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Titre : Revue historique et archéologique du Maine

Auteur : Société historique et archéologique du Maine. Auteur du texte

Éditeur : G. Fleury & A. Dangin (Mamers)

Éditeur : Pellechat (Le Mans)

Éditeur : G. Fleury & A. DanginG. Fleury & A. Dangin (Mamers)

Éditeur : Imprimerie FleuryImprimerie Fleury (Mamers)

Éditeur : Imprimerie G. EnaultImprimerie G. Enault (Mamers)

Éditeur : Imprimerie MonnoyerImprimerie Monnoyer (Le Mans)

Date d'édition : 1906

Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32860001m

Notice du catalogue : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/cb32860001m/date

Type : texte

Type : publication en série imprimée

Langue : français

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Description : 1906

Description : 1906 (T60).

Description : Note : "Voyages en France".

Description : Collection numérique : Fonds régional : Pays de la Loire

Droits : Consultable en ligne

Droits : Public domain

Identifiant : ark:/12148/bpt6k343607

Source : Bibliothèque nationale de France

Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France

Date de mise en ligne : 15/10/2007

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REVUE

BISTOHIQUE ET ARCIIÉOLOGIQUE

DU MAINE


HISTORIQUE ET ARCHÉOLOGIQUE

DU nznrNF

MAISON DITE DE LA REINE 13Él3FNC;iBl~ 1'1, GRANDE-PU1E, AU MANS

GABIUEL l'1.I~UILI' IMPRIMEUR

l'lace des Groii;es.

REVUE

TOME SOIXANTIÈME

ANNF.fè 1906. SECOND SEMESTRE

AU ~IÈGE DE L~l SOCIH~TL

MAMEftS

LE MANS

A. DE SAINT-DENIS LIDflAIRE-ÉDITEUR fi Place Saint-Nicolas.

1906



LES POSSESSIONS 1) t: Il«

ABBAYES 31ANCELLES ET ANGEVINES

EN ANGLETERRE

lJ'PRÈS LE I~U.IlESll:ll' 1~001~

1,'un des derniers actes administratifs de le Conllu.?rant a été le « Grand l'L'censement » j(:neot Srcrre~~l, ou relevé officiel de la propnété du sol, de ses morcellcments de sa population de. son rendement par toute l'nglet8rre, quelque,, comtés près mesure qui compli~te dans son ensemble le plan de réorg:1l1isation poursuivi 1)~il- le chef de la ùynastit' .\nglo-Normande dnns ses États d'outre-mer.

Ce n'est pas ici le lieu de retracer, lie fut-ce que dans ses grandes lignes, le règne de l'heureux compétilt'ur d'Hauold. Disons seulement due Guillaume, par le fuit des circonstances, par le. fait surtout des tl'Op rmides (lui l'avaient aiùé Li entamer la r:om:luéte, fut contraint u brève échéance de se départir de la modération dont il avait fait hreuve tout d'ahord, et -Il laquelle il devait lu franche adhésion d'une partie de la noblesse. et du haut clergé -~il-lo-Saxoiis (1 Les fonctionnaires Normands de tout t1I Parmi ces ralliés de la prcmiPre heurc sc trouvaient: Ealdred, arclWéque d'York; \ul:ilan, évèque de "'orccsler, GauIl¡ier, éi-êqlte


rang, insolents et pillards, eurent vite fait d'exaspérer la population indigène (1). Des soulèvement" éclatèrent dans les comtés, suivis de massacres. Les partisans d'Harold, les « Nationalistes J), dirions-nous aujourd'hui, reprirent courage, firent appel à l'étranger on vit reparaître les Danois et leurs flottes aux embouchures des grands fleuves. A coups d'épée les conquérants de la yeille. durent affermir leur autoriti:. De là d'atroces représailles et une lutte qui, entremêlée d'accalmies, se prolongea durant près de huit ans (`?) (,1(-)57-,1075).

L'issue cependant ne pouvait èwe douteuse. Les AngloSaxons, quoique très braves, étaient mal organisés, sans cohésion; tandis que leur adversaire disposant de forces considérables et aguerries, semblait multiplier ses coups. hien n'était capable d'arrêter son indomptable énergie pas plus les distances que les obstacles naturels ou la rigueur des hivers. Pendant longtemps les comtés du Nord devaient conserver le souvenir tle ses terribles chevauchées. Au d'Hereford. L'élément laïque était représent~ par Edgar Athelino, un descendant des anciens rois, par Edwin, comte de \fercie, l\!orcar, comte de Northumbrie; W'altUeof, cumte de r-Iol'lhampton; Copsi, gouverneur de la région au nord de la Tyne Turchill de \Yarwich Sivard l3arn Edric Wild.

,II Interea Normannico fastu ,\ngli opprimuntur, et praesidibus sue perltis, qui regis mouit us ailiiiotitiin injuriahantur. Pracfecti minores, qui munitioues cuslodiebaut, nobiles et mediocres iudin genas iujuslis exactionilms multisque conturneliis agôl'avabaut, o Ord. Vitalis, Ecclcs. his(or., IV, éditioti Le Prévost, t. II, p. 71. 121 Au dire d'Orderic Vital, dont l';ime et le patriotisme s'émeuvent au souc-euir de tant de calamités près dc cent mille victirnes disparurent dans cette désolation, où la famine était venue s'adjoindre à la guerre. L'énergique protestation qu'arrachent au moine historien tant de cruautés, mérite d'êlre citée

~Iisericordia motus miserabilis populi rnmrorilrns et. ancietatibus rnagis condoleo, quam tantas caedis reo fricolis adulatiouibus ravere ilititiliter studeo. Praeterea iudubitanter assero quod impune uou i-einittetiii, tam feralis occisio. Summos enim et iutos intuetur omnipoa tens Judex, et aeque omnium facta discutiet ac puniet justissimus \index. Ordo Vitalis, oy. cit., t. II, p. ll,)6.


milieu de ses succès Guillaume, malgré tout, éprouva maintes fois de rudes transes. Parmi beaucoup d'autres, celles que lui causa la fidélité chancelante de ses guerriers Nurmands ne furent pas les moins vives. Peu s'en était faIlLi en efIet que la hautaine et péremptoire mise en demeure des épouses, que l'attente et l'ennui torturaient dans leurs manoirs Hl bas au-ùelÜ de la Manche, ne produisit parmi ses chevaliers la plus f~tcheu~e comme la plus inattendue des déhandadea ('1). Pour parer aux défections le Conquérant dut recourir aux ôrauds moyens de persuasion, Il distribua force terres et revenus il multiplia les belles promesses pour l'avenir (:!). Sauf pour quelques-uns chez clui la nostalgie du foyer l'emporta sur la cupidité, la plupaL't se laissèrent prendre Ü J"appÙt et continuèrent à guerroyer.

Le calme rétabli, on voit prendre corps immédiatement sur le pays une aristocratie qui n'u rien de commun avec l'ancienne et clni ne la rappelle que de très loin. Guillaume s'était réservé pour lui-mème les « terres royales », ou domaine privé des anciens rois anglo-saxons, et de ce clief il possédait un revenu immense. Ainsi pourvu le premier, il combla généreusement les plus braves de ses barons, ceux dont le dévouetnent ne s'était pas démenti. Il n'uublia pas non plus ceux qui lui tenaient de plus près, soit par les liens du sang, soit par l'amitié (3). C'est ainsi rlu'Etules, évêque de Bayeux et demi frère du roi, rel:.ut i li Crebris. nunliis a l'iris suis Ila,;itabant ut vito revertereutur, » adùentcs quod nisi reditum maturarent ips-,te sü~i alios conju~es tirocurareiit. ») Ordo Vitatis, op. cit., t. Il, p. 485.

i') u Hec autem inter tot bellorum motiones seculn milites suos retin nere cupicbat, et terras c"rn redditibus et magnis potestatibus eis ami» cabiliter alTerebat, et majora, dum totum regnurn ab adversarüs undique liberaturil esset, promittebat. Ord. Vitalis, op. cit., t. Il, p. 186. (3i La comtesse Judith, niéce du Conquérant, était propriétaire dans les comtés de Middlesex, de Buckingham, et d'Oxford, de Huutinodon et de Cambridge, de Bedford, de Northampton, de Lincoln, de Hulland et de Leicester-


pour att part la riche province de hent et nombre de mano i l' dalls d'autres comtés (1). Guillaume' Fitz-Osbern, principal conseiller du prince, fut investi du comté ù'lIerdord et de l'ile. de Wiglit. Roger de inlotit-oniiiiery eut le Shropshire, Eudes de Champagne le Surrey. De leur côté, Gautier Giffard et Guillaume de 'Varenne se partagèrent le comté tle Buclcinoham. Le breton Paout de Guader commandait Ü Norwich Hugues de Grentetnesnil à Leicester, Guillaume Peverel Noltingham. D'autres comme Eustache tle Boulogne, Hobert de l\Iortain, Guillaume d'Évreux, hobert d'Eu, Geoffroy de blortyne rec;urent du bien un peu partout.

tluant aux batailleurs par tempérament, aux chercheurs la frontière en face du pays de Galles et de la Cornouaille offrnit un champ toujours ouvert à leurs entreprises. Ils étaient sûrs d'y rencontrer en toute saIson de rude; ad~~ersaires qu'il n'était pas facile de mater. C'est là, aux, confins du Herefordshire du 1\7·ontnouthsluire et du Cheshire que nos cotiipitriotes, les W'inebrtud de Ballon et les Payen de Sourches vinrent un peu plus tard se tailler un domaine ('2).

La société anglo-normande nous apparait alors il peu près ainsi composée. Au-dessous du roi il y i d'abord les grands propl'iétaires fonciers, tels que ceux dont je viens de parler, (l) Les él'èques de Coutances et de Lisieux tie furent pas oubliés dans cette répartition, Le premier ne reçut pas moins de deux cent quatrevingt manoirs- états de service lui méritaient bien cette récompense. A la jouruée de Senlac il était aux côtés de Guillaume plus tard, il prit it une part act; l'C, trop acli l'e même eu égard -i son caracli're ecclésiastirlue à toutes les expédition5 contre les Aiiglo-Stxoiis. C'était un chef de balaillon !lnay/sle" militrimn bien plus qu'un évéqu(', remarque Orderic \`ital.

121 Un Guy de Craon (It'ido ~le Cnectmae, cie G'reclmR qui fit souche en Anglelerre, était tenant du roi dans les comtés de Leicester et de Lincoln. Domescla~ Bnoh, t. I, f~~9 235 w~ 3liî v~ Son fils Alain fonda à Freiston, au temps du toi Étieiiiie, un prieuré dans lequel il appela des moincs de Croyland, que ~ouccrnait son fu~re Ge~(Fro~


barons et nobles liés au prince par le serment de fidélité et l'obligation du service de guerre. Ceux-là s'appellent les francs propriétaires, les tenants en chef du roi la terre leur appartieut en propre, ils la transmettent il leur descendauce par voie d'héritage. Quelques représentants de l'ancieiiiie aristocratie saxonne ont aussi réussi à se maintenir en faveur mais ils ne forment plus qu'une minorité sans influence ce sont des déclilis. ~1u-dessous du tenant en chef apparaissent dans chaque comté. le" arrière-tenants, ses lommes d'armes la plupart du temps, retenus euxmêmes dan-, le devoir par une promesse ou un engagement. Dans le; villes résident les citadins, les bourgeois, les -artisans. Les hommes d'église, elu'ils appartiennent au clergé séculier ou régulier, forment un corps il part. Sur la terre enfin, dans les campagnes, sont dissénÙnées les familles indigènes, classées par catégories. Il y a les serfs, les les bordiers ou bonbgers, les coscetz les SU~~i8llL(Llilfl toutes dénominations qui affectent une caste spéciale de la clas"e agricole. Dans cette masse on rencontre encore quelques hommes ou femmes de condition libre, mais c'est l'exception.

Qu'on y prenne garde toutefois. Un point capital differencie la féodalité anglaise de celle des autres pays- La royauté en etIet y il conservé le plus efficace des moyens de recours. Elle est demeurée haute propriétaire du sol. L'hérédité aura JJeau fixer la possession des fiefs dans les familles le le seul propriétaire c'est toujours et partout le roi. (Jue la postérité d'un haut baron vienne il s'éteinùre, par exemple, immédiatement b couronne rs'eiyipressera de disposer à sa guisè de cette succession en déshéreuce. S'il ne laisse qu'une fille, ceJle-ci ne pourra prendre mari sans le consentement du souvèrain. 1)'autre part, (-IL1'uti franc propriétaire cherche il s'émanciper, qu'il tombe dans le crime cle ( forfaiture » soit pue complot, soit par révulte son cas n'est pas douteux. La première peine


qui l'atteindra sera la perte de ses biens. Le Conquérant a au manier habilement cette arme. redoutable: ses SUCCèSseLl[' 1111~L1\ encore.

Mais revenons au (rret!t ]3ieii llue les renseignemeuta qui concernent cette opération soient assez peu explicites, de leur ensemble on peut néanmoins dégager quelques particularités intéressantes. Sur la date précise s'ouvrit cette enquête, il n'existe aucune donnée sÙre. Nous seulement que tout était terminé en -1086 (1). ;\Iême incertitude au sujet des motif,; qui déterminèrent Guillaume le Conquérant u cette mesure. Tout ce que l'ou a avancé à ce propos, remarque 11I. Stuart lloore, découle plutôt d'une série de déùuctions que de lu connaissance des faits immédiats (2). En elTet, la Gltro~ai~ltte :laylo-Sn.o,we et elle seule nous ct conservé, ces détails rapporte simplement qu'en -11)85, le roi Cuut de Ilanemark méditait un coup de main sur l'Anoleterre. Le Conquérant, qui se trouvait alors eu Normaudie, revint promptement par c1elÜ, rumenant awc lui une nombreuse nrmée de cavaliers et de gens de pied, qu'il avait recrutés en France et en 0 Les cotes, particulièrement menacées, furent tlévastém en vue de la défense, taudi; que les soldats 0lra\J~er~ s'ill:tallaient sur le pays, qui dCtt les faire vivre. Lourde charge t 1 i Ou peut le caucluue de cette noté qui termine le demiéme volume du llo~itesda~ llook

Anno millesimo octogesimo sexto ah

Incarnatione Llni. Vigesimo c~ reg'ni

ficta est ista descriptio. non

soliiin jet- ho, Il'es cumitatus sed etiam

pcr alias,

i~3p)m tl~c Sltnl~ oC Llo"tesclny Book, dans Ilomestln~ Slztcfies vol. I, p. 1-2 et suivantes.


pOUl' le pauvre peuple, gémit le vieil annaliste. Vers le milieu de l'hiver, Guillaume tint aa cour u Gloucester une assemblée du clergé s'y réunit aussi, Après cela, le roi eut avec ses « witan ») de très graves entretiens au sujet de sa terre, du chiffre de la population et de la conditioll des gens qui l'habitaient (1).

De ces dernières lignes de la Chronique citée on a été amené à conclure, et non sans queldue raison, que le souverain était hanté par la préoccupation de soumettre il un controle plus régulier et plus exact non seulement la répartition et la rentrée. de l'impôt, mais aussi le service que lui de%-ait la noblesse.

A la suite de ces pourparlers, les agents myaux se répandireut h travera lea comtés pal' groupes de quatre à six (2 On ne peut qu'udmirzr leur façou de procéder, à la fuis ingénieuse et très simple. Partout nit ils se transportaient, étaient invités kt comparailre en leur présence le shéritI et la noblesse du comté, les arrière-telwnts des le, clergé des églises, bailli de chaque village accompagné de six habitants. Le questionnaire était préparé d'avance: chaque réponse devait étre formulée sous la foi du serment. 'l'out d'abord les commissaires s'enquéraient du nom de chaque manoir; qui l'avait possédé au temps du roi Éùouarù le Confesseur; quel en était le tenant actuel `? Ensuite les interrogatoires portaieut sur la contenance du domaine aur le nombre de, cl:arrues qu'occupait la terre seigneuriale; puis celle des manants. Quel était le nombre global des paysans Celui des représentants de (U _I~e~lo-Sn.rora Chnoitiuld, édit. Tlrorpe, t. II, p. -18:)-t86.

I:!) Une concention pass, entre \lstan, évêque de 1\'orceâter; et Gauthier, alilu~ iioiis fuurnit les noms de quatre Je ccs cOn1JIlissaires,' qui l'enerant ad inquirendas terras comitatus. n C'étaient Rémy, écédue de Lincoln, Henry de re'Tel's, Gautier GiITal'ù. comte de l3uckingham, et ~daiii, frère d'Eudes le Di"pencer. Dugdale, Jloaa,ticnn nn~lio., édit., t. I. p. 1j(1!, nuni. XXXIII.


chaque caste agricole; celui des hommes libres? L'encluéte s'étendait :t d'autres ùétail" encore elle recherchait lu quantité des tètes de bétail de toute espèce l'étendue des bois, des pittures le nombre des moulins, des pècheries, des salines le revenu que pouvaient rapporter ces diverses exploitations. Il n'est pa; juailu'aw ruches d'abeilles qui n'aient été elles-mêmes énumérées. Enfin dernier trait caractéristique ks agents notaient ,soigneusement la valeur du dotnaine la conquête, sou rendetnent en impôts; si le chiffre de rapport était monté depuis lors, im bien s'il y avait prohabilité de l'augmenter ( 1).

Recueillies séance tenante par des ('2), soit Sur des rouleaux de parchemin, soit sur des tablettes enduites de cire, les réponses obtenues étaient ensuite transmises ct une équipe de scribes, clercs ou moines normands, in~tallés Ü Wiiieliester. Leur hesogne Ü eux consistait à trait.crire sur des cahier; de. vélin les renseignements relatifs Ü chaque comté (131). On avait dit leur remettre un llan de tlp Cc ouriew questionnaire est transcrit tout au long- en tète de 11n'IHi.silio Elieusi.s, dans Ilonre.,duy Book, col. 1\ p. 4\J7, Henri de llunting-don. puis les .-lanares rre TS-auerley n:'sument aillsi les opérations des commissaires royaux: 5li:it rec \illclmus justiciario~ suo, pcr ullamquamque scyram, id est l'rOI il:cialll Annliae, et inquirere fecit per jusjurandum, quot hidae. id e~t jugera uni suflitlleiiiia t~ar )) annum, essent in unaquaclue villa, et quot aniriialia. Fecit etiatu inquii-i quid unaduaeclue urbs, castellum, cicus, villa, llumeu, partis, ~il\-a n redderet pet, annum liaec autem omnia in ehartis scripta delata suit[ ad i,e.-ein, et intcr thesauros reposita, usque liodie sen'anlur » ~lruanlos cle ap. l.uart, :lnnnLes mona.çtici, t. II, p. t~)1, I~) Un frabment de compte inséré dans l'l:relt'¡. 1Jo»~esclay me parait allusion à ces gl,efliet's ,e Et iuter coiidticeiidos et ~CI iptorem, et forellos emendos et ceram dederunt IX sol. et \'ln deit. lJom~scitt~ Qoolr, t. IV, p. !>I,m,

(:31 Les quatre vastes comtés du nord Nortlmmberland, Clllnbedand, \Vestmnreland et Durham sont omis dans cette description. JI est possible que la situation matérielle de ces qnartiers ne fut pas de nature ~'t permettre aux commissaires royaux d'y l'emplir leur mission, Le Laucasfiire n'est pas meutionné non plus. Ce n'est en effet que sous les cltie trois tl'On\'Ons de ce comté coips pour former l'apanage d'un rejetou de la famille royale,


rédaction arrèt¿ à l'avance, car toujours ils établissent leurs listes doutanictles en comrnenc;ant d'abord par les terres du roi, puis en poursuivant par celles des autres propriétaires, ecclésiastiques et laïcs, par rana d'importance ou de dignité (1). Quand cette longue trans criptioll fut achevée, on la déposa les archives du tré~or avec quelques-unes des minutes originales qui, grÙC8 Li cette précaution, sont parvenues JuSqU'l nous. Ce n'est que plus tard que l'ou aonoea il réunir en volume les uombreur cahiers, dont les feuillets de quelques-uns usés et fatigués ;'[ force d'avoir été maniés, attestent le fréquent usage ('2), Avant ce temps fruillaume ( On a l'uurlaul fait 11011 .,ans raison, 'lue cerlaines portions de la soiit moins complètes que d'autres, ce qui a pu procenir, ou bien dit lacunisme des notes transmises, ou hien du souci qu'al'aient certains copistes de viser la brièvett', G. de Birctt, 3laterinl.s /'m~ lJte cr.lilirtr~ Llrmuesclm/ Dook, dan., Dcutasrlct~ 5toclire.>, t. IL p. +9'?. i`1~ Le Domu.sclny IlucrA, après titi long' ~éjour ci Chapter House, est ~njnurd'lmi uoasercé au Public Record Office de Londres. Il se compose de deux tmites da lbrmat l't. de grosseut ilillérents. Le premier est un in-tolio de :¡H2 léuilleh écrit~ sur deux coluunt~s. Il renferme le recensement Lies comtés suivants Bedford, Berks, Buks, Cliestei et L:uu:aster, Cornwall. Derby, Devon, Dorsct, Gloucester, Haut~, Iferefurd, Ilerts, Huntingdon, lient, Leiceste l' L'I Hutland, Liucoln, ~1iddlesex, ."Im'lliamptou, Nothinglwm, Salo[~, Somer,et, Stafford, Surrey, 5nssex, \anl'irk, 1\'ilt., lVorcester nt Yorck. Le second tome est un in-i LIE" 150 feuillets illoilis soigné que le pl'éer">denL lie contieut 'lue la ie.~C.1-ipLioli des ti-oi.~ coiiités d'Essex, de Norfolk et de Suftolk. Le texte dll Dorirr:.scln~ liook fut édité ponr la première fois (1 l'el'balil1l et litlt'ratim en 1 par les soin, de ~lr. A. Farley sous ce titre: Ilnnresclny liool; sco l,ibur I;cnsttali., fl-illr;lmi Pr~imè fic~is _lu~linc. intcn..lnchinosrerlr>,iire nortao Capilulro'i ll'estritortnslenii as.surcatn.s; lttlmtl~~ licya. Guoryio Ten(u~ lrrituGr rnnudnttts l~pi.s. [Londre~j, 3 vol. iu-l' L'iutroductinn ;;énérale pan .sir Henry Ellis, foruïe avec les tables le voL llle(1816i. Enfin un ~Iuatrièute volume a été formé il raide, de te~tes apparentt's celui (fil llor~mstia~ Bur~lr sous le titre de: =leltlilautertta c~.r I:nclic. ,lntirytiss. F,cou. Dmnc.s~lny. Im/ui.sitiu Eliensi. Giber~ TT-iutmt Ifolcl~rt~ liool:. Plus 1 écemmellt une reproduclion des deuc manuscrits a été entreprise a l'Ordnance Surcep Ortiel', southamptou, sou, la ,lirertioll du Colonel Sir Henry .Tame.s. On Iiii a donné ce titrc Ilonacstla y llor~l:, or~ t/t~ (:rr~at .v,true~/ of F.u~lnnrl of f Il-illiunr tlte I:ourlm·r~or. 1(IHfi; fct~ siruile of lhe l'ünt relntiuy la anclt rtiuul~ separalel y. M. Llenry il, V'Itcatlcy a donné une a Domesday Biblioôraplty u dans les TJontescla~ .stttdi~s, 1. II, 1)~ GG3-Ij9~),


le Conquérant avait, lui, couronné son œuvre. Àu mois d'aoÙt -1086, il convoqua il Salisbury tous les grands du royaume et les autres tenanciers. Il les requit de lui faire hommagè et de lui prêter le serment de fidélité et tous s'éxécutèrent (1).

Ce n'est pas il dire pourtant qu'une mesure du caractère de celle du Great Sttf~uey ait pu s'accomplir sans provoquer de mécontentements. Bien au contraire. Les enquêtes, en effet, révèlent qu'en nombre d'endroits il fallut réprimer des empiètements injustifiés, faire ùéguerpir même certains occupants indélicats. Il s'agissait là des Normands et les paysans anolo-saaoua appelés à déposer durent éprouver un malin plaisir à rétablir les faits. Leurs réponses sont autant de réquisitoires contre les intrus. Pour les vaincus ce fut pire, Beaucoup, jadis riche, et indépendants se virent disputer leur dernier lambeau de terre sans autre alternative que l'éviction ou la perte de la liberté. Il y eut plua d'une scène de désespoir et de larmes. I'urfois même l'ou put craindre des soulèvements.

Le chroniqueur anolo-saxou a résumé fidèlement les impressions Ùè ceux cIe sa race dans cette boutade où perce l'amertume. « Le roi, dit-il, prit un tel soin de faire cousi» gner toutes choses qu'il n'y eut pas une hide, pas un yanl 1) de terre j'ai honte de l'exprimer et lui pourtant n'a pas » rougi d'en venir la pas un bœuf, pas une vache, pas » un porc qui fussent omis sur ses rôles » (2). Le populaire, qui lui aussi a parfois ses façons de se venger, y mit non moins d'ironie. Les massifs registres du trésor de Winches(li Anno l'egis 1~'illelmi xx, res tenuit curiani suam apud Wiiitoiiialli, poste a ad kaleudas Augusti fuit apud Salisbiri, ibique venerunt contra n eum harones sui, et ointies terrarü lmjus re~ui qui alicujus liretii )1 eriaiit, cujusl'umque reodi fuissent, et ornnes homines regis efi"ecti sutit, i, ct jmaccrunt illi fi,lelitatem contra ointies homines. n -:ln~to-Sn.~oie l'kroreiclt. p. l8li .lmaalds clc jl'auerte~, ap. LlIart..4nl1. rrzoitasticr, t. Il, p. t9:

(`?) Anglo-Saxou Clirouicle, loc. cit.


ter si méticuleusement précis, devinrent pour lui comme la l'L'alité anticipée de cet autre livre inexorable dans lequel au Jugement dernier seront lus sans réplique possible les fait, et gestes de chacun. Il les appela le Dorrze.s Doe~ et ce surnom leur est demeuré (1).

Le Dornestta~ Book cite deux abbayes mancelles, SaintPierre de la Couture et Saint-Calais, et trois abbayes angevines: Saint-Nicolas et Saint-Serge ù'Angers, puis saintFlorent de Saumur au nombre des établissements religieux propriétaires de biens eu ~lnâle.terre. leur brièveté ces cinq mentions, 011 va le voir, ne sont pas dénuées d'intérêt.

Les moines de la Couture possédaient Ü \Voolstone, dans le comté de I3uckiu~;h;un, un manoir de médiocre importance. L'ensemble, d'une. contenance de cinq hides, pouvait occuper cinq charmes. La terre ;eigneuriale en retetiail deux il son service' les trois autres demeuraient aux mains tle huit Ut d'un bordier. Le domaine retiferniait en outre quatre Uommt~e5 de pré, iiii 1-)oi.~ capable de nourrir une centaine de porcs il l'automne, puis un moulin, dont le rendement ntuit e,titlll' il six :'job, ~luatre denieu:lvant lit conduète, cette terre appartenait il un nommé Aldric filz Irotling, qui eu tirait tluatre de revenu. Ce fut Gautier Gifiartl, ce pretuier comte de Buckingham don j'ai duj;t 1) « Hic liber ah iurligeuis Dorrtcsr(ai uuucul~atur, ici est, dies judicii per taetatiltoraut ,icut etiitri districti et terribilis ecaminis illius uocissitui :eutèutia nulla tergicer·ttioui: atte \dèl eludi sic r:llm urta 1'uet-it ¡Il neguo uontcutio tic I~is telms f[UaC illuc auuotantut, cutn ventum fuerit ad libliiiii, ,entetttiu ejits iiirlttijai-i non potest vr-\ itnpuitn declin~ri. 1) I)ialor~tts rie ,s'uawnoio, c..rti. Le DOIIJcstlau l3ooF, t'lait encore connu ait moycn à~e sous les noum de LiGt:n 1 S'itt(oninr;, RoW (tt.s ft-~n(urtirtu, l.ilmi~ lir~r(i.s, .1'rwitr(orct (hestt~tt i Re~(is, Gilrer (:crtsttali~ .-l,trlline. l.ilm~ Jurficiuaitr.


parlé (~1), qui en fit don à nos compatriotes mais on ne sait ni quand, ni Ü quel propos. Woolstone d'ailleurs ne fut jamais un prieuré proprement dit. Les abbés de la Couture y maintenaient simplement en obédience deux moilles chargés de surveiller l'exploitation, et c'est Ü peine si ce coin de terre a conservé quelques lambeaux d'histoire. On est mieux fixé sur l'origine des relations entre Guillaume, évêque de Durham, et l'abbaye de Saint-Calais. Ce prélat, originaire du pays de Bayeux, était venu là jadis endosser le froc puis, son mérite aidant, il y avait rempli la charge de prieur claustral et ensuite celle de prieur majeur. Appelé après cela il gouveruer les moines de Saintfinceut du Man', qui traversaient une série de passes pénibles, il n'avait fait qu'un court séjour parmi eux. Sur la fin de l'année d080, l'amitié et la confiance de Guillaume l<=" Conquérant, l'étaient venus tirer de ce poste pour l'élcver sur le siège de Durham, aux conlins de la puissance normande, tout en haut vers les frontières d'l;cosse. Cette seconde phase de l'existence de l'ex-abbé, plus intéressante et plus féconde que la première mieux connue aussi n'est pas de mon sujet j'omettrai donc d'en parler, me bomant à remarquer que ni les honneurs, ni l'éloignement n'affaiblirent chez l'évêque l'affection qu'il avait vouée au eloitre, témoill et abri de ses débuts dans la vie monasticlue. Il le prouva dès l'année qui suivit celle de son passage en Angleterre. Le Conquérant lui avait fait présent à Coveuham (2), dans l'humide et fertile Lincolnshire, d'un domaine assez considérable. Il en détacha l'église, des terres arables, dcux pàtures, deux salines et offrit le tout u l'abbaye de saint-Calais. L'exploitation occupait une vingtaine de faIl, Gauthier Giffai-d a%-ait des biens dans le Berkshire, le 1~'iltshire, le Somerset. le Bedfordshire et dalls les comtés d'Oxford, de Cambridge et d1Inntingdon. Sa l'ille Iloltais, qui épousa Hichard, comte de Clare, fut une grande bicnfaitrice de l'abbaye du Bec.

('2) Dans le Lindsey, au nord de Loutlt.


milles envirou et était é\'aluée il quatre iicre.s de rapport. Cette donation, u laquelle parait avoir contribué Samson, trésorier de cle Bayeux, un compatriote de l'évêque de Durham, fut autorisée pal' le souverain et ratifiée par lui il Dunton ~Il)8`!). Parmi les témoins figuraient deux ecclésiastiques Manceaux: le doyen Hugues et l'archidiacre Maurice qui prend aussi le titre de chancelier du roi leur signature n tous deux se lit au bas de l'acte (1). A Shidurool" dans le south Iliùing, et il Çtrirnsby (2), vers l'entrée de l'estuaire cle l'Humber, l'abbaye de Saint-Calais rel,ut encore d'autrea doua territoriaux. Aussi le i-evuiili de ces divers l~ien~ parut-il sut'tisant pour autoriser l'installation d'un hrieurz près lié l'église ùe Covenham, établi~sement qui demeura sous la juridiction de fondateur jusqu'en l.111:3..1 cette date, 1·:douurif Icr prenant prétexte de ses récents démêlés avec la France, cette maison notunte succursale d'un monastère étraurier et l'unit il l'ulhrtye de. hirkstede dau5 le Linùsey,

Puasons aux dépendaures (les moùtiers angevins. A l'époque du Gneat Surt~ey, c'étaient incontestablement les moines de Saint-Nicolas, qui, entre tous, se trom'aient 1\ la tête cles plus importante; et touchaient les plus grosses (limes, A Crowston, dans le comté- de Buckingham, Hobert de jlortain kur avait cédé une partie de son manoir soit l'équivalence de ce qu'en ulle journée pouvaient labourer cill'l et en l~lus cinq hommées de pré, li2 comté de Bedford, ~t Gliftou, ils faisaient valoir trois (le terre données en aumOnc pal' uni autre seigneur lIorrnalld, Néel Ll'ubigny duquel ils tinrent uussi Il, LJugdale, JIVlla8ti"o¡¡ '21 édit. t. VI, y. ~19:J. I;a,~lae pa~nlimet(ex ad G'o~tucnl~nrm:ns~ cu aoG~u~n, nnm. I.

I: kil. S, E. de Hull.

