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13/06/2023 21:04 La propagation des maladies entre l’Europe et l’Asie dans l’Antiquité 

: le cas de l’Empire romain

Cahiers d’histoire. Revue


d’histoire critique
151 | 2021
Routes de la soie, de la Préhistoire à demain
DOSSIER

La propagation des maladies


entre l’Europe et l’Asie dans
l’Antiquité : le cas de l’Empire
romain
Benoît Rossignol
p. 47-60
https://doi.org/10.4000/chrhc.17469

Résumés
Français English
L’origine des trois grandes épidémies de l’époque romaine a souvent été cherchée en Asie. Nous
proposons un bilan de nos connaissances tenant compte des renouvellements apportés par
l’archéologie. Les circulations commerciales entre Rome et l’Asie sont mieux connues, en
particulier pour l’océan Indien. L’analyse phylogénique des microbes permise par l’ADN ancien
commence aussi à changer nos connaissances. Il reste cependant difficile de mettre en rapport
l’épidémie antonine et l’épidémie dite de Cyprien avec l’Asie. En revanche, la peste de Justinien
trouve bien son origine en Asie centrale, empruntant ensuite sans doute la voie commerciale de
l’océan Indien.

The origin of the three great epidemics of the Roman period has often been sought in Asia. We
propose a review of our knowledge, taking into account the new information provided by
archaeology. The commercial circulation between Rome and Asia is better known, in particular
for the Indian Ocean. The phylogenetic analysis of microbes made possible by ancient DNA is also
beginning to change our knowledge. However, it remains difficult to link the Antonine and
Cyprian epidemics with Asia. Justinian's plague, on the other hand, did originate in Central Asia,
and then probably took the Indian Ocean trade route.

Entrées d’index
Mots-clés : routes de la soie, commerce, épidémie, peste, histoire connectée, archéologie

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13/06/2023 21:04 La propagation des maladies entre l’Europe et l’Asie dans l’Antiquité : le cas de l’Empire romain
Keywords: silk roads, trade, epidemic, plague, connected history, archaeology, Asia, Rome,
Roman empire
Géographie : Asie, Rome
Chronologie : Antiquité, Empire Romain

Texte intégral
1 Trois épidémies marquent l’histoire de l’Empire romain1. Au deuxième siècle, à partir
de 166 et pour de longues années, une maladie, souvent appelée « peste antonine » par
l’historiographie, est attestée dans nos sources2. Moins d’un siècle plus tard, vers 251, à
nouveau pour plusieurs années, une épidémie est signalée par nos sources, souvent
appelée «  peste de Cyprien  », du nom d’un de ses principaux témoins3. À plusieurs
égards, ces deux cas se distinguent d’épidémies attestées dans l’histoire de l’Empire
romain, comme celles qui touchèrent Rome sous Néron et sous Titus4. D’abord, de
nombreuses sources en font mention, ensuite, leur durée est remarquable, sur plusieurs
années avec, semble-t-il, des retours quelques années après la contamination initiale.
Enfin, nos sources attestent que l’une comme l’autre affectèrent de vastes régions de
l’Empire et ne sont pas restées étroitement localisées. Ces caractères se retrouvent pour
la troisième épidémie, celle qui frappa le monde méditerranéen à partir de 542 et que
l’on appelle en général la « peste justinienne5 ». La question est ouverte de savoir quel
rôle reconnaître à ces trois épisodes dans l’évolution du monde antique6  ; l’impact de
chacune de ces épidémies fait l’objet actuellement de débats importants7. Ces maladies
ont-elles pu se propager d’Asie en Europe et avec quelles conséquences historiques ? Il
convient d’abord de comprendre pourquoi la question de l’origine de ces maladies est
importante. Dans un deuxième temps, il apparaît que les sources anciennes sont d’une
interprétation délicate sur la question de l’origine des maladies. Toutefois nos
connaissances des circulations entre l’Europe et l’Asie à l’époque romaine ont été
profondément renouvelées. On pourra alors tenter un bilan, très provisoire, de nos
connaissances et des questions en suspens.

L’origine des maladies anciennes : une


question en renouvellement
2 Les débats sur l’impact des épidémies dans le monde romain s’expliquent par la
faiblesse de nos connaissances sur chacune de ces épidémies et sur la démographie du
monde antique. En l’état actuel des connaissances, seule la troisième est attribuable à
une maladie bien identifiée et bien connue, la célèbre peste bubonique causée par la
bactérie Yersinia pestis, attribution confirmée par l’analyse de l’ADN ancien. Nous
ignorons encore, en revanche, le ou les pathogènes responsables des deux premières
épidémies. Leur qualification de « pestes » est seulement la reprise du terme latin pestis
qui n’a jamais désigné une maladie particulière au sens où nous l’entendons
aujourd’hui. Des identifications ont été proposées, ainsi la «  peste antonine  » est
souvent regardée comme étant la variole, mais il ne peut s’agir que d’hypothèses
reposant sur une lecture des sources antiques et tentant de formuler, à partir de leurs
descriptions, un diagnostic rétrospectif8. Une telle démarche ne peut cependant donner
aucune certitude, au mieux elle permet d’exclure certaines hypothèses : ainsi au regard
des descriptions de Galien9, il semble impossible que l’épidémie antonine ait été la
peste, au sens moderne du terme. L’identification du pathogène et la reconstitution du
déclenchement et de la marche de l’épidémie sont donc des enjeux forts. Pouvoir
assigner l’épidémie à un microbe connu, c’est pouvoir mieux comprendre son
déroulement et mieux évaluer son impact, même s’il faut prendre en compte deux
éléments qui limitent cette connaissance. Le premier est qu’une épidémie ne s’explique
pas seulement par son microbe, elle émerge aussi de la rencontre du pathogène et d’une

