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3.

INTERPRÉTATION DE LA NATURE

Glen T. Hvenegaard, Clara-Jane Blye et Elizabeth Halpenny

Note des auteurs : Nous tenons à remercier John Shultis et Jim Butler pour leur contribution à ce chapitre.

Qu’est-ce que l’interprétation de la nature?

L’un des fondateurs de l’interprétation, Freeman Tilden (1977, p. 8), a défini cette notion comme « une activité éducative qui vise à révéler des significations et des relations par l’utilisation d’objets originaux, par une expérience concrète et par des supports visuels, plutôt que de simplement communiquer des informations factuelles ». Interprétation Canada suggère qu’en fait, aucune définition unique ne peut rendre compte du dynamisme du domaine, mais chacune représente un point de départ pour une compréhension du concept. Selon eux, « l’interprétation est un processus de communication conçu pour révéler au public les sens et les liens qui unissent le patrimoine naturel et culturel au moyen d’une interaction directe avec un objet, un artéfact, un paysage ou un lieu » (Interprétation Canada, 1976). En fonction de ces définitions, l’interprétation se distingue des autres méthodes de communication en révélant les significations de cette information et en cherchant à provoquer (Tilden, 1977) et à inspirer les visiteurs (Gilson, 2020). L’objectif du chapitre est de décrire les caractéristiques de l’interprétation (par rapport à l’éducation), son histoire au Canada et les recherches sur les effets positifs et les stratégies efficaces de l’interprétation.

L’interprétation se fait de différentes manières et dans différents lieux (zoos, musées, parcs et zones protégées, paysages de loisirs en plein air, sites d’écotourisme), mais elle se divise en deux grandes catégories. Premièrement, l’interprétation personnelle consiste en un contact direct entre l’interprète et le visiteur, notamment :

  1. Les visites guidées et les randonnées, dirigées par des interprètes, favorisent les interactions entre les visiteurs et le milieu naturel.
  2. Les programmes de théâtre de plein air intègrent le jeu, les costumes, le chant, la danse et la participation du public dans le but de divertir, d’éduquer et d’inspirer les visiteurs.
  3. Les causeries avec accessoires, qui utilisent des artéfacts comme point central, permettent également une participation directe très utile.
  4. Le service d’interprétation fixe consiste à assigner un interprète à un endroit bien en vue ou à un lieu de rassemblement pendant les périodes de forte affluence et peut inclure des accessoires ou des activités interactives passionnantes.
  5. Le service d’interprétation mobile et le service itinérant sont semblables; l’interprète se déplace dans une zone, et offre une interprétation informelle des sites et des objets aux touristes qu’il rencontre.
  6. L’interprétation vivante présente un mode de vie historique différent de celui des visiteurs. Des interprètes vivants, en costumes d’époque et dans des décors authentiques, mènent des activités quotidiennes pour montrer aux visiteurs comment les gens vivaient réellement et discutent avec eux de renseignements techniques ou de produits authentiques.

L’interprétation non personnelle, quant à elle, crée des liens entre les visiteurs grâce à l’utilisation de supports inanimés, par exemple :

  1. Les centres d’accueil fournissent aux visiteurs des renseignements importants sur une région et ses caractéristiques particulières, ainsi que sur les possibilités qui s’offrent à eux. Ils permettent également au personnel de discuter directement avec les visiteurs.
  2. Les expositions au centre d’accueil, dans le parc ou à l’extérieur peuvent comprendre des kiosques, des dioramas, des artéfacts, des reconstitutions et des maquettes.
  3. Les panneaux interprètent les caractéristiques naturelles ou culturelles des environs immédiats; les lecteurs peuvent décider de ce qu’ils lisent et à quelle vitesse ils le font.
  4. Les sentiers d’interprétation autoguidés utilisent des panneaux ou des brochures pour guider les visiteurs vers des éléments intéressants qui pourraient autrement être négligés ou ne pas être appréciés à leur juste valeur.
  5. Les dépliants et brochures donnent des renseignements détaillés et peuvent être conservés en souvenir et consultés à de nombreuses reprises après la visite.
  6. Les ressources numériques telles que les sites Web, les blogues, les groupes de médias sociaux et les infolettres peuvent être consultés à l’extérieur du site, ce qui permet aux visiteurs d’être mieux renseignés avant la visite et de continuer à participer et à apprendre sur les sites de conservation après leur visite.