,:3) l'l'ère des uomte.. de Clare et Ses possessions d'aprcs le Dom~·sdn~ Lfo~il:, sc tuouvaient dans les comtés de Buckingham, de Dedford, de Leicester et de Warwick.


l'église de Newbold (1). Kirby d~iiis le Warwickshire, c'était mieux encore. 1,,t, dès -1077, un df~ leurs compatriotes, Geoffroy de la Guerche (2), les avait installés avec de bonnes l'ente'; au milieu d'une belle exploitation sur larruelle vivaient une trentaine de familles indigènes. L'abbé Hamon, qui ôouvernait alors l'abbaye de Saint-Nicolas, prit occasion de tous ces dons pour tenter, lui aussi, une fondation outre Manche et, cette année mème, il vint en personne ériger le prieuré de Kirby, depuis lors llonla Kirby, amenant avec lui les six 1)reiniers moines qui devaient l'habiter (3). L'avenir justifia toutes ces espérances et le nouvel établissement acquit rapidement un opulent temporel. A Swavesey (4), dans le Cambridgesliire, l'abbaye de Saint-Serge d'Angers entretenait trois religieux chargés de dessei-vir l'église. Ils avaient été appelés en cet endroit par Alain le Roux, comte de liictiemoud (5). Le Do)rlesctcr~~ Bou>v mentionne simplement les terres que les moines tenaient de ce personnage il a Fen Druyton, ;1 savoir une tenure de trois hides cultivée par sept paysans, plus une hotntnêe de pré, le tout d'une valeur de quarante sols. Mais par un autre document, nous savous du'lain ne borua pas 1;1 ses largesse.s et, qu'en particulier, le prieuré de Swavesey lui clut de nombreuses dimes il lever sur les liiiies, pêcheries et bétail de cinq ou six localités du voisinage (6). i Dugdale, Jforeaslicore nuglic., t. vr, p. ~Ili. L'antae nd Ivi~~lrberia»sa perli>i.cutes, num. III.

i'?) GeolTroy de la Guerche était pl'opriét3il'e d'immeubles dans les villes de Norttampton, de Leicester et de \Vanvick. Dans ce dernier comté il Il':l\'ait pas moins de ~iouze manoirs disséminés sur plus de neuf mille acres de terre,

CI) Ibid., CnWae. num I.

(4i Village ù II, kilomètrc: N.-O. de Cambridge.

15) Fils d'Endou, comte de Penthièvre, frére de Brient et ù'Al:1in le Noir_ Il fut créé, comte de Rieliemoiid après le siège d'York en lom. C"èIait l'un des plus riches propriétaires d'Angleterre. ou il ne possédait pas moins de quatre cent nimluante manoirs.

il;i Dugdale, Dlo~tnstico~a aurdlic., t. Y[/2, p. dhll. Cantae. num.


Le Monmouthshire, pénétrant comme un coin dans le pays de Galles, n'était pas, il s'en faut de beaucoup, un cantott paisible au temps du COIFluérant, ni même plus tard sous ses successeurs. On ne peut mieux comparer alors ce pays qu'à une sorte de zî~ne neutre, véritable champ clos pilrserné lle forteresses oit les Gallois detneuraient sans cesse aux prises avec les a comte.> des Marches » ('1). Les moines de Saint-Florent ne paraissent pas néanmoins s'ètre préoccupés outre mesure de ces conditions quelque peu instables, tluatid ils acceptèrent l'église du chitteau de Monmouth, Il est vrai qu'en cherchant bien dans leur histoire, ils n'eussent pas eu Ü l't'monter très haut pour rencontrer un précédent. :lvaut de se fixer sur les pentes dit « Champ épineux » leurs devanciers avaient en l'flet séjourné pendant plus de trois r{uarts de siècle daus l'enceinte du chilteau de Saumur.

Lu nouvelle fondation eut pour auteur le chutelain de Monmouth lui-même, un certain Guienoc., auquel on ne saurait reprocher d'avoir fuit les choses u demi. Il ne donna pas, il est vrai, beaucoup de terres ;tlix trois moines arri\'és d'Anjou qui, en attendant l'aclte~~ement de leur installatiun dans la forteresse, deaservirent l'oratoire voisin de SaintCadoc mais il leur assura les l'L'venus de neuf églises et trois chapelles, avec les deux tiers des dimes qu'il tirait de ses manoirs et de ceux de ses hommes (2). Pal' le fait c'était, si l'on veut bien y réfléchir, le plus sùr moyen d'assurer eu ces quartiers la subsistance d'une communauté. Dans la auite Guienoc, ayant échangé la milice du siècle pour celle du cloitre, ajouta, de concert avec son ne\'eu Guillaume Il) Ou alipelait ainsi les corutc de «'orccster, de Hereford et dc Gloucester.

i?1 Les commissaires dll Grent Soruei~ enquétant sur plaec, n'out rnentiotiiié il l'avoit- des u~oines que les dimes et seulement deux char ruées de terre. Dugdalc, 3/uun.slicar2 a.i~lic., t. IY, p. 5\Jij, C.'mUa~~ nci 3loue~i~t~pej'liiit,iite.4, num. 1.


lilz I3aderon il ses précétleotes utl'raude; plusieurs lumbeaux de territoire, des prairies, un moulin et divers droits ù'us;1ge (1). Les moines de leur côté semblent s'être inaénü" u multiplier leurs ressources. Ils se firent même industriels et prirent -t leur compte l'exploitation de trois forges installées sur le W'ye et dont la propriété leur avait été cédée par Baderon de Monmouth, fri?re tle Guienoc (2).

l'~tôe suivant, ou Yit les abbayes angevines multiplier encore leurs établissements sur le sol anglais. lloins favoou peut-être moins entreprenants, les moines manceaw n'essaimèrent plus ou presque plus outre ~latielie. A part la fuutlation d'Abergavenny (3) en fLlYeUt' de SaintVincent par W'inebautl de Ballon, et la donation ¡lIa Couture par Patrice de Cllaourse, et i\lathilùe sa femme, de l'éâlise de Toddington ( 1.), le comté de Bedforù, il serait difficik, je de mentionner un bien monastique quelconque ;e rattachant par quelque lieu â l'histoire tle nutrc 11L'0\"I nce.

Dom LÉU1\' GUILLOREAU.

i I i \larchc~;ty, l,u., P"Ú-'Uf,;S anylais de fni~tt-Fforctat, la'i'.s Snmrmi~, BiLlinth. dc l'École des Chartes, 1. XI, 187~1, l'. Lî3 et suicantes. i~2) Duylulc, .lfocansticon alzrtlic., t. IV, p. 596. Cat~tct, iluin. [1. fJ'aprcs sa lléclaralion insér~e au Litv~~ :uir de l'Echirloiur, Brtderon ,le \lonmuutlt tenait directement du roi dix lieÎS ~c chevalier. iLiber \-ipcr édit. Llearne, t. f, 1). l52-l:d.) D'autre part, un titre de l'alhtye cistercienne de la \]c\ll"ille, publié par D. \Iarice Puetttn~.y ri l'ltisloim cl~~ 13r~~tnya~, t. 1, col 6il) nou~ fournit quelques indines snr les attaches de I3aderou arec la Bretagne,

CI, Commune dia comté de \Iollmouth, sttr la l'i\'e gauche de L Llsk, au conllueut de la Uweuuy et dit ruisseau de Herefol'd, i 1-1- milles de ~[ollmouth, B. et S, \[eLlj'Jt d'EibeLlne, de l'aGG~y/~t ~lc faitrt-TW mctat clo llmts, n~~ 8:!cl, 8:.10, 8;it, `~i3.

(Í,) I.ocali"; -29 kilotnrtres still de lledfol'L (:nntttlnit~e cle ln (:otrlt<i't', p. -i1-k~-t, 11"' 7iL1-XLI~


APPENDICE

r. SAI1\T-PIEnnE DE LA COUTUlŒ

BOCfIlNGSCIIŒ

Iu Itiiw;m tiu. Iu Ll~srcsrow tenent tnonaclii S. Petri L:ulturae LIe V'ulteuio LGilTarùj. v hiùas pro uno 111;merio. Terra e,-3t Iii dominio suut Et \"III cuitil uui~ IJorù. habent lit car. Ilii unus utulinus de YI et mn Ven. Prutuut on car. silvu yom. Yald. d yaillit ut liL. 'l\:llIpon' Ht'gis Eùwardi 1111 IiI). Iloc ~lallèl'illtlJ tenuit rllriou;, tilius Goding, et vendere hotuit.

Domesdcy Book, t. 1, p. l~î

II. S.~INT-G:lI,tlls Ll:COLESCIlŒ

Io CO\"E:ILDI liahebut Eshel'll Il car. terrue et diru. ad geld. 'I'urr~r aa nr et YI ho. Nuuc; de L'piscupo [lJuneJItlI'II'¡ IILlbct S. Iiarilefus. Ibi n et dim. et wr villan! et w sud!. cum car. et dinr. Ibi et LX acrae pruti. et Il s,iliii(,. III sol. Tempore Regi" Edwardi valebat LX sol. 1-nodo IItr lih. Tailla xx sol.

Iu CTrimeal~i est socn hujus i\fanerii. Il ho. terrae ad. âeld. Terrne est ad nr hO\ 1'uit, modo colitur.


In ~citebroc est iuland de Covenham. \,fi DO\ 'terre ad güld. Terra ad m lloves. Ihi S. Karilefus habet \u llmnines cum Il caruci~ et m acras Iu~ati.

Ibid., t. 1, p. 340 v~.

III. SAINT-NICOLAS D'ANGERS

130CHINGSCIHE

ln cOTESLAI 1ÎL). ln Cn0\'STO:vE tenent monachi de S. Nicolao Il hid. et dimid. de comite [~Loritonü]. Terra est v cal'. Iu ùominio suut rn, fa VIII villani llallent fi car. Pratum v car. Valet et valuit iiii lih. Tempore Hegis £ùwarùi w lib. Hoc ïllanerium teuuit Edward cilt. et yendere pôtuit.

I(~icl., t. I, [l. 14li r~

BEDI.roH~i:II31=:

Iu CLtSTON HG'. In Haneslau tenet Erfas tus de Nigello [de .\Iuingi] hid. et dimid.

De his Iiidis et ditnill. tenent monachi S, Nicolai rlndegavensis tif vir~. de Nigello in elernosina.

Ibicl., t. I, p. 214 Y'.

"'ARWICSCIR.E

In IiuaII.L.w uu. Goisfridus de ~Virce tenet de reôe Cft men ~~nEH m.


In bac blanerio hahent monachi S. 1\icolai ii car. axu villanos et vi bord. cum v car. Tatum valuit c sol. post XL sol. 111udo X lib. Leuuinus tenuit.

S~IN1'CRGE D'ANGEHS

In N(-)I%E'1'0\- HO. In DIUITUi'Πtenent monuchi de suuumy sub comite Alano ur IiiLlas. Terra est m cur. Iu domiuio est i car. et y- villani cum II cot. hubent car. l'ratum i cur. ValL'l et valuit xi, sol. Tempore Flegis Edwardi LX sul. llunc terram habuit Eddeua,

V. S.1INT-l~'LOI~E1~T DE :ÀUl\lur~

In castello i\lUNEM\"DE habet l'ex ¡Il domiuio mu citr. \Villdmlls F. Liaderou custodit eas. Quoli l'ex habet in lOc ca,tellu valet i: solid. lUi \Villelmlls habet \'Ill car. in dominio et hlures possuut esse.. lbi sliiit \Valenae, habente, Xè\IlI! car. Iteddunt XXè\ItI sextar. mellis et Il solid. Ile w- iiitel- servos et aucill. et III moliui de xx solid. Milite, liuji.is \Villelmi habent nI raI'. Qtio(l \ilelmtls telle! valet xxx lib. Hujus castl'lli aecclesiam et omnem clecimam cuiii n carucatis terrae tel1et S. Florentills de ~almuu.

Ibi~i., t. l, p. ~43 ru.

talENTEIIH.ESCI HE

Ibir(., t. 1, p. l!J5 ru.

HELlEFORSCIIlE

Ibia., t. I, IJ. 180 vu.


CULTE PUBLIC A ARNAGE

AYANT

178 ~)

Si l'on veut voir un hel exemple de pt'rs0véranC8 finulc~ment récompensé t~ar le succès, il faut rC'chercher les origines de la paroisse ù'Arnage ('l). Elle est de création récente et n'a été constituée que \'ers la moitié ùu ZI\~ siècle. Jusque-lu, les habitants dont la réunion t formé ce nOLl\.t'au groupe paroissial étaient, religieusement parlant, les sujel; ou les administrés du curé de Saint-~Jartill de Pontlieue. C'était de sa main qu'il,; devaient les sncrement~, par lui ~Iu'il~ devaient étre instruits, ù son égli!'e qu'ils avaient :l remplir leur devoir pascal. Mais pour s'y rendrt', il· a\'aient une roule si longue il parcourir, l't, d'un autre coté, le chef de la paroisse, appelé par eux pour assister leurs malades, se voyait contraint de franchir de telles distances que, de bonne heure, paroissiens et pasteur dureut chercher quelque combinaison qui leur exemplÙt, et -Il celui-ci et -'IL cew-la, lies ù0placements ouerew à tous et difficiles, pour ne pas dire impossibles, aux enfants, aux vieillards et aux malades.

I i .lrnaôe, comrnuue Ju a~a canton du \laus, tiai ois~e dit doyemn de N.-D. dl' la ~outure. Les titres dont uous nous Sel'uUS, sauf indication coutrane, sont couservés aux de la l',iliriyue de Saint-Morlin de Pontlieue.

LE E


tout, il fallait disposer d'un édifice décent et cOll\'enable pour y uélébrer les ârémonie.s du culte. Une clwpelle fut donc constmite, nou~ lie saurions indiquer ~t quelle date, œais qui existait dès 1398 (1) et ilai, dédiée u sainl Gilles, fut hourvu~` de tous les objets que requiert la célébration de.. offices paroissiaux. Les tldèles qui :'y rassemblaient, tout en restant théoriquèment rattachés u l'L'gli,e 1>aroiasinle de Pontlieue, avaient réussi ù former un ?groupe compacte, ~yant des (lui, sous le nom de fabriciens, géraient les iiiatériels de la succursale religieuse où eux et leurs commettants se réunissaient. Mais dans quelle mesure (2t pour quelles causes en avaientils le droit, cela devint, ell 1-160, un sttjet de litige etttre eux et leur pasteur, tnaltre Jean Lig'T (21, d'olt contestation et compamtion devant l'autorité ecclésiastique comluteute. (_était en l'occasion l'officialité dioW ~aine. (:elle-ci nomma quatre ,~rlitres, mailre J(20ii dit Breil, chantre et clauoine de l'insiglle L'glise cathédrale du Mans, maître Guillaumc' de cliaiioille de la même église et enfin deux licencit; ett (!t'net, maitres Jetm Uosselin et simon Thevenieu, devant lescluels les ltartie~ adverses eurent :1 evhoscr leurs grief" et ~t faire valoir leurs 1~ I:lle était, à cette époque dotée du receuu d'une terre dont ou parle dans un il-iéiiioii-e présenté. en '16ÍG, par les habitants coiiti-e Guy-Ho1I3nd Charlcs. Cew-l;i font état d'une piècc ainsi dési~;uée: l.a 2m'. dn li juillet 1:19'1, Perrine de Busec veud tti pracureur d'Amagé la mélaiuie de Bourdigale

Dans un mérnoirè pl'l'sentu ,:1 ['é\'êque du llaus, en 1691i, par René de la Cour, curé dc Pantlietle, cc dernier dit (lite Pour les honorai l'CS du nuré ou (lui cicilu:«re l'on employe partic du receuu d'une mettainic nomnée Doul'digalle 'lui a été, lésuée par dello darluine de Basse et dont ou uc rapporte point Lie fondation ). Cahiet' papier.

i31 avait proLal~lemeut succédé u cet autre curu de Potitlietie, ~Iichl'l ;\Iarleu, '1IIi, le .'mocernbre l'j'1, passa liait de deux jardins et de 1"- dnatriéme pantie d'une pière de terne, le tout situé u et qu'illou" pour une i-eiite annuelle de cinrl sols n Jean Aquinernonl. 'l'iUe papier. copie du XYIl' siècle.


raisons. Cela nous vaut de savoir que, vous entendez en ce moment les fabricieus, le curé de Pontlieue devait administrer dans leur chapelle tous les sacremliits, sauf l~ baptême, aux habitants du bourg et il ceux des métairies environnantes: qu'il était en outre tenu de célébrer ou de faire célébrer dans cette méme chapelle, le jour de Noè' la messe de l'aurore, le jour de Pàques, une première messe, le jour t)it l'Église honore saint Gillt,.q, patromle ce lieu, une messe. solennelle, précédée, la veille, du chant des vêpres et des inatiiie~ et enfin une messe basse le troisième dimanche de chaque moi; plus, d'y aller présider u l'inhumation des mè-mes ceux-ci ay,mt, du consentement de l'autoritL' religieuse, établi un cimetière près de leur chapelle, et enfin d'y procéder au rite des relevaillès de celles des paroissiennes rlui le demandaient. il aurait dû encore laisser le Très-Saint Sacrement renfermé daus le tabernacle pour que, en cas d'un besoin urgent, le curé d'une paroisse voisine, celle de ~Ioncé, pùt venir y prendre le Saint-Viatique afiti de le porter aux malades. Les fabricieua réclamaient en outre que, les jours oit le saint sacrifice était offert daiis la chapelle, on y fit, comme dans toutes les églises paroissiales, l'aspersion et la bénédiction du paiu n que l'uu distribue ensuite aux: tldèles.

Sans repousser directement aucune de ces demande~, le curé de Pontlieue répondait que les habitants étaiit, de droit, ses paroissiens, devaient se rendre il son église- Les arbitres, a.prèa avoir écouté les dires de l'une et l'autre partie, chargèrent un autre chanoine du Mans, le scolastique .J t'an Quetin, de formuler les termes d'un compromis que fidèles et pasteur s'engagèrent a respecter- Ce COlllpromis, non seulement tenait pour valables toutes les réclamations formulées au nom de leurs commettants par les fabriciens, mais obligeait le curé de Pontlieue à célébrer ou il faire célébrer, tuus les dimanches de l'année, une messe basse dans la chapelle (I'ArnLige. Les paroissiens acceptaient


en retour de verser, chaque ;1I1Il,;e, leur pasteur, une somme ùe cent dix sous tournois, payable ces deux termes, le jour où l'on fête saint .Jean-napti,~te, soit le 21 juin, et le jour de la Nativité de Notre-Seignl'ur, soit le 25 décembre. Ceux d'entre eux qui, ne mettant pas ù profit la présence de leur curé dans leur chapelle aux dates fixes oit il y devait aller, tenaient néanmoins u se confesser et u communier, devaient alors le faire dans l'église paroissiale de Pontlieue. C'est 1-li aussi IIU'ils avaient à se rendre pour s'acquitter de leurs obligations religieuses il toutes les fêtes lie l'année, celles de PÙ'IUe,'i et de Nod exceptées. Lir encore du'ils se réunis,aient pour prendre part aux processions.

Ces dispo,~itions, tilix clusir; ~les fidèles donnaient satic,faction à leur Iiiél~ _lvec le temps, ils souItaitèrent davantage encore. Eli 1512, ils députèrent l'uIl d'entre eux, Pierre Nlesiia-et~, yers maitre Jacques Martin, curé de Pontlieue. Ils sollicitaient ce dernier de vouloir bien laisser l'un de ses se rendre, chaque mercredi de l'anné8, dans la chapelle d'Anwge, pour y offrir le SaintSacrifice de lu messe à l'intention de leurs défunt;, et pom y réciter, ce mème jour, heuaant le carême, les prières de l'absolution. Ils le priaient en outre de permettre que l'ou imposut ceiidreq il ceux des habitants qui se présenteraient pour cette cérl'mollie le mercredi qui suit le aimanche de la Quinquagésime, et que, aux bonnes fête., de l'année, fluel que fùt le jour oit elles tomberaient, ila pussent « faire dire. yespres à haute, ou basse yoix et la messe et faire procession autour (-le la dite chapelle )), Ils s'offraient d'aillem, cle rétribuer le prctre qui serait chargé de ces Lii\,ers ,serviCE's religieux. Lem requête fut admise, mais leur pasteur, n\ervant l'avenir, eut de bien tl1:1rquer ~_lue. lui et ses successeurs auraient le droit de retirer l'autorisatiou qUII venait de couct"der, -t titre temporaire.

De fait, saua que llOllS saehions à quelle époque, ks eut'és de Puutlieue, estimant trop lourde la charge clue l'un ¡J'eux


a~~ait assumée, ,~e bot'l1L'rent. h en\'oyer, le dimanche seulement, uti prêtre céléhrer lu ,ainte nlL'Sse il ;n Ils cessèrent même, eu lS'i7! de <acquitter de cette dernit'rL' obligation, sous prétexte que les honoraires qui lenr a\'ail'l1t été uii 1 WU, daiellt, avec It' temps, de\'enL1s insuftlsanb. Les habitants rl'Arna~;e n'entL'IlLlaicnt pas se contenter tle cette Ils citèrent le curé' de Pontlieue, maitre Pierre LN. l;oy, de\'ant le lieu tel] ou sénéchal du ~raiL1e, maitrè .Jclcques Taron. Celni-ci, après avoir ententlu les Lieux porliès, enjoigllit ù Pierre Lu Ituv, sous peine devoir le temporel (le sa cure et les tle continuel' 71 agir comme l'avaient fait ;èS prédécesseurs. Cette sentence fut frapp",t' et Itt flit portée l'ofuicitlité dio":l'sainc. (:;elle-ci, lt` 2 septembre 1~)Í8, mit tiu au dil1r'-rend. L'official, sans les droits dt~S fidèles, leur fit sentir que, s'ils tenaient ~t vuir les 1~0ré,tnonies du culte ac,:omplies réguli0rpment et frétluemment dans leur chapelle, ils eussent 71 la munir de tous les ot~netnent5 liturgi,¡ut's illlli,spensables, ;1 y ¡'-lablir un SI(2 qui fÙt tuujuurs ~t la disposition du prétre cliary: rle desservir cette sLiceui's~ite, et enfin a assurer ce prétre, avec une rdribution proliortionnée aux charges qu'il c'imposait, uue chambre garnie Ù'UIl mulilir'r décent, dans laquelle il lot se retirer.

Ces du juge d'église se ïtiséitielit, IJlais elle: itilpo.-4~iielit. aux Ilabitauts Lles uIJlig:J.tion,'j quu ceux-ci estimaient trop aUSSi essayèrent-ils Lie s'y sOL1.~tl'aire. Eu ils ü/l'rirent au curt" Me. POlltliene, (5'était alors niaitre Etienne Gras,:in (1) qui s'y [Jrdcl, de lui (1) En conséquence de de l~usnllwit qni lui avait éL'~ concétlC~, maill'e Estienne Gnassin, le janvier (levant \IicViel Lemée, notaire, conclul avec Nicola. Dèfol'ges, prctre, un tl',lile' am termes duquel le liaillcur L'étla au pncneur le dnoit de licrcecoit, durant quatre e ans, I~·s .limes dans les f"I'nlt'" ~lont Il', hal.,itanls fl'équèulail'nt I~ c.hal'clle se toutefois la sonunc dc 110 1 prl'lcl"cl' sur les


culer la jouissance et l'usufruit de toutes 1-eiites ou redevances eu nature dont leur chapelle avait été dotée, l'usufruitier s'engageant dL' son coté il entretenir L'Il 1)()il état et cet ulitice et tou·~ ceux 'lui eu funnaientla dotation, plu: d'y célébrer les ct;rémonie,~ du culle comme le conlpromis de l'au 'l4GO l'a~-ait r~~lti.

Ces arrnn~elttents nt~ liaient que ceLix-1li qui y avaient ;ou,crit, anssi ne furent-ils poiut longtemps observés, Il en Lie nouvelles dif1icultL-,S 'lni, une fois de ttinenèrent devant l'oftieialité tlioctauitic un nouveau curé de Poiitlieue, malt!'e Deiii~~ Prévo,t, et les hahitanta cl':lrua~e (1), C,'s le foi anil'WI: par l'organe de leur mandataire, 1il'ent obsenel' respectueusement il l'l'n'que tll.t ;\[ans, c'était ;tlora 1I~~ (le I3eanmanoir, que leur pasteur ne ,s'étai t point pré,enté dans leur clltyelle, le jour de P:1llues de l',lun~e llr~citW et (ill'il n'y avait envüyé 1H'I'Unlle 1 s,t Illace. \'OLb voudrez bien l'y t;otltt~~tinilre, ajoutaient les ou permettre de mancler ~i tel qui Itous et pal' Il- ntinistère duquel il rel'I'nus de la ralJl'illlle Jc la "ICCl/I'"tle d'Arn:¡g'c, Le pi etieuli- <engagea à y culnlmer tous les sercice., religiew Jnnt ~'tait clmr~é lu I~aillcur, t~lus ;t l'a)l'I' ;t ue Jctnieu la somme (li- tneutc licres t~ar au. Titl'I' p:tpicr, nopin eti Il~l;i. Celtp Il'ansaclioll n',LI'"it pa- i~tn~ "PI,roll\'l'e pal' tous les I~,moi;sicns. Il eii eut p:ll'llli el ilni uLtiIlL'L'IlL des Lettres royault, (1--iiiiiées il le lj 1I0"L'II1I,(, 15~Jé, l,al' Ilonri I~ pan lestluulles il autotisa lcs Ilal,i[;II11-; tlui 1'léil~ieiil~iieiit la cllCll'el18 d'1Ia';8, 1)1;iitlei- d~l'allL l'autorité LO,1inpL'lelltè, tmun ubtenir de celle-ci, <[lié l'ùt déclam~e, tioit calaLlu el oL,tenue l' illlilllidaliou, la Il 'Ilhacli'ili par laqUl'\l0 ils ncaient cédé à f)eliis etiié de Puutlieue, 1,.tjotti-~saiice et 1'tisiifiiiit '¡('~ terres el ries 1 cdcr:u,ècs 'lui foiiiiaieiii la Jotatiou de lad. ili,lpellu. Titne hapicr, dit si,cle.

Il Le G ocetnlrre 16[: m·titrc Julian Cauchu, acocat du roi. f;li.ant ~Inoit aw nulataution. des ImLit;mts it':lru,ye, ordouue à maitre Dcuis Prel'ost, cilié, POlltli,'I1' d'allcr Ai m_u~t~liu ou y faire l'ellirlit. toutes les rlrnrges aLl\'luelics le cOI1lraL de l-lin, .Jug'emellt lelldu dc,"allt Le Yayer, W~ du Hoi, lieutenant ~¡',¡ de la séllécl13ussée du lfaiue. Il oblige les paroissiens il poiti- prendre telles ré,olutious ctu'il lem cOllrielldra l'elret de t'ouruir ait curé une chambre LOollrcl1able, niunic il'un mobilier d'uue wlem Je 3G l~ » Titre papier.


nous sera loisible de nous aClluitter de. notre devoir pascal. Leur réclamation fut agréée (1). Se voyant ainsi soutenus par la plus haute autorité du diocèse, ils curent -k cc~ur de tenir en meilleur état l'édifice religieux oit ils se rendaient fidèlement chaque dimanche. Ils en firent réparer la toiture sur laquelle on plaça un I,anollceau et une nouvelle croix de fer (2). Ils en rellou\"elèrent partiellement le mobilier- Ils achetèrent de uouveaus ornements d'église (:1). Pour enlever tout prétexte d'absence au prètre qui venait remplir :1 leur intention les cérémonies liturgiques, ils lui assurèrent la jouissance d'un jardin et tl'uu immeuble situés près de la chapelle et ùont ils se rentlirent acquéreurs (4). Ils le munirent du mobilier dont tout presbytère était alors pourvu (5). ( 1 Veu la rcqneste de l'autre part et pièces y mentionnées ordonnons led. curé ile, Poullieue estre appelé aux fins d'icelle davaut iiolis à jour compettallt par le premier de nos appariteurs notaires ou sergeautz en aide de droiet et que par provsion il administrera les saincts sacrements aucd. paroissiens en ladite chapelle d'Amaige lorsqll'il en sera par euh. requis et en son refl'as leur hcrtnettons les y recepvoir par le pre~nier pu'" approucé quant ce faire. f3jct au :aIlS le huictiesme jour Il'apuil mil six cent treze. Signé Charles de Beautnauoir, évesque dll illans Copie, papier, du X~111, siedc.

1 ~I « Jacqueq Pouquault, vitrier, pour avoir racoustré de neuf les vitres de la chapelle, 81. 'iii s.

.1 François Ilaye, maréchal, pour la croix de fer mise sur le pinacle de la chapelle, 8 1.

Ponr le panonceau poreimele de plomb et escripture faite en celuici, :1,2 s.

A Julien Guiheri, couweur, pour avoir relaté et enfesté lad. cliapelle, 2(~ J) Comptes du procureur de 1618 à '11122,

(31 `~ Antoine Bouist, brodeur, pour la façon et fourniture de partie dcs estofIes de la chapelle des morts et drap mortuaire, 491. l. A René Salé, rneuuisier, pour le béard, carrie et chandeliers, ~liltl s. A Bellanger. ind de drap de soie, pour les estoffes de la chapelle des mort, ct drap mortuaire, 1. L s. 9 d.

Aud. Bellange" md, pour le fournissement de la chasnble rouge, 43 1. 12 s. » Jlémes comptes,

i Cet iinirieuble fut acheté, contrat en date du G nocembre 'IG:!I, pour le prix de 120 L

15i C'esl ce que l'on appelait 1'tistetisile.


La bonne intelligence se trouvant alors rétablie entre le pasteur et ses ouailles, il devint aisé à celles-ci et à celui-là de se mettre d'accord sur le choix du clerc qui devait suppléer et remplacer le curé (J). Cette question ne devait pas laisser à l'avenir d'ètre un nouveau sujet de discorde. Légalement, nulle contestation ne pouvait ètre soulevée, et, bien qu'ils rétribuassent le vicaire, les fidèles, d'après le droit canonique, n'étaient pas fondés le nommer. Ils en furent tentés néanmoins plus d'une fois, mais ils furent toujours déboutés de leur" prétentions. Cela leur arriva, en particulier, en 1676. Deux ans auparavant, un nouveau curé de Potitlieue, M. René de la Cour, y consentant, ils avaient conclu avec un ecclésiastique (l'Avoise, Pierre Leduc, un traité aux termes duquel ce dernier, en retour du traitement qui lui était assuré, se tenait pour engagé à célébrer, dans la chapelle d'~lrna;e, tous les services religieux dont il a été i i'1 Pal' acte devant Tliomas Le Roy, me Deuis Provost curé de Pontlieue, .Julien Trouvé procureur de la fabrique d'Arnage et trois des habitants d'Arnage, traitteut avec m' Nicolas Percher, prêtre, pour dire toutes les festes de chaque année pendant v ans la messe et vespres chacun jour de dimanche et reste de l'année pour laquelle célébrer les habitans ayderont led. Percher, dire deux messes par semaine dont l'une sera dite pour les trépassés et bieufaileurs de lad. église, dire l'absolutioll en caresme aux jours accoustumez, fourniront les habitans de luminaire, et luy donneront 'IOCI 1. pal' an, aura en oulre ce qui sera recueilli en la chapelle pour l'entretien de la messe des trépassés la glaine qu'il recueillera a l'aoust, le logis et jardin qui dépend de lad. chapclle auquel logis il fera sa demeure. » Acte du 10 janvier 1629, extrait d'un mémoire fout ni par lc curé de Pontlieue en 16iG.

Durant le temps où l'accord règuait entre les habitants d'Arnage et leur curé, une fondation fut faite au profit de leur chapelle, en 16f+. Voir l'acte d'assemblée des habitants d Arnagc réunis au I:uré et au vicaire de Pontlieue, en date du 10 avril il 16il. par lequel ils acceptent la donation qui leur est faite par testament, de -5 1. t. de rente annuelle, assise sur le lieu de la Porcherie, ;'¡ \foncé-eu-I3elin, par maître .Jacques Monceaux, en son vi\'ant, notaire royal au Mans et par sa veuve Madeleine Girard, Ù la condilion d'étre inhumés, l'un et l'autre, dans la chapelle d'Arliage, dans laquelle on devra célébrer pour eux tous les samedis de l'année, une messe basse, plus un .svbrenile, un stabat, et trois messes chantées, tous les ans, dont l'une le jour où l'Église fête saint Loup. Titre papier.


parlé plus haut (1). Cet arrangement, sans que nous en sachions la raison, ne fut point longtemps observé. Dès ~1(iî~, de leur propre initiative et sans en avoir informé l'autorité religieuse compétente, les paroissiens confièrent la desservance de leur chapelle à un prêtre nommé Francois Levray (2). Celui-ci ne fut point agréé par le curé de Pontlieue, qui, de son côté, nomma comme vicaire, un autre prêtre, Guy-Rolland Charles. Cette double désignation fut l'origine d'un conflit dont l'évëque du diocèse eut à entendre et qu'il trancha en faveur du candidat choisi par le curé (3). Les habitants s'inclinèrent. Cela n'avait pas été sans laisser chez eux quelques pénibles souvéilirs aussi n'y y eùt-il jamais grande sympathie entre eux et leur pasteur. (II T"ansaction en date du '25 février lG7t passée entre le cure de Pontlieue, René de la Cour, et les habitants d'Arnage représentés par leur procureur de fabrique, d'une part, et Pierre Leduc, prêtre, demeurant à Avoize, d'autre part, par laquelle les premiers font choix du second pour desservir la chapelle d'Arnage, attendu que le sieur Allard qui en avait été chargé s'acquittait mal de ses fonctions. Pierre Leduc s'engage à célébrer durant six anc, à commencer de la fête de Pàques de l'année précitée, toutes les cérémonies religieuses qui doivent l'être dans cette chapelle et o même d'instruire les enfants du mieux qui lui sera possible n. Le fabricien promet, au nom des habitants, de verser ~'t Pierre Leduc. cent vingt livres d'une pant et soixante sols d'une autre et de lui laisser la jouissance de la m3ison et du jardin joints ~-k la chapelle. Acte passé devant Étienne Pommier, notaire au Nians. Titre original papier. n2) llfaitre François Levray, prèlre, avait été préposé à la desservance de la chapelle d'Aruage, par acte d'assemblée des habitants, en date du :JO novembre -11375, Ce détail est relalé dans les réclamations de GuyRolland Charles. Titre papier.