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situation sociale et biologique permettant plus ou moins la contagion et déterminant la
plus ou moins grande vulnérabilité des populations. Le second est que les microbes eux-
mêmes ont une histoire et évoluent. La pandémie récente a bien illustré ces deux
limites : le covid-19 a rendu évidente l’idée de variants et montré comment ils pouvaient
être plus ou moins dangereux ou contagieux, tandis que face à un même variant les
situations dans deux pays ou deux régions pouvaient présenter de grandes différences
en fonction de la composition des populations (la fréquence des comorbidités, la
composition en âge, etc.) et des mesures mises en œuvre. L’identification d’un microbe
passé ne règle donc pas toutes les questions. Nous ne pouvons pas réellement, pour le
moment en tout cas, savoir si le variant de Yersinia pestis retrouvé dans les sépultures
du 6e siècle était plus ou moins dangereux ou contagieux que celui frappant l’Europe au
14e  siècle ou que celui circulant encore aujourd’hui sur la planète. Il est de même
difficile de préciser dans quelle mesure la société de l’Antiquité tardive était plus ou
moins vulnérable à Yersinia pestis que l’Europe de la fin du Moyen Âge ou la Chine du
19e  siècle. Cela dit, il faut reconnaître cependant que cette identification restreint
fortement le champ de la réflexion et permet des hypothèses plus assurées.
3 Dans le cadre du débat sur la nature et l’impact de ces épidémies, la question de leur
origine est alors importante, car une origine lointaine, ou au moins extérieure à
l’Empire romain, peut désigner une maladie nouvelle, une maladie émergente. Ce
dernier cas de figure entraîne à envisager une double supposition. D’une part
l’émergence signalerait des conditions sociales et biologiques, potentiellement
nouvelles, de contamination et de diffusion très favorables. D’autre part, le microbe
aurait rencontré une population immunologiquement vierge10. Ces deux éléments
soutiennent en retour l’idée d’un impact élevé pour ces épidémies. Outre leur impact
démographique et social, elles auraient alors constitué des ruptures dans la
pathocénose, l’«  état de communauté des maladies en un lieu donné à une époque
donnée11 », et des étapes importantes dans l’histoire des rapports entre l’homme et les
microbes dans les régions européennes et méditerranéennes. L’hypothèse d’une origine
asiatique de ces trois épidémies a été soulevée parfois dès l’époque antique et mérite, on
l’a compris, d’être considérée de près, puisqu’elle peut appuyer ou non la nature de
maladie émergente pour chacune de ces épidémies.
4 Comme le montre le cas de la peste justinienne, l’enquête est renouvelée par les
progrès scientifiques et les informations obtenues par l’archéologie et la paléogénétique.
Le sujet est donc pleinement interdisciplinaire. À partir des séquençages de l’ADN
ancien et de son analyse, les sciences de la vie proposent une reconstitution de l’histoire
des pathogènes, fixant des dates pour leurs évolutions significatives, à partir à la fois des
dates des spécimens examinés, mais aussi à partir de l’horloge moléculaire, l’estimation
théorique du temps nécessaire aux mutations constatées dans le génome. De même à
partir de la répartition des spécimens anciens, mais aussi de la géographie actuelle de la
maladie, ces travaux peuvent proposer des localisations anciennes pour la maladie.
Ainsi, le cas le plus ancien de peste bubonique pour un humain est actuellement situé il
y a 3800 ans, dans la région de Samara, en Russie actuelle12. Nos connaissances restent
très faibles et les recherches sont encore souvent embryonnaires. En fonction des
découvertes à venir, les prochaines années pourraient apporter des éléments
importants, la prudence est donc de mise.

Une contamination nécessairement


venue d’Orient ?
5 Les conceptions médicales antiques ignoraient nos pathogènes et se construisirent, à
l’époque hippocratique, en réaction aux interprétations religieuses traditionnelles. Dès
lors, la maladie était expliquée par la constitution du malade, dans une causalité interne
et profane : elle était la rupture de l’équilibre des humeurs qui circulaient dans le corps.
Cet équilibre devait résulter du régime du patient et de son milieu. La médecine antique