Une interprétation efficace comprend généralement les aspects suivants (adapté de Hvenegaard et Shultis, 2016) :

  • L’interprétation a lieu sur place et met l’accent sur les expériences directes avec le milieu naturel (c’est-à-dire que les visiteurs voient, entendent, sentent et touchent directement les paysages, la faune et la flore et l’eau).
  • L’interprétation est une forme d’éducation informelle (donc qui n’utilise pas une approche de type scolaire).
  • L’interprétation s’adresse à un public volontaire et libre et se déroule souvent pendant le temps libre des visiteurs.
  • L’interprétation répond à l’attente de satisfaction du visiteur.
  • L’interprétation est une source d’inspiration et de motivation en nature.
  • L’interprétation vise à offrir des expériences de loisirs satisfaisantes, augmenter les connaissances, modifier les attitudes, favoriser un comportement respectueux de l’environnement, développer des relations avec les lieux et créer des souvenirs positifs.

L’interprétation de la nature se fait régulièrement dans les zoos, les parcs et les zones protégées, les musées et d’autres contextes de loisirs en plein air. Parallèlement, une grande partie de l’interprétation de la nature se déroule en contexte d’écotourisme, où les visiteurs participent à des activités basées sur la nature qui ont une composante éducative importante et favorisent une éthique de la conservation (p. ex., observation des oiseaux et des baleines, photographie en nature, étude botanique) (Weaver, 2002). En revanche, les programmes d’éducation à l’environnement proposés par les organismes de conservation de la nature s’adressent généralement aux enfants de la maternelle à la 12e année et s’inscrivent dans le cadre de leur programme scolaire. Dans l’ensemble, l’interprétation apporte des avantages importants aux participants par l’apprentissage et le plaisir, mais également aux milieux naturels, aux organismes de conservation, aux parcs et aux zones protégées, à la faune et à la société en général grâce à des attitudes éclairées, des comportements modifiés et des relations avec le lieu.

Histoire de l’interprétation de la nature au Canada

Au Canada, l’interprétation de la nature a commencé dans les parcs, les loisirs de plein air et les organismes municipaux. En réfléchissant à sa carrière dans les services publics, James Harkin (1957, p. 15), le premier commissaire des parcs nationaux au Canada, a affirmé que le Canada avait besoin « d’une opinion publique informée qui exprimera une protestation indignée contre toute vulgarisation de la beauté de nos parcs nationaux ». L’interprétation de la nature dans les parcs nationaux a commencé en 1887, deux ans après la création de ce qui allait devenir le parc national de Banff, lorsqu’un guide a organisé des randonnées d’interprétation dans la grotte inférieure des sources thermales. Le premier musée d’interprétation de parc a été créé à Banff en 1895 et les visites d’interprétation ont commencé dans les grottes de Nakimu, dans le parc national des Glaciers, en Colombie-Britannique, en 1905. En 1929, les parcs nationaux embauchent des guides de nature saisonniers, puis des guides de nature permanents en 1931. Dans les années 1940, Hubert Green fait pression sur le gouvernement fédéral pour qu’il consacre des fonds à l’éducation en matière d’environnement à Banff. Au cours des 20 années suivantes, il réussit à obtenir le soutien, le financement et les politiques nécessaires pour embaucher le premier naturaliste permanent en 1964 (Federation of Alberta Naturalists, 2005).