13) u Veu la présente avec la'sentence arbitralle du 21 mai 'I4G0 avec la sentence rendue en l'officialité le 2 septembre '13'iR et autres pièces attachées à la dicte requeste. Nous avons réglé les honoraires dndit Charles à la somme de six vingt livres non compris son logement et habitation laquelle somme luy sera paiée annuellement par le fermier de la métairie de Bourdigalles et autres fermiers débiteurs et détenteurs dénommez en la présente requeste. Faict le septiesme janvier mil six cent soixante seze.

Loriis, évesque du Mans.

Titre papier. VSignature alitograplie.


Celui-ci eut, en ~LG96, à combattre une nouvelle prétention qui, d'après lui, et ce n'était pas absolument tort, tendait encore il isoler de Pontlieue, ceux des paroissiens qui fréquentaient la chapelle d'Arnage. Une pieus~ chrétienne, Jeanne Trouvé, épouse de Jean Rouillard, y avait fondé une messe de Iteqeeiena qui, durant les douze ans qui suivraient son décè~ devait y être célébrée, le pr2mier dimanche de chaque mois de l'année. C'était, du coup, établir, une messe basse régulière. Or, àL cette époque, et la nôtre en sait quelque chose, moins l'office était long, plus il avait chance d'être fréquenté. Seulement il eu advenait ceci Comme les instructions oit les fidèles s'instruisaient n'étaient pas données à cette messe que j'appellerai de surérogation, ceux qui y assistaient n'étaient plus en état d'y recevoir les avis et les recommandations qui sont lus au prône. Il y avait là un inconvénient auquel le curé obvia, en obtenant que l'office fut célébré le lundi, au lieu du dimanche. On murmura, et si j'entends bien le mémoire qui fut présenté u l'évêché u cette occasion, ceux qui tenaient les deux hôtelleriess'arrêtaient les paroissiens n'avaient pas été les moins ardents Li formuler leurs griefs et leurs réclamations (1).

11 semble bien que la requête dont l'évêque du 1\1ans eut à connaître, en 1713, était moins intéressée et que, seuls, les sentiments religieux dont les hahitants d'Arnage étaient animés, la provoquèrettt. N'étant pas satisfaits des concessions qui leur avaient été précédemment accordées, ils voulaient que, non seulement les jours des fêtes chômées, ('\) « Celte première messe, dis-ie, feroitque les fabitans du dit quanton d'.lrnages, et des paroisses voisines seroient dans l'ignorance de leur devoir et des choses qui regardent leur salut.

Enfin elle seroit une occasion prochaine aux débauches qui ne sont déià que trop ordinaires daus ce petit village qui n'est composé que t1e deux hutelleries à l'exception néanmoins de deux ou trois maisons où demeu1-eiit quelques pauvres IL Mémoire de mc« René de la Cour. Titre papier. Lx. 3


tels ceux où l'on lonorait les saints apôtres ou les mystères de la vie de la Sainte-Vierge, mais encore durant les derniers jours de la Semaine-Sai nte, on fit dans leur chapelle les offices liturgiques, tels la bénédiction des fonts baptismaux et celle du cierge pascal. Ils atFectaieut en plus de ne point assister aux processions que présidait le curé de Pontlieue, préférant se grouper entre eux, et, sous la conduite du vicaire qui remplissait près d'eux les fonctions curiales ils se rendaient aux sanctuaires où l'usage du pays voulait que l'on allàt à des dates déterminées.

En somme, ils auraient souhaité former une paroisse indépendante (1), du moins au dire de leur pasteur, c'était alors maitre Jacques Gautier. Peut-è.tre celui-ci exagérait-il en tout cas, il avait lui-même froissé ses ouailles, en exigeant que la messe célébrée précédemment dans la chapelle d'Arnage, a neuf heures du matin, le dimanche, le fCiI désormais à sept heures, pour donner au vicaire le temps de regagner Pontlieue afn d'y assister aux offices paroissiaux (2), ce qui semble avoir été alors observé. Prolitaut du passage de leur évêque en leur village, quelques paroissiens demandèrent verbalement, à deux reprises différentes, à ~isr Pierre Rogier du Crévy de vouloir bien leur permettre de revenir aux habitudes anciennes (3). ~1) « Ri pour se dispenser d'assister aux processions que le suppliant fait dans l'église de l'Épau le mardi des festes de l'asque suivant la coutume, ils alfectent d'y aller quelque temps après séparément et obligent le vicaire du suppliant de les y nieiiei~, disant que la paroisse d'Arnage veut se distinguer de celle de Pontlieue et qu'ils ont avec eux leur curé, aussy ils appellent ainsi leur vicaire etc ils n'assistent point aux autres processions que fait le suppliant. ».

Mémoire du curé Jacques Gautier titre papier.

12p Mémoire présenté il l'évêque du Mans au nom des habitants d'A mage, et signé par Julien Cotrin, Julien Bérard, Autoine Piau, Thomas La fontaine, René Launay, Étienne Maloiseau. Pierre Raguideau, Jean Hérisson, René Gobille, Atichel Plessis et Jean Larcher. Titre papier. (3'i « Votre Grandeur, passant par le ,'illage d'Arnage en auil 171 quelques particuliers se présentèrent à la portière de votre


Leur requète ayant été bienveillamment accueillie, maître Jacques Gautier en appela au prélat mieux informé et réussit à lui faire retirer l'autorisation qu'il avait d'abord concédée (-1). Sans se décourager, les intéressés revinrent une troisième fois à la charge, mais sans succès, et M¡rr de Froulay en 17~?9 ratifia ce que son prédécesseur avait prescrit en 'J7'20 (2). On se le tint pour dit (3).

Durant dix-huit ans environ, la bonne intelligence régna carosse, vous demandèrent la messe cri lad. chapelle à l'heure de la messe puroissialc s'i[maginant] qu'ilsavoient ce droit là, vous la leur [accordâtes] verbalement, et le suppliant vous ayant présenté sa requeste et communiqué les tiltres, vous nous donnâtes monsieur le grand doien de les examiner et voiaut qu'ils n'avaient pas droit de demander une messe paroissiale en la dite chapelle, vous ordonnàtes que l'on continueroit de dire une messe matutinale les dimanches et festes. » mais le suppliant a apris que votre Graudeur passant par Arnage le dimam;he de la Très-Sainte Trinité, le `~x novembre dernier, l'hoste du Plat-d'Élain et sa femme vous représentèrent qu'ils n'étoient point à la messe les dimanches et festes, attendu qu'on lit dit trop matin et que vous leur accordàtes la messe en lad, chapelle à heure de grand messe. n

(-l, Veu la présente requesle avec les pièces y atllchées pour fixer plus prccisément l'heure à laquelle se célébrera dans la chapelle d'Arnage la messe matutinale qui s'y doit dire chaque jour de dimanche et de feste, et, par cette fixation, assurer aux voyageurs aussy bien qu'à ceux du lieu et des environs une heure certainne à laquelle ils puissent entendre la messe. nous ordonnons que depuis la Toussaint jusqu'à Pàques la dite messe matutinale se dira à sept heures et demye et il six heures et demye depuis Pasques jusqu'à la Toussaint. Donné au Mans le vingt décembre -1720. PIEnRE, évesque du 111ans. »

Titre original, papier, sceau plaqué.

(2) "VU la requeste cy attachée et les permissions cy-devant acordées, nous permettons qu'on célébre la sainte messe dans la chapelle d'Arnage, suivant et conformément aux permissions et aux inèmes clauses et eonditions, et sera la présente avec notre mandement du 8 may cy attaché so-is le sceau de nos armes affichée dans lad chapelle pour, par le prêtre qui la desert, s'y conformer. Donné en notre château d'YHé, près le Nans, le 22 juillet 172J.

C'HOULLAY, év. du Mans. »

Titre ol'iginal, papier, sceau plaqué.

(3) Par un testament, en date du 7 octobre -1727, Marguerite Larcher l' légua à la fabrique de la clrapelle d'A l'IIage une rente annuelle de G 1. ,10 s. à la charge de faire célébrer pour elle douze messes basses par an.


entre les habitants d'Arnage et leur pasteur. Maltre .Jacques Gautier avait été remplacé par maître Jacques Vallienne. Ce dernier, tout en se réservant le choix du vicaire, eut soin de confier la charge à un ecclésiastique sympathique ~t ceux qui devaient réclamer le secours de son ministère (1). Ces rapports aisés prirent fin à la mort de ce pasteur prudent. Il eut pour successeur, Jean llouïn, prétre moins conciliant et aussi, ce me semble, plus près de ses iutérèts. En prenant la direction de sa paroisse, désireux d'améliorer la situation pécuniaire du vicaire qui le secondait à Pontlieue même, il réclama pour ce dernier, à ceux de ses paroissiens qui fréquentaient habituellement la chapelle d'Arnage, une dime en nature égale 1t celle qu'ils offraient, de leur plein gré, au clerc qui résidait près d'eux. Il n'en fallut pas davantage pour l'éveiller les anciennes prétentions. Un mémoire, rédigé au nom des habitants fut, en 1747, soumis à un érudit praticien du Mans, J. Raison, et l'on n'y parlait de rien moins que de chercher les moyens d'ériger une paroisse indépendante de celle de Pontlieue.

L'avocat dont on sollicitait les avis, sans heurter de front les prétentions de ceux qui le consultaient, eut le bon sens de ne pas les engager dans une voie où de rudes mécomptes les auraient attendus. Il leur f'xposa, en leur en signalant les côtés difficiles, quelle procédure, tant devant l'autorité religieuse que devant le pouvoir séculier, ils auraient à suivre. Puis en forme de post-scriptum, il ajoutait cette observation fort pratique « Au cas que M. le Curé veuille faire quelque innovation il ce qui s'est pratiqué jusqu'à ce jour, l'avis de M. Raison est que les habitans d'Arnage pré11 Les habitants ù'Al'I1age ne contestent point au curé de Pontlieue le droit de nommer conjoinctement acec ellx un prêtre pour dessercir la dite chapelle, et celuy qui la dessert actuellement leur a été proposé par feu \I_ Z'allieune leur curé, ils l'ont accepté et depuis enciron 11 ans. ils sont contens de luy. 7,, Nléinoire rédigé pour les habitants d'Aruage, contre leur curé. par M, J. Raison, en date du l7 décembre 1777. Cahier papier.


sentent leur requête à Monseigneur l'évêque du Mans par laquelle ils luy demanderont qu'il luy plaise ériger en succursale leur chapelle, avec ofrl'e d'y faire au vicaire 150 fr. par an (1) ».

On n'alla pas jusqu'à cette extrémité et, en 1790, quand la constitution civile du clergé fut imposée la France, le curé de Pontlieue comptait toujours parmi ses paroissiens, les fidèles résidant près de la chapelle d'Amage. Celle-ci, renfermant trois autels, possédait un modeste mobilter dont les objets les plus importants étaient «( Un calice d'argent avec sa pateinne deux ciboires dont l'un grand et l'autre petit; uue croix argentée avec un bâton de bois peint. Six chandeliera de cuivre deux bras de cuivre six chandeliers d'étain un encen;;oir en cuivre avec sa navette et deux bénitiers de cuivre ('2) ».

L FROGEU.

Il) Cahier papier, copie du XVIII, siècle,

d) luveulairc du moLilier, tilres et papiers de la fnlirice de Punllieue et Arua¡je, dres~é le 15 septcm~re l7!NI. Cahier papier.


TRAITÉ DE L'INDULT DU PARLEMENT DE PARIS

DE

CLAUDE REGNAULDIN

I'ROCUfiEUR GÉNÉRAL AU GRAND CONSEIL (163'2-1673) ET

LA NOMINATION AUX BÉNÉFICES ECCLÉSIASTIQUES

DEUXIÈME PARTIE LE TRAITÉ DE L'INDULT

I 1

ORIGINE DE L'INDULT. L'EUGÉIVIEINNF- ET LA l'.1 UGIV'E En principe, la nomination aux offices ecclésiastiques, et par suite, la disposition des bénéfices attachés aux charges, appartiennent 1 l'Éelise, qui a, seule, le droit de distribuer les fonctions relevant de son pouvoir spirituel. Toutefois, pour reconnaître des bienfaits, ou pour témoigner sa bie nveillance à l'égard du pouvoir civil, elle donne une certaine part dans le choix des dignitaires ecclésiastiques, à des personnes étrangères à sa hiérarchie. Ainsi le roi, les fondateurs ù'églises, et autres laïques, eurent la faculté de dé:,i~ner les titulaires des bénéfices. Bientôt ce privilège fut étendu, et la temps y introduisit d'étranges faveurs et d'in-

LE


contestables abus, Ce n'est point ici le lieu de les énumérer, encore moins de les examiner et d'en faire l'histoire il s'agit seulement de l'Indult accordé pal' les Souverains Pontifes aux Chancelier de France, Présidents et Conseillers du Parlement de Paris, en vertu duquel ceux d'entre eux qui étaient clercs pouvaient se nommer, et ceux qui étaient laïques pouvaient nommer d'autres titulaires capables, pour étre pourvus d'un bénéfice, mais avec celte condition que le Roi devait les indiquer, par Lettres, ù l'un des collateurs du Royaume.

Au temps du grand schisme d'Occident, qui divisa si malheureusement la chrétienté durant une quarantaine d'années (13î8-1!~17), les Papes cherchaient à se concilier l'appui des Princes et des corps puis:ants de l'État par des privilèges nombreux surtout en ce qui concernait les bénéfices. Par abandon volontaire de leur droit, ils cédaient ainsi la faculté de nommer aux postes vacants dans l'Église, « avec un peu trop de facilité )J mais, en retour, le nombre de leurs partisans était augmenté ou affermi ('1). Ainsi, Clément VII, qui siégeait à Avignon (1378-139i), accorda aux officiers recommandés par le roi de France des ôrvces expectatives avec préférence, c'est-à-dire, des droits exclusifs sur des bénéfices qui viendraient à vaquer. Quelques années plus tard au ter septembre '1402, le Registre du Parlement renferme une liste d'officiers de la cour désignés aux faveurs de l'Église en matière bénéflciale (2) et à J'année 1413, il donne l'énumération des privilè~es de même nature accordés au Parlement, sous ce titre Priuilegict yeneraliv Parl.ctrn.ezati sttp~r beneficiis a Papa cotace.~siv.

p4) a Monsieur dit Puy, dans son l'?-ailé dit Parlement de Paris, dit que le cardinal-légat (archeve'lue de Pise) entra ait Parlement eu 1fl' et y apporta. nonante nominations ou gràces expectatives, que le Pape envoyait au, gens du Parlement, qui le~ acceptèrent n. (Thornassin, IliscipLiue cie l'Eglise, parl. "2, 1. ::2. c. 4D.

(2) Du Luie, Placiturmi~ t'Hriæ liber Ij', tit. 1::2, m. 1.


Les rois eux-mèmes lie se faisaient donc point faute de solliciter, de la libéralité des Papes, bon nombre d'avantages temporels pour leurs propres serviteurs. On était alors, en France, sous le règne du malheureux Charles VI. A la prière de ce prince, .Jean XXIII, un des trois pontifes qui se disputaient alors la tiare, donna, pour une fois seulement., aux officiers clercs du Parlement, des grâces expectatives avec préférence, même par rapport aux gradués (1 ~12). Il est u remarquer que la faveur s'étend « aux enfants, frères et neveux des conseillers laïcs » qui pouvaient ainsi Pntrevoir l'heureux moment où ils auraient part, en personne, aux biens d'Église. Conformément t ce privilège, un arrèt, rendu en juillet 1417, attribua une prébende de Chartres il ],indu1tair~, c'est-1-dire, ~i celui qui bénéficiait de lu gnice en question accordée par indult, de préférence au gradué qui y avait été nommé (1).

La fin du grand schisme d'Occidetit (1~17) n'arrtta point le cours des bienfaisances pontificales il l'endroit des membres du Parlement. Le pape Martin V leur renouvela, par une bulle du '-)7 mars 'H28, la faveur jadis accordée par Jean XXIII. Son successeur, Eugène IV, suivit la même ligne de conduite. « La pluralité des Papes estoit bien ostée, mais l'abus des réserves et des -ràces expectatives duroit encore J) (2).

i Hen,; Ctroppin, De Sacra Polétia, ttt. n. 18.

u Eu¡;èl1e IV a, le premier, permis aux laïques de nommer des clercs ea leur place. Ce qu'il y a de plus cunstant et. de plus uniForme pendant toutes les rél'olutions de ces quatre siècles, est la sa~esse et la charité de qui n'a jamais rien oublié de ce qui pouvait servir pour réunir et pour ..errer tuujours plus étroitement les membres de l'Église entre eux, et surtout les membres les plus illustre3 avec le vhef visible de l'Église. Les biens étant les plus propres pour étreindre cette union et cette concorde du SacerdocE avec l'Etat, rien n'est plus juste que de faire couler sur les principaux membres de l'Etat quelques ruisseaux des libéralités de l'Église. qui reooit tous les jours de leur part t une infinité de dons et une protection incomparablement plus utile et plus nécessaire que tous les doris imagiuable: (Thûmassiu, 1. 1'.1 (.`ll 1'raité c!e !'Inr~ult, p. f). 7.


Eugène IV avait besoin d'appuis pour se défendre contre les prétentions injustes et le~ agissements des Pères du Concile de Bâle. Aussi s'empressa-t-il de répondre favorablement il la demande du roi de France, Charles VII, et d'accorder il ceux que le Parlement avait nommés il des bénéfices, la préférence, même sur les expectatives de la Cour romaine et des gradués docteurs, licenciés et bacheliers, recommandés par les diverses Universités du royaume (1 i3r). La bulle est donnée ad hetitio~ei., i~asta~atianz c/~ari.,siaté in (:hris(o ~lii Caroli re~i.s l'mnacormrt et. l'archevêque de Tours est chargé de, veiller il son application (1). Cet induit accordé par Eugène IV, non pas au Parlem°_nt qui siégeait il Paris sous l'autorité de llenri VI, roi d'Angleterre, mais au Parlement de Poitiers, placé sous l'obéissance de Charles VII, ne reyut point d'exécution. C'est du moins ce que rapporte le jurisconsulte Du Moulin, qui ne manque pas de faire ressortir le désintéressement des Parlementaires (2). Mais si ces dcrniers n'usèrent pas de l'Indult durant clueldues années, ce fut, plus probablement, par suite des difficultés que la Pragmatique Sanction, élaborée par l'épiscopat français, à Bourges, sur le modèle des décisions du concile de Bi'tle, avait fait naître entre les Papes et les rois de France (3).

D'ailleurs, quoique. les officiers du Parlement « eussent fortement résisté aux desseins des Papes qui tendaient à détruire l'autorité et la validité de la Pragmatique Sanction, néanmoins ils ne perdirent ni le goust ni le souvenir des grâces )), que leur conférait l'Indult. Un le vit bien, lorsqu'ils chargèrent en 149]" le cardinal de Lyon qui se rendait à Naples, 1) La bulle est reproduite, intégralemcI1t, dans le Traité de l'Imlalt, lt l9-25.

(`?) De in/irnai.s resignnretih~ts, m~ l.e méme auteur prétend aussi que l'fndult fut offert a Charles \'lt par Eugène IV.

(3) lC Comme Eugéne IV voulait apparemment par ce bienfait engager la France et le Padement à renoncer au concile de Bàle et à la pragmatique, on aima rnipux se paaer de son Illllult ¡J. IThomassin, l. C.I


d'obtenir pour eux, du Saint-Siège « quelque provision en bonne forme» qui aurait plus d'efficacité que les mandements royaux, auprès des patrons et collateurs de bénéfices. Les Papes, de leur coté, ne tinrent point rigueur au Parlement, de son attitude au sujet de la Pragmatique, ni même de son opposition à l'exécution du Concordat passé entre Léon X et François 1 (1516). Lorsque PaulilI venu, en 1538, à Nice, afin de travailler u rétablir la paix entre l'empereur Charles Quint et le roi de France, fut sollicité de renouveler l'Indult d'Eugène IV en faveur des officiers du Parlement, il y consentit volontiers. 1) espérait ainsi amener la puissante compagnie à résipiscence, et faire disparaître peu à peu les suites fttclieuses des conciles de Constance et de Bâle à l'égard de l'autorité des Souverains Pontifes.

Une bulle fut expédiée le La juin 1538. Elle confirmait le privilège accordé par Eugène IV au Parlement, mais en réservant le droit des mandataires apostoliques, c'est-à-dire, de ceux qui obtenaient un bénéfice dont le Pape s'était attribué., impérativement, la collation. Elle soumettait à l'Indult les bénéfices réguliers, même ceux de l'ordre de Cluny, et stipulait que tout bénéfice, dont la valeur serait inférieure à deux cents livres tournoises, pourrait être refusé. Le Roi devait désigner le collateur qui aurait à conférer son bénéfice à l'fnduItaire; mais celui-ci ne pouvait user du privilège qu'une seule fois dans sa vie et la même règle existait pour le patron ou collateur, qui, une seule fois aussi durant sa vie, serait obligé de supporter la charge de l'Indult.

u

LA nÉCLARATIO: nE FRANÇOIS le'

Cette bulle, appelée vulgairement la Ywslzae, portant confirmation et concession du droit d'Indult en faveur du Chancelier de France et Officiers du Parlement fut pour lors


très bien reçue, acceptée et enregistrée par ladite Cour J). Mais son exécution donna lieu de vives et nombreuses difficultés. Les Gradués prétendaient devoir passer avant les Officiers du Parlement, et les Cardinaux du royaume disaient ètre exempts de l'Indult. L'affaire fut portée devant le Hoi, qui trancha la question en faveur du Parlement, par Lettres du 18 janvier '1541, adressées au Grand Conseil, dont la mission était, on le sait, de terminer les conflits en matière de bénéfices. Le document royal fut présenté à cette Cour, le :30 janvier, par Martin Ruzé, conseiller, et par Gilles Le Maistre, avocat général du Roi au Parlement, qui en sollicitèrent l'enregistrement et la publication. Le procureur général en prit connaissance et le lendemain, à l'audience du Grand Conseil, les Lettres de François 1er furent lues, publiées et enregistrées.

Mais les Cardinaux et les Universités, d'où sortaiellt les Gradués, ne se tinrent pas pour battus. Ils firent opposition l'affaire fut de nouveau instruite devant le Conseil privé du Souverain. On plaida, L'avocat général soutint la cause du Parlement le rapporteur était messire François Evrault, seigneur de Chemens, garde des sceaux de France. Comme on avait pu facilement le prévoir, la victoire du Parlement fut complète le Roi publia, le -J:3 mars '154:3, un édit qui déboutait Cardinaux et Universités de leurs prétentions, avec défense de les alléguer désormais, sous peine de privation de droits et d'amendé.

Cette préférence, donnée aux Itidultaires, repose sur la teneur même des grâces accordées aux Officiers du Parlement par Jean XXIII et Eugène Ir, qui sont antérieures aux privilèges des Université, et des Cardinaux, et auxquelles il n'a été fait aucune dérogitioti-

Toutefois, l'indult du Parlement se trouvait limité par les droits du pape et du roi, qui «( n'ont voulu ni entendu donuer aucun privilège contre eux-mémes » (1).

(1) Tnnité de L'ludult, p. 33.


On a vu que les mandataires apostoliques avaient été nommément désignés par la huile d:~ Paul III, pour avoir la préférence sur les indultaires du Parlement. Il en était de même de ceux que le Pape avait nommés par prévention, c'est-à-dire, avant le Collateur ordinaire, sauf lorsque celui-ci était cardinal ou que la demande de l'iudultatre avait précédé la provision du Pape (1).

Quant au Roi, le, bénéfices, dont il avait, de plein droit, la Collatioll, soit comme fondateur, soit par l'égale, ou encore par une coutume spéciale. à la Lt province de, Nortnaudie, n'étaient pas soumis il l'Indult.

Au contraire, les droits de joyeux avènement et de serment de fidélité, en vertu desquels le souverain désignait aux prélats, qui venaient de prendre possession de leur siège, un candidat pour le premier catiotiicat libre dans leur église, cédaient le pas a l'Induit du Parlement. La dignité royale n'en recevait aucune atteinte car, dans ces cas, le Roi n'agissait ni coi-niiie collateur, ni comme patron, mais exerçait seulement une prérogative honorificlue. Et de plus, l'Indult constituait en quelque sorte un droit royal, huislue, dans l'application, les Lettres du Roi étaient nécessaires pour prétendre ¡t aucun bénéfice. Du reste, son origine datait de plus haut que celle des droits de joyeux avènement et de fidélité et il contenait un décret irritant les nomiuations des Ordinaires, mème Cardinaux, faites au préjudice des Indultaires désignés par le Roi.

C'est ainsi que le Grand Conseil rendit, le 8 mars 'H:J85, un arrèt qui attribuait une prébende de l'église de SaintAignan d'Orléans à maître Jean Heroy, nommé de Me Pierre Bouguier, conseiller au Parlement, contre maître Jean Bourgeois, chapelain ordinaire de la chapelle du Roi, qui en avait été pourvu ~t cause du droit de joyeux avènement.

Toutes les contestations en pareille matière étaient jugées Il) Arrèl du Grand Conseil, "l.7 juillet 1â~7.


d'après les principes que l'ou vient d'exposer. Un autre arrèt célèbre du Grand Conseil, concernant trois chauoinies de la clthédrale de Coutances fut rendu, en mars 1644, u la réquisition de Nie Joly. Il maintenait en la possession et jouissance de la prébende dite de Villiers, Charles Marchand, pourvu par prévention en cour de Rome en celle de l'Angronnp" Antoine Guillon, tenant l'Indult de M. de Broé., président aux Itequètes et en celle de Champagne, Jean Guenon, nommé droit de joyeux avènement.

Pour jouir de l'Indult, il était absolument nécessaire que le Roi désignât, par Lettres, a un des collateurs du royaume, le titulaire nommé par l'Officier du Parlement. La bulle de Paul III l'avait ainsi établi et la déclaration de François 1P~, du 8 jamier 1541, le rappelait en termes formels « Comme nous ayons, disait-elle, par cy-devant impétré de nostre Saint-Père le Pape certain Indult, pour et en faveur de nostre amI' et féal Chancelier, et nos amez et féaux les Présidens, Conseillers et autres Officiers de nostre Cour de Parlement de Paris, par lequel nostre dit Saint-Père le Pape nous a donné permission et pouvoir de nommer à chacun des Collateur,; et Patrons de nostre P.oyaume l'un de nosdits Conseillers Ecclésiastiques, ou les enfans, parens, et amis de nostre Chancelier, Présiùens, Conseillers et autres Officiers de nostredite Cour Laïc, pour par iceux estre pourveus ausdits nommez du premier Bénéfice vacant en leu{ Collatioti, présentation, ou autre disposition, qui seroit de la valeur de deux cens livres, ou au-dessus, suivant lequel Indult, aurions fait expédier nos Lettres de nomination à nosdits Conseillers Ecclésiastiques, et à ceux qui ont été nommez par nosdits Chancelier, Présidens, Conseillers et autres Officiers laïcs de nostredite Cour, lesquelles nomiuations auroierit nosdi ts nommez, insinués ou fait insinuer aux dits Collateurs ou Patrons de nostredit Royaume, plusieurs desquels au bon vouloir de nostre saint Père le P:rpe, et au


nostre, auroient obtempéré audit Indult, et uomination par nous faites et lesdits nommez pourveus, etc. » (1). Pour que plusieurs ne fussent pas présentés au méme Collateur, et pour qu'Utl seul ne fût pas nommé à plusieurs bénéfices, on commeuça, après la bulle de Paul III, une liste des officiers du Parlement où devaient être indiqués les nominations qu'ils feraient. Mais en @1617, ils cessèrent de rien inscrire sur le registre jusqu'à la mort de Louis XIII (164.'3). Alors, s'imaginant qu'ils avaient eu autrefois, la faculté de choisir les collateurs et patrons qui devaient leur conférer les bénéfiœs, et qu'on ne pouvait leur refuser le~ Lettres royales, les gens du Parlement demandèrent à la fteine régente le rétablissement du Registre. Or les textes leur étaient contraires; et les faits eux-mêmes leur donnaient tort.

Ils auraient dû se souvenir de la décision du Conseil privé du Roi, qui, précédemment, avait pourvu 11ï. d'Avanson, maître des requêtes, d'un benéfice dépendant de l'abbaye de Cluny, sur simples Lettres royales et sans qu'il ait été inscrit sur le Registre, tandis que ses concurrents, les conseillers Pierre Graffin et Antoine Le Coq, n'avaient pas négligé cette dernière précaution. D'ailleurs les Lettres ne faisaient jamais mention de Registres, dont on ne joignait aucun extrait à la nomination celle-ci ne reposait donc pis sur cette liste du Parlement.

III

LES ABUS

La pratique étendit bientôt le privilège de l'Indult. La cause en fut peut-être d'abord à la facilité avec laquelle les Chanceliers et Gardes des Sceaux acceptaient les nominations faites par les Officiers du Parlement « sans sujet rai(1) Reproduit dans le Trai~é de 1'Iredult, p. 48-51.


sonnahle » et parfois malgré certaines irrégularités de forme (1).

De plus, en conformité avec les termes de l'Indult, les Officiers Clercs se tiommaietit eux-mêmes aux Bénéfices, et non d'autres mais avec le temps et par tolérance du Grand Conseil, ils nommèrent aussi d'autres personnes capables, même aux bénéfices réguliers, sous prétexte que leur inhabileté à posséder ces derniers n'était pas plus grande que l'incapacité des Officiers laïques à acquérir tout bénéfice ecclésiastique. « Tel est l'usage d'aujourd'hui, dit Claude TIegnauldin; et celui qui réclamerait contre et qui voudrait y apporter de la reformatiou, :'attirerait la haine et la mauvaise volonté de cette illustre Compagnie» » (2).

La coutume de nommer aux bénéfices réguliers commença d'assez bonne heure. Dès -1562, on trouve le prieuré de Noyelles dtpendant de l'abbaye Saint-Julien de Tours, maintenu par arrêt du Grand Conseil, à Me Martin Ituzé, conseiller au Parlement, qui avait obtenu des Lettres royales, sans insc.riptiou au Registre. La même année, Jacques de Ferrières, nommé de Nie Claude des Assis, conseiller, rey.ut le prieuré-cure de Notre-Dame du Bois, dépendant de l'abbaye de licaulieu, près Le Mans, et Me Michel Gilbert, conseiller, le prieuré de Saint-Pierre, dépendallt de La Chaise-Dieu. L'année suivante, toujours par décision du Urand Conseil, Mo hrançois Thibout obtint le prieuré de Notre-Dame des Vertus, dépendant de l'abbaye de la Celle, au dioc.èae de Langres et Mo Christophe de Longueil, nommé de Mo Jean de Longueil, conseiller, celui de Bellegarde, de l'abbaye de la Couronne.

Ce ne fut pas le dernier abus. L'Indult n'avait accordé qu'une nomination aux Ofticiers du Parlement bientôt ils Il, L. c., p. SD, 63.

(2) L. c., p. G:J, C4;.


,en attribuèrent plusieurs, « pour tirer plus d'avantages de leurs Induits » (1).

De plus, au lieu de se contenter de demander des Lettres royales de subrogation, lorsque celui qu'ils avaient nommè venait ~t mourir sans prendre possession du bénéfice, ils allèrent jusqu'à substituer quelqu'un, à un nommé vivant. lfème quand ils n'étaient plus en charge, ils ~oulurent user de la faculté de subroger une autre personne à un défunt. !\lais, sur le rapport de Claude Regnauldin, le Grand Conseil le leur interdit, en mars lü30.

La liberté de subrogation engendra un autre abus, cri faisant croire aux Officiers dll Parlement ( qu'ils étaient. en tout temps maitres des Bénéfices qui leur avaient été conférés à raison de leur InduIt )J. Parfois ils firent déposséder ceux qu'ils avaient nommés u.t qui, déjà, étaient pourvus. Ou vit même les héritiers collatéraux de Monsieur de Thurnery, Conseiller au Parlement, prétendre enlever il frère Girard le Recoquillé, le prieuré de Saint-Denis de la Chartre, qu'il tenait de la nomination de leur parent mais un arrêt du Granù Conseil les débouta, sur le rapport de Monsieur de Fromentières (17 juillet 1623); et plus tard, en 1648, à l'occasion du procès de messire Isaac de iviç, sieur de Saintrvaurice et conseiller d'État, la même Cour déclara qU'¿1 l'avenir les indultaires ne pourraient plus contraindre a résigner les bénéfices, ceux qui en avaient été pourvus en vertu de leur Indult. Ce jugement mit fin à une prétention vraiment exorbitante.