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ignorait donc notre notion de contagion et était d’abord individualisante, même si elle
considérait qu’une cause environnementale pouvait toucher plusieurs individus  : les
airs, les eaux, les lieux assuraient, ou non, la salubrité du plus grand nombre. Une
épidémie violente et importante constituait donc un événement limite pour le
paradigme médical antique. Elle impliquait un dérèglement environnemental de grande
ampleur, capable de toucher des constitutions individuelles très différentes, d’effacer la
multiplicité des régimes. Un ou plusieurs éléments de l’environnement s’étaient
retrouvés viciés par des éléments délétères, semblables à un venin ou à du poison, des
miasmes corrompant l’air par exemple. La pestilence est donc un temps et un lieu
affectant les vivants. Ce caractère collectif du mal donnait à l’épidémie un sens politique
et pouvait entraîner la recherche d’une causalité religieuse, alors que les représentations
savantes antiques la déniaient en général pour les maladies individuelles. La pestilence
était conçue comme une perturbation du milieu qui faisait rupture : elle demandait des
explications, nécessitait une origine, une souillure ou une transformation initiale.
6 Si, dans l’Iliade (I, 43-54  ; 451-456), la peste s’abattant sur les Achéens a sa cause
dans la colère du dieu, Thucydide intégra au récit épidémique, d’une manière devenue
ensuite exemplaire, une réflexion sur l’origine géographique de la pestilence : apparu en
Éthiopie, le mal s’était étendu sur les territoires du roi des Perses avant de toucher
Athènes. L’exemplarité du texte fit de la réflexion sur l’origine de la maladie un des
passages quasi obligés de tout récit d’épidémie. Ainsi, la survenue d’une pestilence et la
propagation du mal pouvaient s’expliquer par les vents et les saisons, et donc les astres.
Les mouvements de ces derniers semblaient en effet déterminer la succession des
saisons, repérables au déplacement des constellations. Dans un monde fini, aux cieux
proches de la terre et aux étoiles influentes, explication physique et explication
mythique se rejoignaient puisque l’on pouvait voir les dieux derrière les astres. Dans la
peste d’Égine racontée par Ovide13, la maladie résulte de la colère de Junon et le ciel est
à l’origine du mal, par son brouillard étouffant ; les vents torrides soufflent au rythme
de la Lune tandis que les victimes tendent les mains vers des astres incertains. Le
pathétique du poème reposait sur des éléments de connaissances savantes. L’Histoire
naturelle de Pline l’Ancien expose clairement comment on pouvait comprendre les
épidémies pestilentielles dans ce monde où les philosophes avaient révélé l’union
(societas) existant entre terre et ciel14  : les maladies pestilentielles marchaient du sud
vers l’Occident et ne se propageaient presque jamais dans une autre direction15. On voit
le problème soulevé par ce lieu commun du récit classique d’épidémie16 : lorsqu’une de
nos sources présente une épidémie venue depuis l’Asie, il y a de fortes chances qu’elle ne
fasse que se plier à des représentations culturelles dominantes.
7 Le récit de l’origine de la «  peste antonine  » dans deux de nos sources, Ammien
Marcellin (23, 6, 24) et la Vie de Lucius Vérus par l’Histoire Auguste (8,1), témoigne de
la manière dont des réécritures multiples pouvaient faire usage de l’origine orientale
supposée des maladies pestilentielles. Pour les deux auteurs, puisant sans doute à la
même source, la maladie était née du pillage d’un temple à Séleucie-du-Tigre, en
Mésopotamie, lorsque la ville fut prise par les soldats de Lucius Vérus. Un soldat trop
curieux et trop cupide aurait libéré des miasmes enfermés dans une cachette du temple.
Il ne fait guère de doute que le retour des armées de Vérus à Rome depuis la Syrie
constitua un puissant facteur de diffusion de l’épidémie antonine en 166, mais il y a des
raisons importantes pour remettre en cause le récit d’Ammien et de l’Histoire Auguste,
à commencer par sa narration fabuleuse17. Il fallait pour les Romains expliquer le
synchronisme entre le moment où l’épidémie était devenue pleinement visible et le
moment du retour des armées de Vérus, qui avaient suivi depuis le sud-est la marche
traditionnelle des pestilences. On peut observer que, dans nos sources, ce récit de
l’origine orientale de l’épidémie est séparé de la narration propre de cette épidémie18,
comme s’il en constituait un ajout postérieur, la recherche d’une causalité a posteriori19.
Le triomphe de Vérus avait exposé aux yeux des Romains la statue d’Apollon Komaeos,
prise dans le pillage de Séleucie. C’est dans ce temple qu’Ammien, dont le récit est le
plus détaillé, place la contamination résultant de l’ouverture d’une cache tenue secrète
par les « secrets des Chaldéens ». L’analyse du nom donné à Apollon a permis à Louis
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Robert de montrer magistralement qu’il s’agissait d’un culte installé par les fondateurs
macédoniens de la cité20. Il est fort probable que le pillage romain ait ciblé une statue
hellénistique prestigieuse, ancienne, ensuite mise en valeur dans le triomphe et installée
au cœur de Rome, dans le temple d’Apollon Palatin. Mais Apollon était le dieu de la
pestilence et le pillage d’une vieille cité grecque n’était pas forcément à l’avantage du
pouvoir impérial romain  : il y avait là des éléments qui pouvaient passer pour une
souillure. Dans le même temps, et sans doute à cause de cette expédition
mésopotamienne, l’intérêt pour les Babyloniens semble avoir été vif à Rome  : les
Babyloniaca de Jamblique21, rédigées dans ce contexte ou un peu après, témoignent du
prestige supposé de la sagesse barbare chaldéenne et de sa magie. Enfin, en 175, un des
généraux responsables de cette prise de Séleucie avait tenté une usurpation contre Marc
Aurèle, son échec avait fait de lui, rétrospectivement, le responsable d’un pillage désigné
comme nuisible. Ces éléments se retrouvent avec des lieux communs de mythe (la boîte
de Pandore) et des stéréotypes sociaux (le soldat cupide) dans le récit de la
contamination initiale. On peut envisager que la source commune d’Ammien et de
l’Histoire Auguste soit Asinius Quadratus, peut-être dans ses Parthica, rédigées dans la
première moitié du 3e siècle22. Il devait lui-même s’appuyer sur une source plus proche
de l’événement. Plus qu’un témoignage sur la naissance de la maladie, le récit reflète les
enjeux politiques et sociaux du moment : l’inquiétude suscitée par les usurpations, par
les demandes de l’armée, par les menaces frontalières, autant d’enjeux toujours
prégnants, voire plus, pour Quadratus. L’Asie mésopotamienne joue alors le rôle d’un
décor exotique et barbare où placer une souillure révélatrice et traumatique. Pour
autant, récuser la narration ancienne ne signifie pas avoir démontré que la maladie ne
venait pas d’Asie. Cependant, si tel fut le cas, elle n’avait pas besoin d’un pillage et d’une
armée en déplacement pour toucher Rome, tant les échanges avec l’Asie étaient
importants.

