ACTES DES COLLOQUES INSECTES SOCIAUX

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1 ACTES DES COLLOQUES INSECTES SOCIAUX Edités par l'union Internationale pour l'etude des Insectes Sociaux Section française (sous la direction de Jean-Paul LACHAUD et Vincent FOURCASSIÉ) (d'après E. Hegh, 1922)

2 LEPCO LABORATOIRE D'ETHOLOGIE ET PHARMACOLOGIE DU COMPORTEMENT FACULTE DES SCIENCES ET TECHNIQUES Parc de Grandmont TOURS FRANCE

3 ACTES DES COLLOQUES INSECTES SOCIAUX Edités par l'union Internationale pour l'etude des Insectes Sociaux Section française (sous la direction de Jean-Paul LACHAUD, Vincent FOURCASSIÉ) VOL.11 - COMPTE RENDU COLLOQUE CRÉTEIL 3-5 Septembre 1997 ANNUEL, ISSN - n ISBN - n Dépôt légal : 2 ème trimestre 1998 Composé et tiré à l'université Paul-Sabatier de Toulouse Pour les commandes, s'adresser à : Vincent Fourcassié Laboratoire d'ethologie et Psychologie Animale UMR CNRS 5550 Université Paul-Sabatier 118 Route de Narbonne Toulouse Cedex Prix : 100 Francs

4 Jean-Paul LACHAUD : Laboratoire d'ethologie et Psychologie Animale (LEPA) UMR CNRS 5550 Université Paul-Sabatier 118 Route de Narbonne Toulouse Cedex (France) Tél.: (33) Fax: (33) et El COlegio de la Frontera SUR (ECOSUR) Apdo. Postal 36 Carretera Antiguo Aeropuerto Km Tapachula, Chiapas (Mexique) Tél. : (52) Fax : (52) jlachaud@tap.ecosur.mx Vincent FOURCASSIÉ : Laboratoire d'ethologie et Psychologie Animale (LEPA) UMR CNRS 5550 Université Paul-Sabatier 118 Route de Narbonne Toulouse Cedex (France) Tél. : (33) Fax : (33) fourcass@cict.fr

5 I COLLOQUE INSECTES SOCIAUX CRÉTEIL Septembre 1997 LISTE DES PARTICIPANTS ALBARET Jean-Claude (Colombes, France) ASTRUC Cyril (Gif sur Yvette, France) AZARIZ Criss (Créteil, France) BARZMAN Marco (Villetaneuse, France) BENMOUSSA-HAICHOUR Dalila (Créteil, France) BILLEN Johan (Leuven, Belgique) BORDEREAU Christian (Dijon, France) BOULAY Raphaël (Tours, France) BRUNE Andréas (Konstanz, Allemagne) BRAUMAN Alain (Dakar, Sénégal) BUSTOS Xavier (Lausanne, Suisse) CAMMAERTS Marie-Claire (Bruxelles, Belgique) CAMP AN Eric (Toulouse, France) CERDA Xim (Sevilla, Espagne) CESSELIN Florence (Paris, France) CHERIX Daniel (Lausanne, Suisse) CONNÉTABLE Sophie (Dijon, France) CORBARA Bruno (Clermont-Ferrand, France) DAHBI Abdallah (Villetaneuse, France) DEJEAN Alain (Villetaneuse, France) DELLA SANTA Edouard (Petit-Lancy, Suisse) ERRARD Christine (Tours, France) FÉNÉRON Renée (Villetaneuse, France) FOURCASSIÉ Vincent (Toulouse, France) FREZARD Anne (Tours, France) GARNIER-SILLAM Evelyne (Créteil, France) HAN Sun Heat (Dakar, Sénégal) HARRY Myriam (Créteil, France) HERED1A Ana (Bruxelles, Belgique) JOHNSON Ampah (Créteil, France) JOURDAN Hervé (Toulouse, France) JULIEN Jean-François (Gif sur Yvette, France) KONATE Souleyman (Paris, France) LACHAUD Marc (Créteil, France) LE ROUX Anne-Marie (Tours, France) LE ROUX Guy (Tours, France) LEBRUN Daniel (Nantes, France) LENOIR-LABÉ Fabienne (Créteil, France) LEPAGE Michel (Paris, France) LEPONCE Maurice (Bruxelles, Belgique) MAILLEUX Anne-Catherine (Bruxelles, Belgique) MAMPOUYA David (Créteil, France) MATOUB Mustapha (Créteil, France) MERDACI Kernel (Paris, France) MONNIN Thibaud (Bourg Madame, France) MORA Philippe (Créteil, France) N'GO-BIKOUE Antoine M. (Créteil, France) NOIROT Charles (Dijon, France) NOWBAHARI Elise (Villetaneuse, France) ORJVEL Jerôme (Villetaneuse, France) PHAM-DELEGUE Min-Ha (Bures sur Yvette, France) RETANA Xavier (Barcelona, Espagne) RIVAULT Colette (Rennes, France) ROBERT Alain (Dijon, France) ROISIN Yves (Bruxelles, Belgique) ROJO DE LA PAZ Alain (Le Mans, France) ROULAND Corinne (Créteil, France) RUELLE Jean (Namur, Belgique) SANDOZ Jean-Christophe (Bures sur Yvette, France) SCHATZ Bertrand (Toulouse, France) TINAUT RANERA Alberto (Granada, Espagne) VEEAU Florent (Nantes, France) WEULERSSE Janine (Paris, France) WUEST Jean (Vessy, Suisse)

6 III TABLE DES MATIERES 1. Comparaison des stratégies de récolte chez deux espèces de termites champignonnistes Ancistrotermes cavithorax et Odontotermes sp. par F. Cesselin, S. Konate, K. Merdaci & M. Lepage p Comportement camivore chez les termites : du cannibalisme à la prédation. par A. Sennepin p Flexibilité individuelle et collective du comportement prédateur chez la fourmi Ectatomma ruidum Roger (Hymenoptera, Formicidae, Ponerinae). par B. Schatz, J.-P. Lachaud & G. Beugnon p Etudes en milieu naturel du comportment de cleptobiose chez la fourmi néotropicale Ectatomma ruidum (Hymenoptera, Ponerinae). par P. De Carli, J.-P. Lachaud, G. Beugnon & J.A. Lôpez-Méndez p Influence de l'isolement social chez la fourmi Camponotus fellah (Hymenoptera : Formicidae). par R. Boulay & A. Lenoir p L'attaque des cultures maraîchères par les termites (Isoptera) dans la région de Dakar (Sénégal). par S.H. Han & A.B. Ndiaye p Infestation de différentes castes de termites supérieurs par des nématodes entomopathogènes - Rôle de la composition en lipides. par D. Benmoussa-Haichour, G. Reversât & C. Rouland p Extraction et purification d'adn de termitières, présence d'adn bactérien. par M. Harry, N. Jusseaume, B. Gambier & E. Gamier-Sillam... p Croissance comparée du raygrass d'italie (Lolium italicum) sur matériaux termitiques. par M. Lachaud, E. Garnier-Sillam, P. Louguet & D. Laffray p Etude de la microflore actinomycétale cellulolytique du tube digestif de plusieurs espèces de termites supérieurs africains. par D. Azariz & C. Rouland p Recherche d'enzymes intervenant dans la dégradation de la lignine chez plusieurs espèces de termites à régimes alimentaires différents. par P. Mora, C. Lattaud & C. Rouland p Dégradation des composés phénoliques par des microorganismes symbiontes du termite Pseudacanthotermes spiniger. par A.M. N'Go-Bikoue, A. Brauman & C. Rouland p Spécialisation sexuelle chez la fourmi Pheidole pallidula : un test d'hypothèses. par E. Campan, S. Aron, L. Passera & J.J. Boomsma p. 85

7 IV 14. Contribution à la biologie de Tapinoma melanocephalum (Fabricius) (Hymenoptera : Formicidae) par X. Bustos & D. Cherix p Densité et distribution des nids chez la fourmi Ectatomma ruidum Roger (Hymenoptera ; Formicidae ; Ponerinae). par B. Schatz, J.-P. Lachaud, V. Fourcassié & G. Beugnon p Mise en évidence d'une odeur de souche chez Blatella germanica (L.) dans la dynamique de l'agrégation. par C. Rivault & A. Cloarec p Rôle des vibrations dans la communication d'alarme chez deux espèces de termites champignonnistes : Pseudacanthotermes spiniger et P. militaris. par S. Connétable, A. Robert & C. Bordereau p Implications phylogénétiques du mécanisme de recrutement chez Rossomyrmex minuchae (Hym. Formicidae). par A. Tinaut & F. Ruano p Marquage d'aires chez les fourmis. par M.-C. Cammaerts p Camouflage chimique chez la reine de Polyergus rufescens lors de la fondation. par C. Errard & P. D'Ettorre p Polymorphisme et comportements agonistiques chez les ouvrières Cataglyphis niger (Hym., Formicidae). par E. Nowbahari, R. Fénéron & M.-C. Malherbe p Contribution à l'étude de la coaction chez les fourmis (Hymenoptera, Formicidae). par K. Medjimorec, G. Prudhomme & B. Corbara p Régulation sociale et sociotomie : une étude sur la fourmi ponérine Ectatomma ruidum. par S. Dif, S. Granier, K. Latreille & B. Corbara p Influence de l'expérience sur le comportement de prédation de Myrmica laevinodis Nyl. (Formicidae). par A.-M. Le Roux, G. Le Roux & E. Thibout p. 155 INDEX DES AUTEURS p. 159 INDEX DES MOTS-CLÉS p. 161 KEY WORDS INDEX p. 165 REMERCIEMENTS p. 169

8 V CONTENTS 1. Comparison of the foraging stratégies in two fungus-growing termite species Ancistrotermes cavithorax and Odontotermes sp. by F. Cesselin, S. Konate, K. Merdaci & M. Lepage p Carnivory among termites: from cannibalism to prédation. by A. Sennepin p Individual and collective flexibility of the predatory behavior in the ant Ectatomma ruidum Roger (Hymenoptera, Formicidae, Ponerinae). by B. Schatz, J.-P. Lachaud & G. Beugnon p Field studies of cleptobiotic behavior in the neotropical ant Ectatomma ruidum (Hymenoptera, Ponerinae). by P. De Carli, J.-P. Lachaud, G. Beugnon & J.A. Lôpez-Méndez p Influence of social isolation in the ant Camponotus fellah (Hymenoptera: Formicidae). by R. Boulay & A. Lenoir p Termite (Isoptera) damage of vegetables in the Dakar région and the surrounding area (Sénégal). by S.H. Han & A.B. Ndiaye p Sensitivity of the différent castes of higher termites to an infestation with entomopathogenic nematods - Rôle of the lipids composition. by D. Benmoussa-Haichour, G. Reversât & C. Rouland p Extraction and purification of DNA from termite mounds, presence of bacterial DNA. by M. Harry, N. Jusseaume, B. Gambier & E. Garnier-Sillam p Compared growth of italian ryegrass (Lolium italicum) on termitic material. by M. Lachaud, E. Garnier-Sillam, P. Louguet & D. Laffray p Study of cellulolytics actinomycetes from the gut of several african higher termites. by D. Azariz & C. Rouland p Enzymes involved in lignin dégradation among termites with various feeding habits. by P. Mora, C. Lattaud & C. Rouland p Dégradation of aromatic compounds by the symbiontic microorganisms of the termite Pseudacanthotermes spiniger. by A.M. N'Go-Bikoue, A. Brauman & C. Rouland p Split sex-ratio in the ant Pheidole pallidula: a test of hypothesis. by E. Campan, S. Aron, L. Passera & J.J. Boomsma p. 85

9 VI 14. Contribution to the biology of Tapinoma melanocephalum (Fabricius) (Hymenoptera: Formicidae) by X. Bustos & D. Cherix p Spatial density and distribution of the nests in the ant Ectatomma ruidum Roger (Hymenoptera; Formicidae; Ponerinae). by B. Schatz, J.-P. Lachaud, V. Fourcassié & G. Beugnon p Rôle of strain odour in aggregation dynamics in Blatella germanica (L.). by C. Rivault & A. Cloarec p Rôle of head-banging in alarm communication in two fungus-growing termites: Pseudacanthotermes spiniger and P. militaris. by S. Connétable, A. Robert & C. Bordereau p Phylogenetic implications of the recruitment mechanism of Rossomyrmex minuchae (Hym. Formicidae). by A. Tinaut & F. Ruano p Area marking in ants. by M.-C. Cammaerts p Chemical disguise by the queen of the slave-making ant Polyergus rufescens during colony foundation. by C. Errard & P. D'Ettorre p Polymorphism and agonistic behaviors in Cataglyphis niger workers (Hym., Formicidae). by E. Nowbahari, R. Fénéron & M.-C. Malherbe p A contribution to the study of coaction in ants (Hymenoptera, Formicidae). by K. Medjimorec, G. Prudhomme & B. Corbara p Social régulation and sociotomy: Study on the ponerine ant Ectatomma ruidum. by S. Dif, S. Granier, K. Latreille & B. Corbara p Effect of experience on predatory behaviour in Myrmica laevinodis Nyl. (Formicidae). by A.-M. Le Roux, G. Le Roux & E. Thibout p. 155 INDEX TO AUTHORS p. 159 INDEX DES MOTS-CLÉS p. 161 KEY WORDS INDEX p. 165 ACKNOWLEDGMENTS p. 169

10 53 Actes Coll. Insectes Sociaux, 11: 1-60 (1998) COMPARAISON DES STRATEGIES DE RECOLTE CHEZ DEUX ESPECES DE TERMITES CHAMPIGNONNISTES, ANCISTROTERMES CA VITHORAX ET ODONTOTERMES sp. Florence CESSELIN, Souleymane KONATE, Kamel MERDACI, & Michel LEPAGE. Laboratoire d'ecologie, E.N.S., 46 rue d'xjlm, Paris Cedex 05 Résumé. Nous comparons au laboratoire les stratégies de récolte de deux espèces de Macrotermitinae, Ancistrotermes cavithorax et Odontotermes sp. en utilisant des appâts constitués de deux espèces de ligneux de savane: Crossopterix febrifuga et Piliostigma thonningii. En conditions naturelles, il a été suggéré l'existence d'une exclusion compétitive entre les deux espèces sympatriques de termites. Les résultats obtenus montrent chez les deux espèces une même préférence alimentaire pour Crossopterix, alors que dans la savane, Odontotermes consomme préférentiellement Piliostigma. On confirme donc l'hypothèse d'une exclusion compétitive sur le terrain. On montre également que Ancistrotermes cavithorax construit des galeries plus argileuses et investit dans une récolte plus directement orientée vers sa nourriture préférentielle, tandis que Odontotermes sp. effectue des constructions plus limoneuses et une prospection du milieu plus importante parallèlement à sa récolte proprement dite. L'observation des castes a permis de préciser une participation différente des petits et des grands ouvriers aux différentes phases de la récolte. Mots-clés. Termites, préférence alimentaire, stratégies de récolte, compétition. Abstract. Comparison of the foraging stratégies in two fungus-growing termite species, Ancistrotermes cavithorax and Odontotermes sp. We compared the food preferences and foraging stratégies of two sympatric fungus-growing termite species from a preforest savannah in Côte d'ivoire: Ancistrotermes cavithorax and Odontotermes sp. Controlled food experiments in the laboratory on incipient colonies with two dominant tree species: Crossopterix febrifuga and Piliostigma thonningii allowed to better understand the observations previously made in the field, which seemed to demonstrate compétitive exclusion between the two termite species. We compared the food preferences and foraging stratégies. According to the results obtained, the two species exhibitea the same food preference towards Crossopterix, whereas in the field, Odontotermes fed preferably on Piliostigma. We hypothetized that Ancistrotermes could exclude Odontotermes from its prefered food in the natural savannah. We also showed that Ancistrotermes cavithorax utilized more clay particles in its galleries and invested more in foraging towards the food, whereas Odontotermes built more silty galleries and invested relatively more in prospection than in foraging. The observation of the outgoing workers showed différences in the proportions of major versus minor workers in the foraging phases. Key words. Termites, food preferences, foraging stratégies, compétition.

11 2 INTRODUCTION La sous famille des Macrotermitinae (ou termites champignonnistes) est représentée par 4 espèces dans la savane de Lamto (Côte d'ivoire): Ancistrotermes cavithorax (Sjôstedt, 1899), Odontotermes sp., Microtermes toumodiensis (Grassé, 1937) et Pseudacanthotermes militaris (Hagen, 1858). Sur un total de litière végétale disponible sur le sol de 2 à 8 t/ha/an (César, 1971), les termites incorporeraient dans leurs termitières environ 1,3 t/ha/an (Josens, 1972). Le régime alimentaire des espèces champignonnistes de Lamto est à base de litière (Josens, 1972). Mais on sait peu de choses des préférences alimentaires différentes des espèces (Lepage et al., 1993). Des expériences sur le terrain, avec des appâts, avaient suggéré qu Ancistrotermes pouvait exclure Odontotermes de certaines sources de nourriture (Garcia, 1996). Mais il reste difficile de déterminer précisément en conditions naturelles la part relative de la compétition et de la préférence alimentaire. C'est pourquoi nous avons entrepris des expériences en conditions contrôlées, avec des colonies elevées au laboratoire, afin de préciser les stratégies mises en oeuvre dans la récolte de nourriture et les conditions de la coexistence entre les deux espèces. MATERIEL ET METHODES Le Milieu. La réserve de Lamto est située en zone préforestière guinéenne d'afrique de l'ouest, dans la zone bioclimatique guinéenne (5 02'W.6 13 N) (Menaut et César, 1979). Le climat est de type équatorial de transition (Bonvallot, 1968), avec une température moyenne annuelle de 29 C et un total de 1200 mm de précipitations reparties en quatre saisons au cours de l'année. Les grands faciès principaux de la savane sont la forêt galerie, la savane à Loudetia et la savane à Aiidropogonées. Plus de 90% des ligneux appartiennent aux espèces Bridelia ferrugina, Crossopterix febrifuga, Cussonia barteri et Piliostigma thonningii (Menaut, 1971). Les espèces de termites. Les espèces étudiées, Ancistrotermes cavithorax et Odontotermes sp., appartiennent à la sous-famille des Macrotermitinae. Tous les membres de cette sousfamille récoltent des matériaux cellulosiques pour construire leurs meules, qui sont le support du développement du champignon symbiotique Termitomyces. Leurs nids sont hypogés et formés de petites unités, les chambres à meules, reliées entre-elles par un réseau de galeries. Les ouvriers établissent des zones de récolte temporaires à la surface du sol, protégées par des galeries ou des placages de terre. Ancistrotermes cavithorax édifie son nid dans la savane, indépendamment des nids des autres espèces (selon Josens, 1972). L'espèce semble préférer de la litière d'origine arbustive. Lepage et al. (1993) ont montré qu'elle conservait une part relativement importante de matériel d'origine ligneuse dans son régime, même en savane herbeuse. Odontotermes sp. est l'espèce à!odontotermes la plus commune de Lamto et on la trouve à la fois en savane et en forêt galerie (Josens, 1972), mais la révision systématique du genre reste à faire. Elle se nourrit de litière essentiellement d'origine graminéenne qu'elle récolte à l'abri de placages de terre. Ses nids sont très condenses et répartis préférentiellement dans les buttes termitiques qui parsèment la savane. Les colonies étudiées et le dispositif expérimental. Les observations sont effectuées sur quatre colonies d'ancistrotermes cavithorax et à!odontotermes sp., âgées de deux ans, fondées à partir d'imagos capturés sur le terrain. Ces colonies sont gardées dans des conditions d'élevage optimales : température constante de 28 C et humidité saturante. Pour perturber le moins possible les colonies nous n'avons pas compté tous les individus, et seuls les rois, les reines et les meules ont été prélevés et pesés au début de l'expérience. Il est possible d'avoir une estimation de la population des colonies observées, car nous connaissons le nombre d'individus et leur répartition pour une moyenne de dix colonies du même âge et de la même origine:

12 3 Pour Odontotermes. 25% G.O.) (n=10), population total = 328 ± 65 individus (dont 18.3% po v f. Pour Ancistrotermes % G.O.) (n=10), population total = 2173 ± 70 individus (dont 41.4% p.o.et v f (Avec p.o.: petits ouvriers; G.O.: grands ouvriers) Le dispositif expérimental comprend le nid et la zone trophique, constitués de deux boîtes reliées entre-elles par un tube plastique. Les observations ont concerné le choix alimentaire et l'analyse des constructions associées des huit colonies. Dans cette expérience, 4 séries d'observations d'une durée de 10 jours chaqu'une sont éffectuées. Pour les observations des castes en récolte, une seule colonie de chaque espèce a été observée durant 5 jours. La nourriture. La nourriture est constituée de galettes de 4 cm de diamètre et de 3 mm de hauteur, avec des feuilles de Piliostigma thonningii (Césalpiniacées) et de Crossopterix febrifuga (Rubiaciées), broyées en fines particules de 0,2 mm et mélangées à un liant composé d'une solution d'amidon à 1 g/1 (30 g de feuilles pour 72,5 ml de solution d'amidon). Les galettes sont séchées à l'étuve à 65 C pendant 48h et pesées. L'utilisation de l'amidon comme liant a été indispensable à la réalisation des galettes standardisées. Des expériences éffectuées par ailleurs sur des aliments entiers (feuilles naturelles sèches), confirment les préférences alimentaires obtenues (Konate & Lepage, com. pers.). Il semblerait donc que l'amidon ne modifie pas le comportement alimentaire des Termites. Une galette de chaque végétal est disposée dans la zone trophique à équidistance de l'ouverture du tube, avec une alternance de la position des galettes d'une série à l'autre. Paramètres mesurés. La consommation des galettes est fonction de leur variation de poids: à la fin de chacune des séries, les galettes sont prélevées, mises à l'étuve à 65 C pendant 24h et pesées. On calcule la perte de poids. Les placages présents sur chaque galette sont prélèvés à la pince et séchés dans une étuve à 65 C puis pesés. L'analyse du reseau de galeries construites a été fait au cours du temps par la prise de photographies à intervalles et en reportant le réseau sur un calque à l'écnelle. Nous avons également déterminé la texture du sol témoin ainsi que celle des placages sur chaque galette. La méthode utilisée suit le protocole décrit par Feller et al. Une colonie de chaque espèce a été observée de manière continue pendant les 12 premières heures de la récolté, et pendant les 12 dernières heures (septième jour) à l'aide d'une caméra vidéo, ce qui permet ensuite de dénombrer les ouvriers intervenant dans les différentes phases de la récolté: prospection, construction, récolte de nourriture. RESULTATS Choix alimentaire. Pour Odontotermes, on note (Fig. 1) une corrélation positive très significative (P<0,005) entre le poids de la meule et la perte de poids des galettes de Crossopterix (r =0,98 y = 0,0134x+0,0326). Par contre, la corrélation est négative mais non significative (P>0,15) pour les galettes de Piliostigma. Il semble donc qu 'Odontotermes sp. manifeste une préférence alimentaire pour Crossopterix, et que cette préférence est d'autant plus nette que la population de la colonie est nombreuse, ce que traduit le poids de sa meule à champignons.

13 t Perte de poids (g) 0.14 j Crossopterix a Piliostigma Poids de la meule (g) Figure 1: Colonies d'odontotermes: perte de poids des galettes de Crossopterix et de Piliostigma en fonction du poids de la meule (résultats en g). Figure 1: Odontotermes colonies: loss in the weight of Crossopterix and Piliostigma baits as related to the fungus-comb weight (results in g). Pour Ancistrotermes (Fig. 2), on note également une corrélation positive et significative entre le poids de la meule dans les colonies et les pertes de poids des galettes de Crossopterix (P = 0,01) (r = 0,97, y = 0,0563x - 0,192). La corrélation entre le poids de la meule et la perte de poids des galettes de Piliostigma, bien que positive, n'est pas significative (P>0,05). Nous pouvons donc conclure également à une préférence nette à'ancistrotermes pour Crossopterix et à une augmentation de cette préférence en fonction de la taille de la colonie (poids de la meule à champignons). Variation de poids des jettes (g) Crossopterix û Piliostigma Poids de la meule (g) Figure 2: Colonies d'ancistrotermes: perte de poids des galettes de Crossopterix et de Piliostigma en fonction du poids de la meule (résultats en g). Figure 2: Ancistrotermes colonies: loss in the weight of Crossopterix and Piliostigma baits as related to the fungus-comb weight (results in g). Analyse des placages et des galeries. Nous avons observé et pris en compte plusieurs types de placages: placage sur la galette, autour de la galette et sous la galette. Poids des placages.

14 5 En ce qui concerne Odontotermes sp., nous observons une concordance entre la consommation des galettes et la construction de placages car aucune consommation n'a eu lieu sans construction au préalable de placages. Par contre nous n'avons pas mis en évidence de variation significative des poids de placages selon le type de nourriture (P>0,1). Les Odontotermes sp. remanient donc une quantité de sol qui est indépendante du type de nourriture. En effet, le coefficient de ccyrelation entre le jîoids de placages et la variation de poids des galettes de Crossopterix r a une valeur de 0,23 et une valeur de 0,16 pour les galettes de Piliostigma. La préférence alimentaire pour Crossopterix n'induit donc pas un effort de construction plus important. De plus nous ne mettons pas en évidence de corrélation significative (P>0,05) entre la variation de poids de placages et le poids de la meule. En ce qui concerne Ancistrotermes, le coefficient de corrélation entre la masse de placages et la variation de poids des galettes de Crossopterix r a une valeur de 0,5 qui est hautement significative (P = 0,005). En revanche, cette corrélation n'est pas significative (P = 0,2) pour Piliostigma. Ancistrotermes cavithorax module donc son activité de construction selon sa préférence alimentaire. Granulométrie des placages. La comparaison des textures des placages à'odontotermes par rapport à celle du sol témoin (Tableau 1) permet de constater que leur pourcentage en argiles est plus faible que celui du sol témoin. Cette diminution est compensée par une augmentation du pourcentage de limons fins (sol témoin: 24,5%, placage sur Crossopterix : 36,7 % et placage sur Piliostigma : 35,2%). S.G S.F S. Très F L.G L.F A Sol témoin 34,15 17, ,00 24,47 9,21 Odontotermes Placage sur Piliostïsma , ,90 35, Placage sur Crossopterix , , S.G : sable grossier; S.F : sable fin; S. Très F : sable très fin; L. G : limon grossier; L F : limon fin; A : argile. Tableau 1. Odontotermes: texture du sol témoin et des placages sur galettes de Piliostigma et de Crossopterix (%) Table 1. Odontotermes : texture of the control soil and sheetings on Crossopterix and Piliostisma baits (%) Pour l'espèce Ancistrotermes cavithorax, la proportion d'argiles des placages sur Piliostigma (5,8%) est inférieure à celle du sol témoin (9,2%), alors que la proportion d'argiles des placages sur Crossopterix y est environ deux fois supérieure (17,2%) (Tableau 2). Il semble donc que Ancistrotermes opère une très nette sélection des particules argileuses pour construire ses placages sur Crossopterix. La préférence alimentaire influerait clonc sur la granulométrie des placages construits. f S.G S.F S. Très F L.G L.F A Sol témoin 34,15 17,07 8,10 7,00 24,47 9,21 Ancistrotermes Placage sur Piliostigma 33,80 16,30 2,60 9,00 32,40 5,80 Placage sur Crossopterix 31,80 18,20 1,30 9,40 22,10 17,20 S.G : sable grossier; S.F : sable fin; S. Très F : sable très fin; L. G : limon grossier; L F : limon fin; A : argile. Tableau 2. Ancistrotermes cavithorax: texture du sol témoin et des placages des alettes sur Piliostigma et Crossopterix (%) 'able 2. Ancistrotermes cavithorax: texture of the control soil and sheetings on Crossopterix and Piliostisma baits (%)

15 6 Construction des galeries. L'analyse du réseau de galeries a permis d'identifier des galeries de prospection, situées en bordure de la zone trophique, non orientées vers les galettes-appâts et des galeries de récolte, orientées vers la nourriture. Dans le cas des colonies à'odontotermes, l'activité de construction des deux premiers jours est consacrée à l'édification de galeries de prospection. Les galeries de récolte, en direction des deux galettes d'abord, puis préférentiellement en direction de la galette de Crossopterix, apparaissent seulement vers le 4 e jour d'expérience. Ensuite, au cours du temps, l'activité sur galeries de prospection reste toujours supérieure à celle constatée sur galeries de récolte. En revanche, pour les colonies d'ancistrotermes, il n'y a pas de phase préliminaire de prospection: l'activité d'édification de galeries de récolte commence dès le premier jour de la mise en expérience. En fonction du temps, cette activité de récolte reste toujours supérieure à l'activité de prospection. De plus, l'activité de construction de galeries vers Crossopterix reste nettement supérieure à celle constatée vers Piliostigma. Comportement des castes lors de la récolte Phase de prospection et de construction des galeries. La figure 3 présente, pour la colome à'ancistrotermes, environ deux heures après le début de l'expérimentation, les fréquences de passage des grands et des petits ouvriers pendant une période de 10 mn. Seuls les petits ouvriers sont majoritairement concernés par cette activité. Par contre les grands ouvriers n'interviennent pas dans cette phase car la courbe de leur fréquence de passage est quasiment nulle. Norrfcre d'individus Petits ouvriers Grands ouvriers Temps (minutes) Figure 3. Ancistrotermes: fréquences de passage des petits et grands ouvriers durant la phase de prospection et de construction. Figure 3. Ancistrotermes: comparative numbers of major and minor workers during the prospection and building phase. Phase de récolte. La figure 4 montre les fréquences de passage dans la colonie à'ancistrotermes, environ 15h après la mise en place du dispositif. Ces courbes montrent une participation nette des grands ouvriers à la récolte vers Crossopterix. Toutefois, le nombre de petits ouvriers, bien que plus faible que lors de la phase de construction, reste supérieur à celui des grands ouvriers.

16 7 25 t Nombre 20 - d'individs Petits ouvriers Grands ouvriers 15 Jk Temps (minutes) Figure 4. Ancistrotermes: fréquences cumulées de passage des petits et des grands ouvriers durant la phase de récolte. Figure 4. Ancistrotermes: comparative numbers of major and minor workers during the foraging phase. En ce qui concerne Odontotermes, les résultats sont sensiblement différents: les grands ouvriers participent très peu aussi bien à la phase de construction (comme dans le cas d'ancistrotermes), mais aussi à la phase de récolte. Toutefois, la colonie étudiée en fin d'expérience était en mauvais état (population très faible). C'est pourquoi d'autres expériences seraient nécessaires pour confirmer ou infirmer ces différences de comportement. DISCUSSION Les mesures effectuées montrent une préférence nette des deux espèces de termites pour Crossopterix. Cette préférence est d'autant plus marquée que les colonies ont une population assez abondante (révélée par le poids de leurs meules à champignons). Garcia (1996), à partir d'observations réalisées en conditions naturelles sur différents appâts, avait montré également une préférence A'Ancistrotermes pour Crossopterix (22,1% des observations), par rapport à Piliostigma (19,3 %). En revanche, sur le terrain, Odontotermes est vu en récolté plus volontiers sur Piliostigma (23,1 %) que sur Crossopterix (15,4 %).(significatif pour <x<5%). Cette différence dans les préférences alimentaires, au laboratoire et sur le terrain, pourrait s'expliquer selon le principe d'exclusion compétitive (Begon et al., 1990). L'espèce Ancistrotermes, plus agressive, pourrait déplacer Odontotermes des aliments préférés. En ce qui concerne l'estimation de l'effort de récolte, nos résultats montrent que Ancistrotermes cavithorax investit plus en matériaux argileux qu'odontotermes, pour laquelle l'enrichissement se fait plutôt en faveur des limons. Pour cette dernière espèce, nous constatons une relation entre l'activité de récolte et le poids de placages, mais cette relation n'est pas fonction de la préférence alimentaire, alors qu'ancistrotermes investit nettement en fonction de sa préférence alimentaire. Grassé (1986) avait montré que la récolte se fait généralement à l'abri des placages chez les termites et que cette activité de construction qui occasionne une dépense énergétique supplémentaire assure cependant une relative protection des individus récoltants. Il reste à mesurer quantitativement ces dépenses énergétiques chez les deux espèces étudiées. L'observation directe des individus récoltants a permis de distinguer les différents types de galeries et leur évolution au cours du temps, et de déterminer les fréquences ae passage des castes récoltantes. Nos résultats permettent de distinguer des galeries de prospection et des galeries de récolte construites différemment dans le temps en fonction des espèces de termites. Dans le cas à'odontotermes, une part importante de l'investissement reste consacrée à la prospection souterraine (galeries) du milieu. Pour Ancistrotermes, l'investissement en constructions est très rapidement dirigé vers la nourriture consommée. Dans le cas à'ancistrotermes, pour laquelle les résultats obtenus sont

17 8 fiables, la prospection est réalisée uniquement par les petits ouvriers alors que la récolte de la nourriture semble être menée par les deux castes d'ouvriers. Des observations similaires ont été faites chez Macrotermes bellicosus (Badertscher & Leuthold, 1988), et de manière générale chez la plupart des Macrotermitinae où l'activité de construction est attribuée aux petits ouvriers et la récolte aux deux castes d'ouvriers (Grassé, 1986). L'ensemble de nos résultats semble donc suggérer des différences de stratégies de récolte chez les deux espèces étudiées : Ancistrotermes fournirait moins d'énergie avec une récolte bien ciblee, mais investirait plus dans la construction de placages. Odontermes, en revanche, investirait dans des placages limoneux mais fournirait un effort accru de prospection. Cette différence pourrait constituer un élément d'explication du succès (présence dans tous les faciès végétaux) de ces deux espèces dans r écosystème de la savane de Lamto et de leurs modèles de distributions spatiales différents : Ancistrotermes étant plus ubiquiste et Odontotermes étant plus cantonné à des biotopes particuliers. Des expérimentations ultérieures de quantification des énergies mises en jeux pourraient nous permettre de mieux définir le bilan énergétique résultant de ces différentes stratégies de récolte. REFERENCES Badertscher, S. & Leuthold R.H., Polyethism in Macrotermes bellicosus (Isoptera). Ins. Soc. 35: Begon, M., Harpere, J.L., & Townsend, C.R., Ecology. Individuals, populations and communities. Blackwell Scientifïc Publications, Boston, 945 pp. Bonvallot, J., Etude du régime hydrique de quelques sols de Lamto. Mémoire Orstom, Adiopodoumé, 51 pp. César, J., Etude quantitative de la strate herbacée de la savane de Lamto (moyenne Côte d'ivoire). Thèse de Doctorat 3 e cycle. 95 pp. Feller, C., Burtin, G., Gérard, B., & Balesdent, J., Utilisation des résines sodiques et des ultrasons dans le fractionnement granulométrique de la matière organique des sols. Intérêts et limites. Science du Sol 29: Garcia, C., Les termites champignonnistes de Lamto : structure du peuplement et compétition interspécifique. DEA d'ecologie, Université Paris 6. Grassé, P.-P. & Noirot, C., Sur le nia et la biologie de Sphaerotermes sphaerothorax (Sjôstedt), termite constructeur des meules sans champignons. Ann. Sci. Nat., Zool. 10: Grassé, P.-P., Recherches sur la systématique et la biologie des termites de l'afrique Occidentale Française. Première partie, Protermitidae, Mesotermitidae, Metatermitidae (Termitinae). Ann. Soc. Entom. France, 106: Grassé, P.-P., Sur la véritable nature et le rôle des meules à champignons construites par les termites Macrotermitinae (Isoptera, Termitidae). C.R. Acad. Sci., 287 (D): Grassé, P.-P., Termitologia. III. Comportement, socialité, écologie, évolution, systématique. Masson, Paris, 715 pp. Josens, G., Etudes biologique et écologique des termites (Isoptera) de la savane de Lamto-Pakobo (Côte d Ivoirej. Thèse d Etat, Université de Bruxelles, 262 pp. Lepage, M., Abbadie, L. & Mariotti, A., Food habits of sympatric termite species (Isoptera: Macrotermitinae) as determined by stable carbon isotope analysis in a Guinean savanna (Lamto, Côte d'ivoire). J. Trop. Ecol., 9: Menaut, J.-C., Etude de quelques peuplements ligneux d'une savane guinéenne de Côte d'ivoire. Thèse 3e cycle, Fac. Sci. Paris, 153 pp. Menaut, J. C. & César, J., Structure and primary productivity of Lamto savannas, Ivory Coast. Ecology 60,

18 Actes Coll. Insectes Sociaux, 11: 9-17 (1998) COMPORTEMENT CARNIVORE CHEZ LES TERMITES : DU CANNIBALISME A LA PREDATION. Alain SENNEPIN Rathier, Saint Priest La Prugne sennepin@nat.fr (France) Résumé: La consommation d'animaux par les termites semble relever d'au moins quatre phénomènes distincts: le cannibalisme, la nécrophagie. la compétition et la prédation.le cannibalisme sensu lato intervient très fréquemment dans les colonies d'isoptères. Il permet un supplément azoté régulier au régime alimentaire de ces insectes. Il concerne toutes les castes, comme consommatrices et comme victimes, ainsi que les oeufs, et les arthropodes les plus étroitement associés h la colonie. Certains termites peuvent se nourrir d'animaux morts, principalement de vertébrés.dans certains cas. ce comportement peut s'exprimer aussi à l'égard de carcasses de congénères et de fourmis notamment. Cette attitude paraît occasionnelle chez certaines espèces, régulière chez d'autres.l'ultime étape d'interactions de nature compétitive entraîne la consommation du compétiteur après un conflit autour d'un site de nidification, d'une source de nourriture ou d'un territoire de fourragement.ce phénomène semble relativement fréquent, et pourrait parfois prendre des proportions importantes, aux conséquences significatives sur l'écologie des populations d'arthropodes dans de vastes zones.occasionnellement, certains isoptères tuent et consomment d'autres arthropodes qui ne sont ni leurs associés ni des compétiteurs. Les termites expriment, dans ces cas. un comportement de prédateurs.peu d'espèces de termites sont actuellement répertoriées comme utilisant la gamme complète des mécanismes comportementaux correspondant à une consommation carnée.ceci étant, tous les isoptères peuvent exprimer l'un ou l'autre phénomène, ponctuellement ou régulièrement, en fonction de conditions écologiques particulières. Mots-clés: Isoptera. cannibalisme, nécrophagie. compétition, prédation, arthropodes. Summary: Carnivory among termites: from cannibalism to prédation Conceming animal consumption by termites, at least four différent phenomena seem to be implicated: cannibalism. necrophagv. compétition and prédation. Sensu lato cannibalism frequently occurs in isopteran colonies. It brings a regular nitrogen supplément to the diet of these insects.every caste is concerned. as consumer or victim, as well as eggs. and intimately associated arthropods.some termites can scavenge animal corpses. firstly vertebrates.in other cases, this behaviour seerns also occur towards arthropod carcasses, chiefly those of congeners and ants. both in punctual or regular way. according to the concemed termite species.the conclusion of compétitive interactions involves consumption of insect competitors after a nesting or foraging site conflict. This phenomenon seems to frequently occur. and sometimes could take dimensions of ecosystemic importance for arthropod fauna in large areas.occasionally, some isoptera kill and eat other arthropods which are not associâtes nor competitors. In this case, termites have a predaceous behaviour. Only a small number of termite species are recorded. at the present time. to cover the whole spectrum of carnivory mechanisms. in any way, every termite species can be

19 10 involved in one behavioural phenomenon or the other, punctually or regularly, depending to ecological context. Key-words: Isoptera. cannibalism, necrophagy, compétition, prédation, arthropods. INTRODUCTION Les termites trouvent ordinairement les éléments azotés dont ils ont besoin sans faire appel à une consommation carnée : certains fixent l'azote grâce à des bactéries symbiotiques spécialement dévolues à cette tâche, d'autres se le procurent par un comportement trophique mycophage. coprophage. ou, comme c'est le cas chez plus des deux-tiers des genres de Termitidae. soit plus d'une espèce de termite sur deux, humivore et géophage (Hunt and Nalepa. 1994).Ces derniers consomment régulièrement des fragments de cuticules d'arthropodes divers, qui sont des composants ordinaires du sol. sans que cela implique un comportement Carnivore au sens strict (Sleaford and al. 1994). Chez les termites "inférieurs", dont les protozoaires symbiontes peuvent représenter jusqu'au tiers de la niasse totale d'un individu, la digestion saisonnière de ces animalcules par le termite représente aussi un apport azoté substantiel (Grassé 1982).I1 est également possible que des termites humivores et géophages ingèrent des rotifères. des tardigrades ou des acariens (Coineau. com. pers. 1993). tout comme d'autres termites peuvent le faire avec des microinvertébrés des graminées, du bois, des lichens ou des algues.l' utilisation d'autres sources de nourriture d'origine animale par les termites est ici l'objet d'une courte étude synthétique, où l'accent a été mis délibérément sur les questions les moins étudiées jusqu' à présent.au moins quatre phénomènes semblent s'exprimer à travers ces comportements trophiques particuliers: le cannibalisme, la nécrophagie, la compétition et la prédation.les deux premiers sont habituellement compris dans leur sens le plus restrictif, qui concerne uniquement la dévoration de congénères, vivants ou morts. Ils sont ici redéfinis dans une acception plus large.il en va de même pour la compétition débouchant sur la consommation de l'antagoniste, mentionnée jusqu alors dans des études concernant uniquement, comme victimes, des termites de colonies ou d'espèces différentes de celle du consommateur.la prédation chez les termites n'a fait l'objet, jusqu'alors, que d'une très brève évocation (Sennepin 1996).Le présent travail tend aussi à mettre en lumière les groupes d'isoptères adoptant volontiers un spectre comportemental large dans leur consommation carnée. MATERIEL ET METHODES Travail de synthèse effectué à partir de la consultation de la littérature scientifique et d'une correspondance avec les auteurs. RESULTATS 1. CANNIBALISME. Dans l'état actuel de nos connaissances sur le comportement social des isoptères. il est très probable que toutes les espèces de termites pratiquent la consommation plus ou moins régulière de congénères blessés (cannibalisme sensu stricto ). Ce comportement concerne toutes les castes, tous les stades de développement,

20 11 oeufs compris (Grasse Hunt et Nalepa 1994). suivant le niveau de maturité de la colonie et le contexte écologique.les mentions du cannibalisme sont véritablement innombrables dans les études sur ces insectes.aucune d'entre elles n'évoque, toutefois, un fait biologique inévitable et probablement assez fréquent au sein des nids: l'extension de ce phénomène aux arthropodes en association intime avec les constructeurs du nid. tels que des coléoptères temiitophiles. par exemple, qui. considérés comme des congénères par les termites, sont traités comme tels, y compris par un cannibalisme occasionnel, particulièrement en période de disette, où les contacts trophallactiques sont plus fréquents, moins maitrisés, et débouchent sur un plus grand nombre de blessures accidentelles.le cannibalisme sensu lato réunit donc le cannibalisme sensu s/rif to.l'oophagie et la consommation occasionnelle des organismes associés s'étant approprié la signature chimique de la termitière. Le cannibalisme s. /. est aussi répandu et régulier que le cannibalisme s.s. 2.NECROPHAGIE. Au même titre que le cannibalisme, la nécrophagie à l'égard des congénères morts concerne probablement tous les isoptères.elle est à la fois fréquente et occasionnelle: ordinairement, elle n'a pas de caractère régulier et organisée (Dhanarajan 1978). Ce comportement s'étend parfois à la consommation de cadavres de vertébrés d'une part, à une consommation programmée des corps de congénères ou de fourmis vivant dans le même nid. d'autre part.concernant la consommation de vertébrés, les faits suivants peuvent être relevés: des Psammotermes sp. sont trouvés par Lepage (1974) dans une carcasse de perruche, au Sénégal.des isoptères non identifiés sont reportés dans des cadavres humains frais (Smith 1987), tout comme dans des os et des bottes crâniennes (Derry 191 l),des Nasutitermes carnan'onensis sont découverts dans une situation homologue (Wylie and al ),des Nasutitermes nigriceps vidangent les carcasses de plusieurs animaux, où ils sont les seuls acteurs, à l'exception de quelques individus fourmis : un boa de trois mètres de long, une tortue, un paresseux aï et un agouti (Thome and Kimsey 1983).Dans le cadre de la consommation de congénères ou de fourmis.deux espèces d'amitermes..4. laurensis et A.meridianus, font sécher les corps de leurs congénères dans les zones supérieures du nid, puis les réduisent ensuite en petits morceaux, avec lesquels, selon Mjoberg (1920), ils nourrissent leurs larves (ces cadavres sont découverts dans plusieurs centaines de nids).si l'interprétation de Mjoberg correspond bien à la réalité, il s'agit là d'une normalisation de la nécrophagie (Grassé 1982). Par ailleurs. Amitermes laurensis est très fréquemment associé à de nombreuses fourmis. Certaines d'entre elles sont à la fois très pacifiques, et leur présence coïncide avec une grande vigueur de la colonie de termites. Il s'agit notamment de Paratrechina braueri. Tapinoma minutum et Iridomyrmex glaber (Holt and Greenslade 1979) ainsi que Brachvponera hitea (Higashi and Ito 1989). Dans le dernier cas, les auteurs calculent que la colonie des Amitermes est plus souvent en pleine santé en présence de la fourmi que lorsque les isoptères sont seuls dans leur nid. Il est possible, par conséquent, que les espèces de fourmis qui viennent d'être citées, apportent un complément en éléments azotés aux constructeurs du nid.des Reticulitermes speratus pratiquent la nécrophagie de leurs congénères après avoir stockés les cadavres de ceux-ci (Iwata and al. 1992). Certains "termites proches du genre Nasutitermes : Twnulitermes pastinator et Trinervitermes bettoniamts ( Dhanarajan 1978). agissent comme les Amitermes précédemment cités (Mjoberg 1920). Des Twnulitermes sont aussi, parfois, associés à des fourmis avec qui ils entretiennent des relations de grande intimité (cas d'une Cyrtostigmacros, dans Wheeler 1936).Pour leur part. lestrinen'itermes sont fréquemment associés aux monticules de fourmis (San José and al. 1989).Par ailleurs.des Nasutitermes corniger consomment les carcasses de fourmis Monacis bispinosa présentes dans la même structure (Jaffe and al. 1995).Cette espèce d'isoptère connaissant des variations considérables d'un mois sur l'autre dans son taux de fixation d'azote (Grassé 1982), il est vraisemblable que la nécessité d'un supplément protéique saisonnier significatif l'amène à rechercher les associations avec des fourmis habituées à

21 12 rejeter les corps de leurs congénères dans des chambres ou des galeries particulières, que les termites vont ensuite vidanger (Jaffe and al. 1995).Les Nasutitermes. dans certaines régions du Venezuela, sont quasi systématiquement en relation avec les nids des fourmis champignonnistes des genres Atta et Acromyrmex (San José and al. 1989).Certains entretiennent clairement des rapports extrêmement étroits avec les constructrices (Swarz. communications personnelles 1993&1996).Les mêmes associations existent, dans les mêmes zones, avec une fréquence comparable, entre les fourmis champignonnistes et des termites d'un genre très voisin taxonomiquement des Nasutitermes. les Velocitermes. De plus, ceux-ci ont un taux de fixation de l'azote 20 fois plus faible que celui des Nasutitermes (Bentley 1987), ce qui amplifie encore, en ce qui concerne ces derniers, la crédibilité de comportements nécrophages réguliers à l'endroit des carcasses des fourmis auxquelles ils s'associent. 3.COMPETITION. Les colonies d'isoptères s'affrontent pour conquérir des zones de fourragement et des sites de nidification. Au sein d'une même espèce, les sociétés matures tendent à éradiquer les colonies nouvellement fondées et à dévorer les victimes (Thorne and Haverty 1991). Ce phénomène peut être considéré comme quasiment systématique en ce qui concerne la compétition intraspécifique. voire intragénérique (sauf exception).la même situation se reproduit fréquemment entre espèces écologiquement sympatriques et taxonomiquement différentes: des Kalotermes flavicollis peuvent être exterminés et dévorés par des Reticulitermes lucijugus (Springhetti et Amorelli 1982a. Thorne and Haverty 1991).Levings (com. pers. 1995) constate les mêmes faits concernant des Nasutitermes corniger à rencontre d'autres Nasutitermes et de Termes panamaensis. Par ailleurs.termites et fourmis entrent presque continûment en compétition plus ou moins affirmée pour les sites de nidification : ce type d'interaction est très nettement plus fréquent que la prédation des isoptères par les hyménoptères (Sennepin 1996) et les fourmis sont loin d'avoir toujours l'initiative en pareil cas (Wilson and al. 1956, Sennepin 1996).Smythe and Coppel mentionnent une "reciprocal prédation" entre le termite Reticulitermes flavipes et une fourmi Lasiits lors des premiers contacts entre les deux sociétés, qui harmoniseront leurs rapports dans un deuxième temps. Il est clair qu'il s'agit ici non pas de prédation croisée, ce qui ne signifie pas grand chose, mais d'un phénomène homologue à ceux précédemment cités.la dominance des termites dans certaines zones entraîne un appauvrissement significatif chez les populations d'arthropodes (le même phénomène existe à une plus grande échelle chez les fouimis). Ainsi. Wilson and al. (1956) et Jayasuriya and Traniello (1985) constatent que les isoptères constituent, dans certains cas, une menace majeure pour une fourmi, Aneuretus simoni, et affectent. à des degrés divers, la faune de fourmis terricoles dans son ensemble.les isoptères dominants sont dans ce cas, des Nasutitermes et des Hospitalitermes. notamment.dans un contexte de destruction de la forêt ombrophile. la compétition pour des sites de nidification en constante régression s'exacerbe, et les plus forts expulsent les plus faibles, ou les tuent et les consomment.les conflits de nature compétitive débouchent donc fréquemment sur la consommation d'un compétiteur par l'autre.d'une façon générale, le niveau de systématisme et de brutalité dans les combats décroît au fur et à mesure que les insectes concernés divergent à la fois sur les plans taxonomiques et bio-écologiques (habitudes trophiques. choix des nids, etc...)en tout état de cause, les Nasutitermes (et genres affins). compétiteurs redoutables d'autres termites et de fourmis occupant les mêmes niches écologiques, sont sans aucun doute, du même coup, au premier rang des isoptères adoptant un comportement camivore consécutif à l'invasion d'une zone de nidification, fourragement ou autre. 4. PREDATION. Des termites peuvent représenter parfois une menace importante pour certains insectes.ainsi. Glover (1933) considère qu'une espèce de Termes provoque

22 13 d'importantes déprédations dans les populations de 1' homoptère Lciccifer lacca en Inde. De même. Schmutterer (1969) note la destruction des chrysalides du papillon Diparopsis watersi dans les cultures au Soudan, qu'il attribue aux termites.darlington (com.pers. 1996) note qu à de nombreuses reprises, des termites ouvriers et soldats, lors de l'essaimage, sont non seulement agressifs à l'égard des intrus, mais peuvent s'emparer de ceux-ci pour les emmener dans les profondeurs du nid. probablement à des fins trophiques pour la colonie.des publications fournissent des indications à la fois plus détaillées et plus précises.les faits concernent essentiellement la prédation d'hyménoptères, de coléoptères et de myriapodes. Hyménoptères. Batra (1980) décrit l'intrusion de Microcerotermes dans le nid de l'abeille solitaire Artthophora antiope. Line cellule est violée, et les termites consomment à la fois les provisions et le couvain.bennett (1964) note la destruction de nombreux individus aux stades larvaires ou nymphaux d'une autre abeille solitaire, Cenlris derasa par des Microcerotermes arboreus dans le nid du termite. Callan (1977) note que deux autres abeilles du même genre. C. sponsa et C. thoracica sont très fréquemment associés à ce Microcerotermes. Par ailleurs, les Microcerotermes sont parfois présents dans des nids de fourmis (Sennepin 1996). ou associés à des fourmis non agressives dans des tennitières mortes d' Amitermes laurensis (Holt and Greenslade 1979).Martins and al. (1996) considèrent comme probable une prédation lourde des immatures de l'abeille Ptilothrix plumata. à la fois par des fourmis Solenopsis et par des termites non déterminés, au Brésil. Martins (com.pers. 1997) confirme que le nid de l'abeille était totalement investi à la fois par les fourmis et les termites et que le contenu du nid avait disparu.trager (com.pers. 1996) constate des associations fréquentes entre Solenopsis termites, dans les fourmilières, en zone néotropicale.krombein (1991) trouve un ouvrier termite dans le nid d'une guêpe Eustenogaster eximia. non molesté par la fondatrice. Ackonor (1983) trouve de populeuses colonies de Microtermes dans les nids d'une fourmi non agressive. Cataulacus guineensis. Certains termites se trouvent en contiguité immédiate avec la chambre du couvain de l'hyménoptère.la signification biologique des faits cités dans les deux derniers exemples sont incomius à ce jour. Coléoptères.Thome and Kimsev (1983) montrent que des Nasutitermes corniger peuvent être insectivores à l'occasion. Ils sont observés consommant une larve sessile de Cerambycide, après avoir envahi la galerie du xylophage.des Kalotermesflavicoltis tuent puis consomment des Tenebrio molitor (Springhetti et Amorelli 1982b), nourriture qu'ils semblent particulièrement apprécier selon les auteurs. Kitade (com. pers. 1996) mentionne la dévoration d'une larve de lucane ( vivante quand l'attaque s'est produite) par des Reticiditermes speratiis. Myriapodes. Des Reticulitermes santonensis sont observés par Goldberg (1971) en train de tuer puis de consommer un Lithobius tricuspis. à l'exosquelette fortement sclérifié et 20 fois plus volumineux que ses agresseurs. Les termites étaient à l'évidence attirés par leur victime.l'auteur indique que les Reticulitermes ont agi comme si leur but était de chasser une proie. DISCUSSION Il ressort des faits exposés que toutes les espèces de termites ont des habitudes carnivores plus ou moins régulières, exprimées, pour chacune d'entre elles, par des modalités telles qu'un cannibalisme occasionnel, à l'endroit de congénères, d' oeufs produits par la colonie, et d'insectes termitophiles.une nécrophagie occasionnelle, à l'égard de leurs congénères morts, une consommation fréquente de membres de colonies différentes à l'issue d'un conflit, et. à un degré moindre, dévoration de compétiteurs appartenant à des termites d'espèces différentes, voire des arthropodes terricoles divers, en premier lieu desquels des larves de coléoptères xvlophages et des sociétés peu populeuses de fourmis