Outre les parcs nationaux, les programmes d’interprétation dans les parcs provinciaux de l’Ontario ont commencé en 1954. Alan Helmsley y est embauché en 1955, près de 10 ans après son premier été en tant que naturaliste saisonnier dans le parc provincial Algonquin. Sous la supervision de Helmsley, le programme d’interprétation de l’Ontario est reconnu mondialement, en plus d’être un leader dans les parcs canadiens, ceux-ci passant de deux à onze. La participation quadruple également de 1956 à 1964 (Killian, 1993). D’autres provinces et territoires suivent rapidement; les parcs provinciaux de l’Alberta embauchent leur premier naturaliste en 1968 pour établir un centre d’interprétation dans le parc provincial de Cypress Hills (Alberta Parks, 2018) et continuent à se développer au cours des 50 dernières années pour desservir aujourd’hui plus de 450 000 visiteurs par année (Alberta Parks, 2016).

Le premier centre d’interprétation du Service canadien de la faune se trouve en dehors des parcs nationaux et provinciaux et a ouvert ses portes en 1965 à Wye Marsh, près de Midland (Ontario). Interprétation Canada est un organisme national qui favorise le réseautage, le professionnalisme et l’embauche et il a été créé en 1977. De nombreuses municipalités canadiennes disposent désormais de centres d’interprétation de la nature et de programmes d’interprétation.

L’interprétation au Canada a souvent évolué en fonction des efforts de planification, des changements de politique, de l’embauche et de la formation des interprètes, des demandes des visiteurs et des nouvelles technologies. Ces changements se présentent en quatre phases (Hvenegaard et Shultis, 2016). La phase 1 est la familiarisation des visiteurs avec les caractéristiques les plus uniques et les plus majestueuses d’une région (par exemple, les sources thermales et les chutes d’eau) et les explications. Puis, au début des années 1960, comme le public étant de plus en plus sensibilisé à l’environnement, la phase 2 s’est concentrée sur le paysage dans son ensemble, sur les nombreuses relations entre les écosystèmes et sur les questions de gestion (par exemple, la surpopulation et les effets des loisirs sur l’environnement). Au début des années 1970, lors de la phase 3, l’interprétation commence à sensibiliser les visiteurs à l’écologie en se concentrant davantage sur les écosystèmes régionaux. Enfin, à partir des années 2000, la phase 4 voit les organismes d’interprétation se déplacer au-delà des sites pour atteindre des personnes qui n’ont pas visité les parcs et les sites naturels (par exemple, les jeunes, les nouveaux Canadiens, les minorités ethniques et les résidents urbains), en utilisant souvent des technologies qui s’améliorent rapidement, telles que les représentations en réalité virtuelle des aires de conservation éloignées et difficiles d’accès et les publications sur les médias sociaux pour atteindre les jeunes générations qui sont nées à l’ère du numérique. L’interprétation a peut-être changé au fil des décennies, mais les éléments de l’intendance et les approches plus larges au niveau des systèmes se sont maintenus tout au long des phases.

Pourquoi vouloir interpréter la nature? Est-ce que ça fonctionne?

Alors que l’homme détériore de plus en plus nos milieux naturels, il est de plus en plus important de communiquer efficacement sur les principes de gérance et l’éthique environnementale. Si l’éducation en matière d’environnement poursuit un objectif similaire, l’interprétation est unique dans son approche de provocation et se concentre sur l’apprentissage libre et les personnes dans des contextes de loisirs. Il existe donc de nombreuses raisons de tenter d’interpréter la nature.

Premièrement, l’interprétation a la capacité de susciter la passion des participants, d’influencer les valeurs, les attitudes et les comportements à l’égard de la durabilité et de l’intendance, et de sensibiliser le public aux questions environnementales et culturelles pertinentes (Stern et Powell, 2020). Les recherches montrent que l’interprétation permet d’améliorer considérablement la connaissance et la prise de conscience des questions environnementales. Par exemple, les connaissances des visiteurs sont passées de 37 % d’informations correctes avant une excursion de rafting dans le parc national du Grand Canyon à 60 % après la descente (Powell et coll., 2009). De même, plus des trois quarts des participants à une « discussion sur les animaux » au zoo de Wellington (Nouvelle-Zélande) ont amélioré leurs connaissances et ont pu se souvenir du message sur la conservation (MacDonald et coll., 2016).