Des routes commerciales reconsidérées


entre l’Asie et l’Europe romaine
8 Nombre de travaux récents ont été consacrés aux liens, le plus souvent commerciaux,
noués entre l’Empire romain et des partenaires plus ou moins lointains en Asie, depuis
ses voisins frontaliers jusqu’à des régions quasiment inconnues avec lesquelles Rome
n’avait que des relations indirectes. Ces travaux peuvent être replacés dans l’évolution
plus générale de l’historiographie, avec l’affirmation de l’histoire globale puis de
l’histoire connectée, mais ils s’expliquent aussi par les possibilités de réflexions offertes,
ces dernières décennies, par de nouvelles sources. Ainsi, pour la zone qui a sans doute
été l’objet de plus d’intérêt, celle de l’océan Indien, il faut signaler la découverte
d’inscriptions militaires romaines au large du Yémen, dans les îles Farasan, la
publication des inscriptions en différentes langues gravées dans la grotte de Ḥôq, sur
l’île de Suqutra, loin au sud de la péninsule arabique, et surtout la publication du
papyrus de Mouziris, témoignant de l’importance économique, financière et matérielle
du commerce maritime dans la région. S’appuyant sur ces connaissances nouvelles, le
livre récent de Maurice Sartre, intitulé Le  Bateau de Palmyre23, dresse un bilan
suggestif, quoiqu’un peu déséquilibré24, de cette ouverture des mondes anciens
méditerranéens à des lointains exotiques. Il faut prendre acte avec lui des limites de nos
connaissances. Outre des lacunes considérables et une inégale répartition dans le temps
et l’espace, il faut souligner la dissymétrie d’une grande partie de notre documentation :
beaucoup de nos sources, surtout dans le domaine littéraire, présentent avant tout le
regard méditerranéen, grec ou romain. Reste que les routes et les régions de rencontre
et d’échange entre monde lointains de l’Antiquité nous sont mieux connues, et que
l’archéologie peut constituer une voie pour s’affranchir du regard romain. Certains de
ces lieux peuvent être qualifiés, avec Maurice Sartre, de « charnières » entre les mondes.
De l’examen renouvelé de ces régions pivots, comme le Xinjiang ou les côtes de l’Inde, il

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ressort une image plus complexe des échanges à grande distance que celle de grandes
routes connectant une offre et une demande concernant un produit de luxe, et où la soie
circulerait de la Chine à Rome le long d’itinéraires lui étant spécifiquement dédiés. Il
faut récuser ces représentations simplistes et souligner d’abord la multiplicité des
itinéraires, des voies d’échanges, des modes indirects d’acheminement. Outre les
transactions marchandes, il faut aussi prendre en compte les cadeaux d’ambassades, les
dons, les tributs. Il faut rappeler encore la diversité des produits engagés dans ces
échanges  : certes la soie, mais aussi, et parfois tout autant sinon plus, l’encens, les
perles, les écailles de tortue, la cannelle, le nard, le malabathron et, bien sûr, le poivre.
L’arrivée massive de ce dernier dans le monde romain au début de notre ère et les
éléments distinctifs de son commerce rappellent aussi qu’il faut considérer de près les
effets d’échelle, la chronologie et le contexte des échanges25. Ce sont des centaines de
tonnes de poivre qui transitaient de l’Inde vers Rome dans les navires du 2e  siècle.
Toutefois, les formes du commerce et les volumes ne sont pas immuables ni partout
semblables. L’attention doit enfin se porter sur les intermédiaires, sur leur rôle et leur
autonomie  : ils ne sont pas les périphéries des centres qui se trouveraient aux
extrémités des routes. Ainsi, ce sont des réseaux indiens qui organisent en grande partie
le commerce de l’océan Indien, d’abord pour leur propre compte, et qui, ce faisant,
servent aussi d’intermédiaires entre Rome et la Chine26. On peut comprendre alors
pourquoi Maurice Sartre intitule un de ses chapitres  : «  Les soi-disant routes de la
soie27 », attirant l’attention de son lecteur sur la complexité d’échanges multiples où la
diplomatie avait aussi sa part et où les intermédiaires jouaient un rôle déterminant.
Ajoutons qu’en partant du point de vue chinois, ce sont, du sud vers le nord et de l’ouest
vers l’est, des routes de l’ivoire ou de la corne de rhinocéros, qu’il faudrait considérer
avec leurs propres plaques tournantes, comme le Funan, dans le delta du Mékong28.
9 En conséquence, les circulations entre l’Asie et l’Europe à l’époque romaine ont été
reconsidérées. Si l’intensité particulière de celles qui touchaient l’océan Indien est
mieux comprise, les voies terrestres restent bien moins connues, malgré les progrès de
l’archéologie en Asie centrale. Elles restent toutefois attachées à l’imaginaire des
«  Routes de la soie  », imaginaire soutenu par quelques documents remarquables
comme un fameux passage de Ptolémée à propos des caravanes du marchand Maes
Titianos, ou plutôt de ses partenaires, et de leur itinéraire terrestre de la Méditerranée
jusqu’au pays de la soie pour les Romains, non pas la Chine, mais la région du peuple
des Sères, intermédiaires nécessaires dans ce commerce, dans le bassin du Tarim, au
Xinjiang29. Cette région était aussi connectée à la route maritime de l’océan Indien, dont
le développement, aux deux premiers siècles de notre ère, apparaît aujourd’hui comme
un fait historique majeur. Elle permettait aux Romains de contourner les intermédiaires
parthes inévitables sur les itinéraires terrestres30. Comme ces derniers, mais sans doute
plus intensément, elle connectait des réseaux commerciaux s’étendant sur des espaces
divers, marqués par une prospérité remarquable et où la circulation était facilitée par
l’existence de grandes constructions politiques impériales, coexistant plutôt
pacifiquement lorsqu’elles se connaissaient : les empires des Romains, des Parthes, des
Kouchans et des Hans31.