23 14 non agressives.par ailleurs, les termites humivores et géophages, qui représentent plus de la moitié des espèces répertoriées à ce jour, peuvent effectuer une prédation discrète. mais aux copnséquences pédologiques parfois significatives, sur des populations de microarthropodes telluriques et d'autres représentants de la mésofaune.il est possible que certains isoptères utilisent ce mode trophique à plus grande échelle, en systématisant la nécrophasie. faisant de ce phénomène un élément important du fonctionnement trophique de la société. Des colonies de diverses espèces d' Amitermes sont vraisemblablement dans ce cas.etant donné les tendances, chez de nombreux espèces appartenant à ce genre, à installer leurs sociétés dans des structures où de nombreuses colonies d'insectes sociaux terricoles cohabitent (Gay 1968). de nouvelles études méritent d'être entreprises pour savoirsi cette spécialisation, exprimée vis-à-vis de congénères et qui peut s'étendre à des colonies d'isoptères différents ou d'hyménoptères, peut constituer une ouverture vers un certain parasitisme à caractère prédationnel. Des Microcerotermes parasitent fréquemment des hyménoptères, principalement des abeilles. Ce phénomène se produit aussi bien chez l'hyménoptère que dans la structure du termite. Dans le second cas. c'est l'hôte qui devient "le parasite du parasite" (Combes 1995). Il est vraisemblable que des termites de ce genre étendent ce comportement à l'encontre de fourmis et de guêpes (sociales ou non).de nouvelles études de terrain sont nécessaires pour préciser la fréquence et l'étendue de ce parasitisme prédationnel, aussi bien chez ce Temiitinae. que chez d'autres termites susceptibles de parasiter des isoptères d'autres espèces et (à des niveaux de fréquence variable) des fourmis, si ce n'est d'autres groupes d'arthropodes. Ce pourrait être notamment le cas d'un Apicotennitinae du genre Adaiphrotermes (Josens 1972) et à une plus grande échelle, des Macrotermitinae des genres Ancistrotermes et Microtermes (Bagine. com. père. 1994). Les termites ayant été répertoriés, à ce jour, comme présentant le spectre le plus large d'expressions du comportement Carnivore, appartiennent aux genresreticulitermes et Nasutitermes (et genres affins pour chacun d'entre eux).la réalité bioécologique de ces insectes étant fort différente, il ne fait aucun doute que l'étiologie et la fréquence d'un tel état de fait sont fort peu comparables.les Nasutitermes exercent une position de surdominance dans les écosystèmes néotropicaux et orientaux en premier lieu. Ces insectes agissent souvent de façon très spectaculaire. Ils sont les seuls à recourir dans des proportions significatives à la consommation de vertébrés morts.la nécrophagie régulière (comme la compétiton et la prédation) vis-à-vis d'espèces de fourmis est grandement facilité par leur dominance: ne craignant pas les hyménoptères, ils ne redoutent pas de s'associer à eux. et semblent même rechercher cette association dans certains cas (Jaffe and al. 1995).La pression compétitive directe que peuvent imposer ces isoptères à de nombreux représentants de la macrofaune vivant dans leur environnement immédiat implique inévitablement des comportements carnivores liées à cette compétition d'un niveau de fréquence bien différent du caractère occasionnel ou ponctuel d'un tel comportement chez les autres termites, quand celui-ci existe.a titre d'illustration, une seule espèce. Nasutitermes corniger. est dûment répertoriée comme couvrant la totalité du spectre comportemental nécrophage ou insectivore chez les termites (voir plus haut dans la présente publication). A contrario, les Reticulitermes expriment des comportements carnivores d'origine presque aussi diversifiée, certes, que les Nasutitermes. mais dans des proportions assurément nettement moindres. Certains faits, tels la consommation de myriapodes lors d'une "chasse" (Goldberg 1971) sont d'une interprétation délicate.par ailleurs, des termites de ce genre sont fréquemment associés à de nombreuses espèces de fourmis, dans les zones néarctique (King 1897, Smythe and Coppel 1964&1976 entre autres auteurs) et paléarctique (Maistrella. com. pers. 1994). Ce type d'association semble souvent très proche de la symbiose, impliquant des mécanismes croisés fort complexes (un travail à venir fera le point de façon détaillée sur cette question). Des phénomènes allant de la nécrophagie et l'oophagie interspécifique à une prédation discrète et limitée peuvent intervenir dans ce cadre. Selon le degré d'intimité des sociétés présentes dans ces nids mixtes, les phénomènes

24 15 décrits relèvent soit d'une forme de parasitisme, soit, quand la symbiose est véritablement fusiomielle. ce que l'on peut appeler du "létrocannibalisme ". D'une façon générale, le contexte socioécologique, ainsi que les hasards de l'histoire de certaines colonies, intervenant aux côtés de mécanismes plus prévisibles comme les modifications saisonnières dans la fixation de l'azote atmosphérique, jouent indiscutablement un rôle non négligeable dans le comportement réel des sociétés d'isoptères. Au sein d'une même espèce et même de colonies sympatriques. ce qui est vrai pour les uns ne l'est pas forcément pour les autres.de nouvelles études permettront peut-être (le caractère non systématique de ces comportements à l'échelle spécifique rend, en tout état de cause, les recherches difficiles) un approfondissement et des précisions sur des aspects particuliers de cette question.il n'est pas exclu, par exemple, que l'on puisse découvrir, à l'avenir, une société d'isoptères prédateurs spécialisés, si les faits observés par Goldberg (1971) ont été systématisés par un termite, du genre Reticulitermes ou non. Sur un autre plan. des phénomènes différents des quatre illustrés dans le présent travail apparaîtront peut-être comme les moteurs de certains comportements carnivores chez des isoptères. REMERCIEMENTS Je remercie le Dr Alain Dejean et le Pr Daniel Lebrun pour m'avoir encouragé dans ma démarche de recherche sur les complexes de nids d'insectes sociaux terricoles. le lecteur anonyme du présent travail pour ces précieux conseils sur mon manuscrit, et j 'adresse aussi un merci chaleureux à ma femme Isabelle, qui a su créer les conditions permettant ce travail exigeant, et me soutenir quand les difficultés auraient pu empêcher de mener cette tâche à son terme. REFERENCES Ackonor, J.B The nest and nesting habits of the ant Cataulacus guineensis F. Smith (Hvmenoptera: Formicidae) in a shanaian cocoa faim. Ins. Sci. Applic. 4 : Batra. S.W.B., Nests of the solitary bee. Anthophora antiope. in Piuijab, India. J. Kans. ent. Soc. 53 : , Bennett. F.D., Notes on the nestins site of Centris derasa.pan Pacific Entom, 40 : Bentley. B.L., Nitrogen fixation by Nasutitermes and Velocitermes in Venezuela, p 635, dans : Eder (J) and H. Rembold eds : Chemistry and biology of social insects. Verlag J. Peperny. Munich. 757pp. Brosset. A. et R. Darchen, Une curieuse succession d'hôtes dans les nids de Nasutitermes. Biologica Gabonica 3 : Callan, Me C. E.,1977. Observations on Centris rufosuffusa Cockerell (Hymenoptera: Anthophoridae) ami its parasites.j. Nat. Hisl. 11 : Collins. N.M The utilization of nitrogen resources bv termites (Isoptera), pp dans: Lee (AJ), Me Neil (S) & I.H. Roiison eds. Nitrogen as an ecologicalfactor. 22ème Symposium de la British ecological Society, Blackwell Scientific Publications. Oxford. London. Edinburgh. Boston, Melbourne. 470pp. Combes. C Interactons durables. Ecologie et évolution du parasitisme. Collection Ecologie n 26. éditions Masson. 524 pages. Deny, D.E Damage done to skulls and bones by termites.a<a/wn? 86 :

25 16 Dhaiiarajan. G Cannibalism and necrophagy in a subterranean termite. Reticulitermes lucifugus var. santonensis. The Malayan Nature Journal 31 (4) : Gay. F.J A contribution to the systematics of the genus Ami termes (Isoptera: Tennitidae) in Australia. Aust. J. Zool. 16: Glover, P.M., A natural enemy of termite. Termes sp. Ann. Rep. 14 : 36. Goldberg. J Comportement agressif du termite de Saintonge (Reticulitermes santonensis ) envers deux espèces de myriapodesitev. Comp. Anim. 5 : Grassé. P.P., Termitologia 1 : Anatomie, physiologie, reproduction des termites. Fondation Singer-Polignac. Masson eds. 676pp. Grassé, P.P., Termitologia 3 : Comportement, socialité, évolution, systématique. Fondation Singer-Polignac, Masson eds. 715pp. Hisashi, S. and F. Ito, Defense of termitaria by termilophilous anls. Oecologia Holt, J.A. and P.J.M Greenslade Ants in mounds of Amitermes laurensis. J. Aust. eut. Soc., Hunt.J.H. and C.A. Nalepa eds. l994.nourishment and évolution in insect societies, Studies in Insect biologv. Westview Press, Oxford/' IBH Publishing Co, Pvt. Ltd. 449pp. Iwata. R.. T.Yoshikawa and F. Yamada Inteiindividual behaviors in Reticulitermes speratus Kolbe (Isoptera. Rhinotermitidae), 244. in: Living with insects. Proc.l9th Int Congr. entom, Beijing (Pékin). Jaffe. K., C. Ramos and S. Issa, Trophic interactions between ants and termites that share common nests. Ann. entom. Soc. Amer. 88 : Jayasuriya.A.K. and J.F.A. Traniello, The biologv of the primitive ant Aneuretus simoni Emery (Fonnicidae; Aneuretinae). 1. Distribution, abundance, colony structure and foraging ecology. Ins. Soc. 32 : Josens, G., Etudes biologiques et écologiques des termites (Isoptera) de la savane de Lamto Pakabo (Côte d'ivoire). Thèse. Université libre de Bruxelles. King.G.B Termes flavipes Kollar and its association with ants.ent. News 8 : Krombein.K.V Biosystematic studies of ceylonese wasps. XIX. Natural histoiy notes in several families (Hymenoptera: Vespidae, Pompilidae and Crabronidae). Smiths. Contr. Zool. 515 : Lepage, M., Les termites d'une savane sahélienne (Ferlo septentrional, Sénégal) : peuplement, populations, consommation, rôle dans l'écosystème.thèse de Doctorat. Université de Dijon. 344pp. Martins. R.P., F.G. Guimaraes and C.M. Dias Nesting biology of Ptilothrix plumata Smith, with a comparison to other species in the genus (Hymenoptera : Anthophoridae). J. Kans. entom. Soc. 69(1) : Michener.C.D. and R.B. Lange bservations on the ethology of neotropital anthophorine bees (Hymenoptera : Apoidea).l//<iv. Kans. Sci. Bull. 39 (3) : Mjbberg, E Results'of Dr Mjôberg swedish scientific expéditions to Australia, Isoptera. Ark. f. Zool. 12 : Prestwich. G.D., B.L. Bentley and E.J. Carpenter Nitrogen sources for neotropical Nasute termites : fixation and selective foraging. Oecologia 46 : Prestwich (G.D) and B.L. Bentley Nitrogen fixation by intact colonies of Nasutitermes corniger. Oecologia 49 : San José. J.J., R.Montes. P.A.Stansly and B.L. Bentley Environmental factors related to the occurence of mound-building nasute ténuités in trachypogon savannas of the Orinoco Llanos. Biotropica 21 (4) :

26 17 Sennepin. A., Fonction synergique des interactions termites/fourmis. Actes Coll. Ins. Soc.. 10~: Schmutterer (H) Pest of crops in northeast and central Africa. Stuttgart. Gustav Fischer Verlag. eds. 296pp. Sleaford.F.D.E. Bignell and P.Eggleton, A pilot analvsis of gut contents in termites from the Mbalmavo Forest Reserve. Cameroon. Eco!. Entomol.,21 : Smith. K.G.V., A manual offorensic entomology. N-Y, U.S.A. Comstock Publishing Associates eds. 205pp. Smythe. R.V. and H.C. Coppel, Preliminary studies on ant-termite relationships in Wisconsin. Eut. Soc. Amer.. Froc. North. Centr. Br. 19 : Smythe (R.V) and H.C Coppel, The eastem subterranean termite Reticuiitermes flavipes Kollar, and the common thief ant Solenopsis molesta Sav. in the laboratorw with notes on other associated species. W. Acad. Sci. Lett. 61 : 95-"l02. Springhetti. A. and M. Amorelli, 1982a. Compétitive behavior between two species of Isoptera : Kalotermes flavicollis (Kalotermitidae) and Reticuiitermes lucifugus (Rhinotermitidae). Sociobiology 7 : Springhetti, A. and M. Amorelli, 1982b. Behaviour of Kalotermes flavicollis pseudergates toward insects of other species. Bol!. Inst. Entom 36 : Thome (B.L) and R.B Kimsey Attraction of Neotropical Nasutitermes to carrion. Biotropica 15 : Thome. B.L. and M.I. Ha vert}, A review of intracolony. intraspecific. and interspecific agonism in termites. Sociobiology 19 : Wheeler. W.M Ecological relations of ponerine and other ants to termites. Proc. Amer. Acad. Arts. Sci.. 71: Wilson. E.O., T.Eisner. C.Wheeler and J. Wheeler Aneurettis simoni Emerv. a major linkin ant évolution. Bull. Mus. Coinp. Zool (Harvard) 15 : ' Wylie, F.R.. G.L.Walsh and R.A. Yule Insect damage to aboriginal relies at burial and rock-art sites near Carnarvon in central Queensland. J. Aust. ent. Soc. 26 :

27 53 Actes Coll. Insectes Sociaux, 11: (1998) FLEXIBILITÉ INDIVIDUELLE ET COLLECTIVE DU COMPORTEMENT PRÉDATEUR CHEZ LA FOURMI ECTATOMMA RUIDUM ROGER (HYMENOPTERA, FORMICIDAE, PONERINAE) Bertrand SCHATZ 1-2, Jean-Paul LACHAUD 1 ' 3 & Guy BEUGNON 1 'LEPA, CNRS-UMR 5550, Université Paul-Sabatier, Toulouse Cedex (France) 2 ECOSUR, Apdo Postal 36, Tapachula, Chiapas (Mexique) 3 School of Biological Sciences, University ofsussex, Brighton BN1 9QG (U.K.) Résumé: Chez les ouvrières A'Ectatomma ruidum réalisant une activité à l'extérieur du nid, au moins cinq catégories comportementales ont pu être mises en évidence, dont celle des prédatrices. Face à des proies petites et nombreuses, ces prédatrices se répartissent elles-mêmes en deux sous-catégories de spécialistes : les tueuses, qui restent dans le site de prédation et tuent les proies en série, et les transporteuses, qui effectuent de nombreux allers-retours pour ramener les proies une à une jusqu'au nid. Le suivi de cette dissociation comportementale dans sept colonies de tailles différentes (24 à 350 ouvrières) montre que si le nombre des spécialistes des deux catégories augmente graduellement avec la taille des colonies, les proportions de tueuses (23%) et de transporteuses (77%) restent constantes. L'étude, dans de jeunes fondations et des colonies de faible effectif, de l'émergence parmi les prédatrices de ce type de spécialisation, indique que la différenciation de la première tueuse s'établit progressivement au cours de la sociogenèse pour des stades de développement compris entre 15 et 22 ouvrières. Une expérience de sociotomie a également permis de montrer que, suite au retrait temporaire des ouvrières spécialisées dans la fonction de tueuse, le groupe des transporteuses peut générer de nouvelles tueuses, assurant ainsi un maintien de l'efficacité du comportement prédateur à l'échelle de la colonie. La différenciation d'une prédatrice en tueuse ou en transporteuse dépend à la fois de caractéristiques individuelles (niveau de spécialisation et d'activité, expérience acquise, capacité décisionnelle) et sociales (comportement des individus coopérants, compétition à la tâche, état de satiété colonial). Les relations entre performances collectives et capacités individuelles permettent ainsi d'expliquer l'importante flexibilité du comportement prédateur d'e. ruidum et, plus généralement, de son comportement de founagement. Mots-clés: Ponérine, spécialisation comportementale, flexibilité, fourragement, taille des colonies, régulation sociale. Abstract: Individual and collective flexibility of the predatory behavior in the ant Ectatomma ruidum Roger (Hymenoptera, Formicidae, Ponerinae). In the ponerine ant Ectatomma ruidum, workers displaying outside activities belong to, at least, five behavioral catégories, including namely hunters. When faced with small and numerous prey, hunters specialize into two behavioral sub-categories: stingers, which stay in the hunting site and kill prey in sériai, and transporter which perform numerous single-loaded trips to the nest. Seven colonies showing différent sizes (24 to 350 workers) were studied. Although the number of both catégories of hunters gradually increases with colony size, the proportions of stingers (23%) and transporters (77%) remain relatively stable. In young foundations and small colonies, a more in depth study of the emergence of the behavioral specialization of the first stinger among predators indicates a gradually differentiation during sociogenesis for developmental colony stages corresponding to workers. By a temporary removing of ail individuals specialized in stinging behavior, we showed that some of the transporters can differentiate into stingers, securing the efficiency of the predatory behavior. The behavioral differentiation of a given hunter into stinger or transporter depends both on individual characteristics (specialization and activity levels, previous experience, décision making) and on social characteristics (behavior of cooperating individuals, task compétition, colonial starvation state). Relationships between collective performances and individual capacities allow to explain the important flexibility of the predatory behavior of. ruidum and, more generally, of its foraging behavior. Key Words: Ponerine, behavioral specialization, flexibility, foraging, colony size, social régulation.

28 20 INTRODUCTION Dans le cadre de la recherche des composantes fondamentales de l'organisation des colonies, la division du travail est un des phénomènes les plus étudiés chez les fourmis (Holldobler et Wilson, 1990). Les deux castes comportementales le plus souvent évoquées sont d'une part les soigneuses de couvain, ou plus généralement les ouvrières du "service intérieur", et d'autre part les fourrageuses, c'est-à-dire les ouvrières du "service extérieur" (Holldobler et Wilson, 1990). Cependant, beaucoup d'autres sous-castes comportementales peuvent exister, notamment au niveau des tâches de fourragement où se rencontrent les spécialisations les plus marquées (Oster et Wilson, 1978; Rissing, 1981). Par exemple, chez Pachycondyla caffraria, les fourrageuses peuvent être séparées en récolteuses de substances sucrées et en prédatrices, ces dernières pouvant, à leur tour, être divisées en deux sous-catégories : les "piqueuses" et les "transporteuses" (Agbogba et Howse, 1992). Une telle division du travail parmi les prédatrices se retrouve de façon caractéristique chez quelques espèces à régime termitophage obligatoire, telles Pachycondyla (= Termitopone) laevigata, P. marginata, Megaponera foetens et certaines Leptogenys (Leal et Oliveira, 1995), suggérant une possible facilitation dans l'émergence de telles spécialisations fines du fait de certaines caractéristiques propres au type de proies chassées. Au cours d'une étude centrée sur l'analyse du comportement de fourragement des ouvrières à'ectatomma ruidum, nous avons voulu d'une part déterminer les différents types de spécialisation comportementale présentés par les ouvrières du service extérieur et d'autre part tester l'hypothèse de l'influence du type de proies sur l'émergence de ces spécialisations en analysant, en laboratoire, le comportement des ouvrières face à des proies mobiles, petites et nombreuses, c'est-à-dire présentant un certain nombre de caractéristiques proches de proies comme les termites. MATÉRIEL ET MÉTHODES Matériel biologique La fourmi Ectatomma ruidum est une ponérine néotropicale très commune en Amérique Centrale et une partie de l'amérique du Sud, connue pour son impact économique potentiel sur les insectes ravageurs de divers agroécosystèmes (Weber, 1946; Lachaud et coll., 1984, 1990, 1996; Perfecto, 1990). La taille réduite des effectifs de ses colonies (80 à 100 ouvrières en moyenne) ainsi que la faible extension des aires de chasse utilisées (de 0.8 à 8.4 m 1 ) (Lachaud, 1990; Lachaud et coll., 1990; Breed et coll., 1990; Schatz et Lachaud, non publié) rendent son étude en laboratoire particulièrement aisée, dans des conditions expérimentales souvent relativement proches des conditions naturelles. Étude des spécialisations comportementales Trois colonies monogynes, composées respectivement de 21, 61 et 101 ouvrières, ont été élevées dans des nids en plâtre en conditions contrôlées de laboratoire (25±1 "C, 60±5% HR, 12/12 DL). Chaque nid était connecté d'une part à un site à grillons et d'autre part au centre d'une arène où les fourrageuses avaient libre accès à trois sites à miel différents placés à 120 les uns des autres. Toutes les ouvrières ayant manifesté une quelconque activité à l'extérieur ont été marquées individuellement. Toutes les 15 minutes pendant 4 jours, entre 08h00 et 17h30 (ce qui correspond à l'essentiel de la période d'activité de cette espèce, Lachaud, 1990), les visites de chaque individu ont été enregistrées dans les cinq sites potentiels de fourragement (le site à grillons, l'arène et les trois sites à miel). Même si aucun recrutement de masse ni tracé de piste chimique n'ont été observés au cours de la recherche alimentaire, chaque jour, avant le début des observations, la base de l'arène a été nettoyée à l'alcool afin d'éliminer toute possibilité d'information chimique directionnelle connue pour être utilisée par les ouvrières d'e. ruidum lors de la recherche de substances sucrées ou de proies nombreuses ou difficilement transportables (Pratt, 1989; Bestmann et coll., 1995). Un "coefficient de fidélité" (FC) a été calculé pour chaque individu comme le rapport entre le nombre de visites enregistrées dans un site donné et le nombre total de sorties de cet individu durant la période d'observation. En considérant trois sites potentiels de fourragement (le site à grillons, l'arène et l'ensemble des trois sites à miel), toutes les ouvrières présentant un coefficient de fidélité pour un site donné d'une valeur CF > 0,50, ont été considérées comme fidèles à ce site.

29 21 Tests de prédations Sept colonies de tailles différentes (24, 60, 109, 130, 160, 240 et 350 individus) ont été utilisées. Le dispositif expérimental est composé d'un milieu extérieur (30 x 30 cm) connecté d'un côté au nid et de l'autre à l'aire de prédation. Séparée d'environ 35 cm de l'entrée du nid, cette aire de prédation consiste en une boîte de Pétri d'un diamètre de 9 cm, où sont placées les proies (des drosophiles vivantes), et présentant une hauteur de 1 cm seulement afin de faciliter la prédation des fourmis tout en évitant que les proies ne s'échappent. Durant des observations préliminaires, toutes les ouvrières réalisant un acte de prédation ont été marquées individuellement. Les comportements de chaque ouvrière marquée présente dans l'aire de prédation ont été relevés par séquences de 10 minutes. Certaines caractéristiques plus spécifiques des protocoles utilisés seront présentées au niveau des différents tests réalisés. RÉSULTATS Les spécialisations comportementales Sur 78 ouvrières réalisant une quelconque activité à l'extérieur au cours de la phase d'observation préliminaire, seules 68 ont été observées à l'extérieur au cours des 4 jours de test. A partir des différences établies entre les coefficients de fidélité de ces 68 individus (Fig. 1), une très nette différenciation en au moins cinq catégories comportementales apparaît entre les ouvrières (Schatz et coll., 1995). Coefficient de fidélité en % Site à grillons Prédatrices O Récolteuses de miel Sites à miel Intermédiaires non spécialisées Non-fourrageuses Figure 1. Fidélité au site de fourragement chez les ouvrières ayant une activité extérieure. Les données des trois colonies sont regroupées pour chaque site de fourragement (site à grillons, arène et sites à miel) pour les groupes de spécialistes établis à partir des coefficients de fidélité individuels. Foraging site fidelity for workers displaying outside activiy. The data from the three colonies were pooled for each foraging site (cricket site, arena or honey sites) for the différent groups of specialists established according to the individuat fidelity coefficients. On peut ainsi distinguer : des "prédatrices" (92,5% des 187 visites effectuées dans le site à grillons ; FCsite à grillons = 0,83 ± 0,15), des "récolteuses de miev (94,4% des 501 visites dans les trois sites à miel ; FCsites à miel = 0,93 ± 0,13), des "intermédiaires non-spécialisées" (réparties dans les différents sites disponibles sans montrer une spécialisation pour l'un de ces trois sites de fourragement ; FCsite à grillons = 0,50 ± 0,24 ; FCsites à miel = 0,62 ± 0,27 ; FCarène = 0,65 ± 0,23), et finalement des "non-fourrageuses" (très présentes dans l'arène : FCarène = 1 ± 0,02 ; FCsite à grillons = 0,04 ± 0,20 ; FCsites à miel = 0,07 ±0,13) qui se répartissent en "ouvrières chargées de la maintenance du nid' (94,4% de l'ensemble des transports de débris divers) et en "patrouilleuses" (caractérisées par des trajets longs et sinueux et un net désintérêt pour les proies ou le miel). Sur la base des niveaux d'activité individuels des fourrageuses (estimés par le nombre de trajets réalisés), un niveau d'activité de référence a été défini comme

30 22 correspondant à 1,5 fois le niveau d'activité moyen (x = 11 trajets) établi à partir des niveaux d'activité des 78 ouvrières potentiellement actives à l'extérieur (Fig. 2). Nombre de sorties / Niveau Iffpf distinctif d'activité 1,5 x = 16,5 sorties [Niveau moyen d'activité de toutes les fourrageuses potentielles (n = 78) x = 11 sorties I I I I I I 1 I Ouvrières ayant réellement une activité extérieure (n = 68) Prédatrices Récolteuses de miel B Intermédiaires non spécialisées B Non-fourrageuses Figure 2. Niveau d'activité individuel des 68 ouvrières ayant montré une activité extérieure. Individual activity rate of the 68 workers disptaying oustide activity. Pour certaines catégories comportementales comme les prédatrices et les récolteuses de miel, et indépendamment de la valeur du coefficient de fidélité associé au site de fourragement préférentiel, on peut distinguer des spécialistes très actives, appelées "spécialistes-élite" (sensu Oster et Wilson, 1978), qui ont un niveau d'activité supérieur au niveau d'activité de référence et, par opposition, des "spécialistes" qui sont nettement moins actives (Fig. 2). La comparaison entre spécialistes-élite (n = 14) et spécialistes (n = 22), au niveau de leur coefficient de fidélité pour le site le plus visité, ne fait cependant apparaître aucune différence significative entre ces deux catégories (0,95 ± 0,06 vs. 0,86 ± 0,17). La spécialisation comportementale et le niveau d'activité apparaissent donc comme deux caractéristiques distinctes de chaque ouvrière (Schatz et coll., 1995). L'étude détaillée du comportement des prédatrices mises en présence de proies petites et nombreuses permet d'aller plus loin encore dans la mise en évidence de spécialisations comportementales fines. Trois tests de 120 minutes, chacun faisant intervenir 80 drosophiles, ont été réalisés. Face à ce type de proies, et en se basant à la fois sur des critères de fréquence de réalisation des comportements de mise à mort et de transport (Tab. 1) et de niveau moyen d'activité (seules les ouvrières réalisant au moins 10 mises à mort au cours du même test sont considérées comme spécialisées dans cette tâche), deux nouvelles catégories comportementales ont pu facilement être distinguées parmi les prédatrices (Schatz et coll., 1996) : les "tueuses", réalisant 93,2% des mises à mort de proies, et les "transporteuses" qui assurent 98,1% des transports au nid. Comportements Tueuses (n = 6) Transporteuses (n = 28) Nombre de proies tuées Nombre de proies transportées Tableau X. Nombre de mises à mort et de transports réalisés au cours de 3 tests par chacune des deux sous-castes comportementales de prédatrices d'e. ruidum, pour une colonie de 240 ouvrières (au total 240 drosophiles ont été offertes comme proies). Les effectifs de tueuses et de transporteuses correspondent au nombre total d'individus ayant participé à un comportement de chasse au moins une fois au cours des 3 tests. Table 1. Numbers ofstingings and transports performed during 3 répétitions by both behavioral subcastes of hunters, in an E. ruidum colony containing 240 workers (a total of 240 drosophila were supplied as prey). Stingers and transporter numbers correspond to the total number of individuals displaying any hunting behavior at least once during the 3 tests.

31 23 Cette stratégie est très efficace puisque sur 240 proies présentées au cours des trois tests, 219 ont été tuées (91,3% des proies disponibles), dont 94,5% (207 proies) ont été transportées au nid (soit, au total, 86,3% des proies disponibles). Chaque tueuse réalise une séquence typique d'attaque (Lachaud, 1990; Schatz et coll., 1997) : détection, localisation, approche, antennation, saisie avec les mandibules et piqûre. Dès que la proie est immobile, elle est déposée au sol et une nouvelle séquence d'attaque peut commencer ; cependant, quelques tueuses peuvent parfois conserver la proie morte entre leurs mandibules lorsqu'elles engagent une nouvelle attaque. Généralement, les proies mortes déposées au sol sont reprises par les transporteuses, mais ces dernières peuvent parfois solliciter activement le transfert de la proie à une tueuse par des antennations et, occasionnellement, l'intervention de martèlements réalisés avec les pattes antérieures. Dans tous les cas, les proies sont transportées une par une, puis déposées dans le nid ou données aux ouvrières bloquant l'entrée du nid et qui sollicitent à leur tour le transfert de proie. Flexibilité comportementale individuelle et collective Influence de la taille de la colonies. La variation, en fonction de la taille des colonies, du nombre d'individus impliqués dans chacune des deux sous-castes comportementales de prédatrices ainsi que de leurs proportions relatives, a été étudiée au cours de trois tests sur sept colonies (Schatz et coll., 1996). Pour chaque test, on a respecté une proportion relativement constante de 3 à 5 proies par ouvrière prédatrice (nombre estimé durant des tests préliminaires). Figure 3. Nombre et proportion des ouvrières spécialisées en tueuses ou en transporteuses en fonction de la taille de la colonie. Number and proportion of workers specialized in stinging or transporting behaviors according to colony size. Les résultats (Fig. 3) indiquent l'existence de corrélations positives significatives entre la taille de la colonie et le nombre de tueuses (r = 0,986 ; p <.001) et de transporteuses (r = 0,970 ; p <.001). Par contre, les proportions de tueuses (23%) et de transporteuses (77%) restent constantes quelle que soit la taille de la colonie. Émergence de la spécialisation "tueuse" dans les colonies de petite taille. La plus petite colonie étudiée (24 ouvrières) étant caractérisée par l'intervention d'une tueuse en moyenne par test (Fig. 3), nous avons voulu déterminer l'effectif minimum que doit posséder une colonie pour qu'intervienne de façon régulière, au cours de ce type de séquence prédatrice, une ouvrière spécialisée en tueuse. Répétés 86 fois, des tests de prédation ont été réalisés sur huit fondations à différentes étapes de leur sociogenèse (de 8 à 27 ouvrières). Ces tests consistent à proposer 20 proies dans le même dispositif que celui utilisé précédemment. Pour chaque effectif, nous avons établi la proportion des cas où est intervenue une tueuse, c'est-à-dire une prédatrice qui tue au moins 10 proies par test. L'intervention d'une tueuse apparaît pour des sociétés contenant 16 ouvrières et devient systématique au delà de 21 ouvrières (Fig. 4). Entre ces deux effectifs, la pro-

32 24 portion de cas avec intervention d'une tueuse est directement corrélée à la taille de la colonie (r = 0,981 ; p <.001 ; ddl = 6). Cette droite de régression permet de calculer la taille théorique de la colonie pour laquelle cette proportion de cas est de 50% : cette taille théorique est de 18,41 ouvrières (Fig. 4). Ainsi, l'émergence du statut de tueuse serait lié au stade de développement de la colonie, la spécialisation en tueuse n'apparaissant de façon stable qu'à partir d'un certain degré de "maturité" des colonies comme cela a déjà été montré pour les spécialistes de la garde à l'entrée du nid et pour les prédatrices utilisant la stratégie de chasse à l'affût chez E. tuberculatum (Dejean et Lachaud, 1992). Proportion des cas de prédation avec intervention d'une tueuse (en %) r Taille des colonies Figure 4. Proportion des cas d'intervention d'une tueuse en fonction de la taille de la colonie. Le nombre de cas testés pour chaque effectif est indiqué entre parenthèses. La zone en pointillés représente les effectifs pour lesquels l'intervention d'une tueuse n'est pas systématique. Proportion of cases involving one stinger according to colony size. The number of cases tested is indicated between parenthesis. The dotted sector represents the colony size for which the participation of a specialized stinger is not systematic. Régulation sociale parmi les prédatrices. La dissociation comportementale entre tueuses et transporteuses peut faire l'objet d'une régulation sociale au même titre que ce qui a déjà été démontré chez d'autres espèces pour des spécialisations comportementales concernant des tâches réalisées à l'intérieur du nid (Lachaud et Fresneau, 1987). La capacité de régulation sociale parmi les prédatrices a été étudiée ici sur la colonie de 240 ouvrières, en effectuant une expérience de sociotomie qui se déroule en trois phases réparties sur 14 tests (Schatz et coll., 1994b). Nombre d'actes de mise à mort ou de transport p f-, r JOOO^O OOO i Figure S. Prédatrices identifiées par leur numéro Performances individuelles de mises à mort et de transports des proies réalisées par les prédatrices au cours de la phase initiale. Individual performances concerning stinging and transporting behaviors performed by each hunter during the initial phase. Le regroupement au niveau individuel des résultats des huit premiers tests, correspondant à la phase initiale, confirme la séparation comportementale entre les deux

33 25 types de prédatrices. Cependant, cette spécialisation n'est pas stricte, puisque toutes les tueuses ont effectué quelques transports de proies et que, de leur côté, la plupart des transporteuses ont effectué quelques mises à mort (Fig. 5). Cette phase initiale a servi à déterminer, pour l'ensemble des prédatrices, le niveau de référence initial pour le comportement de mise à mort, permettant ainsi d'identifier neuf tueuses, dont sept spécialistes-élite (Fig. 6). La seconde phase, dite phase de sociotomie et regroupant 3 tests, a consisté en l'isolement de ces 9 tueuses. Enfin, au cours de la troisième phase, dite de réunification et regroupant également 3 tests, les deux groupes initiaux de prédatrices ont été reconstitués. L'isolement des neuf tueuses au cours de la phase de sociotomie a provoqué une réorganisation comportementale au sein du groupe des transporteuses (Fig. 6), marquée par l'apparition de 5 tueuses très actives, et la mise en activité de 6 nouvelles transporteuses. Les 5 tueuses correspondent aux individus qui, parmi les transporteuses, présentaient déjà, au cours de la phase initiale, les meilleures performances de mises à mort. Enfin, une nouvelle redistribution générale de la spécialisation en tueuse apparaît au cours de la phase de réunification, respectant pour l'essentiel les spécialisations comportementales individuelles telles qu'elles se manifestaient au cours de la phase initiale, mais intégrant aussi, partiellement, certaines des modifications apparues lors de la phase de sociotomie : les tueuses n 160, n 670 et n 240 perdent leur statut de tueuses alors que les transporteuses n 10 et n 33 deviennent des tueuses très actives. Quant aux 6 nouvelles transporteuses qui s'étaient mises en activité au cours de la phase de sociotomie, elles n'interviennent plus dans la prédation. Pourcentage de proies tuées 1 ueuses 1 ransponeuses ayant ettectue au moins un comportement de mise à mort Phase initiale Rappel des pourcentages individuels obtenus pendant la phase initiale Pourcentages individuels obtenus pendant les phases de sociotomie ou de réunification Figure 6. Analyse individuelle du comportement de mise à mort au cours des phases initiale, de sociotomie et de réunification. Individual analysis of the stinging behavior during the initial, sociotomy and reunification phases. Trois aspects importants de cette régulation sociale, que l'on retrouve également chez d'autres espèces (Lachaud et Fresneau, 1987; Lachaud et coll., 1994), sont à souligner. Le premier correspond à la stabilité des effectifs des différents groupes face à l'ensemble des variations individuelles. Le second correspond à la mise en évidence d'une compétition à la tâche entre les prédatrices. L'issue de cette compétition à la tâche est très influencée par les différentes prédispositions individuelles pour la tâche à réguler, comme c'est le cas ici parmi les transporteuses en ce qui concerne la réalisation du

34 26 comportement de mise à mort au cours de la phase de sociotomie. Enfin, les variations individuelles de spécialisation et de niveau d'activité, au cours de la phase de réunification, semblent montrer que la réalisation répétitive d'un comportement par un individu contribue à renforcer la spécialisation comportementale de cet individu pour ce comportement, alors qu'au contraire sa non-réalisation contribue à diminuer cette spécialisation. L'influence de ce dernier aspect reste néanmoins mineure devant l'importante flexibilité comportementale individuelle, puisque la majorité des individus ont conservé pendant la phase de réunification la spécialisation et le niveau d'activité qu'ils avaient pendant la phase initiale. DISCUSSION L'analyse détaillée, chez E. ruidum, du comportement des ouvrières participant à l'approvisionnement de la société met en évidence l'existence d'une division du travail extrêmement fine et variée. De plus, de façon plus nuancée que dans les conclusions d'oster et Wilson (1978) suggérant que l'élitisme est le moteur essentiel de la spécialisation comportementale, l'analyse simultanée des spécialisations comportementales et des niveaux d'activités manifestés par les individus fait apparaître qu'en fait ces deux phénomènes correspondent à des caractéristiques distinctes de chaque ouvrière. Cette variété dans la division du travail apparaît d'autant plus facile à mettre en évidence que l'on se place dans les conditions optimales d'expression de comportements qui, en conditions normales, seraient difficiles à observer, voire même inexistants. Ainsi, l'utilisation de proies petites et nombreuses, nous a permis de décrire une stratégie de chasse coopérative, avec intervention de deux spécialisations comportementales complémentaires (tueuses et transporteuses) qui, en situation normale, ont peu de chances d'apparaître puisque les ouvrières d'e. ruidum sont connues pour chasser essentiellement en solitaires (Lachaud et coll., 1984; Schatz et coll., 1997). L'intervention dans l'émergence de certaines spécialités, comme celle de tueuse, de processus complexes liés au stade de développement des colonies, semble toutefois indiquer que ces spécialisations comportementales ne sont pas de simples artefacts expérimentaux mais correspondent bien à une potentialité comportementale réelle des individus, se mettant en place progressivement non seulement au cours de l'ontogenèse mais également de la sociogenèse. En jouant sur certaines caractéristiques des proies offertes (longueur, poids, transportabilité), d'autres travaux ont montré qu'une large gamme de stratégies de fourragement, depuis la forme solitaire jusqu'au recrutement gradué, pouvait être utilisée par E. ruidum (Lachaud, 1985; Pratt, 1989; Schatz et coll., 1997). D'une façon similaire, l'utilisation de certaines caractéristiques du milieu dans lequel se déplacent les ouvrières spécialisées dans la récolte de substances sucrées, conduit ces dernières à présenter des spécialisations individuelles spatiales (Lachaud et coll., 1984; Schatz et coll. 1995), temporelles (Schatz et coll., 1993) et même spatio-temporelles (Schatz et coll., 1994a; Beugnon et coll., 1996), et il semblerait qu'il en soit de même en ce qui concerne les prédatrices (Schatz, 1997). L'ampleur de la gamme de spécialisations comportementales dont dispose E. ruidum, ainsi que la grande souplesse qui permet aux ouvrières de cette espèce de faire face à une grande variété de contraintes environnementales tout en maintenant un niveau très élevé de performance (exprimé en nombre de proies ou d'items alimentaires ramenés au nid), confirment l'incroyable flexibilité comportementale de cette espèce (Corbara et coll., 1989). Cette flexibilité se traduit notamment par une grande capacité à réaliser une régulation sociale rapide et efficace dans une situation relativement drastique ou toute une catégorie de spécialistes disparaît. Ainsi, lors de la suppression expérimentale de toutes les tueuses, la différenciation d'une prédatrice en tueuse ou en transporteuse dépend à la fois de ses caractéristiques individuelles (niveau de spécialisation, niveau d'activité, expérience acquise, capacité décisionnelle) et de caractéristiques sociales (comportement des individus coopérants, compétition à la tâche, état de satiété colonial) (Oster et Wilson, 1978; Lachaud et

35 27 Fresneau, 1987; Lachaud et coll., 1994; Schatz, 1997). Les relations entre performances collectives et capacités individuelles permettent donc d'expliquer l'importante flexibilité du comportement prédateur de cette espèce et plus généralement de son comportement de fourragement. REMERCIEMENTS Ce travail, qui a fait l'objet d'une thèse de Doctorat présentée à l'université Paul-Sabatier de Toulouse, a été réalisé grâce à des financements émanants du MESR "Sciences de la Cognition", de la Commission Européenne, du programme Cognisciences CNRS auprès de PRESCOT et du Conseil Régional de Midi-Pyrénées, ainsi que du CONACyT au Mexique (projet n" 0574P-N). RÉFÉRENCES Agbogba C. and P.E. Howse, Division of labour between foraging workers of the ponerine ant Pachycondyla caffraria (Smith) (Hymenoptera: Formicidae). Ins. Soc. 39: Bestmann H.J., E. Janssen, F. Kern, B. Liepold and B. Hôlldobler, All-trans geranylgeranyl acetate and geranylgeraniol, recruitment pheromone components in the Dufour gland of the ponerine ant Ectatomma ruidum. Naturwissenschaften 82: Beugnon G., I. Pastergue-Ruiz, B. Schatz and J.-P. Lachaud, Cognitive approach of spatial and temporal information processing in insects. Behav Process. 35: Breed M.D., P. Abel, T.J. Bleuze and S.E. Denton, Thievery, home ranges, and nestmate récognition in Ectatomma ruidum. Oecologia 84: Corbara B., J.-P. Lachaud and D. Fresneau, Individual variability, social structure and division of labour in the ponerine ant Ectatomma ruidum Roger (Hymenoptera; Formicidae). Ethology 82: Déjean A. and J.-P. Lachaud, Growth-related changes in prédation behavior in incipient colonies of the ponerine ant Ectatomma tuberculatum (Olivier). Ins. Soc. 39: Hôlldobler B. and E.O. Wilson, The ants. Springer-Verlag, Berlin. 732 pp. Lachaud J.-P., Recruitment by selective activation: an archaic type of mass recruitment in a ponerine ant (Ectatomma ruidum). Sociobiology 11: Lachaud J.-P., Foraging activity and diet in some neotropical ponerine ants. I. Ectatomma ruidum Roger (Hymenoptera, Formicidae). Folia Entomol. Mex. 78: Lachaud J.-P., G. Beugnon and D. Fresneau, Coopération chez les insectes sociaux : la division du travail et sa régulation chez les fourmis. In: Systèmes Coopératifs : de la Modélisation à la Conception, (sous la direction de B. Pavard), pp Edit. "Atelier Cognition Partagée- PRESCOT-Toulouse", Coll. Travail, OCTARES edn., Toulouse. Lachaud J.-P. and D. Fresneau, Social régulation in ponerine ants. In: From individual to collective behavior in social insects (J.M. Pasteels & J.-L. Deneubourg Eds.) (Experientia suppl. 54), pp Birkhàuser Verlag, Basel. Lachaud J.-P., D. Fresneau and J. Garci'a-Pérez, Étude des stratégies d'approvisionnement chez 3 espèces de fourmis ponérines (Hymenoptera, Formicidae). Folia Entomol. Mex. 61: Lachaud J.-P., J.A Lôpez-Méndez., B. Schatz, P. De Carli and G. Beugnon, Comparaison de l'impact de prédation de deux ponérines du genre Ectatomma dans un agroécosystème néotropical. Actes Coll. Ins. Soc. 10: Lachaud J.-P., J. Valenzuela, B. Corbara and A. Dejean, La prédation chez Ectatomma ruidum: étude de quelques paramètres environnementaux. Actes Coll. Ins. Soc. 6: Leal I.R. and P.S. Oliveira, Behavioral ecology of the neotropical termite-hunting ant Pachycondyla (= Termitopone) marginata : colony founding, group-raiding and migratory pattems. Behav. Ecol. Sociobiol. 37: Oster G.F. and E.O. Wilson, Caste and ecology in the social insects. Princeton, New Jersey: Princeton University Press, 352 pp. Perfecto I., Indirect and direct effects in a tropical agroecosystem: the maize-pest-ant system in Nicaragua. Ecology 71: Pratt S.C., Recruitment and other communication behavior in the ponerine ant Ectatomma ruidum. Ethology 81: Rissing S.W., Foraging specializations of individual seed-harvester ants. Behav. Ecol. Sociobiol. 9:

36 28 Schatz B., Modalités de la recherche et de la récolte alimentaire chez la fourmi Ectatomma ruidum Roger : flexibilités individuelle et collective. Thèse, Toulouse III, 275 pp. Schatz B., G. Beugnon and J.-P. Lachaud, 1994a. Time-place learning by an invertebrate, the ant Ectatomma ruidum Roger. Anim. Behav. 48: Schatz B., J.-P. Lachaud and G. Beugnon, Apprentissage temporel chez la ponérine Ectatomma ruidum Roger. Actes Coll. Ins. Soc. 8: Schatz B., J.-P. Lachaud and G. Beugnon, 1994b. Polyéthisme et régulation sociale chez les prédatrices d'une fourmi ponérine Ectatomma ruidum Roger. Proc. 26 eme Coll. SFECA, Nancy, pp Schatz B., J.-P. Lachaud, G. Beugnon, Spatial fidelity and individual foraging specializations in the neotropical ponerine ant, Ectatomma ruidum Roger (Hymenoptera; Formicidae). Sociobiology 26: Schatz B., J.-P. Lachaud and G. Beugnon, Polyethism within hunters of the ponerine ant, Ectatomma ruidum Roger (Hymenoptera; Ponerinae). Ins. Soc. 43: Schatz B., J.-P. Lachaud and G. Beugnon, Graded recruitment and hunting stratégies linked to prey weight in the neotropical ponerine ant, Ectatomma ruidum Roger. Behav. Ecol. Sociobiol. 40: Weber N.A., Two common ponerine ants of possible economic significance, Ectatomma tuberculatum (Olivier) and E. ruidum Roger. Proc. Entomol. Soc. Wash. 48: 1-16.

37 53 Actes Coll. Insectes Sociaux, 11: (1998) ÉTUDES EN MILIEU NATUREL DU COMPORTEMENT DE CLEPTOBIOSE CHEZ LA FOURMI NÉOTROPICALE ECTATOMMA RUIDUM (HYMENOPTERA, PONERINAE) Paola DE CARLIl, Jean-Paul LACHAUD 1-2, Guy BEUGNON 1 & J. Antonio LÔPEZ-MÉNDEZ 2 'LEPA, CNRS-UMR 5550, Université Paul-Sabatier, Toulouse Cedex (France) 2 ECOSUR, Apdo Postal 36, Tapachula, Chiapas (Mexique) Résumé: Chez la fourmi ponérine Ectatomma ruidum, en conditions de haute densité de population, les aires de fourragement des colonies voisines se superposent partiellement et les ouvrières d'une colonie peuvent voler les réserves alimentaires des nids homospécifiques voisins (cleptobiose). Dans une plantation de caféiers, au Mexique, nous avons observé l'émergence du phénomène cleptobiotique lors de la présentation d'une source de nourriture unique, fixe et abondante au cours de 3 tests. La cleptobiose peut être "facultative" ou "stricte", suivant que les colonies qui bénéficient de la nourriture fournie ont un contact direct occasionnel ou nul avec la source. Les nids exploitant la source par cleptobiose stricte sont en moyenne plus éloignés de cette source (de près de 60%) que les nids effectuant de l'approvisionnement direct. L'activité des ouvrières voleuses, marquées individuellement, a été suivie pendant une période de 4 semaines, en tenant compte de leur fidélité à la cible des vols, de la durée des intrusions et des rejets des intruses de la part des résidantes. Ces résultats nous conduisent à discuter d'une part de l'impact écologique de la cleptobiose en tant que véritable stratégie de fourragement et, d'autre part, de l'hypothèse du camouflage chimique en tant que mécanisme d'évasion du système de reconnaissance intraspécifique. Mots-clés: Interactions intraspécifique, fourragement, cleptobiose, Ectatomma ruidum, Ponerinae. Abstract: Field studies of cleptobiotic behavior in the neotropical ant Ectatomma ruidum (Hymenoptera, Ponerinae). In the ponerine ant Ectatomma ruidum, under high nest density conditions, hunting areas of neighboring colonies partly overlap and some workers can enter a foreign nest to rob food reserves (cleptobiosis). In order to enhance foraging compétition between E. ruidum colonies, a large quantity of small prey was provided as a single fixed food source during 3 replications, in a Mexican coffee plantation. The food source exploitation was done by "facultative" or "exclusive" cleptobiosis, according to the existence or absence of any direct provisioning to this source. Exclusive cleptobiotic nests were, on average, more distant fforn the source (near to 60% more) than colonies foraging directly on it. The activity of previously marked thief ants was studied during 4 weeks, focusing on the individual fidelity to the same target nest, the duration of intrusions with or without food robbing and the rejections of intruders by resident workers. We discuss the ecological impact of cleptobiosis as an effective foraging strategy and the camouflage hypothesis proposed as an evasive mechanism of the nestmate récognition system. Key words: Intraspecific interactions, cleptobiosis, Ectatomma ruidum, Ponerinae. INTRODUCTION Le vol de nourriture, est un comportement assez répandu dans le monde animal, s'exprimant par le transfert forcé d'items alimentaires d'un individu à l'autre. Chez les fourmis, les ouvrières d'une colonie peuvent voler les réserves alimentaires d'une colonie homospécifique ou appartenant à une autre espèce, comportement connu sous le nom de cleptobiose (Holldobler, 1986; Yamaguchi, 1995). Chez la fourmi ponérine Ectatomma

38 30 ruidum, en conditions de haute densité de population, la distribution homogène des nids (Levings et Franks, 1982; Schatz et coll., 1998) est un indice de la forte compétition intraspécifique locale. Dans de telles conditions, les aires de fourragement des colonies voisines se superposent partiellement (Lachaud et coll., 1984) et les ouvrières d'une colonie peuvent effectuer de la cleptobiose aux dépens des nids homospécifiques voisins (Breed et coll., 1990). Afin de préciser l'importance, chez cette espèce, du vol alimentaire en tant que stratégie de fourragement, nous avons étudié ce phénomène en conditions naturelles, aussi bien à l'échelle de la population qu'à celle des colonies. De plus, afin de tester l'hypothèse du camouflage chimique (Breed et coll., 1992) proposée pour expliquer les intrusions d'ouvrières homospécifiques dans les nids étrangers, nous nous sommes également intéressés au comportement cleptobiotique des fourmis voleuses à l'échelle individuelle. MATÉRIEL ET MÉTHODES Les expériences ont été réalisée au Mexique, en janvier-février 1996, dans une plantation de caféiers où la densité en nids d'e. ruidum est très élevée (11200 nids/ha, Schatz et coll., 1998). Une source unique de 1500 cadavres de mouches (Ceratitis capitaux) a été proposée à un endroit fixe, 3 jours de suite, au cours de 3 tests de 4 heures. Nous avons enregistré l'approvisionnement direct à la source ainsi que les interactions cleptobiotiques de toutes les colonies impliquées, directement ou indirectement, dans l'exploitation de la source. De plus, l'activité des ouvrières voleuses, identifiées individuellement par un marquage à la peinture, a été suivie pendant une période de 4 semaines, en tenant compte de leur fidélité à la cible du vol, de la durée des intrusions et des éventuels rejets des ouvrières intruses de la part des résidantes. RÉSULTATS Au total, 57% des 2090 proies prélevées à la source, au cours des 3 tests, et transportées aux différents nids ont, par la suite, été l'objet de vols. Seulement 50% des 42 nids actifs dans la zone étudiée se sont approvisionnés directement à la source, les autres étant impliqués dans son exploitation indirecte, par le biais d'interactions cleptobiotiques. Source de nourriture Nids qui ne font pas de cleptobiose Nids effectuant de la cleptobiose facultative Nids effectuant de la cleptobiose stricte Figure 1. Nids effectuant de la cleptobiose facultative ou stricte, numérotés de 1 à 42, en ordre croissant suivant leur distance à la source. Facultative or exclusive cleptobiotic nests, numberedfrom 1 to 42, in increasing order, according to their distance from thefood source.

39 31 La cleptobiose peut être "facultative" ou "stricte", selon que les ouvrières d'une colonie se rendent aussi à la source de nourriture (19 nids : Fig. 1) ou qu'elles s'approvisionnent exclusivement par le vol, aux dépens des colonies voisines (20 nids). Les nids voleurs stricts sont en moyenne plus éloignés de la source que les nids réalisant un approvisionnement direct (355,8 cm versus 226,5 cm), soit près de 60% plus loin. Un nid voleur peut avoir jusqu'à 8 cibles différentes et, parallèlement, une même colonie peut subir des vols de proies de la part de plusieurs nid voisins, jusqu'à un maximum de 15. Les pourcentages d'items alimentaires transportés au nid, directement depuis la source ou par cleptobiose, varient d'une colonie à l'autre. Un cas particulier est celui des "nids-relais" qui fourragent principalement par cleptobiose (de 70% à 100% des entrées de proies) et perdent plus de 30% de ces proies en étant à leur tour cibles des vols effectués par les colonies voisines. Le nid 22, par exemple (Fig. 1 et 2), fonctionne comme relais entre le nid 7 (plus proche de la source et cible principale de ses vols), et plusieurs nids voleurs, notamment le nid 31 qui est son plus proche voisin. Items Alimentaires 20 r Approvisionnement direct Q Vols effectués Vols subis Temps 60 min 120 min 180 min 240 min Figure 2. Exemple de nid-relais : bilan de l'exploitation directe à la source et des vols effectués et subis par la colonie 22 (résultats cumulés des trois tests). Relay-nest: balance of the direct exploitation at the source and ofthefood robbings conducted and sujfered by colony 22 (cumulative data ofthe three répétitions). Au total, 259 observations de comportements individuels ont été faites, concernant 44 fourmis voleuses marquées appartenant à 21 colonies d'e. ruidum et ayant comme cibles 5 nids différents. Les comportements enregistrés sont soit des approvisionnements à la source, soit des intrusions avec vol (véritables cleptobioses) ou sans vol (l'ouvrière intruse ressort du nid-cible sans rien transporter). La fidélité des ouvrières voleuses à un même nid-cible a été démontrée par des observations répétées d'individus marqués durant les 4 heures d'observation journalières (fidélité à court terme : 92%, 135 observations sur 18 individus concernés), mais également pendant une période de plusieurs jours (fidélité à long terme : 75%, 103 observations sur 44 individus), pouvant aller jusqu'à un maximum de 26 jours correspondant à la durée totale de notre expérience. Les durées des intrusions sont très variables. Dans le cas où les ouvrières ressortent sans avoir rien volé (20 individus, 65 observations), l'intrusion peut durer juste quelques secondes (minimum : 5 s), tandis que les durées des intrusions avec vol (12 individus, 74 observations) ne sont jamais inférieures à une minute (minimum : 1 min 40 s). Les valeurs maximales des durées enregistrées se situent à plus d'une heure, aussi bien pour les intrusions sans vol (maximum : 1 h 1 min 10 s) que pour les cas de véritable cleptobiose

40 32 (maximum : 1 h 16 min 55 s). Les rejets des intruses de la part des résidantes, bien qu'assez rares, peuvent intervenir à tout moment de l'intrusion. DISCUSSION En situation de forte densité en nids, lors de l'exploitation d'une source alimentaire fixe très riche, E. ruidum a recours, de façon régulière et importante, à la cleptobiose intraspécifique. Au travers de cette cleptobiose, un plus grand nombre de colonies peut bénéficier de la nourriture disponible, et de plus celle-ci diffuse dans l'espace sur une plus grande distance. La cleptobiose permet ainsi l'exploitation d'une source alimentaire non seulement de la part des colonies dont l'aire de fourragement inclut l'emplacement de la nourriture, mais aussi de la part des colonies qui en sont éloignées (Breed et coll., 1990). A la suite des vols, et en particulier grâce au rôle des nids-relais, la nourriture est largement distribuée au sein de la population. Ce flux centrifuge des proies vers les colonies périphériques permet un écoulement rapide de la source, vraisemblablement par suppression ou atténuation de la saturation physique des nids exploitant directement cette source, phénomène qui, en conditions normales, tend à limiter la capacité d'absorption de proies des colonies (Lachaud et coll., 1990; Schatz, 1997). Le vol de nourriture entre colonies voisines semble donc être une stratégie de fourragement bien adaptée aux conditions de très haute densité de population, offrant une solution sans conflits ouverts à la compétition pour les ressources. Par ailleurs, pour certaines ouvrières, le fait de se spécialiser dans la cleptobiose sur une même cible présente l'avantage de leur permettre d'exploiter des réserves alimentaires fixes et relativement disponibles, sans se disperser dans la recherche de proies, aléatoire et coûteuse en énergie. La grande variabilité des durées d'intrusions et l'existence de rejets après des intrusions de longue durée vont à l'encontre de l'hypothèse du camouflage chimique (Breed et coll., 1992). La possibilité d'intrusion dans les nids étrangers serait simplement liée au haut niveau de tolérance intercoloniale, probablement dû à une forte proximité génétique entre colonies d'une même population. REMERCIEMENTS Ce travail a été réalisé dans le cadre du programme de la Communauté Européenne "Capital Humain et Mobilité" (ERBCHBICT941509) et avec le soutien du CONACyT (projet n" 0574P-N). Nous remercions J.A. GARCtA BALUNAS et M.A. MORENOPRÔSPERO pour leur aide sur le terrain. RÉFÉRENCES Breed M.D., P. Abel, T.J. Bleuze and S.E. Denton, Thievery, home ranges, and nestmate récognition in Ectatomma ruidum. Oecologia 84: Breed M.D., L.E. Snyder, T.L. Lynn and J.A. Morhart, Acquired chemical camouflage in a tropical ant. Anim. Behav. 44: Hôlldobler B., Food robbing in ants, a form of interference compétition. Oecologia Lachaud J.-P., D. Fresneau and J. Garcfa-Pérez, Étude des stratégies d'approvisionnement chez 3 espèces de fourmis ponérines (Hymenoptera, Formicidae). Folia Entomol. Mex. 61: Lachaud J.-P., J. Valenzuela, B. Corbara and A. Dejean, La prédation chez Ectatomma ruidum: étude de quelques paramètres environnementaux. Actes Coll. Ins. Soc. 6: Levings S.C. and N.R. Franks, Pattems of nest dispersion in a tropical ground ant community. Ecology 63: Schatz B Modalités de la recherche et de la récolte alimentaire chez la fourmi Ectatomma ruidum Roger : flexibilités individuelle et collective. Thèse, Toulouse III, 275 pp. Schatz B., J.-P. Lachaud, V. Fourcassié and G. Beugnon, Densité et distribution des nids chez la fourmi Ectatomma ruidum Roger. Actes Coll. Ins. Soc. 11: Yamaguchi T., Intraspecific compétition through food robbing in the harvester ant, Messor aciculatus (Fr. Smith), and its conséquences on colony survival. Ins. Soc. 42:

41 53 Actes Coll. Insectes Sociaux, 11: (1998) INFLUENCE DE L'ISOLEMENT SOCIAL CHEZ LA FOURMI FELLAH (HYMENOPTERA : FORMICIDAE) CAMPONOTUS Raphaël BOULAY et Alain LENOIR. Laboratoire d'éthologie et Pharmacologie du Comportement (L.E.P.C.O.), Faculté des Sciences et Techniques, Parc de Grandmont, Tours, France. Résumé. L'influence de l'isolement chez les insectes sociaux a peu été étudiée depuis les travaux de Grassé et Chauvin (1944) mettant en évidence "l'effet de groupe". Outre la longévité, notre étude montre que chez la formicine Camponotus fellah, une situation d'isolement prolongée affecte aussi le comportement. On constate en effet une augmentation significative des trophallaxies entre des ouvrières minor, isolées pendant une durée d'au moins 72 heures. Les fourmis trophallaxent plus, qu'elles aient ou non reçu de la nourriture pendant leur phase d'isolement. Ces comportements ne semblent donc pas uniquement liés à des échanges alimentaires, mais peut-être aussi à des transferts de substances de reconnaissance. Mots-clés. Isolement social, Effet de groupe, Camponotus fellah, Trophallaxies Abstract. Influence of social isolation in the ant Camponotus fellah (Hymenoptera: Formicidae). Since the work of Grassé and Chauvin (1944) dealing with the concept of "group effect", only few studies have been devoted to the influence of social isolation in social insects. Here we present experiments on the formicine ant Camponotus fellah, showing that in addition to the effects on longevity, an isolation period also affects social behaviour. When they have been deprived of social contacts for at least 3 days, young minor workers trophallax more longer. This augmentation is significant wether ants received regularly food or not. The augmentation of trophallaxis seems not only due to food exchange, but it may be linked to a transfer of récognition substances. Key words. Social isolation, Group effect, Camponotus fellah, Trophallaxis INTRODUCTION Les sociétés de fourmis sont caractérisées par le fort lien social qui relie tous les membres d'une même colonie. Cette cohésion est basée sur la reconnaissance de signaux chimiques, portés au niveau cuticulaire par tous les individus de la société et constituant l'odeur coloniale. L'homogénéisation de ce mélange (essentiellement constitué d'hydrocarbures) résulte des échanges continuels entre tous les individus, notamment par des léchages interindividuels et surtout des trophallaxies (Lenoir et coll., sous presse).