Deuxièmement, de nombreux visiteurs veulent de l’interprétation parce qu’elle ajoute de la valeur à leur expérience. En général, les visiteurs des parcs s’attendent à la présence du personnel d’interprétation et l’apprécient. De plus, la participation à des programmes d’interprétation augmente la satisfaction des visiteurs (dans les parcs et dans presque tous les contextes) par rapport à ceux qui ne participent pas à un programme d’interprétation personnel (Ham et Weiler, 2007; Stern et coll., 2011). Plus de 80 % des visiteurs de la zone du bassin versant du canal de Panama se sont déclarés très satisfaits de leur expérience et ont été particulièrement satisfaits des présentations d’interprétation personnelle et des expositions (par rapport aux autres services ou à l’interprétation non personnelle). La satisfaction (découlant des programmes d’interprétation) a également augmenté les intentions comportementales pro-environnementales et les attitudes de conservation des visiteurs des centres de villégiature d’écotourisme (Lee et Moscardo, 2005).

Enfin, selon le contexte, l’interprétation relève des gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux ou des municipalités. Les objectifs et les approches d’interprétation sont donc façonnés par la législation et les politiques pertinentes. Par exemple, les parcs nationaux sont créés pour « le bénéfice, l’éducation et le plaisir » du peuple canadien (gouvernement du Canada, 1990 : 3). De même, la vision des parcs provinciaux de l’Alberta est d’« inspirer les gens à découvrir, valoriser, protéger et apprécier la nature » (gouvernement de l’Alberta, 2009). L’interprétation soutient les objectifs du parc en améliorant l’expérience des visiteurs, en renforçant les comportements d’intendance et en améliorant la sensibilisation et l’éducation. Ces résultats permettent de concrétiser les décisions concernant les politiques et la gestion (Hvenegaard et coll., 2023).

Malgré les nombreuses raisons d’offrir des possibilités d’interprétation de la nature, de nombreux participants potentiels se heurtent à des obstacles. La participation aux activités d’interprétation personnelle est parfois faible, représentant de 10 à 25 % des visiteurs (Stern et coll., 2011; Hvenegaard, 2011). Les contraintes sont notamment le temps disponible, la connaissance des programmes, l’accessibilité des renseignements, l’étape de la vie du participant potentiel, les perceptions concernant les choix de programmes, les activités concurrentes, le coût et le calendrier (Hvenegaard, 2017).

Études de cas au Canada

Il existe quelques études canadiennes sur l’efficacité de l’interprétation de la nature qui présentent des approches typiquement canadiennes. Dans la réserve de parc national Pacific Rim, en Colombie-Britannique, Randall et Rollins (2006) ont examiné le rôle des guides d’excursion en kayak dans l’éducation des visiteurs et l’influence sur les comportements. Environ 82 % des visiteurs guidés étaient des kayakistes moins expérimentés, tandis que 71 % des visiteurs non guidés étaient plus expérimentés. Pour les visiteurs des excursions non guidées, les scores de connaissances avant l’excursion (basés sur dix questions de type « vrai ou faux ») n’étaient pas différents des scores après l’excursion. Toutefois, pour les visiteurs des excursions guidées, les scores sont passés de 5,3 avant l’excursion à 6,5 après l’excursion. En ce qui concerne les comportements, les chercheurs ont demandé aux visiteurs guidés s’ils étaient pour ou contre la politique, voire indifférents à celle-ci, encourageant les visiteurs à renoncer volontairement à la pêche lors de leurs voyages en raison des potentielles répercussions sur la population de sébastes menacée. Les visiteurs étaient plus enclins à appuyer la politique empêchant la pêche à la suite de commentaires des guides que si ceux-ci n’en parlaient simplement pas. Dans l’ensemble, les guides touristiques ont contribué à développer les connaissances et à façonner les comportements des visiteurs.