Microbes et caravanes de l’Asie vers


l’Europe : une histoire à écrire
10 Nous nous trouvons donc au cœur d’un renouveau historiographique concernant les
échanges entre Rome et l’Asie d’une part, et l’histoire des maladies anciennes de l’autre.
Pour autant, rien n’autorise à relier systématiquement les deux. La plus grande
incertitude concerne peut-être l’épidémie dite de Cyprien. Sa date même reste discutée.
En choisissant la datation haute d’un document, les lettres de Denys d’Alexandrie32,
Kyle Harper en place la première observation en Égypte en 24933. Dès lors, une origine
orientale est possible, voire probable, tant la province du Nil est liée au commerce vers

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l’Inde et l’Asie, mais on peut aussi songer, comme Harper, à une origine éthiopienne34.
Cette datation est controversée et refusée par Sabine Huebner, qui place la première
observation de l’épidémie sur le Danube en 25135. Pour autant, l’origine asiatique n’est
pas récusée. Observant la coïncidence dans sa chronologie entre l’épidémie et l’invasion
des Goths, Sabine Huebner suppose, prudemment, que la maladie aurait été apportée
par des membres des peuples des steppes présents chez les envahisseurs36. Les porteurs
et le chemin envisagés sont donc radicalement différents : non plus les marchands sur
les chemins du commerce, mais les nomades sur ceux de la guerre. Dans un cas comme
dans l’autre, on se trouve en présence d’hypothèses fragiles.
11 Pour l’épidémie antonine, l’origine asiatique, on l’a vu, est affirmée dès l’Antiquité.
Séleucie-du-Tigre se trouvait sur un des débouchés des itinéraires commerciaux
terrestres jusque vers l’Asie centrale37. Mais le récit antique de la contamination initiale
à Séleucie doit être récusé : pourquoi le microbe aurait-il attendu l’armée romaine pour
se diffuser, ignorant les nombreux échanges commerciaux et caravaniers entre Séleucie
et la Syrie romaine ? Pour autant, si l’on s’éloigne de Séleucie, d’autres éléments ont été
relevés. Les sources chinoises attestent elles aussi d’épidémies plus nombreuses dans les
mêmes années38. Par la suite, au début du 3e  siècle, la fin de la dynastie des Han
orientaux est marquée par les épidémies, décrites notamment par Zhang  Ji, figure
médicale contemporaine de Galien39. À partir d’une analyse de la statuaire des
Kouchans, notant l’importance de la figure d’Hariti, connue ensuite comme déesse de la
variole, David Bivar suggéra que les régions occupées par les Kouchans avaient pu
souffrir de la même épidémie que l’Empire romain40. S’il faut relever, là aussi, la part
considérable des hypothèses et des suppositions, ainsi qu’une approche peu critique du
récit de la contamination à Séleucie41, ses observations interrogent encore. Enfin,
l’Arabie fut touchée par des épidémies vers les années  150. Une inscription sud-
arabique, au Yémen, mentionnant une épidémie vers 156 a été mise en rapport avec
l’épidémie antonine42 et l’Histoire Auguste garde le témoignage d’une épidémie en
Arabie, à comprendre plutôt comme la province romaine et donc vers l’actuelle
Jordanie, probablement un peu avant 14843. Il est impossible de dire si l’on a affaire à
des épidémies isolées ou s’il faut rapprocher ces attestations. On ne peut pas non plus
retracer un chemin épidémique et la voie d’une contamination entre l’une ou l’autre de
ces attestations d’épidémies dans la deuxième moitié du 2e  siècle. En outre, l’Asie et
l’Europe ne sont pas les seules concernées  : Kyle Harper a fait observer comment
l’histoire naturelle de la variole laisse envisager qu’elle est apparue en Afrique44. Si
l’épidémie antonine fut bien l’émergence de la variole parmi les populations humaines
c’est d’Afrique que le microbe aurait marché d’une part vers Rome et d’autre part vers
l’Asie, l’Inde et la Chine. Cependant, l’identification de la maladie de l’époque de Galien
avec la variole n’est pas confirmée et l’évolution de son virus est encore mal connue45. Il
est donc actuellement prématuré de tracer les chemins de cette épidémie. Pour autant,
le synchronisme des épidémies et des difficultés entre Rome et la Chine ne saurait être
négligé et d’autres éléments doivent être pris en compte, dont le facteur climatique46.
12 Pour la «  peste justinienne  », nous bénéficions de données mieux assurées.
L’épidémie est identifiée, grâce à l’ADN ancien, comme ayant été provoquée par le
bacille de la peste au sens moderne et médical du terme, Yersinia pestis, sous la forme
d’un variant aujourd’hui disparu. Son génome montre sa proximité avec des variants
(0.ANT) issus de foyers naturels de peste en Asie centrale, notamment au
Kirghizistan47, pays voisin du Xinjiang. D’après Procope, la maladie apparaît à Péluse,
en Égypte, en 54148. Jean d’Éphèse, retranscrit dans la chronique de Michel le Syrien,
détaille l’origine en amont de la survenue en Égypte : « elle commença par les peuples
intérieurs du sud-est de l’Inde, c’est-à-dire de Kouš, Ḥimyarites et autres49  ». La
propagation de la maladie semble donc directement liée aux routes de l’océan Indien50
et son origine voisine avec l’une des régions charnières pour les échanges en Asie. Pour
autant, ce n’était pas la première arrivée de la peste bubonique en Méditerrané : Rufus
d’Éphèse la décrit vers 100 de notre ère en Égypte, Syrie et Afrique51. L’épidémie de
Justinien constituait donc un retour fracassant, ou l’arrivée d’un nouveau variant.
L’éclairage porté sur les chemins de la peste à la veille de 541 soulève des questions  :
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pourquoi est-ce à ce moment-là que la maladie emprunta des voies fréquentées depuis
des siècles  ? Pourquoi se diffusa-t-elle d’une manière non attestée jusqu’alors  ? Outre
les propriétés de chaque variant, difficiles à connaître, les circulations humaines
comptent, mais il faut aussi songer aux questions de réservoir animal – la présence des
rats – et de contexte : la question climatique est importante en 541.
13 Les trois grandes épidémies qui ont marqué l’histoire de l’Empire romain restent
encore mal connues. Pour deux d’entre elles, l’origine est encore obscure. Il faut résister
à un «  orientalisme épidémiologique52  », héritier de Thucydide et de la médecine
coloniale européenne, et reconnaître les limites de nos connaissances. À la fin de
l’Antiquité, la peste de Justinien emprunta les voies du commerce qui s’étaient tissées
depuis longtemps entre le cœur de l’Asie et la Méditerranée romaine. Toutefois, les
raisons de cette survenue nous échappent  : l’histoire des microbes et des hommes sur
les routes du commerce est complexe et encore largement à écrire.