42 34 L'objet de notre étude fût de rechercher si l'isolement, et donc l'impossibilité d'échanger toute substance avec des congénères, influence le comportement d'ouvrières de la fourmi Camponotus fellah. PROCÉDURE Nous avons analysé les comportements mutuels (trophallaxies et léchages interindividuels) entre deux ouvrières minor de Camponotus fellah. Pour cela, des ouvrières âgées de 15 jours ont été prélevées dans le nid et immédiatement placées dans des tubes de verre dont la partie fermée constitue un réservoir d'eau. Les rencontres ont été réalisées en mettant en contact les ouvertures des deux tubes contenant les fourmis, ce qui minimise le stress causé par leur manipulation. Pour chaque couple de fourmis, deux rencontres de 15 minutes chacune ont été réalisées, l'une avant et l'autre après une période d'isolement de 24, 72, 120, 240 ou 480 heures. Les fourmis isolées furent soit maintenues à jeun pendant toute la durée d'isolement, soit nourries régulièrement avec un mélange de sucres et d'acides aminés. Dix tests ont été réalisés par type de rencontre. Les durées totales des trophallaxies et des léchages ont été comparées à l'aide d'une ANOVA. Le test post-hoc de Newman-Keuls, a permis la comparaison des durées de comportement avant et après isolement (* = p<0.05 et ** = /K0.01). RÉSULTATS Après une phase d'isolement d'au moins 72 heures, on constate une augmentation très importante de la durée des trophallaxies (figures 1 et 2). Les fourmis peuvent alors consacrer plus de 55% du temps de la rencontre à trophallaxer (contre 5% pour les témoins). Cette augmentation est observée, que les fourmis aient été alimentées ou maintenues à jeun. La durée totale des léchages ne varie pas significativement après une phase d'isolement, quel que soit l'état de satiété et la durée de l'isolement. 800 x en s 0 ** -r À i À I ** durées d'isolement en heures Figure 1 : Influence de l'isolement sur la durée totale des trophallaxies chez les ouvrières alimentées (blanc et noir respectivement avant et après isolement). Influence of social isolation on the total duration of trophallaxis in fed workers (white and black, respectively before and afier social isolation).

43 Jj Là durées d'isolement en heures Figure 2 : Influence de l'isolement sur la durée totale des trophallaxies chez les ouvrières non alimentées (blanc et noir respectivement avant et après isolement). Influence of social isolation on the total duration of trophallaxis in unfed workers (white and black, respectnely before and after social isolation). DISCUSSION Dans chaque dyade étudiée, les deux fourmis étaient dans des conditions d'alimentation similaires. Ceci suggère que les trophallaxies observées après isolement ne sont pas uniquement motivées par l'alimentation. Il est probable qu'elles permettent également le rétablissement d'un lien social entre les ouvrières isolées. Les trophallaxies constituent notamment un mode privilégié pour les échanges de substances de reconnaissance au sein de la colonie. Ces comportements permettent en effet le transfert des hydrocarbures stockés dans les glandes post-pharyngiennes des différents individus de la société (Soroker et coll., 1994 ; Soroker et coll., 1995). Les modifications comportementales dues à l'isolement s'accompagnent très certainement de bouleversements physiologiques. L'octopamine est une neuro-hormone libérée dans le système nerveux de bon nombre d'invertébrés devant faire face à des situations stressantes. Notre objectif sera à l'avenir de rechercher si cette monoamine, ou d'autres substances, sont impliquées dans les réactions des fourmis à l'isolement. RÉFÉRENCES Grassé P.-P. and R. Chauvin, L'effet de groupe et la survie des neutres dans les sociétés d'insectes. Rev. Scient. 82: Lenoir A., D. Fresneau, C. Errard and A. Hefetz, sous presse. Individuality and colonial identity in ants : emergence of the social représentation concept. Dans : Information processing in social insects (C. Detrain, J.-L. Deneubourg et J.-M. Pasteels, Eds.) Birkhauser. Soroker V., C. Vienne and A. Hefetz, Hydrocarbons dynamics within and between nestmates in Cataglyphis niger (Hymenoptera: Formicidae). J. Chem. Ecol. 21: Soroker V., C. Vienne, A. Hefetz and E. Nowbahari, The postpharyngeal gland as a "Gestalt" organ for nestmate récognition in the ant Cataglyphis niger. Naturwissenschaften 81:

44 53 Actes Coll. Insectes Sociaux, 11: (1998) L'ATTAQUE DES CULTURES MARAÎCHÈRES PAR LES TERMITES (.ISOPTERA) DANS LA RÉGION DE DAKAR (SÉNÉGAL) HAN S. H. 1 & NDIAYE A. B. 2 ' Laboratoire d'ecophysiologie des Invertébrés, Université Paris XII Val de Marne, avenue du Général de Gaulle, Créteil Cedex, France 2 Laboratoire de Zoologie des Invertébrés Terrestres, IFAN, B. P. 206 Dakar, Sénégal Résumé. A Dakar et dans les environs, une étude sur l'attaque des cultures maraîchères par les Termites a été menée. Les cultures sont pratiquées dans 3 types principaux de milieux : les "niayes", les dunes de sables fixées ogoliennes et les milieux à vertisols. L'étude de 42 parcelles représentant 17 cultures maraîchères a permis de recenser la présence des termites suivants: Psammotermes hybostoma, Microcerotermes sp.. Macrotermes subhyalinus, Odontotermes nilensis et Microtermes spp. L'étude de la fréquence des espèces de Termites dans les parcelles montre que les Microtermes spp. sont les plus répandus et les plus nuisibles. Les auteurs notent une absence d'attaques sur les cultures pratiquées dans les niayes qui serait liée aux sols gorgés d'eau parfois saumâtre. Mots-ciés. Termites, attaque, cultures maraîchères, Dakar, Sénégal. Abstract. Termite (Isoptera) damage of vegetables in the Dakar région and the surrounding area (Sénégal). In the Dakar région and the surrounding area a study has been conducted to assess termite damage to vegetables. The cultures are grown on 3 types of soils : the niayes, the ogolian sandy dunes and vertisols. Psammotermes hybostoma, Microtermes sp., Macrotermes subhyalinus, Odontotermes nilensis and Microtermes spp. were recorded in 17 cultures. The study of the frequency of termite species in the différent plots show that the Microtermes spp. are the most widespread and the most harmful. The authors note no attacks on the cultures grown in the niayes which could be linked to watery soil. Key Words. Termites, damage, vegetable cultures, Dakar, Sénégal. INTRODUCTION De nombreuses études relatives aux dégâts des termites ont été faites un peu partout à travers le monde. Certaines de ces études concernent les plantations forestières (Roy-Noël, 1982; Roy-Noël & Wane, 1977; Agbogba & Roy-Noël, 1982; Cowie et al., 1989) et d'autres des plantes cultivées (Mora et al., 1996; Collins, 1984; Tiben et al., 1990; Han & Ndiaye, ). Pour ce qui est des études se rapportant spécifiquement aux cultures maraîchères nous pouvons citer les travaux de El Bashir (1981) au Yemen, de Assem (1980) en Egypte et de Popov et al. (1982 ) en Ethiopie.

45 38 De ces travaux il résulte que certaines espèces de termites sont nuisibles aux végétaux. D'après Logan et al. (1990), sur les espèces de Termites décrites, environ 300 occasionnent des dégâts sur les végétaux vivants et les bâtiments. D'après Wood & Pearce (1991) les pertes dues aux Termites en Afrique en sylviculture et en cultures vivrières sont souvent supérieures à 15%, atteignant même parfois 90%. Compte tenu de l'importance sociale et économique des activités maraîchères au Sénégal, et plus particulièrement à Dakar et dans les environs, il nous a paru nécessaire d'entreprendre l'étude des dommages occasionnés par les termites. En effet au delà de son intérêt théorique (élargissement des connaisances de la bio-écologie des termites du Sénégal), cette étude met à la disposition des maraîchers des informations complémentaires pour une conduite plus rationnelle de leurs exploitations. MATÉRIEL ET MÉTHODES Le cadre de l'étude, Dakar et les environs, est une région située entre les longitudes 17 W et 17 30W et les latitudes 14 30N et 15 N. Elle comporte deux saisons, une pluvieuse allant de juillet à septembre avec un maximun de pluie enregistré en aôut (jusqu'à 150 mm et plus) et une saison sèche fortement atténuée par la rosée qui constitue, d'après Courel (1984) jusqu'à 3,4 % de la pluviométrie. Les températures maximales (35 C) en octobre et les minimales (16 C) en janvier. L'humidité relative reste élevée pendant toute l'année (Guèye & Lepage, 1988). 17 cultures maraîchères réparties en 42 parcelles ont été étudiées, représentant un total de pieds pour une superficie cultivée de m2 (Tableau 1). Les parcelles se trouvent dans 16 localités : Ouakam, Yoff, Cambérène, Pikine, Thiaroye, Yeumbeul, Malika, Keur Massar, Rufisque, Keur Daouda Sarr, Keur Ndiaye Lô, Sangalkam, Noflaye, Bambilor, Gorom, Ndiar. Les ouvrages de Collingwood et al. (1984) et de Beniest (1987) nous ont permis de déterminer les différentes cultures rencontrées. Tableau 1- Récapitulatif du nombre de parcelles etpieds observés pour chacune des cultures étudiées Récapitulative table ofplot and plant numbers observedfor each studied crop Cultures Effectif observé Parcelles étudiées Ail (Allium sp.) Aubergine (Solanum melongena) Aubergine amère ou Diakhatou (Solanum aethiopicum) Carotte (Daucus carota) Chou-pommé (Brassica oleracea var. capita) Chou-rave (Brassica caulorapa) Courgette (Cucurbita pepo) Fraisier (Fragaria ananassa) Gombo (Hibiscus esculentus) Haricot vert (Phaseolus vulgaris) Navet (Brassica rapa) Oignon (Allium cepa) Oseille de Guinée ou Bissap (Hibiscus sabdariffa) Piments (Capsicum spp.) Radis (Raphanus sativus) Salade ou Laitue (lactuca saliva) Tomate (Lvcopersicum esculentum Ces différentes cultures sont pratiquées dans trois types principaux de milieux qui se distinguent par un certain nombre de caractères physiques et biotiques que Roy-Noël (1974) a étudiés dans les détails. Le premier de ces milieux, les niayes, est constitué par des dépressions interdunaires à sols hydromorphes au niveau desquelles affleure parfois la nappe phréatique. Le deuxième milieu est constitué par les dunes de sables fixées ogoliennes. Le troisième milieu, les vertisols, est représenté par des sols plus ou moins

46 39 argileux, qui correspondent au plateau marno-calcaire de Bargny et les blocs sédimentaires soulevés en relation avec le volcanisme des Mamelles et de ses épanchements. Pour l'étude proprement dite, nous commençons au niveau de chaque parcelle par déterminer la superficie et le nombre de pieds de chaque culture. Ensuite, culture par culture, les pieds morts sont enlevés un par un et les éventuelles attaques notées. Les termites présents sont récoltés dans des pilluliers contenant de l'alcool éthylique 70. Notons que dans chaque parcelle étudiée, et pour une culture donnée, un unique relevé est effectué à un moment quelconque du cycle de la culture. RÉSULTATS Au cours de cette étude, un certain nombre d'espèces de termites ont été récoltées sur les différentes cultures attaquées. Il s'agit de: Psammotennes hybostoma DESNEUX, 1902 Microcerotennes sp. Macrotennes subhyalinus (RAMBUR, 1842) Odontotennes nilensis EMERSON, 1949 Microtennes spp. Le relevé des fréquences permet de distinguer 2 groupes de Termites (Fig.l). Microtermes spp. Psammotennes hybostoma. et Odontotermes nilensis sont les plus fréquents représentant respectivement 38%, 24% et 19% de la faune de termites récoltés. Microcerotennes sp. (9,5%) et Macrotermes subhyalinus (7,7%) sont les plus rares. Fig. 1 : Fréquences des espèces de termites dans les 42 parcelles Tennires species frequency in 42 plots studied étudiées Le nombre de cultures attaquées par une espèce de termite varie de 2 à 7. On trouvera la liste des plantes maraîchères attaquées par chacune des espèces de termites au tableau 2.

47 40 Tableau 2 - Inventaire des cultures attaquées par chaque espèce de termite List of damaged crops for each termite species Espèces de Termites Psammotermes hybostoma Microcerotermes sp. Macrotermes subhyalinus Odontotermes nilensis Microtermes spp. Cultures Aubergine, Gombo, Haricot vert, Oignon, Oseille, Tomate. Aubergine, Gombo, Salade, Tomate Chou, Navet Ail, Haricot vert, Oignon, Oseille, Piments, Tomate Aubergine, Chou, Courgette, Gombo, Haricot vert, Piments, Tomate L'étude des attaques en fonction de la nature du milieu des cultures (niayes, dunes ogoliennes, milieux à vertisols) montre une absence d'attaques sur les cultures pratiquées dans les niayes et une prédominance des attaques au niveau de la zone de sol plus ou moins argileux du plateau de Bargny et des blocs sédimentaires liés au volcanisme de Ouakam (0,17%) par rapport aux dunes fixées (0,09%). Les taux d'attaques observés pour chacune de ces cultures dans les différents milieux sont indiqués sur le Tableau 3. Tableau 3- Répartition des attaques des Termites en fonction des milieux des cultures N.P.A. (Nombre de Pieds Attaqués) Repartition of the attacks according to cultivated soils N.P.A. (Number of attacked plants) Milieux Niayes Milieux à sols plus ou Dunes de sables moins argileux ogoliennes Cultures Effectif N.P.A. Effectif N.P.A. Effectif N.P.A. (%) (%) (%) Ail ,64 Aubergine (0,41) (0,20) Aubergine amère 558 0(0) 217 0(0) (0) Carotte (0) Chou (0) (1,18) (0,004) Chou-rave (0) Courgette (0,29) Fraisier (0) Gombo (0) (0,35) Haricot vert (0,02) (0,04) Navet (2,03) - - Oignon (0) (0,01) (0,03) Oseille - 5 0(0) (25,10) Piments (0,37) (0,62) Radis (0) (0) Salade (0) (0,01) (0) Tomate (0) (0,77) (0,18) Total (0) (0,17) (0.09) En ce qui concerne les attaques, notons d'abord l'existence de 5 cultures sur lesquelles aucun cas d'attaque n'est observé. Ces cultures sont : la Carotte, le Chou-rave, le Fraisier, le Radis et l'aubergine amère. Pour l'ail, le taux observé sur une parcelle étudiée est de 0,64%. Les pieds attaqués étaient vivants et apparemment bien portants. L'espèce récoltée, Odontotermes nilensis construisait des placages de récolte sur les feuilles et la partie émergeante du bulbe. L'Aubergine est attaquée par Microtermes spp., Microcerotermes sp. et Psammotermes hybostoma, avec un taux d'attaques moyen de 0,29%. Le Chou montre un taux d'attaque moyen de 0,11%. Les espèces en cause sont Microtermes spp. et Macrotermes subhyalinus.

48 41 Pour la Courgette, un seul cas d'attaque due à une espèce du genre Microtermes est observé. Le Haricot vert est attaqué par Psammotermes hybostoma, Microtermes spp. et Odontotermes nilensis. La moyenne des attaques est de 0,03%. Le Navet est attaqué par une seule espèce, Macrotermes subhyalinus. Le taux d'attaques moyen est de 2,03%. L'Oignon est attaqué par deux espèces, Odontotermes nilensis et Psammotermes hybostoma. La moyenne est de 0,01%. L'Oseille de Guinée, attaquée par Psammotermes hybostoma et Odontotermes nilensis, montre un taux d'attaques moyen de loin le plus élevé de tous ceux qui sont observés, 24,85%. Sur les Piments ont été récoltés les Microtermes spp. et Odontotermes nilensis. Le taux d'attaques moyen est de 0,53%. La Salade compte un seul pied attaqué sur un effectif observé de L'espèce en cause est Microcerotermes sp. La Tomate est attaquée par 4 espèces: Microtermes spp., Microcerotermes sp., Psammotermes hybostoma et Odontotermes nilensis. Le taux d'attaques moyen est de 1,12 %. Pour l'essentiel les attaques notées sur les cultures ont lieu au niveau des racines, du collet et de la tige. Des attaques de feuilles n'ont été observées que pour l'oignon, l'ail et le Chou. Ces attaques sont effectuées à l'abri de placage dans le cas de Odontotermes nilensis sur l'oignon et l'ail alors que Macrotermes subhyalinus s'attaque aux feuilles de Chou sous un placage ou pénétre à l'intérieur de la pomme avec remplissage de terre. A l'exclusion de Macrotermes subhyalinus, les termites peuvent remonter plus ou moins haut à l'intérieur des tiges (Tomate, Aubergine, Gombo, Bissap, Piments) à partir des racines et du collet des pieds qu'ils attaquent. Microcerotermes sp. établit dans certains cas des galerie-tunnels au dessus des pieds des cultures à port ligneux (Gombo, Aubergine) qui se terminent au niveau de petits trous pratiqués par les Termites sur la tige qui est attaquée de l'intérieur. Les sections de tige au dessus du collet et au ras du sol sont notées chez de jeunes plants de Tomate et chez le chou. Dans le premier cas, Psammotermes hybostoma, après avoir sectionné la tige abandonne la partie aérienne à terre et continue de ronger la partie sous terre encore vivante avec ses racines intactes. Quant à Macrotermes subhyalinus lorsqu'il sectionne un pied de chou, il délaisse la partie souterraine au profit de la partie aérienne. Chez le Navet, Macrotermes subhyalinus pénètre à l'intérieur du tubercule qui est rongé. Les parties rongées sont remplacées par de la terre. DISCUSSION Notre étude a permis la récolte de 5 genres et d'au moins 7 espèces. Ce nombre représente environ 10% des espèces de Termites recensées au Sénégal à ce jour. Sur d'autres types de végétaux (essences forestières et fruitières) Roy-Noël & Wane (1977), Roy-Noël (1982), Agbogba & Roy-Noël (1982) et Han & Ndiaye (1996) ont recensé une vingtaine d'espèces. Cette différence dans le nombre d'espèces récoltées est liée en partie à la différence de nature des végétaux en question. En effet, les cultures maraîchères, de par leur taille, leur port et leur cycle de développement, sont incapables d'abriter certaines espèces de termites. Le faible taux d'attaques observés pour la plupart des cultures est sans doute la résultante de différents facteurs biotiques et abiotiques, parmi lesquels l'humidité des sols (liée à l'irrigation et à des arrosages plus ou moins réguliers) semble occuper une place prépondérante. Ainsi, en ce qui concerne l'irrigation, les travaux de El Bashir et al. (1981) ont souligné une variation significative du nombre moyen d'attaques, qui peut être de 10 à 23 % en fonction de la qualité de l'irrigation. De même Han & Ndiaye (1996) ont montré qu'une bonne irrigation est un excellent moyen de lutte contre les termites.

49 42 L'absence d'attaques de Termites sur les cultures pratiquées dans les niayes trouve donc une explication dans l'engorgement des sols qui empêche tout développement de termites. Des travaux réalisés ailleurs dans le monde ont montré également que les cultures maraîchères peuvent faire l'objet d'attaques de termites. Au Yemen, El Bashir et al. (1981) ont noté des attaques de Microtermes najdensis et de Microcerotermes diversus sur les piments, la Tomate et le Gombo. En Egypte des attaques de Acanthotermes ochraceus sur l'aubergine sont rapportées par Assem (1980). En Ethiopie, Popov et al. (1982) notent l'attaque des Piments par Macrotermes spp. Dans notre étude la Tomate est attaquée par Microtermes spp., Microcerotermes sp., Psammotermes hybostoma et Odontotermes nilensis, le Gombo et l'aubergine par P. hybostoma, Microcerotermes sp. et Microtermes spp., et enfin les Piments par Microtermes spp., et 0. nilensis. En dehors de Acanthotermes, non signalé au Sénégal, les autres genres rencontrés par ces auteurs figurent dans notre inventaire. Cette étude préliminaire permet d'établir l'existence de dégâts occasionnés par les termites sur les cultures maraîchères dans la région de Dakar, tant au niveau de parcelles situées sur les dunes de sables fixées ogoliennes que sur les vertisols du plateau de Bargny et des blocs sédimentaires liés au volcanisme de Ouakam. Toutefois, les faibles taux d'attaques moyens observés ne doivent pas occulter les taux d'attaques parfois élevés au niveau des parcelles. De plus, les taux observés sont certainement en dessous des dégâts réels dans la mesure où nos relevés, pour une parcelle donnée, sont effectués une seule fois au cours du cycle de culture alors que les attaques ont lieu durant tout le cycle de la culture depuis les semis jusqu'à la récolte. Il serait donc intéressant de suivre des essais depuis les semis jusqu'à la récolte pour une estimation complète des dégâts causés par les termites sur les cultures maraîchères. RÉFÉRENCES Agbogba, C. et J. Roy-Noël, L'attaque des arbres par les Termites dans la presqu'île de Cap-Vert (Sénégal). ÛI. - Cas du parc forestier de Dakar-Hann sur sables ogoliens. Bull. IFAN, 39, sér. A. (3-4): Assem, M. A., Termites on vegetables. Sociobiology. 5: 162. Beniest, J., Guide pratique du maraîchage au Sénégal. Collection "Cahier d'information ", 1, CDH, Dakar. 143 pp. Collingwood, E. F., L. Bourdouxhe et M. Defrancq, Les principaux ennemis des cultures maraîchères au Sénégal. CDH, Dakar. 95 pp. Collins, N. M., Termite Damage and Crop Loss Studies in Nigeria - Assessment of Damage to Upland Sugarcane. Tropical Pest Managment. 30, 1: Courel, M. F., Etude de l'évolution récente des milieux sahéliens à partir des mesures fournies par les satellites. Thèse de Doctorat d'etat, Université. Paris I. 407 pp. Cowie, R. H., W. M. Logan et T. G. Wood, Termite (Isoptera) damage and control in tropical forestry with spécial référencé to Africa and Indo-Malaysia, a review. Bull. Ent. Res. 79: El Bashir, E., A. Khairalla et I. B. El Khateb, Crop damage due to Termites in Tihama région of the Yemen Arab Republic. Yemen Arab Republic, Ministry of Agriculture Research Service. 12 pp. Guèye, N. et M. Lepage, Rôle des Termites dans de jeunes plantations d'eucalyptus du Cap-Vert (Sénégal). Actes Coll. Ins. Soc. 4: Han, S., H. et A. B. Ndiaye, Dégâts causés par les Termites (Isoptera) sur les arbres fruitiers dans la région de Dakar (Sénégal). Actes Coll. Ins. soc. 10: Logan, J., W., M., R. H. Cowie et T.G. Wood, Termite (Isoptera) Control in Agriculture and Forestry by Non-chimical Methods: A review. Bull. Entomol. Res. 80:

50 43 Mora, P., C. Rouland et J. Renoux, Foraging, nesting and damage caused by Microtermes subhyalinus (Isoptera : Termitidae) in a sugarcane plantation in the Central African Republic. Bull. Entomol. Res. 86: Popov, G., B., G. Mitchell et M. A.Farah, Ethiopia, Report of a Survey on Plant Production, 7 april - 2 may FAO, Rome. 98 pp. Roy-Noël, J., Recherches sur l'écologie des Isoptères de la presqu'île du Cap- Vert (Sénégal). Introduction et première partie : le milieu. Bull. IFAN, 36, ser. A. 2: Roy-Noël, J., L'attaque des arbres par les Termites dans la presqu'île du Cap- Vert (Sénégal). II. - Cas du reboisement sur dunes fixées de Mbao. Bull. IFAN, 44 ser.a. (1-2): Roy-Noël, J. et J. Wane, L'attaque des arbres par les Termites dans la presqu'île du Cap-Vert (Sénégal). I. - Cas du reboisement sur dunes fixées de Malika. Bull. IFAN, 39, ser. A. (1): Tiben, A., M. J. Pearce, T. G. Wood, M. A. Kambal et R. H. Cowie, Damage to crops by Microtermes najdensis (Isoptera, Macrotermitinae) in irrigated semidesert areas of the Red Sea coast. 2. Cotton in the Tokar Delta région of Sudan. Tropical Pest Managment. 36: Wood, T., G.et M. J. Pearce, Termites in Africa : The Environmental Impact of Control Measures and Damage to Crops, Trees, Rangeland and Rural Buildings. Sociobiol. 19:

51 53 Actes Coll. Insectes Sociaux, 11: (1998) INFESTATION DE DIFFÉRENTES CASTES DE TERMITES SUPÉRIEURS PAR DES NÉMATODES ENTOMOPATHOGÈNES - RÔLE DE LA COMPOSITION EN LIPIDES D. BENMOUSSA-HAICHOUR G. REVERSAT 2, C. ROULAND 1 1 Laboratoire d'ecophysiologie des Invertébrés - Université Paris Xll-Val de Marne, avenue du général de Gaulle CRETEIL Cedex. 2 Laboratoire d'ecologie des Sols tropicaux. ORSTOM, Ile de France avenue Voragnat Bondy Cedex 09 Résumé: Différentes castes de termites champignonnistes (Termitidae, Macrotermitinae), ravageurs de culture sucrières au Tchad et au Congo, ont été utilisées d'une part pour tester l'efficacité de trois souches de nématodes entomopathogènes du genre Steinernema et Heterorhabditis et d'autre part pour déterminer les mécanismes de développement du parasite à l'intérieur de son hôte. Des connaissances nouvelles sur la composition biochimique des différentes castes peuvent expliquer que la multiplication des nématodes entomopathogènes ne se réalisent, chez les Macrotermitinae testés, que chez les ailés. Mots clés : Nématodes entomopathogène, lipides, Termite, culture tropicale SENSITIVITY OF THE DIFFERENTS CASTES OF HIGHER TERMITES TO AN INFESTATION WITH ENTOMOPATHOGENIC NEMATODS -ROLE OF THE LIPIDS COMPOSITION Abstract : Workers, soldiers, nymphs and alates from the fungus-growing termites Macrotermitinae which caused damages on tropical crops were used to test the efficiency of 3 strains of entomopathogenic nematodes of généra Heterorhabditis and Steinernema. Recents studies on biochemical composition of différents castes show that the development of entomopathogenic nematodes exists only on the alates. Key words :entomopathogenic nematodes, termite control, lipids, tropical crops INTRODUCTION Les nématodes des genres Heterorhabditis et Steinernema sont des parasites d'insectes édaphiques utilisés en lutte biologique. Le stade infestant de ces nématodes correspond au troisième stade larvaire L3. A ce stade, la larve vit à l'état libre dans le sol et recherche activement un hôte. Une fois l'hôte trouvé, la larve pénètre par un orifice naturel, puis gagne l'hémolymphe; la mort de l'hôte intervient dans les 48 heures après infestation. Une bactérie du genre Xenorhabdus est associée au nématode chez les Steinernema, du genre Photorhabdus chez les Heterorhabditis (Boemare et al, 1993). Cette association joue un rôle très important dans le mécanisme de la pathogénicité envers l'insecte (Laumond et al, 1989).

52 46 Leur efficacité contre plusieurs ravageurs d'importance agronomique a déjà été mise en évidence par différents auteurs (Laumond et ai, 1979 ; Georgis et al, 1982 ; Epsky et Capinera, 1988 ; Mauldin et Beal, 1989) et leur innocuité envers les animaux à sang chaud en font des acteurs de la lutte biologique particulièrement intéressants. Des premiers travaux ont montré que l'infestation d'ailés d'ancistrotermes guineensis et de Pseudacanthotermes spiniger par plusieurs souches de nématodes entomopathogènes entrainait non seulement une forte mortalité de ces derniers mais encore une production de nouvelles larves L3 infestantes (Rouland et al., 1996). Les nématodes peuvent donc effectuer un cycle biologique complet dans un sexué de termites. L'objectif de cette nouvelle étude est de déterminer l'impact des nématodes entomopathogènes sur les différentes castes de termites ainsi que les conditions nécessaires à la réalisation de leur cycle biologique. MATERIEL ET METHODES Origine du matériel : Les essais ont été réalisés sur trois espèces de termites provenant de deux plantations de canne à sucre africaines où sont apparues des pullulations de ces termites ravageurs: - La plantation de la SARIS au Congo où se développe une espèce champignonniste Pseudacanthotermes spiniger. Les nids de cette espèce d'une grande dureté provoquent des casses importantes au niveau des machines de récoltes (Mora, 1992) - Dans la plantation de la SONASUT au Tchad se développent deux espèces: Ancistrotermes guineensis qui consomme les racines de la canne, provoquant ainsi de fortes baisses de rendement (Rouland et al., 1993) et Macrotermes bellicosus qui s'attaque aux boutures lors de la plantation. Les infestations ont été effectuées avec trois souches de nématodes produites sur des larves de Galleria melonella (Lepidoptera, Noctuidae) par le Laboratoire de Biologie des Invertébrés, INRA Antibes, (Laumond et al.,1979) : Steinernema carpocapsae souche Bretonne K27 (France), Steinernema kushidai souche Hamakita E2 (Japon), et Heterorhabditis bacteriophora HP88 (USA). Protocole d'infestation : Les individus des différentes castes (20 ouvriers, 15 soldats, 5 nymphes ou 4 ailés) sont placés dans des boîtes de pétri rondes (d =55 mm) contenant 17g de terre Meaux (type S24) imbibée de 2,4 ml d'eau distillée. Trois types de milieux sont réalisés: Témoin (+ 0,5 ml d'eau distillé ); K27 ( + 0,5ml de solution contenant 780 L3) ; E2 ( + 0,5 ml de solution contenant 555 L3); HP88 (+ 0,5 ml de solution contenant 500 L3 ). Pour chaque catégorie, 10 boîtes sont réalisées. Elles sont maintenues à température ambiante pendant toute la durée de l'expérimentation. Chaque jour, les termites morts sont récoltés, comptés et déposés individuellement dans des tubes à hémolyse dont le fond est remplacé par un disque soudé de toile à tamis en acier inoxydable à maille de 100(1. Chaque tube est ensuite suspendu dans un tube à essai contenant de l'eau distillée jusqu'à une hauteur de 1cm en dessous du tamis. Les nématodes qui ont réalisé un cycle biologique complet dans le termite produisent une nouvelle génération de L3 qui quittent le cadavre de l'insecte, passent à travers le tamis et tombent dans l'eau où ils sédimentent. Tous les 2 jours pendant 2 semaines, les culots des tubes sont comptés.

53 Figure 1 Sensibilité îles différentes castes (/'Ancistrotermes guineensis à l'infestation pur des nématodes entomopatliogènes du genre Steinernema Sensitivity of the différent castes of (Ancistrotermes guineensis to an infestation with entomopathogenic nematodes of généra Steinernema % survie Jours Jours

54 48 Dosage des lipides Les lipides totaux ont été dosés chez les différentes castes du termite Macrotermes bellicosus par la méthode sulfo-phospho-vanillique (Drevon et Schmit, 1964), les termites sont digérés à chaud (100 C) en milieu sulfophosphorique, les lipides développent alors avec la vanilline une coloration rose dosable au spectrophotomètre à une densité optique de 550 nm. Les teneurs mesurées sont exprimées en (ig de lipides totaux par mg de termite. RESULTATS Sensibilité des castes d'ancistrotermes guineensis : ( Fig. 1) Toutes les castes d'a. guineensis se sont révélées sensibles à l'infestation par les 2 souches de nématodes entomopathogènes mais à des degrés divers (Fig. 1). Les nymphes (lb) se sont révélées les moins résistantes puisqu'en 2 jours il n'y a plus que 50% de survivants et qu'en moins de 10 jours, tous les animaux sont morts. Les ouvriers (2c) ont également présenté une mortalité rapide mais on observe une différence significative de sensibilité selon la souche : le temps de L50 est de 5 jours avec la souche E2 alors qu'il est de 10 jours avec la souche K27. Cette même différence se retrouve en fin d'expérimentation, tous les insectes infestés par E2 meurent en moins de 10 jours alors que ceux infestés par K27 survivent jusqu'à plus de 15 jours. Les ailés présentent un taux de mortalité largement supérieur à celui des témoins puisqu'à la fin de l'expérience plus de 60% des témoins sont encore vivants alors que tous les traités sont morts, on peut cependant noter, là aussi, des différences entre les deux souches testées, pour E2 plus de 50% des insectes sont morts en 5 jours, alors qu'il faut plus de 8 jours pour obtenir le même résultat avec K27. En ce qui concerne les soldats, il est difficile de conclure en raison de la rapide mortalité des témoins. Si K27 a un effet létal certain sur les soldats, il n'y a pas de différences significatives entre le taux de mortalité des témoins et celui des soldats infestés par E2. Sensibilité des castes de Pseudacanthotermes spiniger : (Fig.2) Les ouvriers grands et petits ainsi que les grands soldats ont présenté une mortalité extrêmement rapide aussi bien chez les animaux témoin que chez les traités. Seuls les grands ouvriers traités par la souche HP88 présentent une mortalité significativement plus rapide que les témoins. Par contre, les ailés présentent une très grande sensibilité aux différentes souches de nématodes testées. En particulier, les souches E2 et K 27 entraînent la mort de tous les individus en 12 jours. HP 88, bien qu'également efficace, n'induit la mort de tous les sexués qu'après 20 jours. Sensibilité des castes de M. bellicosus : (Fig 3) Chez les grands ouvriers de M. bellicosus (Fig 3a) la mortalité survient 5 jours après infestation avec la souche K27, alors que la mortalité est observée chez E2 après 6 jours d'infestation. Chez les petits ouvriers (Fig 3b) une mortalité rapide après 3 jours d'infestation est observée avec les souches K27 et E2 alors que les témoins présentent 70 % de survie. Les ailés de M. bellicosus (Fig.3c) présentent également une grande sensibilité aux différentes souches testées : en 2 jours tous les individus traités par K27 sont

55 Figure 2 Sensibilité des différentes castes de Pseudacantholermes spiniger à l'infestation par des nématodes entomopathogènes du genre Steinerneiiia et Heterorhabditis Sensitivity oftlie différent castes of Pseudacantholermes spiniger to an infestation with entomopathogenic nematodes of généra Steinerneina and Heterorhabditis % survie % survie % survie % survie

56 50 morts, la souche E2 n'entraine une mortalité totale des ailés que 17 jours après infestation. Production des larves L3 infestantes par les castes neutres : La production de larves n'a été suivi que chez A. guineensis et P. spiniger. Contrairement à ce qui a été observé chez les ailés (Rouland et al., 1996), aucune L3 n'a été produite par les ouvriers ou les soldats, quelle que soit la souche de nématode utilisée. Composition en lipides des différentes castes de M. bellicosus : Castes Lipides fig /mg Ailés 49,6 Ouvriers 15,2 Soldats (grands) 1,24 Tableau 3 : Résultat biochimique chez les différentes castes de Macrotermes bellicosus Biochemistry resuit in the différent castes of Macrotermes bellicosus Les ailés se caractérisent par une teneur en lipide bien supérieure à celles observées dans les deux autres castes : elle est plus de 3 fois supérieure à la teneur des ouvriers et 40 fois plus élevée que celle des soldats. Il existe donc de nette différence d'une caste à l'autre. Ces résultats pourraient être liées à des différences de métabolisme entre les individus, elle même en rapport avec la fonction sociale et la nature de l'alimentation. DISCUSSION ET CONCLUSION Les différentes castes (ouvriers, soldats, nymphes et ailés) se sont révélées extrêmement sensibles aux souches de nématodes entomopathogènes testées. La souche la plus efficace est, dans tous les cas, Steinernema kushidai (E2), souche d'origine japonaise dont on peut supposer qu'elle s'adapte mieux aux températures élevées rencontrées en Afrique. Un résultat original de ce travail est de montrer qu'aucune production de L3 n'est obtenue après infestation des ouvriers et des soldats aussi bien par Steinernema kushidai que par S. carpocapsae alors que ces deux espèces entrainent une forte production de L3 chez les ailés (Rouland et al., 1996). Les deux souches de nématodes étudiées sont donc incapables d'effectuer un cycle biologique complet dans un termite ouvriers ou soldats, ce qui est en accord avec les observations de Mauldin et al. (1989) sur Reticulitermes spp. Les deux souches de nématodes entomopathogènes testées ne peuvent donc réaliser un cycle biologique complet que chez les sexués. Ces sexués se distinguent nettement des autres castes par leur forte teneur en lipides or Bonifassi et Neves (1990) signalent que la présence de lipides est un des facteurs indispensables au développement du nématode entomopathogène dans son hôte. Chez les ailés, la quantité de lipides largement supérieure à celles des autres castes peut expliquer la multiplication et le développement important des nématodes à l'intérieur de l'hôte.

57 Figure 3 Sensibilité des différentes castes de Macrotermes bellicosus à l'infestalion par des nématodes entomopathogènes du genre Steinernema et Heterorhabditis Sensitivity of tlie différent castes of Macrotermes bellicosus to an infestation with entomopathogenic nematodes of généra Steinernema and Heterorhabditis % de survie Grands ouvriers b : petits Ouvriers Jours

58 52 Ces travaux montrent que cette nouvelle technique de lutte contre les termites est particulièrement prometteuse. En effet, comme d'une part les castes se sont toutes révélées sensibles à l'infestation et que, d'autre part les sexués permettent une multiplication des nématodes, un seul traitement effectué au moment des essaimages permettrait de maintenir dans le sol une quantité de nématodes suffisante pour limiter le développement de l'ensemble de la colonie Remerciements : Nous tenons à remercier très vivement Mr C. Laumond du laboratoire de Biologie des Invertébrés (INRA - Antibes) pour nous avoir fourni les différentes souches de nématodes testées. RÉFÉRENCES Boemare, N. E., Akhurst, R. J. and R.G. Mourant, DNA Relatedness between Xenorhabdus spp. (Enterobacteriaceae), symbiotic bacteria of entomopatogenic nematodes, and a proposai to transfer Xenorhabdus luminescens to new genus, Photorhabdus gen. nov. Int. J. Syst. Bacteriol, 43 : Bonifassi, E., and J. Neves, La production de masse des nématodes entomopathogènes : Steinernematidae et Heterorhabditidae. Rencontres Caraïbes en Lutte Biologique 58: Drevon, B. and J.M. Schmit, La réaction sulphophosphovanillique dans l'étude des lipides sériques. Bull. Trav. Soc. Pharm. Lyon., 8 : Epsky, N. D. and J. L. Capirena, Efficacy of the entomogenous Nematode Steinernema feltiae against a subterranean termite, Reticulitermes tibialis ( Isoptera : Rhinotermitidae). J.Econ.Entomol. Soc. Am Georgis, R., Poinar, G.O. and A.P. Wilson, Susceptibility of strawberry root weevil Otiorrhynchus sulcatus to neoaplectanid and heterorhabditid nematodes. IRC S Med. Science 10 : 442. Laumond, C., Mauleon, H. and A. Kermarrec, Données nouvelles sur le spectre d'hôtes et le parasitisme du nématode entomophage Neoaplectana carpocapsae. Entomophaga 24 : Laumond, C., Simoes N. and N. Boemare, Toxines de nématodes entomoparasites. Pathogénecité de Steinernema carpocapsae. Perspectives d'application en génie génétique.c. R. Acad. Agric. Fr. 75 : Mauldin, J. K. and R.H. Beal, Entomogenous nematodes for control of subterranean termites, Reticulitermes spp. (Isoptera : Rhinotermitidae). J. Econo. Entomol., 82 : Mora, P., Dégâts des termites champignonnistes (Macroterminae) Pseudacanthotermes spiniger et Microtermes subhyalinus dans les plantations de canne à sucre.mise au point d'une lutte spécifique.7vtè.çe d'université Paris XII 176 p. Rouland, C., Ikouane, A. and N. Nayalta, Etude biologique des populations à'ancistrotermes guineensis présentes dans les plantations de la SONASUT.(SAHR - Tchad) Actes coll. Insectes sociaux, 8 : Rouland, C., Benmoussa, D., Reversât, G. and C. Laumond, Etude de la sensibilité de sexués de termites Macrotermitinae à une infestation par les nématodes entomopathogènes des genres Heterorhabditis et Steinernema. C. R. Acad. Sci. Paris, Sciences de la vie, 1996 ; 319 :

59 53 Actes Coll. Insectes Sociaux, 11: (1998) EXTRACTION ET PURIFICATION D'ADN DE TERMITIERES, PRESENCE D'ADN BACTERIEN HARRY M., JUSSEAUME N., GAMBIER B. et GARNIER-SILLAM E. Laboratoire de Biologie des Sols et des Eaux, Université Paris XII-Val de Marne 61, av. du Général de Gaulle, Créteil, France Résumé. De nombreuses études ont montré que dans les écosystèmes tropicaux, les termites contribuent de façon significative aux différents processus de dégradation de la matière organique et modifient les propriétés physiques et chimiques des sols. En revanche, leur action sur les micro-organismes du sol a été très peu étudiée. En effet, les méthodes traditionnelles ne permettent la mise en évidence que d'une faible fraction de la biomasse microbienne totale. Avec l'essor des techniques moléculaires, des macromolécules informatives comme l'adn deviennent accessibles sans qu'il soit nécessaire d'isoler ou de cultiver des cellules bactériennes. Une étape critique de notre travail a été la mise au point d'une méthode efficace d'extraction et de purification d'adn des termitières, préalable nécessaire à toute étude moléculaire reposant sur l'emploi de la PCR (Polymerase Chain Reaction). En effet, les propriétés physiques et chimiques des termitières notamment d'humivores, à savoir une texture argileuse et de forts taux en matières organiques et en acides humiques, sont très défavorables à un bon rendement d'extraction et de purification d'adn. Différentes constructions d'espèces de termites de régimes trophiques différents (espèces humivores : Cubitermes subarquatus, Thoracotermes macrothorax, Noditermes lamanianus, Procubitermes niapuensis, espèce champignonniste : Odontotermes sp.) ont été soumises à l'analyse. La quantité d'adn extrait des termitières d'humivores est significativement plus importante que celle extraite des sols témoins. L'utilisation de la PCR a permis de mettre en évidence la présence d'adn bactérien au sein de toutes les constructions. Mots clés. Termitières, humivores, champignonnistes, ADN, bactéries, PCR Abstract. In tropical ecosystems, termite activities induce changes in the chemical and physical properties of soils. The question then arises as to whether or not termites affect the presence of natural microbial communities. Several reports have pointed out the difficulty of recovering bacteria from natural environments by traditional methods of cell cuhivation, only a small fraction of the total microbial biomass being cultivable. With the advances in molecular technologies, informative macromolecules like DNA become accessible without requiring any prior cell isolation or cultivation. A critical step was to develop an efficient method for extracting and purifying DNA from termite mounds, a prerequisite for any molecular study using PCR (Polymerase Chain Reaction). In fact, chemical and physical properties of the termite mounds especially that of soil-feeders (i.e., clay-like texture, high organic carbon and humic acid contents) critically impede good DNA recovery and purification. A diversity of mounds of various trophic group termites (soil-feeders : Cubitermes subarquatus, Thoracotermes macrothorax,

60 54 Noditermes lamanianus, Procubitermes niapuensis; fùngus-growers : Odontotermes sp.) was submitted to the analysis. DNA recovery was significantly higher in soil-feeder mounds than in control soils. Using spécifié amplification (PCR) the presence of bacteria was assessed in ail the constructions studied. Key words. Termite mounds, soil-feeders, fungus-growers, DNA, bacteria, PCR INTRODUCTION De nombreuses études ont montré que dans les systèmes tropicaux, les isoptères contribuent de façon significative aux différents processus de dégradation de la matière organique et modifient les propriétés physiques et chimiques des sols (Lee & Wood, 1971 ; Lobry de Bruyn & Conacher, 1990 ; Garnier-Sfflam & Harry, 1995). En revanche, leur action sur les micro-organismes du sol a été très peu étudiée. Quelques auteurs ont estimé les populations microbiennes des nids de termitières de champignonnistes à l'aide de méthodes de culture (Meiklejohn, 1965 ; Keya et al., 1982). Mais, ces méthodes traditionnelles ne permettent la mise en évidence que d'une faible fraction de la biomasse microbienne totale, estimée par différents auteurs comme étant de l'ordre de 0,01 à 10 % (Atlas & Barta, 1993). Avec l'essor des techniques moléculaires, des macromolécules informatives comme l'adn deviennent accessibles sans qu'il soit nécessaire d'isoler ou de cultiver des cellules bactériennes. Aussi, dans cette étude avons-nous cherché à évaluer l'utilisation de techniques moléculaires reposant sur l'extraction d'adn, puis sur l'amplification spécifique d'adn 16S bactérien afin d'attester la présence de bactéries au sein de nids d'espèces de termites ayant des régimes trophiques différents (Harry et al., a soumis). Notre étude a porté sur les termitières de quatre espèces de teimites humivores, Cubitermes subarquatus, Thoracotermes macrothorax, Noditermes lamanianus, Procubitermes niapuensis, et d'une espèce champignonniste, Odontotermes sp.. Une étape critique a été la mise au point d'une méthode efficace d'extraction et de purification d'adn des termitières dont les propriétés physiques et chimiques, à savoir une texture argileuse et de forts taux en matières organiques et en acides humiques, sont très défavorables à un bon rendement d'extraction et de purification d'adn. MATERIEL ET METHODES Site d'étude et échantillonnage L'étude s'est déroulée dans le bassin versant élémentaire de Nsimi-Zoetele au Sud-Cameroun. Ce bassin versant appartient au réseau hydrographique du fleuve Nyong dont le cours est situé en forêt tropicale humide entre les latitudes 2 48'N et 4 32'N. L'échantillonnage a été effectué sur les nids de cinq espèces de termites à raison de deux nids par espèce. Cubitermes subarquatus, SJÔSTEDT, érige un nid constitué de " demi-chapeaux " empilés les uns sur les autres et appliqués contre le tronc de grands arbres, qui peut atteindre plus de 2,5 mètres de hauteur. Thoracotermes macrothorax, WASMANN,

61 55 construit son nid, semble t-il, avec les mêmes matériaux que Cubitermes mais sa muraille est phis épaisse. Le nid, qui ne s'appuie pas à un tronc, présente une forme cylindrique. Sa surface extérieure se montre très régulièrement mamelonnée avec un aspect de pastilles juxtaposées. Procubitermes niapuensis, SILVESTR1, présente un nid plaqué contre le tronc de grands arbres. Il se compose d'une série de constructions en forme de gourdes (4-10 cm), plus ou moins imbriquées les unes dans les autres. De l'ensemble des gourdes partent une ou plusieurs grosses galeries-tunnels qui descendent vers le sol où elles entrent en rapport avec le réseau hypogé de la périécie. Noditermes lamanianus, SJÔSTEDT, érige un nid en forme de pagode. Sa base se compose d'une ou de deux outres surmontées d'une outre plus volumineuse se terminant en cône aigu. Le matériau utilisé est de la terre peu consistante, probablement mêlée à un peu de salive. Les nids se trouvent presque toujours au pied d'un arbre, parfois contre lui. Ces quatre espèces de termites humivores (Termitinae) consomment de l'humus et incorporent leurs fèces dans leur construction en quantité variable selon les espèces. Odontotermes sp., HOLMGREN, construit un nid s'ouvrant à l'extérieur par un ensemble de cheminées. Les cavités des cheminées se continuent dans la profondeur du nid où elles se ramifient et convergent vers une région située à plus d'un mètre au dessous de la surface du sol. Cette espèce de termite champignonniste (Macrotermitinae) développe une exosymbiose particulière avec un champignon du genre Termitomyces pour dégrader le matériel végétal. Le nid est construit avec des particules fines du sol cimentées par de la salive. Les fèces ne sont pas incorporées mais déposées sur les planchers des constructions. Des sols ne présentant pas d'activité tennitique notable au moment du prélèvement ont été désignés comme sols témoins et cinq strates ont été échantillonnées (0-2, 2-5, 5-20, 20-30, cm). Soulignons, cependant, qu'en Afrique, la notion de sol témoin est relative. En effet, il est peu probable que les sols choisis aient été totalement exempts d'une bioperturbation au cours du temps. Dans notre étude, la strate 2-5 cm est utilisée comme référence des communautés bactériennes du sol. Sols ensemencés Afin d'évaluer l'efficacité de la méthode d'extraction utilisée, différents sols stériles ont été inoculés par une suspension bactérienne d'escherichia coli (Pharmacia - souche NM 522) de concentration connue. Deux strates du sol témoin (A2 : 2-5 cm; A6 : cm) présentant une texture et des taux de carbone organique et d'acides humiques différenciés ont été utilisés. Caractéristiques physiques et chimiques des sols et des termitières Pour chaque échantillon (sols et termitières) des analyses pédologiques classiques ont été réalisées notamment, la texture en cinq fractions granulométriques, la teneur en carbone et en azote, et la distibution des substances humiques selon les méthodes décrites dans Garnier-Sillam et al., Extraction et purification d'adn Deux méthodes principales d'extraction d'adn du sol ont été décrites. La première méthode décrite par Holben et al. (1988) repose sur l'isolement des cellules bactériennes du sol puis sur l'extraction de leur ADN après une étape de lyse cellulaire. La seconde, développée par Ogram et al. (1987), repose sur une lyse directe des cellules bactériennes sans isolement préalable des cellules. Différents protocoles d'extraction et

62 56 de purification ont été testés afin d'établir un protocole adapté à l'extraction d'adn de termitière. La qualité de l'adn extrait est vérifié après electrophorèse sur gel d'agarose 1% sous U.V. après immersion 10 min dans un solution de Bromure d'ethidium (1%). Amplification spécifique d'adn 16 ribosomique bactérien La PCR permet d'obtenir un très grand nombre de copies d'un segment particulier d'adn et repose sur l'utilisation de deux amorces, courtes séquences d'adn (18-24 nucléotides). Ces amorces s'hybrident à des sites complémentaires de l'adn du génome ciblé qui encadrent la région que l'on veut amplifier. Les conditions d'amplification d'adn 16S ribosomique bactérien sont décrites dans Harry et al. (a soumis). Les produits d'amplification sont analysés sur gel d'agarose. RESULTATS ET DISCUSSION Caractéristiques physiques et chimiques des sols témoins et des termitières étudiées Les principales caractéristiques physiques et chimiques des échantillons étudiés sont reportées dans le tableau 1. On notera que dans les termitières d'humivores les taux de carbone organique sont 2,6 à 4,3 fois plus élévés que ceux relevés dans les termitières de champignonnistes et 2,8 à 1,7 fois plus élévés que ceux des sols témoins. De même, pour les termitières étudiées, les taux d'acides humiques sont plus importants dans les termitières d'humivores que dans celles des champignonnistes. Extraction d'adn de sols et de termitières La méthode d'extraction par " lyse directe " a été retenue dans notre étude car elle permet d'obtenir un meilleur rendement d'adn extrait, celui-ci étant par ailleurs plus représentatif de l'échantillon global. Le protocole général d'extraction est présenté dans la figure 1. Les échantillons de sols et de muraille de termitières sont soumis à une solution de lyse contenant du lysozyme, de la protéinase k et du sodium dodecyl sulfate. La précipitation des protéines est réalisée à haute force ionique par ajout de NaCl. Après lavage, l'adn est précipité à l'éthanol absolu, séché, et repris dans de l'eau ultrapure. Les protocoles d'extraction incluant l'emploi de billes de verre ou des méthodes de sonication ont été écartés car ils présentent le défaut de fragmenter l'adn (Ogram et al. 1987). L'ADN natif obtenu après extraction, vérifié sur gel d'agarose, n'est pas fragmenté et présente un poids moléculaire supérieur à 23kb. Le rendement d'adn extrait estimé à partir de l'extraction de sols ensemencés est de 70 à 90% selon la nature du sol. L'ADN du sol A6 plus riche en argile est plus difficile à extaire (Figure 2). Les quantités de l'adn extrait sont en moyenne de ± ig/g de termitière sèche, les termitières de C. subarquatus étant les plus riches en ADN (17.53±7.42 jg/g) et celles de P. niapuertsis les moins riches (8.67 ± 3.3jrg/g). Les murailles de termitières d'humivores présentent selon les espèces de 1,5 à 3,5 fois plus d'adn que les sols témoins et celles des champignonnistes 1,5 fois plus. Purification d'adn de sols et de termitières Lors de la lyse directe, des composés «contaminants», comme les substances humiques et les ions métalliques, sont co-extraits. Ces composés constituent un obstacle majeur à l'utilisation de la PCR car ils inhibent la Taq polymérase en chélatant les ions Mg 2+ nécessaires à son fonctionnement ou empêchent l'hybridation des amorces (Tsai & Oison, 1992). De nombreux auteurs se sont heurtés à la difficulté de purification de

63 ADN purifié Figure 1 : Protocole d'extraction et de purification d'adn de sols et de termitières (SDS : Sodium dodecyl sidfate ; SH : Substances humiquesj Melhod used for extracting andpurifying DNA from soils and termite mounds.

