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France : Bernard Thibault cherche une sortie de crise

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Un phrasé haché très reconnaissable au point de susciter les caricatures les plus drôles, une dégaine lisse d’un chanteur des années soixante dix, une assurance maîtrisée d’un besogneux contremaître… Voilà comment est apparu le secrétaire général de la CGT Bernard Thibault, tout au long de cette chaude semaine sociale, qui se cherche encore une sortie de crise.
Même si son syndicat a été à la pointe de la contestation de la politique de Nicolas Sarkozy visant à remettre en cause les régimes spéciaux de retraite, il a réussi ce petit tour d’illusion d’apparaître toujours comme l’homme de la composition syndicale et du possible compromis, ne cherchant l’épreuve de force avec le pouvoir que pour mieux asseoir son autorité sur ses terres et d’y imposer les réformes d’un syndicalisme rénové. Au cours de ses nombreuses interventions pendant ce conflit, Bernard Thibault, l’ancien membre du parti communiste qui avait pris la direction de la GCT en 1999, succédant à Louis Viannet, avant de se faire réélire en 2003, a tenu à faire la part des choses entre ce qui relève principalement de la négociation salariale et sociale et ce qui fait partie de la stratégie manœuvrière des partis politiques. Entre défense des intérêts catégoriels et récupération politique, il y a un fossé que Bernard Thibault semble vouloir maintenir le plus large possible.
D’où cette petite musique jouée par la direction de la CGT tout au long de ce conflit qui consiste à solliciter l’appui des partis politiques de gauche pour amplifier les revendications et exercer une pression supplémentaire sur les partenaires de la négociation (Etat, entreprises), sans faire partie intégrante de leurs agendas politiques.
Sur ce terrain particulier, Bernard Thibault a raison de s’inquiéter. Sa propre autorité et sa propre capacité à maîtriser le déroulement de ce conflit sont ouvertement défiées, d’abord par des troupes maisons qui s’entêtent à dépendre de leurs accointances politiques, ensuite par un autre syndicat, «Sud Rail», qui a fait de la radicalité un fonds de commerce mobilisateur. «Sud Rail» est souvent décrit comme subissant l’influence manipulatrice, entre autres, d’un autre fleuron en pleine croissance de l’extrême gauche, la LCR, que dirige le jeune postier aux dents longues, Olivier Besancenot.
 Alors que la négociation finale est lancée, cette concurrence vient de se traduire sur le terrain par des actes de sabotage dans le réseau SNCF visant à la ralentir et à la torpiller. Bernard Thibault avait alerté sur l’ampleur de la situation: «D’aucuns qui voudraient jeter le discrédit sur le mouvement social, les cheminots et les syndicats et faire capoter ces négociations ne s’y prendraient pas autrement (…) Est-ce une provocation, est-ce une manipulation, je n’en sais rien à ce stade, mais on veut nous faire sortir du sujet qui est au cœur de ce conflit qui est l’avenir des retraites».
De nombreux éditorialistes écrivent régulièrement que si la sortie de crise ne dépendait que de Bernard Thibault, cela fait longtemps que le front social se serait apaisé. Lors de la crise du CPE (Contrat premier embauche) qui avait définitivement enterré les espoirs de l’ancien Premier ministre Dominique De Villepin de pouvoir un jour jouer un rôle de premier plan, Bernard Thibault avait montré sa capacité à s’opposer et mobiliser ses troupes pour stopper net ce projet. Avec Nicolas Sarkozy, la relation n’est plus aussi frontale. Les deux hommes, sachant qu’ils n’auront d’autres choix que de «savoir terminer une grève», passent leur temps à se jauger mais ne se sont jamais recroquevillés sur une posture de rupture. Paraphrasant à dessein le leader communiste Maurice Thorez qui, en 1936, lançait : «Il faut savoir terminer une grève lorsque s’ouvre le temps de la discussion », Nicolas Sarkozy ne fait que répondre à un écho lointain qui lui est parvenu de Bernard Thibault, lorsque celui-ci, dans sa démarche d’explication de persuasion, avertit ses troupes du danger qu’il y avait à s’enliser dans un mouvement de contestation long, politisé, isolé et impopulaire.
Malgré leurs divergences structurelles, les deux hommes savent qu’ils sont condamnés à composer et à se montrer politiquement compatible. Un quinquennat est socialement long et le train des réformes, promis par Nicolas Sarkozy, est extrêmement fourni.

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