Notes
1 Cet article est rédigé dans le cadre du programme ANR Pscheet : Pestes et sociétés humaines,
émergence, évolution et transformations bioculturelles.
2 Elio Lo Cascio (dir.), L’Impatto della « peste antonina », Bari, Edipuglia, 2012.
3 Kyle Harper, « Pandemics and Passages to Late Antiquity : Rethinking the Plague of c. 249-270
Described by Cyprian », JRA, 28, 2015, p. 223-260.
4 Voir notamment Tacite, Annales, XIII, 1-2 ; Suétone, Nero, 39 ; Divus Titus, 8.
5 Lester K. Little (dir.), Plague and the End of Antiquity : The Pandemic of 541-750, Cambridge,
University Press, 2007.
6 C’est l’objet du livre de Kyle Harper, Comment l’Empire romain s’est effondré, le climat, les
maladies et la chute de Rome, tr. fr., Paris, La Découverte, 2019.
7 Depuis les années 1990, lorsque le débat a été relancé à propos de l’épidémie antonine, la
bibliographie est considérable. On peut aborder le débat à partir du compte rendu du livre de
Harper donné par Alain Bresson, «  Fates of Romes  », JRS, n°  110, 2020, p.  233-246.
Dernièrement, il s’est particulièrement porté sur la « peste justinienne », suite à plusieurs articles
de Lee Mordechai et Merle Eisenberg, dont « Rejecting Catastrophe : The Case of the Justinianic
Plague », Past & Present, n° 224-1, 2019, p. 3-50.
8 Rebecca Flemming, « Galen and the Plague », dans Caroline Petit (dir.), Galen’s Treatise Περὶ
Ὰ λυπίας (De indolentia) in Context. A Tale of Resilience, Leyde, Brill, 2019, p.  219-244,
particulièrement p. 232-240.
9 La plus importante est Galien, Méthode de traitement, 5, 12 (K  366-368  ; tr. fr. Jacques
Boulogne, Paris, Gallimard, 2009, p.  317-318). Le passage doit être lu en gardant à l’esprit ce
qu’est un symptôme pour Galien : Méthode de traitement, 12, 1 (K 811 ; op. cit., p. 657). Le refus
par Galien d’un quatrième genre de symptômes implique qu’il puisse passer volontairement sous
silence des éléments potentiellement très visibles qui pour nous seraient déterminants, il est donc
très risqué de s’appuyer sur l’argument e  silentio pour prétendre établir un diagnostic
rétrospectif.
10 C’est l’hypothèse explorée, pour l’épidémie antonine, par le modèle développé par Yan Zelener,
« Genetic evidence, density dependence and epidemiological models of the “Antonine Plague” »,
dans Elio Lo Cascio (dir.), op. cit., p. 167-177.
11 Danielle Gourevitch, « [compte-rendu de Lester K. Little, op. cit.] », L’Antiquité classique, 77,
2008, p. 581.
12 Maria A.  Spyrou et  al., «  Analysis of 3800-year old Yersinia pestis genomes suggests Bronze
Age origin for bubonic plague », Nature communications, 2018, 9, 2234, DOI : 10.1038/s41467-
018-04550-9.
13 Ovide, Métamorphoses, VII, 528-532 et 580.
14 Pline, Histoire naturelle, XVIII, 273, citant ou paraphrasant Démocrite.
15 Pline, Histoire naturelle, VII, 51.
16 Richard P. Duncan-Jones, « The impact of the Antonine Plague », JRA, 9, 1996, p. 114.
17 Benoît Rossignol, «  Le climat, les famines et la guerre  : éléments du contexte de la peste
antonine », dans Elio Lo Cascio (dir.), op. cit., p. 91-92.
18 Dans l’Histoire Auguste, la description de l’épidémie se trouve dans la «  Vie de Marc Aurèle
(XIII, 3-6)  » et on peut penser qu’Ammien en parlait dans les livres perdus consacrés à cette
période. De même, il faut remarquer comment Eutrope sépare le récit de la prise de Séleucie, où
https://journals.openedition.org/chrhc/17469 8/11
13/06/2023 21:04 La propagation des maladies entre l’Europe et l’Asie dans l’Antiquité : le cas de l’Empire romain
la maladie est absente (8, 6, 10, 2), et le récit de l’épidémie placée post victoriam persicam (8,6,
12, 2).
19 Nous faisons allusion, en toute conscience des écarts entre la médecine grecque et celle de
sociétés sans écriture, à la notion développée par Andras Zempleni, «  La “maladie” et ses
“causes”. Introduction  », L’Ethnographie, t.  81, n°  96-97, 1985, p.  28-29  : face au récit de la
contamination à Séleucie, l’historien se trouve dans une situation largement similaire à celle qu’il
décrit pour l’ethnographe dans les cas de causalité a  posteriori, en revanche Ovide et Pline
décrivent la causalité a priori. D’autres catégories explicitées par Andras Zempleni nous semblent
aussi pouvoir être fécondes pour analyser les récits de pestilence  : ainsi à Séleucie, la cause