Bueddefeld et coll. (2023) ont développé du matériel d’apprentissage et des ressources post-visite et ont défini des résultats d’interprétation pour le parc national Elk Island, en mettant l’accent sur la coexistence de l’homme et de la faune. En raison des restrictions entraînées par la pandémie de COVID-19, l’équipe de recherche a utilisé une technologie numérique innovante pour produire une vidéo d’interprétation en ligne pour aider les visiteurs à comprendre comment coexister avec la faune sauvage dans le parc en toute sécurité. La vidéo a suivi les méthodes d’interprétation dialogique narrative et les quatre étapes de l’arc du dialogue : (1) créer une communauté; (2) discuter d’expériences personnelles; (3) explorer les expériences des autres et (4) synthétiser et conclure. Les connaissances des visiteurs se sont bien améliorées après avoir visionné la vidéo, tout comme leur probabilité d’adopter des comportements favorables à l’environnement, comme se tenir à distance sécuritaire de la faune. Cette vidéo d’interprétation a été un succès et devrait inciter d’autres interprètes à utiliser la narration dialogique et les outils numériques.

Hvenegaard (2017) a examiné l’utilisation et les perceptions des programmes d’interprétation au parc provincial du Lac-Miquelon, en Alberta. Parmi les visiteurs, 85 % ont reconnu que les programmes d’interprétation étaient importants pour la mission d’Alberta Parks et 68 % ont reconnu que les programmes d’interprétation augmentaient la valeur de leur expérience. Les visiteurs ont mentionné qu’ils participaient aux programmes d’interprétation parce qu’ils pensaient qu’ils seraient utiles aux membres de leur groupe, qu’ils seraient divertissants, qu’ils seraient éducatifs, qu’ils permettraient d’apprendre quelque chose sur un sujet particulier et que « c’était une activité à faire dans le parc ». La plupart des participants (> 80 %) étaient d’accord ou tout à fait d’accord pour dire que les programmes d’interprétation ont contribué à accroître leurs connaissances sur la nature du parc, l’intérêt à participer à d’autres programmes, l’appréciation du parc et d’Alberta Parks. Cook et coll. (2021) ont étendu cette étude au parc provincial de la vallée de Bow, au parc provincial William A. Switzer et au parc provincial du Lac-Miquelon. Les visiteurs ont à nouveau fait état d’une grande satisfaction à l’égard des programmes. La plupart d’entre eux ont indiqué de plus grandes connaissances et une plus grande compréhension des questions environnementales et près de 80 % des personnes interrogées ont remarqué un changement d’attitude positif.

Dans le parc national de Banff, Macklin et coll. (2010) ont examiné les effets de l’interprétation novatrice (p. ex., des jeux d’improvisation théâtrale) sur le plaisir des enfants et leur perception de l’apprentissage (voir Hvenegaard et coll., 2008). Les activités d’improvisation ont été les préférées des enfants parce qu’elles combinaient plaisir, activité physique, créativité, défis, dynamique de groupe positive et nouveauté. Cependant, les activités dont les enfants ont le plus appris sont les excursions plus traditionnelles dirigées par des interprètes et les conversations sur la nature, qui incluent la sensibilisation sensorielle, l’implication physique, l’interaction guidée, la collaboration avec les pairs et des messages simples. Il est clair que les enfants ont besoin d’une combinaison d’approches adaptées.