64 Tableau 1 : Caractéristiques physiques et chimiques des sols témoins et des termitières étudiées, COT (Carbone Organique Total), CEC (Capacité d'echange Cationique), AH (Acides Humiques). Chemical and physical characteritics of control soils and termite mounds. Termitières Termitières Termitières Termitières Termitières Sol Sol Odontotermes C. T. P. N. témoin témoin sp. subarquatus macrothorax niapuensis tamanianus A2 (2-5 cm) A6 ( cm) ph eau 4,5 ± 0,0 5,8 ±0,2 6,00 ± 0,3 6,1 5,4 4,7 ± 0,2 4,8 Argiles 63,1 ±2,4 61,0 ±0,5 56,0 ± 1, ,3 46,9 ± 2,4 67,2 (%) COT 12,5 ± 3,0 44,6 ± 6,5 32,7 ± 1,5 45,1 53,4 18,8 ± 1,2 9.1 NOT 1,4 ± 0,2 4,4 ± 0,2 3,3 ± 0,3 4,21 5,4 1,7 5,76 CEC 4,6 ± 0,1 12,5 ± 0,1 9,2 ± 1,15 7,5 21,8 5,6 ± 0,5 3.3 (cmol + / kg) AH 1,8 ±0,15 6,5 ± 0,9 4,7 ± 0, ,67 ± 0, (mgc/g) S0IA6 M Sol A2 M Figure 2 : Electrophorèse sur gel d'agarose : ADNs natifs extraits de sols ensemencés (E. coli). M= marqueur de taille (X Hind III digest) Electrophoresis on agarose gel. Native DNA extracted from seeded soils (E. coli). M= Marker (A. Hind III digest)

65 l'adn extrait du sol. Trois méthodes principales de purification peuvent être distinguées: les gradients de chlorure de césium, les méthodes électrophorétiques et les méthodes chromatographiques. Les techniques de purification sur gradient de chlorure de césium n'ont pas été retenues dans notre étude car elles sont longues et fastidieuses et ne sont pas toujours suffisantes à elles seules pour obtenir un ADN assez purifié pour être amplifié (Ogram et al., 1987). En revanche, nous avons testé différentes méthodes électrophorétiques et chromatographiques. Il apparaît pour nos échantillons que seule une méthode reposant sur la combinaison d'une purification sur gel d'agarose et d'une purification sur mini-colonne permet l'élimination complète des contaminants (Harry et al., b soumis). Le traitement préalable des échantillons aux solvants organiques facilite les étapes de purification. L'obtention d'une amplification spécifique de la région ribosomique 16S de l'adn d'escherichia coli (ADNr 16S), lorsque les sols ensemencés sont soumis à la réaction de PCR, atteste de l'efficacité de la double méthode de purification utilisée. Amplification spécifique ADN ribosomique 16S La méthode de purification utilisée apparaît d'autant plus efficace que des amplifications bactériennes spécifiques (ADNr 16S) ont été obtenues à partir d'adn extrait de termitières d'humivores comme celles C. subarquatus particulièrement riches en acides humiques. Deux précédentes études avaient déjà souligné les fortes teneurs en acides humiques des termitières d'humivores (Garnier-Sillam et al, 1989; Garnier-Sillam & Harry, 1995). L'obtention d'amplifications spécifiques de la région ribosomique 16S bactérienne dans tous les échantillons soumis à l'analyse atteste la présence de bactéries au sein des murailles de termitières d'humivores et de champignonnistes étudiées (Harry et al., a soumis). La PCR apparaît comme un outil adapté pour détecter la présence de bactéries dans les matériaux très particuliers que constituent les termitières. Si cette technique est utilisé pour la première fois, dans nos études sur de l'adn extrait de termitières, différentes travaux reposant sur l'emploi de la PCR ont permis l'établissement de phylogénies de bactéries du sol après séquençage de la région de l'adn ribosomal 16S (Stackebrandt et al., 1993 ; Borneman & Triplett, 1997). De telles applications constituent la suite de nos études. CONCLUSION Une étape critique de notre étude a été la mise au point d'une méthode efficace d'extraction et de purification des ADNs présents au sein de différentes termitières afin d'utiliser des outils moléculaires permettant l'analyse génétique de leurs communautés microbiennes. Les amplifications spécifiques d'adnr 16S bactérien attestent la présence de bactéries au sein des termitières d'humivores et de champignonnistes étudiées. La plus grande quantité d'adn observée dans les termitières par rapport aux sols témoins s'explique d'une part, pour les termitières d'humivores par l'incorporation de fèces générant un environnement favorable au développement ou au maintien de microorganismes, d'autre part pour les termitières de champignonnistes par la présence de carbone facilement dégradable apporté par la salive des termites qui sert de ciment aux constructions. Ces résultats sont à mettre en relation avec les comportements trophiques et constructeurs des termites qui en modifiant les conditions physiques et chimiques de leurs termitières y induisent, par conséquent, des modifications microbiennes.

66 REFERENCES Atlas, R.M. and R Bartha, Microbial ecology, fundamentals and applications. Third Edition. Benjamin/Cummings Publishing Company, Inc., New York, Borneman, J. and E.W.Triplett, Molecular microbial diversity in soils from eastern Amazonia : evidence for unusual microorganisms and microbial population shifis associated with deforestation. Appl. Environ. Microbiol. 63 : Garnier-Sillam, E., J. Renoux and F. Toutain, Les composés humiques des termitières de Thoracotermes macrothorax (humivore) et de Macrotermes mulleri (champignonniste). Soi! biol. Biochem. 21 : Garnier-Sillam, E., C. Decayeux, C. Longuemare, J. M. Bouchy & M. Harry, Distribution des composés humiques le long de deux profils sédimentaires continentaux. Annales de Limnologie, 30, Garnier-Sillam, E. and M. Harry, Distribution of humic compounds in mounds of some soil-feeding termite species of tropical rainforests : its influence on soil structure stability. 1ns Soc. 42 : Harry, M., B. Gambier and E. Garnier-Sillam (b). How removed humic substances for purifying DNA extracted from soils and termite mounds for polymerase chain reaction applications. Soumis Harry, M., N. Jusseaume, B. Gambier and E. Garnier-Sillam (a). Molecular analysis of microbial communities in mounds of some tropical soil-feeding and fungus-growing termite species. Soumis. Holben, W.E., J.K Jansson, B.KChelm and J.M.Tiedje, DNA Probe method for the détection of spécifié microorganisms in the soil bacterial community. Appl. Environ. Microbiol. 54 : Keya, S.O., N.K Mureria, and M.A. Arshad, Population dynamics of soil microorganisms in relation to proximity of termite mounds in Kenya. J. Arid Environ. 5: Lee, KE and T.G.Wood, Physical and chemical effects on soils of some Australian termites, and their pedological significance. Pedologia 2 : Lobry de Bruyn, L.A., and A.J. Conacher, The rôle of termites and ants in soil modification : a review. Aust. J. Soil Res. 28 : Meiklejohn, J., Microbiological studies on large termite mounds. Rhod. Zamb. Mal. J. Agric. Res. 3 : Ogram A., G.S. Sayler and T. Barclay, The extraction and purification of microbial DNA from sediments. J. Microbiol. Meth. 7: Stackebrandt E., W. Liesack and B.M. Goebel, Bacterial diversity in soil sample from a subtropical Australian environment as determined by 16S rdna analysis. The FASEB Journal, 7, Tsai, Y. and B.H. Oison, Rapid method for séparation of bacterial DNA from humic substances in sediments for polymerase chain reaction. Appl. Environ. Microbiol. 58:

67 103 Actes Coll. Insectes Sociaux, 11: (1998) CROISSANCE COMPAREE DU RAYGRASS D'ITALIE (LOLIUMITALICUM) SUR MATÉRIAUX TERMITIQUES Marc LACHAUD 1, Evelyne GARNIER-SILLAMPhilippe LOUGUET 2 & Daniel LAFFRAY 2. 1 Laboratoire de Biologie des Sols et des Eaux 1 Laboratoire de Physiologie Végétale Université Paris 12-Val de Marne av du G" 1 de Gaulle Fr.-940I0 Créteil Cedex Résumé. La fertilité des sols tropicaux dépend fortement de l'action des termites. Afin d'évaluer cet impact, dans cette approche préliminaire, nous avons étudié et comparé la croissance du ray-grass d'italie sur substrat de base, pauvre en nutriments minéraux, enrichi ou non en murailles de termitières de Cubitermes subarquatus ou de Macrotermes bellicosus. Cette étude a mis en évidence l'existence de facteurs limitant la croissance. Les diagnostics foliaires ont été mis en relation avec la croissance montrant ainsi que seuls les individus cultivés sur un sol enrichi en termitières de C. subarquatus n'étaient pas carencés en azote. De plus, les acides fulviques, riches en azote total, sont fortement représentés dans la termitière de C. subarquatus. L'hypothèse d'une minéralisation préférentielle de ces acides fulviques a donc été formulée, afin d'expliquer l'apport supérieur en azote de la termitière de C. subarquatus. Mots-clés. Sol, ray-grass, termite, nutrition minérale, croissance. Abstract. Compared growth of italian ryegrass (Lolium italicum) on termitic material. The fertility of tropical soils is closely related to the action of termites. During this first approach and in order to evaluate this impact, we studied and compared the growth of ryegrass on a médium, with a poor minerai nutrient content, enriched or not with termite mounds of Cubitermes subarquatus or Macrotermes bellicosus. The study of these termite mounds impact on the ryegrass growth allowed us to underline the existence of limiting factors. The foliar analysis, related to the ryegrass growth, revealed that only plants grown on a soil enriched with C. subarquatus mounds were not nitrogen deficient. Furthermore, the fulvic acids, rich in total nitrogen, showed high contents in the C. subarquatus mounds. The hypothesis that a preferential mineralization of these fulvic acids was therefore postulated, explaining the higher nitrogen input by the C. subarquatus mounds. Key words. Soil, ryegrass, termite, minerai nutrition, growth.

68 INTRODUCTION Le problème de la fertilité des sols tropicaux représente une préoccupation environnementale et économique majeure à l'échelle mondiale. Etant l'un des facteurs limitants essentiels de la production, la fertilité de ces sols constitue un thème de recherche fondamentale autant qu'appliquée. Les termites, qui constituent la plus forte biomasse du sol dans ces milieux sont un modèle particulièrement intéressant et original pour étudier leur action sur les sols. Généralement, seuls les aspects négatifs de l'impact des termites sur l'écosystème ont été étudiés. Ceux-ci sont en effet très importants. Néanmoins, quelques observations sur le terrain ont permis de mettre en évidence un effet positif de la présence de termitières sur la croissance végétale (Hesse, 1955, Lee and Wood 1971, Watson 1976). Il faut cependant rappeler que cette influence est connue depuis longtemps des fermiers africains. Seulement, une analyse fine des mécanismes de l'action des termites sur la fertilité n'a jamais été totalement réalisée. Les observations faites sur le terrain nous confortent dans l'idée qu'une meilleure connaissance des interactions sol-termite-plante est susceptible d'apporter des informations intéressantes pour l'amélioration durable de la fertilité des sols cultivés en milieux tropicaux. Deux facteurs principaux limitent la production végétale en milieu tropical, l'eau à travers le caractère aléatoire des précipitations et les carences et toxicités minérales. Au cours de cette étude, nous nous sommes affranchis du facteur eau, pour n'étudier que les seuls facteurs liés à la nutrition minérale. Afin d'avoir une meilleure compréhension des apports de la termitière à la plante et d'identifier quel est le poids relatif des contraintes minérales du milieu, nous nous sommes attachés à tester plusieurs types de matériaux termitiques. Origine du matériau termitique MATERIELS ET METHODES Les termitières de C. subarquatus (termite humivore) proviennent du bassin versant de Nsimi-Zoetele (sud Cameroun) et celle de M. bellicosus (termite champignonniste) d'une parcelle plantée en palmiers Rôniers (Borassus aethiopum) de la région de Maroua (nord Cameroun). Pour chaque site d'étude, des sols témoins, ne présentant pas d'activité termitique lors du prélèvement ont également été échantillonnés. Cubitermes subarquatus, SJÔSTEDT, construit un nid constitué de " demi-chapeaux " empilés les uns sur les autres, appliqués contre le tronc de grands arbres et qui peut atteindre plus de 2,5 mètres de hauteur. Ce termite humivore (Termitinae) consomme de l'humus et incorpore ses fèces dans ses constructions. La termitière de l'espèce de Macrotermes échantillonnée présente un nid épigé d'environ lm en forme de dôme. Cette espèce de termite champignonniste (Macrotermitinae), développe une exosymbiose particulière avec un champignon du genre Termitomyces pour dégrader le matériel végétal. Le nid est construit avec des particules fines du sol cimentées par de la salive. Les fèces ne sont pas incorporées mais déposées sur les planchers des constructions.

69 Origine du matériel végétal et méthodes d'analyse Choix du matériel végétal Le matériel végétal utilisé pour cette étude est le ray-grass d'italie (Lolium italicum, variété Tiara). Ce choix repose sur le fait que cette espèce a été déjà très largement utilisée dans la littérature pour l'étude des effets de carences minérales (Marschner, 1995). Par ailleurs, cette espèce présente un certain nombre d'avantages (semences génétiquement homogènes et fixées, surface occupée pour sa culture en conditions contrôlées de faible dimension, croissance rapide). Conditions de culture 40 semences de ray-grass ont été plantées par pot, celles ci sont régulièrement espacées. Les plantes ont été cultivées en conditions contrôlées dans des enceintes phytotroniques (intensité d'éclairement : 250 (imol.m^.s" 1 ', cycle jour/nuit : 16H /8H, température jour/nuit : 25720, Humidité Relative jour/nuit : 30/60 % ). Les biomasses foliaires et racinaires ont été déterminées après 20 et 40 jours. Les teneurs en azote, phosphore et potassium totaux ont été mesurées sur les parties aériennes. Le substrat de base est composé d'un mélange de kaolin (20%), sable fin (40%) et de sable grossier (40%), autoclavé. Nous avons mélangé ce substrat avec des murailles issues de termitières différentes. Pour permettre la comparaison des croissances dans chaque série, nous avons choisi d'apporter des quantités de Carbone Organique Total (COT) comparables. Deux séries ont été menées, la première série de pots a reçu un apport en COT d'environ 900mg par pot (1 dose), la seconde a reçu un apport en COT d'environ 1800 mg par pot. RESULTATS et DISCUSSION Caractéristiques chimiques des murailles de termitières Muraille de C. subarquatus STSC 2-5 cm STSC 5-20 cm Muraille de M. bellicosus ST NC 5-12 cm ST NC cm 2 cations ± CEC (cmol+/ka) COT (mg/g) NOT (mg/g) 12.5 ± ± ± ± ± tab. I : 2 étions : Somme des cations échangeables, CEC : Capacité d'echange Cationique, COT : Carbone Organique Total, NOT : Azote Organique Total (ST : Sol Témoin, SC : Sud Cameroun, NC : Nord Cameroun) tab. 1 : 2 canons : Sum of exchangeable cations, CEC : Cationic Exchange Capacity, COT : Total Organic Carbon, NOT : Total Organic Nitrogen (ST : Standard Soil, SC : South Cameroun, NC : North Cameroun)

70 Les analyses des murailles de termitières peuvent être comparées à celles des sols témoins de la région dont elles sont issues (tab. 1). Le nid de C. subarquatus présente une CEC et un taux de carbone organique fortement supérieurs à ceux du sol témoin. En revanche, l'inverse est observé pour le nid de M. bellicosus. Ces données sont en totale congruence avec celles obtenues par de nombreux auteurs concernant l'action des termites humivores et champignonnistes sur les propriétés chimiques du sol (Lee & Wood, 1971 ; Lobry de Bruyn & Conacher, 1990 ; Garnier-Sillam & Harry, 1995). Dans notre étude, les différences observées dans les compositions organiques et minérales selon le type de termitière étudié justifie l'étude comparative de leurs effets sur la croissance végétale. Comparaison de la croissance des parties aériennes et souterraines du ray-grass Nous présentons, par souci de clarté, les résultats où seule une dose de termitière a été apportée (fig. 1). Après 40 jours de croissance, on observe que l'augmentation de la biomasse foliaire du ray-grass cultivé sur un sol enrichi en nid de C. subarquatus est plus importante que pour les autres apports, à la différence des racines. En outre, la croissance foliaire apparaît continue pour le ray-grass cultivé sur sol enrichi en nid de C. subarquatus. En revanche, la croissance foliaire est pratiquement arrêtée, dès 20 jours, dans le cas du ray-grass cultivé sur sol enrichi en nid de M. bellicosus. Afin de tester l'hypothèse d'une carence ou d'une toxicité minérale, une analyse foliaire des teneurs en éléments minéraux a été réalisée. De plus, des essais de croissance sur des sols normalement enrichis ont été menés, avec des conditions environnementales plus favorables. Les résultats ont mis en évidence que la croissance foliaire était beaucoup plus élevée après 40 jours (2,16g). Etude comparée des taux et quantités d'éléments minéraux des feuilles du raygrass Nous avons indiqué les gammes de valeurs considérées comme adéquates pour la croissance, selon Bergmann (1988, 1992) (tab. 2a).Le tableau 2b regroupe les taux des principaux éléments minéraux totaux foliaires. On remarque que les taux foliaires du phosphore sont situés dans la gamme proposée par Bergmann (1988, 1992). Nous pouvons limiter notre discussion à l'étude de l'azote. Pour cet élément en particulier, les variations selon la termitière utilisée sont les plus nettes. Selon Bergmann (1988, 1992), le taux d'azote foliaire permettant une croissance optimale de la plante varie entre 3 et 4,2% du poids sec. L'apport en nid de C. subarquatus est à l'origine d'un taux élevé d'azote, supérieur à 4%. En revanche, ce taux est toujours inférieur dans le cas d'un apport en nids de M. bellicosus. On peut émettre l'hypothèse que l'azote serait le facteur limitant principal au développement des parties aériennes dans le cas d'un apport en nid de M. bellicosus. L'azote est présent en quantité optimale dans les feuilles de ray-grass cultivées sur un sol ayant reçu un apport de termitière de C. subarquatus, dans nos conditions expérimentales. S'il existe une carence azotée, on sait classiquement que la croissance foliaire est davantage inhibée que la croissance racinaire. L'étude du rapport Biomasse Foliaire/Biomasse Racinaire permet de conforter cette hypothèse.

71 Apport en nid de Cubi H Apport en nid de Macro Témoin Feuilles (mg) Racines (mg) fig. 1 : Poids moyens foliaire et racinaire, après 40 jours, d'un plant de ray-grass cultivé sur un substrat enrichi ou non avec 1 dose de différents nids. Nombre de répétition : 3. fig. J : Average shoot and root weights, after 40 days, of a ryegrass plant cultivated on a poor médium enriched or not by 1 dose of différent nests. Number of répétition : 3. Apport en nid de Cubi H Apport en nid de Nasuti Témoin fig. 2 : Rapports des Biomasses Folaires (B.F.) sur les Biomasses Racinaires (B.R.) du ray-grass en fonction des divers substrats. Nombre de répétition : 3. fig. 2 : Ratios of Shoot Biomass (B.F.) on Root Biomass (B.R.) of ryegrass according to différent médiums. Number of répétition : 3.

72 (%P.S.) N P K Feuilles ray-grass 3,0-4,2 0,35-0,5 2,5-3,5 tab. 2a : Taux des éléments foliaires tab. 2a : Foliar elements rates 20j ld termitière C. subarquatus 4,6 0,78 4,79 40j ld termitière C. subarquatus 4,09 0,46 5,25 40j 2d termitière C. subarquatus , j ld termitière Ai bellicosus 2,84 0,89 3,02 40 j témoin tab. 2b.Taux des éléments foliaires après 20 et 40 jours en fonction des apports en termitière (Id : 1 dose ; 2d : 2 doses, %P.S. : Pourcentage du poids de Matière Sèche). Nombre de répétitions : 3. tab. 2b : Foliar elements rates after 20 and 40 days according to différents inputs of nests (%P.S. : Pourcentage of Dry Matter Weight). Number of répétition : 3. Rapport Biomasse Foliaire/Biomasse Racinaire (B.F./B.R.) Dans le cas d'un apport en muraille de C. subarquatus, le rapport B.F./B.R. est supérieur à 2 après 40 jours à la différence des autres substrats (fig. 2). La comparaison des rapports BF/BR nous renseigne sur la stratégie adoptée par la plante. Si la biomasse foliaire est plus importante, la population de ray-grass, poussant sur un milieu suffisamment riche, développe sa partie aérienne par suite d'une allocation équilibrée des assimilats de la photosynthèse vers les parties aériennes et racinaires. Au contraire, si la biomasse racinaire est relativement plus importante que la foliaire, la population de ray-grass a adopté une stratégie optimisant la croissance racinaire afin d'augmenter ses capacités d'absorption des éléments nutritifs. Pourquoi le plus important taux d'azote foliaire est-il observé lors d'un apport en nid de C. subarquatus? Plusieurs hypothèses peuvent être envisagées. La première serait que l'apport en azote total dans les pots serait le facteur déterminant. Afin de tester cette hypothèse, nous présentons les résultats obtenus dans le cas où les quantités d'azote total apportées par les murailles de termitières sont très proches (tab. 3). Bien que l'apport d'azote total fourni au système racinaire soit identique, les biomasses foliaires sont significativement différentes. Ainsi, ce n'est pas la quantité d'azote total apporté qui détermine majoritairement la production de biomasse foliaire. La seconde hypothèse est la suivante. On sait que les végétaux absorbent l'azote sous forme minérale (N0 3 \ NH/). Est-ce que le sol enrichi par de la termitière de C. subarquatus est à l'origine plus riche en azote minéral ou bien cet azote provient-il de l'activité d'une microflore minéralisatrice? Dans l'hypothèse d'une activité bactérienne, il faut alors se demander quel type de matière organique, riche en azote, est la plus facile à minéraliser. A priori, des molécules peu polymérisées, de faibles poids

73 moléculaires, comme les acides fulviques, peuvent constituer un substrat privilégié des bactéries minéralisatrices. quantité d'azote apporté par pot Biomasse Foliaire par pot au bout de 40 jours nid de C. subarquatus (1 dose) 89 mg 104 mg ± 20 nid de M. (2 doses) bellicosus 83 mg 62 mg ± 10 tab. 3 : Biomasses foliaires selon les apports en azote total dans le pot. Nombre de répétition : 3. tab. 3 : Shoot biomass according to the différent inputs of total nitrogen in the pot. number of répétition : 3. Rôle des substances humiques Le tableau 4 regroupe les quantités d'acides fulviques apportées par pot. On constate que l'apport en AF par la termitière de C. subarquatus est le plus important. Quantité de nid apporté par pot Somme des AF par gramme de nid Quantité d'af apporté par pot C. subarquatus 20g 11.5 mg 230 mg M. bellicosus 50g 1.79 mg 89 mg tab. 4 : Abondance des AF selon la quantité de nid apporté (AF ; acides fulviques) tab. 4 : Abundance of AF according to the input of nest (AF : fulvic acids) % dun OT des substances humiques AF AH C. subarquatus M. bellicosus tab. 5 : Distribution de l'azote entre les acides fulviques et acides humiques (AH) (Garnier-Sillam, 1987), NOT : Azote Organique Total. tab. 5 : Distribution of nitrogen between the fulvic and hicmic acids (AH) (Garnier- Sillam, 1987), NOT: Total Organic Nitrogen. De plus, il apparaît dans le tab. 5 que les acides fulviques présents dans le nid de C. subarquatus sont plus riches en azote que ceux présents dans le nid de M. bellicosus. Donc, l'impact, sur la nutrition minérale du ray-grass, d'une activité bactérienne

74 minéralisatrice de l'azote présent dans les acides fulviques, pourrait ne pas être négligeable dans le cas d'un apport en nid de C. subarquatus. CONCLUSION Il apparaît que pour des quantités de carbone organique total apportées comparables, la termitière du C. subarquatus présente la teneur en azote la plus favorable pour la croissance du ray-grass, après 40 jours, dans nos conditions expérimentales. L'azote serait le facteur limitant principal pour la croissance du raygrass sur le substrat enrichi en nids de M. bellicosus. Ainsi, les termites humivores tels que les C. subarquatus, qui consomment l'humus et construisent leur nid en déjections, fabriquent un matériau susceptible d'amender les sols. Toutefois, même avec cet apport d'azote, la croissance du ray-grass reste faible comparée à celle obtenue sur un sol normal équilibré et les plantes ne peuvent pas exprimer leur potentialité génétique de production. D'autres facteurs limitants (structure physique du sol, autres carences et/ou toxicités minérales) fréquents dans les sols tropicaux peuvent expliquer les résultats obtenus. REFERENCES BERGMANN W., "Ernahrungsstorungen bei kulturpflanzen. Entstehung, visuelle und analytische diagnose". Fischer Verlag (éd.), Jena, pp.23. BERGMANN W., "Nutritional disorders of plants-development,visual analytical diagnosis". Fischer Verlag (éd.), Jena, pp.36. GARNIER-SILLAM E., Biologie et rôle des termites dans les processus d'humification des sols tropicaux du Congo. Thèse d'état, Université de Paris XII, pp.276. GARNIER-SILLAM E. and HARRY M., Distribution of humic compounds in mounds of some soil-feeding termite species of tropical rainforests : its influence on soil structure stability. Ins Soc. 42 : HESSE P. R., A chemical and physical study of the soils of termite mounds in East Africa. J. Ecol., 3, LEE K.E. and WOOD T.G., Termites and soils. Acad. Press. (Lond., New York), pp.251. LOBRY DE BRUYN L.A., and CONACHER A.J., The rôle of termites and ants in soil modification : a review. Aust. J. Soil Res. 28: MARSCHNER H., Minerai nutrition of higher plants, 2nd édition, pp.889. WATSON J.P., The use of mounds of Termite Macrotermes falciger as a soil amendment. J. Soil Sci., 28,4, and

75 103 Actes Coll. Insectes Sociaux, 11: (1998) ETUDE DE LA MICROFLORE ACTINOMYCETALE CELLULOLYTIQUE DU TUBE DIGESTIF DE PLUSIEURS ESPECES DE TERMITES SUPERIEURS AFRICAINS D. AZARIZ et C. ROULAND Laboratoire d'écophysiologie des Invertébrés- Université Paris XII Val de Marne, avenue du Général de Gaulle Créteil Cedex France Résumé. Les travaux sur la microflore symbiotique du tube digestif de termites supérieurs se sont le plus souvent intéressés aux bactéries sensu-stricto et ont ignoré les bactéries filamenteuses (actinomycètes). Au cours de ce travail, la flore actinomycétale provenant du tube digestif de 15 espèces de termites a été analysée. Les résultats des dénombrements montrent que la quantité d'actinomycètes par volume de tube digestif est variable d'un genre à l'autre et au sein d'une même espèce. La quantité d'actinomycètes cellulolytiques présente dans le tube digestif des termites de la sous-famille des Macrotermitinae est nettement plus faible que celle des autres sousfamilles. Une étude qualitative a été réalisée afin de mettre en évidence la diversité de cette microflore actinomycétale. Sur les 15 espèces de termites étudiées, on observe une grande diversité de morphotypes en particulier chez les Nasutitermitinae et les Macrotermitinae. Mots-clés : Actinomycètes, Termites, tube digestif, cellulolyse. Abstract : Study of cellulolytics actinomycetes from the gut of several african higher termites Studies on termites gut microflora, concerned mainly bacteria sensu-stricto, but data on filamentous bacteria (actinomycetes) are scarce. In this study, actinomycetal flora from digestive tracts of 15 termites species was analysed. The actinomycetal concentration was différent in termites belonging to the same genus and even in termites belonging to the same species. The cellulolytics actinomycetes concentration in the digestive tract of termites belonging to the sub-family of Macrotermitinaes is especially low in comparison with the one on the concentration obtained in other sub-families. In order to display the actinomycetes microflora diversity, a qualitative study was assayed. Among the 15 termites species studied, the highest morphotypes diversity was observed in Nasutitermitinae and Macrotermitinae. Key words : Actinomycetes, Termites, gut, cellulolysis. INTRODUCTION Beaucoup de travaux ont montré que l'intestin postérieur des termites contient une grande abondance de microorganismes symbiotiques dont la diversité est en relation avec l'évolution des isoptères (Grassé et Noirot, 1959 ; Eutick et al.., 1978 ; Czoliz et al., 1985). Concernant les actinomycètes particulièrement peu d'études ont été réalisées.

76 Néanmoins ces dernières années des observations à l'aide du microscope électronique ont montré l'existence d'une abondante microflore filamenteuse au niveau du tube digestif de plusieurs espèces de termites ( Bignell, et al., 1979 ; Brauman, 1983). Ceci a été confirmé par des numérations et des isolements (Pasti et Belli, 1985 ; Pasti et al., 1990 ; Azariz, 1996 ; Lenoir-Labé, 1996). MATÉRIEL ET MÉTHODES Plusieurs espèces de termites ont été étudiées (Tableau. 1). Ces termites qui présentent différents régimes alimentaires ont été récoltés dans plusieurs pays africains. Termites origine régime alimentaire Termitinae Amitermesvuncifer 1 (AE.l) Tchad (canne à sucre) Xylophage-détritivore A. evuncifer 2 (AE.2) Tchad (savane) Xylophage-détritivore A. sp. 3 (A.3) Sénégal Xylophage-détritivore A. sp. 4 (A.4) Sénégal Xylophage-détritivore Microcerotermes parvus (Mi) Sénégal Xylophage M. parvulus (M) Tchad Xylophage Termes hospes (TH) Cameroun Xylophage -détritivore Cubitermes heghi (CH) Tchad Humivore Nasutitermitinae Trinervitermes trinervius ( i l ) Cameroun Xylophage-fourrageur T. togoensis ( 11 o) Tchad Xylophage-détritivore T. geminatus (TG) Côte d'ivoire Xylophage-détritivore Nasutitermes lujae (NL) Cameroun Xylophage N. fulleri (NF) Cameroun Xylophage Apicotermitinaes Astalotermes quietus (AQ) Cameroun Humivore Macrotermitinaes Macrotermes bellicosus (MB) Côte d'ivoire Champignonniste M. subhyalinus (MS). Côte d'ivoire Champignonniste Tableau 1: Origine et régime alimentaire des différentes espèces de termites étudiées. Table 1 : Origin ofseveral termites species characterized by différentfeeding diets. Dissections Dix tubes digestifs de termites ouvriers vivants sont disséqués à sec dans des conditions stériles, puis broyés dans 1 ml d'eau distillée. Les différents broyats obtenus constituent les dilutions zéro à partir desquelles des dilutions en cascade, jusqu'à 10" 5, ont été réalisées. Dénombrement Les différentes suspensions bactériennes ont servi d'inoculum pour le dénombrement de la microflore actinomycétale aérobie cellulolytique. Les ensemencements sont effectués sur un milieu sélectif (Hayakawa et Nonomura, 1987 modifié au laboratoire) contenant de la cellulose microcristalline comme seule source de carbone. 1 ml de chaque dilution est étalé sur des boîtes de Pétri carré (12 cm x 12cm) contenant 70 ml du milieu de culture décrit ci-dessus, puis incubées dans une étuve à

77 Isolement des actinomycètes Après une semaine de croissance sur le milieu de dénombrement, les différentes colonies d'actinomycètes sont prélevées et repiquées sur milieu de Bennet contenant delà carboxyméthylcellulose (CMC). Ce milieu permet non seulement la croissance et la sporulation des actinomycètes mais également une première distinction des différents morphotypes. Mesure de l'activité cellulose Après cinq jours de croissance, le milieu de culture est recouvert par une solution de rouge Congo (0.1 %). Ce colorant a la propriété de se fixer aux polysaccharides. Après pénétration du colorant, la décoloration est réalisée par rinçage avec une solution de Nacl (1 M). Le Rouge Congo colore en rouge la CMC partout où elle est présente, lorsque celle-ci a été hydrolysée par des cellulases extracellulaires, des halos clairs apparaissent autour des colonies. RESULTATS Sélection d'actinomycètes cellulolytiques : étude quantitative et qualitative Les résultats obtenus (Tableau 2) montrent que la quantité d'actinomycètes par volume de tube digestif est variable (test F, au risque de 2,5 %) non seulement d'un genre à l'autre mais également au sein d'un même genre ou d'une même espèce. Cependant, les espèces qui présentent la plus grande quantité d'actinomycètes cellulolytiques sont des espèces à régime alimentaire xylophage : Test F significatif au risque de 2,5 % entre xylophages/humivores et xylophages/champignonnistes. Les populations d'actinomycètes cellulolytiques se sont révélées extrêmement diversifiées ainsi, par espèces, de 15 à 52 moiphotypes ont pu être différenciés. Il est intéressant de constater que la diversité n'est pas corrélée à l'abondance des populations d'actinomycètes. En effet, les espèces champignonnistes qui s'étaient révélées les plus pauvres en actinomycètes présentent un grand nombre de morphotypes différents (48 et 31 respectivement pour M. bellicosus et M. subhyalinus) alors que chez M. parvulus qui était l'espèce qui comportait la population la plus abondante (10 6 /ml de T.D.), seuls 18 morphotypes différents ont pu être identifiés. Une étude en cours devrait permettre de préciser si les morphotypes isolés sont spécifiques ou communs à plusieurs espèces. Production de cellulases extracellulaires Sur les 500 morphotypes sélectionnés (cf. tableau 2), 222 ont produit des cellulases dans le milieu extérieur soit près de 50 %. L'ensemble de ces observations nous a conduit à sélectionner 73 morphotypes qui présentent un rapport Auréole/Colonie égal ou supérieur à 2,5 et dont la plage de lyse est supérieure à 2 cm en 5 jours. Toutes les souches sélectionnées par le test au rouge Congo sont mises en culture sur milieu minéral liquide additionné de cellulose microcristalline. Parmi les 73 souches testées, 37 ont pu se développer avec de la cellulose comme seule source de carbone soit plus de 50 %. Plusieurs souches ayant des rapports A/C élevés quand elles sont cultivées sur milieu solide avec de la carboxymethylceliulose comme source de carbone, n'ont pas présenté de croissance sur cellulose microcristalline Il n'existe, en fait, pas de corrélation (r = 0,109, p<0,05) entre la taille de l'auréole et les capacités de croissance de la souche sur cellulose microcristalline. Les activités carboxyméthylcellulases (CMCases) ont été recherchées dans le milieu de culture de ces 37 souches. 21 souches se sont révélées capables de produire au moins une endocellulase dans le milieu de culture Si l'on s'intéresse à l'origine des souches sélectionnées, il apparait que 75 % de ces souches proviennent de termites dont le régime alimentaire est typiquement

78 xylophage. Les autres souches sélectionnées proviennent des termites evuncifer et Termes hospes qui sont des xylophages-détritivores. Amitermes U.F.C/ il U.F.C/ Nombre de Espèces TD TD morphot -ypes. TERMITINAE 'Amitermes evuncifer â Amitermes evuncifer 2 2, «Amitermes sp3 5, Amitermes sp4 5, Microcerotermes parvulus Microcerotermes parvus 2, Termes hospes Cubitermes heghei NASUTITERMITINAE Trinervitermes trinervius 3, Trinervitermes togoensis 4, Trinervitermes geminatus 3, C Nasutitermes lujae 6, Nasutitermes fulleri 8, APICOTERMITINAE Astalotermes quietus 2, MACROTERMITINAE Macrotermes subhyalinus 0, «Macrotermes bellicosus 0, UFC = Unité formant colonie TD = Tube digestif Tableau 2 : Etude quantitative et qualitative des actinomycètes cellulolytiques du tube digestif de plusieurs espèces de termites. a,b,c,d : Une même lettre indique que les oncentration ne sont pas significativement différentes. Table 2 : Quantitative and qualitative study of cellulolytics actinomycètes from the gut of several termite species. a,b,c,d : The same letter indicates that the concentrations are not significatively différents. DISCUSSION Les résultats des dénombrements montrent que l'ensemble des termites supérieurs étudiés au cours de ce travail hébergent dans leur tube digestif une microflore actinomycétale cellulolytique importante et diverse dont l'importance varie entre 2,3 x 10^ et 10 actinomycètes par ml de tube digestif. Ce nombre est non négligeable par rapport aux densités bactériennes totales habituellement dénombrées dans le tractus digestif des termites qui varient entre 10 8 et bactéries/ml (Krasil'Nikov et Satdicov, 1970 ; Shultz et Breznack, 1978 ; Brauman et al., 1987). Par contre, le nombre d'actinomycètes cellulolytiques est nettement plus élevé que la quantité de bactéries anaérobies cellulolytiques : Elle est inférieure à 100 bactéries par tube digestif chez N. lujae (Breznack et Brune, 1994).

79 AE1AE2 A3 A4 Mi M TH CH TT TTo TG AQ NL NF MS MB Figure 1 : Pourcentage de souches produisant des celluloses extracellulaires. Percentage ofstrains that produce extracellular cellulase. %de souches ne produisant pas d'auréoles (% ofstrains without halo) E! % de souches produisant des auréoles (% ofstrains with halo) AE1AE2 A3 A4 Mi M TH CH TT TTo TG AQ NL NF MS MB Figure 2 : Pourcentage de souches présentant un rapport A/C supérieur à 2,5. Percentage ofstrains who posses A/C superior than 2,5. Souches avec auréoles (strains with halo) 0 % A/C >2,5.

80 Parmi la microflore actinomycétale isolée, plus de 50 % (fig.l) des morphotypes produisent des cellulase, actives sur carboxyméthylcellulose dans le milieu extracellulaire. Ce résultat confirme l'intérêt du tractus digestif des termites pour la recherche de microorganismes cellulolytiques. En effet les travaux de Morvan (1995) sur la microflore du rumen ont montré que la proportion de flore cellulolytique est de 25 % chez la vache, 20 % chez le lama et 8 % chez le mouton; dans l'estomac du cheval, la flore cellulolytique représente 10 %. Parmi les morphotypes présentant des plages de lyse importantes sur milieu solide, seuls quelques uns ont présenté une bonne activité cellulolytique quand ils sont cultivés sur cellulose microcristalline. Ceci peut être dû soit au fait que le substrat inducteur n'est plus le même soit à la nature du milieu solide ou liquide. Ainsi, Prinzis (1990) a montré que la synthèse de certains antibiotiques ne s'effectue qu'en milieu solide chez deux souches d'actinomycètes (12T 35 et 3T 3) isolées à partir du sol. Il est également possible que l'auréole de cellulolyse observée en milieu solide soit dû non seulement à des enzymes extracellulaires mais aussi à des enzymes de type périplasmique. 75 % des souches cellulolytiques proviennent de termites dont le régime alimentaire est typiquement xylophage (fig.2). Les autre souches sélectionnées proviennent des termites Amitermes evuncifer et Termes hospes qui sont des xylophagesdetritivores. Aucune souche provenant du tube digestif des termites humivores ou champignonnistes n'a présenté de croissance sur le milieu sélectif. Ces résultats sont en accord avec les travaux de Rouland (1986) qui a montré que, chez plusieurs espèces de termites xylophages (Microcerotermes parvus et Sphaerotermes sphaerothorax), l'intestin postérieur, riche en microorganismes symbiotiques, est la partie du tube digestif la plus active dans la biodégradation des polysaccharides végétaux. De même, toutes les souches bactériennes non filamenteuses cellulolytiques isolées à partir de tractus digestif de termites proviennent de termites xylophages : Reticulitermes virginicus et Coptotermes formosanus (Mannesmann, 1972), Nasutitermes lujae (Brauman, 1989), Cephalotermes rectangularis (Lenoir et Rouland, 1993); Des actinomycètes cellulolytiques ont également été isolés chez des termites xylophages, Amitermes sp. et Microcerotermes parvus, et champignonnistes, Odontotermes sp. (Pasti et Belli, 1985). REFERENCES Azariz, D., Sélection de souches d'actinomycètes cellulolytiques à partir du tube digestif de termites supérieurs en vue d'application en biotechnologie. Thèse d'université, Université Paris XII-Val de Marne, 163 p. Bignell, D.E., H.Oskarsson and J.M. Anderson, Distribution and abondance of bactena in the gut of a soil feeding termite Procubitermes aburiensis J. Gen Microbiol., 117: Brauman, A., Etude du métabolisme bactérien de termites supérieurs à régime alimentaires différenciés.(mise en évidence d'une nouvelle voie de dégradation du benzoate et du 3-hydroxybenzoate). Thèse de doctorat, Université Aix-Marseille II 168 p. Brauman, A., M. Labat, and J.L. Garcia, Contribution à l'étude de la microflore hetérotrophe de termites supérieurs à régime alimentaires différenciés. Bull Sci Tech. INRA, 22 : Brauman, A., Etude de la microflore hétérotrophe d'un termite supérieur Nasutitermes arborum. DEA, U. Paris XII, 110 p. Breznak, J.A. and A. Brune, Rôle of microorganisms in the digestion of lignocellulose by termites. Annu. Rev. Entomol., 39 : Czolij, R. M. Slaytor, and R.W. O'brien, Bacterial flora of the mixed segment and the hindgut of the higher termite Nasutitermes exitiosus Hill (Termitidae Nasutitermitinae)^4/?jP. and Envi. Micobiol. 49 :

81 Eutick, M.L., P. Veivers., R.W. O'brien and M. Slaytor, Dependence of the higher termite Nasutitermes exitiosus and the lower termite Coptotermes lacteus on their gut flora. J. Insect. Physiol., 24 : Grassé, P.P. and C. Noirot, L'évolution de la symbiose chez les Isoptères Experientia, 15: Hayakawa, M. and H. Nonomura, Humic Acid-Vitamin agar, a new médium for the selective isolation of soil Actinomycetes. J. Ferment. Technol., 65 : Krasil'nikov, N.A., and S.I. Satdikov, Bacteria of termites intestines. Microbiologiya, 39: Lenoir-Labé, F. and C. Rouland, Purification et propriétés de deux osidases produites par des bactéries isolées à partir du tractus digestif de Cephalotermes rectangularis (Isoptera, Termitidae). Act. Coll. IUSSI, 8 : Lenoir-Labé, F., Recherche d'une microflore actinomycétale spécifique du segment mixte de plusieurs espèces de termites supérieurs : Caractérisation et rôles. Thèse d'université. Université Paris XII-Val de Marne, 135 p. Mannesman, R., A comparison between cellulolytic bacteria of the termites Coptotermes formosanus (Shiraki) and Reticulitermes virginicus (Banks) Int. Biodeterior. Bull., 8 : Morvan, B., Ecologie et physiologie des microorganismes hydrogénotrophes des écosystèmes digestifs - Etude particulière de l'écosystème ruminant - Thèse d'université, Université Claude Bernard- Lyon I, 161 p. Pasti, M.B., L. Pometto, M.P. Nuti and D.L. Crawford, Lignin-solubilizing ability of actinomycetes isolated from termite (Termitidae) gut. Appl. Environ Microbiol., 56: Pasti, M.R. and M.L. Belli, Cellulolytic activity of actinomycètes isolâtes from termites (Termitidae) guts. FEMS Microbiol Lett., 26 : Prinzis, S., Isolement et caractérisation de souches d'actinomycètes. Purification et étude structurale de leurs métabolites antifongiques. Thèse d'université, Université Claude Bernard Lyon I, 197 p. Rouland, C. 1986, Contribution à l'étude des osidases digestives de plusieurs espèces de termites Africains. Thèse de Doctorat ès Sciences, Université Paris XII- Val de Marne, 210p. Schultz J.E. and J.A. Breznak, Heterotrophic bacteria present in hindguts of Wood-eating termite Reticulitermes flavipes. Appl. Environ. Microbiol., 35 : 930-

82 103 Actes Coll. Insectes Sociaux, 11: (1998) RECHERCHE D'ENZYMES INTERVENANT DANS LA DEGRADATION DE LA LIGNINE CHEZ PLUSIEURS ESPECES DE TERMITES A REGIMES ALIMENTAIRES DIFFÉRENTS Philippe MORA 1, Claude LATTAUD 2 et Corinne ROULAND 1 1 Laboratoire d'ecophysiologie des Invertébrés, Université Paris XII Val de Marne - Avenue du Général de Gaulle, Créteil cedex, France 2ORSTOM Ile de France- Laboratoire d'ecologie des Sols Tropicaux 32, avenue Varagnat, Bondy cedex 09, France Résumé. La recherche d'enzymes intervenant dans la dégradation de la lignine chez plusieurs espèces de termites à régimes alimentaires différents montre que les termites xylophages et les termites humivores ne possèdent pas les enzymes recherchées. Les termites champignonnistes présentent la particularité de posséder des laccases. Au sein de ce groupe des Macrotermitinae, seules deux espèces secrètent des pyranose oxydases. Mots-clés. Isoptera, termites, lignine, laccases Summary. Enzyme involved in lignin dégradation among termites with various feeding habits Several termite species characterized by différent diets were screened for enzymes involved in lignin dégradation. Xylophagous and soil-feeding termites had no ligninolytic enzymes. Fungus-growing termites produced laccases and some specificity appeared in this group : only two species exhibited pyranose oxydase activities. Key words. Isoptera, termites, lignin, laccases INTRODUCTION Les études biochimiques de la dégradation de la matière végétale par les termites concernent essentiellement l'hydrolyse des polysaccharides. Par contre, peu d'études ont porté sur la dégradation de la lignine. Selon les espèces, le pourcentage de dégradation de la lignine pouvait être très élevé (Butler et Buckerfield, 1979 ; French et Bland, 1975) mais ces premiers travaux ont été largement contestés en raison du peu de spécificité des méthodes employées (Breznak et Brune, 1994). Jusqu'à présent, aucune donnée n'a encore été obtenue sur i'existence, chez ces insectes, des différentes enzymes intervenant dans la dégradation des lignines. Ces enzymes sont de deux types : le groupe de polyphenol-oxydase à savoir les laccases et des peroxydases telles que la lignine peroxydase (LiP) et la manganèse peroxydase (Mn peroxydase). Les deux dernières agissent directement sur la lignine uniquement en présence d'eau oxygénée. Le deuxième groupe d'enzymes regroupe les pyranoses oxydases qui produisent de l'eau oxygénée. Cette étude a pour objectif la recherche de ces enzymes chez plusieurs espèces de termites à régimes alimentaires différents (humivore, xylophage, champignonniste).

83 MATERIEL ET METHODES Matériel biologique. - Cette étude a été effectuée sur : - 4 espèces de termites xylophages : Amitermes evuncifer, Nasutitermes lujae, Reticulitermes santonensis, Trinervitermes rhodesiensis. - 5 espèces de termites humivores : Crenetermes albotarsalis, Cubitermes speciosus, Noditermes sp., Procubitermes arburiensis, Thoracotermes macrothorax. - 5 espèces de termites champignonnistes : Ancistrotermes periphrasis, Macrotermes bellicosus, Macrotermes miilleri, Macrotermes renouxi, Pseudacanthotermes spiniger. Obtention des extraits enzymatiques. - Les extraits bruts ont été obtenus selon un protocole déjà décrit (Rouland et al., 1986). Dosages enzymatiques - Laccases : le dosage a été effectué en présence d'abts (2,2' - azino bis [3-éthylbenzothiazoline-6-sulfonate]) comme substrat enzymatique (Bourbonnais et Paice, 1990). L'unité enzymatique est définie comme la quantité (en (im) d'abts oxydé par mn à 37 C. - Lignine peroxydase (LiP) : l'activité enzymatique a été dosée par une technique colorimétrique basée sur l'oxydation de l'azur B (Archibald, 1992). L'unité enzymatique est définie comme la quantité (en p.m) d'azur B oxydée par mn à 37 C. - Manganèse peroxydase (Mn peroxydase) : le dosage de la Mn peroxydase a été effectué en présence de rouge phénol et de peroxyde d'hydrogène (Paszcynski et ai, 1988). L'activité spécifique est définie comme la quantité de rouge phénol oxydé par mn et par mg de protéines ( x M/mn/mg). - L'activité pyranose oxydase a été déterminée selon la technique décrite par Janssen et Ruelius (1975). L'unité enzymatique est définie comme la quantité (en pm) de sucre oxydé par mn à 37 C. Dosage des protéines - La quantité de protéines des solutions enzymatiques a été déterminée selon une méthode basée sur l'emploi de Bleu de Coomassie et utilisant la sérum albumine comme référence (Sedmark et Crossberg, 1977). RESULTATS Les activités LiP et Mn peroxydase n'ont pas été détectées chez toutes les espèces étudiées. Seules les espèces champignonnistes possèdent une activité laccase (Fig. 1). «4 0 M. miilleri f\1 M. bellicosus ES f-spiniger 2 M. renouxi 0 A. periphrasis Fig. 1 : Activités laccase chez différentes espèces de termites champignonnistes Laccase activities from différent species of fungus-growing termites

84 Les activités les plus élevées ont été mises en évidence chez P. spiniger et M. renouxi avec respectivement 34 U/mg et 19 U/mg. Les activités des trois autres espèces ne dépassent pas 10 U/mg. Des activités pyranose oxydases ont été détectées uniquement chez deux espèces champignonnistes (Fig 2.): P. spiniger et A. periphrasis. Pour ces deux espèces, l'activité la plus importante a été obtenue sur le glucose. Chez P. spiniger, cette activité correspond au double de celle d'a. periphrasis. Sur les autres sucres, les activités sont plus faibles et restent comprises entre 2 et 10 U/mg. -S S P. spiniger A. periphrasis Fig. 2 : Activités pyranose oxydase chez deux espèces de termites champignonnistes Pyranose oxidase activities from two species offungus-growing termites DISCUSSION L'ensemble des résultats montre que les enzymes intervenant dans la dégradation de la lignine n'ont pas été détectées chez les espèces xylophages et humivores. Les termites champignonnistes se caractérisent par une plus grande diversité dènzymes et en particulier par une activité laccase rencontrée chez toutes les espèces testées. L'absence d'enzyme ligninolytique chez les espèces xylophages peut paraître surprenante puisque c'est dans ce groupe alimentaire que la ligninolyse a été décelée pour la première fois. (Seifert et Becker, 1965 ; Butler et Buckerfield, 1979). L'absence d'activité laccase chez ces espèces, pourrait être due à la nature du substrat utilisé (ABTS). En effet, bien que l'abts soit employé très généralement pour l'étude des laccases, ces enzymes peuvent être recherchées en utilisant d'autres substrats, tel que le syringaldazine (Yaver et al., 1996). Les détections de la Mn peroxydase et de la LiP réalisées à partir de méthodes colorimétriques s'étant révélées négatives, il faudrait là aussi envisager d'utiliser d'autres méthodes telle que l'oxydation du vératryl alcool en UV (Tien et Kirk, 1988). Enfin, outre ces aspects méthodologiques, il est possible que, chez les termites xylophages, la dégradation de la lignine emprunte d'autres voies métaboliques que celles connues actuellement. En l'absence d'enzyme intervenant dans la dégradation de lignine chez les espèces humivores, on peut supposer que l'assimilation de complexes phénoliques comme la lignine pourrait résulter d'une action physico-chimique et pas uniquement enzymatique. En effet, l'intestin postérieur des termites humivores se caractérise par des ph extrêmement alcalins, le plus souvent voisins de 10 (Bignell et Eggleton, 1996) ; à de tels ph, il est possible qu'une fraction de la lignine et plus généralement les complexes phénoliques soient solubilisés voir minéralisés. La présence de pyranose oxydases uniquement chez deux espèces de termites champignonnistes, P. spiniger et A. periphrasis, indique qu'il existe, au sein des

85 Macrotermitinae, des différences spécifiques dans les mécanismes de dégradation de la lignine. L'activité laccase mise en évidence chez l'ensemble des termites champignonnistes étudiés pourrait jouer un rôle essentiel dans la dépolymérisation de la lignine. Cette activité, bien que dosée dans le tractus digestif du termite, pourrait être d'origine fongique car elle est également trouvée dans les mycotêtes de leurs champignons symbiontes (travaux en cours). Ainsi, comme il a été précédemment montré pour les cellulases et les xylanases (Abo-khatwa, 1978 ; Rouland et al., 1988 a et b ; Matoub et Rouland, 1995) les laccases pourraient être des enzymes "acquises". Un prolongement intéressant à ce travail serait donc de purifier et caractériser les laccases présentes chez le termite et chez son champignon symbiotique. Ces nouvelles données pourraient permettre de mieux appréhender le problème complexe de la symbiose termitechampignon chez les Macrotermitinae. REFERENCES Abo-khatwa N., Cellulase of fungus growing termites : a new hypothesis on its origin. Experientia 34, Archibald F. S., A new assay for lignin-type peroxidases employing the dye Azuré B.Appl. and Env. Micro. 58, Bignell D. E. and P. Eggleton, On the elevated intestinal ph of higher termites (Isoptera: Termitidae). Insectes Soc. 42, Bourbonnais R. and M. G. Paice, Oxidation of non phenolic substrates. An expanded rôle for laccase in lignin biodégradation. FEBS lett. 267, Breznak J. A. and A. Brune, Rôle of microorganisms in the digestion of lignocellulose by termites. Annu. Rev. Entomol. 39, Butler J. H. and J. C. Buckerfield, Digestion of lignin by termites. Soil. Biol. Biochem. 11, French J. R. J. and D. E. Bland, Lignin dégradation in the termites Coptotermes lacteus and Nasutitermes exitiosus. Mater. Org. 10, Janssen F. W. and H. W., Ruelius, Pyranose oxidase from Polyporus obtusus. Methods in Enzy. 41 B, Matoub M. and C. Rouland, Purification and properties of the xylanases from the termite Macrotermes bellicosus and its symbiotic fungus Termitomyces sp. Comp. Biochem. Physiol. 112 B, Paszcynski A., R. L. Crawford and V-B. Huynh, Manganese peroxidase of Phanerochaete chrysosporium : purification. Methods in Enzy. 161, Rouland C., C. Chararas and J. Renoux, Etude comparée des osidases de trois espèces de termites africains à régime alimentaire différent. C. R. Acad. Se. Paris Série IIII, 9, Rouland C., A. Civas, J. Renoux and F. Petek, 1988a. Purification and properties of cellulases from the termite Macrotermes miilleri and its symbiotic fungus Termitomyces sp. Comp. Biochem. Physiol. 91B, Rouland C., J. Renoux and F. Petek, 1988b. Purification and properties of two xylanases from the termite Macrotermes miilleri (Termitidae, Macrotermitinae) and its symbiotic fungus Termitomyces sp. Insect. Biochem. 18, Sedmark J. J. and G. Crossberg, A rapid, sensitive and versatile assay for protein using Coomassie brilliant blue G 250. Analyt. Biochem. 79, Seifert K. and G. Becker, Der chemische abbau von laub- und nadelholzarten durch verschiedene termiten. Holzforschung 19, Tien M. and T. K. Kirk, Lignin peroxidase of Phanerochaete chrysosporium. Methods in Enzy. 161, Yaver D. S., F. Xu, E. J. Golightly, K. M. Brown, S. H. Brown, M. W. Rey, P. Schneider, K. Halkier, K. Mondorf and H. Dalboge, Purification, characterization, molecular cloning and expression of two laccase genes from the white rot basidiomycete Trametes villosa. Appl. and Envi. Micro., 62,

86 103 Actes Coll. Insectes Sociaux, 11: (1998) DEGRADATION DES COMPOSES PHÉNOLIQUES PAR DES MICROORGANISMES SYMBIONTES DU TERMITE PSEUDACANTHOTERMES SPINIGER A. M. NGO-BIKOUE, A. BRAUMAN, C. ROULAND Laboratoire d'ecophysiologie des Invertébrés, Université Paris XlI-Val de Marne CRETEIL Cedex - France Résumé : La dégradation de composés aromatiques par le termite Pseudacanthotermes spiniger et sa microflore symbiotique a été étudiée. En culture liquide, Termitomyces eurhizus, symbionte de P. spiniger, est capable de minéraliser l'acide syringique et l'acide gallique, par contre aucune dégradation de l'acide férullique n'est observée. La microflore digestive dégrade l'ensemble des composés aromatiques testés aussi bien en aérobiose qu'en anaérobiose. Le seul polyaromatique testé, l'acide tannique, est dégradé aussi bien par le champignon symbionte que par la flore fermentaire du termite. Mots clés : Termites, symbiose digestive, Pseudacanthotermes Termitomyces, microflore digestive, composés aromatiques. spiniger, Abstract: Dégradation of aromatic compounds by Pseudacanthotermes spiniger and its symbiontic microflora was investigated. Termitomyces eurhizus, symbiontic fungus of Pseudacanthotermes spiniger, in liquid médium mineralized syringic and gallic acids but not ferulic acid. Gut microflora degraded most of aromatic compounds in aérobic and anaerobic conditions. Tannic acid, polyaromatic compound, was degraded by symbiontic fungus but also by symbiontic microflora of the digestive tract. Key words: Termites, digestive symbiosis, Pseudacanthotermes spiniger, Termitomyces, gut microflora, aromatic compounds. INTRODUCTION Les termites champignonnistes, largement répandus en Afrique, sont caractérisés par leur relation exosymbiotique avec un champignon du genre Termitomyces et la présence, dans leur tube digestif, d'une forte densité bactérienne. Cette double association permet à ces termites de minéraliser plus de 90% de la matière organique ingérée (Breznak et Brune 1994). Des travaux récents ont montré qu'à côté de la cellulose et des hémicelluloses, les composés végétaux aromatiques peuvent constituer une source de nourriture alternative pour ces termites (Mora 1997). Cette étude a donc été réalisée pour déterminer quels composés aromatiques peuvent être dégradés par le termite Pseudacanthotermes spiniger et quel partenaire symbiotique est impliqué dans cette biodégradation. MATÉRIEL ET MÉTHODES Matériel biologique : Les ouvriers de Pseudacanthotermes spiniger proviennent des champs de canne à sucre de la SARIS (Vallée du Niari, Congo).