instrumentale serait l’effraction de la cache du temple, l’agent le soldat cupide et l’origine le
pillage contra fidem. Ajoutons que, parce qu’ils échappent au paradigme de la médecine
hippocratique individualisante et profane, les récits de pestilence se rapprochent de maladies
interprétées en termes d’intentionnalité et d’étiologie sociale.
20 Louis Robert, «  Eulaios, histoire et onomastique  », Épist. Épétéris Philos. Sch. Ath., 1962-
1963, p. 519-529 (= Opera Minora Selecta, II, Amsterdam, Hakkert, 1969, p. 978-987).
21 Photios, Codex 94 avec scholie A1.
22 Giuseppe Zecchini, «  Asinio Quadrato storico di Filippo l’Arabo  », ANRW  II, 34.4, 1998,
p.  2999-3021  ; Pasqua De  Cicco, Les  Historiens grecs d’époque impériale et tardive à l’état
fragmentaire, Thèse de doctorat, université de Nantes, 2017, p. 81-183.
23 Maurice Sartre, Le Bateau de Palmyre. Quand les mondes anciens se rencontraient, VIe siècle
av. J.-C./VIe siècle ap. J.-C., Paris, Tallandier, 2021.
24 Le volume montre un tropisme oriental marqué et les deux premiers chapitres, consacrés à
l’Occident et à l’Afrique, ne sont pas à la hauteur des suivants : la documentation y est bien plus
de seconde main et s’appuie sur une bibliographie ancienne, parfois dépassée, les populations
locales sont peu considérées (les Garamantes au Sahara méritaient plus d’attention) et
l’archéologie est trop absente (par exemple pour la « route de l’ambre ») ou réduite à l’anecdote,
comme pour le célèbre statère de Lampaul-Ploudalmézeau, où la bibliographie francophone
semble ignorée et qui est présenté sans un contexte géographique significatif, celui de l’Aber-
Benoît et de Tréglonou.
25 Federico De Romanis, Pierre Schneider et Jean Trinquier, « La circulation du poivre noir de
l’Inde méridionale jusqu’en Méditerranée  : quels changements  ?  », dans François Lerouxel et
Julien Zurbach, Le Changement dans les économies antiques, Bordeaux, Ausonius, 2020, p. 279-
317, particulièrement p. 308-311.
26 Kasper G. Evers, Worlds Apart Trading Together : The Organisation of Long-Distance Trade
between Rome and India in Antiquity, Oxford, Archaeopress, 2017.
27 Maurice Sartre, op. cit., p. 209-224.
28 Jao Tsung-I, Léon Vandermeersch, «  Les relations entre la Chine et le monde iranien dans
l’Antiquité historiquement revisitées à la lumière des découvertes archéologiques du dernier quart
de siècle  », 93, 2006, Bulletin de l’École française d’Extrême-Orient, 93, 2006, p.  207-245,
particulièrement p. 221-223 et 226.
29 Paul Bernard, « De l’Euphrate à la Chine avec la caravane de Maès Titianos (c. 100 ap. n.è.) »,
CRAI, 149-3, 2005, p.  929-969  ; Nathanael Andrade, «  The voyage of Maes Titianos and the
dynamics of social connectivity between the Roman Levant and Central Asie/West China  »,
Mediterranaeo Antico, 18, 1-2, 2015, p.  41-74. Sur les liens entre Iran et Chine  : Jao Tsung-I,
Léon Vandermeersch, op. cit.
30 Nathanael Andrade, op. cit., p. 51-53.
31 C’est à juste titre que ce fait est souligné dans Jean-Noël Robert, De Rome à la Chine. Sur les
routes de la soie au temps des Césars, Paris, Les Belles Lettres, 1993.
32 Eusèbe, Histoire ecclésiastique, 7, 21-22.
33 Kyle Harper, « Pandemics and Passages to Late Antiquity : Rethinking the Plague of c. 249-
270 Described by Cyprian  », loc.  cit., et Kyle Harper, «  Another eyewitness to the plague
described by Cyprian, with notes on the ‘Persecution of Decius’ », JRA, 29, 2016, p. 473-476.
34 En observant qu’une partie des sources antiques confondaient facilement Inde et Éthiopie.
35 Sabine R. Huebner, « The “Plague of Cyprian”: A revised view of the origin and spread of a 3rd-
c. CE pandemic », JRA, 34, 2021, p. 151-174.
36 Sabine R. Huebner, op. cit., p. 169.
37 Nathanael Andrade, op. cit., p. 41 et 53-54.
38 Le synchronisme avait déjà été relevé par Friedrich Hirth, China and the Roman Orient,
Leipzig, Munich, Georg Hirth, 1885, p.  175, il a été à nouveau mis en évidence par Richard
Duncan-Jones, op. cit., p. 117, s’appuyant sur la liste des épidémies chinoises dressée par William
McNeill dans les années 1970 et constamment utilisée depuis. Cette liste devrait aujourd’hui être
mise à jour et corrigée  : Ka-Wai  Fan, «  Correspondence [Quantitative analysis of epidemic and
population patterns in the Chinese Empire  : how is this possible  ?]  », Epidemiology and