Kath (2009) décrit un programme d’éducation dans le sud de l’Alberta qui permet de sensibiliser les parties prenantes aux espèces envahissantes. La composante la plus efficace était une activité autour d’un feu de camp en soirée où l’on distribuait des bouquets d’herbes envahissantes « attrayants » avant de les inviter à jeter les herbes dans le feu pour représenter symboliquement leurs efforts de « purger le parc de ses mauvaises herbes » (p. 12).

La recherche de Wolfe (1997) met en lumière quelques études canadiennes moins récentes. Dans la région de Kananaskis, en Alberta, une campagne d’affiches innovantes illustrant des fleurs couramment cueillies (par exemple, « Wanted ALIVE not dead ») a permis de réduire de 50 % le nombre de visiteurs réprimandés par le personnel du parc pour avoir cueilli des fleurs. En proposant des randonnées d’interprétation guidées dans la zone d’accès limité du parc provincial Dinosaur, en Alberta, le nombre de visiteurs non autorisés observés dans ces zones a diminué de près de 90 % (Wolfe, 1997).

Comment l’interprétation de la nature peut-elle devenir plus efficace?

En plus de l’utilisation de diverses théories pour comprendre les mécanismes à l’œuvre dans l’interprétation de la nature (Hvenegaard et Shultis, 2016), deux revues systématiques récentes soulignent la valeur de l’interprétation et la nécessité de continuer à en élargir la compréhension et les pratiques (He et coll., 2022; Kidd et coll., 2019). Des chercheurs ont souligné le besoin de disposer d’outils de communication innovants en raison des lacunes des stratégies actuelles et des résultats prometteurs d’études récentes (He et coll., 2022; Byerly et coll., 2018; Kidd et coll., 2019; Skibins et coll., 2012). Les possibilités d’élargir et d’améliorer les pratiques d’interprétation comprennent l’intégration de programmes et de messages fondés sur la théorie, la segmentation du public, l’évocation des répercussions émotionnelles, la fourniture de ressources pour agir après la visite, la sollicitation d’engagements et de promesses auprès des visiteurs et l’utilisation de la réalité virtuelle et de la réalité augmentée. Les deux études indiquent le besoin de mener des recherches plus approfondies et de se concentrer sur les résultats longitudinaux de l’interprétation, ainsi que sur une meilleure compréhension des divers participants et de leurs expériences. De tous ces éléments ressortent une orientation pour l’avenir et des possibilités d’amélioration. Voici quelques précisions sur deux sujets à prendre en compte.