87 Techniques de cultures : - Termitomyces eurhizus, le champignon symbionte de P. spiniger est cultivé sous agitation dans un milieu minéral de Raulin selon une technique déjà décrite (Ikhouane, 1995). - Les cultures bactériennes sont réalisées en anaérobiose, suivant la technique de Hungate modifiée, et en aérobiose, dans des erlenmeyers, à partir de broyats de tubes digestifs entiers (Miller et Wolin, 1974). Substrats de croissance : Les composés aromatiques utilisés sont tous des produits modèles de la dégradation des composés polyaromatiques végétaux types tanins ( acides tannique et gallique) ou lignine (acides férullique, vanillique, syringique et coumarique). Numération bactérienne : La numération bactérienne des différentes parties du tube digestif du termite a été faite par la méthode du nombre le plus probable (NPP) sur un milieu de culture contenant un des composés aromatiques comme seule source de carbone (Genthner et al., 1981). Chromatographie : Les analyses des composés intermédiaires ont été réalisées par chromatographie sur couche mince ou en HPLC. Pour les analyses en chromatographie liquide, la technique suivie est celle décrite par Tomasi (1993). La chromatographie couche mince a été effectuée selon la méthode décrite par Kumholz et al. (1987). RÉSULTATS Dégradation des composés aromatiques par des cultures du champignon symbionte T. eurhizus et la microflore intestinale Tableau 1 : Évaluation de la dégradation en culture liquide des différents aromatiques Table 1: Estimate of aromatic compounds dégradation in liquid médium composés Champignon (fungus) Broyats de tube digestif (crushed gut) Syringate + + Ferullate - + Coumarate - + Vanillate - + Gallate + + Acide tannique + + Légendes: +: 90% du substrat dégradé en 5 jours de culture (90% of dégradation in 5 days of culture) -: aucune dégradation observée ( no dégradation in culture) Mesures effectuées par HPLC à partir d'échantillon de culture liquide aérobie ( aérobic liquid samples analysed by HPLC) Sur les six composés testés, seuls le syringate, le gallate et l'acide tannique permettent la croissance du champignon. Le suivi en HPLC de l'évolution du substrat au cours de la culture indique une hydrolyse rapide de ces trois acides : plus de 90% du substrat est dégradé en 5 jours. Cette dégradation s'accompagne d'un changement de couleur des milieux de culture : le milieu de culture avec le syringate devient rapidement rouge violacé et le reste jusqu'à la fin de culture alors que les milieux avec les acides gallique ou tannique s'assombrissent mais ne prennent pas de teinte rougeâtre. Plus les milieux deviennent colorés plus le taux de dégradation est important. La microflore intestinale du termite est capable d'hydrolyser l'ensemble des composés aromatiques testés en aérobiose.

88 Numération bactérienne sur différents composés aromatiques (Figure la et lb). Dans l'intestin moyen comme dans l'intestin postérieur, il existe une importante population bactérienne (de 10 9 à 10" bactéries/ml éq.de tube digestif) susceptible de se développer sur un milieu comportant des composés aromatiques comme seule source de carbone. Quelle que soit la portion d'intestin considérée, cette dégradation peut s'effectuer aussi bien en anaérobiose qu'en aérobiose. Seul l'acide syringique apparaît plus hydrolysé dans la panse en anaérobie. 0 Tube digestif potérieur / hindgut Tube digestif moyen / midgut 12 ts Tube digestif postérieur / Hindgut Tube digestif moyen / midgut J Ferullate Syringate Vanillate Tanin Figure la: Numération de la flore bactérienne intestinale aérobie du Pseudacanthotermes spiniger Figure la: Aerobe gut bacteria estimation of Pseudacanthotermes spiniger Ferullate Syringate Tanin Figure lb: Numération de la flore bactérienne anaérobie du Pseudacanthotermes spiniçer Figure lb: Anaerobe gut bacteria estimation of Pseudacanthotermes spiniger DISCUSSION La dégradation de la lignine par les champignons est très souvent l'oeuvre des champignon de pourritures blanches mais cependant des dérivés monoaromatiques à faible poids moléculaire peuvent être aussi attaqués par d'autres champignons (Jokela et al., 1987; Pelaez et al., 1995), des levures ou des bactéries (Ruel et Barnoud 1985 ; Breznak et Brune, 1994). T. eurhizus présente de fortes capacités d'hydrolyse des acides syringique, gallique et tannique qui sont dégradés à 90% après 5 jours de culture. Ses capacités de dégradation sont donc limitées aux seuls composés trisubstitués, substrats moins résistants à la biodégradation que les mono ou disubstitués (Bergbauer, 1991).

89 L'apparition d'une coloration rouge dans le milieu après croissance du champignon sur acide syringique est à mettre en relation avec la production de composés intermédiaires quinones (Cheftel et al., 1990). L'importante flore bactérienne intestinale montre, par contre, des capacités de biodégradation en aérobiose de tous les composés phénoliques testés: mono, di, et trisubstitués. La flore anaérobie montre aussi une capacité dégradative importante sur les trois seuls composés testés: syringate, ferullate et tanin. Ces résultats posent le problème, chez les Macrotermitinae, du rôle respectif des différents partenaires de la symbiose pour la dégradation des composés aromatiques végétaux. En effet, il peut paraître surprenant que le champignon symbionte et la microflore anaérobie de la panse dont on ne peut mettre en doute le caractère symbiotique, présentent tous deux de fortes capacités d'hydrolyse des mêmes composés aromatiques à savoir les acides syringique et tannique. Cependant, il est important de préciser que les substrats utilisés dans ce travail sont des composés monomériques modèles rares dans la nature. La symbiose tripartite observée chez ces termites pourrait peut-être trouver son application dans la dégradation des composés complexes naturels comme la lignine et les tanins. Les produits de dégradation de ces composés complexes étant difficiles à étudier par les techniques de chromatographie classique, seule l'utilisation de composés marqués pourrait nous permettre d'apporter de nouveaux éléments pour comprendre les mécanismes de la symbiose digestive chez ces insectes. RÉFÉRENCES Bergbauer, M., Dégradation and oligomerization of syringic acid by distinctive ecological groups of fungi. Microbiol. Ecol. 21:73-84 Breznak, J. A. and Brune, A., Rôle of microorganisms in the digestion of lignocellulose by Termites. Annu. Rev. Entomol. 39: Cheftel, J.C., Cheftel, H. and Besançon, P., Introduction à la biochimie et la technologie des aliments. Lavoisier Ed, Paris, 132p. Ikhouane, A., Etude de la biodégradation de polymères végétaux par des champignons du genre Termitomyces symbiontes de termites. Thèse de l'un. Paris XII, 170p. Jokela, J., Pellinen, J. and Salkinoja-Salonen, M., Initial steps in the pathways for bacterial dégradation of two tetrameric lignin model compounds. Appl. Env. Microb. 53: Genthner, B. R. S., Davis, C. L. and Bryant, M. P., Features of rumen and sewage sludge strains of Eubacterium limosum, a methanol and H2-C02 utilising species.appl. Env. Microbiol. 42: Krumholz, L. R., Crawford, R. L., Hemiling, M. E. and Bryant, M. P., Metabolism of Gallate and Phloroglucinol in Eubacterium oxidoreducens via 3- Hydroxy-5-oxohexanoate. J. ofbacteriol. 169: Miller, T. C. and Wolin, M. J., A sérum bottle modification of hungate technique for cultivating obligate anaerobes. Appl. Microbiol. 27: Mora, P., Recherche d'enzymes intervenant dans la dégradation de la lignine chez plusieurs espèces de termites à régimes alimentaires différents. Colloque Insectes Sociaux, U. Paris XII, 3/5 septembre. Pelaez, F., Martinez, M. J. and Martinez, A. T., Screening of 68 species of basidiomycetes for enzymes involved in lignin dégradation. Mycol. Res. 99: Ruel, K. and Barnoud, F., Dégradation of wood by microorganisms: In Biosynthese and dégradation ofwood components. Ed. Takayoshi Higuchi, Academic Press. 99: Tomasi, I., Dégradation des composés aromatiques halogènes par Pseudomonas cepacia AC1100. Thèse de l'ina PG, 142p.

90 103 Actes Coll. Insectes Sociaux, 11: (1998) SPÉCIALISATION SEXUELLE CHEZ LA FOURMI PHEIDOLE PALLIDULA: UN TEST D'HYPOTHÈSES Eric CAMP AN 1, Serge ARON 1, Luc PASSERA 1 & Jacobus J. BOOMSMA 2 1 Laboratoire d'ethologie et Psychologie Animale, CNRS 5550, Université Toulouse III, Toulouse Cédex 4 (France) 2 Department ofecology and Genetics, University ofaarhus, DK Aarhus C, (Danemark) Résumé. Les colonies de la fourmi Pheidole pallidula présentent une distribution bimodale de la sex-ratio: certaines colonies se spécialisent dans la production quasi exclusive de femelles reproductrices, alors que d'autres colonies produisent presque exclusivement des mâles. Deux hypothèses ont principalement été avancées pour rendre compte d'une telle distribution de la sex-ratio chez les Hyménoptères sociaux. Selon l'hypothèse de la disponibilité en ressources alimentaires (RLH - Nonacs, 1986), les colonies dont les ressources sont limitées produiraient des mâles, alors que celles bénéficiant d'abondantes ressources investiraient dans les deux sexes de la descendance, en biaisant sensiblement la sex-ratio en faveur du sexe femelle. L'hypothèse des asymétries de parenté (RAH - Boomsma et Grafen, 1990, 1991) soutient que les variations dans la structure génétique des colonies induiraient les ouvrières a biaiser la sex-ratio en faveur de l'un ou l'autre sexe, afin d'accroître leur propre succès reproducteur. Nos résultats suggèrent que ces deux explications pourraient agir conjointement dans la spécialisation sexuelle des colonies de P. pallidula. Mots-Clés. Sex-ratio, Formicidae, structure génétique, ressources Abstract. Split sex-ratio in the ant Pheidole pallidula: a test of hypothesis. Colonies of the ant Pheidole pallidula show a strong bimodal distribution of the secondary sex-ratio, with most of the colonies producing reproductives of one sex. Such split sex-ratios have been mostly explained in two différent ways in eusocial Hymenoptera. According to the resource level hypothesis (RLH - Nonacs, 1986), foodconstrained colonies would produce maies, whereas well fed colonies would rear both maie and female sexuals and will réalisé a relative over investment in female reproductives. The relatedness asymmetries hypothesis (RAH - Boomsma and Grafen, 1990, 1991) predicts that split sex-ratio results from workers assessing the relatedness asymmetry in their own colony, and biasing the sex ratio toward their own reproductive interests. Variations in relatedness asymmetries between colonies may be due to ail factors affecting the kin structure of colonies. Our results suggest that both explanations could be responsible for the sex spécialisation of colonies in P. pallidula. Key words. Sex-ratio, Formicidae, relatedness, genetic structure, food availability

91 INTRODUCTION La fourmi Pheidole pallidula présente une distribution très fortement bimodale de la sex-ratio secondaire: certaines colonies sont spécialisées dans la production quasi exclusive de mâles, alors que d'autres colonies ne produisent que des femelles reproductrices. La comparaison de la sex-ratio primaire (proportion d'oeufs haploïdes pondus par les reines) et de la sex-ratio secondaire (proportion de mâles adultes parmi les sexués) dans les deux types de colonies indique que les reines des sociétés à mâles et des sociétés à femelles pondent une proportion identique d'oeufs haploïdes, et que la spécialisation sexuelle des colonies est largement due à une manipulation différentielle de la sex-ratio par les ouvrières (Aron et al., 1995; Keller et al. 1996). Deux hypothèses principales ont été proposées pour justifier de la spécialisation sexuelle des colonies chez les Formicidae. Primo, l'hypothèse de la disponibilité en ressources ou "Resource Level Hypothesis" (RLH) prédit que des variations dans la qualité et/ou la quantité des ressources disponibles peut entraîner un shift de la sex-ratio des colonies en faveur de l'un ou l'autre sexe (Nonacs, 1986). Dans la mesure où la quantité de ressources disponibles influence directement le développement des larves femelles en ouvrières ou en reines, les colonies dont l'apport énergétique est limité (à cause du faible nombre d'ouvrières ou du manque de disponibilité en ressources alimentaires dans le milieu) produiraient des ouvrières plutôt que des femelles reproductrices, alors que les mâles - peu coûteux à produire - arriveraient à maturité. Lorsque les ressources sont abondantes, les colonies investiraient dans les deux sexes de la descendance sexuée, en favorisant l'investissement dans le sexe femelle. Plusieurs travaux réalisés chez les fourmis et les abeilles ont mis en évidence l'étroite association entre l'apport en nourriture, l'investissement sexuel, et la sex-ratio des colonies (Nonacs, 1986; Deslippe et Savolainen, 1995; Rosenheim et al., 1996; mais voir Backus et Herbers, 1992 pour des résultats contradictoires). Secundo, l'hypothèse des asymétries génétiques ou "Relative Relatedness Asymmetries Hypothesis" (RAH) tient compte des variations dans les asymétries de parentés d'une colonie à l'autre, variations dues à divers facteurs tels le nombre de reines dans les sociétés, le nombre d'accouplements de celles-ci, le degré de stérilité des ouvrières, ou encore le degré d'apparentement entre les individus reproducteurs (Boomsma et Grafen, 1990, 1991). Ces asymétries de parenté correspondent au rapport entre le degré de parenté moyen d'une ouvrière avec les femelles sexuées et avec les mâles, au sein de chaque colonie (Trivers et Hare, 1976). Selon cette hypothèse, les ouvrières évalueraient leur apparentement au couvain mâle et femelle, et manipuleraient la sex-ratio afin d'accroître leur propre succès reproductif, en élevant principalement des femelles dans les colonies au sein desquelles les asymétries de parenté sont supérieures à l'asymétrie moyenne calculée sur l'ensemble de la population, et en élevant préférentiellement des mâles dans les colonies au sein desquelles les asymétries de parenté sont inférieures à celle de la population. L'influence des asymétries de parenté sur la spécialisation sexuelle des colonies a été rapportée chez les abeilles (Boomsma, 1991; Mueller, 1991), les guêpes (Queller et al., 1993), et les fourmis (Sundstrôm, 1994; Evans, 1995, Sundstrôm et al., 1996). Dans ce travail, nous avons testé la valeur respective de ces 2 hypothèses dans les variations inter coloniales de la sex-ratio chez Pheidole pallidula.. MATÉRIEL ET MÉTHODES Trente-neuf colonies de Pheidole pallidula issues d'une même population ont été récoltées à Bruniquel (France), les 30 juin et 6 juillet A cette période de l'année, la majorité des sexués ont atteint le stade adulte. Bien que nous ayons récolté le plus grand nombre d'individus sexués, l'excavation complète des nids est impossible compte

92 tenu de la nature rocheuse du sol. En outre, les nids de cette espèce sont étendus et en été les reines sont généralement localisées dans la partie la plus profonde du nid, ce qui rend leur récolte impossible. Par conséquent, nous ne possédons qu'une estimation approximative du nombre total de sexués produits, de la population totale d'ouvrières et du nombre de reines dans chaque colonie. Sex ratio des colonies La sex-ratio numérique des colonies a été estimée en sexant tous les reproducteurs récoltés (nymphes et ailés). Seules les colonies produisant plus de 20 sexués ont été considérées (n= 36). Parmi celles-ci, les colonies produisant plus de 80% de mâles ou de femelles sexuées ont été respectivement référencées comme des colonies "à mâles" ou des colonies "à femelles". Pour chaque colonie, l'investissement énergétique dans les deux sexes est estimée en multipliant le nombre de mâles et de femelles sexuées par leur poids sec à l'état adulte, ce poids étant corrigé par un facteur tenant compte de leur coût de production respectif (Boomsma, 1989; Boomsma et al., 1995). Le rapport corrigé entre le poids sec des femelles et des mâles est C= (Aron et al., 1995). Disponibilité en ressources La RLH prédit qu'une augmentation de la disponibilité des ressources alimentaires entraîne une plus grande productivité des colonies en sexués, associée à une sex-ratio biaisée en faveur du sexe femelle. Nous avons testé la possibilité d'une association positive entre la productivité des colonies et l'investissement énergétique relatif dans le sexe femelle. Organisation socio-génétique de Pheidole pallidula Par électrophorèses sur gels d'acétate de cellulose, nous avons analysé le génotype de 696 ouvrières, 227 femelles sexuées, et 297 mâles (n= 1220 individus / 39 colonies). Quatre marqueurs polymorphes ont été colorés, mais seuls deux d'entre eux se sont révélés utilisables: Acon (E.C ) et Me (E.C ). Trois allèles apparaissent pour Acon et deux allèles pour Me (Tableau 1). Acon Me s m f s f ouvrières femelles mâles total Tableau 1. Fréquences alléliques pour les ouvrières, les femelles sexuées et les mâles de Pheidole pallidula à Bruniquel (n= 1200 individus). Les différents allèles sont référencés selon leur vitesse de migration (s: lent, m: médium, f: rapide). Table 1. Allele frequencies for workers, gynes and maies of Pheidole pallidula in Bruniquel (total derived from 1220 individuals). The différent alleles are named according to their relative migration velocity (s: slow, m: médium, f: fast). La déviation de l'équilibre de Hardy-Weinberg est estimée en tenant compte du coefficient de consanguinité F calculé sur la population des ouvrières (Wright, 1951). Le degré de parenté moyen entre ouvrières r (± SE) été estimé sur la base de la fréquence des différents génotypes des ouvrières, selon la méthode de Queller et Goodnight (1989). Cette méthode donne les valeurs de régression des coefficients de

93 parenté, plutôt que le degré de parenté réel entre les individus. Les mâles étant haploïdes, les coefficients de parenté calculés entre une femelle (diploïde) et un mâle doivent être divisés par 2. L'estimation précise du degré de parenté moyen entre ouvrières a été corrigée pour éliminer tout effet lié à la consanguinité, selon l'équation de Pamilo (1985): r*= [r - 2F 1(1 + F}]/[1-2F/(1 + F)l. (1) Pour estimer le nombre d'accouplements par reine, 25 reines et quelques ouvrières ont été récoltées à Bruniquel au début du printemps 1997, et élevées dans des conditions artificielles de laboratoire (Passera, 1980). La détermination du génotype des reines et des jeunes ouvrières qu'elles produisent permet de déduire le nombre de mâles ayant inséminé chaque femelle. Le nombre moyen d'accouplements par reines Me est estimé à partir de l'équation de Pamilo (1993): Me=l/2>i 2 (2) où pi est la contribution observée de chaque mâle dans la descendance d'une reine (Boomsma et Ratnieks, 1996). Le nombre effectif de reines reproductrices par colonie Ne a été estimé à partir de l'équation de Ross (1993), modifiée par Seppà (1994): Ne= (4r s - r q - 2r m ) / (4rf- r q - 2r m ) (3) où rq est le degré de parenté moyen entre reines, r s est le degré de parenté moyen entre soeurs issues d'une même mère, rf est le degré de parenté moyen entre ouvrières d'une même colonie au sein de la population, et r m est le degré de parenté moyen entre les mâles ayant inséminé une même reine. Dans la mesure où les reines sont extrêmement difficiles à récolter en été, et où le degré de polygynie semble relativement faible, nous avons été incapables de déterminer avec précision rq and et r m. Cependant, l'accouplement chez P. pallidula ayant lieu au cours ^importants vols nuptiaux (Bonpart, 1964), la probabilité qu'une femelle s'accouple avec deux mâles apparentés est proche de zéro (r m = 0). Dès lors, seules les valeurs extrêmes de N e ont été estimées, en considérant 1) que les reines reproductrices ne sont pas apparentées (r q - 0) et 2) que le degré de parenté entre reines d'une même colonie est identique à celui calculé pour les ouvrières (rf=r q ). RÉSULTATS Sex-ratio des colonies Comme l'indique la figure 1, la sex-ratio secondaire suit une distribution fortement bimodale. Parmi les 36 colonies produisant des sexués, 31 (86%) ont plus de 80% de sexués appartenant à un seul sexe. La sex-ratio numérique à l'échelle de la population (proportion de femelles parmi tous les sexués) est de Ce qui donne un rapport d'investissement énergétique femelles:mâles de 1.1:1 à l'échelle de la population. Disponibilité des ressources Il existe une corrélation positive significative entre la proportion d'énergie investie dans le sexe femelle et la productivité totale des colonies (y= log x ; r 2 = 0.27, N= 36, p= 0.001; figure 2). En d'autres termes, plus les colonies produisent de sexués, plus l'investissement énergétique est biaisé en faveur du sexe femelle. Organisation socio-génétique de Pheidole pallidula Le coefficient de consanguinité F= 0.06 ± 0.08 n'est pas statistiquement différent de zéro, en accord avec les génotypes observés dans une population panmictique (F^con-

94 0.08 ± 0.09, 0.5, df= 3, N= 39, n.s.; FMe = 0.02 ± 0.09, 0.02, df= 1, N= 3, ns; Li and Horvitz, 1953). v o XI E o prop. de femelles investissement relatif dans le sexe femelle Figure 1. Distribution de la proportion de femelles et de l'investissement relatif en femelles dans les colonies de P. pallidula. Figure 1. Distribution of the proportion of females and of the proportionnai investment in females by individual colonies of P. pallidula.» l B u femelles 0.8 A partir des 25 reines élevées en laboratoire, nous avons obtenu 473 jeunes ouvrières dont le génotype a été analysé. Aucun accouplement multiple n'a été détecté. Compte tenu d'une certaine probabilité de non-détection d'un second accouplement, liée à la taille de l'échantillon et/ou au faible polymorphisme génétique trouvé chez cette espèce, l'estimation la plus précise du nombre moyen d'accouplements par reine obtenue à partir de l'équation (2) est Me < Ce résultat indique que les reines de P. pallidula ne s'accouplent qu'une seule fois (monoandrie). E n -e 1 r 2= 0.27, p= œ CD GO 0 O 0.8 Q3 0.6 AD 0.4 O 0.2 O., / v O o o O o a o o Log (prod. totale en sexués) Figure 2. Proportion d'énergie investie dans le sexe femelle en fonction du logarithme de l'investissement total en sexués (mg) chez P. pallidula. Figure 2. Proportionnai investment in female sexuals as afunction of the total sexual investment (mg) in P. pallidula. Le degré de parenté moyen entre ouvrières d'une même colonie est de r = 0.54 (SE= 0.06). Cette valeur est significativement différente de 0.75, qui est attendue dans les colonies d'hyménoptères présentant une seule reine monoandre (r-test, p < 0.02). Le degré de parenté entre ouvrières, corrigé pour tout effet de consanguinité est r*= Les reines de P. pallidula ne s'accouplant qu'une seule fois, et les ouvrières étant

95 stériles, cette estimation du degré de parenté entre ouvrières indique que le nombre de reines par colonie est la variable sociale la plus importante chez cette espèce. Cette conclusion est également supportée par deux autres résultats: (1) il existe une relation significative entre le degré de parenté entre ouvrières et la parenté entre les ouvrières et les mâles (y= 0.679x ; r 2 = 0.67, p < ), et (2) la valeur de régression du degré de parenté entre ouvrières et mâles est inférieure à 0.5 et la parenté entre les mâles d'une même colonie est faible (r= 0.35, SE= 0.07, significativement différent de 0.5; Mest, p < 0.05) (tableau 2). Ces 2 résultats ne peuvent s'expliquent que par la polygynie. Le nombre moyen effectif de reines par colonie Ne est compris entre 1.56 et 1.75, selon que les reines sont considérées comme apparentées ou non-apparentées. Le nombre effectif de reines reproductrices par colonie et le degré de parenté entre ces reines sont donc les deux paramètres principaux pouvant être à l'origine d'une variation inter coloniale dans les asymétries de parenté chez P. pallidula. Afin de tester le rôle possible des asymétries de parentés dans la détermination de la sex-ratio chez cette espèce, les colonies ont été séparées en 2 groupes distincts sur la base de leur sexratio numérique: les colonies produisant plus de 80% de femelles sexuées et celles produisant moins de 20% de femelles sexuées. Le tableau 2 indique que le degré de parenté moyen entre ouvrières dans les colonies produisant des mâles est significativement supérieur à celui calculé dans les colonies à femelles (respectivement, 0.62 ± 0.08 vs ± 0.13, Mest, t= 2,43, df= 29, p < 0.025). En outre, la parenté entre les femelles sexuées et les ouvrières est également supérieure dans les colonies produisant des mâles (0.56 ±0.11 vs ±0.12; r-test, t= 2,14, df= 19, p < 0.05). Estimation du degré de parenté ± SE Proportion femelles r w-œ r x. w r m-w r m-m > ± 0.13 (12) 0.20 ±0.12 (12) _ < ±0.08 (19) 0.56 ±0.11 (9) 0.43 ±0.11 (19) 0.39 ±0.08 (19) Population 0.54 ±0.06 (39) 0.44 ±0.07 (27) 0.42 ±0.09 (24) 0.35 ±0.07 (24) Tableau 2. Degrés de parenté (valeurs de régression) dans les colonies produisant des femelles (prop. de femelles > 0.80), dans les colonies produisant des mâles (prop. femelles < 020), et dans la population. L'apparentement entre ouvrières (r w - w ), entre ouvrières et femelles sexuées (r g. w ), entre ouvrières et mâles (r m. w ), et entre mâles (r m -m) est indiqué. Table 2. Régression relatedness estimâtes in female-producing colonies (prop.females > 0.80), in male-producing colonies (prop.females < 020), and at the population level. Relatedness between workers (r w. w ), workers and gynes (r g. w ), workers and maies (fm-w)> and between maies (r m - m ) is indicated. L'estimation des asymétries de parenté des ouvrières à l'égard des femelles sexuées et des mâles (rf. w lr m. w ) est de 2.6:1 dans les colonies à mâles. L'estimation des asymétries de parenté au sein des colonies à femelles est malheureusement impossible, car presque aucun mâle n' a été trouvé dans ce type de colonies. Nous avons alors adopté une méthode moins directe, quoique tout aussi efficace, permettant de tester l'existence d'une différence dans les asymétries de parenté entre les deux types de

96 colonies. Nous avons reporté le degré de parenté des ouvrières à l'égard des mâles (r m. w) et des femelles sexuées (rf. w ) en fonction de l'investissement relatif dans le sexe femelle, pour l'ensemble des colonies de la population étudiée (figure 3). Comme on pouvait s'y attendre (cf. tableau 2), la parenté entre ouvrières et femelles sexuées décroît avec l'augmentation de l'investissement énergétique dans le sexe femelle. Toutefois, le degré de parenté des ouvrières à l'égard des mâles décroît également Cette chute de r m. w en fonction de l'investissement énergétique semble plus prononcée que pour rf- w ^ 0.6? 0.4 a w ôuioa QD o B O r2-0.09, p» 0.14 o : o o o '. D 8 r2-0.09, p= SZH O o- -It " investissement relatif en sexués femelles o ? Figure 3. Coefficients de parenté (valeurs de régression) entre ouvrières et femelles sexuées (rg- w ), et entre ouvrières et mâles (r m. w ), en fonction de la proportion d'énergie investie dans le sexe femelle. Figure 3. Colony-level régression relatedness between workers and gynes (rg. w ), and between workers and maies (r m. w ), as a function of the proportionnai investment into gynes. Bien que ces tendances ne soient pas statistiquement significatives, elles suggèrent fortement que les asymétries de parenté pourraient en effet être plus importantes dans les colonies à femelles que dans les colonies à mâles. DISCUSSION Les colonies de la fourmi Pheidole pallidula ont été considérées jusqu'à ce jour comme monogynes. Les résultats de nos analyses génétiques montrent, au contraire, que le polygynie est un phénomène fréquent chez cette espèce. Le degré de parenté moyen entre ouvrières r w. w proche de 0.5, et l'existence d'une relation significative entre r w. w et r m. w indiquent: 1) une polygynie fonctionnelle dans un grand nombre de colonies, et 2) un nombre effectif de reines par colonie relativement faible. Nos résultats montrent également que la sex-ratio chez P. pallidula est fortement influencée par la disponibilité des ressources alimentaires. L'hypothèse de la disponibilité en ressources (RLH) soutient qu'à l'accroissement des ressources alimentaires correspond une augmentation de la productivité totale des colonies en sexués et un investissement biaisé en faveur du sexe femelle (Nonacs, 1986; Rosenheim et al., 1996). L'existence d'une corrélation positive significative entre l'investissement en femelles et la productivité totale des colonies observée dans ce travail supporte cette hypothèse. Cependant, la RLH prédit également que lorsque les ressources sont abondantes, les colonies doivent élever une certaine proportion de mâles. Cette hypothèse ne permet donc pas d'expliquer l'absence de mâles dans près de 25% des colonies échantillonnées. Selon l'hypothèse des asymétries de parenté (RAH), la spécialisation sexuelle résulte de différences dans la structure génétique des colonies. Nos analyses génétiques montrent que les reines ne s'accouplent qu'une seule fois, et que la polygynie est la

97 variable sociale la plus importante chez P. pallidula. Par conséquent, le nombre de reines par colonie et le degré de parenté entre ces reines sont les deux causes principales des variations dans les asymétries de parenté chez cette espèce. Dans la mesure où l'augmentation de la polygynie (lorsque les reines sont apparentées) réduit les asymétries génétiques au sein des colonies, la polygynie est théoriquement associée à une sex-ratio biaisée en faveur du sexe mâle. Inversément, les asymétries de parenté étant maximales dans les colonies monogynes (3:1) (Trivers et Hare, 1976), ces dernières devraient favoriser le sexe femelle. Cependant, lorsque les colonies possèdent plusieurs reines non-apparentées le degré de parenté entre ouvrières est faible mais les asymétries de parenté sont élevées, et atteignent un rapport de 3:1 (Boomsma, 1993). Dans ces colonies, les femelles ont alors une plus grande valeur reproductive que les mâles pour les ouvrières. Par conséquent, lorsqu'il existe des variations entre colonies polygynes dans le degré de parenté entre les reines, comme cela pourrait être le cas dans la population étudiée, la RAH prédit que les colonies au sein desquelles la parenté entre ouvrières est faible sont caractérisées par de fortes asymétries génétiques et par une sex-ratio biaisée en faveur du sexe femelle; alors que les colonies présentant une parenté plus élevée entre ouvrières ont des asymétries de parenté plus faibles et élèveraient préférentiellement des mâles (Boomsma, 1993). Bien que les résultats présentés à la figure 3 ne prouvent pas que les variations dans les asymétries de parenté sont responsables de la spécialisation sexuelle des colonies de P. pallidula (les droites de régression ne sont pas significatives, et les pentes des droites sont relativement similaires), ils semblent néanmoins en accord avec les prédictions de cette hypothèse. La confirmation définitive du rôle des asymétries de parenté dans la bimodalité de la sex-ratio chez cette espèce nécessite toutefois des analyses génétiques plus précises. RÉFÉRENCES Aron S., Passera L., Keller L., Conflits reines-ouvrières et variations de la sexratio chez Pheidole pallidula. Actes Colloques Insectes Soc. 10: Backus V.L. and Herbers J.M, Sexual allocation in forest ants : food limitation does not explain observed pattems. Behav. Ecol. Sociobiol. 30: Bonpart H., Recherches préliminaires sur la biologie de Pheidole pallidula (Hym. Formicoïdea, Myrmicidae). Thèse 3e cyle, Toulouse, 155 pp Boomsma J.J., Adaptive colony sex ratios in primitively eusocial bees. TREE 6: Boomsma J.J., Sex ratio variation in polygynous ants. In: Queen Number and Sociality in Insects (L. Keller éd.), pp Oxford University Press Boomsma J.J. and Grafen A., Intraspecific variation in ant sex ratios and the Trivers-Hare hypothesis. Evolution 44: Boomsma J.J. and Grafen A., Colony-level sex ratio selection in the eusocial Hymenoptera. J. evol. Biol. 3: Boomsma J.J., Keller L. and Nielsen M.G., A comparative analysis of sex ratio investment parameters in ants. Funct. Ecol. 9: Boomsma J.J. and Ratnieks F.L.W., Paternity in eusocial Hymenoptera. Philos. Trans. R. Soc. Lond. 351: Deslippe R.J. and Savolainen R., Sex investment in a social insect: The proximate rôle of food. Ecology 76: Evans J.D., Relatedness threshold for the production of female sexuals in colonies of a polygynous ant, Myrmica tahoensis, as revealed by microsatellite DNA analysis. Proc. Nat. Acad. Se. (USA) 92: Keller L., Aron S. and Passera L., Inter-nest sex-ratio variation and maie brood survival in the ant Pheidole pallidula. Behav. Ecol. 7: Li C.C and Horwitz D.G., Some methods of estimating the inbreeding coefficient. J. Human. Genet. 5:

98 Mueller U.G., Haplodiploidy and the évolution of facultative sex ratios in a primitively eusocial bee. Science 254: Nonacs P., Ant reproductive stratégies and sex allocation theory. Q. Rev. Biol. 61:1-21 ^ Pamilo P., Effect of inbreeding on genetic relatedness. Heréditas 103: Pamilo P., Polyandry and allele frequency différences between the sexes in the ant Formica aquilonia. Heredity 70: Passera L., La ponte d'oeufs préorientés chez la fourmi Pheidole pallidula (Nyl.) (Hymenoptera : Formicidae). Insectes Soc. 27: Queller D.C. and Goodnight K.F., Estimating relatedness using genetic markers. Evolution 43: Rosenheim J.A., Nonacs P. and Mangel M., Sex ratios and multifaceted parental investment. Am. Nat. 148: Ross K.G., The breeding system of the fire ant Solenopsis invicta effects on colony genetic structure. Am. Nat. 141: Seppa P., Sociogenetic organization of the ants Myrmica ruginodis and Myrmica lobicornis: number, relatedness and longevity of reproducing individuals. J. Evol. Biol. 7: Sundstrôm L., Sex ratio bias, relatedness asymmetry and queen mating frequency in ants. Nature 367: Sundstrôm L., Chapuisat M. and KellerL., Conditional manipulation of sex ratios by ant workers: A test of kin selection theory. Science 274: Trivers R. L. and Hare H., Haplodiploidy and the évolution of the social insects. Science 191: Wright S., The genetical structure of populations. Ann. Eugenics 15:

99 103 Actes Coll. Insectes Sociaux, 11: (1998) CONTRIBUTION À LA BIOLOGIE DE TAPINOMA MELANOCEPHALUM (FABRICIUS) (HYMENOPTERA: FORMICIDAE) Xavier Bustosl>2 & Daniel Cherix2>3 1 Universidad del Valle, Departamento de Biologîa, A.A , Cali (Colombia) 2 Musée cantonal de Zoologie, Palais de Rumine, C.P. 448, 1000 Lausanne 17 (Suisse) 3 Institut de Zoologie et d'écologie Animale, Université de Lausanne, 1015 Lausanne (Suisse) Résumé. Dans des conditions de laboratoire il a été possible de montrer que Tapinoma melanocephalum est une espèce qui réunit pour partie les caractéristiques fondamentales d'une espèce vagabonde (tramp species). La polygynie fonctionnelle, l'unicolonialité et la possibilité de formation de nouvelles colonies par fractionnement sont mises en évidence. Mots-clés. Formicidae, Dolichoderinae, Tapinoma melanocephalum, espèce vagabonde. Abstract. Contribution to the biology of Tapinoma melanocephalum (Fabricius) (Hymenoptera: Formicidae) Under laboratory conditions it has been possible to show that Tapinoma melanocephalum could be considered as a tramp species. Functionnal polygyny, unicoloniality and budding are investigated. Key words. Formicidae, Dolichoderinae, Tapinoma melanocephalum, tramp species. INTRODUCTION Tapinoma melanocephalum est une Dolichoderine tropicale de la tribu des Tapinomini, largement répandue sous les tropiques (Forel 1891, Kempf 1972, Fowler et al. 1990, Harada 1990, Bolton 1995). L'activité humaine lui a permis de se propager en milieu naturel dans le sud des États-Unis, par exemple en Floride, où elle est bien installée (Smith 1965), et dans les habitations de zones plus tempérées, au Canada (Ayre 1977, in Nickerson et Bloomcamp 1988). En 1984, elle a été découverte en Allemagne (Steinbrink 1987), ainsi qu'en Suisse dès 1995 (Dorn et al. 1997). Neuf espèces de la tribu Tapinomini sont considérées comme des pestes, appartenant aux genres Tapinoma, Linepithema, Azteca et Conomyrna (Harada 1990). T. melanocephalum représente une peste domestique qui s'introduit dans les bâtiments et les serres, surtout dans les zones comme les salles de bain et les cuisines. Du point de vue alimentaire, elle semble particulièrement attirée par les substances sucrées. Elle est capable d'utiliser de nombreux substrats pour s'installer, dans le milieu naturel le dessous de roches, le bois en décomposition, les plantes, des tas d'herbe morte, sous des détritus ou du feuillage et dans le milieu habité les tiroirs, armoires, vêtements abandonnés et même du métal (Smith 1965, Nickerson et Bloomcamp 1988, Harada 1990). T. melanocephalum est aussi reconnue comme prédatrice de Coléoptères et de Lépidoptères maintenus en élevage (Nickerson et Bloomcamp 1988). En Suisse, par exemple au Jardin Zoologique de Zurich, cette espèce se rencontre dans la zone des animaux exotiques, dont elle consomme les aliments (obs. pers.).

100 On peut dès lors se demander si cette espèce remplit les conditions de base des espèces vagabondes (tramp species sensu Passera 1994). Ces caractéristiques sont les suivantes: - Unicolonialité: c'est-à-dire la capacité d'échanger des individus, ouvrières et reines, entre plusieurs nids occupant une même zone, voir une même région, sans agressivité intraspécifique. - Polygynie: existence de plusieurs reines fonctionnelles. - Réduction ou absence de vol nuptial: la majorité des espèces vagabondes ont perdu la capacité de réaliser des vols nuptiaux, même si les sexués sont ailés, l'accouplement ayant lieu à l'intérieur du nid. La formation des nouvelles sociétés se réalise alors par bouturage. - Migration, forte agressivité interspécifique, petite taille et monomorphisme, stérilité des ouvrières et courte longévité des reines. - Lien étroit avec des environnements humains. Disposant de peu de données relatives à la biologie de cette espèce, nous avons entrepris une recherche visant à mettre en évidence certaines caractéristiques évoquées cidessus. MATÉRIEL ET MÉTHODES Récolte et élevage de colonies de T. melanocephalum. Des colonies contenant des reines, du couvain et des ouvrières ont été récoltées au Jardin Zoologique de Zurich, dans une serre de l'école Polytechnique Fédérale de Zurich (EPFZ) ainsi qu'en milieu urbain dans la ville de Cali (Colombie). On peut supposer que les colonies de Zurich ont la même origine. Elles ont été introduites de Puerto Rico en 1985 dans la serre, d'où elles seraient passées au zoo via des échanges de plantes (K. Dorn, com. pers.). Il est important de signaler que les nids observés, aussi bien à la serre qu'au zoo, se trouvaient à des endroits particulièrement bien chauffés, soit au dessus des tuyaux de chauffage soit à l'intérieur des cages de reptiles et amphibiens tropicaux (avec des températures voisines de 28 C). Pendant l'été, lorsque le chauffage est arrêté, leur présence est fortement réduite. Les colonies ont été installées dans des nids artificiels en insectarium, sous des conditions constantes de température (28 C ±1 C), d'humidité (75%) et de cycle journalier (16h/8h). Les nids consistent en des plaques carrées de plâtre légèrement surélevées de 2 mm. par rapport au sol grâce à des petits supports. Un régime à base de banane, d'oeufs, de sucre et de miel a été mis au point pour les nourrir. Unicolonialité. Des tests d'agressivité ont été menés sur trois groupes de 6 lots de 50 fourmis issues des colonies stocks du zoo. Ils ont consisté à introduire successivement dans chaque lot et suivre visuellement pendant 10 minutes 7 ouvrières provenant du zoo, de la serre et de Cali. Le comportement des ouvrières hôtes envers les ouvrières introduites est noté. Le même test a été effectué en introduisant des ouvrières de la serre sur 4 lots d'ouvrières du zoo après 15 jours d'isolement des hôtes. Dans une deuxième partie, nous avons introduit des reines provenant de la serre et du zoo dans deux groupes de 4 lots de fourmis provenant du zoo. La survie des reines est contrôllée après 24 heures. Ce test a été également répété sur 4 lots de fourmis après 15 jours d'isolement. Polygynie. Six colonies monogynes et 6 colonies digynes contenant chacune 100 ouvrières ont été suivies. Tous les 3 jours on a dénombré le couvain et vérifié son état de

101 développement. Après 80 jours un test d'oviposition similaire a celui employé par Ulloa- Chacôn (1990) sur W. auropunctata a été effectué. Celui-ci consiste à isoler chaque reine avec 50 ouvrières pendant 24 heures au bout desquelles le nombre d'oeufs pondus est dénombré. Formation de nouvelles colonies. Douze lots contenant chacun 100 ouvrières provenant de la serre avec a) des oeufs et des larves au premier stade de développement (LI), b) des larves au deuxième stade (LU) et c) des larves au troisième stade (LUI) ont été réalisés pour observer la capacité d'élevage de sexués par des colonies orphelines et vérifier, dans ce cas, si des accouplements intranidaux avaient lieu. RÉSULTATS Unicolonialité. La figure 1 montre une différence significative entre les pourcentages de mort d'ouvrières de différentes origines introduites dans les colonies provenant du zoo. Les fourmis de Cali ont été tuées à plus de 80%, ce qui n'est pas le cas avec les fourmis de la serre. Un test de Tukey non paramétrique permet de voir que les pourcentages des fourmis de la serre tuées par leurs hôtes après isolement (p=0.8914) ou sans isolement (p=0.5003) ne diffèrent pas significativement de ceux des fourmis issues du zoo tuées par des individus de même provenance. Ceci permettrait de confirmer que les souches de la serre et du zoo ont une origine commune. Il faut signaler que malgré ces observations, les ouvrières de la serre furent approchées en permanence par des ouvrières hôtes en réalisant de longs et nombreux contacts antennaires. En ce qui concerne l'introduction des reines, seules celles provenant du même lieu (zoo) ont été acceptées. Dans les autres cas, 7 reines sur un total de 8 ont été exécutées. % fourmis tuées Figure 1. Pourcentages des individus de T. melanocephalum tués après leur introduction dans des colonies de 50 ouvrières issues du Jardin Zoologique de Zurich Figure 1. Percentages of T. melanocephalum individuals killed afther their introduction in colonies of 50 workers from the Zurich Zoological Garden

102 Huit fourmis d'origine inconnue, récoltées à Lausanne, ont également été tuées lors de leur introduction dans des nids de fourmis provenant du zoo de Zurich. Polygynie. Toutes les colonies ont produit des ouvrières adultes. Les résultats du test d'oviposition montre que la ponte des reines issues de colonies digynes après 80 jours ne diffère pas significativement de celle de reines issues de colonies monogynes (Figure 2). Ponte en 24 h Mann-Whithney U: p= n=6 'BffjgjmtBwai Monogyne i m n=12 Digyne Figure 2. Pontes de reines de T. melanocephalum issues de colonies digynes ou de colonies monogynes. Figure 2. Egg laying from T. melanocephalum queens from digynous or mogynous colonies. Nombre de stades larvaires Une approche préliminaire du nombre de stades larvaires a été faite en prélevant un échantillon d'une centaine de larves d'ouvrières dont la longueur totale a été mesurée (Figure 3). Il semble y avoir trois stades larvaires principaux. Fréquence Longueur des larves (mm.) Figure 3. Distribution des taille sde larves de Tapinoma melanocephalum (n=102) Figure 3. Distribution ofsizes of Tapinoma melanocephalum larvae (n=102)

103 Formation de nouvelles colonies Les colonies orphelines sont capables de produire, à partir de larves de deuxième stade (Tableau 1), des sexués qui peuvent ensuite s'accoupler à l'intérieur du nid. Deux colonies, l'une avec des larves de deuxième stade et l'autre avec des larves de troisième stade n'ont produit que des mâles. Ceci peut être dû à la quantité limitée de larves et d'oeufs introduits dans chaque colonie. Larves I LII + LIII Nombre de colonies testées 4 1 Nombre de colonies ayant produit des sexués 0 1 Type de sexués élevés (M: mâles ; F: femelles) " m.c Nombre d'accouplements intranidaux 0 1 Larves II Larves III M+F M+F 0 1 Tableau 1. Production de sexués des colonies orphelines avec différents types de couvain. Table 1. Alate production by queenless colonies with différent kinds ofbrood. En mai 1997, lors d'une visite à la serre, aucune reine n'a été observée; en revanche, on a trouvé des petits groupes d'ouvrières avec des larves de sexués, lesquels en insectarium ont produit 5 femelles et 5 mâles, dont un accouplement a été observé. Dans les trois cas d'accouplement intranidaux observés (ce dernier et ceux des colonies orphelines testées), les colonies se sont développées normalement. Aucun vol nuptial n'a été observé dans les différentes colonies ayant produit des sexués. DISCUSSION T.melanocephalum semble bien posséder les caractéristiques fondamentales d'une espèce vagabonde (tramp species), à savoir l'unicolonialité, la polygynie et la formation de nouvelles colonies par bouturage. Le concept d'unicolonialité est un peu ambigu dans le cas de cette étude car chez des colonies isolées mais d'origine commune (celles du zoo et celles de la serre à Zurich), nous n'avons pas observé d'agressivité entre les ouvrières mais vis-à-vis des reines provenant d'une autre population locale. Il convient cependant de remarquer que l'introduction de reines dont le statut physiologique n'est pas forcément comparable (âge, etc.) pourrait expliquer cette différence. Des observations comparables (P. Ulloa- Chacon, com. pers.) ont été faites sur Wasmannia auropunctata. Dans le cas des fourmis originaires de Cali et de Lausanne on remarque que l'agressivité est très forte. En effet, elles proviennent de zones très éloignées (Colombie) ou d'origine très différente (Lausanne). Ceci peut être lié aussi en partie aux différences phénotypiques observées entre les fourmis aussi bien de Colombie que de Lausanne par rapport à celles de Zurich. En effet, chez les premières le contraste de couleur entre l'abdomen-thorax et la tête est plus marqué que chez les deuxièmes. En ce qui concerne la polygynie, on s'aperçoit que la différence de ponte entre les reines de systèmes digynes ne diffère pas significativement de celles de reines de systèmes monogynes. Cependant, Keller (1985) a démontré que chez la fourmi d'argentine, une autre Tapinomini, le taux d'oviposition des reines est inversement proportionnel à leur nombre, ceci à cause de la diminution de leur capacité d'attraction d'ouvrières. Cette même observation, a été faite par Ulloa-Chacôn (1990) chez la petite fourmi de feu W. auropunctata. Il faut en plus signaler que le ratio reines/ouvrières est de

104 1/50 chez les colonies digynes et de 1/100 chez les colonies monogynes, ce qui devrait donc favoriser des pontes plus fortes chez les reines provenant de colonies monogynes. La faible taille de l'échantillon des reines issues de colonies monogynes (n=6) par rapport à celui des reines issues de colonies monogynes (n=12) ainsi que les faibles taux de ponte pourraient expliquer ce résultat. De façon similaire à T. sessile (Smith 1928), T. melanocephalum est une espèce dont la ponte des reines semble variable et plutôt réduite par rapport à d'autre espèces de fourmis (Smith 1965). Cette ponte réduite serait compensée par une haute polygynie. Par exemple, nous avons découvert au mois de mars de 1997 dans la serre de Zurich cinq colonies comportant en moyenne 25 reines sur une surface d'environ 1.5 par 0.04 m. Concernant la formation de nouvelles colonies par bouturage, bien qu'elle n'ait pas été entièrement démontrée, elle reste probable (absence de vol nuptial et accouplement intranidal possible). I. Armbrecht (com. pers.), a observé dans une habitation à Cali des pistes d'ouvrières de T melanocephalum transportant des reines encore ailées, lesquelles n'ont pas produit de descendance en laboratoire. Des études sur la disponibilité de glycogène chez les reines ( du type de celles de Passera et al. 1990), permettraient d'avoir une réponse plus claire sur la potentialité de réaliser des vols nuptiaux. L'association avec l'environnement humain semble indispensable à T. melanocephalum dans les zones tempérées, celui-ci lui fournissant des conditions relativement constantes et favorables de température et d'humidité, seuls facteurs apparemment limitants. D'autres études en cours sur son comportement alimentaire permettront d'étudier l'efficacité de cette espèce pour exploiter des sources de nourriture instables que ce type d'habitat offre. Au Jardin Zoologique de Zurich, nous avons observé des ouvrières de T. melanocephalum attaquer des sexués de Ponera ragusae et déplacer des ouvrières de Pheidole sp., beaucoup plus grandes, sur des appâts de miel. Ceci laisse supposer qu'il s'agit d'une espèce avec une forte agressivité interspécifique, bien que de petite taille (1.3 < 1 > 1.5 mm). Il serait judicieux de rester vigilant à l'égard de T. melanocephalum, fourmi dont la plasticité écologique et l'opportunisme lui permet de se propager facilement dès que les conditions climatiques lui sont favorables. Des précautions sanitaires spéciales devraient être prises dans les immeubles susceptibles d'être envahis par cette espèce, tels que les hôpitaux, locaux alimentaires, insectarium, jardin zoologique, etc... REMERCIEMENTS Les auteurs tiennent à remercier les différentes personnes et institutions qui ont permis cette recherche, en premier lieu la Commission Fédérale des Bourses pour Etudiants Etrangers à Fribourg. Le Musée Cantonal de Zoologie et la Société Vaudoise d'entomologie ont fourni les moyens pour mener la recherche et l'aide de Max Hagner à Lausanne a permis de récolter des fourmis dans des bâtiments de la ville. La collaboration de Karl Dorn et Isabelle Landau (Amt fur Gesundheit und Umwelt der Stadt Zurich), de René Honegger conservateur d'herpétologie au Jardin Zoologique de Zurich et de Paul Frick de l'institut de Botanique de l'ecole Polytechnique Fédérale de Zurich a été très importante. Nous remercions également les professeurs Patricia Chacôn de Ulloa et Inge Armbrecht de Penaranda du Département de Biologie de la Universidad del Valle à Cali (Colombie) pour la collection et l'envoi de fourmis, ainsi que pour leurs commentaires. RÉFÉRENCES Bolton, B A New General Catalogue of the Ants of the World. Harvard Univ. Press. Cambridge, Massachussets. 504 pp.

105 Dorn, K., I. Landau et D. Cherix Einschleppung von Tapinoma melanocephalum (Formicidae) in der Schweiz. Mitt. Schweiz Ent. Ges. 70: Forel, A Les Formicides. In: Histoire Physique, Naturelle et Politique de Madagascar. Vol. 20: Histoire Naturelle des Hyménoptères 2. (Grandidier, A. Ed.). Librairie Hachette et C ie, Paris, pp Fowler, H.G., J.V. Bernardi, J.C. Delabie, L.C. Forti et V. Pereira-Da-Silva Major ant problems in South America. In: Applied Myrmecology: A World perspective (R. K. Vander Meer, K. Jaffe et A. Cedeno Eds.). Westview Press, Boulder, Co. pp Harada Ants pests of the Tapinomini tribe. In: Applied Myrmecology: A World perspective (R. K. Vander Meer, K. Jaffe et A. Cedeno Eds.). Westview Press, Boulder, Co. pp Keller, L Etude de la monogynie expérimentale et de ses implications chez une espèce de fourmi polygyne (Iridomyrmex humilis (Mayr)). Travail de Diplôme. Université de Lausanne. 64 pp. Kempf, W. W Catalogo abreviado das formigas da Regiao Neotropical (Hymenoptera: Formicidae). Stud. Entomol. 14: Nickerson, J. C. et C. L. Bloomcamp Tapinoma melanocephalum (Fabricius) (Hymenoptera: Formicidae). Florida Dept. of Agr. Cons. Ser, Div. Plant Ind. Entomol. Cir. 307: 1-2. Passera, L Characteristics of Tramp Species. In: Exotic Ants: Biology, Impact and Control oflntroduced Species (Williams, D.F. Ed.). Westview Studies in Insect Biology, Westview Press, Boulder, Co. pp Passera, L., L. Keller, A. Grimai, D. Cherix, D. Chautems, D. Fortelius, W. Rosengren, et E. Vargo Carbohydrates as energy source during the flight of sexuals forms of the ant Formica lugubris (Hymenoptera: Formicidae). Entomol. Gener. 15: Smith, M. R The biology of Tapinoma sessile, an important house-infesting ant. Ann. Ent. Soc. Amer. 21: Smith, M. R House infesting ants of the eastern U.S. Their récognition, biology and economic importance. USD A Tech. Bull. 1326: Steinbrink, V. H Ein weiterer Nachweis von Tapinoma melanocephalum (Hymenoptera: Formicidae) in der DDR. Angew. Parasitol. 28: Ulloa-Chacôn, P Biologie de la reproduction chez la petite fourmi de feu Wasmannia auropunctata (Roger) (Hymenoptera: Formicidae). Thèse de Doctorat. Université de Lausanne. 161pp.