On alla plus loin encore, en fait d'abus. L'inscription au registre, rétabli en 1643, parut, aux Officiers du Parlement, marquer la naissance de leurs droits sur les bénéfices, plutôt que les Lettres royales. Aussi s'empressaient-ils d'inscrire leur nomination dès qu'ils apprenaient la vacance de quelque prélature. Chacun voulait arriver bou l~re7nier. Il est bien vrai que la règle du droit ~ni l~rior ter>apore, Il) L. c., p. 72.


yotior jure, règlait la pratique. Le bénéfice appartenait au premier nommé, même si un suivant présentait ses Lettres avant lui (1). Le successeur du c:ollatPUr qui n'avait pas encore donné le bénéfice était obligé de le faire, parce que CI. l'Indult a quelque chose de réel, et affecte la dignité sur laquelle il est assis » (2).

Plusieur~ arréts intervinrent dans ce sens, entre autres, celui de mars 'lG44, qui maintint le nommé de Monsieur de Broé, président aux requêtes du Palais, à un bénéfice, dépendant de l'évêque de Coutances.

IV

LA VALIDITÉ DE L'INOULT

Pour valoir, la nomination devait être faite par celui qui en avait le pouvoir. Or, l'Officier du Parlement proposait seulement au Roi la personne qui devait jouir de l'Indtilt ce n'était 11 qu'une préparation. La vraie nomination, conférant un droit réel, se faisait par les Lettres du Roi qui pouvait ainsi écarter les indignes et les incapables (3). Si, après la « siônification » des Lettre8 royales au Collateur ou Patron, celui-ci disposait du Bénéfice en faveur d'un autre que celui qui avait été nommé, l'Indultaire avait six mois pour demander l'annulation de cet acte. Ce n'était pas trop, parait-il, de la double autorité du Pape et (1 Le Grand-Conseil le jugea ainsi par un arrêt du Il avril 1650, moy plaidant n dit Claude Regnauldin.

Notre auteur propose ici d'obli~'el' les nommés il présenter leurs lettres, dans les trois ou six mois, sous peine de déchéance de leurs droits. .lutrement le dernier nommé, croyant être seul, pourrait perdre l'occasion d'acquérir un autre héuélice. (L. c., p. 82, Ki.)

~2) 1.. c., p. 8:3.

131 On ne pouvait prétendre aur héuéfices ecclésiastiques, sans être tonsuré. Au mois demai1G::JO.sur le rapport de Claude Regnauldin, un arrêt du (;1 and-Conseil déclara « indigne de la grâce du Prince qu'il il a surpris quelqu'un qui s'était faussement qualifié de clerc tonsuré dans ses lettres de nomination. (L. c., p. 85, 86.)

LX. H


du Roi, pour faire accepter l'Indult par les Collateurs et Patrons des Bénélices.

L'Indultaire prenait donc date du jour de la nomination royale; celui qui s'était inscrit antérieurement sur le Registre (-lu Parlement, mai; n'avait reçu que postérieurement ses Lettres passait en second lieu. (( C'est It, dit Claude Regnauldin, une maxime très constante qui ne reçoit aucune difficulté et dont il n'est pas loisible de douter dans le Grand Conseil (11) ».

Il fallait en outre, pour la validité de la nomination, qu'elle fût signifiée à un Collateur ou Patron existant. Si elle était faite durant une vacance, elle devenait inutile, puisque il n'y avait alors personne qui pùt être obligé de la remplir. C'est ainsi que deux bénéficiaires, nommés par le Roi après le décès de l'abbé de Saint-Florent et avant la nomination de l( monsieur le cardinal llazarin it ladite abbaye», furent écartés, par jugement du Grand Conseil, en mars 1650, au profit des nommés de Monsieur de Harlay, maitre des Ilequêtes, et de Monsieur de Savenières, conseiller.

D'après une maxime constante, dans la matière, il n'était point nécessaire d'attendre la provision de Home pour tlélivrer des Lettres ~t l'lndultaire. « La nomination du Roi qui a succédé it l'élection donnait le jr4s ad reva et imposait ait Pape la nécessité de conférer le bénéfice, il moins d'incapacité et d'indignité notoires dans la personne choisie, comme l'avait établi le Concordat. Elle suffisait, à elle seule, pour asseoir l'Indult. Bien plus, elle n'était pas détruite par l'acte de celui qui résignait son bénéfice avant d'en avoir été pourvu. Car sans parler de la légitimité de la nomination en elle-méme, ( la gratit1cation royale doit être, de sa nature, constante et inébranlable, quand celui qui en a esté honoré ne s'en est point rendu indigne ('2) o.

\1) L. c., p. ~H, \cI'"2.

~~2'i L. c., p. \)5, ;lî.


L'Indult ôrwait la personne avant d'affecter la charge qu'elle occupait. Une affaire qui fit du bruit en son temps et qui concerne l'érection de l'évêché de Paris en archevêché en donne la preuve.

Lorsque messire Jean-François de Gondi n'était encore que coadjuteur de Paris, avec future succession, maitre Jacques Feydeau reçut des Lettres de nomination pour jouir de 1·ludult de 1\fonsieur Feydeau, conseiller au ParlemEnt, !\lais avant qu'elles fussent expédiées, le cardinal de Retz mourut, et le coadjuteur devint évêque de Paris. Le changement survenu inspira à Feydeau des doutes sur la validité de ses premières Lettres. Le 20 septembre 16'-)1, il en obtint de nouvelles qui confirmaient les précédentes et mandaient « à l'Évesque, Doyen, Chauoines et Chapitre de l'Église de Paris de luy conférer le premier Bénétîce qui vieudrait à vacqliei- (1) ». La veille du même jour, 'le 19, le Pape détachait de l'archevêché de Sens, les évêchés de Paris, lleau~, Orléans et Chartres, érigeait le premier en archevèché, et lui donnait les titulaires des trois autres pour sutTragants.

Deux mois plus le 14 novembre, il élevait JeanFrançois de Gondi lit dignité de premier archevêque de Paris mais c'est seulement en février 1623 que le prélat obtint des lettres portant confirmation de cette érection, enregistrées par le Parlement le 8 aoÚt suivant.

Le nouvel archevèque pouvait-il, en cette qualité, être soumis, une autre fois, à l'Indult, et devait-il remplir les nominations qu'il avait reçues, n'étant encore qu'êvêque? ('1) L. c., p. !~J. wu.


Cette double question ;e posait au sujet de maître Baltazar tle Rostaing que Monsieur de Bellièvre conseiller et depuis, premier président au Parlement, avait désigné, en vertu de son Indult, pour être pourvu du premier bénéfice libre, dépendant de l'archevèque ou du Chapitre de Paris. C'était en mai 1630.

L'archevêque ne s'estima pas, sans doute, lié par l'Indult; car au mois de février 1632, après le décès de maitre Geoffroy Vincent, il conféra sa cltanoinie et prébende à maitre François Joly, qui en prit possessiun le 26 mais, dès le lendemain, le sieur de Rostaing la réclamait, se faisait pourvoir par le Ctancelier de l'Université, et portait plainte devant le Grand Conseil.

Claude Regnauldin soutint que les premières lettres de nomination, données avant que lfessire de Gondi fût archevêque, étaient bonnes et devaient conserver leur effet. Il le démontra par des arguments juridiques, et par l'exemple de l'évêque de Tournon que le pape Innocent III blàma sévèrement, pour avoir refusé une prébende à quelqu'un qui avait reçu un mandat apostolique avant la nomination dudit évèque, quand il n'était encore qu'archidiacre de la même église.

La collation de bénéfices aux nommés du président Séguiel' et du conseiller Feydeau, par Jean François de Gondi non encore archevêque, n'était donc pas une gratitication volontaire, comme le prétendait le sieur de Rostaing; elle déchargeait le prélat de toute obligation ultérieure à l'égard de l'Iudult du Parlement. « Il n'a pu, disait avec raison Claude Regnauldin, à cause du changement du nom de sa dignité, souffrir une nouvelle charge c'est le changement et la mutation de la personne qui donne ouverture à l'Induit; et la personne ne peut être grevée que JemeL i~z t~itc~ » (1). Il serait injuste de soumettre plusieurs fois à L. c., p. 109, ti0.


l'Indult une personne qui l'a déju supporté et qui n'a même pas changé de Bénéfice, mais seulement de dénomination, Ce serait aussi aller contre les termes de la bulle et les intentions du Pape. Pour ces motifs, le Grand Conseil adjugea à maitre François Joly la prébende que lui avait conférée l'archevêque.

Ainsi, l'Indult était bien une charge personnelle. Le collateur, il qui il s'imposait, avait tous les avantages d'un débiteur pour sa libération. Si deux Bénéfices dépendant de sa dignité venaient ;1 vaquer en même temps, il pouvait offrir à 1'liidulttit-e, celui qu'il jugeait bon de conférer. Une difficulté se pré~entait concernant les communautés, qui, elles, ne meurent pas. Quand donc y avait-il, pour elles, ouverture de l'Induit Autrement dit, puisque chaque peusonne ne pouvait avoir à supporter l'Indult qu'une fois dans sa vie, à quelle époque les corps moraux dont la vie n'est point interrompue, et de qui dépendaient certains bénéfices, pouvaient-ils être soumis au privilè~;e du Parlement? Par une délibération du mois de novembre 1598, le roi Heni II ordonna qu'il y avait ouverture de l'Indult sur les communautés il chaque changement de règne. Cette mesure s'étendit même aux religieux de l'abbaye de Sainte-(~e.ncviève de Paris, qui craignant saus doute d'être grevés de l'InduIt à l'époque du changement de leur abbé, du trois en trois ans, avaient obtenu de n'y être soumis que tous les trente ans.

n

EXTENSION DE L'INOULT

Le privilège de l'Indult, accordé parles Papes aux Officiers du Parlement de Paris, était déjà considérable. Obtenir un bénéfice pour soi ou pour un des siens, parent ou autre, de tout collateur du royaume, même une seule fois dans sa vie


n'était point dédaiatier et les Parlementaires la dédaignèrent si peu qu'ils firent étendre le plus possible une faveur si appréciable.

Ainsi la Patrliae n'asnljettissait que les C:ollateurs u l'Indult des Lettres royales du 18 janvier -1541 y soumettent aussi les Patrons..

La même bulle ne parle que des Chancelier, Présidents et Conseillers du I'arlement le Boi ajoute les autres officiers de sa cour.

La bulle ne dit point que les Indultaires seront préfén~s aux Gradués, et pourront requérir un bénéfice, même dépendaut d'un cardinal le Roi leur accorde ce double avantage La bulle ne mentionne que les Collateurs simples, c'està-dire, les individus la déclaration de Henri II soumet aussi u l'Induit les Chapitres, Collèges et Communautés. Toutefois le Heceveur des Gages, le Clerc du Greffe, le Greffier de la Chambre du Domaine, qui s'étaient inscrits sur le Registre du Parlement pour jouir, eux aussi, de l'Indult, furent écartés.

Quand un Collateur grevé par l'Indult, venait u mourir sans y avoir satisfait, la charge passait à son successeur. « Cet avantage vient d'une bénigne interprétation et d'une favorable extension des .luges (1) ».

On à vu que les Officiers laïques pouvaient nommer d'autres personnes à leur place. Bientàt, les Officiers clercs les imitèrent; puis, vinrent la subrogation et la pluralité des nominations, soit d'un séculier ou d'un régulier en même temps, soit de plusieurs séculiers et de plusieurs réguliers, soit aussi sur différents Collateurs et patrons.

Pour simple mémoire, il faut rappeler que plusieurs arréts avaient contraint des titulaires de résigner leurs bénéfices, et que des nommés séculiers avaient obtenu des bénéfices réguliers.

il~ L. c., p. 112~2-


On le voit, les membres du Parlement de Paris protitaient largement des privilèges que les Papes leur accordaient. Il y eut encore, dans la suite, d'autres extensions de l'Indult, tout au:si favorables aux Gens du Roi.

l'époque, dont s'occupe Claude Regnauldin, la pratique avait établi, pour la matière de l'Indult, une jurisprudence, dont le Grand Conseil ne s'écartait jamais dans ses décisious. Il avait, en quelque sorte, érigé en axiomes de droit plusieurs maximes qu'il tenait pour inviolables.

D'après lui, l'Indult était intangible. Le pape lui-même ne pouvait réclamer un Bénéfice, sur lequel le Parlement avait jeté son dévolu. Comme l'on disait alors, la seule réquisition, quelle que soit sa forme, empêchait la prévention du Pape, qui, dans certain cas, pouvait étre soumise n l'Indult, par exemple, pour les Bénéfices de la province de Bretagne, où il était regardé comme Ordinaire, loco urdimurii.

VII I

LA BULLE DE (:LliISIEI~'l' I\ ou CGL.-df~'n'TI1-L'

« Il eust esté à souhaiter, écrit Chevallot, que feu Mon» sieur Fteânauldin eut remis la main à son ouvrage depuis » la nouvelle jurisprudence qui a été introduite en consé» quence de la bulle d'ampliation de l'Induit, du Pape » Clément IX, et cie;; Lettres d'attache données par le Roy » sur la même bulle, vérifiées au Grand Conseil le no» vembre 'l608. » Comme notre jurisconsulte ne l'a pas fait, son éditeur a voulu, il juste titre, compléter le Traité par la publication de ces dOLl1ll1l'nt.s et pal' quelques rúflexions personnelles afin de montrer J'extension considérable donnée au privilège de l'Indult par Clément IX. Ce serait laisser la matière inachevée que de ne pas suivre son exemple et de ne pas résumer brièvement les faits survenus


depuis que le Procureur général avait terminé son travail. Ces dernières pages ne seront qu'un abrégé de celles de Chevallot, qui, malgré leur importance, n'ont plus, pour nous, l'intérêt de l'oeuvre elle-même de Claude Regnauldin. Les privilèges, accordés par Eugène IV et Paul III, parurent bientôt insuffisants aux membres de l'illustre Parlement de Paris. Être obligés d'accepter des bénéfices cures et ayant charge d'àmes, pourvu qu'ils ne fussent pas audessous de deux cents livres de revenu, ne convenait pas à leur dignité. C'était trop peu et les rois de France euxmêmes trouvaient que les parlementaires n'avaient pas tiré, de l'Indult, tout l'avantage voulu.

Pour faire cesser ce qu'il regardait comme un inconvénient, Louis XIV chargea son Ambassadeur près du SaintSiège, de demander au Pape « d'amplifier et d'étendre considérablement ladite grâce ». Clément IX y consentit, et publia dans ce sens, la bulle SHlllmi Regis, qui « n'ayant rien de contraire aux saincts decrets, droits de la Couronne, Pri vilèges et Libertés de l'Église gallicane », fut acceptt~e, approuvée et confirmée par Lettres royales du 16 novembre 1608. Le monarque en confiait l'exécution au Grand Conseil, pour que les Officiers du Parlement et leurs successeurs puissent en jouir et user » pleinement, paisiblement et perpétuellement nonobstant tous usages, Hèglement, Arre:t, et autres choses à ce contraires, auxquelles pour ce regard seulement, et sans tirer à conséquence, avons dérogé et dérogeons ('1). ) »

Cette bulle, restée célèbre, accordait au Parlement de Paris trois avantages, estimés très précieux. D'après la règle ordinaire, les religieux pouvaient, seuls, obtenir un bénéfice régulier regvla.rin regtclarib~cs disait le droit ce qui restreignait singulièrement l'application du privilège de l'Indult. Désormais, Clément IX donne aux officiers du (1) Lettres d'attache sur la bulle d'ampliation de l'Indult, accordée par le Pape Clément IX au Parlement de Paris. (f", c., p. 1G8=177.~


Parlement « le pouvoir d'impétrar, accepter et posséder en commande des Bénéfices en vertu de l'Indult, lorsqu'ils auront vaqué eu commande, et aux Collateurs ordinaires celui de conférer en commande les Bénéfices réguliers sujets à l'Indult, lorsqu'ils seront requis par des séculiers » (1). Toutefois, le Pape exceptait, de cette exteusion du privilège, les monastères et prieurés conventuels, ayant le droit eff2ctif d'élire leur supérieur, ainsi que les offices claustraux. La part des gens de robe était encore assez belle.

En second lieu, la Cléme~ttine élevait de 200 a 600 livres le chiffre ii, nécessaire pour remplir l'Indult. Cela voulait dire que les indultaires pourraient, -Il l'avenir, refuser les bénéfices qui n'auraient pas 600 livres de revenu, au lieu due, auparavant, ils devaient se contenter de 200, comme limite c'était trop peu, pensaient-ils, pour la dignité de leurs personnes.

Enfin, par un troisième privilège, la Bulle déclarait que les indultaires ne seraient plus obligés., désormais, d'accepter des Bénéfices-Cure, et ayant actuellement charge d'âmes. Les Parlementaires n'avaient ni la vocation, ni le goût du ministère pastoral.

Comme autrefois pour la Pct~tline, le Pape nommait exécuteurs de la bulle, les abbés de Sairrt-Denis et de SaintGermain-des-I'rés, et le grand archidiacre de Paris. C'était il eux que devaient recourir les indultaires, en cas de refus des patrons ou des collateurs.

vil[

L'EXEMPTION DES CARDINAUX

Si la Clénaentine avait singulièrement étendu les avatitages de l'Indult, elle renfermait, cependant, une disposition (l) L. c., p. 17ï,lï8.


importante en faveur des Cardinaux du royaume, qu'elle exemptait du privilège accordé aux officiers du Parlement de Pari, Les termes de la Bulle étaient trop formels pour que l'on osât contester l'authenticité et la légitimité de cette exception mais en pratique on n'en tint pas compte, et il fallut une réclamation des cardinaux auprès de Louis XIV pour la faire observer.

Un arrët du Conseil d'État, rendu le 1-1 janvier 1673, à Saint-Germain-en-Laye, sous la présidence de Sa Majesté, ordonnait l'exécution de la Bulle et des Lettres d'attache qui l'avaient suivie, en ce qui concernait les cardi riliux. Le roi les déclarait « exempts du droit de nomination des Officiers du Parlement de Paris », annulait toutes les nominations faites sur leurs Bénéfices, et faisait « très expresses inhibitions et défenses d'expédier à l'avenir aucunes Lettres de nomination à cause dudit Indult sur lesdits Bénéfices dont ils sont pourveus ». Les commissaires, députés pour l'exécution de la Bulle, ne pouvaient imposer leurs choix aux Cardinaux toutefois, ceux-ci devaient recevoir ceux qui avaient été faits pal' leurs prédécesseurs non cardinaux (1).

Louis XIV confirma cet Arrêt par des Lettres patentes du 29 janvier suivant. Il s'exprimait de la sorte G Nos Cousins les Cardinaux Ursini, d'Est, Grimaldy, de Retz, Mancini et de Bouillon,. nous ayant représenté qu'encore que par leur dignité ils sont exempts de toutes bruces expectatives et Indults, lt caU:îe des Bénéfices qu'ils possèdent dans notre Royaume, et dont ils sont pourvus sur notre nomination, 1)ai- le moyen desquels ils sont Collateur: et Patrons de différents titres, lesdits Officiers de notre Parlement ne laissent pas d'obtenir des Lettres de nomination aux Bénéili L'arrèt est donné intégralement dans le Traité de 1'1-nditlt, p. 1861! 13.


fices qui dépendent de leurs Collations. prétendent par ldi Ôter il nos Cousins les Cardinaux la liberté de disposer des principaux Bénéfices de leurs Collations qui viennent ~i vacquer, et bien que les Indults qui leur ont donné la faculté de nommer, en ayent nommément excepté les Bénéfices dont nosdits Cousins les Cardinaux sont pourvus, avons déclaré et déclarons lesdits Bénéfices dont nosdits Cousins les Cardinaux sont ou seront cy-après pourvus, exempts du droit de nomination desdits Officiers de notre Parlement de Paris, accordé pal' la Bulle. » Ces lettres sont datées de Versailles et signées « Louis, et sur le reply par le I;oy, l:olbert, et scellées du grand sceau de cire verte, en lac de soye rouge et verte. Et plus bas est écrit Etll'egistré ès registres du Grand Conseil du Roy, suivant ce jourd'huy donné en iceluy. A Paris le 21 fénier -1672. Signé Herbin (1). »

Ainsi, rie n'était omis de ce qui pouvait garantir aux cine! cardinaux nommés le privilège que leur accordait la Clé~nentiue. Toutefois, le cardinal de Bonzi, archevèque de Narbonue et grand aumônier de la Reine, n'étant pas « dénommé ny compri, audit Arrest et Lettres patentes fit observer à Louis :1I~' que les officiers du Parlement profiteraient peut-être de cette omission pour empiéter sur les droits attaclns sa dignité. Le Roi ne jugea pas la précaution superflue, et rendit, le 25 avril 1672, à Saint-Germainen-Laye, un arrèt spécial en faveur du cardinal de Bonzi, qui fut suivi deux jours après, de Lettres patentes, et enregistré au Grand Conseil, le 15 juin de la méme année t2).

Les réflexions de l'avocat Chevallot sur l'exemption des cardinaux témoignent de la mauvaise humeur qu'elle causa chez les membre, du Parlement. Ne pouvant en contester il) L. c., p. 19i-~0'2.

(21 Ibid., p. 20:~215.


l'authenticité, ni la légitimité, il prétend du moins qu'elle repose sur la seule volonté de Clément IX, formulé0 dans la Bulle, et que le Pape invoque inutilement des lettres de son prédécesseur Paul III, qui jamais n'ont été reç:.ues, ni autorisées en France.

On reconnaît ici une des maximes du droit gallican, reprise plus tard par les Articles organiques, d'après laquelle les documents pontificaux devaient, pour obtenir leur efiet, être soumis préalablement au viso de l'état laïque. La même doctrine est encore plus explicitement formulée dans les observations de Chevallot, sorte de commentaire, dont il 11 cru pouvoir accompagner la Clérizentiue et qui reflète bien l'esprit des juristes de la fin du grand règne.

Sans une Déclaration du Roi, la Bulle ne suftlsait pas, d'après lui, pour exempter quiconque de l'application de l'Induit; et loin d'interpréter la démarche des cardinaux auprès de Louis XIV comme une précaution contre l'avidité de. Parlementaires, il y voyait une preuve de la nécessité d'un acte royal pour donner force de loi à la Cl~~iae~ati~ae. D'ailleurs, les Lettres patentes du Roi avaient restreint, le plus possible, la portée de l'eremption accordée aux cardinaux, qui devaient, de pal' la volonté du monarque, accepter les nominations faites jusqu'alors en vertu de l'Indult, sur leurs bénéfices.

Bien plus, on établit une distinction entre l'Indult des Officiers et celui du Chancelier. Ce qui donna lieu à cette jurisprudence singulière, d'après laquelle l'autorité laïque décidait de l'exécution des lois pontificales et même les modifiait, ce fut la nomination de l'évêque d'Orléans, du Cambout de Coislin, premier aumônier du roi, faite par le chancelier Séguier ~l un bénéGce dépendant du cardina d'Est, abbé et chef général de l'ordre de Cluny. L'élu avait, d'abord, été Dom François de Brillac, qui, plus de sept ans après, renonça u la dite nomination, par acte du 19 mars 1669.


C'est alors que Séguier choisit du Cambout de Coislin, qui fut agréé par Le Tellier, archevêque de Reims, commE Grand Vicaire du cardinal d'Est.

Comme cela se passait depuis l'acceptation officielle de la Bulle, il fallait bien donner le motif de cette dérogation aux ordres du Pape Sa Majesté, étant en son Conseil déclara que son intention n'avait point été « de préjudicier par les Arrêt et Déclaration de janvier 1672 aux dites Lettres expédiées eu faveur dudit sieur de Coislin pour tenir l'Indult dudit sieur Chancelier et Garde des Sceaux. de France Veut et entend Sa lllajesté qu'il jouisse dit bénéfice d'icelles tout ainsi que si lesdits arrests et déclarations du mois de janvier -tG7: n'estoient point intervenus. Des lettres patentes du même jour, 1 octobre 1672, confirmèrent du Conseil d'État et le tout fut enregistré, au Grand Conseil, un mois après, le li novembre (1).

En réalité, on acceptait avec joie les dons du Saint-5ièôe en pratique, on ne tenait compte de ses décisions que dans la mesure où la volonte du Roi le trouvait convenable. Le gallicanisme introduisait ces contradictions dans un état elirétieri.

j IX

LES RÈGLES nE I)'1\DULT

Pour user de leur privi1ège, les Officiers du Parlement, les Indultair~s, comme on les appelait, étaient tenus d'observer certaines règles juridiques, qui ne diminuaient el rien les faveurs dont ils étaient l'objet.

En premier lieu, 1'liidultLire devait obtenir, du Roi, des Lettres patentes, par Jesque1les Sa ~lajesté choisissait un Collateur qui serait obligé de se conformer à l'Induit, et lui 1») L. c., p. ~l5-2:Jü.


désignait l'officier du Pal'lement lui-même, ou, s'il était laïque, celui qu'il avait uommé sa place. Mais l'Indultairc pouvait présenter ses Lettres patentes au Collateur quand bon lui semblait, sans crainte de les voir perdre leur valeur. Il était bien libre d'attendre aussi longtemps qu'il le voulait, mème au-delà d'un au, comme il parait d'après la décision du Grand Conseil, rendue le 28 novembre 16512 au profit de messire Autoine de Breda, curé de Saint-Andrédes-Arts, nommé pour Monsieur de Hodiq, maUre des Requêtes, contre messire Thomas Tardif, qui tenait son Indult de Monsieur Docquiere.

Lorsque les Lettres patentes du Roi avaient été communiquées au Collateur désigné, celui-ci ne pouvait plus disposer de son bénéfice, à son gré. Et s'il lui arrivait de le conférer à quelqu'un de son elloix, sa collation, sans ètre nulle par elle-mème, le devenait du moment que l'indultaire déclarait invoquer, à l'encontre, le décret irritant des papes Eugène IV, Paul III et Clément IX, rendu en faveur des indultaires en général. Ceux-ci avaient donc un réel avantage sur les brevetaires du serment de fidélité et de joyeux avènement, auxquels il ne restait d'autre ressource en pareil cas, que de faire condamner les colliteurs à leur payer une pension proportionnée aux revenus du bénéfice dont ils avaient été frustrés on le vit bien dans l'affaire du sieur Renal, qui gagna un procès de ce genre contre l'évèque de Saint-Pons.

C'était seulement à partir du jour où les Lettres royales avaient été « signifiées » au Collateur que l'Indultaire avait un droit réel sur le bénéfice. Il avait ~out intérêt Li se huter de les transmettre car le droit établissait Claude Renaudin l'a démontré au nombre quarante-cinquième de son ouvrage- que si deux personnages différent" avaient reçu, du Roi, des Lettres pour un même Collateur, celui-là devait obtenir le bénéfice, qui avait présenté, le premier, ses


Lettres patentes, quoique postérieures, en date, à celles de son concurrent.

Les Indultaires avaient six mois pour réclamer les bénéfices que le droit leur assignait. Durant cette période, ils pouvaient méme forcer les Collateurs les leur conférer, et si ce;; derniers refusaient, s'en faire pourvoir par les exécuteurs de l'indult. Et dans le cas, où l'ordinaire aurait donné la provision Ü un autre, elle devenait nulle. De leur côté, les Collateurs pouvaient obliger les indultaires d'accepter les bénéfices aoumi, u l'indult, pourvu qu'ils fussent de six cents livres de revenu, et n'ayant pas actuellement charge d'Ümes. Le refus des indultaires « valait t repletion », comme on disait alors, et rendait la liberté du choix au collateur. Il faut remarquer que l'ampliation donnée par Clément IX n'enlevait pas aux indultaires la faculté d'accepter des bénéfices dont le revenu était inférieu r u six cents livres, et de s'en tenir seulement au droit fixé par la Pauline.

Lorsque deux bénéfices, soumis l'Indult, venaient à vaquer en méme temps, le Collateur ordinaire, ou le Patron, avait le pouvoir d'en oll'rir un à l'indultaire, pourvu qu'il réunit les conditions spécifiées par la Clévae~ati~ae. Les indultaires ne perdaient pas leur droit pour n'avoir pas repris la collation d'un bénéfice vacant, faute d'avoir été prévenus, il subsistait pour une vacance postérieure. C'était la tendance, chez le;; « parlementaires d'etendre, le plus possible, leur privilège; elle se manifestait à toute occasion- Ainsi, les collateurs bretons, quoique « chargés de la réserve du Pape et libres des expectatives des gradués » furent déclarés assujettis à l'Indult, malgré leurs réclamations. Bien plus, le Pape lui-même, qui nommait, comme Ordinaire, en Bretagne, dans les ~ix mois (1), n'en fut pas exempt. Car, entre autres le Grand Conseil sanc(11) Un édit du roi Henri Il, de l'au 'l5UI, l'avait reconnu.


tionna, contre l'abbé d'Estrées, la nomiuntion au prieuré de I3odieu, dépendaut de l'abbaye de Saint-Jagut, de maître Louis-François Paris, qui tenait l'indult de son père, conseiller au Parlement (9 juillet tG81). Quelques années plus tard, 2 mars 1701, une décision de la même Cour attribuait la Chantrerie de la cathédrale de Dol u maître Claude Civile, en vertu de l'Indult de Monsieur Frémont Daunevil, maître des Requêtes.

Ce deuxième arrêt CI. est d'autaut plus considérable, dit Chevallot, qu'il pruuve que les premières dignités dépendantes du Pape en la province de Bretagne en vertu des réserves de la Chancellerie romaine, sont sujettes à l'Indult comme tous les autres bénéfices collatifs de Bretagne (1). » C'est ce que Claude Regnauldin avait déjà établi à la dernière page de son Traité.

Toute cette matière de l'ludult, qui n'a plus d'application pratique depuis longtemps ne laissait pas indifférents le clergé et même les laïques d'alurs, qui voyaient des situations importantes dans l'Église échoir au premier indultaire venu. Les assemblées du Clergé adressèrent, en vain, des remontrances à Sa Majesté. Le nombre même de ceux qui jouissaient du privilège, d'abord limité aux vingt ou vingtquatre officiers du Parlement, était de trois cent cinc¡uantedeux, à la veille de la Révolution.

L'Indult disparut avec le vieux droit ecclésiastique de France. Il n'y avait plus de Parlement pour en demander le rétablissement et il serait bien oublié si quelques ouvrages des jurisconsultes d'autrefois ne nous restaient. Le Traité de Claude Regnauldin, le premier de tous en date, et un des plus estimés, nous donne une connaissance exacte de la matière, et des faits aussi bien que des coutumes qui s'y rapportent.

Dom PAUL RENAUDIN.

Il) L, c., p. 255.


PREMIÈRE VISITE PASTORALE

DE

MGR F.-G. DE JOUFFROY-GONSSANS

17 78

S'il est, avant la Révolution, un évêque qui ait laissé dans notre diocèse un suave souvenir de zèle et de piété, c'est, assurément, Monseigneur François-Ga<:pard de JoutIroyGonssans. Il était évèque de Gap lorsque Louis XVI le nomma, le 7 décembre -)777, au siège de Saint-Julien du Mans, que venait de quitter Mgr de Grimaldi transféré à Noyon (1). Le nouvel éV8que du Mans prit possession, par procureur, le 27 juin 1778, et, le 3(t suivant, fit son I l) Né le 17 décembre 1736, au château de la Cagne, diocèse de Vence, Louis-André de Grimaldi, neveu de Charl"s de Grimaldi, wcque de Rodez, devint vicaire-général de La Rocllefoucauld, à Rouen, puis à Pontoise. Nommé au \lans en 1757, il fut sacré le 5 juillet. Il partit à Noyon en -17,)7 et fut peu re~retté des Manceaux. Ses bulles étaient du `?0 mars -1778. Le Clergé l'envoya aux États sa députation lui fut enlevée par la Constituante. La Conceution le fit émigrer. Il se réfugia aux PaysBas, en Allemagne, en Angleterre et mourut à Londres en 18fk3 sans avoir voulu se démettre et après s'ètre du côté des auti-coucordataires. Dom Piolin, Histoire de l'Eglise `iu Jlnus, t. VI. A- Jean, Les Er~r'~ques ct :lrcl~eucqrres cle Frnnce de IG~R_z ~i 1801, pp. i:l28, 430.

Lx. 5

LA


entrée solennelle au Mans (1). A peine installé, Mgr de voulut conuaitre son diocèse et annonça pour l'automne prochain sa première visite dans le Sonnois (2). Son prédécesseur avait, dans le liittcel. qu'il léguait à son clergé, donné les règles il suivre pour les visites épiscopales (3). L'objet que se propose l'évêque, visitant soit diocèse, avait-il dit, ,( est de conserver la Foi dans sa pureté, de remédier aux désordres et de réprimer les scandales qui déshonorent la Religion de reformer les incetirs du Clergé et du peuple et de rétablir partout et le bon ordre et la discipline )) (4).