  1. S’appuyer sur les valeurs, les émotions et les programmes fondés sur l’éthique. Blye et ses collègues (2023) ont étudié le rôle des émotions (parmi d’autres facteurs psychologiques) pour mieux comprendre ce qui influence les comportements en faveur de l’environnement des visiteurs de parcs qui ont participé à un programme d’interprétation en personne dans les parcs provinciaux de l’Alberta. Les émotions (positives et négatives) ont influencé de manière significative la probabilité que les visiteurs adoptent des comportements pro-environnementaux. Un sentiment de fierté inspiré par des changements environnementaux positifs grâce à l’action peut être très motivant pour les gens et encourager un engagement nouveau ou renouvelé en faveur de comportements pro-environnementaux (Blye et coll., 2023). Les programmes d’interprétation peuvent utiliser notre peur de l’avenir des milieux naturels ou notre culpabilité envers les répercussions de nos comportements sur la nature (comme la vitesse des changements climatiques) pour soutenir les changements. Réfléchissez à ce que vous ressentez après avoir vu des images d’animaux prisonniers de déchets. Votre sentiment de culpabilité vous incite-t-il à vous débarrasser correctement de vos déchets? Pensez aussi à la campagne (trop) réussie de « Smoky the Bear » et à la peur qui en a découlé, à savoir que tout feu est mauvais et qui a donné lieu à des décennies de pratiques de lutte active contre les incendies qui ont contribué à l’intensification des feux de forêt. La réaction de peur peut être très puissante. Toutefois, il est très important de veiller à ce que les émotions négatives soient appuyées par des suggestions de changements positifs et de comportements réalisables (Whitburn et coll., 2020), sans quoi les visiteurs peuvent vivre des sentiments d’inaction et d’apathie, qui peuvent mener au désespoir. En plus de susciter des émotions, l’interprétation permet d’éduquer et d’apporter des solutions, si possible.
  2. Mettre l’accent sur les innovations et les engagements (aller au-delà de l’éducation). Les parcs, les organismes de conservation, les zoos et les organismes d’écotourisme ont récemment commencé à utiliser les promesses et les engagements comme outil pour faire changer les comportements (Ballantyne et coll., 2018). L’utilisation de promesses d’engagement permet de combiner une communication persuasive avec des actions d’engagement, qui se sont toutes deux avérées efficaces pour influencer les comportements pro-environnementaux (Byerly et coll., 2018; He et coll., 2022). Mann et ses collègues (2018) ont demandé aux visiteurs d’une exposition sur la faune sauvage d’écrire des « promesses » de comportements pour aider à soutenir les manchots et leur environnement (par exemple, utiliser moins d’eau, choisir des fruits de mer durables et réduire la consommation d’électricité). Près de la moitié des participants se sont souvenus de leur promesse plus d’un an plus tard et ont affirmé l’avoir tenue. Les visiteurs qui avaient inscrit des mesures plus spécifiques étaient plus susceptibles de se souvenir de leurs promesses et de les tenir, contrairement à ceux qui ont écrit des déclarations plus générales du type « s’occuper des manchots et des animaux ». Une autre étude réalisée en Australie, en Nouvelle-Zélande et aux États-Unis s’est penchée sur l’utilisation des zoos de sites Web spécialement conçus pour soutenir les visiteurs après leur visite (Ballantyne et coll., 2018). Les sites Web ont fourni un contenu basé sur les expériences sur le terrain et les programmes d’interprétation, tout en favorisant un engagement continu et une volonté d’en apprendre plus sur la faune et la flore. Ces sites Web offraient la possibilité de s’engager à adopter des comportements pro-environnementaux spécifiques (p. ex., ramasser au moins un déchet par jour et utiliser des sacs réutilisables). Les participants qui ont visité les sites Web ont décrit l’engagement comme étant motivant et utile. Ils ont également davantage augmenté leurs comportements pro-environnementaux que ceux qui ne les ont pas visités (Ballantyne et coll., 2018).

Conclusion

L’interprétation de la nature améliore l’expérience des visiteurs et soutient une gestion efficace des sites de conservation de la biodiversité. Malgré tout, l’interprétation de la nature est confrontée à de nombreux défis. L’interprétation est souvent sous-financée, ce qui diminue sa capacité d’atteindre ses objectifs. Dans de nombreux cas, le secteur de l’interprétation est le premier à connaître des restrictions budgétaires et le dernier à voir un rétablissement de son financement. Le personnel d’interprétation est souvent relégué à des postes saisonniers et à temps partiel, plutôt qu’à des postes permanents et à temps plein. De plus, de nombreux sites qui proposent des activités d’interprétation de la nature intègrent mal l’interprétation dans la planification et la gestion des activités de l’organisme et de nombreux organismes n’ont pas été en mesure d’évaluer pleinement l’interprétation afin de déterminer les relations de cause à effet pour certains programmes et techniques d’interprétation. De même, de nombreux membres du personnel de première ligne et de supervision ne connaissent pas les études publiées sur l’efficacité de l’interprétation. De plus, de nombreux gestionnaires de sites chargés des budgets n’ont pas d’expérience ou d’appréciation des avantages potentiels de l’interprétation.