https://journals.openedition.org/chrhc/17469 9/11
13/06/2023 21:04 La propagation des maladies entre l’Europe et l’Asie dans l’Antiquité : le cas de l’Empire romain
Infection, 139-4, 2011, p.  644-645. Cela manifeste le besoin de traductions et d’échanges entre
chercheurs travaillant sur des régions différentes pour améliorer nos connaissances. Ce besoin va
au-delà d’une liste d’épidémies, car on ne peut travailler sur une telle liste en ignorant les
catégories et les conceptions des sources qui ont permis de l’élaborer, pas plus que le loimos grec
ou la pestilentia romaine, les catégories chinoises de wenyi (épidémie fébrile) ou de li (pestilence)
ou de shanghan (pathologie du froid), par exemple, ne peuvent être ramenées simplement à une
nosographie moderne : Martha E. Hanson, Speaking of epidemics in Chinese medicine : disease
and the geographic imagination in late imperial China, Londres, Routledge, 2011, p. 9-10.
39 Martha E. Hanson, op. cit., p. 4-5, p. 12.
40 David Bivar, « Hariti and the Chronology of the Kusanas », Bulletin of the School of Oriental
and African Studies, 33-1, 1970, p. 10-21, particulièrement p. 19-21.
41 Benoît Rossignol, op. cit., p. 92-94.
42 Christian Robin, «  Guerre et épidémie dans les royaumes d’Arabie du  Sud d’après une
inscription datée (IIe  siècle de l’ère chrétienne)  », CRAI, 1992, 136-1, p.  215-234  ; Rossignol,
op. cit., p. 94-95 ; Harper, Comment l’Empire romain..., op. cit., p. 158.
43 Romain Loriol, « Les prodiges comme géographie sous Antonin le Pieux et Théodose. Sur une
liste de l’Histoire Auguste (Vie d’Antonin, 9, 1-5) », MEFRA, 129-2, 2017, p. 613-634.
44 Kyle Harper, op. cit., p. 150.
45 Flemming, op. cit. L’histoire de la variole et de ses variants avant l’époque moderne est encore
mal connue, mais s’est précisée ces dernières années. En dernier lieu, voir Barbara Mühlemann
et al., « Diverse variola virus (smallpox) strains were widespread in northern Europe in the Viking
Age  », Science, 2020, 24  juillet, DOI  : 10.1126/science.aaw8977. L’ancêtre commun du virus
prétendument «  viking  » et de la variole moderne serait à placer vers 300  de notre ère. Sur les
problèmes soulevés par cet article, voir Timothy P.  Newfield, Ana T.  Duggan, Hendrik Poinar,
« RE : Diverse variola virus (smallpox) strains were widespread in northern Europe in the Viking
Age  », Science, 369, 2020, eLetter  :
<https://science.sciencemag.org/content/369/6502/eaaw8977/tab-e-letters>.
46 Benoît Rossignol, op. cit.
47 Vladimir V. Kutyrev et al., « Phylogeny and Classification of Yersinia pestis Through the Lens
of Strains From the Plague Foci of Commonwealth of Independent States  », Frontiers in
Microbiology, 9, mai 2018 (DOI : 10.3389/fmicb.2018.01106), particulièrement p. 8-9.
48 Procope, Histoire de la guerre contre les Perses, 2, 22, 6.
49 Jean-Baptiste Chapot (éd.), Chronique de Michel le Syrien, II, Paris, Leroux, 1901, p. 235 (IX,
XXVIII, 305), voir aussi p. 236 et 240 (Zacharie le rhéteur) à propos d’une origine dans le pays de
Kouch.
50 Kyle Harper, Comment l’Empire romain..., op. cit., p. 308-311.
51 John Mulhall, « Plague before the Pandemics : The Greek Medical Evidence for Bubonic Plague
before the Sixth Century », Bulletin of the History of Medicine, 93-2, 2019, p. 151-179.
52 Patrick Boucheron, « “Yersinia Pestis”, histoire(s) naturelle(s) », cours au Collège de France,
2  février 2021, <https://www.college-de-france.fr/site/patrick-boucheron/course-2021-02-02-
11h00.htm>.

Pour citer cet article


Référence papier
Benoît Rossignol, « La propagation des maladies entre l’Europe et l’Asie dans l’Antiquité : le cas
de l’Empire romain », Cahiers d’histoire. Revue d’histoire critique, 151 | 2021, 47-60.

Référence électronique
Benoît Rossignol, « La propagation des maladies entre l’Europe et l’Asie dans l’Antiquité : le cas
de l’Empire romain », Cahiers d’histoire. Revue d’histoire critique [En ligne], 151 | 2021, mis en
ligne le 01 février 2022, consulté le 13 juin 2023. URL :
http://journals.openedition.org/chrhc/17469 ; DOI : https://doi.org/10.4000/chrhc.17469

Auteur
Benoît Rossignol
Université Paris-1 Panthéon-Sorbonne, ANR Pscheet, UMR 8210 Anhima

Droits d’auteur
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13/06/2023 21:04 La propagation des maladies entre l’Europe et l’Asie dans l’Antiquité : le cas de l’Empire romain

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