« Pour assurer à ces visites, continue le prélat, le succès qu'on a droit d'en attendre, les curés ne manqueront pas d'y préparer leur peuple. Pour cet effet, ils publieront au prône le mandement qui les annoncera, sitÔt qu'ils l'auront reçu, ordonnant à tous les paroissiens de s'y trouver, et les instruiront du respect qu'ils doivent à leurs évêques, des grands avantages que sa venue peut leur procurer, de l'obligation où ils sont de l'écouter avec docilité et d'accomplir fidèlement tout ce qu'il prescrira v (5).

Les moindres détails du cérémonial avaient été prévus. f 11 Né au chàteau de Gonssans, au diocèse de Besan~on, le 15 août 1723, reçu au Chapitre noble de Saint-Claude en -173'a, nommé chevalier de Saint-Georges en '1748, abbé de Lieu-Croisssnt tdiocése de Besançon), en il il fut nommé évéqne de Gap en 1773 et fut sacré le 20 mars 177~. A. Jean, op. cit., p. 32.

n?) Le Sonnois ISaosnois. SÙllOisl, était une contrée de la province du :lfaine occupant l'extrémité Nord-Est du département actuel de la Sartlie. Sa capitale avait été autrefois le bourg de Saosnes. Elle fut transférée à Saint Rémy-du-Plain et en dernier lieu à Mamers. Le Sonnois était un archidiaconé avec 1l paroisses. Son histoire est intimement liée :i celle des pays Iléehois et alen~ollL1ais. Cf. Pesche, Dictioixmai~·e, t. V, pp. 75~1f!19, avec une carte,

(3~ Ritnel dll diocèse ,dc bfans pablié par l'nutorité rie bforaseigneur Lovis-:l ndré de Grintatdi, ér,~èyue du dlans. Au 111ans, Monnoyer, 1775,

in-t^.

(~'¡ Ritttel cité, p. 108.

(51 Rituel cité, p. 109.


Le curé, averti de l'heure de la visite épiscopale, se rendait, en surplis et en chape, sans étole, à l'entrée du lieu, précédé de la bannière et des clercs. Il pouvait être accompabné des communautés religieuses et civiles de la cité et du clergé des puroissas venues pour la confirmation (1). Toutes les cloches qui, la veille avaient annoncé la fête, sonnaient à toute volée (2).

Le prélat, après s'être revêtu des habits pontificau~, se mettait ~l genoux, baisait la croix paroissiale et s'acheminait vers l'église (3), placé sous le dais que portaient les notable; de l'endroit, magistrats ou échevins (4), au chant du Te Demvz et du lieizeclictic~. En arrivant à l'église, l'évêque prenait de l'eau bénite, a,opergeait le clergé et le peuple et recevait les encensements ordinaires (5). Les prières pour étaient ensuite récitées (6), le patron de l'église invoqué. Après quoi, la prélat oUH'ait le tabernacle, en retir:J.it le Saint Ciboire et faisait lit \'isite des vases sacrés (7), des fonts baptiamcm (8), du cimetière (.0).

Ceci terminé, il disait la messe et !\Igr de Gonssans tint ir toujours la célébrer, même la esse (10) et donnait la Contlrmation. Toute la cérémonie se terminait par la bénédiction poutificale. Au presbytère l'évêque recnvait les les confrères, « en un mot, il examinait si tout ce (lui concernait le spirituel et le temporel de l'église était dans l'ordre requis et en bon état, il recevait les réquisition,s de son promuteur, les remontrances

ric~«r cité, p. 111- n?~ Ibid., p. Itn-

(;J'11bid., p. 112.

(4) P. 110.

(5) lbid., p. 1 12.

(fi) Ibi~r., p. 113.

(~) l6id., p. 114.

(8) Ibid., p. IIj.

,ni Ibi~t" p.lIti.

(11)1 Chanoine Nepveu de la hiauouillière, Vlémoires, t. 1, p- 308


ou plaintes tant du curé que des habitants, donnait les avis et faisait les ordonnances qu'il estimait convenables (1). Mgr de Gonssans partit donc « à cheval », pour le grand archidiaconé du Sonnois, le 20 septembr~ 1778, accompagné de 1~11~i. Du Gast, son promoteur, Duperrier du infourier, son grand vicaire, Bouet, son secrétaire et « plusieurs autres personnes » (2). Déjà le temps s'assombrissait, des pluies fréquentes annonçaient un mauvais automne en même temps qu'elles rendaient difficiles les routes et les chemins (3).

La première halte eut lieu à Savigné où Mer « dina »- Le soir il couchait Beaufay (4). « On est allé au devant lui, écrit le curé de cette paroisse, Jean Moulin, le 2-1 septembre, avec la croix, la bannière et le dais. Après les cérémonies d'usage et la célébration de la sainte messe, Sa Grandeur a donné la confil'lnation aux habitants de Beaufay de Courcebœufs et de Briosne » (5).

De là, le pieux évèque rendit peut-ètre visite à NotreDame de TOl'cé'! Nous le retrouvons seulement le 24 septembre à Champaissant. Il y confirme dans son lit René Botirditi, meunier de la Louvresse (6). Le 27, il est à Moncéen-Saosnois où le reçoit Me René Hamelin, curé. Trois cent. quatre-vingt personnes attendent dans l'église le sacrement de Cunfirmation (7).

I l) lütuel cité, pp. ll8-lln..

12) Nepveu de la :\lal1ouillière, t. 1. l, p. 32-1. État civil de Mézières-sous-Dallon dans Iraucrataine des ~tachives da la Snrtiae, t. 1, p. 271. Nous avons emprunté il cet ouvrage, après les avoir contràlés, beaucoup de détails.

\31 Il. Triger, Ob.seruatimes ayrècoles et ~nétéorologiqices. de 1544 à 1789 dans la pruuirace du hfainc. Le Mans, 1881, in-8~, p. 48. (4) Nepveu de la Manouillière, op. cit., p. 3?'a. i.

(5-) Chroniquc cle l'Ouest, lS:J8, p. 350.

161 Abbé J. Val'assellr, Claaiicpai.ssaret neligiacc.r, et /'éoctal dans Reuue leislorigt~e et anchéologique dit 3laine, t. LIX, p. 130.

171 État civil de Moncé. Inue~ataire sonxmaire, t. I, p. 272. L'étude de M, L'abbé Vavasseur sur .lloracé-en-Saosraois parue dans la Prorince clu


Ce chiffre n'a rien d'étonnant si l'ou songe la difficulté qu'il y avait pour un évèque de visiter souvent un diocèse aussi vaste que celui du Mans. En 1773, Mgr de Grimaldi avait confirmé à la Chapelle-du-Bois sept cents personnes (1). Les populations arrivaient parfois si nombreuses que l'évzque était obligé de quitter l'église, comme le fit Mgr de Tressan en 1701, à Duneau, où la confirmation fut donnée dans la prairie ce qui fut cause « qu'un grand nombre de personnes n'eurent point de foin » ('2).

La distance est grande qui sépare Champaissant de Neufchâtel nous retrouvons le 6 octobre Mgr de Gonssans. Que fit-il du 27 septembre u cette date. Nous ne savons. Pendant ces huit jours, il fit probablement peu de stations, et peut-être tint-il à se reposer quelques heures sous les frais et paisibles feuillages de l'abbaye de Perseigne. Suivant l'usage, plusieurs paroisses se réunissent à Neufchàtel Vezot, Le Val, Livet (3).

Le surlendemain, 8 octobre, l'évêque est à Pizieux. Après la sainte messe, il confirme les paroissiens de Saosnes, Montrenault, Commerveil et Saint-Calez (4). Le D, il eït à MaroJles-les-Braults. « Après avoir célébré la sainte messe, il a donné la confirmation le matiu à neuf cents habitants de cette paroisse, dans cette église et le soir, à trois heure;; après midi, Sa Grandeur a confirmé dans la mème église, les habitants de Dissé (sous Ballon) et Peray dont le nombre était pour les deux paroiases de trois cents » (5).

Vfai~ae, t. IX, ne mentionne pas cette visite épiscopale. René Hamelin né, a Monhoudou, était curé depuis le 29 septembre '1751 et resta jusq--i'à la Révolution. l'rouinc~ du 3faine, t. IX, p. :1~6.

(l) État civil de la Chapelle-du-Bois, Irm~eix~aire so>rarnaine, t. 1, p. 187. 12) État c.ivil de Duneau, IRC~entnire sonmnaire, t. p. 31 de Grimaldi vint confirmer au Luart en 1773 et fut obligé d'administrer le sacrement « sub arboribus prope castellum n Ibict p. ;~l: État civil du Luart.

13) État civil de Neufchàtel, Inuentaire sornn~aire, t. l, p.Zi7). 141 État civil de Pizieux, Inaentnire sonauxaire, t. p. 25~.

~5~ Assistaient à cette cérémonie, outre la suite du prélat, ~1M. Gournay,


Deux jours après (12 octobre) le prélat est à Dartôeul. «. J'y ai conduit, écrit llfe Chaillou, le curé de Nouans, sur ses registres, environ 480 de mes paroissiens, et tous ceux d'environ dix ans et au delà y ont été admis après avoir été disposés par les catéchismes et le sacrement de Pénitence (1). Le 14 octobre Mgr de Gonssan; visite l'église de René et y donne la Contlrmation « aux halritants de cette paroisse et il ceux de Thoigné, il commencer depuis ceux de de dix ans il a visité aussi la chapelle d'Épierre (2) et a donné la confirmation dans ledit village 1 quatre ou cinq malades. Dans toutes ses visites et fonc-' tions il a au jugement de tout le monde, montré un zèle vraiment apostolique » (3).

C'e;;t une louange unanimE; qui salue donc, au cours de ces visites le nouvcl évèque du Mans, celui qu'on a dit être « une des gloires les plus pure; de l'épi,sco[lat franço.is il la fin du siècle dernier » (4 A !.0US ses diocésains, eu effet, il dévoile la bonté inaltérable de son coeur et une simplicité digne des premiers temps de l'Église.

Cette paternelle bonté il eut surtout 1 la mettre en pracuré de Cilampaissant, Leroux, curé de Saint-Pierre-des-Ormes, 13uffoi-d(?l curé de l:ommerceil,'fisou, curé de Pizieux, Ba,'ille de Sussigny, prieur de Saiut-Synnphorien (en tlarolles Subrieu, curé de ltarollette, Bernardin, curé d'Aceinne, de la Borde, curé de llJarolles, Lehault, vicaire de Marolles. État ci,'il de Varolles. Communication de 11I. R. Jaguelin. II) Le curé de Nouans n'avait fait que sninc les prescriptions du rituel Lorsque les Curé, seront informés de notre visite, y lit-on, ou du jour que nous aurons indiqué pour la Confirmation, ils en avertiront au plutôt leur peuple et rei,oiit pour les y préparer des instructions et Catéctiismes deux ou trois fois dans le cours de la semaine, sans préjudice des catéchismes ordinaires des Dimanches et Fêtes n. fütoe( cité, p. 71. Reg. de l'état civil de Nouans. I~tncntaire sotn»tnine, t. l, p. 271;.

12, Épierres était un fief en René, dépendaut du prienr~i de Viroin. Cf. Besche, Dictiottttaine toporJrayhitlue, t. IV, p. W fi. Gaucin, lîéorf,~aptitie aucien>te dit diocèse dit 3lans, p. 307.

ia) Registres de l'État civil de René. Ittretxlaire sut>maire, 1, [J. `?î:l. r41 R. Triger, L'Attuée lî8J ait Jlart.s et cinrts le J[¡lIIt-JJuinc. )lamers, iii-81 vtrt-3lU l'.


tique à Blèves. Sa visite eut lieu « au commencement d'octobre » nous dit :~1~ Jacques Desrochers, curé de Blèves, soit avant la station de l~'eufch5.tel, coit après celle de René. La Confirmation n'y avait pas été donnée depuis soixante ans. En entrant dans l'Église, le prélat vit quatre pilliers qui soutenaient le clocher et les qualifia de « potences)). Au reste « il n'y avait dans l'église, ni pavé, ni lambris, ni chaire à prêcher, le clocher, la nef étaient totalement découverts ». Le prélat engageC1 tort le curé à remettre tout en état, et pour ce faire, fit appel à la bonne volonté des habitants. Celle-ci fit défaut « l'Église est bien plus grande, qu'il ne faut disaient-ils, pour contenir très commodément tous les habitants ». Le curé fut forcé de continuer, à ses frais, la restamation de son église (1).

Roullée, le prélat « tit un séjour de trois jours (dans le mème temps), pendant lequel il essaya en vain. de rétablir la bonne harmonie entre le curé et ses paroissiens désunis depuis douze ans à la suite d'un conflitélevé entre 11i~ Allain Lamare curé et le seigneur de Boullée d'accord avec plusieurs habitants qui refusaient de payer un douzième de dimes » (2).

Pendant dix-sept jours nous perdons la trace de notre évêque qui düt vraisemblablement administrer le sacrement de Confirmation dans les cantons actuels de Saint-Paterne, Fresnay et La Fresnaye. A Assé-Je.Boisne, par exemple, il confirme 89'r per.~onnes Le 29 octobre, il est à quelques (t¡ L. Calendini, Notes arc/réologirltres. L'o7lisc de Dtèues dans la F'ror~i>tce ci~r Jlairan, t. XI, Il. :Jl9-32G.

(~2~ f1egistres de l'état civil de Rotillée. Inumataire sorimnnire, t. l, p. 2~1.

(:1, l'. :lfoulard, Itec/~erches leistwiyues s~w tu chciteLttrrie et la pnnoisse cl':ls.sf~-1e-lioi.srac. Le Mans, Lebkaiilt, 13t3.i, p. klfl. Les pauoi·sieris d'Assé allèrent il Moulins-lc-Carbonnel, ce que n'indique pas 11. 1lloulard.


pas de à Moulins-le-Carbonnel, entouré d'un nombreux clergé, où l'on remarque le supérieur du Grand Séminaire du Mans, MM. Rouilly-Duclos, curé de Saint-Germain-dela-Coudre et doyen, Clogenson, curé de Saint-Pierre de Mont,;ort, Alençon, Thomeret, curé de Cesnes, Quesnot, curé de Silly, Tessier, curé de Bérus, Hains, curé de SaintLéonard-des-Bois, Clogenson de l'Étang, vicaire de Moulins. La Confirmation est donnée « à environ mille per~onnes de tout âge, de tout sexe, dont 500 de cette paroisse, ISO d'Assé et environ 100 de Gesnes-le-f'~and~elin » (1).

De Moulins-le-Carbonnel, Mgr de Gonssans se rend à Sougé-le-Ganelon où il est le jour de le Toussaint. Il y doiltie la Confirmation à environ 900 persol1nes. Malgré cette affluence « la cérémonie se fit avec tout l'ordre, la piété et la modestie possible » écrit 11. René Fortis, curé de Sougé. « Tout le monde ajoute-t-il fut édifié de la piété exemplaire de Monseigneur qui n'occupe son siège que pour montrer l'exemple des plus rares vertus ». Une note de cet ecclésiastique est surtout à conserver. « Monseigneur honora de sa visite, écrit-il sur ses registres, Messieurs les Curés chez qui il fut toujours logé, préférant la maison et le logis des prêtres à toute autre » (2). A cette règle il fit rarement exception. Pendant cette première visite pastorale, nous ne le rencontrons qu'au château de :\1. de Moutessott à Douillet-le-Joly (3). Il en sera de même pendant tout son épiscopat. En 1780, il descend chez le seigneur d'Amné (4), en 1784, chez le marquis de Sourches (5) il n'a point voulu Ily Reg. de l'état civil de 111oulius-le-Carbonuel. Inventaire somnaire. t. 1, p. 30n.

(2) Reg. de l'état civil de Sougé-le-Gal1elol1. Inuentaire sorraynaire, t. l, p.220.

13) R. Triôer, Étude histnrique sur Dotsillet-le-Jolg. Mamers, 1884, p. -19~.

i É) A. Pommier, I:hronir~u,;s de Souligné-sons-T'allon et de Flacé, 3 V).

15) Abbé Ledru et duc des Cars, Le chàteau de .5'ourches et ses seû~neurs. Paris, Le Mans, 188Í, in-8~, p- 269.


descendre chez les seigneurs, écrit le chanoine de la l\Ianoui11ère, mais toujours chez messieurs les Curés ('1). Il n'y avait point eu de confirmation, Sougé-le-Ganelon, depuis 1700. A cette date l'évêque du Mans Mgr de Tressan, avait délégué, pour une partie de ses visites, un évèque exilé Mgr Dalton évèque d'Ossory en Irlande, inhumé depuis en l'église de la Couture (2), En 1778, Mgr de Gonssans coucha au presbytère et partit le lendemain après y avoir diné, laissant tous les habitants transportés de joie d'avoir un prélat qui mérite à si juste titre le respect, l'admiration de ses diocésains par sa bonté si naturelle, sa piété exemplaire, son zèle infatigable (3) ».

Parti de 5uugé-le-Ganelon le 2 novembre Mgr. de Gonssans est le soir à Douillet-le-Joly et est l'hôte de M. de Montesson qui le reçoit de la manière la plus gracieuse. Ce fut, disent les Cl~>·oitiryces un jour de joie et de bonheur, et il y eut à l'église une si grande affluence de peuple que l'on dut enlever les bans pour les porter dans le cimetière (4). La saison devenait de plus en plus mauvaise mais malgré les mauvais chemins il fallait cependant continuer la visite. La petite troupe se dirigea donc vers Piacél'évêque confirma le 4 novembre. Saint-Georges, Saint-Paul, la Poôté furent réservées pour Li l'aunée suivante, lors de la visite du I3as-i~qaine (5). Sur sa route l'évêque reçoit la visite des paroisses qui envoient pour la saluer une députation Il) Nepveu de la Manouilliere, 3lémoine.s, t. p. 381.

r.2¡ Reg. de l'état civil de Sougé-Ie-Ganelon. Inz~er~taire soriuonire, t. l, p. 217. Sur ce pieux prélat Irlandais, cr. Dom Piolin, Histoire de l'qlise dit .llans, t. VI, pp. 353 et seC[. Il mourut le,26 janvier 1672 et fut inhumé en l'église de la Couture où se voit sou épitaphe.

(3, P. ~[oulllrd, Cürnniqi<e.s de .S'opé-lc-Gnraclon. Le Mans, Lebrault, 1980. Reg_ de l'état civil de Sougé. lurentaire so~imnaire, I, p. 21 i. (tl R. Triger, Douillet-La-Jolq. Mamers, lS8f, p. 19~.

(.5) 1I. Triger place la visite de ces paroisses après celle de Douillet. Elle n'eut lieu qn'en 1779. A. Leguicheux, Claroniques du canton de Fnesraay, p. 4,IID. P. Moulard, Recüerches historiyoes sur Sainl-l'aul-leLe llans, '1888, p. ~;8.


laquelle accompagne l'évèque d'une limite à l'autre de la paroisse (1).

A Piacé l'évêque du Mans confirme environ cinq cents habitants tant de Piacé que de Juille et de Coti.-é-desGuél'ets (2), et part pour Beaumont et Ballon. C'est probablement at l'occasion de cette visite qu'il conféra u CharlesPierre Paulmier, curé de Ballon, le titre de doyen qu'il enlevait a René Lorcet, curé de Congé-sm-Orne. Ces faits, dit l'historien de Ballon, se passaient « à la fin de 1778 » (3). Le 13 novembre et non le 30 (4) au soir, il arrivait à Saint-Mards-sous-Ballon. Ainsi que marquait le Itit~tel (5), il assista à la bénédiction du Saint-Sacrement et donna la sienne. Puis il se rendit au presbytèl'e, se montrant tOUjOUl's « prélat respectable plus encore par sa piété, par E'a douceur, par sou af1abilité que par sa naissance (6). Le lendemain, 14 novembre, il célèbre la messe et donne la confirmation qui n'avait pas été conférée depuis 28 ans 1400 confirmants se présentèrent. La cérémonie achevée u une heure tardive, comme il arriva, en 177D, à SaintGeorges-le-Gaultiel' (7), l'évêque fit la visite de l'église, alla diner avec ses curés. « L'après midi, sachant qu'il y avait un malade sur la paroisse, au lieu du Verger, près la Chabossièl'e, il s'y transporta pour le continuer, dans son lit, malgré l'avis qu'on lui avait donné que la maladie était une tièvre putride qui se communiquait » (8). Dans leur simplicité ces notes peignent admirablement notre pieux (1) I i :1. Le Guicheux, op. cit., p. 188, P. nloulard, oy. cit., p. :~3. dl Reg. de l'état civil de Piacé. louaulaine sonmunire. 1. p. 159. (31 Abbé Aubry, Ballon, Saicat-Mands et Snirat-Ouen, p. 10. 1'1) Abbé Auhry, olr. cil., p. 237.

1:~) Rituel cité, p. '1 H.

(I'~) Abbé Aubry, op. cit., p. ~37. lanenlaire sorimnaire, t. p. 272. III Commencée à 1 heures du matin, elle ne s'était achevée qu'à mid i 1/2 1`i~6 habitauts avaient été coulirniés. Reg. de Saint-Gcorgesle-Gaultier. Laucntni~~e .sorrmaire, 1, p. 211!1.

18) Abbé Aubry, op. cit., p. 2:n. Dom Piolin, Hisloirc cle l'l~c~lisc cla Mans, t. VI, p. 567.


évèque et font comprendre l'enthousiasme qu'il suscitait sur son passage.

C'était un samedi le ;;oir, l'évêque partit de Saint-liards et fut coucher à Mézières-sous-Ballon avec ses trois compagnons de voyage. Le leudetnain, après avoir dit la messe, Mgr donna la Coufirmation dans le chceur de l'église à 47G personnes, Le sacrement conféré, après avoir interrogé les enfants sur le catéchisme, il fit, ainsi que le demandait le Ritrt.el (1) la de l'église, que 1f~ F. Poilvilain avait fait « balayer, nettoyer et orner comme il se pratique dans les plus grandes solennités » (2), visita le tabernacle (:3), et donna la ljéiiédictiort avec le Saint-Ciboire (4). Le Riltt.el dit eticore « Ensuite, on marche aux x Font;; Baptismaux en chantant le psaume -119- Lcttcdute Ptteri. » (5). Ainsi fit il Mézières Mgr de Gonssans qui de là se rendit à la sacristie (C visiter les ornements, les livres et tout ce qui sert il l'Église » (fi). C'était encore une prescription du Rilrtel « exposer par ordre, le jour de la visite, au matin, sur une grande table de la sacristie, les ornements, linges, livres et aotres meubles appartenant à l'église, afin que lIIonseignelll' puisse facilement les visiter et en faire le dénombrement » (7).

Le 15 novembre au soir, l'escorte épiscopale partit de Mézières pour Souligné u par Ull temps épouvantable » (8). Depuis deux mois, en effet, il tombait de l'eau tous les (1) IIiW e1 cité, p. I10.

(~31 RitoeL cité, p. 110. Cr. 3lattclmiaaut rl~: 3lr~r tle Tressara, 1685, ctts culte et office dinici, VII, dans (Imloramtnces s~rvoclales da diocèse drt 3laus, inepririrr~e.s yar ondre cie J[!), rtc l'nottllart. Pa lois, 17H, pp. Ifj sq. (3~ Ritual cité, p. tH.

(4) Etat civil de Mézières-sons-Dallon.

(5) Rititel cité, p. I1J.

llil État civil de Mézières-sons-Dallon.

i Rituel cité, p. 110.

État civil de nléziéues-sous-Ballon. Ltuerataire soneruaire, t. J, p. :!71. Abbé Henri Briard, Jlé=ièrc.sorc.s-llallon. Laval, 1!N~i, p. Il. Ectrait de la Prouiraco dit .llaine.l


jours. Le 16 novembre la confirmation fut donnée en l'église de Souligné aux habitants de cette paroisse et de Saint-I\émy. « Il y avait cinq cents personnes à confirmer on y avait admis les enfants à dix ans et peu au dessous, suwant leur éducation c'était l'ordre du prélat) ('1). Cette visite devait être la dernière de l'année. Le 17 novembre le prélat arrivait au Mans « en bonne santé (2) et sans doute aussi l'àme heureuse. Sa première tournée épiscopale avait été vraiment triomphale, ses diocésains avaient pu deviner en lui l'homme de Dieu. « Il a prouvé par ce voyage, dit un contemporain, qu'il a beaucoup de zèle, car il a eu pendant beaucoup plus d'un mois un très mauvais temps et des chemins affreux » (3). C'en était assez pour s'attacher le coeur de son peuple.

(1) Reg. de Souligné. Inuerxlaire. sonumaire, t. 1, p. 15. 12) Nepveu de la Mauouilliére, ~lfémoires, t. I, p. i:E!8. (3) Ibid., in loc. cit.

Louis CALENDINI.


APPENDICE

ITINÉRAIRE DE LA VISITE PASTORALE DE 1778

20 Septembre. Départ du Mans,

Arrêt à Savignè-l'É\'êque.

Coucher à Beaufay.

2l Confirmation à ( Courceboeufs.

21 Confirmation à Beaufay. Briosne.

2~ Champaissant.

~'j Moncé-en-Saosnois.

Vezot.

ü Octobre. Neufch3tel. Le Val.

Livet.

Saosnes.

1. 3tuntreuault.

8 Pizieux. I Commerveil.

Saint-Calez.

!J ;\1 Il Le matin Marolles.

ara es. l.e soir à 3 heures, Uissé-sous-Ballon Peray

12 Dangeul: Nouans.

René Thoigné.

Illèves.

13 jours). Roullée.

211) :o.loulins-le-Carbonnel. 1 G G d 1. esnes-Ie- an e 1[[,

1Novembre. Sougé-Ie-Ganelon, coucher.

2 Arrivée il Douillet-le-Joly. Coucher chez ;\1. de Montesson. 3 Confirmation à Douillet.

4 Piacé, .TuiUé.

Ballon. 1 Congé-des-Guérets.

93 Arrivée et coucher à 5aiul-btards-sous-Ballon.

H Confirmation à Saint-Mards.

Coucher ~i Méziéres-solls-Ilalion.

,1:> Confirmation à Mézières. Coucher à Souligné.

Souligné: Saint-Rémy,

17 itetour au Mans.


DIABLE DE MONTAIGU

(MAYENNE)

Entre Évron et Bais, à six kilomètres environ au S. E. de Jublains, sur le territoire de la commune d'Hambers, a'élève un mamelon isolé, de 290 mètres d'altitude, qui se détache au milieu d'un vaste horizon comme un pittoresque avantposte de la chaîne des Coëvrons.

C'est le tertre de Montaigu, aux contours régulièrement arrondis, dont l'aspect original et pour ainsi dire « individuel )) semble avoir exercé de tout temps une attraction particulière sur les populations de la Mayenne.

Du sommet, il est vrai, le panorama est splendide. La vue s'étend, au Nord, jusqu'a la forêt d'.lndaine et aux collines de Normandie à l'Ouest, jusqu'aux collines bretonnes de Vitré au Sud, bien au-delà de Sainte-Suzanne à l'Est, sur la forèt de Pail et, dans ce cadre immense se dessine un merveilleux fouillis de prairies, d'étangs, de frais vallons et de grands bois.

Comme on l'a fort bien dit, l'homme se plut toujours dans ce site privilégié.

Sur les versants de Montaigu, M. Émile Moreau, le distingué. président de la Commission archéologique de la

LE


Mayenne, signalait naguère une station mégalithique (1). Plus récemment M. l'abbé Angot, le savant historien dont notre province entière s'honore, y relevait de nouvelles traces de la voie romaine du \ians à Jublains, par Rubricaire il confirmait en même temps les origines mérovingiennes du villagt', de Montaigu (2).

D'autre part, au XII" siècle, les ermites de saint Alleaume, fondateur de l'abbaye d'Étival-en-Charnie, prenaient possession du sommet du mamelon. Ils y construisaient un petit ermitage et une modeste chapelle la dévotion populaire ne tardait pas à attirer les pélerins.

L'histoire de cet ermitage n'est plus faire. 11i. l'abbé Angot l'a reconstituée, en 1904, avec une érudition ('t. une précision qui ne laissent rien à ajouter (3).

Grâce il lui, nous savons désormais que, bien avant le ~e siècle, la chapelle de 1\1." saint ~'Iichel, sur le tertre de Montaigu, était, le jour de la fète de l'archange, un centre de pèlerinage très fréquenté qu'à la fin du 1IV~' siècle déjà, l'oratoire primitif, de construction très ancienne, tombait en ruines qu'il fut rebâti en 1 iOZ, avec l'autorisation des seigneurs de Chelé, .Jean de L andivy et Marguerite de la infaclieferrière.

La pieuse initiative de cette reconstruction appartint à un simple clerc « qui désirait estre prestre, mais dont le nom peu poétique s'harmonise mal avec les beautés du paysage. Il s'appelait Jean Cochon.

Par une coïncidence à remarquer, Jean Cochon entreprit son beuvre en pleine guelTe anglaise, sans aucun souci des il) E. Moreau. 3lottrnite~rts ntégalitltit~ues d'HaoiGers et de SainleLaval, L. \loreau, 1,,75. ~1'ote sitr deux atoacelLcs staliorts pné/risloritytes du déyartemetat cle la bfagenne, Toulouse, Bonnal et Gibrac.

12) Abbé Angot, ilfoutaigo, Laval, Goupil, HJOL LebalneunaRe ibideiii, -t\JU3. Cf. aussi f. Liger, La t.'énomaraia nonrai~ae. \,3) Abbl Augot, hfontaigts, etc.


troubles du temps (1). 'i. La pierre fut tirée du roc sur lequel on bâtit l'eau et la chaux furent amenées à grands frais et fatigues. Si le granit ne fut pas taillé avec finesse, il le fut cependant avec goût, en belles assises pour les murs, en blocs choisis pour les ouvertures et les contreforts, si bien que depuis cinq cents ans, en dépit de quelques modifications et retranchements, l'édifice brave les pluies, les vents et les orages. »

Reconnue officiellement par l'évèque du ]lJans en '1 i23, la nouvelle chapelle de Montaigu vit accourir, plus nombreux que jamais, « moult de gens par dévotion et par forme de pèlerinage. » Le 1V~ siècle, en effet, fut en France la grande époque de la dévotion à saint Michel, le saint fnataçais, que le patriotisme de nos pères opposait à saint Georges, le saint ciiiglaii, en lui gardant à bon droit une vive reconnaissance pour avoir inspiré Jeanue d'Arc, la libératrice de la Patrie (2). De divers côtés, des sanctuaires s'élevaient en son honneur dans nos campagnes, mais quand ce sanctuaire était situé sur une hauteur, il était, semble-t-il, plus vénéré enc:ore, car bI~ saint Michel aime les montagnes. Sous ce rapport, certes, la chapelle. de Vlontaigu répondait aux goûts de l'Archange: elle était, à tous égards, le ~llo~zt-Saitat-ufichel dtc lLlaine. Méme de nos jours, elle reste un lieu de pélerinage populaire.

Quant à l'ermitage, rebâti avec l'oratoire, il fut habité jusqu'en 1835 par des ermites « amateurs », qui vivaient des dons des habitants. A cette date cependant, la vie érémitique n'étant plus dans les mœurs, le curé et le maire d'Hambers dÚrent congédier d'un commun accord le dernier ermite de Montaigu.

111 Le fait, il vrai dire, n'est pas exceptionnel: le transept septentrional de la cathédrale du Mans fut également terminé pendant les guerres anglaises du XVe siècle.

I?i Cf. les 1 emarquables études de notre regretté maitre Siméon Luce sur la guerre de Cent Ans et notre ~ttvde leistooique snr Dotcitlet-ieJoly, Mamers, 1881.


Ne le regrettons pas trop. La nature humaine est ainsi faite qu'un jour peut-être la place sera reprise par quelque philosophe désabusé du socialisme contemporain, ou désireux d'échapper aux: automobiles.

La chapelle ::iaint-Michel de i\Iontaigu, privée de son vieux pinacle, n'otTre pas de caractère architectural remarquable, mais elle possédait au-dessus de l'autel, il y a une trentaine d'années encore, un groupe en bois, saiat blichel te~wassa.nt le dérizolz, qui attirait l'attention de tous les visiteurs par son antiquité et surtout par l'aspect peu banal de la tête du diable.

En 1835, M. Verger, le premier historien de Jublains et de Montaigu s'empressait déjà de signaler ce curieux groupe. A l'intérieur de la chapelle, écrivait-il, « le morceau capital est la statue de saint Michel terrassant le démon l'artiste a eu la bizarre idée de composer ce dernier personuage de serpents entrelacés dont la couleur, d'un jaune livide, a vraiment quelque chose de repoussant ajoutons qu'il est muni d'une notable paire de cornes » (1). ClIlq ans plus tard, en 1840, c'était un gros regret pour Léou de la Sicotü?re, au cours d'une excursion troublée par une pluie diluvienne, de ne pouvoir pénétrer dans la chapelle et examiner le diable de blontaigu Tout au moins en parle-t-il, lui aussi, d'après M. Verger, comme d'une oeuvre étrange (2).