106 103 Actes Coll. Insectes Sociaux, 11: (1998) DENSITÉ ET DISTRIBUTION DES NIDS CHEZ LA FOURMI ECTATOMMA RUIDUM ROGER (HYMENOPTERA; FORMICIDAE; PONERINAE) Bertrand SCHATZ 1 ' 2-3, Jean-Paul LACHAUD 12, Vincent FOURCASSIÉ 1 & Guy BEUGNON 1 'LEPA, CNRS-UMR 5550, Université Paul-Sabatier, Toulouse Cedex (France) 2 ECOSUR, Apdo Postal 36, Tapachula, Chiapas (Mexique) 3 School ofbiological Sciences, University ofsussex, Brighton BN1 9QG(U.K.) Résumé: La compétition intraspécifique chez les fourmis, surtout lorsque la densité de population est élevée, se manifeste le plus souvent par une distribution des sociétés qui tend à maintenir la plus grande distance possible entre nids voisins. Afin de vérifier si une telle distribution était la règle chez la fourmi néotropicale Ectatomma ruidum, connue par ailleurs pour son faible niveau d'agressivité intraspécifique, nous avons étudié la distribution des colonies de cette espèce et de l'espèce sympatrique E. tuberculatum, dans une zone à très forte densité en nids d'e. ruidum, évaluée à nids/ha. Deux méthodes d'analyse des données ont été utilisées : (a) le calcul de l'indice de Clark et Evans; (b) la comparaison statistique des distances observées au plus proche voisin et des distances théoriques obtenues par simulation informatique. Les deux méthodes montrent que la distribution des colonies est homogène avec une tendance significative à l'éloignement maximum entre les nids, traduisant l'existence d'une territorialité marquée entre colonies voisines. Par contre, les distributions des nids d'e. ruidum et d'e. tuberculatum sont indépendantes, et traduisent bien le faible niveau d'interaction entre ces deux espèces qui exploitent des niches écologiques différentes. Ces résultats confirment l'existence d'une forme de territorialité chez E. ruidum et fournissent un argument supplémentaire en faveur de la structure monodome des colonies de cette espèce. Mots-clés: Compétition intraspe'cifique, structure monodome, Ectatomma ruidum, fourmiponérine. Abstract: Spatial density and distribution of the nests in the ant Ectatomma ruidum Roger (Hymenoptera, Formicidae, Ponerinae). Intraspecific compétition in ants, namely under high population density conditions, is generally expressed by a distribution of the nests tending to maintain the largest distance between neighboring colonies. In order to verify if such a distribution is the rule for the neotropical ponerine ant Ectatomma ruidum, known for its low intraspecific aggressiveness, we studied the colonies distributions of both this species and the sympatric E. tuberculatum, in a site characterized by a very high density of E. ruidum nests, estimated to be 11,200 nests/ha. Two methods were used for data analysis : (a) the caiculation of the Clark and Evans' index; (b) the statistical comparison between the observed mean distance to the nearest neighbor and the theorettcal one obtained by computerized simulation. Both methods show that the colonies are overdispersed (regular distribution). This significant tendency to a maximal distribution between the nests reflects the existence of a noteworthy territoriality between neighboring colonies. On the other hand, the colonies distributions for E. ruidum and for E. tuberculatum are independent, what reflects the low level of interaction between both species which exploit différent ecological niches. These results confirm the existence of some form of territorial behavior in E. ruidum and bring a new argument supporting the monodomous structure of the colonies of this species. Key Words: Intraspecific compétition, modomous structure, Ectatomma ruidum, ponerine ant. INTRODUCTION L'existence de fortes densités en nids chez la ponérine néotropicale Ectatomma ruidum (Pratt, 1989; Lachaud, 1990; Breed et al., 1990), associée à l'existence d'une très faible agressivité entre sociétés de la même espèce pouvant déboucher sur des phéno-

107 mènes de cleptobioses intraspécifïques (Breed et coll., 1990, 1992; De Carli et coll., 1998) et même de kidnappings intraspécifïques (De Carli et coll., 1996; De Carli, 1997), soulève le problème de la structure modome ou polydome des colonies de cette espèce. Diverses études portant notamment sur les relations agonistiques (Jaffé & Marquez, 1987), la reconnaissance des congénères (Gallegos Aguiire et coll., 1997) et les phénomènes de rejets des intruses (Breed et coll., 1992; De Carli et coll., 1998) suggèrent l'existence, au moins à un certain degré, d'une reconnaissance des étrangers et d'une véritable territorialité entre les différentes colonies d'une même population. Cette hypothèse est renforcée par les résultats concernant la distribution régulière des nids d'e. ruidum, obtenus par Levings et Franks (1982) au Panama et par Breed et coll. (1990) au Costa Rica, lors d'études réalisées en conditions de densité en nids moyennes à fortes (1400 à 6000 nids/ha). Afin de vérifier d'une part si une telle distribution homogène des colonies d'e. ruidum se retrouvait dans une situation de densité extrême en nids (» 6000 nids/ha) et, d'autre part, si cette distribution était influencée de la même façon par la compétition intraet interspécifique, nous avons étudié la distribution des colonies de cette espèce et de l'espèce sympatrique E. tuberculatum, dans une zone à très forte densité en nids d'e. ruidum, évaluée à plus de nids/ha (Lachaud et coll., 1996). MATÉRIEL ET MÉTHODES Cette étude a été menée au Mexique de mai à juillet 1995, dans une plantation expérimentale de café (Station Expérimentale de l'inifap) à Rozario Izapa (Municipalité de Cacahoatan, Chiapas, Mexique). Le nombre total de nids d'e. ruidum a été relevé sur deux quadrats totalisant 200 m 2 (2 fois 10 m x 10 m), ainsi que les distances de chaque nid par rapport aux nids immédiatement adjacents. Se reconnaissant facilement par leur entrée d'un diamètre d'environ 3 à 4 mm, les nids d'e. ruidum sont localisés en suivant les fourrageuses retournant à leur colonie. Sur l'ensemble des 224 nids d'e. ruidum relevés, l'existence de deux entrées à moins de 5 cm l'une de l'autre a été rencontrée dans 3 cas seulement où elles ont été considérées comme correspondant au même nid. Les emplacements des nids d'e. ruidum ont été reportés sur des cartes de distribution, ainsi que ceux des nids d'e. tuberculatum dont la densité dans la zone d'étude est connue pour varier de 70 à 300 nids/ha environ (Lachaud et coll., 1996). Le type de répartition des nids a été déterminé par la méthode de Clark et Evans (1954), basée sur la distance moyenne d'un nid à son plus proche voisin. Le calcul de l'indice R pour un quadrat donné est établi selon la formule (1), où (D) correspond à la distance moyenne au plus proche voisin, et (d) à la densité. (1) Indice R de _ Distance observée moyenne au plus proche voisin = D Clark et Evans Distance théorique moyenne établie pour une répartition aléatoire l/(2d 3 ) La valeur de R (variant entre 0 et 2,14) et celle de son intervalle de confiance permettent la détermination du type de répartition des nids étudiés (Fig. 1). Cet indice R a été corrigé ici par la formule de Donnely qui annule "l'effet de bord" (les nids situés aux bords de la zone étudiée étant parfois plus proches d'un nid situé à l'extérieur de cette zone que d'un nid situé à l'intérieur) (Sinclair, 1985). Distribution agrégée, groupée Distribution homogène, régulière 0,50 1, ,00 2,14 R: indice de Clark et Evans Figure 1. Schéma explicatif de la méthode de Clark et Evans. Explanatory scheme of the Clark and Evans' method.

108 Une seconde méthode a été utilisée pour déterminer si le type de répartition des nids d'e. ruidum était influencée par la répartition des nids d'. tuberculatum. Cette méthode est basée sur la comparaison, par un test bilatéral de Student, des distances théoriques et observées au plus proche voisin, en distinguant les deux espèces. Les distances théoriques sont établies au cours de 200 simulations où les nids d'e. ruidum sont placés aléatoirement sur la carte, les nids d'e. tuberculatum (dont la position dépend en conditions naturelles de celle des supports végétaux sur lesquels les colonies de cette espèce construisent le tunnel d'entrée caractéristique de leur nid) restant, quant à eux, à leurs positions originales. RÉSULTATS Analyse des interactions intraspécifiques : densité et distribution des nids d'e. ruidum Le recensement des colonies d'e. ruidum a permis de dénombrer 109 et 115 nids respectivement dans les deux quadrats, soit une densité moyenne de nids/ha ou 1,12 nids/m 2. C'est la plus forte densité relevée jusqu'à présent chez cette espèce, les autres relevés réalisés dans divers pays d'amérique Centrale étant compris entre 1400 et nids/ha (Levings et Franks, 1982; Pratt, 1989; Lachaud, 1990; Breed et al., 1990). Densité en ra re re Indice R Indice R C C Probabilité de nids/100m 2 corrigé corrigé corrigé C corrigé 115 0,693 0,466 0,485 1,486 1,428 9,97 7,77 <0, ,736 0,479 0,499 1,537 1,476 10,74 8,92 <0,0001 Tableau 1. Calculs de l'indice R de Clark et Evans, avec et sans la correction de Donelly. r\: distance moyenne observée entre nids; re: distance théorique entre les nids selon une distribution strictement aléatoire; C: paramètre qui se distribue selon la loi normale centrée réduite permettant de déterminer la probabilité d'une distribution aléatoire des nids étudiés. Table 1. Calculations of the Clark and Evans' R index, with or without Donetty's correction. ra: mean distance observed between the nests; re: theoretical distance between the nests according to a random distribution; C: normally distributed parameter which allows the détermination of the probability of a random distribution ofthe studied nests. Analysé selon la méthode de Clark & Evans, le mode de distribution des nids d'e. ruidum est homogène dans les deux quadrats étudiés (Tab. 1). En effet, la distance observée au plus proche voisin est toujours très significativement supérieure à la valeur théorique. Cette distance au plus proche voisin est en moyenne de 0,71 m alors qu'elle ne serait que de 0,47 m si la distribution était de type aléatoire. Cette distribution régulière des colonies se traduit par un éloignement entre les nids qui tend à être maximum. Analyse des interactions interspécifiques : distribution des nids d'e. ruidum et d'e. tuberculatum Dans tous les cas de voisinage entre les nids d'e. ruidum et ceux d'e. tuberculatum (un nid d'e. ruidum a comme plus proche voisin un nid d'e. tuberculatum ou inversement), les distances observées et théoriques ne sont pas significativement différentes (Tab. 2) alors que la différence est très significative entre nids d'e. ruidum. Quadrat n l ni Distance observée Distance théorique t P. ruidum / E. ruidum ,37(17,35) 47,15 13,187 <.001 E. ruidum / E. tuberculatum 9 42,84(12,48) 47,96 1,230 n.s. E. tuberculatum / E. ruidum 6 37,05(10,17) 45,34 1,997 n.s. E. tuberculatum / E. tuberculatum / /

109 Quadrat n 2 n2 Distance observée Distance théorique t P E. ruidum / E. ruidum 86 71,33 (16,70) 46,18 13,968 <.001 E. ruidum / E. tuberculatum 23 54,94(19,23) 47,66 1,816 n.s. E. tuberculatum t E. ruidum 15 49,20 (19,41) 48,68 0,103 n.s. E. tuberculatum t E. tuberculatum ,34 / / Tableau 2. Comparaison, pour les 2 quadrats, des dislances au plus proche voisin (en cm) observées (moyenne et déviation standard) et théoriques. L'ordre des espèces comparées est important, puisque la comparaison "E. ruidum / E. tuberculatum", par exemple, signifie qu'il s'agit des cas où un nid d'e. ruidum a comme plus proche voisin un nid d'e. tuberculatum. ni et n2: nombre d'interactions étudiées. Table 2. Comparison, within both plots, between observed (mean and standard déviation) and theoretical distances to the nearest neighbor (in cm). The ordrer of the compared species is important: for instance, the comparison "E. ruidum / E. tuberculatum " deals with cases for which the nearest neighbor ofe. ruidum is a nest of E. tuberculatum. ni and n2: number ofstudied interactions. Les distributions des nids de ces deux espèces peuvent donc être considérées comme indépendantes puisque leur mode de distribution est aléatoire : il n'y a ni attirance ni évitement entre les colonies de ces deux espèces. Par contre, la distance observée entre deux nids d'e. ruidum reste toujours très signifïcativement supérieure à la distance théorique (Tab. 2), confirmant ainsi les résultats obtenus précédemment avec la méthode de Clark et Evans sur la tendance des colonies d'e. ruidum à s'éloigner au maximum les unes des autres. DISCUSSION Dans la mesure où les conditions du milieu sont homogènes quant aux sites de nidification disponibles, les sociétés adultes d'insectes sociaux possédant un nid permanent et appartenant à la même espèce ou à des espèces très proches présentent généralement un mode de dispersion régulier, c'est-à-dire un espacement entre les colonies beaucoup plus uniforme que si leur positionnement était dû au hasard (Baroni-Urbani, 1979; Levings et Traniello, 1981; Holldobler et Wilson, 1990). Un tel mode de distribution, signifïcativement régulier, se retrouve de façon caractéristique chez E. ruidum, et ce pour des densités de population très variables : 1400 nids/ha (Breed et coll., 1990), 1800, 3000 et 6100 nids/ha (Levings et Franks, 1982) et jusqu'à et nids/ha (cette étude). Pour ces différentes densités, la distance moyenne au plus proche voisin diminue plus ou moins régulièrement (1,84 m, 1,42 m, 1,19 m, 1,16 m, 0,74 m et 0,69 m respectivement) mais, statistiquement, reste toujours très supérieure à la distance qui correspondrait à une répartition aléatoire. Par opposition, la distribution des colonies d'e. ruidum ne semble pas être influencée par celle des colonies d'e. tuberculatum puisque la distance moyenne au plus proche voisin observée entre ces deux espèces n'est pas signifïcativement différente de ce que l'on obtiendrait pour une distribution aléatoire. Ce résultat, qui peut s'expliquer par l'exploitation de niches écologiques différentes (la première étant plutôt terricole et la seconde plutôt arboricole), confirme l'hypothèse de Levings et Franks (1982) selon laquelle les interactions aversives, quelle que soit leur nature, sont plus fortes entre colonies appartenant à la même espèce qu'entre colonies appartenant à des espèces différentes. La très faible agressivité entre ouvrières provenant de nids différents appartenant à une même population a pu suggérer à certains auteurs (Breed et coll., 1990) que les colonies d'e. ruidum avaient une structure polydome, c'est-à-dire qu'une seule et même colonie se répartissait en plusieurs sous-colonies occupant plusieurs nids, et maintenant un contact étroit entre elles au travers de l'échange réciproque aussi bien de fourrageuses que de couvain. Toutefois ces mêmes auteurs signalent que cette hypothèse n'est pas compatible avec le comportement de rejet manifesté par les résidantes lors des intrusions cleptobiotiques. La capacité des ouvrières d'e. ruidum à faire la distinction entre des congé-

110 nères du même nid ou étrangers a d'ailleurs été démontrée en laboratoire par Jaffé et Marquez (1987) et confirmée au niveau de l'analyse des hydrocarbures cuticulaires de sociétés appartenant à une même population ou à des populations différentes (Gallegos Aguirre et coll., 1997; Jeral et coll., 1997). Ces différents résultats suggèrent l'existence d'une territorialité chez E. ruidum, ce qui semble confirmé d'une part par le fait que les ouvrières marquent les abords immédiats de leur nid et peuvent reconnaître le territoire de leur propre colonie (Jaffé et Marquez, 1987), et d'autre part par le fait que la compétition intercoloniale pour l'occupation de l'espace se traduit par une extension immédiate du territoire d'une colonie donnée après blocage de l'entrée des colonies voisines (Schatz et Lachaud, non publié). La distribution homogène des nids, en confirmant l'existence d'une territorialité, conforte l'hypothèse d'une structure monodome des colonies d'e. ruidum. REMERCIEMENTS Ce travail a été réalisé grâce à des financements émanants du MESR "Sciences de la Cognition", de la Commission Européenne, du programme Cognisciences CNRS auprès de PRESCOT et du Conseil Régional de Midi-Pyrénées, ainsi que du CONACyT au Mexique (projet n 0574P-N). Nous remercions J.A. LÔPEZMÉNDEZ et Alejandro SIBAJA pour leur aide sur le terrain. RÉFÉRENCES Baroni-Urbani C., Territoriality in social insects. In: H.R.Hermann (éd.), Social Insects, vol. 1, pp Academic Press, New York. Breed M.D., P. Abel, T.J. Bleuze and S.E. Denton, Thievery, home ranges, and nestmate récognition in Ectatomma ruidum. Oecologia84: Breed M.D., L.E. Snyder, T.L. Lynn and J.A. Morhart, Acquired chemical camouflage in a tropical ant. Anim. Behav. 44: Clark P.J. and F.C. Evans, Distance to nearest neighbor as a mesure of spatial relationships in populations. Ecology 35: De Carli P., Interactions intraspécifiques chez une fourmi néotropicale : Ectatomma ruidum. Thèse, Toulouse III, 210 pp. De Carli P., J.-P. Lachaud and G. Beugnon, Behavioural plasticity in Ectatomma ruidum Roger (Hymenoptera, Ponerina), in a homospecific interactive situation. Insect Social Life 1: De Carli P., J.-P. Lachaud, G. Beugnon and J.A. Lôpez-Méndez, Etudes en milieu naturel du comportement de cleptobiose chez la fourmi néotropicale Ectatomma ruidum (Hymenoptera, Ponerinae). Actes Coll. Ins. Soc. 11: Gallegos Aguirre B., J.-P. Lachaud, L. Craz Lôpez and P. De Carli, Especificidad del olor colonial y reconocimiento del congénère en la ponerina Ectatomma ruidum (Hymenoptera, Formicidae). Mem. 32 Congr. Nac. Entomol., pp , Metepec (Pue., Mexique). Hôlldobler B. and EO. Wilson, The Ants. Springer-Verlag, Berlin. 732 pp. Jaffé K. and M. Marquez, On agonistic behaviour among workers of the ponerine ant Ectatomma ruidum (Hymenoptera : Formicidae). Ins. Soc 34: Jeral, J.M., M.D. Breed and B.E.L. Hibbard, Thief ants have reduced quantities of cuticular compounds in a ponerine ant, Ectatomma ruidum. Physiol. Entomol. 22: Lachaud J.-P., Foraging activity and diet in some neotropical ponerine ants. I. Ectatomma ruidum Roger (Hymenoptera, Formicidae). Folia Entomol. Mex. 78: Lachaud J.-P., J.A. Lôpez-Méndez, B. Schatz, P. De Carli and G. Beugnon, Comparaison de l'impact de prédation de deux ponérines du genre Ectatomma dans un agroécosystème néotropical. Actes Coll. Ins. Soc. 10: Levings S.C. and N.R. Franks, Patterns of nest dispersion in a tropical ground ant community. Ecology 63: Levings S.C. and J.F.A. Traniello, Territoriality, nest dispersion, and community structure in ants. Psyché 88: Pratt S.C., Recruitment and other communication behavior in the ponerine ant Ectatomma ruidum. Ethology 81: Sinclair D.F., On tests of spatial randomness using mean nearest neigbhor distance. Ecology 66:

111 103 Actes Coll. Insectes Sociaux, 11: (1998) MISE EN EVIDENCE D'UNE ODEUR DE SOUCHE CHEZ BLATTELLA GERMANICA (L.) DANS LA DYNAMIQUE DE L'AGREGATION. Colette RIVAULT & Ann CLOAREC IJMR CNRS n 6552, Laboratoire d'ethologie, Campus de Beaulieu, Université de Rennes I, RENNES Cedex (France) Résumé. Nous avons analysé les facteurs sociaux qui contribuent au maintien de la stabilité et de la cohésion des agrégats chez Blattella germanica (L.). Des tests comportementaux ont confirmé le rôle de substances attractives déposées par contact corporel sur des papiers filtres. Des tests de choix avec des groupes de larves indiquent qu'elles sont attirées préférentiellement sur des papiers imprégnés par l'odeur de congénères, bien qu'elles soient capables de s'agréger sur un papier témoin. Cette odeur est produite et perçue par tous les stades larvaires. Pour la première fois, des expériences comparant l'attractivité de l'odeur de souches provenant de localisations géographiques séparées, révèlent que les blattes sont capables de discriminer et de reconnaître l'odeur des membres de leur propre souche. Toutes les souches testées présentent des performances comparables Devant l'odeur de deux souches étrangères, les larves semblent éviter les papiers imprégnés et restent à l'écart. D'un point de vue évolutif, on peut se demander quelle est la fonction d'une telle reconnaissance entre souches. Mots-clés. Blattella germanica (L.), grégarisme, reconnaissance d'odeur. Abstract. Rôle of strain odour in aggregation dynamics in Blattella germanica (L.). Social factors contributing to the maintenance of the stability and cohésion of Blattella germanica (L.) aggregates were investigated. Behavioural tests confirmed the rôle of the attractive substance deposited on filter papers by body contact. Choice tests with groups of larvae indicated that these larvae were preferentially attracted onto papers conditioned by the odour of their conspecifics, although they were able to aggregate on clean control paper. Our data showed that this odour is produced and perceived by larvae at ail developmental stages. For the first time experiments comparing the attractiveness of odours of populations from well-separated geographical locations revealed that cockroaches are able to discriminate and to recognize the odour of members of their own strain. Ail strains studied presented similar discriminatory capacities. When larvae were presented a choice between odours from two différent unfamiliar strains, they avoided these conditioned papers and remained preferentially in the test dish The function of this récognition between Blattella germanica strains raises questions concerning its evolutionary importance. Key-words. Blattella germanica (L.), aggregation, strain odour récognition.

112 INTRODUCTION La notion de grégarisme a donné lieu à diverses définitions qui essaient toutes d'expliquer ce phénomène complexe. En effet, les individus de certaines espèces vivent en groupe alors que d'autres sont solitaires. On peut poser l'hypothèse d'une attraction sociale permettant le regroupement. En écologie, l'agrégat est défini comme un type de distribution spatiale (Southwood, 1966). En éthologie, le grégarisme se définit comme une tendance à former un groupement sous l'empire de l'attraction réciproque (Grassé, 1952). Chez les blattes, et en particulier chez Blattella germanica, nous avons voulu vérifier ce qu'était cette attraction réciproque et analyser le phénomène qui permet de maintenir la cohésion des agrégats. Depuis les travaux d'ishii et Kuwahara (1967,1968), on sait qu'une substance attractive contenue dans les fèces joue le rôle de phéromone grégaire chez Blattella germanica Lorsque Ritter et Persoons (1975) tentent d'isoler la phéromone, ils mettent en évidence un mélange composé d'hydrocarbures, d'acides gras, de cétones et d'alcool. MacFarlane et Alli (1986) isolent de l'acide lactique. Sakuma et Fukami (1993), isolent des composés complexes qu'ils appellent Blattellastanoside A et B. Mais jusqu'à présent aucun système glandulaire capable de sécréter ces différents composés n'a pu être mis en évidence. Devant les contradictions relevées dans la bibliographie, nous avons réexaminé le problème d'un point de vue éthologique et tenté de vérifier si : 1) l'agrégation observée entre les individus d'un groupe était bien maintenue par une phéromone grégaire; 2) si tous les individus émettent et perçoivent cette phéromone et choisissent leur zone de repos en relation avec les odeurs présentes dans leur environnement. Enfin, nous avons comparé l'effet attractif de l'odeur de souches récoltées dans différentes localités pour tester si les blattes sont capables de discriminer et de reconnaître l'odeur de leur propre souche. MATERIEL ET METHODES Description des tests. On utilise le test d'ishii et Kuwahara (1967). Un groupe de larves placé dans une boîte de Pétri, est soumis à un test de choix entre deux papiers filtre préalablement imprégnés ou non d'odeurs différentes Les tests sont réalisés dans une salle climatisée à 25 C et soumise à une photopériode LD: Pendant les tests les larves n'ont ni eau, ni nourriture; elles ont eu de la nourriture ad libitum avant les tests. Le test est mis en place pendant la phase diurne du nycthémère. Après une anesthésie au CO 2 les larves sont déposées dans la boîte de test. On lit le résultat du test 24 h. après, quand les blattes sont en phase de repos. Les boîtes de tests mesurent 140 mm de diamètre et 20 mm de haut. Les papiers filtre pliés en forme de W sont posés debout dans la boîte. L'imprégnation des papiers se fait avec une proportion de 25 larves de stade 1 pour un papier pendant 3 jours (de J1 à J3). Les tests sont réalisés avec 20 larves de stade 1 âgées de 3 ou 4 jours qui correspond au milieu du premier stade larvaire En effet, on sait que les larves présentent un pic d'activité au milieu de chaque stade larvaire (Dabouineau et Rivault, 1988). Pour vérifier l'effet de l'âge des larves, nous avons testé des larves de stades 2, 3 et 4 par lots de 20 en milieu de stade. Les larves de stades 5 et 6 sont testées par lots de 10 seulement pour des raisons d'encombrement dans la boîte (les chiffres sont

113 multipliés par deux pour faciliter les comparaisons avec les autres stades). La lecture des tests s'effectue 24 h. après la mise en place du test. Le nombre d'animaux présents sur chacun des papiers et dans le reste de la boîte est noté, ce qui nous fait trois positions possibles. Tests de base. Les tests sont réalisés avec des larves issues de la souche Piscine d'âges différents. Test A : Les 2 papiers sont des papiers témoins, non imprégnés. Test B : L'un des papiers est imprégné par les larves qui seront soumises aux tests, et issues de la souche Piscine. L'autre est un papier témoin. Test C : L'un des papiers est imprégné par des larves issues de la même souche que celles qui seront testées c'est-à-dire des blattes issues de la souche Piscine. L'autre papier est un papier témoin. Test D : Les deux papiers sont imprégnés par une odeur de blattes de la souche Piscine; l'un par les blattes qui serviront au tests et l'autre par des blattes issues de la même souche. Ces tests permettent de vérifier le comportement des larves de la souche Piscine dans 4 situations: Le test A permet de vérifier que les larves sont bien attirées par les papiers filtre en l'absence de toute odeur attractive. Il permet également de vérifier comment elles se répartissent sur les deux papiers. Les tests B et C permettent de comparer l'attraction différentielle lorsque l'un des papiers est imprégné par une odeur de blatte. Le test D permet de comparer plusieurs odeurs. Ces tests permettent également de vérifier si la réponse comportementale observée varie en fonction de l'âge. Nous avons testé des papiers imprégnés par des individus d'âges différents. Si l'effet observé est constant pendant tout le développement larvaire, cela signifie que la phéromone est sécrétée pendant tout le développement larvaire. Nous avons testé également des individus d'âges différents. Si le comportement observé persiste pendant tout le développement, c'est qu'il y a toujours perception de la phéromone déposée sur les papiers. Comparaison entre souches Nous avons testé si les larves sont capables de distinguer l'odeur de leur propre souche. Une souche correspond à des blattes capturées en nombre variable, dans des endroits différents, dans deux villes différentes (Rennes, Sète) et élevées ensuite au laboratoire. Six souches ont été testées. Ces tests sont réalisés uniquement avec des larves de stade 1 âgées de 3 ou 4 jours et l'imprégnation des papiers se fait de J1 à J3. Test E : Les tests sont réalisés avec des larves issues de la souche Piscine. Les deux papiers sont imprégnés par une odeur de blattes; l'un par des blattes issues de la souche Piscine et l'autre par des blattes issues d'autres souches issues d'origines géographiques différentes et élevées au laboratoire dans des terrarium isolés. Test F : Ce test est symétrique du précédent et teste le comportement d'individus étrangers face à deux papiers, l'un étant imprégné par leur odeur et l'autre par l'odeur de la souche Piscine. Test G : Les individus testés sont des individus Piscine. Les deux papiers sont imprégnés par une odeur de blattes qui proviennent de deux souches étrangères différentes.

114 Les tests E, F et G permettent de vérifier si les larves sont capables de distinguer et de choisir l'odeur de leur propre souche par rapport à celle d'une souche étrangère issue d'une autre origine géographique. Le test F permet de comparer si les blattes issues de souches différentes présentent toutes les mêmes capacités que la souche Piscine qui nous sert de référence. Le test G permet de vérifier leur comportement en l'absence de l'odeur de leur propre souche et éventuellement de vérifier quelles sont leurs préférences. RESULTATS Tests de Base Pour les tests A, B, C et D, on n'observe pas d'effet lié au stade larvaire (Glm, F = 0, P = 1, ddl = 5, pour chacun des tests). Il y a donc émission et réception de l'odeur déposée sur les papiers pendant tout le développement larvaire, ce qui confirme les données bibliographiques. Ceci nous permet de regrouper l'ensemble des données obtenues pour analyser les résultats des tests A, B, C et D (Tab. 1). Test A : La répartition moyenne montre que les larves ont autant de chance d'aller sur l'un ou l'autre papier (test t de Student, P>0,05). Il faut remarquer une proportion relativement importante de larves qui restent dans la boîte et ne vont pas sur les papiers. En fait, les larves ne se répartissent pas également sur les deux papiers, mais elles choisissent tantôt l'un, tantôt l'autre papier (Tab 1) ce qui explique qu'en moyenne les deux papiers sont également fréquentés. Tests B et C : Le choix entre un papier témoin et un papier imprégné par une odeur de blattes se fait en faveur du papier imprégné (test t de Student, P<0,05). On observe également une diminution du nombre de larves qui restent dans la boîte. Dans le premier cas le papier est imprégné par les blattes qui participent au test et dans le second cas par des blattes issues de la même souche. On n'observe aucune différence significative entre les deux tests (test t de Student, P>0,05), ce qui semble indiquer que les larves testées ne sont pas plus attirées par un papier qu'elles ont imprégné ellesmêmes que par un papier imprégné par des larves de la même souche. Test D : Les blattes restent peu dans la boîte et choisissent d'aller sur les papiers. Elles vont significativement plus souvent sur le papier auto-imprégné que le papier alloimprégné (test t de Student, P<0,05). Un vérification du phénomène, stade par stade indique une tendance (non significative) mais qui va toujours dans le même sens. Cependant on n'observe pas d'augmentation du phénomène avec l'âge. En effet, le papier imprégné par les larves de stade 6, élevées ensemble depuis l'éclosion, n'est pas plus attractif que le papier imprégné par des larves de stade 1 qui ne sont ensemble que depuis 3 jours. Comparaison entre souches L'analyse des résultats des tests E, F et G montre qu'il n'y a pas d'effet souche (Glm, F = 0, P = 1, ddl = 5, pour chacun des tests). Les individus Piscine sont toujours capables de distinguer le papier imprégné par des individus Piscine, du papier imprégné par des individus d'une autre souche. Il en est de même pour les individus issus des 6 autres souches. Nous avons donc regroupé l'ensemble de nos données (Tab. 1).

115 Test Position N Moyenne SE Test A Papier Témoin Papier Témoin Boîte TestB Papier Témoin Pap. Auto-imprégné Boîte TestC Papier Témoin Pap. Allo-imprégné Boîte Test D Pap. Auto-imprégné Pap. Allo-imprégné Boîte TestE Papier Etranger Papier Piscine Boîte Test F Papier Etranger Papier Piscine Boîte Test G Papier Etranger Papier Etranger Boîte TABLEAU 1 : Répartition moyenne des larves dans les différents tests Légende : N : nombre de tests de 20 larves, Moyenne : nombre moyen de larves comptabilisées dans chacune des trois positions par test; SE : écart à la moyenne. Table 1 : Mean distribution of larvae in différent tests. Legend : N : Number of tests with 20 larvae; Mean : mean rtumber of larvae observed on each of the three test positions; SE : standard error. Le test E montre que les individus Piscine choisissent plus souvent le papier Piscine que le papier Etranger. Inversement les individus issus des 6 autres souches choisissent leur papier plutôt que le papier Piscine (Test F). Il n'y a pas de différence significative entre les tests E et F (test t de Sudent, P > 0,05). Avec le test G, les larves Piscine ont le choix entre deux papiers imprégnés par des larves issues de deux souches étrangères (parmi les 6 déjà utilisées). On n'observe aucune différence significative entre la répartition sur l'un ou l'autre papier et dans la boîte qui est d'environ 1/3 pour chaque position. La répartition entre les trois positions semble se faire au hasard et ne pas résulter d'une attraction vers une position particulière.

116 Il faut remarquer la proportion très importante de larves qui restent dans la boîte, contrairement à ce qui se passe dans les tests E et F Comparaison des tests présentant deux papiers "identiques" Trois tests présentent deux papiers "identiques", soit deux papiers témoins (A), soit deux papiers imprégnés par la souche Piscine (D), soit deux papiers imprégnés par deux souches étrangères (G) (Tab. 1). Il est intéressant de comparer la proportion d'animaux qui ne vont pas sur les papiers dans ces 3 tests. Cette proportion est faible dans le cas du test D, où les larves sont attirées par les papiers imprégnés par l'odeur de leur souche. Elle augmente un peu avec le test A, les papiers témoins étant moins attractifs que les papiers imprégnés par l'odeur de la souche d'origine. Cette proportion est nettement plus élevée avec le test G. Les deux papiers imprégnés par des odeurs provenant de souches étrangères semblent peu attractifs, puisqu'on observe une répartition de 1/3 entre les trois positions que nous avons définies. DISCUSSION L'installation des larves de Blattella germanica sur les papiers qu'on leur propose en situation de test ne se fait pas au hasard et répond à des critères bien particulier. Elles préfèrent s'installer sur les papiers plutôt que rester dans la boîte, cette attirance pour les papiers étant d'autant plus élevée que les papiers sont imprégnés par l'odeur de leur souche (auto et allo-imprégnation). De plus, les jeunes larves savent reconnaître l'odeur de leur souche et la choisissent préférentiellement à un papier témoin et à l'odeur d'une autre souche. Lorsqu'elles ont le choix entre deux papiers étrangers, elles sont peu attirées par ces papiers. Jusqu'à présent, les comparaisons entre souche n'ont jamais été envisagées chez les blattes. En fait, nous avons une situation qui pourrait être comparable à celle décrite chez certaines espèces de fourmis ou de termites (Cataglyphis cursor : Nowbahari et al., 1990; Camponotus vagus : Bonavita-Cougourdan et Clement, 1994; Polistes biglumus : bimaculatus Lorenzi et al., 1994; Reticulotermes santonensis ou R. grassei : Vauchot et al., 1996) où la reconnaissance de l'odeur coloniale permet la fermeture des colonies. L'absence d'odeur de colonie ou de toute autre forme de reconnaissance intercoloniale est considérée comme un trait primitif chez certaines abeilles (Wilson, 1971). D'un point de vue évolutif, on peut se demander quelle est la fonction d'une telle reconnaissance entre souches chez Blattella germanica et si la présence d'un tel caractère pourrait être considéré comme une préadaptation à la socialité. REFERENCES Bonavita-Cougourdan, A. & J.L. Clément, Complexité du message chimique cuticulaire chez les fourmis: le modèle Camponotus vagus (Scop ), (Hymenoptera: Formicidae). Memorabilia Zoologica 48:23-37.

117 Dabouineau, L. & C. Rivault, Nourriture et dispersion chez les jeunes larves de Blattella germanica. Insectes Soc. 4: , Grassé, P. P Le fait social: Ses critères biologiques, ses limites. In: Structure et physiologie des sociétés animales. (P. P. Grassé, éd.), CNRS, Paris, pp Ishii, S. & Y. Kuwahara, An aggregation pheromone of the German cockroach Blattella germanica (Orthoptera: Blattellidae). 1. Site of the pheromone production. Appl. Entomol. Zool. 2: Ishii, S. & Y. Kuwahara, 1968 Aggregation of German cockroach Blattella germanica nymphs. Experientia 24: Lorenzi, M.C., A.G. Bagneres, & J.L. Clément, The rôle of cuticular hydrocarbons in social insects: Is it the same in paper wasps? In; Natural history and évolution of paper wasps. (S. Turillazzi and M.J. West-Eberhard, eds), Oxford, University press, pp MacFarlane, J E. & I. Alli, Aggregation of larvae of Blattella germanica (L.) by lactic acid present in excreta. J. Chem. Ecol. 72: Nowbahari, E., A. Lenoir, J.L. Clément, C. Lange, A.G. Bagneres & C. Joulie, Individual, geographical and experimental variation of cuticular hydrocarbons of the ant Cataglyphis cursor (Hymenoptera: Formicidae): their use in nest and subspecies récognition. Biochem. Syst. Ecol, 18: Ritter, F. J. & C.J. Persoons, Recent development in insect pheromone research in particular in the Netherlands. Ne th. J. Zool. 25: Sakuma, M. & H. Fukami, Aggregation arrestant pheromone of the German cockroach Blattella germanica (L.) (Dictyoptera: Blattellidae): isolation and structure elucidation ofblattellastanoside-a and -B. J. Chem. Ecol, 79: Southwood, T. R. E., Ecological methods with particular reference to the study of insect populations. Methuen, London. Vauchot, B., E. Provost, A.G. Bagneres & J.L. Clément, Régulation of chemical signatures of two termite species, Reticulitermes santonensis and R. (I.) grassei, living in mixed colonies. J. Insect Physiol. 26: Wilson, E.O., The insect societies. Belknap Press, Havard.

118 103 Actes Coll. Insectes Sociaux, 11: (1998) RÔLE DES VIBRATIONS DANS LA COMMUNICATION D'ALARME CHEZ DEUX ESPÈCES DE TERMITES CHAMPIGNONNISTES : PSEUDACANTHOTERMES SPINIGER ET P. MIL1TARIS Sophie CONNÉTABLE, Alain ROBERT & Christian BORDEREAU Développement - Communication Chimique, CNRS UMR 5548, Université de Bourgogne, 6 Bd Gabriel, Dijon (France) Sophie.Connetable@u-bourgogne.fr Résumé. Quand ils sont perturbés, les soldats des deux espèces de termites supérieurs P. spiniger et P. militaris frappent le substrat avec leur tête et émettent ainsi des sons. Ce comportement d'oscillation est structuré en salves composées d'un nombre variable de coups répétés régulièrement. La mise au point d'un appareil de stimulation artificielle a permis de démontrer que ce comportement est un système de communication d'alarme. Le signal est transmis par le substrat et non par l'air, il ne s'agit donc pas de communication acoustique et la perception des vibrations déclenche une réponse polyéthique chez un groupe d'individus récoltants. Les caractéristiques de ce comportement d'alarme sont différentes chez P. spiniger et P. militaris, mais ces signaux ne semblent pas intervenir dans la reconnaissance spécifique chez ces deux espèces sympatriques. Mots-clés. Vibrations, comportement, alarme, Macrotermitinae, Pseudacanthotermes. Abstract. Rôle of head-banging in alarm communication in two fungusgrowing termites : Pseudacanthotermes spiniger and P. militaris. When they are disturbed, soldiers of the two higher termite species Pseudacanthotermes spiniger and P. militaris hit the substratum with their head, producing thereby sounds. The oscillatory or head-banging behaviour is structured in sériés, or bursts, of regular beats. Artificial stimulation proved that head-banging is an alarm communication system. The signal was not transmitted through the air but through the vibrations induced in the substratum. Perception of the vibrations produced by head-banging termites induced a polyethic response. Différences in the frequencies of the oscillatory movements appeared between P. spiniger and P. militaris but we could not show that these différences play a rôle in species récognition. Key words. Vibrations, behaviour, alarm, Macrotermitinae, Pseudacanthotermes. INTRODUCTION L'efficacité des mécanismes de communication des termites leur permet de former des sociétés d'une taille considérable. Ils se déplacent et vivent en groupes très denses et représentent donc des proies faciles pour un grand nombre de prédateurs. Face à ces prédateurs, les termites ont dû développer de nombreuses stratégies de protection et de défense. Ces stratégies sont notamment mises en oeuvre lors de la récolte de la nourriture qui, chez de nombreuses espèces, se fait à l'extérieur du nid. Les mécanismes individuels de défense sont renforcés chez les termites par des systèmes de communication assurant la coordination de la défense. Ces systèmes peuvent être de type chimique comme les phéromones d'alarme et de piste qui permettent aux individus de s'associer face à une

119 menace (Pasteels & Bordereau, 1997) ou de type mécanique comme les mouvements d'oscillation du corps que l'on peut observer chez les soldats de certaines espèces après une perturbation. Ces mouvements d'oscillation sont connus depuis longtemps par le bruit de crépitement qu'ils produisent lorsque l'individu frappe le sol. Ainsi, dans une des premières études consacrées aux termites, Smeathman (1781) montre que les soldats de Macrotermes bellicosus émettent des sons en frappant le substrat avec la face inférieure de la tête. Il s'agit, selon lui, d'un "signal d'alarme" de la colonie, le son avertissant la population du danger. Par la suite, de tels comportements d'oscillation du corps ont également été observés chez de très nombreuses espèces d'isoptères, mais ce comportement n'a été étudié en détail que chez quelques termites inférieurs : Zootermopsis angusticollis (Howse, 1962 et 1964), Z. nevadensis (Stuart, 1988 ; Kirchner et al., 1994) et Coptotermes lacteus (Stuart, 1988). Chez les termites supérieurs, ce comportement reste inexploré et ceci malgré l'importance qu'il semble avoir dans la vie de leurs sociétés très populeuses. Par ailleurs, les signaux d'alarme pourraient intervenir dans des processus d'isolement colonial ou spécifique, primordiaux dans le cas d'espèces confrontées à une forte compétition. C'est le cas notamment chez deux espèces du genre Pseudacanthotermes (P. spiniger et P. militaris) qui sont sympatriques dans plusieurs plantations de canne à sucre d'afrique équatoriale (Mora, 1992 ; Dibangou, 1994). Les relations entre ces deux espèces sont d'autant plus complexes qu'elles partagent le même composé principal pour la phéromone de piste et la phéromone sexuelle (Bordereau et al., 1991 ; Laduguie et al., 1994). L'isolement spécifique pourrait donc faire intervenir, en plus des processus chimiques classiquement étudiés (composés secondaires des phéromones, hydrocarbures cuticulaires,...), des processus physiques tels que les vibrations pour lesquels nos connaissances sont très pauvres. Nous avons donc analysé les caractéristiques du comportement d'oscillation ainsi que son rôle dans la communication chez les populations récoltantes de P. spiniger et P. militaris. MATÉRIEL ET MÉTHODES P. spiniger et P. militaris sont deux espèces de termites supérieurs champignonnistes appartenant à la sous-famille des Macrotermitinae. Les individus utilisés pour cette étude proviennent de deux colonies de P. spiniger fondées au Gabon en 1988 et huit colonies de P. militaris fondées au Congo en Toutes ces colonies sont maintenues au laboratoire à 28 C et 80 % d'humidité, dans des bacs en altuglas remplis de terre argileuse (50x70x70 cm). L'alternance jour/nuit est de 12/12 h. Les observations ont été réalisées sur les populations récoltantes pendant la période de nuit. Les grands soldats ne s'aventurant que très rarement à découvert sur les lieux de récolte, toute l'étude à été réalisée sur des petits soldats. Pour déclencher les vibrations, plusieurs types de stimuli ont été testés : une odeur associée à un mouvement d'air (souffle du manipulateur), l'intrusion d'une blatte, l'allumage brusque de la lumière et un coup sec sur le bois. Les mouvements ont été décomposés à l'aide d'une chaîne d'acquisition vidéo-rapide constituée d'une caméra couplée à un ordinateur PC. Ce système expérimental permet d'obtenir un maximum de 40 images (190x122 pixels) enregistrées à une vitesse de 300 images par seconde. Ces enregistrements ont été réalisés au Laboratoire d'électronique et d'informatique de l'image (LE2I) à Dijon. Les enregistrements audio des sons produits par les termites ont été obtenus à l'aide d'un magnétophone NAGRA IV-D et d'un microphone SENNHEISER MD211N (vitesse de la bande 9 cm/s) placé à 1 cm du ou des soldats. Le comportement étant structuré en salves de coups, le nombre de coups par salve a été déterminé en repassant

120 les bandes magnétiques a une vitesse de 2,25 cm/s. Le rythme des alternances salve/immobilité et le rythme des coups à l'intérieur d'une salve ont été déterminés par des analyses acoustiques obtenues avec le logiciel Hypersignal (Hyperception] au laboratoire "Image Signal Acoustique" de l'école Supérieure de Chimie, Physique et Electronique de Lyon. Le nombre de coups par salve a été étudié sur les enregistrements de 32 individus (692 salves) chez P. spiniger et 31 individus (638 salves) chez P. militaris. Les intervalles de temps entre deux coups d'une même salve ont été mesurés sur 135 salves (663 coups) réalisées par P. spiniger et sur 143 salves (616 coups) réalisées par P. militaris. Des individus isolés ne produisent que très rarement (5% des cas environ) plus d'une salve sans nouvelle stimulation. Les intervalles de temps séparant deux salves n'ont donc pu être mesurés que sur 4 enregistrements chez P. spiniger et 3 enregistrements chez P. militaris. La reproduction artificielle des signaux a pu être obtenue grâce à la mise au point, en collaboration avec le laboratoire LE2I, d'un système composé d'un générateur de fonction Hewlett Packard HP 33120A couplé à un haut-parleur sur la membrane duquel un petit morceau de métal destiné à frapper le sol est fixé. Ce système permet de faire varier l'intervalle de temps entre deux salves, le nombre de coups par salve ainsi que l'intervalle de temps entre ces coups. Le dispositif est placé, soit sur un morceau de bois où des individus récoltent, soit à quelques centimètres au-dessus des individus récoltants, soit sous une feuille de papier filtre sur laquelle un petit soldat est posé. La transmission des vibrations d'un groupe d'individus à un autre a été analysée grâce à un système permettant aux individus de ne communiquer que par le sol (Fig. 1). Un groupe est stimulé par une odeur et la réaction des individus placés de l'autre côté de la barrière est observée. A 40 cm Fig. 1: Schéma du dispositif utilisé pour étudier la transmission des vibrations d'un groupe d'individus à un autre. Les individus sont placés sur la feuille de papier (B) qui traverse la barrière souple (A). Fig. 1: Device used to study the transmission of the vibrations through the substratum from one group of termites to another. Minor soldiers are placed on the paper sheet (B), one group on each side ofthe flexible barrier (plastic film, A) that allows propagation of the vibrations. RESULTATS Les enregistrements vidéo nous ont permis de déterminer les stimuli déclenchant les vibrations. Les principaux stimuli (tableau 1) sont les odeurs et les mouvements d'air,

121 alors que l'intrusion d'une blatte, une lumière vive ou un coup sur le sol semblent avoir peu d'effet. Seuls les soldats produisent ces oscillations, les ouvriers réagissent à tous ces stimuli en s'enfuyant vers l'intérieur du nid. Odeur et mouvement d'air Coup sur le substrat Lumière brusque Intrusion d'une blatte P. spiniger P. militaris Tableau 1: Influence de différents stimuli sur le déclenchement des vibrations chez les soldats des deux espèces ; oscillation de plus de 50% des soldats + : moins de 10% des petits soldats répondent Table 1: Effect ofvarious stimuli on the oscillation behaviour ofsoldiers ofboth species ++++ : oscillation behaviour in more than 50% of the soldiers + : in less than 10% ofthe soldiers Les images vidéo-rapides ont permis de décomposer les mouvements des petits soldats en plusieurs phases. L'analyse de l'enregistrement d'un petit soldat de P. militaris (Fig. 2) montre que, lors de ce mouvement, l'individu soulève toute la partie antérieure de son corps (tête et thorax) alors que l'abdomen s'abaisse. Cette phase ascendante est suivie d'une phase d'attente d'environ 3 ms puis d'une phase descendante à la fin de laquelle l'individu frappe le substrat avec la partie inférieure de sa tête ou gula. La durée totale du mouvement est de 20 ms. Le mouvement de P. spiniger est identique. Fig. 2 : Enregistrement vidéo-rapide (300 images/seconde) d'un mouvement d'oscillation d'un petit soldat de P. militaris. Fig. 2 : Video recording ofthe oscillation behavior of a P. militaris minor soldier (Recording speed: 300f rame s / second), La figure 3A représente un enregistrement acoustique des sons produits par les vibrations d'un groupe de petits soldats de P. spiniger. On peut voir des groupes de sons correspondant aux salves de coups réalisées par les petits soldats présents sur le lieu de

122 récolte. Ces salves sont séparées par des pauses dont la durée varie peu et pendant lesquelles aucun soldat ne vibre. Cette figure permet donc de montrer l'existence d'un synchronisme chez les soldats. On observe le même phénomène sur l'enregistrement de P. militaris. L'analyse des fréquences des sons enregistrés montre que le signal n'a ni harmoniques, ou fréquences multiples des fréquences fondamentales, ni variations de ces fréquences au cours de la durée du signal (Fig. 3D). Ceci permet d'affirmer que nous sommes bien en présence d'un bruit "blanc", c'est à dire provoqué par un choc, pour les deux espèces étudiées. Chez P. spiniger (fig. 3B), l'intervalle de temps séparant deux salves varie entre 1 et 2 s, ce qui correspond à une fréquence allant de 0,5 à 1 salve/seconde. Chez P. militaris, cet intervalle varie entre 1 et 2,5 s, c'est à dire entre 0,4 et 1 salve/seconde. Chez P. spiniger les salves étudiées (fig. 3C) sont composées de 1 à 10 coups, mais nous avons pu observer par ailleurs un maximum de 13 coups par salve. Chez P. militaris, les salves sont composées de 1 à 8 coups (maximum observé : 12 coups). Le temps moyen entre deux coups d'une même salve est de 55 ms chez P. spiniger (x = 18,88 ± 4,14 coups/seconde) alors qu'il est de 71 ms chez P. militaris (x = 14,10 ±2,73 coups/seconde). Les comparaisons effectuées deux à deux entre une colonie de P. spiniger et une colonie de P. militaris montrent que l'intervalle de temps séparant deux coups frappés par un soldat de P. spiniger est toujours significativement inférieur à celui observé chez P. militaris. Grâce à l'appareil de stimulation artificielle que nous avons mis au point, nous avons pu tester l'impact des oscillations sur les congénères. La ré-émission de signaux enregistrés grâce au haut-parleur permet d'affirmer que la propagation du signal se fait par le sol et non par l'air. Les termites n'ont en effet aucune réaction si le haut-parleur est placé à 1 cm au-dessus du substrat alors que l'application du dispositif frappeur sur le substrat déclenche la fuite des ouvriers à l'intérieur du nid. Les soldats répondent à cette stimulation par trois comportement différents : la fuite, l'immobilisation et l'oscillation. Les proportions de ces trois comportements au sein d'une population de soldats varient suivant l'état de perturbation de la colonie. Les résultats obtenus en faisant varier la structure du signal sont identiques pour les deux espèces et montrent que le rythme de ces vibrations ne parait pas avoir une grande importance. En effet, n'importe quelle vibration ressentie dans le sol entraîne la fuite des ouvriers et des oscillations de la part de certains soldats présents. Toutefois, quand le rythme des salves ne correspond plus à celui que peuvent fournir les soldats, la réponse est moins nette et elle n'est pas synchrone à la stimulation. Quand on fait varier uniquement la fréquence des coups à l'intérieur d'une salve (avec une fréquence entre deux salves de 0,7 salves/seconde et 4 coups par salve), on observe (tableau 2) que quelle que soit la fréquence des coups, le système déclenche toujours un comportement d'oscillation chez certains petits soldats présents. Mais les valeurs proches de celles mesurées chez les deux espèces en provoquent plus que les autres. Dans les cas où on observe peu d'oscillations, la stimulation entraîne soit l'immobilité, soit la fuite. Les résultats obtenus en faisant varier la fréquence des salves sont tout à fait comparables à ceux obtenus précédemment : toutes les valeurs (de 0,1 salves/seconde à 10 salves/seconde) déclenchent des oscillations, mais les valeurs situées entre 0,4 et 3 salves/seconde engendrent plus de réponses. En revanche, on observe toujours une réponse de grande ampleur quel que soit le nombre de coups par salve (valeurs testées comprises entre 1 et 20).

123 P. spiniger P. militaris Tableau 2: Réaction des petits soldats des deux espèces à des stimulations de fréquences variables (en coups/seconde) : plus de 40 % de soldats oscillent ++ : de 10 à 20% de réponses +++ : de 20 à 40% de réponses + moins de 10% de réponses Table 2: Reaction ofthe small soldiers ofboth species to stimulations with various beats frequencies ++++: oscillation of more thon 40% ofthe soldiers ++:10to20% +++ : 20 to 40% + less than 10% Pour étudier la spécificité des vibrations, nous avons recherché si deux groupes de soldats posés sur une même feuille de papier mais séparés par une barrière peuvent présenter un comportement d'oscillation après stimulation d'un seul groupe. Que les deux groupes testés soient homo- ou hétérocoloniaux, homo- ou hétérospécifiques, on observe toujours que tous les individus oscillent simultanément. Si on procède à la même expérience alors que les deux groupes ne sont plus sur la même feuille de papier, on n'observe aucune réponse. Ce comportement d'alarme ne semble donc pas jouer de rôle dans la reconnaissance spécifique. DISCUSSION ET CONCLUSION Les résultats obtenus montrent que les oscillations verticales des petits soldats entraînent bien, chez les deux espèces de termites champignonnistes P. spiniger et P. militaris, une réaction de fuite face à un danger éventuel. En effet, ce comportement intervient uniquement quand la colonie est perturbée et les vibrations provoquées ont un impact important sur la population d'ouvriers qu'elles font fuir à l'intérieur du nid. Les soldats peuvent répondre en s'immobilisant, en s'enfuyant ou en produisant eux-mêmes des vibrations, ce qui permet une propagation et une amplification du signal au sein de la population récoltante. Les paramètres qui contrôlent la réponse des soldats aux vibrations sont encore mal connus. P. spiniger et P. militaris présentent des différences en ce qui concerne le rythme d'émission et la durée des mouvements oscillatoires. Toutefois, s'il existe une spécificité dans les caractéristiques physiques du mouvement, celle-ci ne correspond pas à une spécificité de réponse : les résultats obtenus avec le mécanisme de stimulation artificielle montrent que les individus réagissent à un éventail très large de fréquences. Cette spécificité ne semble donc pas pouvoir aboutir à une discrimination des deux espèces ; elle pourrait être simplement due à la différence de taille et de poids des individus. Le même type de comportement d'alarme a également été décrit chez des termites inférieurs. Chez Zootermopsis angusticollis (Howse 1962 a, 1964 a, 1965 ; Stuart, 1988) et Z. nevadensis (Stuart, 1988 ; Kirchner et al., 1994), les oscillations verticales sont réalisées par les ouvriers et les larves qui frappent le plafond des galeries avec la face dorsale de leur tête et par les soldats qui frappent le sol avec la pointe de leurs mandibules et le plafond avec leur tête. La structure temporelle des signaux est identique à celle des deux espèces du genre Pseudacanthotermes, mais les résultats obtenus avec un système de reproduction artificielle des vibrations montrent que, contrairement à ce que nous avons pu observer, les individus ainsi stimulés ne répondent jamais par des oscillations. Chez Coptotermes lacteus (Stuart, 1988), les caractéristiques du comportement oscillatoire sont plus proches de celles observées chez P. spiniger et P. militaris. Les vibrations provoquent la fuite des ouvriers dans le nid ainsi que le déploiement des

124 Figure 3 Analyses acoustiques des sons produits par les oscillations des petits soldat de P. spiniger: A : Enregistrement de 6 salves réalisées par les soldats dune C : Détail de la première des 5 salves présentées en D, composée de 11 coups. population récoltante. B : Enregistrement (composé de 5 salves) d'un petit soldat isolé. D : Analyse spectrographique d'un enregistrement d'un individu isolé. Figure 3 : Acoustical analysis ofthe sounds produced by the head-bangings ofp. spiniger minor soldiers A : Time analysis of a succession of 6 bursts carried out by the C : Enlargement ofthefirst burst shown in B, mode upofll beats. B^lT^Iam^s^frs P uccètsion of 5 bursts carried out by an D : Spectrographic analysis ofa P. spiniger minor soldier's burst. isolated minor soldier.