Afin d’améliorer les avantages de l’interprétation de la nature et d’être en mesure de l’apprécier, le secteur a plusieurs besoins. Premièrement, les interprètes de la nature et les chercheurs peuvent s’engager dans une recherche plus large, basée sur des cadres théoriques solides, pour évaluer l’efficacité des différentes techniques. Deuxièmement, les interprètes de la nature devraient s’engager dans des programmes éducatifs hors site afin de développer de nouvelles relations entre la nature et les visiteurs actuels et futurs. Troisièmement, les interprètes doivent chercher à intégrer leur travail dans tous les aspects des activités d’un site. En fait, tout le personnel du site peut être interprète dans un certain sens. Finalement, les interprètes devraient collaborer avec tous les secteurs de l’interprétation et de l’environnement afin d’améliorer la synergie et les résultats (Ostrem et Hvenegaard, 2023).

En conclusion, l’interprétation de la nature peut fournir aux visiteurs, aux touristes, aux animateurs de loisirs et aux résidents des renseignements et des expériences significatives qui leur permettront de mieux connaître et comprendre les milieux naturels et d’établir un lien entre ces expériences et la vie moderne. La réalisation de cet objectif aidera les gens à mieux apprécier le patrimoine naturel et culturel de leur région, à vouloir poursuivre leur apprentissage et à transférer ces valeurs et cette expérience dans leur vie quotidienne. Même si elle ne peut être le seul mécanisme permettant de transformer les gens en citoyens engagés et attentifs, l’interprétation de la nature, et les techniques connexes d’éducation à l’environnement et de guide touristique, semble être la meilleure approche dont nous disposons pour apporter des changements aussi substantiels au niveau individuel et sociétal dans les zones protégées.

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À propos des auteur.e.s

Glen T. Hvenegaard

Université de l’Alberta

Glen Hvenegaard est professeur en science de l’environnement au campus Augustana de l’Université de l’Alberta à Camrose, en Alberta. Il étudie les interactions entre l’humain et la nature, en particulier sur l’interprétation, les parcs, les oiseaux, le tourisme basé sur la nature et la durabilité rurale. Il est corédacteur de Parks and Protected Areas: Mobilizing Knowledge for Effective Decision-Making (2021) et de Tourism and Visitor Management in Protected Areas: Guidelines for Sustainability (2018).

Clara-Jane Blye

Université Dalhousie

Clara-Jane Blye est membre de la faculté de gestion des loisirs de l’Université Dalhousie. Ses recherches portent sur la politique des loisirs en plein air, la gestion des parcs, la psychologie de l’environnement et les relations avec la nature. Elle utilise des méthodes de recherches mixtes et son travail est fortement axé sur l’application. Elle a travaillé avec des ONG et des agences de gestion des parcs pour élaborer des recherches théoriques et pratiques qui alimentent les politiques et les stratégies. Elle étudie actuellement les expériences des nouveaux arrivants qui visitent le parc national d’Elk Island.

Elizabeth Halpenny

Université de l’Alberta

Elizabeth Halpenny travaille à la Faculté de kinésiologie, du sport et des loisirs de l’Université de l’Alberta. Elle enseigne et mène des recherches dans les domaines du tourisme, du marketing, de la psychologie de l’environnement et de la gestion des zones protégées. Ses recherches portent sur les expériences des visiteurs et la gérance de l’environnement. Ses projets actuels portent sur l’utilisation récréative et la gestion des aires naturelles, l’agrotourisme et la conservation des médias sociaux liés au tourisme et aux changements climatiques. Elle a obtenu son doctorat en études des loisirs à l’Université de Waterloo en 2006.

 

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L’article Interprétation de la nature (2024), par Glen T. Hvenegaard, Clara-Jane Blye et Elizabeth Halpenny, est distribué sous la licence Creative Commons Attribution – Pas d’utilisation commerciale – Partage dans les mêmes conditions 4.0 International, sauf indication contraire.

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L’apprentissage en plein air au Canada Copyright © by Simon Priest; Stephen Ritchie; et Daniel Scott is licensed under a License Creative Commons Attribution - Pas d’utilisation commerciale - Partage dans les mêmes conditions 4.0 International, except where otherwise noted.

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