Plus heureux en 1860, le spirituel inventeur des ALpes ~lftvaeelles, M. du Peyroux, av ait la faveur de le contempler. Les cornes menaçantes et les serpents entrelacés le frappaient son tour, et il résumait son impression dans les termes suivants: « Ce groupe Laoco~aiqtce n'est pas dépourvu de sculpture rendu, après le grattage d'une couche de Il) F.T, Verger, Notice surTttGlai~ts, 2e édition, Nantes, Mellinet, lR.'35, p. '107.

121 L. de la Sicotiére. E.rcursions clnns la ~lfaicte, Le Mans, nichelcL 1841, p.lU5. LX. 6

L\. 6


peinture d'un jaune livide, il son naturel de bois de chêne, il aurait sa valeur » (1).

En '1904, enfin, dans son savant article sur Montaigu, 1\1. l'abM Ancot, ne dédaignait pas de donner un dernier souvenir au diable de Montaigu « Le groupe traditionnel de l'archange terrassant le démon était, disait-il, habilement sculpté dans un tronc d'arbre. Le diable avait des gueules béantes à toutes les articulations et une chevelure de serpents. Ce groupe rtidttil en xniette~ ycar 1111 cotth de totz~aenre, a été remplacé depuis une trentaine d'années par un plâtre tout blanc qui ne se recommande que par sa taille ».

Dès lors, en présence d'un acte de décès dressé en si bonne et due forme par l'érudit historien de la Mayenne, on pouvait croire le diable de Montaigu rentré pour toujours dans les enfers, et perdre tout espoir de revoir l'intéressant personnage.

liais le diable, dit-on, a la vie dure et voici qu'aujourd'hui nous avons la bonne fortune d'annoncer sa réapparition inattendue.

Toutefoi~, ledit diable, s'ennuyant sur les sommets de Montaigu désertés par leurs ermites, a déménagé. En démon à hauteur de la civilisation moderne, il réapparait au centre de la grande ville ({ du circuit de '1906 », au musée archéologique du Mans!

Il y a quelques mois, en effet, Vi. Lesage, sculpteur et marchand d'antiquités, au Mans, parvis Saint-Julien, retrouvait, par un heureux hasard, la tète du diable de Montaigu. ~ppréciant aussitôt l'intérêt local de la trouvaille, il voulait l¡ien refuser toute offre de vente, et, avec un désintéressement dont nous tenons à le remercier, la mettre notre (L) A. du Peyrous, Les .~tpes Vfancelles, Le Mans, Loger et Boula)", lRGI, p. 1G5.


disposition pour le nouveau musée archéologique de la rue des rossés-Saint-Pierre.

Le musée et les amateurs d'antiquités devront lui en savoir gré..

Le diable de Montaigu est plus curieux encore qu'on ne pouvait le supposer d'après les descriptions précédentes. Non seulement la tète, de 0 m. 28 cent. de hauteur, est couronnée d'une chevelure de serpents entrelacés et de deux cornes qui devaient être formidables avant d'être brisées, comme elles le sont maintenant, mais le nez et le menton sont formés par des crapauds ingénieusement combinés et fort bien traités la bouche, gamie de dents régulières, s'ouvre dans un rictus amer de colère et de désespoir; les yeux, ronds et saillants dans des orbites profondément accentués semblent sortir des gueules de monstres fantastiques, et l'oreille gauche est pincée par un serpent d'une disposition très originale. L'expression de l'ensemble est la fois étrange, naïve et vigoureuse. Sculptée dans un morceau de chêne très dur, cette tête était scellée au corps l'aide d'un osserneut dont une partie demeure engagée il l'intérieur du cou elle n'est plus peinte en jaune livide, mais en vert et en rouge. Telle quelle, elle suffit à prouver que le groupe du saint Vlichel de Montaigu n'était pas sans valeur et qu'il devait être l'oeuvra de l'un de ces artistes qui ont peuplé nos églises du Moyen-Age de tant de ôrotcsques expressifs. Dans tous les cas, l'idée très particulière de composer les traits du démon avec des crapauds et l'habile exécution de cette idée font honneur u l'imagination du sculpteur autant qu'à son expérience professionuelle et ir sa science iconographique. On peut même dire qu'il nous a laissé il Montai~u le type le plus ratiouuel de Satan, en le représentant sous une figure humaine, tout en composant cette figure l'aide de bêtes immondes (1). Il) Cf. Grirnoard de Saint-Laurent, .lfamoeG de l'nnt ckrétieu. Des démons.


C'est au XV" siècle, époque de la reconstruction de la chapelle que nous croyons pouvoir attribuer la tète du diable de Montaigu, au plus tard à la deuxième moitié du siècle, car la Renaissance, il nous semble, ne comporterait plus un symbolisme aussi naïf et aussi caractéristique. Par son ancienneté comme par sa bizarrerie et son origine locale, l'aeuvre a donc sa place bien marquée au musée archéologique du Mans. Nos amis de la Mayenne et tous ceux qui s'intéressent à l'iconographie du Moyen-Age seront heureux de l'y retrouver. De plus, elle y consacrera en quelque sorte le souvenir de la charmante excursion que la Société historique et archéologique du nfaine vient de faire aux environs de Montaigu, et elle atténuera ses regrets de n'avoir pu saluer que de loin, au cours de cette excursion, la silhouette si pittoresque du mamelou de Montaigu et de sa vieille chapelle.

ROBERT TRIGER.


CII1~ONI(>UE

Depuis quelques mois nous avons il déplorer quatre nouvcaux décès qui suscitent dans la Société de sincères regret, S. E. le cardinal Labouré, archevêque de Rennes, ancien évêque du Mans, qui, pendant tout son séjour au Mans, avait bien voulu compter au nombre des membres d'honneur de la Société et donner il nos études de bienveillants encouragements.

1\1. le Cto Léonce de Gastines, ancien élève de l'École des Chartes, ancien maire de Chaufour, décédé le 30 mars en son chaiteau de la Denisière, li l'ciôe de 76 ans, membre de la Société hiatorirje<e et a~·cl~éodogiq2te dit. ~liainte depuis la fondation.

Au service funèbre du G avril, Mgr l'Évêque du Mans a rendu à notre regretté collègue un légitime hommage', et dans une émouvante aUocution l'a dépeint fidèlement CI: Au sein de sa noble et chrétienne famille, M. le comte de Gastll1es a réalisé le type du patriarche de nos saints livres, entouré de ses enfants et petits enfants, aimé et vénéré de tous. Dans sa vie civile, il s'est dévoué à ses concitoyens. La commune de Chaufour, dont il fut maire pendant de longues années, n'a pas oublié tout ce du'elle doit à sa sage et prt?voyante admiuistration. Érudit, il ne s'est jamais désiiitéi-essé des études sérieuses et utile,, et le brillant élève de l'École des Chartes est tout naturellement devenu


membre de plusieurs sociétés savantes. Simple, bon, accueillant, il n'attendait pas qu'on lui demandàt des services il allait au-devant de ceux qui en avaient besoin. o Nous nous associons de tout cmur à ces éloges si mérités, en priant Mme la comtesse de Gastines et MM. de Gastines d'agréer nos respectueuses et bien sincères condoléances. M..T.-C. Chedeau, avoué honoraire, adjoint au maire de Mayenne, décédé le 12 avril, dans sa 81e année. M. Chedeau s'intéressait tout particulièrement aux travaux d'histoire locale en 1865, il avait contribué à la fondation de la Société d'Ax·clzéologie, Sciences et Arts de let Afagcnoe, et bien que cette Société n'eut qu'une existence éphémère, il avait publié dans son bulletin, avec M. de Sarcus, un dfe·moire sttr le.v cléçoatvertes arcitéologiqates faites r,o 1864, cta~as le lit de la dfayenne, au gué de Saint-Léonard. Dès la premitwe heure, en 1876, M. Chedeau avait pris place parmi les membres titulaires de notre Société et il faisait également partie de la Corxxrxzissio~x historiyte de la Dfa~enrxe. M. Jules-Albert Appert, administrateur de l'hôpital de Flers, ancien vice-président de la Société historique de l'Orne, officier d'Académie, décédé à Flers le 11 juillet ,lffl6, dans sa 72e année. Bibliophile et collectionneur, M. Appert était encore pour nous un ami de la première heure et un confrère toujours bienveillant. D'une grande modestie, il avait peu publié, mais nul ne connaissait mieux que lui l'ancien Passais nul ne l'aimait davantage. Sa perte sera douloureusement ressentie dans notre Société qui appréciait depuis si longtemps son amicale sympathie. A la dernière séance de la Sociétr; d'Agricctlttere, Sciences et A~·ts de la Sartlc.e, 111. le docteur Delaunay a rendu un


nouvel hommage not~e regretté archiviste, 11. Louis Brière. Très élégamment écrite, très bien pensée et présentée, ~a notice a été particulièrement appréciée.

Notre Société a fait, le jeudi 5 juillet, Sainte-Suzanne, Evron et Jublains, une intéressante excursion qui n'a pas obtenu moins de succès que les précédentes. Nous en publierous le compte-rendu dans la prochaine livraison avec plusieurs clichés photogrilphiques.

Le lendemain soir, fi juillet, la Société était mise incidemtnent en cause au Conseil municipal du Mans, et d'une observation rapportée par divers joumaux il semblait résulter que la Société «( eut inauguré le II1llsée archéologique en dehors de la Municipalité ».

Le Président a cru aussitôt de son devoir de remettre les choses au point, dans une lettre 11 1I. le Maire du Mans où il rappelait la présence, Li la du musée le2 août 1903, de qt~i~a_e membres de la Municipalité, dont 1\1. le Maire d'alors et ses deux adjoints.

À la séance suivante du Conseil, le 12 juillet, 11I. le Maire a bien voulu communiquer cette lettre à l'Assemblée et donner lecture d'une réponse de l\1. Déan-Laporte, dégageant en termes des plus courtois la responsabilité de l\1. Triger, dont « la science et la parfaite correction, ajoutait-il aimablement, sont depuis longtemps appréc.iées de nous ».

Dès lors, I'IIIWCIeIlt était Iiieii ulos, et ne pourra plus tard fournir de prétexte ~,t des critiques peu justifiées


telles que la Société en a eu à subir, en 1904, dans une autre assemblée.

Le dimanche 8 juillet ont eu lieu à Saint-Benoit du Niaiis de grandes fêtes pour la réception solennelle par Mgr de Bonfils d'une nouvelle relique de sainte Scholastique généreusement rendue aux catholiques du Mans par le Conseil de fabrique de Juvigny-Ies-Dames, gruce à l'intermédiaire dévoué et à la haute influence de Mgr Dubois, évêque de Verdun.

Cette belle relique l'humérus du bras gauche provient de la partie du corps de la Patronne LIu Mans, prise en 874, comme on le sait, par la reine Hichilde, femme de Charles-le-Chauve. Son authenticité est indiscutable, et sa restitution, peu banale après mille années apporte une récompense bien méritée au zélé curé de Saint-Benolt, M. le chanoine Pralon, au moment méme il poursuit, à la sueur de son front, la reconstruction de sa vieille église.

Le lundi suivant "16 juillet, l'heureuse initiative de notre confrère, M. l'abbé Didion, rétablissait à Fresnay la messe solennelle de la saint Bonaventure, supprimée en "190.Í il la suite d'incidents encore présents a tous les esprits. Bien que la cérémonie ait été exclusivement religieuse et privée du caractère public qu'elle offrait jadis, elle suffit dès maintenant pour renouer les anciennes traditions de la Fabrique de toiles de Fresnay, car la Bonaventure étant avant tout la fête de l'ancienne confrérie des tisserands, la messe en apparait, au point de vue historique, l'élément essentiel. Au cours de la cérémonie, NI. l'abbé niorancé,


aumônier du Prytanée, dont la vibrante et patriotique éloquence est toujours si appréciée, a prononcé un superbe panégyrique de saint Bonaventure. L'assistance était considérable et pas une place n'était demeurée vide dans l'église. Depuis longtemps connu par ses explorations archéologiques en Afrique, M. le médecin-major Rouquette, attaché aujourd'hui au 31" d'artillerie en garnison au Mans, vient de nous envoyer une savante description de sa plus précieuse trouvaille, une lanterne de bronze provenant du cimetière païen d'Ain-el-Hout. Cette lanterne, on peut le dire, est ulliLlue dans son genre on n'en trouve jusqu'ici qu'une reproduction en sculpture sur la colonne Trajane, dans une scène de navigation nocturne. M. le Dr Rouquette en conserve chez lui, au Mans, un très fidèle moulage, qui est bien l'un des plus curieux spécimens de l'antiquité qu'on puisse voir dans notre ville. Avec tous nos compliments pour sa découverte, nous prions bi. le docteur Rouquette de recevoir nos meilleurs remerciements.

M. C. Chaux, président de la Société des Scie~ace~, Lettrea et :lrts cl'~1~e~2, a bien voulu également nous adresser une étude sur une Brn~cclce des Yairatrailles, d'autant plus intéressante pour nous qu'on la trouve établie au XVIIe siècle à la ChapeIJe-Gaugain, près de Saint-Calais. D'après les nombreux documents inédits réunis par M. Chaux, cette branche se rattache en ligne collatérale au vaillant compagnon de la Hire, de Dunois et de Jeanne d'Arc, à Poton de Xaintrailles, et elle s'est perpétuée jusqu'au commencement du siècle. NI. Chaux donne d'abondants détails sur


ceux de ses membres qui ont habité notre région et son excellente notice devient par là même un nouveau chapitre de notre histoire locale.

M. Henri Chardon, dont l'infatigable activité est pour tous un exemple, a publié depuis quelques mois plusieurs travaux sur lesquels nous avons hâte de revenir.

Dans son Histoire religieo.se de tllarolles les Brarc,c (Mamers, G. Fleury et Dangin, 1906, un vol. in-8o) l'érudit auteur sort des sujets qui d'ordinaire ont sa préférenœ pour aborder par exception la monographie locale. Cette exception est motivée, il est vrai, par l'attachement tout spécial qu'il porte à sa ville de Marolles, et certes, nous ne pouvons que l'en féliciter. Si l'effacement complet, à Marolles, des souvenirs téodaux, n'a permis à M. Chardon de r3constituer que l'histoire religieuse, il y trouve, dans les vies de quatre curés distingués, de nouvelles pages bien dignes de sa plume. De plus, il les complète comme toujours par de multiples détails inédits les renseignements qu'il donne notamment sur l'ancienne église, le tableau du t3aptërrae de Clnz~is et le Sépnelcre de Hoyau, commandés par le curé Engoulvent, sur l'ancienne confrérie de saint Sébastien réorganisée par NI. Loriot de la Borde, sur la courageuse attitude de M. Marquis-Ducastel pendant la Révolution, offrent un intérêt qui dépasse de beaucoup les limites de la paroisse de Marolles.

Avec sa notice Voyages et voyageu~·s dans le Vfaine dit TV19 au. XXe siècle (Le Mans, Saint-Denis, 1906), :\1. Chardon change de genre une fois encore. Il se révèle adepte du Totrring-Clo.b, et nous fait faire une charmante (( course au clocher à travers le Saosnois en compagnie de personnages qui eurent 'été bien dignes d'être membres du Torwiag l'allemand Just Zinzerling, la marquise de Sévigné, Scarron, Roger de Gaignièrcs, l'ingénieur Michel, Mérimée, etc. Il est


juste toutefois de conclure que M. Chardon connait beaucoup mieux le Saosnois qu'eux tous réunis.

Chardon, cependant, ne saurait oublier longtemps cette histoire littéraire du Maine à laquelle il a tant contribué déjà et qui nous a valu de sa part de si curieuses communications.

Il y a quelques mois, donc, il nous révélait une nouvelle aeuvre « dramatique )) du ~VI~ siècle: « Quntre histoi~·es lrar per~sorzrzaiges srrr quatre évaragilea de l'advent à jozser yar les petits en faoas les quatre climenches dzsdit adt~ent. Corra posécs har maistr·e Fraraçois Briarzd maaist~·e des escolles clr. Sainct Benoist en. la cité du illarz.,y. (Le Mans, A.. de Saint-Denis, 1906, in-8.)

Cette oeuvre date de 1512 et se rattache encore à la littérature des Mystères elle vient compléter très heureusement les publications précédentes sur le même sujet et les divers recueils de uoëls ,ifa~2ceau·e la troisième histoire est particulièrement originale, et maistre Briand y a intercalé une /'arce, une dispute entre un aveugle et son varlet. Une farce dans un mystère une plaisanterie grossière dans une représentation édifiante peut paraitre bien singuJière à notre époque. ~L Chardon montre qu'elle était de règle au 1Vi" siècle, Au reste maistre Briand semble tout à fait de son temps ce n'était point un maitre d'école ~no~·ose, et l'ou ne devait pas trop s'ennuyer, en "1512, aux escolles de Sainct Benoist! Une fois de plus, M. Chardon nous prouve qu'il y a toujours du nouveau à apprendre.

Dès ses débuts en histoire, :~5. le docteur Delaunay s'était signalé par deux qualités maitresses, l'art de découvrir des documents curieux, et l'art de les mettre en c~~wre daus


des récits d'une agréable lecture. Le volume qu'il nous donne aujourd'hui, La Jlnye~z~ie ~·éaolutiomzaire (Laval, Goupil, ~1906, in-8~) confirme pleinement ces qualités. Sous forme d'épisodes détachés L'ize a~°restatin~a en 1791 Les brigand~ de Fo~ataine-Daniel; La levée de 179'2; La deic,ciècne Restazzr~ztinzz dazzs laVfaltenzze U~z howzne cle lettres, P.-D. Dubze.isso~z, 1~1. Delaunay achève de faire connaitre par des documents nouveaux et indiscutable; toute une série de faits caractéristiques, et il les fait connaître, non seulement avec la plus louable impartialité, mais avec une mise en scène qui ajoute à la vérité scrupuleuse du récit un intérêt souvent dramatique. C'est, à notre avis, qu'on nous permette de le dire, la vraie manière d'écrire l'histoire, surtout l'histoire de la Révolution, de lui attirer les lecteurs et par suite d'en vulgariser les enseignements plus utiles quejamais. Nos sincères compliments donc Ü notre distingué confrère, dont nous avons lu le nouvel ouvrage avec un très vif intérêt.

Un peu oubliée de l'histoire, la guerre de Trente Ans avait été jusqu'ici Incomplètement étudiée. Et cependant, elle offre au point de vue militaire un intérêt tout spécial, car elle a été, en quelque sorte, l'école de formation des armées modernes, et c'est dans cette lutte, conduites souvent par des hommes de guerre de grande valeur, que nos vieilles bandes ont commencé à prendre les qualités d'endurance et de cohésion qui devaient en faire l'admirable infanterie française d'autrefois.

11t_ le vicomte de Noailles a donc été particulièrement bien inspiré en appliquant à la période française de la guerre de Trente Ans ces aptitudes et ces talents d'historien militaire qu'avait déjà révélés son livre ~llari~rs et Koldaty fra~rçais eH A~nériqne. Plus mouvementés et complexes, les


événements qu'il étudie aujourd'hui offraient à ses recherches un champ d'action plus vaste, un terrain encore inexploré, fertile en découvertes et en observations techniques. Il l'a fouillé ce terrain ou mieux ce champ de bataille, avec un soin et une précision qui n'ont laissé dans l'ombre aucun détail, aucun document si malaisée que soit la tàche il a pleinemeut réussi ~i y faire revivre les hommes. Toutefois, le volume que nous sommes heureux d'annoncer, publié sous le titre d'Épisodes de la gneerne de Trea.te A~as, le cardinal de Lcc Valette (Paris, Perrin, 1906) n'embrasse encore que quatre années 1635 à 1639. M. le vicomte de Noailles a eu, en effet, l'excellente pensée de grouper des faits militaires, un peu arides peut-étre pour la masse des lecteurs, autour d'une figure singulièrement originale et curieuse. A la fois cardinal et lieutenant-général des armées du roi ce qui à première vue bouleverse toutes nos conceptions modernes Louis de Nogaret de La Valette méritait bien l'honneur d'occuper le centre du tabl~:au, mais il ne pouvait l'occuper que pendant la durée de ses commandements de 1635 à 1639. Au reste, ces années avaient été si bien remplies qu'elles ont déjà fourni à l'auteur la matière d'un gros et très intéressant volume de plus de 600 pages, les récits de campagne et les critiques des opérations s'entrecoupent de piquantes anecdotes, de traits de moeurs et des épisodes toujours variés de la pittoresque carrière d'un personnage qui fut, comme on l'a dit, ( cardinal sans avoir été prêtre, général sans avoir été soldat ».

Louis de Nogaret était le troisième fils du duc d'Épernon, premier mignon du roi Henri III qui l'appelait son fils aîné. Lancé très jeune à la Cour et destiné à l'Église, il fut avant tout un parfait courtisan. Simple clerc, n'ayant pas reçu les Urdres il était nommé en -1614 il l'archevêché de Toulouse, obtenait en 1G21 le chapeau de cardinal, de préférence ~l 11i. de Luyon qui avait été combattu par la jalousie


inquiète de Luynes, et présidait avec tact l'Assemblée générale ju Clergé.

Mais, s'occupant fort peu de son archevêché où il ne résidait jamais et qu'un autre administrait à sa place, il dut bientôt s'en démettre.

C'est alors que commence son rôle militaire et qu'en -1635 l'amitié de Richelieu lui donne le commandement d'une armée. En réalité La Valette avait toujours eu le goût des armes il était fort brave il avait du sang-froid et de la méthode. S'il n'avait été qu'un très médiocre archevêque, il fut un bien meilleur général.

En sa qualité d'ancien officier, initié lui-même à tous les enseignements de nos États-majors, M. de Noailles était mieux autorisé que beaucoup d'autres à rendre justice à La Valette, devenu lieutenant-général des armées du roi il l'apprécie en ces termes

« Sans apprentissage, entré trop vieux dans la carrière, Louis de Nogaret donna peut-être tout ce qu'on pouvait altendre d'un général improvisé ne possédant que des notions insuffisantes de l'art de la guerre. Son caractère, ses aptitudes, l'ardeur qu'il apporta toujours à l'organisation et à l'entretien de son armée, à disciplinar et à tirer le meilleur parti des troupes tant en vue de sa gloire personnelle que pour le service du roi, indiquent des qualités appréciables qui eussent pu se développer très avantageusement dans sa jeunesse. »

Ces appréciations, certes, sont méritées et n'ont rien d'exagéré elles témoignent même du souci constant de l'auteur de ne pas « grossir » son personnage, de s'en tenir à des jugements d'une exactitude rigoureuse.

Plus d'un lecteur sera tenté d'y ajouter, avec nous, que le cardinal de La Valette, en tant que chef d'armée, a fait honneur au Pays, et que M. de Noailles, lui, en tant qu'historien, a fait une œuvre non seulement très instructive, mais patriotique. N'est-ce pas, en effet, un enseignement


toujours salutaire et réconfortant de mettre en relief le privilège, traditionnel jusqu'ici, qu'avait notre race de produire à l'improviste, aux époques les plus diverses sous l'ancienne monarchie comme sous la Révolution de grands et vaillants soldats de transformer tout d'un coup en habiles généraux des cardinaux ou d'héroïques enfants du peuple `'

Quoi qu'il en soit, ce livre consacre de plus en plus la haute compétence du vicomte de Noailles dans les études de guerre, et son attrait est encore accru par des reproductions de portraits, d'autographes et de plans. Nous tenions il le présenter sans retard comme un chapitre vraiment neuf et important d'histoire militaire qui fera vivement clésit-er les suivants.

R. T.

Nous aVons le regret, au moment de trrminer cette chronique, d'apprendre la mort de M. Louis-Édouard1-itaiiislas Piette, ancien magistrat, officier de l'instruction publique, président d'honneur de la Société préhistorique de Frauce, décédé au chàteau de la Cour des Prés, pres Humigny (Ardennes), dans sa 80e année.

;\1. Piette s'était tout spécialement consacré aux études prél1istorique~ et avait acquis dans cette branche, si peu connue et si difficile, une notoriété très méritée. Il voulait bien adresser régulirrement ses savantes publications il la bibliothèque de la Société historique et archéologique du Maine, et on peut dire qu'il aura vaillamment travaillé jusqu'n sa dernière heure, car, en même temps que la lettre de décès, nous recevons encore quatre brochures de lui l~otiona contpl~»tentaires sttn l'A.tien; Classificatioaz des


sédirrae~zt.i forrnés daats les cazeanzes peazda~zt l'~tge dzr re~rue; Les écritacres de l'ïtge glyp(iqzze; Gz~auztre du Mas d':l=il et stcttzeette~ de dfeaztort.

Puisse le dernier souvenir que nous lui accordons susciter parmi nous quelque nouvelle vocation « préhistorique ». Si la Mayenne a déjà été un peu étudiée ce point de vue, la Sarthe est demeurée retardataire, et l'avenir peut y réserver quelques découvertes inattendues.

R. T.


lmp.l:.l·'leury


UN ACADÉMICIEN MANCEAU

LE COMTE DE THESSAN

INTRODUCTION

C'est en quelques pages seulement que nous esquisserons cette étude critique sur le comte de Tressan. Une histoire méthodique de sa vie nous eût bien tenté, mais elle nous eût entraîné à éprouver trop,longuement la patience du lecteur et le courage nous etlt peut-être manqué pour démèler jusqu'au bout l'écheveau d'une telle vie. Dans cette vie, pas d'unité qui nous serve de point de direction, pas de fait saillant pour élever un piédestal au comte de Tressan.

Cependant en étudiant intimement sa personne ses gestes, sa valeur technique, nous avons eu la satisfaction de reconnaître en lui un des derniers représentants de pure race de l'ancienne France.

Sa complexion psychologique est intéressante au plus haut degré elle se présente sous divers aspects et évoque plusieurs des grands problèmes qui ont passionné nos aïeux et qui nous occupent encore maintenant.

C'est donc sous forme d'analyses successives qu'il nous a paru préférable d'étudier le comte de Tressan c'est en le


suivant dans toutes les manifestations de sa longue carrière que nous tenterons de retracer la physionomie dc son caractère:

Nous souhaitons qu'une plume de talent lui édifie un jour un monument convenable. A défaut d'autorité, nous apportons au moins ici la sincérité de notre labeur et un hommage inspiré par un sentiment filial quiconque aime le grand pays qui le fait vivre, a le devoir de consacrer ses premiers efforts au culte particulier de la petite Patrie qui l'a vu naître.

1

L'HOMME

Louis-Élisabeth de La Vergne, comte de Tressan, est né au Mans, le 4 novembre 1705, de François de La Vergne et de Louise-Madeleine Brulart.

Il est mort à ~9 ans.

Il appartient donc tout entier au ~VIIIe siècle, mais en même temps il lui échappe, car il fut avant tout le fils de la tradition et, si à plusieurs reprises, dans le cours de sa vie, sa marche a souvent changé d'allure, c'est la tradition qui le guida et non la société dans laquelle il a vécu. Cette transmission dogmatique des principes lui semblait imposée par le culte de ses aïeux. Plus d'une fois, il lui fallut une force réelle de caractère pour ne pas briser cette conception, pour ne pas dire bien haut « Je suis l'ami de Voltaire, de Fontenelle, de J.-J. Rousseau, laissez-moi vivre et ne m'obligez pas à continuer une vie qui ne m'appartient pas »

Mais non, l'atavisme était puissant en lui il conservait, vigoureux, un sang dont l'analyse révèle plusieur~ degrés de fierté.


De Tressan ne se sentit quelqu'un que lorsqu'il acquit la« certitude qu'il descendait de plusieurs guerriers célèbres, qu'il était apparenté avec les Lévis-Mirepoix, les Montmorency, les La Trémoille, les La Tour du Pin, les Narbonne, les d'Hautpoul, les de La Fare, les de Marcieu il se fit de cette pléïade une solide cuirasse et consentit alors à aller de l'avant.

Entre temps, il se souvint que Jean de La Vergne, évêque et comte de Lod~Ye, était le fondateur de sa fami!le, que plusieurs gens de robe avaient honoré sa filiation et que les aînés n'avaient jamais failli d'accrocher leur durandal au côté.

Tout jeune, il comprit que sa ligne de conduite était tracée par ces précédents et que, malgré son caractère, il devait suivre le sillon. Il le creusa jusqu'au bout. Souvent la lierse leurta quelques rocs de granit, elle s'ébrécha, mais comme la pointe était toujours en terre et cachée à l'œil profane, on ne vit que le fer luisant et on conclut à la bonne trempe de l'outil.

On ne saurait mieux dépeindre l'homme qui lutta jusqu'à la dernière heure avec sa conscience, et qui, respectueux toujours de la tradition, laissa ses idées flotter au-dessus de son bonheur. La conscience resta maîtresse et ne cessa de gouverner l'enveloppe chez ce dernier des descendants de monseigneur de Lodève le comte de Tressan, qui ne fut jamais compris excita les envieux, à tel point, queVoltaire plusieurs fois le traita d'homme heureux, et ses contemporains le crurent.

II

SON CARACTÈRE

Depuis la mort du comte de Tressan maintenant encore on lui a tout refusé. On lui a refusé même sa


qualité de Manceau, ainsi que certains traits de caractère, moins imputables à sa personne qu'à son entourage. Nous avons dit que de Tressan était né au Mans ceci est un point important car il permet de constater son origine il n'est point Languedocien n'en déplaise à plusieurs. Malgré sa naissance accidentelle dans la ville des Cénomans, il n'en appartient pas moins à leur cité.

Il le sentait bien lui-même, lorsque, au moment d'aller s'asseoir sous la coupole, le nouvel immortel écrivait à (t ses chers compatriotes », les rhétoriciens manceaux Aimables petits-fils de ces chers compagnons

Qui jouaient avec moi sur les bords de la Sarthe. Il se rappelait cet oncle de Tressan, évêque du Mans, chez qui il avait vu le jour et qui prit soin de ses premières années. 11 se rappelait aussi le caractère dur de ce prélat, souvent poursuivi par la rumeur publique. Puis sa pensée se reportait plus loin vers le collège des Jésuites de La Flèche, vers le collège Louis-le-Grand, enfin vers la Cour où il était appelé par sa tante, la duchesse de Ventadour, gouvernante du jeune roi.

Ces tablaaue avaient formé son imagination son esprit naturel en fut fortement imprégné et il eut été difficile d'imposer une direction à ce pauvre voyageur, qui devait quêter de porte en porte la subsistance morale.

Par la force des choses son caractère se dessina très jeune, et se ressentit des cummotious de son inégale existence. Des morues cloîtres de La Flèche, de Tressan tomba dans la vie voluptueuse de Paris, et pendant longtemps, sinon jusqu'à sa mort, son inquiétude fut grande pour se soustraire aux responsabilités qui incombaient il son tuteur du palais épiscopal. Mais à peine était-il rassuré d'un côté que de l'autre l'orage éclatait, et la bourrasque trop forte emportait le jeune exilé qui, de par la volonté d'un grand


oncle prélat, s'était déraciné, et de par une autre volonté, celle d'un autre oncle également prélat, allait se lancer dans le tourbillon de la grande vie du ~VIII~ siècle. Monseigneur de Tressan, le grand aumônier, tenait un salon où se réunissaient les beaux esprits du siècle naissant. C'est que le jeune comte, qui avait alors près de dix-huit ans, fit la connaissance de l'abbé de Chaulieu, de Fontenelle, Voltaire, ilfontesquieu, Montcrif, Massillon, et, dans ce parterre de célébrités, le provincial ne put apporter que son grade de lieutenant-colonel et son titre d'ami du roi. Ce dernier titre, il est vrai, produisit bon effet. Voltaire l'en flatta et' n'osa plus tard retirer sa bienveillance à celui qui le possëdait quant à Fontenelle qui n'était encore rien, il s'offrit pour ètre son éducateur.

De Tressan prit goût à cette société brillante le luxe extérieur l'impressionna sa nature délicate des premiers temps s'effaça promptemenl; il crCtt aux prétentions de Fontenelle, à la curiosité de Voltaire; il s'égara dans les réflexions de 1\Iontcrjf sur l'imagination, et c'est ainsi qu'il se forgea un caractère, changeant il merveille. Assurément ce LaIlguedocien, né au Vlaus et vivant à Paris, avait un certain talent pour interpréter le savoir de ses connaissances. Parfois il voulut vivre la vie des autres pour cette raison on le critiqua plus que les autres on le traita de philosophe parce qu'il correspondait avec J.-J. P,ousseau on fit courir le bruit qu'il était athée parce qu'il fréquentait Voltaire, même à l'époque 011 celui-ci amenait un prètre chez IP'e de Fontaine-Martel pour la faire confesser, et, suivant son expression, « l'expédier dans les règles voulues ». Cependant, si la fatalité avait voulu que de Tressan vit le jour dans le XVIIIe siècle, comme nous l'avons dit, il n'était pas réellement de son siècle il remontait en esprit à deux ou trois cents ans en arrière et jamais son culte de la tradition ne lui permettait de se mettre définitivement


au pas avec les hommes qu'il fréquentait, malgré son désir de les imiter.