125 soldats autour de la zone de récolte, c'est à dire une réponse polyéthique comme chez Pseudacanthotermes. Stuart (1988) conclut que les mécanismes vibratoires d'alarme ont évolué depuis un signal peu structuré chez des termites primitifs tels que Zootermopsis vers un signal complexe associé à une réponse polyéthique chez Coptotermes, termite inférieur assez évolué. Nos résultats, qui montrent que l'alarme vibratoire des termites supérieurs est au moins aussi complexe que celle observée chez Coptotermes, vont dans le sens de cette hypothèse, mais des travaux sur d'autres espèces, ainsi qu'une étude de la transmission des vibrations dans le sol et de leur perception par les termites, seraient nécessaires avant de conclure. REMERCIEMENTS Nous souhaitons remercier Mme N. Gâche du laboratoire "Image Signal Acoustique" de l'ecpe Lyon et Mr Y. Tupinier sans qui les analyses acoustiques n'auraient pas été possibles. Les images vidéo-rapides ont été obtenues grâce à la caméra expérimentale de Mr F. Bouffaut (LE2I, Dijon) et Mr B. Michaux (LE2I, Dijon) nous a permis de mettre au point le système de stimulation artificielle. Nous remercions également Mr le Professeur C. Noirot et Mme B. Wobst pour leur aide et leurs commentaires lors de la rédaction de ce manuscrit. RÉFÉRENCES Bordereau, C., A. Robert, O. Bonnard and J.L. Le Queré, (3Z,6Z,8E)-3,6,8- Dodecatrien-l-ol : sex pheromone in a higher fungus-growing termite, Pseudacanthotermes spiniger (Isoptera, Macrotermitinae). J. Chem. Ecol. 17: Dibangou, V., Etude comparée de la biologie et du métabolisme digestif de deux espèces de termites (Pseudacanthotermes spiniger et P. militaris) des plantations de canne à sucre de la vallée du Niari (Congo). Thèse de Doctorat, Univ. Paris XII, 181 pp. Howse, P.E., Oscillation movements in the termite Zootermopsis angusticollis (Emerson). Symp. Genetica Biol. Italica 11: Howse, P.E., The significance of the sound produced by the termite Zootermopsis angusticollis (Hagen). Anim. Behav. 12: Kirchner, W.H., I. Broecker and J. Tautz, Vibrational alarm communication in the damp-wood termite Zootermopsis nevadensis.. Physiol.Entomol. 19: Laduguie, N., A. Robert, N. Salini and C. Bordereau, Les termites et le Dodécatrienol. Actes Coll. Ins. Soc. 9: Mora, P., Dégâts des termites champignonnistes (Macrotermitinae) Pseudacanthotermes spiniger et Microtermes subhyalinus dans les plantations de canne à sucre ; mise au point d'une lutte spécifique. Thèse de Doctorat, Université Paris Xn, 176 pp. Pasteels, J.M. and C. Bordereau, Releaser pheromones in termites. In: Pheromone communication in social insects : ants, wasps, bees and termites (Van der Meer, R.K., Breed, M.D., Winston, M.L. and K.E. Espelie Eds). Westview press, Boulder, USA, 368 pp. Smeathman, H., Some account on the termites which are found in Africa and other hot climates. Phil. Trans. R. Soc. London 71: Stuart, A.M., Preliminary studies on the significance of head-banging movements in termites with spécial reference to Zootermopsis angusticollis (Hagen) (Isoptera : Hodotermitidae). Sociobiol. 14 :

126 103 Actes Coll. Insectes Sociaux, 11: (1998) IMPLICATIONS PHYLOGENETIQUES DU MECHANISME DE RECRUTEMENT CHEZ Rossomyrmex minuchae (HYM. FORMICIDAE) Alberto TINAUT & Francisca RUANO Departamento de Biologîa Animal y Ecologîa, Facultad de Ciencias, Granada. (Espagne) Résumé Le genre Rossomyrmex est un parasite esclavagiste de différentes espèces de Proforrmca. L un des aspects le plus remarquable de ces fourmis est que le recrutement des individus qui réalisent l'assaut tt la colonie cible s'effectue par transport des adultes. Cette méthode n'est utilisée chez les autres Formicidés que pour le déménagement de la fourmilière ou les échanges entre nids. Nous analysons les avantages et inconvénients que peut avoir cette méthode en comparaison avec le recrutement de groupe. Les raisons qui pourraient rendre plus avantageuse cette méthode de recrutement chez une espèce esclavagiste peuvent être un moindre coût énergétique pour la colonie ou bien une plus grande efficacité au moment de l'assaut De notre analyse il ressort quelques inconvéments pour Rossomyrmex. La proximité phylogénétique de ce genre avec Proformica et Cataglyphis, genres dans lesquels l'unique méthode de recrutement connue est le transport des adultes, nous amène à penser que Rossomyrmex utilise pour ses raids l'unique moyen dant elle dispose. Mots-clés. Rossomyrmex, esclavagisme, recrutement, phylogénie Summary. Phylogenetic implications of the recruitment mechanism of Rossomyrmex minuchae (Hym. Formicidae). The genus Rossomyrmex is a slave-maker of différent Proformica species. The recruitment system used by this genus against host nests is adult transport. This particular method is used by the other ants généra only for nest relocation or exchanges between nests. In this work, we analyse the advantages and disadvantages of recruitment by adults transport in comparison to group recruitment. The advantages of this recruitment method for a slave-maker species may be lcss energetic effort expended by the nest, or more efficiency in carrying out assaults. In our analysis, we found only a few disadvantages for Rossomyrmex. The phylogenetic position of this genus close to Proformica and Cataglyphis, both of which only use adult transport, may suggest that Rossomyrmex uses this recruitment method because it does not have any other possibility. Key words Rossomyrmex, slavery, recruitment, phylogeny INTRODUCTION Le recrutement est un moyen de communication qui permet de conduire un autre membre de la société dans un point de l'espace où sa présence est nécessaire (Wilson, 1971) et permet un important succès évolutif dans l'optimisation de la récolté de nourriture (Oster et Wilson, 1978; Acosta et al., 1986). Chez les insectes sociaux, de manière générale, les tâches qui requièrent l'intervention de plusieurs ouvrières, et donc l'utilisation du recrutement, sont le fourragement, le déménagement de la colonie et la défense. Le recrutement en tandem et le recrutement de groupe sont les modes les plus fréquents dans les fourmis, alors que le transport d'adultes est essentiellement utilisé pour le déménagement du nid (Holldobler et Wilson, 1990). Par ailleurs, le tandem et le recrutement de groupe nécessitent implicitement l'utilisation de substances chimiques d'attraction, alors que le transport d'adultes (et dans certains cas, le tandem également) est basé sur des stimuli physiques (comportement d'invitation) (Wilson, 1971; Agbogba, 1984; entre autres).

127 Le recrutement est caractéristique de chaque espèce donc de sa position phylogénétique, bien que son expression dépende de plusieurs facteurs, tels que la taille ou la densité des proies et les conditions de l'environnement. En outre, le recrutement peut continuellement s'ajuster face à des situations changeantes des ressources alimentaires ou du milieu(detrain et al., 1990; Crist et Mac Mahon, 1991; Baroni Urbani, 1993). Chez les espèces esclavagistes (Tableau 1) le recrutement est utilisé lors des raids d'approvisionnement en esclaves (il s'agit d'ailleurs là de l'unique comportement que ces fourmis manifestent hors du nid). SPECIES NEST RELOCATION RAIDS MYRMICINAE C. muellerianus 7 Tandem H. canadensis Tandem H. sublaevis? Tandem P. americanus Group Group L. duloticus Group E. ravouxi Group M. gordiagini? Group FORMICINAE M. miraicus? Group F. sanguinea Carry, Group Group Polyergus sp Carry, Group Group Rossomyrmex sp Carry Carry Tableau 1. Types de recrutements et tâches des espèces esclavagistes (d'après Hôlldobler et Wilson, 1990 et nos données). Recruitment systems of slave-makers species (from Hôlldobler and Wilson, 1990 and unpublished data) Il est possible de considérer que les fourmilières cibles sont des proies, surtout si l'on tient compte du fait que l'agressivité intraspécifique est à l'origine de l'esclavagisme (Darwin, 1859; Hôlldobler, 1976; Buschinger, 1990; Le Moli et al., 1993). Dans ce cas, l'estimation des coûts et bénéfices du recrutement lors d'un raid contre un nid esclave peut être analysée avec les mêmes arguments que dans le cas d'un recrutement pour l'exploitation d'une proie. Parallèlement à ce qu'indique Taylor (1978) pour les espèces non parasites, la phase de recrutement préparant le raid correspond à une perte d'énergie et le transport de couvain volé à un gain d'énergie (équivalent à une entrée d'aliments). Rossomyrmex est l'unique genre esclavagiste pratiquant le recrutement par la méthode du transport d'adultes. Ceci nous a amené à rechercher comparativement l'existence d'un avantage quelconque dans l'utilisation de cette méthode. Des raids on été décrits chez d'autres esclavagistes, notamment dans le genre Polyergus (Talbot, 1967; Topoff, 1985; Mori et al. 1991; Hasegawa et Yamaguchi, 1994). Cependant, on ne connaît aucune étude analysant en détail l'efficacité des différents types de recrutement chez ces fourmis. Une telle investigation doit être basée sur la efficacité (fïtness) des colonies (Taylor, 1978; Fewell, 1988), qui résulte d'un ensemble de stratégies, dont le type de recrutement n'est qu'un élément parmi d'autres (efficacité de récolte des esclaves, taux de parasitisme, sexués produits par la colonie, comportement de copulation, usurpation de nouvelles fourmilières, etc. ). Il est toutefois possible d'émettre quelques considérations théoriques sur les raisons qui peuvent rendre plus favorables l'utilisation d'une méthode de recrutement déterminée chez une espèce esclavagiste. En principe la meilleure méthode serait celle supposant un moindre coût énergétique, soit parce que la méthode est elle-même économique, soit parce qu'elle implique moins d'individus lors du raid. Un autre avantage à prendre en compte est

128 l'efficacité au moment de l'assaut, celle-ci pouvant être améliorée si le recrutement a lieu quand l'activité de l'espèce hôte est atténuée ou si le type de raid permet un effet de surprise. Enfin, l'impossibilité d'utiliser un autre mécanisme doit aussi être pris en compte. Dans cet article, nous comparons les deux genres esclavagistes de la tribu des Formicini, en analysant chacun de ces aspects. Pour ce faire, nous utilisons des données tirées de la littérature pour Polyergus, et nos propres données sur le comportement de R. minuchae. Ces données font partie d'une étude générale de cette espèce, réalisée depuis 5 ans, et dont les résultats sont en cours de publication. Histoire Naturelle de Rossomyrmex minuchae. Du enre Rossomyrmex on connaît seulement deux espèces: R. proformicarum du Tian-Shan (Kazakhstan) et des plaines de la Caspienne (Russie) et R. minuchae de la Sierra Nevada (Espagne) (Tinaut, 1981). Les deux espèces sont parasites esclavagistes de différentes espèces du genre Proformica. Les donnés biologiques sur R. proformicarum proviennent d'arnoldi (1928 et 1932) et de Marikovsky (1974). Bien que peu de données quantitatives soient disponibles, on sait que les ouvrières de cette espèce pratiquent le transport d'adultes lors de la première phase de raid contre Proformica. Quant à R. minuchae, il s'agit aussi d'une espèce réalisant des raids par transport d'adultes. Quand la fourmilière cible est localisée, l'ouvrière exploratrice retourne à son nid. Un moment plus tard, elle en ressort, suivie d'un petit nombre d'ouvrières. Une fois à l'extérieur, et par l'intermédiaire de sollicitations antennaires, une ouvrière se laisse prendre entre les mandibules de l'exploratrice. De cette manière, elle est transportée jusqu'à proximité du nid cible où elle est libérée. Après quelques secondes, les deux ouvrières retournent au nid mère où chacune recrute une autre ouvrière. Cette chaîne s'interrompt au moment où la concentration aux environs de la fourmilière cible est suffisante (60 à 90 ouvrières). Ces fourmis commencent alors subitement à creuser près de l'entrée principale pour pénétrer dans le nid cible. Lors des raids les jours suivants les fourmis ont mémorisé l'emplacement du nid cible et n'ont plus besoin d'être transportées. MATERIEL ET METHODES Economie de la fourmilière Selon notre hypothèse il serait intéressant pour la fourmilière que le raid contre la colonie cible se fasse de sorte que la plus grande partie des ouvrières investissent un effort minimum, surtout si au moment de l'assaut elles doivent lutter contre les ouvrières cibles, pour ainsi pouvoir investir plus d'énergie dans le vol du couvain. En plus il doit exister un mécanisme de contrôle du nombre d'individus concernés, puisqu'il faut éviter d'impliquer toute la population d'une fourmilière, ce qui pourrait être très dangereux pour la survie de celle-ci. Pour élucider ces aspects on a suivi 18 assauts présentés par 5 nids, tout en notant le nombre d'ouvrières impliquées dans le transport, le nombre total dans l'assaut, la durée de l'assaut et, dans l'ensemble, la dynamique de ces recrutements. Calcul d'effort Le recrutement pour assaillir une fourmilière dure une heure à une heure et demie. Le chemin parcouru par les ouvrières transporteuses de congénères le premier jour reste le même les jours suivants, mais dans ce cas les ouvrières font le voyage non chargées ce qui est d'un coût énergétique plus faible. La méthodologie consiste à mesurer le temps investi par les ouvrières réalisant le transport d'adultes, et le jour suivant, à la même heure, on mesure à nouveau un nombre égal d'ouvrières sans charge. La différence du temps employé selon qu'elles sont chargées ou non est interprétée comme "coût de transport".

129 Rythme d'activité Afin de voir s'il existe une relation entre le type de recrutement et les conditions du milieu, on a suivi le rythme d'activité de 3 fourmilières mixtes (Rossomyrmex avec Proformica) et de 2 fourmilières de P. longiseta pures. L'activité a été mesurée par le nombre d'entrées et de sorties pendant 10 min chaque heure, pendant 1 journée, et tous les 15 jours, pendant la période d'activité des fourmis au long de l'été RÉSULTATS Économie de la fourmilière La Figure 1, montre la dynamique du recrutement pour une fourmilière typique. Cette dynamique a l'allure d'une courbe exponentielle qui résulte du fait que chaque ouvrière recrutée devient recruteuse, ainsi la séquence suit une progression géométrique dont le terme général est 2". Cependant cette progression est limitée, puisqu'il arrive un moment où le recrutement s'arrête. Figure 1. Dynamique du recrutement théorique et réel. Dynamic of théorie and real recruitment. Time (min) Si on considère que le nombre d'ouvrières qui participent à l'assaut est d'environ 60-90, ce type de recrutement a pour conséquence le fait que le nombre d'ouvrières ayant réalisé au moins un transport soit de 32. C'est-à-dire qu'approximativement la moitié des individus impliqués ont été transportés et en conséquence n'ont subi aucune dépense d'énergie au cours du déplacement. En outre, pour obtenir ce nombre, il est nécessaire qu'une ouvrière (la première) fasse 6 trajets, la deuxième 5 et ainsi successivement, et environ 16 ouvrières auront réalisé seulement un parcours. Calcul de l'effort Dans la Figure 2, on remarque que le temps nécessaire pour le même trajet par les ouvrières déchargées est presque la moitié de celui des ouvrières transportant une congénère, ce qui signifie probablement que leur effort énergétique est plus important.

130 , Carry Alone Figure 2. Temps investis pour 15 ouvrières chargées et 15 ouvrières déchargées. Time invertment for 15 loaded workers and 15 unloaded workers. Rythme d'activité Les ouvrières de R. minuchae sont actives de 12 à 20 h. (heure locale) avec un patron d'activité bimodal, correspondant à une diminution d'activité dans les heures les plus chaudes (15-16h.) (Fig. 3). Les ouvrières de P. longiseta sont actives plus longtemps (10 à 21h), et présentent un cycle quotidien d'activité unimodal avec un maximum à 16h., quand la température du sol est la plus haute. 0 Rossomyrmex -<) Proformica - O Soil temperature q O"'' Hours Figure 3. Activité journalière de Proformica et de Rossomyrmex. Diary activity of Proformica et and Rossomyrmex DISCUSSION Le recrutement de groupe présente l'avantage d'un moindre effort individuel par rapport au transport des adultes qui est significativement coûteux pour l'individu porteur. Dans le recrutement de groupe, le groupe initial se forme par l'émission d'une phéromone de recrutement et le nombre de recrutées peut dépendre de la quantité de phéromone (Deneubourg et al., 1986). Il est connu que les phéromones d'alarme ont un effet local, et l'intensité de la réaction dépend de la distance du point de son émission (Wilson, 1971), pourtant le recrutement d'un nombre supérieur ou inférieur ne suppose aucun effort physique supplémentaire. Le nombre total d'ouvrières recrutées peut être aussi en rapport avec la quantité d'aliments à collecter(acosta et al., 1986). Finalement, un autre avantage attribuable à ce type de recrutement est l'effet de surprise qu'un groupe d'assaut peut

131 causer à la colonie cible. Dans le cas de Polyergus ssp, on signale (Topoff, 1990) que les ouvrières de Formica montrent des réactions de panique devant l'agressivité montrée par les ouvrières de Polyergus. Cependant dans le cas de Rossomyrmex tous les avantages qu'on vient de signaler se retournent contre elle, puisque le transport des adultes suppose un effort important. On peut se demander si cet effort supplémentaire signifie réellement un inconvénient pour la colonie. Cette question peut être abordée de plusieurs point de vue. D'une part il est évident que l'accroissement de l'effort nécessité par le transport d'un adulte, représente très peu par rapport à l'effort total que chaque ouvrière doit réaliser pour transporter la totalité des larves et cocons du nid assailli, ce qui représente 2 à 3 jours de travail. L'inconvénient qu'entraîne une longue présence à l'extérieur pour effectuer les transports est que l'ouvrière chargée devient une proie facile pour les prédateurs, surtout pour les araignées. Ces attaques ne sont pas importantes numériquement, cependant elles peuvent occasionner des distorsions lors du recrutement et entraîner son échec. Ce phénomène a déjà été signalé (Marikovsky et Tischenko, 1970) et nous l'avons parfois observé sur le terrain. Le problème qui s'ajoute à ce type de recrutement est le contrôle numérique des ouvrières assaillantes. Dans le cas du transport d'adultes, puisque la dynamique de recrutement suit une progression géométrique, son asymptote ne serait atteinte qu'en cas de recrutement de toute la population, et cela ne coïncide pas avec la disparition de l'aliment, comme on a pu le décrire chez les espèces non parasites (Acosta, et al., 1986; Deneubourg et al., 1986; Taylor, 1978). En réalité, le transport d'adultes a besoin d'un contrôle différent. Dans la Figure 2, on peut voir qu'à partir d'un certain moment le nombre d'ouvrières n'augmente pas mais se stabilise. L'absence de nouveau recrutement est due au fait que les individus qui arrivent à la fourmilière visée ne retournent plus au nid et restent pour attendre l'attaque. L'assaut n'a lieu qu'au moment où la majorité ou la totalité des individus impliqués dans le recrutement arrive au point de regroupement. Les causes concrètes qui provoquent l'arrêt du recrutement et le début du regroupement ne nous sont pas encore claires pour nous. Enfin l'effet de surprise, obtenu par Polyergus à l'aide de phéromones (Topoff, 1990), ne doit pas fonctionner dans le cas de Rossomyrmex, puisque le regroupement s'effectue à 10 ou 15 cm de l'entrée principale du nid cible et il semble que cette présence n'incommode pas les ouvrières de Proformica qui continuent leur activité normale. D'ailleurs Rossomyrmex attaque subitement en différents fronts. Notre interprétation est qu'effectivement elles essaient d'obtenir un effet de surprise, ce qui semble confirmé par le petit nombre de combats observés dans les alentours de la fourmilière. Par conséquent, en comparant le transport d'adultes avec le recrutement de groupe nous ne trouvons aucun avantage, mais plutôt quelques petits inconvénients. Le maintien de ce type de recrutement au cours de l'évolution doit être expliqué par une autre raison. Celle-ci peut être la taille de la fourmilière de Rossomyrmex puisque Deneubourg et al. (1986) suggèrent que le tandem, qui peut être considéré comme une stratégie similaire au transport des adultes, est plus caractéristique des fourmilières peu peuplées. Si on considère exclusivement la population des ouvrières de Rossomyrmex, le nombre moyen est de 107 ouvrières, ce qui la situe parmi les colonies de petites taille. Ceci peut expliquer l'utilisation du transport d'adultes par similitude au tandem. Cependant on a déjà signalé que cette stratégie est utilisée par des espèces très différentes dont quelques-uns unes forment de grandes colonies, comme dans le genre Formica pour le déménagement du nid. Le transport d'adultes représente donc un mécanisme spécial de recrutement dont le sens n'est pas encore clair, c'est pour cela que nous croyons que la taille de la fourmilière ne justifie pas son utilisation au moins dans ce cas là. Les espèces à fourragement solitaire utilisent toujours le transport des adultes pour le changement de nid, ce qui donne la sensation qu'il s'agit d'un mécanisme de recrutement unique qui peut exister sans la nécessité d'utilisation de substances chimiques. Dans un article en préparation (Ruano & Tinaut, en prép.) nous avons trouvé qu'il existe une relation significative entre l'absence de recrutement chimique et les

132 conditions du milieu; en effet les espèces qui fourragent sur des sols à haute température tendent à se comporter comme des espèces solitaires. Dans le cas de Rossomyrmex, même si cette espèce vit avec d'autres espèces thermophiles à fourragement solitaire (Proformica et Cataglyphis), son activité se trouve légèrement déplacée par rapport aux heures centrales du jour vers des températures un peu inférieures (Fig. 3). Par conséquent on ne peut plus penser que les conditions du milieu ont favorisé ou justifient l'absence de recrutement chimique, comme cela serait possible chez Cataglyphis ou Proformica. A Formica - Polyergus - Cataglyphis B - Rossomyrmex - Proformica Figure 4. Phylogénie de la tribu des Formicini d'après Hasegawa et al. <en prèp). Molecular phylogeny ofthe tribe Formicini ( Hasegawa et al., en prep). L'unique possibilité qui reste envisageable est que l'origine de ce genre de fourmis parasites provient d'un taxon qui ne présentait pas de recrutement chimique. Effectivement la phylogénie des Formicini d'acord avec les résultats du Hasegawa et al. (en prép) et la genitalie (Tinaut et al., 1994) nous permet de distinguer deux groupes d'espèces (Fig. 4) ; d'une part le groupe A constitué par des espèces, incluant les esclavagistes, qui utilisent le recrutement de groupe et d'autre part un autre groupe B constitué par des espèces considérées comme fourrageuses solitaires, avec aussi des espèces esclavagistes, qui par ailleurs maintiennent toujours l'option de transport des adultes. Cela nous amène à considérer 1) que le parasitisme de Rossomyrmex aurait pu apparaître dans le groupe d'espèces où l'absence de recrutement en groupe serait un caractère dérivé, et 2) que puisqu'il n'existait pas de possibilité de recruter par des moyens chimiques, ce groupe d'espèces parasites aurait utilisé l'unique moyen dont il disposait, le transport d'adultes. En résumé nous pensons que Polyergus et Rossomyrmex, n'ayant pas la même origine phylogénétique ont développé différentes stratégies pour obtenir un même objectif: s'approvisionner en nouvelles esclaves. Bien que la méthode de recrutement de Rossomyrmex paraisse plus coûteuse, elle ne doit pas représenter un inconvénient important dans son propre contexte, puisque l'objectif final, la capture d'esclaves s'obtient d'une manière efficace. REMERCIEMENTS Spécialement au Dr. lenoirpour le temps consacré à cet article et à ses corrections. A tous les membres du Laboratoire d'ethologie et Pharmacologie du Comportement du Tours pour leur accueil et l'aide apportée. A Raphaël Boulay et Abdelmounim Bahdid pour les souffrances occasionnées par la première traduction de cet article. Ce travail a été réalisé dans le cadre du projet DGICYT PB et de l'action Intégrée Picasso HF

133 REFERENCES Acosta, F.J., Zorrilla, J.M., Ferradas, MA., Interprétation conjointe du recrutaient et de la déconnexion nid/source afin d'évaluer 1 Efficacité d'exploitation collective des ressources chez quatre espèces de fourmis. Acta Oecologica, Oecol. Gener. 7: Agbogba, C., Observations sur le comportement de marche en tandem chex deux espèces cfe fourmis Ponérines: Mesoponera cafraria (Smith) et Hypoponera sp. (Hym. Formicidae). Ins.Soc. 31: Arnoldi, K.V., Studien liber die Systematik der Ameisen. III. Rossomyrmex. Neue Gattung der Ameisen und ihre Beziehungen zu den anderen Gattungen der Formicidae. Zool. Anz. 75: Arnoldi, K.V., Biologische beobachtungen an der neuen palaarktischen sklavenhalteratneise Rossomyrmex proformicarum K. Arn., nebst einigen bemerkungen uber die beforderungsweise der ameisen. Zeit. Morph. Okol. Tiere, 24 (2): Baroni-Urbani, C., The diversity and évolution of recruitment behaviour in ants, with a discussion of the usefulness of parsimony criteria in the reconstruction of evolutionary historiés. Ins. Soc Buschinger, A., Sympatric speciation and radiative évolution of socially parasitic ants-heretic hypothesis and their factual background. Z. zool. Syst. Evolut.-forsch. 28: Crist, T.O., MacMahon, J.A., Foraging pattems of Pogonomyrmex occidcntalis (Hymenoptera: Formicidae) in a shrub-steppe Ecosystem: The rôles of Température, Trunk Trails, and Seed Resources. Environ. Entomol Darwin, C. R., On the origin of species by means of natural selection, or the préservation of favoured races in the struggle for life. lst ed. London. J. Murray Deneubourg, J.L. Aron, S., Goss, S., Pasteels, J.M., Duerinck, G., Random behaviour, amplification processes and number of participants: how they contribute to the foraging properties of ants. Physica 22D Detrain, C., Pasteels, J.M., Deneubourg, J.L., Goss, S., Prey foraging by the ant Pheidolle pallidula: decission making systems in food recruitments. llth International Congress IUSSI India. Fewell, J., 1988 Variation in foraging pattems of the western harvester ant, Pogonomyrmex occidentale, in relation to variation in habitat structure, p In: Interindividual Behavioral Variability in Social Insects. Jeanne Robert ed. Westview Press. Boulder and London. Hasegawa, E., Yamaguchi, T., Raiding behavior of the Japanese slave-making ant Polyergus samurai. Ins. Soc. 41: Holldobler, B., Toumaments and slavery in adesertant. Science. 192: Holldobler, B., Wilson, E.O The Ants. ed. HarvardUniversity press., Harvard,732 pp. Le Moli, F., Grasso, D.A., D'Etorre, P., Mon, A., Intraspecific slavery in Polyergus rufescens Latr. (Hymenoptera: Formicidae): field and laboratory observations. Ins. Soc. 40: Marikovsky, P.I., The biology of the ant Rossomyrmex proformicarum K.W. Arnoldi (1928). Ins.Soc. 21: Marikovsky, P. I., Tischenko, V.P., The spider mirmecophile Zodarium asiaticum Tysts, sp. n. and some features of its biology. The works ofthe Réservation of Alma-Ata, XI, Mon, A., Grasso, D.A., Le Moli, F., Raiding behaviour of the obligatory slave-making ant, Polyergus rufescens l^atr. (Hymenoptera, Formicidae). Actes Coll. Insect. Soc. 7: Oster, G.F., Wilson, E.O., Caste andecohgy in the Social Insects. Princeton University Press, New York. 352 pp. Talbot, M., Slave-raids of the ant Polyergus lucidus Mayr. Psyché, 74 (4): Taylor, F., Foraging Behavior of Ants: Theoretical Considérations. J. theor. Biol. 71: Tinaut, A., Rossomyrmex minuchae nov. sp. (Hym. Formicidae) encontrada en Sierra Nevada, Espana. Bol. Asoc. esp. Ent. 4: Tinaut, A Ruano, F., Fernândez Escudero, I., Description del macho del género Rossomyrmex Arnoldi, 1928 (Hymenoptera, Formicidae). Nouvelle Revue d'entomologie, 1: Topoff, H., Ecology of raiding behavior in the western slave-making ant Polyergus breviceps (Formicidae). Southwest. Nat. 30(2): Topoff, H Slave-making Ants. American Scientist, 78: Wilson, E.O., The Insect Societies. Ed. Harvard University Press. Cambridge. 548 pp.

134 103 Actes Coll. Insectes Sociaux, 11: (1998) MARQUAGE D'AIRES CHEZ LES FOURMIS Marie-Claire CAMMAERTS Laboratoire de biologie animale et cellulaire, Faculté des Sciences, Université Libre de Bruxelles, av. F. Roosevelt 50, B-1050 Bruxelles (Belgique) Résumé Les ouvrières de Myrmica rubra marquent leur aire de récolte avec la sécrétion de leur glande de Dufour, les abords de leur nid avec celle de leurs glandes métapleurales et les entrées de leur nid avec celle de leur glande labiale. Les ouvrières mineures de Pheidole pallidula marquent leur aire de récolte avec le contenu de leur glande de Dufour, et les entrées et abords de leur nid avec celui de leurs glandes métapleurales Mots-clés. Marquage, glande de Dufour, glandes métapleurales, glande labiale, Myrmica rubra, Pheidole pallidula. Abstract. Area marking in ants. The workers of Myrmica rubra mark their foraging area with the sécrétion of their Dufour gland, their nest vicinity with that of their metapleural glands and their nest entrances with that of their labial gland. The minor workers of Pheidole pallidula mark their foraging area with their Dufour gland contents, and their nest entrances and vicinity with their metapleural glands contents. Key words. Marking, Dufour gland, metapleural glands, labial gland, Myrmica Pheidole pallidula rubra, INTRODUCTION Sur une aire nouvelle, les ouvrières d'une société de fourmis se comportent, au début, autrement qu'à l'accoutumée. Elles hésitent à se déplacer, lèvent les antennes, sinuent et touchent parfois le sol de leur gastre. Peu après, elles agissent de manière usuelle. Manifestement, elles marquent tout nouveau site. Nous résumons ci-après nos travaux relatifs aux marquages opérés par Myrmica rubra et Pheidole pallidula. MATERIEL ET METHODES Les fourmis furent maintenues au laboratoire dans un ou deux nids artificiels posés dans des bacs (68/38/7 ou 35/23/4 cm) servant d'aires de récolte. Les stimuli, posés sur les aires de récolte, étaient soit des morceaux de papier intacts ou marqués, soit des structures organiques d'ouvrières (antennes, pattes, thorax, fragments de thorax, glandes), soit des extraits glandulaires imprégnant des morceaux de papier. Nous avons

135 révélé l'existence de marquages, en avons recherché les caractéristiques et en avons découvert la nature en analysant l'agrégation des fourmis, indigènes et étrangères, sur des surfaces données, la manière dont elles parcourent ces surfaces, leur vitesse linéaire et angulaire près des stimuli, leur orientaion vers ces stimuli ainsi que leur distance minimum d'approche, leur comportement agonistique et les traces qu'elles laissent, en certains lieux, sur du noir de fumée. RESULTATS MYRMICA RUBRA Marquage d'aires de récolte (Cammaerts et al., 1977) Sur une aire nouvelle, les ouvrières de M. rubra se déplacent lentement, avec précaution et touchent le sol, de manière intermittente, avec l'extrémité de leur gastre. Ce faisant, elles déposent de petites quantités du contenu de leur glande de Dufour. Durant 3 min, la fraction la plus volatile de cette sécrétion attire d'autres fourmis et les incite à se déplacer très vite. Puis, la fraction la moins volatile, toujours perçue par les fourmis, les incite à se déplacer à vitesse usuelle, sans hésitation. Ce marquage, qualifié alors de territorial, est, selon la nomenclature d'hôlldobler et Wilson (1990), un "home-range marking", c'est-à-dire un marquage d'aires les rendant hospitalières mais n'entraînant pas de comportement défensif au sein d'une même espèce. Marquage des entrées et abords immédiats des nids (Cammaerts, soumis) Les aires jouxtant les nids agrègent les fourmis indigènes qui s'y déplacent normalement, mais éloignent les étrangères qui s'y meuvent plus vite et de manière moins sinueuse. Les indigènes se déplacent plus au centre d'aires marquées alors que les intruses circulent plus en périphérie. Ces aires attirent à courte distance les indigènes mais pas les intruses. Ces différences entre indigènes et intruses apparaissent après un marquage de 12 h environ, et subsistent durant 16 h environ. Les pattes ainsi que le thorax des fourmis ont les mêmes caractéristiques éthologiques que des aires marquées. Les deux premiers segments thoraciques présentent une partie de ces caractéristiques, et le segment 3 l'autre partie. En fait, la partie antérodorsale du segment 1 (contenant la glande labiale) tranquillise les indigènes mais alarme et rend agressives les intruses, tandis que la partie postérieure du segment 3 (contenant les glandes métapleurales) attire les indigènes mais éloigne les intruses. Des papiers posés dans les entrées des nids calment les indigènes sans toutefois les attirer; ils excitent les intruses et les rendent agressives sans les inciter à s'éloigner. Ils reproduisent donc, y compris leur évolution au cours du temps, les comportements observés en présence des deux premiers segments thoraciques ou de la partie antérodorsale du segment 1. Des papiers posés devant des entrées attirent les indigènes sans pour autant les calmer; ils repoussent les intruses sans les rendre particulièrement agressives. Ils ont donc le même effet, y compris son évolution au cours du temps, que des troisièmes segments thoraciques ou des parties postérieures de segments 3. Les fourmis marquent donc, avec leurs pattes, l'intérieur de leurs entrées de nid avec le contenu de leur glande labiale, et les abords immédiats de leur nid avec celui de leurs glandes métapleurales Aux entrées des nids, des ouvrières stationnent, face à l'aire de récolte, les antennes tendues vers l'avant, et font, de temps à autre, de brefs mouvements de pattes et de

136 corps, marquant sans doute alors ces lieux. Sur ces aires marquées, les fourmis sont plus agressives que sur des aires intactes, et cette agressivité est plus manifeste dans les entrées des nids que devant ces entrées. Ces aires sont donc marquées territorialement, et des différences existent entre les deux marquages. PHEIDOLE PALLIDULA Marquage d'aires de récolte (Cammaerts et Cammaerts, 1996) Les ouvrières mineures marquent les aires de récolte, de manière propre à l'espèce, et les majeures stimulent les mineures à réaliser ce marquage Pour ce faire, les mineures et les majeures utilisent le contenu, différent, de leur glande de Dufour et touchent le sol par intermittence avec l'extrémité de leur gastre. Les majeures usent en plus de stimulations tactiles. Le marquage opéré par les mineures est rapide et subsiste peu de temps. Il est plus intense en présence du contenu de la glande de Dufour des majeures dont l'action stimulante persiste au-delà de 20 min Marquage des entrées et abords immédiats des nids (Cammaerts et Cammaerts, 1998) Les ouvrières d'une société s'agrègent sur des aires imprégnées des odeurs de leurs propres entrées et abords des nids, mais dédaignent les aires marquées par ces mêmes odeurs mais d'une autre société. Elles circulent plus sur ces aires marquées que sur des aires contrôles, et d'autant plus qu'il s'agit d'aires marquées par leur propre société. Elles ne modifient guère leur locomotion mais se déplacent plus au centre d'aires marquées par des congénères et plus en périphérie d'aires marquées par des étrangères. Les entrées et abords des nids sont attractifs à courte distance pour des indigènes. Le marquage s'opère en 12 h environ et subsiste au moins 10 h. En milieu marqué, les fourmis sont plus agressives qu'en milieu intact. De plus, les indigènes se déplacent peu et attaquent les intruses dès leur apparition, tandis que les intruses se déplacent vite, tentent de fuir, et, devant l'indigène, bougent rapidement les antennes, écartent les mandibules, stridulent, puis l'agressent éventuellement. Les mineures sortant du nid circulent quelques secondes au niveau des entrées marquant sans doute alors ces lieux. Elles ne touchent le sol de leur extrémité abdominale que très rarement. Il n'y a pas de corrélation entre les caractéristiques éthologiques résultant d'un marquage d'un site et les dépôts fécaux des fourmis. Le marquage ne résulte donc pas d'un dépôt de matière fécale, ni de celui du contenu de la glande poison (contenant la phéromone de piste commune à toutes les sociétés de P. pallidula), ni de celui du contenu de la glande de Dufour (permettant un marquage, propre à l'espèce, des aires de récolte). Les traces des pattes de mineures sortant des nids sont plus longues que celles des autres fourmis. Chacune de ces paires de pattes a un effet identique à celui d'aires marquées. Cet effet disparaît après un lavage à l'acétone de 20 min. Les fémurs, tibias et tarses séparés sont aussi actifs que les pattes. Un thorax entier de mineure est plus actif; et un troisième segment thoracique l'est plus encore, à rencontre d'un thorax de majeure. Les glandes métapleurales des mineures, ainsi que des extraits acétoniques de ces glandes, présentent les caractéristiques du marquage; celles des majeures, et leur extrait acétonique, ont une toute autre activité. Le marquage des entrées et abords du nid est donc assuré par des mineures qui s'apprêtent à quitter le nid et déposent alors en ces lieux, avec leurs pattes, du contenu de leurs glandes métapleurales.

137 Myrmica rubra entrée dépôt du contenu des glandes de Dufour x métapleurales a labiale o de Dufour de majeures x métapleurales de mineures Figure. Marquage des entrées, abords et alentours des nids chez deux espèces de fourmis. Marking of nest entrances, vicinity and surroundings in two species of ants. DISCUSSION Nos études montrent qu'autour d'un nid de fourmis, il peut exister 3 marquages différents, se succédant dans l'espace : un marquage, non territorial pour l'espèce, des aires de récolte; un marquage, propre à la société, des abords des nids visant à éloigner les intrus qui, s'ils restent, se font agresser, un marquage, propre à la société, des entrées des nids d'où tout intrus est rapidement éliminé Les limites des aires ainsi marquées dépendent des espèces et des contraintes écologiques. REFERENCES Cammaerts, M-C. Marking of nest entrances and vicinity in Myrmica rubra (Formicidae), soumis. Cammaerts, M-C. et R Cammaerts, Area marking in the ant Pheidole pallidula (Myrmicinae). Behav. Process., 37: Cammaerts, M-C. et R Cammaerts, Marking of nest entrance vicinity in the ant Pheidole pallidula (Formicidae, Myrmicinae). Behav. Process., sous presse. Cammaerts, M-C., Morgan, E D. et R Tyler, Territorial marking in the ant Myrmica rubra L. (Formicidae). Biol. of Behav., 2 : Hôlldobler, B. et E D. Wilson, The ants. The Belknap Press of Harvard University Press, Cambridge, Mass., 732 pp.

138 103 Actes Coll. Insectes Sociaux, 11: (1998) CAMOUFLAGE CHIMIQUE CHEZ LA REINE DE POLYERGUS RUFESCENS LORS DE LA FONDATION Christine ERRARD 12 & Patrizia D'ETTORRE 3. 'Laboratoire d'ethologie et Pharmacologie du Comportement, Faculté des Sciences et Techniques, Parc de Grandmont, Tours (France) 2 Laboratoire d'ethologie Expérimentale et Comparée, Av. J.B. Clément, Université Paris Nord, Villetaneuse (France) 3 Dipartimento di Etologia Ecologia ed Evoluzione, via A. Volta, 6, Pisa (Italy) Résumé. Polyergus rufescens, esclavagiste obligatoire, dépend de l'espèce esclave Formica cunicularia. Après l'accouplement, la reine P. rufescens pénètre dans un nid de F. cunicularia, tue la reine hôte et se fait adopter par les ouvrières adultes. Pour comprendre comment la reine P. rufescens peut s'introduire dans la colonie de F. cunicularia, nous avons étudié les profils cuticulaires de la reine P. rufescens (avant et après adoption) et les avons comparés à ceux de la reine esclave tuée après usurpation ou vivant en colonie monospécifique. Les résultats montrent que le profil chimique de la reine P. rufescens, avant qu'elle entre dans le nid de F. cunicularia, diffère de celui de la reine P. rufescens après son adoption dans le nid de F. cunicularia. En effet, avant son adoption, la reine P. rufescens n'a pas de véritable visa chimique, son profil ne possédant que quelques traces d'hydrocarbures. D'autre part, une fois son adoption réalisée, la reine P. rufescens acquiert, d'une façon inconnue, des hydrocarbures semblables à ceux de la reine hôte. Mots-clés. Fourmis esclavagistes, fondation, signature chimique de la reine. Abstract. Chemical disguise by the queen of the slave-making ant Polyergus rufescens during colony foundation. The process of colony usurpation in the obligatory slave-making ant Polyergus rufescens was investigated from a chemical point of view. To understand how mis parasite can integrate into a host colony, the cuticular hydrocarbons ofthe slave-making female, before and after adoption, were compared to that ofthe slave queen killed by the parasite or living in monospecific colonies. The results show that the chemical profiles of the P. rufescens queens before and after adoption are différent. The young P. rufescens female has only few traces of hydrocarbons probably to favour its adoption in the host colony. After usurpation, by camouflage or mimicry, the cuticular profile of the slave-maker becomes more similar to that of the F. cunicularia from monospecific colony. Key words. Slave-making ants, colony founding, queen chemical signature. INTRODUCTION Chez les parasites sociaux, la fondation d'une colonie est particulière car la jeune femelle fécondée n'est pas capable de fonder une colonie de façon indépendante et doit, peu après l'accouplement, trouver un nid hôte. Polyergus rufescens est une fourmi esclavagiste obligatoire qui dépend entièrement de l'espèce esclave Formica cunicularia. Après l'accouplement, la reine P. rufescens pénètre dans le nid de F.

139 cunicularia où elle tue la reine hôte, s'approprie le couvain, et se fait adopter par les ouvrières adultes (Topoff et al., 1988; Mori et al., 1995). A la différence des autres espèces esclavagistes, la reine P. rufescens obtient des soins des ouvrières résidentes adultes, formant ainsi des liens sociaux permanents. Ainsi, la reine parasite doit tromper les mécanismes de discrimination de la société hôte. Ces mécanismes, responsables de la fermeture des sociétés, sont basés sur le fait que tous les membres d une société, portent une odeur commune ou «Gestalt odour». Il est maintenant bien connu que les substances chimiques responsables de l'odeur coloniale sont en partie des hydrocarbures portés par la cuticule des individus (voir Lenoir et al., sous presse). Le but de ce travail est d'étudier les mécanismes chimiques qui permettent à la reine de P. rufescens de s'introduire dans le nid hôte et d'obtenir son adoption. MATÉRIEL ET MÉTHODES Matériel biologique. Les fourmis proviennent de colonies sympatriques des Apennins (Parme, Italie). Des colonies monospécifiques (reine, ouvrières et couvain) de F. cunicularia sont prélevées et installées au laboratoire; les reines de P. rufescens sont prélevées dans la nature, avant l'accouplement et après l'accouplement pendant les raids. En laboratoire, les expériences ont consisté en l'introduction de jeunes femelles P. rufescens fécondées dans les colonies de F. cunicularia. Les reines de P. rufescens sont retirées 5 jours après leur adoption tandis que les reines de F. cunicularia tuées sont retirées juste après leur mort. Des ouvrières sont également prélevées dans les colonies monospécifiques ou mixtes. Chromatographie en phase gazeuse. Les reines et les ouvrières des deux espèces sont tuées par congélation. Les extraits cuticulaires sont réalisés en immergeant séparément la tête, thorax et abdomen des individus d&is 1ml de pentane. Un étalon interne nc2o est ajouté dans chaque extrait (ÎOO^L à 10" mol/1). Chaque extrait est injecté dans un chromatographe (HP 5890 Sériés II Plus) muni d'un détecteur à ionisation de flamme, dont le programme de température va de 80 à 160 C (10 C/min) puis de 160 à 300 C (3 C/min). Nous avons analysé les spectres de 17 femelles P. rufescens avant l'accouplement, 14 après l'accouplement, 8 reines après adoption dans une colonie de F. cunicularia, 8 reines «témoin» de F. cunicularia (colonies monospécifiques) et 10 reines F. cunicularia tuées lors de l'usurpation. Dix ouvrières de chaque espèce provenant de colonies mixtes et 10 ouvrières F. cunicularia de colonie monospécifique ont été analysées. Analyse des spectres cuticulaires. Pour chaque profil cuticulaire, nous avons calculé le pourcentage relatif de chaque pic sur le total des pics relevés (52 composés chimiques). Afin d'estimer la distance chimique entre les différents types de reines et d'ouvrières, nous avons utilisé une analyse hiérarchique en cluster (méthode de Ward). RÉSULTATS Analyse des chromatogrammes. Les profils cuticulaires des têtes de femelles de P. rufescens, avant leur adoption (avant et après accouplement), possèdent des acides gras (temps de rétention < 20 mn), mais ne contiennent que très peu d'hydrocarbures que l'on ne trouve qu'à l'état de traces (Figure la). Au contraire, quand la femelle du parasite est adoptée dans le nid hôte, son profil chimique possède de nombreux hydrocarbures (Figure lb) que l'on retrouve dans le profil des reines de F. cunicularia «témoin» (Figure le). Analyse hiérarchique en cluster. La représentation schématique en cluster fait apparaître des nœuds séparant 4 différents groupes. Le premier nœud sépare le groupe des P. rufescens avant adoption (avant et après accouplement, eux mêmes séparés par un autre nœud) des 3 autres groupes. Un second nœud divise le groupe des reines F. cunicularia tuées par le parasite des 2 autres groupes. Un troisième nœud sépare le groupe des ouvrières F. cunicularia (avant et après usurpation) du groupe des reines F. cunicularia témoin, P. rufescens adoptées et des ouvrières P. rufescens (Figure 2).

140 El a ,.,. _ Lu C j Figure 1. Chromatogrammes des extraits cuticulaires des reines de a) P. rufescens avant adoption, b) P. rufescens après adoption dans le nid hôte, c) F. cunicularia de colonies monospécifique (témoin). Chromatograms of cuticular extracts ofqueens of a) P. rufescens before adoption, b) P. rufescens after adoption in the host nest, c) F. cunicularia from monospeciflc colonie (control).

141 c S I 0.5 o LU «0-4 b ï 0.3 cn m X) co B A E d cf cp D C Figure 2. Analyse hiérarchique en cluster des reines (ou femelles) et ouvrières (méthode de Ward). A - femelle P. rufescens avant accouplement, B = femelle P. rufescens après accouplement, C = reine P. rufescens après adoption, D = reine F. cunicularia témoin, E = reine F. cunicularia tuée, cp = ouvrières P. rufescens, cf = ouvrières F. cunicularia après usurpation, d = ouvrières F. cunicularia en colonie témoin. Hierarchical cluster analysis of the queens and workers (Ward's method. A = P. rufescens queen before mating, B = P. rufescens queen after mating, C = P. rufescens queen after adoption, D = control F. cunicularia queen, E = killed F. cunicularia queen, cp = P. rufescens workers, cf = F. cunicularia workers after usurpation, d = control F. cunicularia workers. DISCUSSION Ces résultats montrent que le profil chimique de la femelle P. rufescens, avant qu'elle entre dans le nid de F. cunicularia, diffère de celui de la reine P. rufescens après son adoption dans le nid hôte. En effet, avant son adoption, la femelle P. rufescens n'a pas de véritable profil chimique, celui-ci ne possédant que quelques traces d'hydrocarbures. Il semblerait ainsi que la jeune reine esclavagiste n'ait pas encore commencé la synthèse de ses propres hydrocarbures ou qu'elle ne synthétise qu'une uantité minimale de produits afin de favoriser son adoption. Il apparaît également que jours après l'adoption, le spectre cuticulaire de la reine P. rufescens devient en grande partie similaire à celui de la reine hôte témoin. Ces résultats confirment des études antérieures proposant que le mécanisme par lequel un parasite obtient son intégration dans une colonie hôte implique l'existence d'un mimétisme chimique ou d'un camouflage chimique. Bien que l'on ne puisse exclure la possibilité que P. rufescens synthétise les hydrocarbures spécifiques de l'espèce hôte, il semble assez probable que la similarité des profils observée entre la reine P. rufescens et son hôte soit obtenue lors des contacts physiques avec la reine et les ouvrières F. cunicularia pendant l'usurpation (Topoff et Zimmerli, 1993). En effet, on sait que la femelle P. rufescens, lors de son introduction dans le nid hôte, attaque violemment les ouvrières hôtes et tue la reine (Mon et al., 1995; D'Ettorre et al., Déplus, la reine F. cunicularia tuée par la reine parasite possède un profil chimique différent de celui d'une reine F. cunicularia témoin, ce qui permet de penser que lors des interactions agressives, la reine P. rufescens projette une substance «propaganda» sur la reine hôte afin de perturber la reconnaissance coloniale (Allies, 1986). En conclusion, la stratégie de fondation des reines P. rufescens semble reposer essentiellement sur le fait que les jeunes femelles n'ont pas d'odeur quand elles entrent dans le nid hôte, ces reines conservant leur neutralité chimique plus longtemps que des

142 jeunes ouvrières, afin d'échapper au système de reconnaissance coloniale et obtenir ainsi leur adoption. Ce système correspondrait à l'utilisation d'une caractéristique générale des jeunes imagos de fourmis que nous avons appelé "chemical insignifiance" (Lenoir et al., sous presse). REMERCIEMENTS Nous remercions le Prof. F. Le Moli pour ses suggestions lors de la mise en place des expériences et C. Vienne pour sa collaboration dans les analyses chromatographiques. RÉFÉRENCES Allies, A.B., A.F. Bourke et N. Franks, Propaganda substances in the cockoo ant ' Leptothorœc kutteri and the slave-maker Harpagoxenus sublaevis. J. Chem. Ecol. 12: , D'Ettorre, P., A. Mori et F. Le Moli, Haplometrotic colony founding by the slavemaking ant Polyergus rufescens (Hymenoptera, Formicidae). Ital. J. Zool. 64:49-53.,, ^ J. Mori, A., P. D'Ettorre et F. Le Moli, Host nest usurpation and colony foundation in the European amazon ant, Polyergus rufescens Latr. (Hymenoptera: Formicidae). Ins. Soc. 42: Lenoir, A., D. Fresneau, C. Errard et A. Hefetz, (sous presse). Individuality and colonial identity in ants: the emergence of the social représentation concept. Dans : Information processing in social insects (C. Detrain, J.L. Deneubourg et J.M. Pasteels, Eds), Birkhauser. Topoff H. et E. Zimmerli, Colony takeover by a socially parasitic ant, Polyergus breviceps: the rôle of chemicals obtained during host-queen killing. Anim. Behav. 46: Topoff, H., S. Cover, L. Greenberg, L. Goodloe et P. Sherman, Colony founding by queens of the obligatory slave-making ant, Polyergus breviceps: the rôle of the Dufour's gland. Ethology 78:

143 103 Actes Coll. Insectes Sociaux, 11: (1998) POLYMORPHISME ET COMPORTEMENTS AGONISTIQUES CHEZ LES OUVRIERES CATAGLYPHISNIGER (HYM., FORMICIDAE) Elise NOWBAHARI, Renée FENERON & Marie-Claire MALHERBE Laboratoire d'ethologie Expérimentale et Comparée, UPRES-A 7025, Université Paris-Nord, Villetaneuse (France) Résumé. Les ouvrières de Cataglyphis niger (Formicinae) présentent un polymorphisme continu avec une large variation de taille. A partir des trois classes de taille définies (minor, média, major) nous avons étudié l'influence de la taille sur les comportements agonistiques lors de rencontres dyadiques. Plusieurs types de rencontres ont été réalisés en confrontant des ouvrières de même taille ou de tailles opposées, appartenant à des nids différents plus ou moins éloignés géographiquement. Les résultats montrent que, indépendamment de leur taille, les ouvrières sont capables de distinguer les fourmis étrangères de même espèce et sont plus agressives vis-à-vis d'ouvrières issues de nids éloignés géographiquement. Certaines réactions agonistiques diffèrent selon la taille. Les major, par exemple, réalisent davantage d'ouverture de mandibules que les autres catégories d'ouvrières. Ce comportement, qui prend parfois l'allure de combats ritualisés, pourrait avoir un effet inhibiteur sur le déroulement de la séquence d'agression, limitant les risques de mortalité plus élevés en présence de major. Mots-clés, comportement agressif, reconnaissance coloniale, distance géographique, polymorphisme. Abstract. Polymorphism and agonistic behaviors in Cataglyphis niger workers (Hym., Formicidae) In Cataglyphis niger a continuous polymorphism with a large size variation is observed within the worker caste. From the three size classes defined (minor, média, major) we studied the effect of size on agonistic behaviors in dyadic tests. Several kinds of tests were performed between same-sized workers or opposite-sized workers, belonging to neighboring or distant nests. Results show that independently ofthe size, ail workers are able to distinguish the foreign ants and are more aggressive towards the workers proceeding from distant nests than those proceeding from neighboring nests. Some agonistic reactions differ with the worker size. The major, e.g., threat more frequently than the other classes of workers. This behavior, which sometimes leads to ritualized fights, would inhibit the aggressive reaction, minimizing the risk of mortality always higher when faced with a major. Key words. aggressive behavior, nestmate récognition, géographie distance, worker polymorphism.

144 INTRODUCTION Chez les fourmis, il est bien connu que le polymorphisme influence la division du travail. L'existence de variations de taille au sein de la caste ouvrière permet d'accroître l'efficacité de la colonie dans l'accomplissement de certaines tâches (Oster & Wilson, 1978). Les ouvrières de grande taille, les major, apparaissent le plus souvent spécialisées sur un petit nombre d'activités qui incluent la défense du nid, le fourrragement, le stockage de nourriture et le broyage des graines (Hôlldobler & Wilson, 1990). Des observations préliminaires sur l'espèce Cataglyphis niger (Formicinae) ont montré que les major réalisent plus fréquemment la garde à l'entrée du nid et le fourragement que les autres catégories d'ouvrières. Nous avons donc émis l'hypothèse que, de par leur morphologie et leur fonction sociale, les major de C. niger pouvaient être aussi plus performants dans les activités de défense et dans la capacité à discriminer les fourmis étrangères à la colonie. Nous avons donc étudié, sur cette espèce, le polymorphisme au sein de la caste ouvrière et l'influence de la taille sur les comportements agonistiques. MATERIEL ET METHODES Cette étude a été effectuée à partir 9 colonies récoltées près de Tel-Aviv (Israël), sur deux sites distants d'environ 50 Km. Ces colonies ont été élevées dans des conditions standardisées (T= C). Elles ont été installées dans des nids reliés chacun à une aire de fourragement (28 x 27.5 x 8.5 cm) où était déposée la nourriture composée de larves de Tenebrio et d'un mélange de pomme-miel. L'étude du polymorphisme a été réalisée à partir de 3 colonies. Au total 338 ouvrières ont été mesurées à l'aide d'un micromètre en prenant comme indices biométriques la distance interoculaire et la largeur du thorax. L'influence de la taille sur les comportements agonistiques a été étudié à l'aide de rencontres dyadiques en arène neutre (boîte cylindrique de 9 cm de diamètre). Ces tests ont consisté à mettre en présence deux fourrageuses issues soit de la même colonie ("témoins"), soit de nids voisins prélevés sur le même site ("même site"), soit de nids prélevés sur chacun des sites ("sites différents"). Les ouvrières mises en présence étaient de même taille (Exp. I) ou de tailles opposées (Exp. II). Les comportements de chaque fourmi ont été notés pendant 5 minutes. L'analyse des données n'a porté ici que sur les fréquences des différentes réactions agonistiques, comprenant la fuite (FUI), la soumission (SOU), les ouvertures de mandibules (OUV), les morsures (MOR) et les projections d'acide formique (JET) Le traitement statistique a été réalisé à l'aide d'analyses de variance et de comparaisons posthoc (tests de Duncan). RESULTATS Etude biométrique de la caste ouvrière Les ouvrières C. niger présentent un polymorphisme continu avec une large gamme de taille ; les major ont une distance interoculaire environ 3 fois supérieure à celle des minor (Fig. 1). Les mesures prises deux à deux mettent en évidence une isométrie entre la distance interoculaire (x) et la largeur du thorax (y), les ouvrières se distribuant le long d'une droite d'équation : y = x ' 8S (Fig. 2).

145 S 30 média major I 10 Z 0 < Distance interoculaire (mm) Figure 1. Répartition des ouvrières selon leur distance interoculaire. Figure 1. Frequency distribution of worker according to their interocular distance Distance interoculaire (Log) Figure 2. Mise en évidence d'une isométrie entre la largeur du thorax et la distance interoculaire. Figure 2. Isometry indicated by the double logarithmic plot of thorax width versus interocular distance. Influence de la taille sur les comportements agonistiques Indépendamment de leur taille, les ouvrières reconnaissent les fourmis étrangères et présentent des comportements agonistiques envers elles (Fig. 3). Ces réactions Exp I : Tests entre ouvrières de même taille (a) témoins (N = 45) 12 Exp II : Tests entre ouvrières de tailles différentes (a) minor face à non or/major (N = 43) sont (b) même site (N= 90) FUI SOU OUV MOR JET n minor a média mrnajor FUI SOU OUV MOR JET Dminor g major Figure 3. Réactions agonistiques selon la taille des ouvrières et le type de rencontre (tests de Duncan, *P<0.05; **P<0.01). Figure 3. Agonistic reactions according to the worker size in the three kinds of tests. (Duncan tests, * P<0.05; **P<0.01). Figure 4. Réactions agonistiques des ouvrières minor(a) et major (b) selon la taille de leur opposant, lors de tests entre sites différents. Figure 4. Agonistic reactions of minor (a) and major (b) according to the size of the opponent, in tests between workers of diffèrent sites.