Il sentait d'instinct que tout autour de lui n'était qu'incrédulité et cosmopolitisme, il se rendait compte que la majorité des « penseurs )) était anti-dogmatiste et antinationale, et quoiqu'il eÙt soin d'égarer les soupçons, on l'avait déjà quelque peu malmené pour ses opinions religieuses à un moment de sa vie on lui reprocha même d'étre au service du roi de, Pologne, alors qu'il était exilé. Par instant il semblait maudit des profanes mais bientôt le calme renaissait et quelques compensations, usitées en tel cas, effaçaient les scrupules qu'il avait fait naître. C'est ainsi qu'il vécut toute sa vie incompris, à cause de ce caractère qu'il s'était faussé si jeune et qu'il conserva si vieux, comme une tige dont les racines restent vivaces en terre, malgré son extérieur de bois mort.

Les inégalités de Tressan n'empêchèrent pas ses contemporains de l'aimer. Pendant une partie de sa carrière on crut à la brusquerie du militaire plus tard après la retraite, à la rèverie du poète; jusqu'à sa mort, à l'originalité du caractère.

Plusieurs des grands hommes qui eurent une place marquée dans les siècles précédents ont été ainsi jugés. Au fait, c'était peut-être naturel tt l'époque, mais les temps ont marché et maintenant la vérité apparait sans voile. Le comte de Tressan n'a rien à en redouter, car dans ce XVIII" siècle où tous les vices ont conspiré pour se faire protecteurs d'une Cour avant d'égorger le dernier des Bourbons, n'est-il pas curieux de rencontrer une nature comme celle de Tressan qui sut résister à toutes les tempètes, qui vécut dans toutes les promiscuités politiques et galantes du temps, et qui en sortit sain et sauf.

C'est pour cela, sans doute, que le 1VIII° siècle en a été étonné c'est pour cela que le jeune XIX" siècle lui rendit des hommages; et qu'aujourd'hui le XX", qui goùte en


dilettante les écarts domestiques du règne de Louis XV, l'a complètement oublié.

lit

LE DIPLOMATE, LE SOLDAT

Le comte de Tressan, qui de tout son siècle fut l'homme universel par excellence, devait nécessairement faire un stage dans la diplomatie. Néanmoins son caractère loyal, bon enfant et tonjours ouvert à sa conscience, ne devait y faire que d'assez mauvaise besogne aussi durant tout0 sa vie de Tressan pratiqua-t-il très rarement l'art de parler pour ne rien dire.

Dès l'âge de vingt ans, en 1725, il fut attaché à une mission. Le roi Louis XV, qui avait toujours eu pour lui la plus grande sympathie, voulut qu'il figurât à la suite du duc d'Orléans chargé d'aller demander la main de Marie Leczinska, fille du roi de l'ologne, et de l'épouser en son nom. A vrai dire le jeune de Tressan ne prit pas ce rôle d'envoyé très au sérieux. Son imagination y tint seule sa place et ses souvenirs se reportèrent sur le faste des cérémonies, le déploiement du protocole, l'harmonie du luxe et des frivolités qui entourèrent les solennités.. La gravité diplomatique n'était pas de son ressort, et son impatience fut grande pendant les préparatifs du voyage. Eu revanche, il a laissé une série de notes sur les échos relatifs aux membres de la mission.

C'est le '19 juillet 1725 que furent signés les actes du mariage. Le maréchal de Villars, les comtes de Maurepas et de Morville, secrétaires d'État, représentaient le roi de France le comte de Tarlo et M. Dodun, contrôleur général des finances, étaient les mandataires du roi de Pologne. Le '.H du même mois les ambassadeurs de Louis SV pour


le roi Stanislas, le duc d'Antin et le marquis de Beauvau, partent pour Strasbourg, suivis du duc de Noailles (1). Le 27, les ambassadeurs arrivent à Saverne et font leur entrée à Strasbourg le 31, en grande pompe, escortés des carabiniers (2).

C'est le 29 juillet que le duc d'Orléans se mit en route et c'est probablement le même jour que le jeune de Tressan quitta Versailles. Après cette date, il est témoiu oculaire de toutes les fètes et il s'étend longuement sur les détails des cérémonies, du mariage.

Aux simples croquis et aux notes hâtives, succède alors un journal dans lequel il se plaît à tx-oder finement les sensations éprouvées au milieu de ce faste.

Quelques passages anecdotiques des plus attrayants, méritent une mention.

Le jour du mariage, tout d'abord, de Tressan se montre particulièrement enthousiaste.

« Le duc d'Orléan~ écrit-il, marchait eu tète, portait un manteau d'étoffe d'or avec un chapeau garni d'un bouquet de plumes, puis Marie Leczinska entre son père et sa mère. La jeune princesse était vètue d'un grand habit de cérémonie en brocart d'argent couvert de pierreries, et suivie de la corntesse de Linange, sa dame d'honneur.

» Après 1~n fort beau discours prononcé par le cardinal de Rohan, la future reine, escortée du roi et de la reine de Pologne, ainsi que le premier prince du sang, quittèrent leur place et s'approchèrent de l'autel.

» Le grand aumônier ayant revêtu ses habits pontificaux, bénit l'anneau et les treize pièces d'or et ayant demandé au duc d'Orléans s'il prenait, au nom de Sa Majesté très Chrétienne, la princesse Marie pour épouse et à cette princesse Il) Le duc de Noailles était commandant aux gardes du corps et devait escorter la Reine après son mariage.

i,?) Soucenirs du con:te de Tressan, par le marquis de Tressan.


si elle prenait pour époux le roi Louis XV, roi de France et de Navarre, leur donna la bénédiction, et la cérémonie se termina par un Te De~snx. A ce moment, tous les canons de la ville tonnèrent à la fois.

» Après la cérémonie j'eus l'honneur d'être présenté à la neine en même temps que les onlciers de sa maison par la surintendante, Mlle de Clermont.

)) Ce fut dans cette solennité que je fis pour la première fois ma cour cette auguste princesse, dans la société de laquelle j'eus l'honneur d'être admis pendant trente ans. )) Pendant toute la durée du voyage, il continue ces notes d'un impressionisme parfait et parfois nerveux.

Cependant, le comte de Tressan ne sembla prendre aucun goût au métier de diplomate, et dès sa rentrée en France il s'empressa de reparaître à Versailles et à Paris, dans les salons oit il était en relations avec les personnes les plus en vue de l'époque, MM. d'Armenonville, le marquis de Surgères, le comte de Crussol, le marquis de Lorneuil, Duclos, de Caylus, Ni,~lme, de Senlis, de Surgères, de Crussol, d'autres encore qui formaient le Gotha de la noblesse, l'élite des gens de lettres et de science. Son voyage n'avait pas altéré son caractère, il revenait avec le même esprit vif et saillant, prompt au madrigal et à la réplique, toujours recherché comme un homme de grand savoir et un courtisan heureux.

En fait il ne lui resta rien de cette mission que beaucoup de gens de carrière eussent utilisée comme un fructueux début.

Pourtant les extériems étaient trompeurs, M. de Chauveliti (1) s'y laissa prendre il vit en de Tressan l'homme aimable et savant, et le pria d'accompagner en Italie M. de Bussy, nommé ambassadeur à Parme. Dans cette seconde (1) A cette époque M. de Chauvelin était garde des sceaux et ministre des affaires étrangères.


phase de sa carrière diplomatique, de Tressan, plll.~ âgé de dix ans, fut aussi brillant que la première fois, mais il se désintéressa plus encore de toute situation, de toute affaire sérieuse, se contentant de se présenter à la Cour de VictorAmédée de Savoie, avec qui il était un peu parent et chez qui il reçut l'accueil le plus bienveillant (1). Son séjour en Italie fut du moins très agréable. Flatté par les princes de Savoie accueilli avec distinction par la duchesse de Modène, de Tressan trouva même dans le pape Clément XII un ami de famille. En effet, alors qu'il n'était encore que Ms~ Corsini et nonce en France, Clément XII avait beaucoup connu l'évêque du Mans et l'archevèque de Rouen dont il avait gardé le meilleur souvenir. Le comte de Tressan raçonte dans ses bTérraoires qu'étant Rome lors de la mort de son oncle, Monseigneur de Rouen, le pape lui dit dans une audience particulière « J'avais projeté de faire votre oncle cardinal, et si vous voulez entrer dans l'état ecclésia5tique, je disposerai tout de façon que vous puissiez un jour parvenir à cette dignité. )) De Tressan déclina cette proposition qui lui ouvrait une nouvelle carrière il lui sembla ne pas étre digne de revêtir la pourpre cardinalice et ce jour-là fut peut-étre le seul où il montra de la diplomatie.

Son séjout en Italie lui procura en outre de douces satisfactions intellectuelles. Son activité trouva un champ vaste à exploiter, son goût pour les lettres s'alimenta des plus saines joies, quand, dans la bibliothèque vaticane, il entreprit la lecture des manuscrits provençaux, et c'est qu'il conçut le projet de son immense travail sur les romans de chevalerie.

Ce furent d'ailleurs les seuls fruits de son passage à l'ambassade. L'ennui que lui causaient les sombres chan11) Un prince de la maison de Savoie avait épousé une demoiselle Isabeau de la Vergne dont la famille avait émigré pendant la Ligue.


celleries, les pertes de famille qu'il éprouva ébranlèrent sa santé il tomba malade et fut forcé de rentrer en France, recherchant comme cure les salons hospitaliers où il régnait avec ôràce.

Sa carrière officielle de diplomate se termina ainsi, sans faits, sans résultats, sans autorité. Au reste, de Tressan ne sut jamais dénouer les intrigues, sa franchise lui nuisait quelquefois et, sans son intimité avec le roi, sa situation se serait bien souvent ressentie des petits -couplets composés sur les célébrités du moment. Il n'avait point ce talent de créer des affaires délicates en sa faveur.

De même que son ancien compatriote et confrère, l'académicien de La Chambre, il eùt fait un mauvais politique. Nous avons tenu à montrer d'abord quelle fut la situation du comte de Tressan dans une phase de sa vif' où un homme d'autre caractère aurait eu le droit et le moyen d'établir sa personnalité.

Étudions maintenant sa carrière militaire.

On se demandera peut-être pourquoi nous avons suivi cet ordre et rejeté notre étude sur le soldat, dont le rôle fut plus considérable, après le croquis du diplomateC'est pour une simple considération chronologique. Le comte de Tressan ne fut que fictivement soldat avant de représenter son maitre à l'étranger: en réalité il ne prit du service qu'en -17'27, deux années après avoir été envoyé en mission.

De Tressan fut-il vraiment un soldat `?

La réponse est embarrassante car elle dépend du point de vue auquel on se place.

Si on se pose-sur le terrain technique en envisageant le relief qu'eÜt le comte de Tressan, qui parvint à de très hauts emplois, on ne rencontre aucune preuve saillante de ses aptitudes militaires. Ses écrits nous révèlent, d'ailleurs, que le métier lui était imposé par les circonstances et que sa


haute intelligence se trouvait trop à l'étroit sous la casaque des gardes du roi. Par le fait, c'est l'exemple de ses aïeux qui l'avait forcé à embrasser la carrière militaire. Dès sa jeunesse, malgré son esprit naturel qui eÙt pu l'entraîner dans une voie nouvelle, il avait obéi à la loi de la descendance, et comme héritier du La Yergne de Jarnac, l'ami de Coligny, du La Vergne d'Ivry, le compagnon du bon roi Henri IV, le comte de Tressan n'avait cru pouvoir se dispenser de continuer les traditions de ses ancétres. Ce fut toute son ambition jamais sa plume ne se mit au service de son état (1), mais son épée, d'une bonne trempe, fit merveille dans différentes actions et à délilut de la science militaire, le courage au combat consacra sa réputation il suffit même à lui tresser une couronne de gloire. De Tressan fut donc un bon soldat, un courageux, mais en somme il ne fut que cela. Il paraissait se désintéresser des choses de la guerre, il réprouvait les scènes de carnage, il maudissait intérieurement les auteurs de ses exploits, et parfois il semblait regretter de s'être abandonné à cette vie de hasard. Tout au moins, il le laissait deviner lorsqu'il écrivait à Voltaire

Mais l'homme est-il toujours tout ce qu'il pouvait être Dès l'atge de quinze ans, je ne fus plus à moi.

Élevé dans la Cour de mon auguste maitre,

L'aimer et le servir fut ma suprême loi.

Tout Français se doit moins qu'il ne doit il son Roi. Et il se découvre encore plus lorsqu'il dit

Gémissant d'un fléau qui dévaste la terre,

J'ai souvent combattu, trois fois j'ai vu la guerre. Non, de Tressan, n'était pas pour être lieutenant(1) A l'exceptiou de quelques articles parus dans l'P;~ic~ciopédie.


général si les circonstances fortuites n'étaient pas venues le saisir dès son berceau, nous aurions peut-étre eu plutôt en lui un savant, capable de révolutionner son siècle et d'enrichir la science d'importantes découvertes.

C'est treize ans que le futur immortel fut admis dans l'intimité de Louis et appelé il partager avec lui l'euseignement de M°~u de Veutadour ('1). Sa bonne humeur, sa grâce et son esprit séduisirent son royal condisciple qui, après un ah de présencp. il la Cour, le fit nommer lieutenantcolonel, le 9 février 1719. Or, il partir de cette époque, de Tressan se plut surtout à satisfaire ses goûts pour la poésie et les belles lettres, laissant un peu de côté les charges etles prérogatives de son grade.

L'amitié du roi lui ménagea cependant un rapide avancement. Le '1:3 octobre 1722 (2), il était mestre de camp réformé à la suite, du régiment d'Orléans c'est avec ce titre qu'il partit pour Stra~bourg en mission diplomatique. Lorsqu'il revint, il se remit de préférence aux études de littérature tout en accomplissant pour la forme ses devoirs militaires.

Mais le 2 juillet 1727 il prenait régulièrement du service, et sollicitait l'autorisation de lever une compagnie dans le régiment de Buugard (3).

Bien que l'obligation d'accompagner M. de Bussy en Italie ne lui eùt permis d'exercer que fort peu de temps son commandement, il le reprit presque aussitôt il son retour de Rome, dès que sa santé fut rétablie, et reçut l'ordre de se rendre avec sa compagnie sur les bords du Hhin oit la guerre de la succession de Pologne réclamait ses services.

Il) Ainsi qu'il a été fait mention plus haut la duchesse de Ventadour, précepteur du Roi, était la tante de ~1. de Tressan.

(21 La Clermwlopie officielle du r~eüaistère de la Gnenre accuse la date citée ci-dessus, par contre M. le marquis de Tressan donne la date de 172:3 nous supposons une erreur de chiffre.

(3) Plus tard le régiment d'Aumont.


La première partie de cette campagne fut un peu effacée pour de Tressan dont la santé était encore chancelante. Il n'eût pas la force de rester d'une manière permanente à la tête de ses soldats et dut résilier ses fonctions actives contre celles d'aide de camp du duc de Noailles.

Dans la seconde partie de la guerre, en revanche, il se distingua tout particulièrement aux principales affaires, car son tempérament robuste et son amour pour le roi avaient eu raison de sa santé. Il décrit dans ses ~ilPriaoires ses occupations et ses sensations de campagne il le fait dans le style naïf que nous lui connaissons, avec une modestie et des sentiments qui étonnent vu l'esprit de l'époque. On se demande comment la critique même doit juger le récit suivant de la bataille ou plutôt du siège de Philippsbourg l( J'assistais également, écrit le comte de Tressan, au siège de Philippsbourg, et je pus me convaincre dans ce siège que les héros comme les autres hommes sont sujets a la caducité. Il n'y avait plus dans l'armée ennemie que l'ombre du prince Eugène il avait survécu à lui-même et il craignait d'exposer sa réputation, si gravement ébranlée, au hasard d'une dernière bataille.

» Un jeune homme audacieux aurait attaqué nos retranchements qui n'étaient qu'à peine ébauchés lorsque l'armée vint à Wisentlial, nos troupes étaient si proches de Philippsbourg que la cavalerie n'avait pas assez de terrain pour se mettre en bataille entre la ville et le camp sans souffrir énormément de la canonnade. Elle n'avait qu'un pont de communication sur le Rhin, et, en cas qu'on eût emporté le retranchement, toute l'armée, qui n'avait point de retraite, aurait péri infailliblement. Nous n'en prîmes pas moins Philippsbourg.

Le jour où le maréchal de Berwich fut tué à la tranchée, je fus blessé en même temps que mon ami de la Faye. C'était un homme de beaucoup d'imagination et d'esprit; il était fils de M. de la Faye, capitaine aux gardes,


homme d'un vrai mérite, et d'une mère aussi vertueuse que belle. Cependant ils furent indignement traités dans les fameux couplets attribués à Rousseau.

» Le. pape Clément XII des princes de Corsiny, qui avait été très longtemps nonce en France, me demanda des nouvelles de toute la famille de la Faye avec le plus grand intérêt, en 1733, et m'en fit l'éloge. Le frère de M. de la Faye était très riche, très aimable et faisait des vers charmants, tenait une très bonne maison et vivait dans la meilleure et la plus haute société. Ce même de la Faye qui fut blessé et tomba dans mes bras au siège de Philippsbourg, a été tué depuis, à la tète d'un régiment d'infanterie au siège de Gênes.

» Une autre perte bien sensible pour moi est celle de M. le marquis de Charost, mon ami intime, qui fut tué en 1735, à Clausen, à la tête du régiment de la Couronne, et, ce qui doit être une leçon éterneHe pour les militaires dans les affaires de nuit, il fut tué par une décharge de son régiment à la tète duquel il arrivait pour l'empêcher de tirer ('1). »

Que dire de ce récit ou plutôt que dire du soldat luimême quand, dans une page, tant d'idées diverses se succèdent Le début semble teinté de philosophie, puis la critique parait s'annoncer et on peut s'attendre à l'exposé de quelques grands principes de tactique, mais il n'en est rien. Tour à tour les impressions intimes joyeuses ou poétiques, se suivent et se mélangent, et la fin arrive sans conclusion. Néanmoins, il faut insister sur l'esprit de ce singulier journal de guerre, ne mt-ce que pour faire remarquer une fois de plus combien son auteur fut toujours modeste en ce qui touchait à ses exploits, et que jamais la pensée ne lui est venue de faire valoir sa bravoure. Après la campagne, de Tressan revint à Versailles, et (1) So«uerirs dit co»ate de Tressan.


suivant son habitude, alla demander à ses amis de lui faire oublier l'ennui des camps et des casernes. Son humeur lui attira alors des désagréments il eut l'audace de chansonner des ministres et des dames de la Côur et fut mis en disgrâce, tel que peut l'être du moins un ami du roi. La disgrâce en effet ne parait guère sérieuse. Le 1'1 mai 1735, de Tressan entrait dans les gardes du corps, compagnie de Noailles, avec le grade de t~oisième enseigne. Cinq ans plus tard, le 101' janvier 1740, il était nommé brigadier comme second enseigne de la compagnie. Il resta trois ans seulement dans ce grade, et en décembre 1744, il recevait le brevet de maréchal de camp (~1).

Malgré les divergences soulevées sur ce point de détail (2), ce fut en qualité de brigadier que de Tressan assista aux sièges de Mérius, d'Ypres, de Fribourg et de Furnes, et il ne fut véritablement reconnu comme maréchal de camp qu'au mois de décembre 1744 (3). Quoi qu'il en soit, cette nouvelle campagne lui procura l'occasion de se distinguer encore dans plusieurs rencontres, il prit part à la bataille de Fontenoy et assista aux sièges de Tournay, d'Oudenarde, de Mons, Charleroy, Namur, ainsi qu'à la bataille de l\.aucour. A Fontenoy, le comte de Tressan se créa une situation exceptionnelle et eùt en quelque sorte les honneurs de la journée.

Il raconte lui-même ses impressions en ces termes « J'avais couché, la veille de la bataille, dans une grande (1) Cf. Ciero~~ologie officielle dit ministère de: la Guerre (Liste des maréchaux de camp, lieutenants-généraux et maréchaux de France jusqu'en 1i89.)

12) C'est par erreur, croyons-nous, que le marquis de Tressan a laissé croirè qu'il servit en qualité de maréchal de camp dans la première partie de celte campagne. r1. C. de la Jonquiére dans son remarquable travail sur l'drmée à l'~lcadérr~ie, remet les choses au point. Le marquis de Tressan reconnait du reste son petit écart lorsqu'il écrit que le comte de Tressan, il la bataille de Fontenoy, se mit à la tête de la brigade dont il avait le commandement.

(3) Cf. L'Ar~née à l'Académie, par C. de la Jonquière (Perrin 489'~).


salle où 11. le maréchal de Noailles avait bien voulu me recevoir près de ses deux fils.

» Dès quatre heures du matin, nous fûmes chez le Roi qui achevait de se botter « Vous voilà bien paré, me dit mon maitre en me voyant en habit de maréchal de camp tout neuf. sire, répondis-je, je compte bien que c'est aujourd'hui un jour de fète pour Votre Majesté et pour la nation.

» Pendant la bataille, le Hoi m'envoya porter différents ordres et rallier les troupes d8 cavalerie que je menai aux carabiniers et qui s'y conduisirent avec valeur.

» Le Roi, inquiet de la position de Fontenoy, m'y envoya. Ce village était défendu par la brigade du Dauphin commandée par le duc de la Vauguyon, mon ami intime, et par le comte de Choiseul-111euse.

» le rendis compte au Roi du bon état de ce poste quoiqu'il fut foudroyé par trois batteries ennemies, je l'assurai que les ennemis n'osaient S'En approcher à la portée de fusil, et que lorsqu'ils avaient osé une seule fois dépasser des maisons brïrlées et s'en approcher à trente pas, le feu de Fontenoy fait Li propos leur avait détruit trois compagnies de grenadiers, qui formaient la tête de la colonne et que j'avais vu couchés sur la tefl'8 à cette distance des retranchements.

)) En revenant rendre compte au roi, je passai à la tète du régiment de Noailles NI. le comte de Noailles, aujourd'hui maréchal de Mouchy, était il la tête de cette division il était couvert de sang, il me rassura par son air gai et me dit qu'un cavalier tué d'un coup de canon était tombé sur lui. Je ne vis que trois escadrons et je n'osai demander où était le quatrième, lorsque j'appris qu'il avait été détruit presque en entier dans le centre de la colonne anglaise où il avait pénétré dans une charge vigoureuse du brave régiment de Noailles. LX. 8


» Le Roi vint à la tète du régiment de Dillon et dit au dernier des quatre braves frères qui, tour à tour avaient commandé le régiment et dont le troisième venait d'être tué « Monsieur de Dillon, je regrette bien votre frère, il était digne de son nom. Je vous donne son régiment. » Ces paroles restèrent gravées dans le coeur de cet intrépide Nédy Dillon qui, depuis, s'est fait tuer à Lauffeld, à la tête de ses grenadiers, dans le second retranchement des ennemis. Ce prince hoaora plusieurs officiers de grâces et de propos honorables, plus chers aux Français que les grâces mêmes le soir de ce grand jour, il m'accorda de servir désormais toujours en ligne et de m'employer paix et guerre dans mon grade (1). »

Ce récit substantiel est par fait de forme et de simplicité il n'a qu'un défaut, la discrétion dont il entoure les actes de l'auteur. La conduite du comte de Tressan fut beaucoup plus brillante qu'il ne le fait supposer. Pendant une partie de la bataille, il fut de service auprès du roi en qualité d'aide de camp. Plusieurs fois il s'exposa en portant des ordres au nom de son maitre. Bien mieux, un moment de l'action, lorsque MM. de Choiseul et Biron étaient engagés dans le village de Fontenoy, de Tressan voulut se mettre à la tète de la maison du roi, comme le plus ancien des lieutenants.

Où allez-vous de Tressan, lui dit Louis XV, n'êtesvous pas de service près de moi ?

Sire, répondit le comte, permettez-moi de saisir l'occasion d'acquitter ma reconnaissance et mon zèle.

Revenez donc bientôt me donner des nouvelles. Sire, ce seront celles de la victoire.

Ce furent en effet les nouvelles de la victoire que le comte de Tressan rapporta, avec une gerbe de lauriers. « Mes amis, il faut sauter commanda-t-il gaiement à (1) Souueni~~s du cornte de Tressan.


ses hommes qui avaient devant eux une triple ligne de baïonnettes et de piques. Quand il revint vers le roi, il était blessé au bras et a la cuisse.

Vous m'avez bien servi, mon cher Tressan, lui dit le monarque, que ferais-je pour vous?

Sire, répondit le blessé, je supplie Votre Majesté de m'accorder de servir toute ma vie en ligne selon mon grade. Je vous reconnais bien là, je vous le promets.

Telle est la vérité sur le rôle du brave officier à la bataille de Fontenoy.

De Tressan passa les huit jours qui suivirent cette action au château de Choisy, c'est qu'il composa une de ses rares poésies épiques. Elle était dédiée à NI. de Voltaire et chantait les louanges du Roi la pensée en était plus contrainte que lorsqu'il écrivait à Le Sellier

Quant tu peins l'horreur d'un naufrage, Je vois au milieu de l'orage,

Les feux, les rochers et la mort

J'y vois l'image de la guerre

Qui vient de ravager la terre,

Et je te suis dans ton transport.

Ironie mystère de la pensée Confessions imprudentes qui parfois s'échappaient des lèvres du poète, alors que repoussant les souvenirs de l'épopée sanglante, il chantait les bienfaits de la paix, l'épée au côté.

L'année 1746 fut pour de Tressan une époque de grande activité militaire. La conspiration Jacobite prenait d'importantes proportions en Angleterre. Le roi de France voulait soutenir Charles-Édouard et il chargea de Tressan de se mettre à la disposition du prétendant. D'après le plan des opérations, le comte devait commander l'avant-garde débarquer à Douvres, s'emparer du château et y attendre l'armée française en tenant l'ennemi en échec afin de laisser


libre la ligne de Londres. Avant le départ, Louis XV fit mander le, comte de Tressan et lui dit « Vous serez lieutenant-général à Douvres. »

C'est avec cette perspective que de Tressan se mit en route pour organiser sa petite armée mais les Anglais, au courant des faits et gestes de l'escadre de Ni. de Roquefeuille, mobilisèrent leur flotte en vue des côtes de France et rendirent tout débarquement impossible.

Sur ces entrefaites, le prince Édouard débarqua en France et la mission du comte de Tressan prit fin. Cependant il n'en perdit pas tous les avantages quelques mois plus tard, le 10 mai 1748, il était nommé lieutenant-général et recevait le commandement militaire du Boulonnais. Dans ce poste il eût à s'occuper de différentes diftlcultés survenues entre l'autorité civile et l'autorité militaire. Viauvais diplomate, de Tressan ne sut pas aplanir ces obstacles et voulut y apporter la promptitude du coldat. A la suite d'une contestation avec les délégués de la ville, M. d'Aumont, alors gouverneur, rendit un arrêt défavOl"3.ble aux vues du commandant aussitôt, celui-ci reconnaissant loyalement son immixtion dans les questions hors de sa compétence, n'hésita pas à abandonner la partie et se récusa dans plusieurs lettres pleines de bon sens et d'honnêteté qui lui attirèrent l'estime et l'amitié des personnes en rapport avec lui. Son caractère ne pouvant se plier à la tension morale qu'exigent des négociations délicates, le comte se retourna vers Paris et réclama un autre poste plus conforme à ses aptitudes. Il pressentit à ce sujet de Moncrif qui en parla à Mme la duchesse de Villars. La duchesse de Villars en communiqua à M. d'Argenson, mais la réponse obligea le comte de Tressan à rester à Boulogue sous peine de se voir supprimer son commandement. Pendant ce séjour forcé il se remit alors à composer des pièces de vers, à correspondre avec Voltaire et les beaux esprits de sa connaissance. On a cru voir dans cette intimité avec les philosophes


l'une des causes de son éloignement de la capitale. Il est vrai que depuis l'affaire de Fontenoy il avait un peu perdu les bonnes grâces du roi. En tout cas, il se consola de ces mauvaises fortunes en travaillant à son lifémoire sttr le Fltticle élect~~i~ltte.

La défaveur clui semblait ~'attacher il ses pas n'était pas aussi grande qu'on pouvait le croire. Elle provenait surtout de son caractère, et son caractère était parfois irascible, armé de piquantes flèches toujours bien dirigées- Au moment où ses amis et amies tentaient de le faire revenir a Versailles, sa verve s'exerça sur 1\pue de Châteauroux Le roi en conn~.ut un \'if dépit et, quelques jours après l'apparition de la chanson, le -} novembre 17 ~9, l'auteur fut envoyé à Toul, comme gouverneur du Touloi et de la Lorraine. Par compensation dans ce poste éloigné de la Cour et de ses frivolités oit renvoyait le maréchal de Belle-I:;]e, il avait la joie de se retrouver auprès du roi Stanislas dont let sympathie et l'intimité devaient lui procurer les plus belles années de sa vie.

La nomination de 1\1. de Tressan il Toul marque le début d'une seconde étape dans sa carrière militaire. En effet, le comte de Tressan vécut à Toul une vie toute différente, s'appliquant remplir ses devoirs de soldat avec. un zèle remarquable et inconnu chez lui jusqu'à cette époque.

Déjà sans doute, sa vaillance avait été nettement établie, mais des réserves avaient été faites sur sa valeur technique- Or, en prenant contact avec cette cour de Nancy où Stanislas éclipsait quelque peu les vertus de soit royal gendre, de Tressan se sentit un autre homme.

Non-seulement il reçut de Sa llajesté Polonaise le titre de grand maréchal du palais, mais de son côté le maréchal de Belle-Isle traça au nouveau gouverneur une ligne de conduite qui le rendit tout heureux: « Le commandement


de la Lorraine, écrit-il dans ses Sutsvenirs, me permit de satisfaire pleinement le goût que j'ai professé, durant toute ma carrière pour la vie active. Je parcourais la province pour en rectifier moi-même la carte, pour en visiter les mines, les productions. Je m'appliquai encourager l'étude de l'histoire naturelle par mon exemple et mes conseils. » C'était, comme on le voit, une existence nouvelle et ses chefs s'étonnaient des qualités qu'elle révélait M. d'Argenson lui-même, à plusieurs reprises, fit espérer des jours meilleurs à l'exilé. Sa vie était désormais plus stable, partagée entre ses occupations militaires et ses études littéraires. Une satisfaction particulière lui fut en outre réservée c'est celle de prononcer un discours à l'inauguration de la statue de Louis XV à Nancy, le 26 novembre 1755. De Tressan s'appliqua à tresser une couronne de lauriers à celui qu'il avait tant aimé et qui lui avait donné des preuves d'affection, car il ne le rendit jamais responsable de ses disgrâces.

Malheureusement, la tranquillité du comte de Tressan ne fut pas encore de longue durée en Lorraine, et ses discours lui attirèrent de nombreuses tracasseries. On accusa parfois le P. Menou de conduite itidi-ne à son égard, mais, à coup sûr, les philosophes renchérissaient et aggravaient la situation du gouverneur.

Le roi Stanislas, l'unique et vrai soutien de Tressan, le dédommageait un peu de ses infortunes la disgrâce n'en devenait pas moins de plus en plus apparente.

Frédéric de Prusse tenta adroitement de profiter du moment. Après avoir réussi à s'entourer de bon nombre de philosophes obligés de s'éloigner momentanément de France après avoir comblé de ses faveurs d'Alembert, Diderot, Voltaire, pour ne citer que les principaux, le grand Frédéric voulut aussi s'attacher le comte de Tressan. Il le nomma membre de l'Académie de Berlin, puis il le fit pressentir par Maupertuis sur son consentement à entrer


dans l'armée prussienne avec le même grade et les mémes prérogatives qu'il avait en France.

Tout aussitôt, la conscience de Tressan se révolta; son indignation fut son comble et se traduisit par ces paroles éloquentes, dignes des gentilshommes d'autrefois « Sire, Votre Majesté me console de mes malheurs, mais, dussent-ils encore s'accroitre, je suis Français, je me dois au Roi mon maitre et à ma patrie. Vous ne m'honoreriez plus de votre estime, si je cessais de lui être fidèle. » Frédéric comprit au moins les sentiments qui inspiraient le brave soldat et lui continua sa bienveillance.