146 plus fréquentes et plus agressives lorsque les fourmis sont issues de nids éloignés géographiquement : plus de 25% des tests effectués entre ouvrières de sites différents (23 sur 90 tests) comportaient des projections d'acide contre seulement 1% des tests entre ouvrières de même site (1 sur 90 tests). Les différences liées à la taille portent essentiellement sur les ouvertures de mandibules toujours plus fréquentes entre major (F2.87 = 5.49, P<0.01 pour les tests entre ouvrières de même site; F2,87 = 3.33, P<0.05 pour les tests entre ouvrières de sites différents). Ces ouvertures des mandibules peuvent soit précéder une attaque plus violente avec morsure et projection d'acide formique, soit prendre l'allure de combats ritualisés, où les ouvrières se font face, mandibules largement ouvertes et antennes repliées vers l'arrière, avançant et reculant ("jerking"). Les réactions de fuite s'observent plus fréquemment entre minor qu'entre major (F2,87 = 5.55, P< 0.01). Ces différences comportementales s'expriment quelle que soit la taille de l'opposant (Fig. 4). Dans ces conditions, les major projettent plus souvent de l'acide formique que les minor (Fi.83 = 7.28, P<0.01), ce qui peut être relié à des différences de morphologie interne. DISCUSSION Les ouvrières des trois classes de taille sont capables de reconnaître les fourmis étrangères de même espèce et de distinguer les ouvrières provenant de nids voisins de celles provenant de nids éloignés. Contrairement à d'autres espèces (Salzemann & Jaffe, 1991), cette reconnaissance intraspécifique existe même chez les major, qui ne semblent pas constituer une caste spécialisée dans la défense. Certaines réactions comportementales diffèrent, cependant, selon la taille. Les major accomplissent davantage d'ouvertures de mandibules que les autres classes d'ouvrières, quelles que soient la taille et l'origine de leur opposant. Ces comportements de menace pourraient avoir un effet inhibiteur sur le déroulement de la séquence d'agression, limitant les risques de mortalité plus élevés en présence de majors. Ceci est d'autant plus important qu'au sein des colonies de C. niger, les major représentent seulement 20% environ des effectifs et que leur production nécessite un investissement énergétique important. REMERCIEMENTS Nous tenons à remercier Professeur A. Hefetz pour ses conseils et son aide lors de la récolte des fourmis. La mission de récolte a été financée par le CNRS. REFERENCES Holldobler, B. & E. O. Wilson, The Ants. Springer-Verlag, Berlin, 732 pp. Oster, G. F & E. O.Wilson, Caste and Ecology in the Social Insects. Princeton Univ. Press, Princeton, 354 pp. Salzemann, A. & K. Jaffe, Polyéthisme et défense de la société chez la fourmi champignonniste Atta laevigata (Fr. Smith). Insectes Soc. 38:

147 103 Actes Coll. Insectes Sociaux, 11: (1998) CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA COACTION CHEZ LES FOURMIS (HYMENOPTERA, FORMICIDAE) Karine MEDJIMOREC \ Guillaume PRUDHOMME 1 & Bruno CORBARA 2 ' 1 UFR de Psychologie, Sciences sociales et Sciences de l'education & 2 LAPSCO, UPRES-A CNRS 6024 Université Biaise Pascal, 34 Av. Camot F Clermont-Ferrand corbara@lapsco.univ-bpclermont.fr Cédex Résumé. Nous avons soumis des fourmis de l'espèce Ectatomma ruidum à une tâche de transport de cocons, en comparant la vitesse d'exécution de fourmis isolées à celle de fourmis en groupes (de deux à huit individus). Les résultats révèlent un effet de coaction puisque le transport des cocons est significativement plus rapide lorsque les fourmis exécutent leur tâche en groupe. Nous interprétons ces résultats selon les critères de la psychologie sociale d'une part, et selon ceux de l'éthologie des insectes sociaux d'autre part. Mots-clés : coaction, régulation sociale, facilitation sociale, Ectatomma ruidum, transport de cocon. Abstract : A contribution to the study of coaction in ants (Hymenoptera, Formicidae). We compared the performances of isolated and grouped (from two to eight) workers of the ant Ectatomma ruidum that were confronted with the task of transporting cocoons. Our results show a coaction effect i.e, when they are grouped, workers complété their task much more rapidly than when they are isolated. These results are interpreted in terms of social psychology as well as in terms of social insect ethology. Key-words : coaction, social régulation, social facilitation, Ectatomma ruidum, cocoon transport. INTRODUCTION Cette étude porte sur la facilitation sociale, un thème central de la Psychologie sociale expérimentale depuis le début du siècle (Guerrin, 1995). La facilitation sociale peut se définir comme l'effet bénéfique de la présence d'autrui sur la performance quant à la réalisation d'une tâche : on parle plutôt de coaction quand autrui participe également à la tâche. Phénomènes majoritairement appréhendés chez l'espèce humaine, les effets de la facilitation sociale nous ont semblé intéressants à étudier chez les fourmis, en conservant l'approche qui est celle de la psychologie sociale expérimentale, en appliquant les concepts de cette dernière, mais aussi en relisant les résultats obtenus à l'aune des connaissances actuelles de l'éthologie des fourmis. Quelques expérimentations sur l'effet 1 adresse pour toute correspondance

148 de facilitation sociale et de coaction ont déjà été réalisées chez les fourmis. Ainsi Chen (1937) conclue à un effet de coaction chez des fourmis de l'espèce Camponotus japonicus soumises à une tâche de creusement de terre. MATERIEL ET METHODES Les fourmis utilisées dans cette étude proviennent d'une société (environ 300 individus) à'ectatomma ruidum (Ponerinae) élevée en laboratoire et originaire de la région de Tapachula (Etat du Chiapas, Mexique). Le dispositif expérimental est constitué d'un nid en plâtre à six chambres successives (type Janet), relié par un tube en plastique à une aire extérieure. Durant les sessions expérimentales, nous avons isolé la chambre 1 des autres chambres du nid, afin d'empêcher toute communication entre le, ou les individus testés, et le reste de la société. Répertoire comportemental lié à l'activité de transport : E. ruidum est capable de transporter des objets en les saisissant dans ses mandibules. Ce comportement de transport peut être impliqué en particulier dans les comportements alimentaires et les soins au couvain. Dans cette étude, nous nous intéresserons au transport des cocons. Tâche à réaliser par les fourmis : Les ouvrières doivent transporter cinq cocons préalablement déposés dans la zone extérieure, sèche et éclairée, impropre à leur survie, vers le nid, humide et obscure, favorable à leur développement. Nous étudierons ici la vitesse de transport des cocons par des fourmis isolées ou en groupe, la tâche étant accomplie lorsque tous les cocons présents dans la zone de départ sont déposés dans la zone d'arrivée. Les ouvrières sont testées isolées, en groupes de 2, 3, 4, 5, 6 et 8. Chaque condition est répétée 10 fois. Hypothèses : H1 = Le transport des cocons est plus rapide lorsque les fourmis sont en groupe que lorsqu'elles sont isolées. H2 = Plus la taille du groupe augmente et plus le transport des cocons est rapide. RESULTATS Des prétests ont montré que dans les conditions groupales, toutes les fourmis ne participaient pas à la tâche de transport des cocons (Medjimorec et Prudhomme, 1996). Pour prendre en compte ce phénomène, nous utilisons un indice de calcul permettant de comparer les vitesses d'exécution des fourmis ayant effectivement réalisé la tâche. L'indice de calcul i est le suivant : i = (T x Nf )/Nc avec i qui correspond au temps moyen de transport d'un cocon par une fourmi (exprimé en mn et centièmes de mn); T, le temps de transport; Nf, le nombre de fourmis transporteuses et Ne, le nombre de cocons ramenés. Lorsque la tâche n'est pas exécutée au bout de 20 mn, le temps de transport T est compté comme égal à 20 mn. Le test statistique utilisé est une ANOVA pour échantillons indépendants. Les résultats obtenus sont exprimés dans le Tableau 1 où, dans la colonne Statistiques, sont exprimées les probabilités d'erreur entre les conditions expérimentales. Les différences entre les conditions expérimentales (signifiées dans le Tableau 1 par *) sont considérées comme significatives à partir de P<0.05 (par exemple : 2 ouvrières vs 3 ouvrières, différence significative avec P = 0,0513; a fortiori 1 ouvrière vs 3 ouvrières sera significatif). On constate un effet de coaction très net puisque les performances réalisées en situations groupales sont très supérieures à celles obtenues par les fourmis isolées (F(63) = 22,640; P<0.0001).

149 L'hypothèse H1 est largement validée. Dans tous les cas, les ouvrières transportent les cocons plus rapidement lorsqu'elles sont en groupe. H y a donc coaction et élévation du niveau moyen d'activité comportementale. Conditions expé. T i(mn) Statistiques Nb moy. transp. 1 ouvrière 18,560 2 ouvrières 8, ,2 3 ouvrières 4, ,9 4 ouvrières 3, ,1 5 ouvrières 2, ,9 6 ouvrières 2, ,8 8 ouvrières 3, ,8 Tableau 1. Résultats Table 1. Expérimental expérimentaux results Cependant l'hypothèse H2 n'est pas confirmée puisque les performances ne croissent pas exactement en fonction de la taille du groupe. En fait, on constate une valeur seuil de trois fourmis (seuil à partir duquel la taille du groupe n'a plus d'impact sur les performances des fourmis transporteuses de cocons), les différences n'étant alors plus significatives entre les conditions expérimentales. DISCUSSION La plupart du temps, les fourmis isolées n'exécutent pas la tâche (avec la convention des 20 mn, la moyenne est de 18,56 mn) : la fourmi est un animal social, la situation expérimentale d'isolement est perturbatrice. En revanche, lorsque la fourmi isolée agit, son action n'est pas forcément celle attendue par l'expérimentateur. Il est arrivé que l'ouvrière ne transporte qu'un seul cocon et s'arrête dans le tuyau reliant la zone extérieure au nid, où elle semblait alors avoir un comportement de garde. On peut donc également expliquer le mauvais score en situation d'isolement par le fait, qu'en réalité, une ouvrière seule se trouve face à de multiples tâches à accomplir, la tâche de transport n'en étant qu'une parmi d'autres. Les ouvrières en groupe exécutent la tâche : ce comportement en situation de groupe pourrait être expliqué, en Psychologie sociale, par l'hypothèse de Zajonc (1965), selon laquelle la présence d'un congénère augmente le niveau de tension de l'organisme et déclenche l'émission de la réponse dominante dans le répertoire comportemental du sujet. Dans notre étude, la réponse dominante (ou du moins attendue comme telle), était le transport du cocon. Cependant, bien que la réponse comportementale "transport du cocon" est une des plus prégnantes, lorsque deux ouvrières sont attelées à cette tâche, elles sont en nombre suffisant pour parvenir à la réaliser. Cela peut être l'explication du seuil de deux transporteuses. De plus, les autres membres du groupe participent à d'autres tâches. H semblerait donc qu'il existe, dans le fonctionnement de ces insectes, un système de réponses comportementales permettant une hiérarchisation des tâches en fonction de la taille du groupe. La conséquence de ce système serait, dans un premier temps, la réalisation des tâches les plus urgentes en situation de groupe minimale, et dans un deuxième temps, lorsque la taille du groupe augmente, une diversification des tâches. La division du travail caractérise en effet le fonctionnement de la plupart des sociétés d'insectes, et explique qu'en moyenne deux ouvrières seulement s'impliquent dans la tâche de transport des cocons. Cela ne signifie pas que les autres sont inactives. Bien au contraire, on a observé que les autres membres du groupe produisaient une

150 gamme de comportements étendus. Pour résumer, la tâche qui nous intéresse au départ est toujours accomplie en situation de groupe, mais seulement par une partie des ses membres. En fait, face à une même tâche, les ouvrières n'ont pas toutes les mêmes réactions. De nombreux travaux ont montré que les individus de même âge, appartenant à une même caste et à un même groupe morphologique, pouvait présenter des profils comportementaux très différents. Cette variabilité comportementale, qui semble très répandue chez la plupart des Hyménoptères sociaux, a souvent été désignée sous l'appellation d' "idiosyncrasie". Cette idiosyncrasie montre que tous les individus de la fourmilière ont une histoire marquée par le milieu social, histoire qui n'est pas identique à celle des individus voisins. Nous avons placé nos sujets expérimentaux dans une situation de résolution de problèmes. En l'occurence, le problème posé par l'expérimentateur consistait à faire ramener cinq cocons dans le nid par un nombre variable de fourmis. Dans le cas d'une expérimentation de psychologie humaine, un problème analogue pourrait être posé, mais il s'accompagnerait alors d'une "consigne" donnée aux sujets expérimentaux. Ces derniers sont donc censés savoir quel est le problème à résoudre. Dans le cas des fourmis, le paradigme de résolution de problème n'est sans doute pas ce qu'il y a de plus approprié. On ne soumet pas véritablement de "problème à résoudre" aux fourmis; cellesci, individuellement, n'ont accès qu'à une information localisée de la situation et elles répondent aux stimulations qu'elles perçoivent en agissant localement sur leur environnement. Ainsi, si la situation de départ est la suivante : deux fourmis sont dans le monde extérieur en présence de cinq cocons, il se peut qu'une des deux ouvrières perçoive la présence d'un cocon et le transporte dans la zone-nid plus adéquate pour la survie de celui-ci. La situation devient alors plus complexe puisque l'on a un cocon dans le nid et quatre à l'extérieur, les deux ouvrières peuvent dès lors être soumises à des stimulations différentes, impliquant en réponse des tâches différentes, l'une consistant à faire du soin de cocon dans le nid, l'autre à transporter un cocon de l'extérieur vers le nid. Ce simple exemple montre que pour les fourmis une explication des phénomènes observés au cours d'une telle expérience en terme d'allocation des tâches, de division du travail et de régulation sociale est sans doute plus pertinente (voir Detruy, 1997; Minet 1997). Au delà de cette expérimentation réalisée sur des fourmis, ceci pose le problème général du paradigme de la résolution de problème et de sa validation écologique. REMERCIEMENTS Un grand merci à Jean-Paul Lachaud et Bertrand Schatz pour avoir récolté les fourmis utilisées dans ce travail. RÉFÉRENCES Detruy V., Etude de la coaction sur une tâche de transport de larves et conséquences sur la division du travail chez la fourmi Ectatomma ruidum. Mémoire de Maîtrise de l'université Biaise Pascal, Clermont-Ferrand. 41 pp. Chen S.C, Social modification of the activity of ants in nest-building. Physical Zool. 10 : Guerrin B., Social facilitation. Cambridge University Près. 244 pp. Medjimorec K. and G. Prudhomme, Contribution à l'étude de la coaction sur une tâche de transport de cocons chez la fourmi Ectatomma ruidum. Mémoire de Maîtrise de l'université Biaise-Pascal, Clermont-Ferrand. 42 pp. Minet C., La coaction en termes de régulation sociale à travers la réalisation d'une tâche de transport de larves/cocons chez les fourmis. Mémoire de Maîtrise de l'université Biaise Pascal, Clermont-Ferrand. 98 pp. Zajonc, Social facilitation. Science 149 :

151 103 Actes Coll. Insectes Sociaux, 11: (1998) RÉGULATION SOCIALE ET SOCIOTOMIE : UNE ÉTUDE SUR LA FOURMI PONÉRINE Ectatomma ruidum Stéphane DIF Sébastien GRANIER 2, Karine LATREILLE 2 & Bruno CORBARA 1 1 Laboratoire de Psychologie Sociale de la Cognition, UPRES-A CNRS UFR Psychologie, Sciences Sociales et Sciences de l'education Université Biaise Pascal, 34 Avenue Carnot F Clermont-Ferrand Cedex. corbara@lapsco.univ-bpclermont.fr Résumé: Ce travail, effectué sur une micro-société sans reine de la fourmi ponérine Ectatomma ruidum, vise à étudier les conséquences d'une sociotomie sur les profils comportementaux des ouvrières. Les sociogrammes obtenus, sur la base d'observations d'individus marqués, confirment l'existence d'une flexibilité comportementale permettant une régulation sociale des comportements individuels adaptée à la situation nouvelle. Nous discutons comment la régulation sociale peut suffire à expliquer la dynamique de la structure sociale et en particulier l'émergence d'un polyéthisme corrélé à l'âge. Mots-clés: Ectatomma ruidum (Formicidae, Ponerinae), polyéthisme, régulation sociale, sociotomie. Abstract: Social régulation and sociotomy: a study of the ponerine ant Ectatomma ruidum. This study, conducted on a queenless micro-society of the ponerine ant Ectatomma ruidum, aims to understand the conséquences of a sociotomy experiment concerning the behavioural profiles of individuals. Sociograms obtained on the basis of individually-oriented data confirm the existence of a great behavioural flexibility that allows the social régulation of behavioural profiles and that is well adapted to the new situation. We discuss the way social régulation may be sufficient to explain the dynamics of the social structure as for instance the emergence of an age-correlated polyethism. Key words: Ectatomma ruidum (Formicidae, Ponerinae), polyethism, social régulation, sociotomy. INTRODUCTION Corbara et coll. (1989) ont étudié les caractéristiques de la division du travail dans des sociétés naturelles de la ponérine Ectatomma ruidum. Ces auteurs ont montré comment les ouvrières de cette espèce se répartissaient le travail entre deux pôles extrêmes d'activités : soins au couvain vs gardes et activités extérieures. Ils ont également mis en évidence le fait que, paradoxalement, des individus d'un même âge pouvaient avoir des profils comportementaux assez différents, même si en terme de groupes d'âge (c'est-àdire de résultats moyens) on pouvait admettre l'existence d'un polyéthisme corrélé à l'âge. Une étude des stades initiaux de la sociogenèse, réalisée chez cette espèce, confirme la grande diversité des profils comportementaux pouvant exister chez des individus de même âge (Corbara, sous presse). Ces travaux rejoignent ceux de Franks (1994) sur l'interrogation qu'ils suscitent quant à la pertinence du terme de polyéthisme d'âge et amènent à rejeter l'hypothèse "maturationnelle" concernant le déterminisme de ce dernier. Selon cette hypothèse qui a longtemps prévalu, les ouvrières seraient pré-programmées pour présenter des profils comportementaux différents à des périodes successives de leur existence. Les travaux cités confortent une hypothèse alternative selon laquelle les individus présenteraient des profils comportementaux déterminés par l'environnement social, le polyéthisme d'âge étant à considérer comme une propriété émergente. En nous situant dans la lignée de cette conception plus "émergencielle", nous faisons l'hypothèse que la régulation sociale est permanente dans la société de fourmis et qu'elle peut s'exprimer

152 chaque fois que l'expérimentateur modifie l'environnement social ou non social. Une expérience de sociotomie, consistant à enlever une partie des individus d'une colonie, devrait nous permettre de metttre en évidence les modalités de cette régulation sociale des comportements. Fresneau et Lachaud (1985) ont réalisé une sociotomie expérimentale à partir d'une société naturelle de Pachycondyla (= Neoponera) apicalis. Afin de mieux contrôler les effets de la sociotomie, nous avons préféré pour notre part travailler sur des micro-sociétés comparables par leurs effectifs d'ouvrières et de couvain, et constituées de façon à obtenir des demi-sociétés parfaitement comparables en termes d'effectifs. Nous présentons, dans le cadre imparti ici, les résultats détaillés relatifs à une seule sociotomie, réalisée sur une société sans reine comprenant 20 ouvrières. MÉTHODE Dans une colonie adulte, nous avons prélevé dix ouvrières à l'intérieur du nid (service A) et dix à l'extérieur (service B) que nous avons marquées individuellement. En procédant de cette façon et en raison des corrélations mises en évidence par ailleurs entre organisation spatiale et organisation sociale (Fresneau et coll., 1989) nous avons maximalisé les probabilités pour que les ouvrières du service A soient surtout des soigneuses de couvain et celles du service B des fourrageuses. L'étude s'est déroulée en trois sessions expérimentales de deux jours chacune, séparées par deux jours de latence : 1. Session de référence où les deux services sont dans le nid avec le couvain; 2. Session de séparation où, à la suite d'une sociotomie, les services A et B sont placés dans deux nids distincts avec une quantité égale de couvain; 3. Session de réunification où les deux services sont replacés dans le nid initial avec l'ensemble du couvain. Les résultats sont analysés à la fin de chaque session afin d'établir le profil comportemental individuel de chaque membre de la colonie et le profil des activités collectives de la colonie. RESULTATS Les résultats sont résumés dans la Figure 1. A l'issue des tests de comparaison de moyennes, nous pouvons déduire que les deux services ont des taux d'activité différents. Ainsi, le service A correspondrait à un service intérieur (préférentiellement orienté vers les soins au couvain, SCV) et le service B à un service extérieur (préférentiellement orienté vers les gardes et activités extérieures, GAE et inactivités notées IN). Ce résultat est conforme à ce qui était attendu dans la procédure choisie, et traduit les corrélations existant, dans une colonie d'e. ruidum, entre les organisations sociale et spatiale. Pendant la phase de séparation, les deux services présentent des taux de SCV, de GEN, d'ae et d'in équivalents pour les deux groupes. Lors de cette même session, les sociogrammes révèlent un changement effectif des comportements individuels. La mobilisation des inactives est plus importante pour les ouvrières du service extérieur qui sont majoritairement inactives quand l'effectif est important, et deviennent soigneuses de couvain lorsque la population diminue. Par contre, cette mobilisation des inactives est moins opérante pour le service intérieur (ouvrières déjà orientées vers les SCV) et s'effectue surtout vers les GEN et les AE. Par conséquent, à l'issue de la séparation, les deux services A et B génèrent en leur sein les spécialistes manquantes. Des individus fortement spécialisés lors de la première session montrent une grande inertie dans leur profil comportemental tout au long de l'expérience, phénomène déjà observé par Lachaud et Fresneau (1987) chez Pachycondyla (= Neoponera) apicalis. A noter qu'un petit nombre d'individus très spécialisés soit dans les SCV, soit dans les GAE s'orientent vers d'autres activités. Au cours de la session de réunification, on retrouve une organisation telle que les deux services A et B retrouvent en partie leur situation initiale, respectivement de service intérieur et service extérieur. Des résultats analogues ont été obtenus sur une seconde micro-société d'e. ruidum (Dif et coll., 1996), ainsi que dans d'autres conditions expérimentales (Monier et Tavares-Martins, 1997).

153 Figure 1. Sociogrammes relatifs aux 3 périodes. L'axe des abscisses correspond aux ouvrières et l'axe des ordonnées aux pourcentages pour chaque catégorie comportementale. Le trait noir représente la moyenne générale de la colonie. Figure 1. Sociograms relative to the J periods. The x-axis corresponds to the workers, and the y-axis to the percentages of each behavioural category. The black line refers to the colony 's général mean. SI: Service Intérieur, Internai Service; SE: Service Extérieur, External Service. a. Soins au couvain - Broodcare SI SE M a MO H tft1*20 l'ï il MO PERIODE PERIODE 2 R8 IWIÏÎ Ï-'IMÏO FU&F20 PERIODE 3 b. Gardes et activités extérieures - Guards and ExternalAdivities. SI SE i l ii MO etiiira) B 30 J 10 J 0 flw+h h M & MO ' H 10-0 u N U ' Fl 1 il 120 MA MO l-ïiarao PERIODE 1 PERIODE 2 PERIODE 3 c. Inactivités - Inactivities. SE H à MO I II il 120 PERIODE PERIODE 2 PERIODE 3

154 DISCUSSION Dans des travaux antérieurs, en étudiant les stades précoces ou plus tardifs de sociétés naturelles d'e. ruidum, il a été montré que les ouvrières de cette espèce présentaient une importante flexibilité comportementale. Ce phénomène est mis à nouveau en évidence dans cette étude portant sur une petite société sans reine soumise à une sociotomie. La sociotomie a ici pour conséquence de soumettre les individus à un environnement social modifié et se traduit par une régulation sociale des comportements individuels. Ainsi, en deuxième période, des individus qui appartenaient préalablement au service intérieur effectuent des tâches tournées vers l'extérieur et inversement, des fourmis du service externe se tournent vers les soins au couvain. Il y a bien eu régulation sociale des comportements individuels sous la pression d'une modification de l'environnement social et cette régulation sociale n'est rendue possible que par la flexibilité comportementale des individus. Ce résultat confirme nos hypothèses quant aux mécanismes en jeu dans la dynamique de la structure sociale. Dans la société à'e. ruidum, la régulation est la règle; dans le cas précis de cette expérience de sociotomie, elle aboutit à ce que les groupes qui en sont issus soient viables. En situation non expérimentale, cette régulation s'exprime en permanence, de façon sans doute moins radicale, et permet en particulier d'expliquer l'émergence d'un polyéthisme corrélé à l'âge (Corbara, sous presse). Ces résultats sont en parfaite concordance avec ceux obtenus chez la même espèce dans le contexte du comportement de prédation. En effet, Schatz et coll. (1998) montrent qu'à l'issue d'une expérience de sociotomie consistant à retirer les ouvrières "tueuses", un groupe de "transporteuses" pouvait régénérer de nouvelles tueuses. REMERCIEMENTS Un grand merci à Jean-Paul Lachaud et Bertrand Schatz pour avoir récolté les fourmis utilisées dans ce travail. RÉFÉRENCES Corbara B., J.-P.Lachaud and D. Fresneau, Individual variability, social structure and division of labour in the Ponerine ant Ectatomma ruidum Roger (Hymenoptera, Formicidae). Ethology 82 : Corbara B., sous presse. Self-organization in the division of labour in incipient colonies of the ant Ectatomma ruidum (Formicidae: Ponerinae): Emergence of an age-related polyethism. Ins. Soc. Dif S., S. Granier and K. Latreille, Les effets du contexte sur l'organisation sociale d'une microsociété de fourmis : mise en oeuvre d'une régulation sociale? Etude sur la Ponérine Ectatomma ruidum Roger (Roger,1861). Mémoire de Maîtrise de l'université Biaise Pascal, Clermont-Ferrand, pp 40. Franks N.R., Is âge polyethism a myth? In : Les insectes Sociaux (A. Lenoir, G. Arnold & M. Lepage, Eds), Publ. Univ. Paris-Nord, p Fresneau D. and J.-P. Lachaud, La régulation sociale: données préliminaires sur les facteurs individuels contrôlant l'organisation des tâches chez Neoponera apicalis. Actes Coll. Ins. Soc. 2 : Fresneau D., B. Corbara and J.-P. Lachaud, Organisation sociale et structuration spatiale autour du couvain chez Pachycondyla apicalis (Formicidae, Ponerinae). Actes Coll. Ins. Soc. 5 : Lachaud J.-P. and D. Fresneau, Social régulation in ponerine ants. In: From individual to collective behavior in social insects (J.M. Pasteels & J.-L. Deneubourg Eds.) (Experientia suppl. 54), pp Birkhàuser Verlag, Basel. Monier A. and P. Tavares-Martins, Régulation sociale et interactions sociales dans une microsociété à'ectatomma ruidum (Formicidae, Ponerinae), Mémoire de Maîtrise de l'université Biaise Pascal, Clermont-Ferrand, pp.73. Schatz B., J.-P. Lachaud and G. Beugnon, Flexibilité individuelle et collective du comportement prédateur chez la fourmi Ectatomma ruidum Roger (Hymenoptera, Formicidae, Ponerinae). Actes Coll. Ins. Soc. Il :

155 103 Actes Coll. Insectes Sociaux, 11: (1998) INFLUENCE DE L'EXPERIENCE SUR LE COMPORTEMENT DE PREDATION DE MYRMICA LAEV1NODIS NYL (FORMICIDAE) Anne-Marie LE ROUX 1, Guy LE ROUX 1, Eric THIBOUT 2 'Laboratoire d'éthologie et Pharmacologie du Comportement (L.E.P.C.O.) 2 Institut de Recherche sur la Biologie de l'insecte (I.R.B.I.) Faculté des Sciences et Techniques Parc de Grandmont Tours Résumé. Pour Myrmica laevinodis, espèce polyphage, la larve d'acroiepiopsis assectella (Lepidoptera), vivant en milieu naturel dans les feuilles de poireau dont elle se nourrit, se révèle être (malgré la présence de produits soufrés) une proie lorsqu'elle est présentée pour la première fois en laboratoire. Lors de présentations ultérieures, les M. laevinodis manifestent par leur comportement une capacité de discrimination lorsqu'elles ont le choix entre des larves (P+) élevées sur poireau, qu'elles délaissent progressivement et des larves (P-) élevées sur milieu artificiel dépourvu de produits soufrés qu'elles consomment. De plus elles mémorisent cette expérience gustative / olfactive et sont aptes à le manifester 3 semaines plus tard. Mots clés. Myrmica, expérience, prédation, larve d'acroiepiopsis assectella. Abstract. Effect of experience on predatory behaviour in M. laevinodis Nyl (Formicidae) M. leavinodis is a polyphagous species. In nature, Acroiepiopsis assectella larvae eat ieek leaves which contain sulfur compounds. In spite of the presence of these compounds, A. assectella larvae are preyed by M. laevinodis when presented for the fct time in the laboratory. When presented later, Myrmica discriminate between P+ larvae reared on leek and P- larvae reared on artificial diet without any sulfur compounds: P+ larvae are progressively rejected while P- larvae are regularly eaten. Moreover they memorize this gustative/oifactive experience, and are able to express this 3 weeks later. Key-words. Myrmica, experience, prédation, Acroiepiopsis assectella larva. INTRODUCTION Les composés secondaires des végétaux sont bien connus pour être des signaux bénéfiques pour les insectes spécialistes phytophages et entomophages. Ainsi en est-il des composés soufrés produits par les Allium pour la teigne du poireau Acroiepiopsis assectella et pour son parasitoïde l'hyménoptère Diadromus pulchellus. Par contre, on considère qu'ils peuvent être des signaux négatifs pour les généralistes. En effet, les larves d'a. assectella élevées en présence de composés issus du poireau sont moins

156 attaquées par les Formica fusca ou les F. selysi (Nowbahari et Thibout, 1992) que les larves élevées sur milieu artificiel exempt de tels composés. Un tel phénomène est-il généralisable à d'autres entomophages polyphages? Ces derniers sont-ils aptes à modifier leurs comportements et leurs stratégies après perception des signaux? Pour tenter de répondre à ces questions et afin d'approfondir notre connaissance des capacités d'apprentissage révélées lors du déménagement de couvain chez des fourmis du genre Myrmica (Le Roux et coll., 1997), nous avons proposé à des Myrmica laevinodis les mêmes types de proies que celles offertes aux formicines citées ci-dessus. MATERIEL ET METHODES Dix groupes composés de 30 ouvrières et d'une reine de M. laevinodis sont soumis à une expérience de choix. Chaque groupe est placé dans un nid tubulaire en verre de 10 cm de long (muni d'un abreuvoir) débouchant sur un milieu extérieur en plastique de 8 cm de diamètre et 5 cm de hauteur. On dépose, dans ce dernier, deux larves du 4 ' stade d'a. assectella (tuées par congélation), une élevée sur poireau (P+) et l'autre élevée sur milieu artificiel sans produits soufrés (P-) ; ceci tous les 2 jours pendant 10 jours (soit un total de 50 larves P+ et 50 larves P-). Une première observation de 60 minutes est effectuée à partir de l'introduction des larves. On note : le nombre de larves de chaque type rentrées par les fourmis dans le nid et le temps s'écoulant avant la rentrée de chaque larve dans le nid. Un relevé de l'état des larves 24 heures après leur introduction permet de noter le degré de consommation : non consommée, partiellement consommée, entièrement consommée. L'ensemble des résultats de ces observations constitue la série n l. Trois semaines plus tard, on procède à une expérience de rappel sur 9 des 10 groupes (soit 45 larves P+ et 45 larves P- présentées) dans les mêmes conditions et l'ensemble des résultats forme la série n 2. RESULTATS - Nombre de larves rentrées dans le nid en 24 heures (Fig. 1) : Les fourmis rentrent significativement plus de larves P- que de larves P+ lors de la l èrc série de tests (x 2 = 6,72 ; ddl = 1 ; p =.01). Lors de la 2 ème série, cela n'apparaît qu'aux deux derniers tests, mais la différence est alors plus prononcée, ce qui entraîne une différence globale significative (% 2 = 5,75 ; ddl = 1 ; p =.02). - Ordre de rentrée des larves : Dans la série n l, 28 larves P- sont rentrées en premier pendant l'heure suivant l'introduction contre 15 larves P+ mais la différence n'est pas significative (test du signe p =.188). Par contre dans la série n 2, l'ordre de rentrée est significativement en faveur des larves P- : 39 larves P- rentrées en premier contre 4 P+ (p =.031 ). - Durée moyenne de rentrée des larves (Fig.2) : Dans la série n l, les durées moyennes de rentrée ne diffèrent significativement, ni avec le type de larves, ni au cours des tests successifs (ANOVA pour mesures répétées : effet larves : p =.34 ; effet jours : p =.67). Dans la série n 2, pour les larves P-, ces durées sont globalement significativement inférieures à celles de P+ : l'anova pour mesures répétées révèle qu'il y a un effet nature de la larve (p =.01), un effet jour du test (p =.04) et une interaction entre ces deux facteurs (p =.01). Ces résultats indiquent que les fourmis discriminent de mieux en mieux les deux types de larves.

157 Larves rentrées (série 1) Larves rentrées (série 2) IMMi 11 j3 j5 j7 j9 Temps en jours j3 6 J7 j9 Temps en jours Fig 1 : Nombre de larves rentrées dans le nid en 24 h Fig 1 : Number of larvae retrieved to the nest per 24 h. S O u 3 o u i M Durée moyenne de rentrée des larves dans le nid (série 1) Durée moyenne de rentrée des larves dans le nid (série 2) j1 j3 j5 j7 )9 Temps en jours j1 j3 j5 )7 j9 Temps en jours Fig 2 : Durée moyenne (avec écart - type) de rentrée des larves. Fig. 2 : Mean time (±s.d) oflarval retrieving into the nest. Larves consommées (sérlo 1) IP 1 entier np+pailiolj pp-onlisr m p- paitiol I 3 5 i7 Temps on jours Larves consommées (série 2) gp+entier ap*p a,,iel p- entier gjp-pofliol 1 À,3 je \i Temps en jours Fig. 3 : Consommation des larves Fig. 3 : Number of eaten larvae - Consommation des larves (Fig. 3) : Dans tous les cas, les restes de larves plus ou moins consommées sont retrouvés 24 H après dans le milieu extérieur. Le test du x 2 indique une différence hautement

158 significative au niveau de la consommation des larves P+ et P- dans les deux séries.(l ère série x 2 = 26,66 ; ddl = 2, p =.001 ; 2 èrac série x 2 = 46,16, ddl = 2, p =.001) Les larves P- sont pratiquement toutes (et entièrement) consommées dans les 2 séries de tests. Par contre, les larves P+ qui sont consommées comme les P- lors des premiers tests de chaque série, le sont de moins en moins lors des tests suivants et certaines le sont seulement partiellement (dans ce cas, la région postérieure est intacte). DISCUSSION Les différents résultats obtenus révèlent que les Myrmica discriminent les deux types de larves avec une préférence pour les larves élevées sur milieu artificiel (donc sans produits soufrés). La préférence au niveau de la consommation apparaît rapidement : dès le 2 ême test, les larves P+ sont de moins en moins consommées, alors que les P- le sont toujours autant. La différence de palatabilité, qui s'est traduite par la différence de consommation par les fourmis, entraîne alors une discrimination, probablement gustative, lors de la prise de contact avec la larve. Ceci se traduit par une diminution du nombre de larves P+ rentrées dans le nid ainsi que par un ordre et un temps de rentrée en faveur des larves P- les plus appréciées des fourmis. Ces effets s'accroissent avec l'expérience. Ce travail confirme et précise les résultats de Nowbahari et Thibout (1992) chez F. fusca et F. selysi et ceux de Cornélius et Bernays (1995) chez Iridomyrmex humilis : les composés des végétaux influencent le comportement des prédateurs généralistes par l'intermédiaire de la proie. Des études complémentaires avec des fourmis marquées permettront : (1) de mieux analyser au niveau individuel la discrimination progressive mise en évidence ici pour le groupe ; (2) de révéler des différences de capacités de discrimination entre les individus et une éventuelle mise en place d'une spécialisation s'opérant au cours des tests successifs. Remerciements : Nous tenons à remercier Muriel Bodin, Muriel Martaresche et Lisa Servain pour leur participation aux expérimentations, ainsi que Dominique Le Glaunec pour son aide lors de la saisie informatique du manuscript. BIBLIOGRAPHIE Cornélius, M.L., & E.A. Bernays, The effect of plant chemistry on the Argentine ant Iridomyrmex humilis (Hymenoptera: Formicidae). J. Ins. Behav., 8: Le Roux, G., A.M. Le Roux, & R. Boulay, Apprentissage et mémorisation lors du déménagement du couvain chez Myrmica ruginodis Nyl. (Formicidae) : influence de l'âge. C. R. Coll. Ann. SFECA (1997), Toulouse Nowbahari B., & E. Thibout, Defensive rôle of Allium sulfur compounds for leek moth Acroiepiopsis assectella Z. (Lepidoptera) against generalist predators. J. Chem. Ecol., 18:

159 INDEX DES AUTEURS INDEX TO AUTHORS Aron S pp. 85 Azariz D pp. 69 Benmoussa-Haichour D pp. 45 Beugnon G pp Boomsma JJ pp. 85 Bordereau C pp. 117 Boulay R pp. 33 Brauman A pp. 81 Bustos X pp. 95 Cammaerts M.-C pp. 133 Campan E pp. 85 Cesselin F pp. 1 Cherix D pp. 95 Cloarec A pp. 109 Connétable S pp. 117 Corbara B pp D'Ettorre P pp. 137 De Carli P pp. 29 Dif S pp. 151 Errard C pp. 137 Fénéron R pp. 143 Fourcassié V pp. 103 Gambier B pp. 53 Garnier-Sillam E pp Granier S PP- 151 Han S.H pp. 37 Harry M pp. 53 Jusseaume N pp. 53 Konate S pp. 1 Lachaud J.-P pp Lachaud M pp. 61 Laffray D pp. 61 Lattaud C pp. 77 Le Roux A.-M pp. 155 Le Roux G pp. 155 Lenoir A pp. 33

160 Lepage M pp. 1 Lôpez Méndez J.A pp. 29 Louguet P pp. 61 Malherbe M.C pp. 143 Medjimorek K pp. 147 Merdaci K pp. 1 Mora P pp. 77 N'Go-Bikoue A.M pp. 81 Ndiaye A.B pp. 37 Nowbahari E pp. 143 Passera L pp. 85 Prudhomme G pp. 147 Reversât G pp. 45 Rivault C pp. 109 Robert A pp. 117 Rouland C pp Ruano F pp. 125 Schatz B pp Sennepin A pp. 9 Thibout E pp. 155 Tinaut A pp. 125

161 INDEX DES MOTS-CLES Acanthotermes ochraceus, 37 Acroiepiopsis assectella, 155 Acromyrmex, 9 Actinomycètes, 69 Adaiphrotermes, 9 ADN, 53 Aire de fourragement, 29, 133 Alarme, 117 Allium, 155; sp. 37; cepa, 37 Amitermes sp. 69; evuncifer, 69, 77; laurensis, 9; meridianus, 9 Ancistrotermes 9; cavithorax, 1; guineensis, 45; periphrasis, 77 Aneuretus simoni, 9 Anthophora antiope, 9 Apicotermitinae, 9, 69 Arthropodes, 9 Astalotermes quietus, 69 Affa, 9 Azteca, 95 Bactéries, 53, 69 Biochimie, 53 Biologie, 95 Biométrie, 143 Blatella germanica, 109 Borassus aethiopum, 61 Brachyponera lutea, 9 Brassica caulorapa, 37; oleracea var. capita, 37; rapa, 37 Brideliaferruginea, 1 Cameroun, 53, 61, 69 Camouflage chimique, 29, 137 Camponotus fellah, 33\japonicus, 147; vagus, 109 Cannibalisme, 9 Capsicum spp., 37 Castes, 45, 137 Cataglyphis, 125; cursor, 109; niger, 143 Cataulacus guineensis, 9 Cellulolyse, 69 Centris derasa, 9; sponsa, 9; thoracica, 9 Cephalotermes rectangularis, 69 Ceratitis capitata, 29 Chalepoxenus miillerianus, 125 Cleptobiose, 29 Coaction, 147 Communication, 33, 109, 117, 125, 133, 137, 143 Compétition 1, 9; intraspécifique, 29, 103 Comportement, 1, 9, 19, 29, 109, 117, 143, 147, 151, 155; agressif, 143; alimentaire, 33 Composés aromatiques, 81 Composition biochimique, 45 Congo, 45, 117

162 Conomyrma, 95 Coptotermes formosanus, 69; lacteus, 117 Côte d'ivoire, 69 Crenetermes albotarsalis, 77 Croissance végétale, 61 Crossopterix febrifuga, 1 Cubitermes heghei, 69; speciosus, 77; subarquatus, 53, 61 Cucurbita pepo, 37 Cultures maraîchères, 37; tropicales, 45 Cussonia barteri, 1 Cyrtostigmacros, 9 Daucus carota, 37 Dégâts, 37 Dégradation enzymatique, 77, 81 Densité de population, 103 Diadromus pulchellus, 155 Diparopsis watersi, 9 Distance géographique, 143 Distribution des nids, 103 Dolichoderinae, 95 Ectatomma ruidum, 19, 29, 103, 147, 151; tuberculatum, 19, 103 Effet de groupe, 33 Enzymes, 77 Epimyrma ravouxi, 125 Escherichia colli, 53 Espagne, 125 Espèce vagabonde, 95 Eustenogaster eximia, 9 Expérience, 155 Facilitation sociale, 147 Flexibilité collective, 19; individuelle, 19 Fondation, 19, 137 Formica, 125; cunicularia, \Y!\fusca, 155, sanguinea, 125; selysi, 155 Formicidae, 33, 85, 95, 103, 125, 143, 147, 151, 155 Formicini, 125 Fourmis esclavagistes, 125, 137 Fourragement, 1, 9, 19, 29, 133 Fragaria ananassa, 37 France, 85 Gabon, 117 Glande de Dufour, 133; labiale, 133; métapleurales, 133 Grégarisme, 109 Guinée, 1 Harpagoxenus canadensis, 125; sublaevis, 125 Heterorhabditis bacteriophora, 45 Hibiscus esculentus, 37; sabdarijfa, 37 Hospitalitermes, 9 Humivores, 53 Hymenoptera, 19, 29, 33, 85, 95, 103, 125, 133, 137, 143, 147, 151, 155 Interactions interspécifiques, 103; intraspécifiques, 29, 103 Iridomyrmex glaber, 9; humilis, 155 Isolement social, 33 Isoptera, 1, 9, 37, 45, 53, 61, 69, 77, 81, 117 Israël, 143 Italie, 137

163 Kalotermes flavicollis, 9 Laccases, 77 Laccifer lacca, 9 Lactuca sativa, 37 Lasius, 9 Lepidoptera, 155 Leptogenys, 19 Leptothorax duloticus, 125 Lignine, 77 Linepithema, 95 Lipides, 45 Lithobius tricuspis, 9 Lolium italicum, 61 Lycopersicum esculentum, 37 Macrotermes spp., 37; bellicosus, 1, 45, 61, 69, 77, 117; miilleri, 77; renouxi, subhyalinus, 37, 69 Macrotermitinae, 1, 45, 53, 61, 69, 77, 117 Marquage, 133 Megaponerafoetens, 19 Mexique, 19, 29, 103, 147 Microcerotermes sp., 37; arboreus, 9; diversus, 37; parvulus, 69; parvus, 69 Microflore symbiotique, 69, 81 Microtermes, 9; spp., 37; najdensis, 37; toumodiensis, 1 Monacis bispinosa, 9 Monodomie, 103 Myrmecocystus mimicus, 125 Myrmica laevinodis, 155; rubra, 133 Myrmoxenus gordiagini, 125 Nasutitermes camarvonensis, 9; corniger, 9\fulleri, 69; lujae, 69,77; nigriceps, 9 Nasutitermitinae, 69 Nécrophagie, 9 Nématodes entomopathogènes, 45 Nids, 53, 61 Noditermes sp.77; lamanianus, 53 Nutrition minérale, 61 Odontotermes sp., 1, 53, 69; nilensis, 37 Pachycondyla apicalis, 151; cajfraria, 19; laevigata, 19; marginata, 19 Paratrechina braueri, 9 Parenté, 85 PCR, 53 Phaseolus vulgaris, 37 Pheidole sp., 95; pallidula, 85, 133 Photorhabdus, 45 Phylogénie, 125 Piliostigma thonningii, 1 Polistes biglumus bimaculatus, 109 Polyergus spp., 125; rufescens, 137 Polyéthisme, 19, 151; d'âge, 151; de caste, 1, 143 Polygynie, 95 Polymorphisme, 143 Ponera ragusae, 95 Ponerinae, 19, 29, 103, 147, 151 Prédation, 9, 19, 155 Préférence alimentaire, 1 Procubitermes arburiensis, 77; niapuensis, 53

164 Profils cuticulaires, 137 Proformica, 125 Protomognathus americanus, 125 Psammotermes sp., 9; hybostoma, 37 Pseudacanthotermes militaris, 1, 117; spiniger, 45, 77, 81, 117 Ptilothrix plumata, 9 Raphanus sativus, 37 Ravageurs, 37, 45 Ray-grass, 61 Reconnaissance coloniale, 143; d'odeur de souche, 109 Recrutement, 125 Régulation sociale, 19, 147, 151 Rejets, 29 Ressources alimentaires, 19, 29, 85 Reticulitermes spp., 45; flavipes, 9; grassei, 109; lucifigus, 9; santonensis, 9, 77, 109; speratus, 9; virginicus, 69 Rossomyrmex spp., 125\minuchae, 125; proformicarum, 125 Sénégal, 37, 69 Sex-ratio, 85 Signature chimique de la reine, 137 Sociogenèse, 19 Sociotomie, 19, 151 Sol, 53, 61 Solanum aethiopicum, 37; melongena, 37 Solenopsis, 9 Spécialisation comportementale, 19, 143; sexuelle, 85 Sphaerotermes sphaerothorax, 69 Steinernema carpocapsae, 45; kushidai, 45 Stratégie de récolte, 1, 19, 29 Structure de nid, 1 ; génétique, 85 Suisse, 95 Symbiose digestive, 81 Taille des colonies, 19 Tapinoma melanocephalum, 95; minutum, 9; sessile, 95 Tchad, 45, 69 Tenebrio, 143; molitor, 9 Termes hospes, 69; panamaensis, 9 Termites champignonnistes, 1, 45, 53, 77, 117 Termitidae, 9,45 Termitières, 53 Termitinae, 61, 69 Termitomyces, 1, 53, 61; eurhizus, 81 Territorialité, 29, 103, 133 Thoracotermes macrothorax, 53, 77 Transport de cocons, 147 Trinervitermes bettonianus, 9; geminatus, 69; rhodesiensis, 77; togoensis, 69; trinervius, 69 Trophallaxie, 33 Tube digestif, 69 Tumulitermes pastinator, 9 Velocitermes, 9 Vibrations, 117 Wasmannia auropuncatata, 95 Xenorhabdus, 45 Zootermopsis angusticollis, 117; nevadensis, 117

165 KEY WORDS INDEX Acanthotermes ochraceus, 37 Acroiepiopsis assectella, 155 Acromyrmex, 9 Actinomycetes, 69 Adaiphrotermes, 9 Aggregation, 109 Alarm, 117 Allium, 155; sp. 37; cepa, 37 Amitermes sp. 69; evuncifer, 69, 77; laurensis, 9; meridianus, 9 Ancistrotermes 9; cavithorax, 1; guineensis, 45; periphrasis, 77 Aneuretus simoni, 9 Anthophora antiope, 9 Apicotermitinae, 9,69 Aromatic compounds, 81 Arthropods, 9 Astalotermes quietus, 69 Atta, 9 Azteca, 95 Bacteria, 53, 69 Behavior, 1, 9, 19, 29, 109, 117, 143, 147, 151, 155; aggressive behavior, 143; feeding behavior, 33 Behavioral flexibility: collective, 19; individual, 19 Biochemical composition, 45 Biochemistry, 53 Biology, 95 Biometry, 143 Blatella germanica, 109 Borassus aethiopum, 61 Brachyponera lutea, 9 Brassica caulorapa, 37; oleracea var. capita, 37; rapa, 37 Bridelia ferruginea, 1 Cameroon, 53, 61, 69 Camponotus fellah, 33'Japonicus, 147; vagus, 109 Cannibalism, 9 Capsicum spp., 37 Castes, 45, 137 Cataglyphis, 125; cursor, 109; niger, 143 Cataulacus guineensis, 9 Cellulolysis, 69 Centris derasa, 9; sponsa, 9; thoracica, 9 Cephalotermes rectangularis, 69 Ceratitis capitata, 29 Chalepoxenus miillerianus, 125 Chemical camouflage, 29, 137 Cleptobiosis, 29 Coaction, 147 Cocoons transport, 147 Colony foundation, 19, 137 Colony size, 19

166 Communication, 33, 109, 117, 125, 133, 137, 143 Compétition 1, 9; interspecific, 103; intraspecific, 29, 103 Congo, 45, 117 Conomyrma, 95 Coptotermes formosanus, 69; lacteus, 117 Crenetermes albotarsalis, 77 Crossopterix febrifuga, 1 Cubitermes heghei, 69; speciosus, 77; subarquatus, 53, 61 Cucurbita pepo, 37 Cussonia barteri, 1 Cuticular profiles, 137 Cyrtostigmacros, 9 Damages, 37 Daucus carota, 37 Diadromus pulchellus, 155 Digestive symbiosis, 81 Diparopsis watersi, 9 DNA, 53 Dolichoderinae, 95 Ectatomma ruidum, 19, 29, 103, 147, 151; tuberculatum, 19, 103 Entomopathogenic nematodes, 45 Enzymatic dégradation, 77, 81 Enzymes, 77 Epimyrma ravouxi, 125 Escherichia colli, 53 Eustenogaster eximia, 9 Food availability, 19, 29, 85 Food preferences, 1 Foraging area, 29, 133 Foraging stratégies, 1, 19, 29 Foraging, 1, 9, 19, 29, 133 Formica, 125; cunicularia, 137;fusca, 155; sanguinea, 125; selysi, 155 Formicidae, 33, 85, 95, 103, 125, 143, 147, 151, 155 Formicini, 125 Fragaria ananassa, 37 France, 85 Fungus-growing termites, 1, 45, 53, 77, 117 Gabon, 117 Géographie distance, 143 Glands: Dufour's, 133; labial, 133; metapleural, 133 Group effect, 33 Guinea, 1 Gut, 69 Harpagoxenus canadensis, 125; sublaevis, 125 Heterorhabditis bacteriophora, 45 Hibiscus esculentus, 37; sabdariffa, 37 Hospitalitermes, 9 Hymenoptera, 19, 29, 33, 85, 95, 103, 125, 133, 137, 143, 147, 151, 155 Interactions: interspecific, 103; intraspecific, 29, 103 Iridomyrmex glaber, 9; humilis, 155 Isoptera, 1, 9, 37, 45, 53, 61, 69, 77, 81, 117 Israël, 143 Italy, 137 Ivory Coast, 69 Kalotermes flavicollis, 9

167 Laccases, 77 Laccifer lacca, 9 Lactuca sativa, 37 Lasius, 9 Lepidoptera, 155 Leptogenys, 19 Leptothorax duloticus, 125 Lignin, 77 Linepithema, 95 Lipids, 45 Lithobius tricuspis, 9 Lolium italicum, 61 Lycopersicum esculentum, 37 Macrotermes spp., 37; bellicosus, 1, 45, 61, 69, 77, 117; mulleri, 77; renouxi, subhyalinus, 37, 69 Macrotermitinae, 1, 45, 53, 61, 69, 77, 117 Marking, 133 Megaponera foetens, 19 Mexico, 19, 29, 103, 147 Microcerotermes sp., 37; arboreus, 9; diversus, 37; parvulus, 69; parvus, 69 Microtermes, 9; spp., 37; najdensis, 37; toumodiensis, 1 Minerai nutrition, 61 Monacis bispinosa, 9 Monodomous colonies, 103 Myrmecocystus mimicus, 125 Myrmica laevinodis, 155; rubra, 133 Myrmoxenus gordiagini, 125 Nasutitermes camarvonensis, 9; comiger, 9,fulleri, 69; lujae, 69,77; nigriceps, 9 Nasutitermitinae, 69 Necrophagy, 9 Nest distribution, 103 Nests, 53, 61 Noditermes sp.77; lamanianus, 53 Odontotermes sp., 1, 53, 69; nilensis, 37 Pachycondyla apicalis, 151; caffraria, 19; laevigata, 19; marginata, 19 Paratrechina braueri, 9 PCR, 53 Pest insects, 37, 45 Phaseolus vulgaris, 37 Pheidole sp., 95; pallidula, 85, 133 Photorhabdus, 45 Phylogeny, 125 Piliostigma thonningii, 1 Plant growth, 61 Polistes biglumus bimaculatus, 109 Polyergus spp., 125; rufescens, 137 Polyethism, 19, 151; d'âge, 151; de caste, 1, 143 Polygyny, 95 Polymorphism, 143 Ponera ragusae, 95 Ponerinae, 19, 29, 103, 147, 151 Population density, 103 Prédation, 9, 19, 155 Previous experience, 155 Procubitermes arburiensis, 77; niapuensis, 53

168 Proformica, 125 Protomognathus americanus, 125 Psammotermes sp., 9; hybostoma, 37 Pseudacanthotermes militaris, 1, 117; spiniger, 45, 77, 81, 117 Ptilothrix plumata, 9 Queen chemical signature, 137 Raphanus sativus, 37 Récognition: nestmate, 143; strain odour, 109 Recruitment, 125 Rejections, 29 Relatedness, 85 Reticulitermes spp., 45; flavipes, 9; grassei, 109; lucifigus, 9; santonensis, 9, 77, 109; speratus, 9; virginicus, 69 Rossomyrmex spp., 125; minuchae, 125; proformicarum, 125 Ryegrass, 61 Sénégal, 37, 69 Sex-ratio, 85 Slave-making ants, 125, 137 Social: facilitation, 147; isolation, 33; régulation, 19, 147, 151 Sociogenesis, 19 Sociotomy, 19, 151 Soil, 53, 61 Soil-feeders, 53 Solanum aethiopicum, 37; melongena, 37 Solenopsis, 9 Spain, 125 Specialization: behavioral, 19, 143; sexual, 85 Sphaerotermes sphaerothorax, 69 Steinernema carpocapsae, 45; kushidai, 45 Structure: nest, 1; genetic, 85 Switzerland, 95 Symbiontic microflora, 69, 81 Tapinoma melanocephalum, 95; minutum, 9; sessile, 95 Tchad, 45, 69 Tenebrio, 143; molitor, 9 Termes hospes, 69; panamaensis, 9 Termite mounds, 53 Termitidae, 9,45 Termitinae, 61, 69 Termitomyces, 1, 53, 61; eurhizus, 81 Territoriality, 29, 103, 133 Thoracotermes macrothorax, 53,77 Tramp-species, 95 Trinervitermes bettonianus, 9; geminatus, 69; rhodesiensis, 77; togoensis, 69; trinervius, 69 Trophallaxis, 33 Tropical cultures, 45 Tumulitermes pastinator, 9 Vegetable cultures, 37 Velocitermes, 9 Vibrations, 117 Wasmannia auropuncatata, 95 Xenorhabdus, 45 Zootermopsis angusticollis, 117; nevadensis, 117

169 REMERCIEMENTS La réalisation de ce volume n 11 des "Actes des Colloques Insectes Sociaux" a été rendue possible grâce à la collaboration de Christian BORDEREAU, Christine ERRARD, Pierre JAISSON, Hervé JOURDAN, Alain LENOIR, Maurice LEPONCE, Charles NOIROT, Elise NOWBAHARI, Luc PASSERA, Jacques PASTEELS, Min-Ha PHAM-DELEGUE, Alain ROBERT et Janine WEULERSSE qui ont accepté de réviser et de commenter l'essentiel des manuscrits présentés ici. Nous les en remercions vivement. (Dessin de couverture : "Têtes de soldats de termites congolais" constituant la fig. 15 de l'édition de 1922 de "Les Termites" par E. Hegh, publiée à Bruxelles. [Planche dessinée par M. Gisseleire, d'après des dessins originaux du Prof. Yngve Sjôstedt (Monographie der Termiten Afrikas, 1900: Kung. Svenska Vet. Akad. Handl., 34 (4), 236 pp.)] (Dessin de page 4 : Page de couverture de la même édition de 1922 de "Les Termites" par E. Hegh)

170 LES TERMITES PARTIE GÉNÉRALE Description. Distribution géographique. Classification. Biologie. Vie sociale. Alimentation. Constructions. Rapports avec le monde extérieur. (4C0 FIGURES DANS LE TEXTE ET UNE CAKTE). PAR E. HEGH, INGÉNIEUR AGRICOLE, attaché au Ministère des Colonies > SEPTEMBRE 1922.

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