En France, cette réponse eùt une grande répercussion, et les philosophes eux-mèmes accablèrent d'éloges le gouverneur de Lorraine. Jean-Jacques Rousseau, pour sa part, fit valoir en termes élevés les mérites du disgracié. « Permettez-moi, lui écrivait-il d'exhorter les jeunes officiers à profiter de votre exemple, à se rendre dignes de vos bontés et à perfectionner sous vos yeux les qualités qu'ils vous doivent peut-être et que vous attribuez à leur éducation. Je prendrai volontiers pour moi, quand vous viendrez à Paris, le cons~il que je leur donne, ils étudieront l'homme de guerre, moi le philosophe notre étude commune sera l'homme de bien et vous serez toujours notre maitre. ) »

D'Alembert et Voltaire s'unirent à leur collègue pour l'acccaha~~enze~at dit ~zouice. Voltaire badinait spirituellement sur la situation militaire du comte de Tressan et il lui écrivait en 1756 « Je ne me flatte pas que le Gouverneur de Toul vienne jamais manger des truites de notre lac (1), mais si jamais il en avait la fantaisie, nous le recevrions avec transport, nous compterions ce jour parmi le plus beau de notre vie ».

» Vous avez l'air, Messieuri les lirutenants-généraux, de (1 ) Vollaire avait loué une propriété à Morimond, sur le lac de Leman.


passer le Rhin cette année, plutôt que le l\Iont-Jura, et j'ai peur que vous ne soyez à Hanôvre quand je serai ;J Plombières. Devenez maréchal de France, passez du guuveruement de Toul à celui de Metz, soyez aussi heureux que vous méritez de l'ètre, faites la guerre et écrivez là. L'histoire que vous en ferez vaudra certainement mieux que la rapsodie de la guerre de "1741 qu'on met impudemment sous mon nom. »

De Tressan agréait toutes ses flatteries elles lui faisaient oublier les injustices dont ses épigrammes et ses fréquentations le rendaient victime.

Cependant, une nouvelle disgrâce acheva de le mettre dans une situation critique.

La vie brillante de la cour de Lunéville et les dépenses imposées par les exigences d'un commandement important avaient altéré l'état des tinances du général. Or, en 1764, au moment où il eommenç,ait il prendre le dessus le ministre Choiseul lui supprima le traitement de lieutenantgénéral que le maréchal de Delle-Isle lui avait accordé. Cette nouvelle lui causa une grande peine en diminuant sensiblement ses revenus. Dans cette épreuve il fut secouru moralement par le roi Stanislas qui lui apporta toujours, en toutes les circonstances, l'appui de son amitié. Voulant malgré tout servir le roi de France, de Tressan n'accepta pas les nouvelles propositions qui lui venaient de l'étranger et il se contenta de se retirer définitivement près du roi de Pologne.

Ce fut la dernière marche du calvaire. De Tressan méritait mieux comme soldat ses états de service devaient effacer à tout jamais les rimailles imprudentes, faites dans un moment où la cour glissait sur la pente fatale. Comme le roi s'était laissé conduire par le parti des femmes, de Tressan comprit il fut noble et se résigna.

Il vendit ses objets inutiles pour satisfaire il l'instruction


de ses enfants et parut heureux lorsque le roi lui accorda une pension sur sa cassette en atte¡;dant des jours meilleurs. Ils vinrent en effet ces jours meilleurs, mais ce ne fut point pour couronner le demi-siècle de sa vie militaire. Plus tard, dans sa retraite, il n'en sentira pas moins, à diverses reprises encore, son cceur battre aux souvenirs des champs de bataille- Une première fois, lorsque son fils aîné, colonel sans avenir, qui subissait le contre coup du caractère de son père demandera du service dans l'armée américaine lors de la guerre de 1'liidépeiidarice. Puis, en 1780, quand le roi fera une promotion de maréchaux et qu'il n'y sera pas compris.

De Tressan, du l'este, murmura faiblement (1 Ma carrière, dit-il, avait commencé d'un~ manière bien brillante, elle est finie aujourd'hui. J'ai négligé la fortune, mais j'ai servi avec honneur. »

Sa plainte s'arrêta sur ces mots.

Une dernière fois son cœur tressaillit d'un souffle chuuvin. Presque u la veille de sa mort, il se plut à évoquer les ehamps de bataille les silhouettes de ses compagnons d'armes, les de La Vauguyon, de Cliarrost, de La Faye, de Calvière tous reçurent ses hommages émus, ses témoignages d'amitiés éprouvées. Il prit plaisir aussi à faire revivre ses campagnes de 1733 et 173~, rédiger des notes sur les batailles auxquelles il avait assisté, il laisser flotter ses pensées sur ce passé de gloire et de jeunesse. Ce furent ces sentiments qui dominèrent ses derniers moments et ils ne le quittèrent qu'au tombeau.

En résumé, la carrière militaire du comte de Tressan fut vaillante, mais, comme sa vie entière, elle n'eût point d'unité. Son but était de servir son roi et il n'eût d'autre préoccupation que d'être courtisan, avec le rare mérite de rester un soldat profondément honnête et de ne s'écarter jamais des règles de la conscience.


On a tracé exactement en ces quelques lignes son portrait de soldat-

« :Vienne l'heure des combats, de Tressan n'aura rien de plus pressé que d'aller joindre sa compagnie et de courir à la gloire à travers les périls mais durant les loisirs de la paix, il fuira la caserne pour vivre à la Cour et rechercher les cercles fréquentés par les beaux esprits (1). » Il n'y avait rien de plus à dire peut-être. Le développement que nous avons donné à ce chapitre nous semblait nécessité cependant par les multiples péripéties qu'au cours de sa carrière militaire, le comte de Tressan eut à subir et qu'il supporta sans compromission, en continuant à suivre le sillon creusé par ses aïeux, malgré les obstacles d'une Cour qui déjà ne comprenait plus les vieilles traditions françaises.

IV

LE POÈTE

De Tressan a écrit beaucoup de vers, sans qu'il fut pour cela un grand poète. Il a ciselé avec son esprit joyeux et mordant tout une série d'histoires fort drôles et de pensées bien amenées qu'il a taillées symétriquement par pieds et par rimes, et de ce fait, il a eu une corde de plus son arc il a été poète.

Deux siècles après sa mort, on lui reprocha son ambition et un jour on tint à lui décerner une étiquette, mais lorsqu'il s'agit de déterminer son genre et son école, on ne put en venir à bout si bien qu'en fin de compte on lui donna une place quelconque.

Comme g enre, il fut déclaré poète galant (genre précieux), il l '1 lIauréau, Hisloire littéraire du bfaine.


et comme école, poète de salon (producteur personnel). C'est inconvenant de traiter ainsi un Immortel qui ne peut répondre aux critiques toutefois il y a des précédents, car M. Campenou est un peu d'avis que les poésies du comte de Tressan n'ont eu d'autre mérite que d'avoir été faites à propos.

De Tressan parlait de l'actualité en vers il chansonnait au jour le jour, et il ne faudrait pas être surpris que bientôt dans une chaire de littérature, peut-être même dans la presse, on élevàt de Tressan la grande maitrise de la chanson satirique, comme fondateur du genre.

Pourtant, avant d'en arriver là, peut-on « classer le poète plus e..ractement. Tout d'abord, on doit lui reconnaitre plusieurs qualités il fut léger et lyrique à l'excès, parfois didactique et par exception critique. Avec ce bagage il n'est pas surprenant qu'un de nos contemporains l'ait sacré poëte précieux.

« De Tressan, dit Hauréau (1), n'aimait pas d'autres vers que les vers légers, il affectait une respectueuse indifférence à l'égard de la prose et des vers graves. » L'aveu arrive 11 point, car nous y retrouvons un trait de caractère, c'est-àdire que chacune de ses œuvres poétiques a été inspirée par le même esprit qui dirigea ses multiples transformations. Très jeune, de Tressan rimaillait déjà quelques épigrammes; mais comme la médisance était son plus grand défaut, la duchesse de Villars, dont il fréquentait le salon, lui doima plusieurs fois, comme pénitence, l'ordre de composer des cantiques. Le ~énite~zt des sai~ates (2) s'acquitta de ces avec un courage d'écolier puni. Plus tard, on a dit que ces poésies lui coûtaient beaucoup faire, mais qu'elles coûtaient beaucoup plus à lire (3).

(1) Hauréau. Histoine littérnire dit 3laine.

(2) Surnom qui lui était donné dans les salons pour le genre d'exercice auquel il était astreint.

Bi ~onuenira dte nomte de Tressnn, par le marquis de Tressan.


De Tressan se lança ensuite dans la poésie fugitive, que l'on pourrait appeler la poésie des courtisans.

Il s'cxplique lui-même fort à propos à ce sujet.

« Quelquefois, dit-il, le meilleur des maîtres, auprès duquel j'ai eu l'honneur d'être élevé depuis l'Lige de treize ans et qui m'avait fait colonel à seize, nie pressait de faire des vers.

Eh comment aurais-Je pu désobéir '1 »

Sur ce ton il en faisait de fort beaux, tels ceux qu'il dédia à Madame de Pompadour et que 1'oltaire lui arracha des mains pour les faire publier

0 vous, qui conservez, au milieu de la Cour, Un cceur à l'amitié fidèle,

Les chiffres qui paraient cet antique séjour. D'une main il formait une chaîne éternelle Et de l'autre il gravait le nom de Pompadour

La duchesse de Villars maternellement le gronda et lui infligea la cruelle punition de traduire le Cantiqtce c~échitzs. [\fais cela n'empêcha pas sa lyre de taquiner fort, un jour, NI. de Viaurepas, dans la chanson suivante qui tH exiler l'auteur.

Il) .s'ott~~anir., ctu co>ute r(e Tnessan, par le marquis de Tressan.

c\ 1IAUAIfE DE PO~[PADOL'R (1)

Moins ambitieuse et plus belle

Que Diane et que Gabrielle,

Apprenez qu'on a vu l'amour

Effacer d'un coup de suD aile

La France est en désarroi

Oit trouver le remède

Aux malheurs que je prévois


Serait-ce au conseil du roi Quel aide quel aide quel aide On y répond toujours non,

Amelot boit et fraude,

Maurepas parle chanson,

Tancin se tait, d'Argenson

Nigaude, nigaude, nigaude.

Toutes les petites malédictions qu'il récolta ne rendirent point célèbre la muse de Tressan. Sa notoriété ne dépassait guère les salons des gens de Cour. Campenon, tout en critiquant ses vers, les remonte un peu dans l'estime des derniers descendants de l'époque et trouve. qu'ils formaient une partie brillante dans la société du ZV1II~ siècle. Pour bien analyser les poésies de Tressan il faudrait prendre chaque pièce et en extraire l'essence, partie par partie. On ne peut que se contenter de citer quelques uns de ses morceaux les mieux traités dans chaque genre. Quel joyeux badinage par exemple que cette lettre écrite 't my]ord Stafford. Il l'avait composée à la dernière heure, au moment une attaque de goutte le forçait de garder la chambre et l'empêchait d'assister au diner de l'aimable insulaire qui lui ménageait toujours une agréable compagnie. Voici quelques passages de cette missive:

De la manie abdét-itaiiie

Vous me tiendrez bien convaincu, Lorsqu'en riant vous aurez lu Ce radotage que sans peine

A rimé ma facile veine

Digne de l'Abbé mal vêtu (1), Qui jadis, sur l'air mirdondaine,

(1) 1) L'abbé Pélegrin.


Chantait, vers la Samaritaine,

Marie et le petit Jésus

Qu'il connaissait de nom tout au plus. Je suis au lit et vous à table,

Je jure un peu quant vous riez, Je cède à l'ennui qui m'accable Et vous, dans un punch agréable, Tranquillement vous vous noyez. Et de bons propos égayez

La liberté qui tient la table

Du Mylord que vous adorez

Peut-être quelque Élève heureuse De Florence ou de la Paris,

Jeune, folle, ou capricieuse,

Ou qui mieux est encore honteuse, Viendra, conduite par les ris,

Trouver votre troupe Joyeuse.

Eh morbleu, Messieurs, tout est bon, Dira le Mylord en furie

Eh quoi, prenez-vous ma maison, Pour Sceaux ou quelques bergeries, Et mon vin pour l'eau de Lignon '?

Parfois aussi il touche le genre pastoral comme dans ces vers qu'il intitule

Sur mo~x Hermitage de Fra~xco~xville

Vallon délicieux, ô mon cher Franconville

Ta culture, tes fruits, ton air pur, ta fraîcheur,

Raniment ma vieillesse et consolent mon coeur


Que rien ne trouble plus la paix de cet asile Où je trouve enfin le bonheur

Tranquille en cette solitude,

Je passe de paisibles nuits -1

Je reprends le matin unp, facile étude,

Le parfum de mes fleurs chasse au loin mes ennuis Je vois le soir de vrais amis,

Et m'endors sans inquiétude.

Dans le genre lyrique nous trouvons de Tressan inférieur. Il a fait des chansons sans grande importance, et si notre rôle n'était de signaler les variétés de conception du poète, nous n'aurions certainement pas lieu de nous arrêter à ce genre. Donc, de Tressan a fait beaucoup de chansons il a traduit quelques psaumes; il a composé beaucoup de cantiques. La bonne humeur et l'esprit qui règnent sans cesse dans ces couplets ont pu donner sur le moment un certain relief à leur auteur, mais aujourd'hui l'intérêt n'existe plus, et en citant la complainte ci-dessous nous croyons présenter la meilleure qu'il fit

Le printemps ne fait point éclore De fleurs plus brillantes que vous Les oiseaux chantant dès l'aurore, N'ont point des accents aussi doux, Sans cesse une gràce nouvelle

Se dévoile et vient vous parer

Heureux qui, vous voyant si belle, Ne fera que vuus admirer

Plus heureux qui pourra vous plaire Qu'il soit digne d'un sort si doux Que rien ne puisse l'en distraire, Qu'il soit sans cesse à vos genoux


Qu'il vous dise Je vous adore.

!\lais d'un ton si vif, si touchant,

Qu'il puisse l'être plus encore

Que vos regards et votre cliatit.

Ses contemporains classèrent l'Hoy>z~rae-~llacl~irae de la Vlétrie parmi les poètes du genre didactique. Cette poésie est peut-être, en effet la seule qui reflète son rôle d'inst¡'Hire et de corn.mta~aiqi<er~. «: C'est, dit l'abbé Piron, un tissu de préceptes, une suite de principes revêtus de l'expression et de l'harmonie de la poésie ou au moins une instruction recouverte d'un voile qui déguise la pensée de l'auteur. » En tous cas, son apparition, la pièce suivante fit grand bruit dans le camp des philosophes. D'ailleurs c'est certainement la plus remarquable des oeuvres de de Tressan, malgré s.L longueur.

Elle parut sous forme de lettre adressée u un parent de l'auteur:

Si dans vos vers, sage Naturaliste,

Un scepticisme, et profond et prudent, Sur votre esprit avait pris l'ascendant, Si vous étiez un peu moins dogmatiste, Je peserais vos raisons de douter,

elier Damon, loin de vous écouter, Quand follement vous cherchez à détruire Des nceuds sacrés, quand je vous vois lutter Contre le jour qui peut seul vous conduire, Les plus beaux vers ne peuvent vous séduire. Et dans les miens je dois les refuser. Un vil mortel, un nouvel Erostrate, Ose abuser dit grand art d'Hypocrate Par le scalpel il découvre à nos yeux De nos ressorts les accords merveilleux Il voit leur force, il prévoit leur ruine.


Il en conclut c( L'homme est une machine, » Que les concours des atàmes forma,

» Ft que l'Ether plus rapide anima ».

Ah, cher Damon, se peut-il que votre ame Méconnaissant cette céleste flamme

Qu'en votre sein versa le Créateur,

Puisse écouter la voix d'un imposteur?

Quoi, notre esprit, cette vive lumière,

Quoi, ces ressorts l'un à l'autre liés,

Pour nos besoins, féconds et variés,

Assujettis aux lois de la matière,

Par le hasard seraient modifiés?

Le croirez-vous ? Quoi notre intelligence, Notre pensée est un corps circonscrit

<2u'un agent meut par sa vive effluence,

Qui suit, sans choir, les lignes qu'il décrit? A ces traits reconnait-on l'esprit?

Reconnait-on la sublime substance

Qui se souvient, compare aime et choisit Le ha5ard n'est qu'un être fantastique,

Qu'un mot, qui sert l'ignoranre publique Jamais ce mot qui d'elle-même est amené N'offre à l'esprit un sens déterminé.

Tout mouvement, un Dieu moteur l'imprime, Tout obéit à sa direction.

De ses décrets la chaine, quoiqu'intime,

Reste cachée il la perception,

Depuis les temps de l'enfance du monde,

Même parmi les êtres végétant.

Observe-t-on sur la terre, sous l'onde,

Ou dans les airs, de nouveaux habitants,

Nés du concours des atômes flottants?

Non, cher Daman, une force seconde

LX. 9


Entretient tout, sans que rien se confonde De son pouvoir la source est dans les Cieux. D'un sein fécond, sans jamais s'altérer,

Chaque saison, la nature abondante,

Répand les dons qu'une main bienfaisante, Dans leur principe, a pour nous préparé. Mais, produit elle une nouvelle plante D'astres nouveaux le ciel est-il paré '?

Or, je demande à ce puissant génie

Qui, par pitié, veut dessiller mes yeux,

Comment l'espèce à l'autre espèce unie

Se reproduit?. Aux mortels curieux

Tout est obscur, et le nouveau système

Que l'on propose est toujours mal prouvé. Par Malpighy, Verehyens, Harvé même,

Ce doute obscur ne put être levé -Y

Et notre es¡:ence est toujours un problème. Si notre esprit dépendait de nos sens,

Plus ses ressorts seraient fermes, puissants, Plus cet esprit atteindrait au sublime Ont ils rendu Milon digne d'estime

Et dans Pascal ils étaient languissants

Par ces raisons mon esprit en suspens

S'il ne croyait, que serait-il ? Sceptique

Mais je déteste un traité dogmatique,

Qui m'avilit, qui m'ôte tout espoir,

Et qui, surtout, veut me faire entrevoir

Que la vertu, l'honneur, sont des chimères, Fantômes vains, faiblesses de nos pères,

Liens adroits, dont la société

A par degrés connu l'utilité.

Il nous reste à parler de de Tressan comme poète épique. Desessarts nous tire d'embarras en rangeant dans ce genre


la pièce suivante, adressée à Voltaire, et dans laquelle l'auteur fait œuvre de courtisan

(1) Sourenirs dit comte de Tressan, par le marquis de Tressan.

A M. DE VOLTAIRE (1)

Le digne fils de Henri Quatre

Vient à nos yeux de l'imiter,

Qu'un Français qui l'a vu combattre Aime à te l'entendre chanter.

Henri, dans les champs de la gloire, En combattant pour ses foyers,

Reçut des mains de la Victoire

Et son empire et ses lauriers.

Louis, ta couronne affermie,

Gage du bonheur de l'État,

Ne craint plus la ligue ennemie, Le fanatisme et l'attentat.

Tu fais respecter les frontières

Que toi seul pouvais t'imposer

Ton bras renverse les barrières

Qu'en vain on cherche à t'opposer. Ton grand coJur ne peut pas attendre L'ennemi qui leur sert d'appui Dès qu'il s'apprête à les défendre, Tu voles au devant de lui.

Il vient déjà, la foudre gronde

Et fait voler au loin la mort

Aux pieds du plus grand Roi du monde Les dieux arrêtent son effort.

Bientôt une colonne entière

L'élite des deux nations,


Cette méthode de procéder 1:>aos analyse est peut-être la seule qui convenait au sujet. Que pouvait dire la critique devant tant de transformations subites ']

L'unité d'idée était écartée dès le début. L'intérêt de la pensée n'était plus de l'époque elle ne correspondait pas aux sentiments des écoles contemporaines.

C'était une fleur sans racine, venue se greffer au parterre poétique du siècle, au milieu de fleurs éclatantes, et on peut dire que de Tressan représenta dans la gerbe la modeste

Fait pénétrer sa tête altière

Au milieu de nos bataillons.

De feux, de métaux, de bitume, Tel on voit un torrent affreux, Dont le cours entraîne et consume Tout ce qui s'oppose à ses feux. Volez troupe fière et fidèle

Si digne de garder nos rois

L'amour, la gloire vous appelle, De Louis entendez la voix.

Il vous aurait conduit lui-même Sans nos larmes et sans nos cris, Méritez cet honneur suprême

En renversant les ennemis.

Du sein de la voûte azurée,

Minerve regardait Louis,

Veillait sur sa tète sacrée

Et sur les beaux jours de son fils. Leurs mains du temple de mémoirE' Arrachaient ces sanglants lauriers Perdus. mais perdus avec gloire, Aux funestes champs de Poitiers.


plante des champs. Autant dire que jamais il ne posa au grand poète. Sa notoriété si vive dura. ce que durent les roses.

Le marquis de Boufflers dépeignit ainsi de Tressan « Une guêpe noyée dans le miel ». Cette appréciation e~it été suffisante pour montrer au poète la voie qu'il devait suivre. Il avait en lui l'étoffe d'un grand satyrique, par goût et par esprit. Mais au lieu de prendre pour modèles les maitl'es de son tempéramment Aristophane, Térence, Boccace, Commines et Molière, il s'est inspiré d'Ovide, de Tibulle, d'Anacréon, de l'Arioste, ou de ses contemporains Hamilton, Gresset et autres.

Une fois de plus, de Tressan avait fait fausse route, mais une fois encore il se faisait pardonner car il avait eu le talent d'être agréable.

DlaRC P~IthEP~.

~a slliL're).


PREMIÈRE VISITE PASTORALE

DE

MGR F.-G. DE JOUFF~OY-GONSSANS

A BEAUMONT-LE-VICOMTE, EN 1778

M. Louis Calendini vient de publier dans la première livraison du tome LX de cette Revo.e un article intéressant sur la première visite de M~' de Gonssans dans son diocèse. Les documents qu'il a consultés sont pour la plupart extraits de l'hzL~entaire Sona~naire des Archiues de la Se~rtlie qui a été fait à la hâte, il faut le dire, et un peu au hasard. Beaucoup de visites pastorales n'ont pas été signalées, soit de la faute des curés qui ne les ont pas consignées sur leurs registres, soit de celle des abréviateurs. Quoi qu'il en soit les Registres ~nroissia2~x de Beaumont n'ont pu être consultés et ils renferment justement des renseignements très circonstanciés et absolument nouveaux sur la première visite pastorale de Mgr de Gonssans. M. Gabriel-René Yvard qui fut curé de Beaumont de 1747 à 1782, nous en a laissé à la fin de ses Registres un récit détaillé dont je voudrais faire profiter le lecteur, récit que j'abrège à mon tour, de peur d'ennuyer.

LA


« Mgr de Gonssans étant arrivé au Mans dans le mois de juin 1778, il y a été reçu avec une joie universelle, et est allé loger au Seminaire de la Mission où il sera sans doute, jusqu'à ce que son palais épiscopal soit réparé et peut-être mème rebàti de neuf. Dès les premiers jours de juillet je fus lui présenter mes profonds hommages et j'en fus reçu au mieux quelque temps après je retournai au Mans, et il m'itivita à dîner avec lui, ce qu'il a fait à presque tous les curés qui sont allés le saluer, et une très grande partie se sont fait un devoir d'y aller.

» Dès le mois d'aoùt, il a fait une Leltre circaeï.ai~~e pour tous les curés du grand Archidiaconné dont Beaumont fait partie, leur anuonçant qu'il allait commencer dès après l'Ordination de septembre à donner la Confirmation dans leur canton, et afin qu'ils y préparassent les enfant.s par des Catéchismes, fixant leur ~tge à 10 ans pour les plus jeunes, et les grandes personnes pour la confession et la communion par des instl'Uctions; pourquoy il ordonna que huit jours avant son arrivée dans chaque paroisse, on fit la prière le matin et le soir, et un salut avec la bénédiction du Saint Ciboire, accordant d'ailleurs à tous les confesseurs approuvés, tous les pouvoirs nécessaires pour préparer les fidèles la Confirmation, tant dans la chaire que dans le tribunal de pénitence.

» Je lus cette lettre vraiment pastorale le jour de l'Assomption et je dis que dès le soir à l'oraison, nous commencerions à chanter le j'emi Crr:ator avant la bénédiction du Saint Sacrement.

» En septembre, Monseigneur donna à tout son diocèse un Mandement digne de son zèle, pour l'annoncer et demander à son peuple le secours de ses prières et leur apprendre qu'ayant le dessein de visiter tous ses enfants, il allait cette même année confirmer le grand Archidiaconné.

» En effet, il partit du ~Ians le dimanche 120 septembre 1778, et entrant par Bonnétable, il alla à Mamers, à


A]ençon, à Fresnay et dans la plupart des paroisses adjacentes (1) ».

M. Yvard, ne donne point le détail de ses diverses pérégrinations. Cependant M. Calendini se demandant ce qu'il fit la date du 27 septembre jusqu'au 6 octobre, M. Yvard va nous le dire, en partie du moins. « Je l'avais, dit-il, déjà salué à Mamers le 28 septembre », puis dans un autre passage de sa relation, il ajoute « Monseigneur donna la Confirmation à environ 2,500 personnes à Mamers, les derniers jours de septembre et les premiers d'octobre. Il confirmait à la sainte table comme on y distribue la Sainte Communion, un jour le matin les hommi?s, l'après-midi les garçons, un autre jour les femmes le matin, et les filles le soir. »

» Monseigneur a été accompagné dans ces visites par M. du Perrier du Mourier, chanoine du Mans et son grand vicaire, de M. Dugast, aussi chauoine et son promoteur (2), de M. Bonnet (3), son secrétaire et aumônier, prétre et docteur de sou pays, tous ecclésiastiques des plus pieux et méritans, et de M. le Supérieur de la ;\Iissiun du Mans ( ~) qui cepen1) « Ce fut il Cliampaissant (tire Sa Grandeur donna son Jlandemeut, en conséquence de la Lettre du roy pour demander à Dieu l'heureux accouchement de la ['eine, laquelle mit au monde le samedi avant midi 2l1 décembre une lille nommée Marie-Thérèsc-Cllarlotle par la reine de lIonôrie sa grand'mère, et le roy d'Espagne, et fut haptisée le même jour par le cardinal de Guérnené, archevêque de Reims, grand-aurnùnier de France.

I:JI 11.'tlicliel-Jacdues-Charles du Guast, prètre, licencié en tliéoloôie de la Faculté de Paris, de la maison et société royale de Naearre, chanoine de Saint-Pierre-de-la-Cour et de la cathédrale. était i:é au Mans en -1726, paroisse du Crucifix.

13) M. Michel Bonnet prêtre de Besançon ,oint au !llans avec ~Iu' de Gonssans, en qualité de secrétaire. Nommé chanoine le "18 février 178'"2, il fut remplacé au secrétariat par 11I_ Petit, sur lequel nous n'avons pas d'autres renseignements. Je serais porté à croire que c'était ClaudeAmbroise-Augustin Petit, prêtre de la Mission, professeur de théologie au Séminaire, et qui était aussi originaire de Besançon.

14) C'était ~I. Claude-Joseph Vauclieret, de la Congrégation de la Mission, supérieur du Séminaire du Mans dès tï74, et qui en 1793 fut


dant le quitta il la Toussaint pour aller à la rentrée des Séminaristes qui, ayant fait leur temps, doivent être ordonnés aux Quatre-Temps de Noël.

» La suite du poutife «( les plusieurs autres personnes » des autres narrateurs), qui allait toujours à cheval et même à pied fort souvent, n'était que de son valet de chambre qui lui servait aussi de inaitre d'hôte], d'un laquais IL livrée jaune et d'un palefrenier qui conduisait le cheval qui portait les malles de bagage MM. les assistants avaient un seul domestique pour eux deux ).

Parti de Sougé-le-Ganelon le 2 novembre, Monseigneur donna la Confirmation à Saint-Gerrnain-de-la-Coudre (1) le mercredi 3, et le jeudi 4, il était à Piacé (2) où NI. Yvard alla- le saluer. De là il se rendit a Chérancé, d'oit le venduedi soir fi novembre il vint à Vivoin. « Il logea comme par·toztl chez 1i. le curé, (3), qui est aussi doyen impliqué dans des poursuites judiciaires. (CL Saint I'incent-de-f'anl et ses in.stilutions dans le Jfaiue, par l'abbé Lochet, p. 3~.)

(t): Pierre Houilly-Duclos, iii, à N.-D. du Ham en 'iil7, était curé de Saint-Germain-de-la-Coudre depuis le ~21 août 1161 et doyen rural de Fresnay, Ce fut lui qui fonda le 17 novt'mbrc l7S! l'école des sœurs, supprimée l'année de~nière, et la dota généreusement. Il donna sa démission peu après, et resta prètre habitué il Saint-Germain il mourut reclus .i rhôpital de Chartres en '179"1. tVoir 3fart~ps du 3faiue, J, li- '211.) (~2~ Le curé de Piacé était Hyacinthe-Louis-Marie Touchard, Tours eu li3.i, reyu dans l.t Confrérie de Vivoiti en 1763, et curé le 14 septembre ti67, Ce fut lui qui fit bâtir le presbytère actuel et en posa la premièrc pierre le 4 mai 'I77J. Lors de la Récolutiou, il refusa le serment schismatique et fut obligé de se cacher. Mais, accablé d'infirmités, il se présenta le 6 pluviôse an VII, au secrétariat de l'Administration municipale de Beaumont, et il cause de son àôe, fut autorisé à se retirer « chez la citoyenne Le Baron une des deux smurs du curé de Vivoin dont va parler 11I. Icard. j.lrcla. ~nu>rici.p. de Beaumont

t:3) M. René-Marie Le Baron, gradué de Sorbonne, à Beaurnont-leVicomte en 7 L fut d'abord vicaire-sacriste dans sa paroisse natale. Eu juillet 1 ¡¡.¡, il fut nommé curé de Vicoin, par 1\1" Jean-Paul Brunet d'E\'l'Y, prieur commendataire de Vicoin, puis en 175. doyen rnral de Beaumont eu remplacemeut de nI- Posliu curé de !\Icurcé. Il mourut le 5 janvier 1779. Sa sœur, Marie-Anue, retirée à Beaumont après la mo~t de aou frére, fut la l'rovidence des prètres persécutés pendant la Révoltilioli. ~'otes Renaudot et Yvard.)


rural de Beaumont, quoique attaqué depuis deux ou trois ans d'une paralysie presque universelle qui le tient dans une espèce d'enfance. Mais MM. Fournigault et Hulot, ses vicaires (1), avec ses sœurs le reçurent au mieux. Le samedi matin j'allai le trouver afin de l'amener chez nous, car chaque curé, où il confirmait et dinait, ¿tait allé l'inviter et amener chez lui, et le conduisait le lendemain à la destination qu'il avait fait annoncer 8 ou 'lU jours auparavant. » Ce saint évêque après avoir dit la sainte Messe qu'il célèbre tous les jours avait confirmé environ 900 personnes tant de Vivoin que de Meurcé qui y était réuni, et dîné avec tout le clergé des environs, qui était venu comme moi pour honorer ce saint pontife, il partit à pied pour Beaumont, suivi d'une partie de ceux qui avaient dîné avec lui. Messieurs les officiers Municipaux avaient envoyé audevant de 5a Grandeur, les tambours et fifres de ville. J'avais fait mettre mon manteau long dans une des premières maisons à l'entrée de la ville, où je le pris, et conduisis Sa Grandeur au presbytère. Je fus si touché et édifié de la piété de tous mes paroissiens qui bordaient en foule les rues au passage du saint prélat, qui lui demandaient à genoux la bénédiction qu'il leur donnait avec une tendresse paternelle, que quelque difficile que je sois à pleurer, je ne pus retenir mes larmes de joie, en sorte qu'à son arrivée à la maison où M~'9 les Prètres l'attendaient en soutane, comme était le prélat lui-même, je ne pus rien lui dire de suivi, le suppliant seulement de lire dans mon cœur, et dans celui de tous mes paroissiens, tous les sentime nts de respect, d'allégresse et de vénération dont nous étions tous vivement pénétrés pour Sa Grandeur.

(1') M. Louis Fournigault, né au Mans, paroisse Saint-Jean-de-la-Chèverie, fut nommé vicaire de Vivoin en 1777. Ni Joseph Hulot, né à Chassillé le `?9 juillet 1752, fut vicaire à Vivoin dès 1778. En 1790, étant curé de Bouloire, il refusa le serment et fut obligé de se réfugier à Vivoin, chez des amis. Au péril de sa vie, il continua de donner les sacrements, dans toute la contrée. Il mourut curé de Tu6é en 1815.


» Dans le moment arrivèrent MM. les officiers du siège de justice, savoir, Mr,3 de Tilly, sénéchal d'épée (1). M. de Lelée (2), lieutenant particulier et subdélégué, Me Le Sueuf (3), procureur du roi, Mllt. Lehaut, Guitton, Percheron et Péan, avocats (4) les quatre premiers complimentèrent Sa Grandeur. Si Mre de Tilly parla le premier, ce fut pour éviter contestation, la chose n'étant pas décidée qu'il dût parler avant les officiers de robe.

» Ensuite vinrent les officiers municipaux, savoir M. Ronsard (5), maire et lieutenant-général, j'y parus aussi (1) M. Jacques de Tilly, de la branche des seigneurs de Prémarest, était denxième /ils de René-Pierre-François-Aimé de Tilly et de JacquineMadelaine de Guéroust de Boiscléreau.

Il était bailli ou sénéchal d'épée, dans l'apatiage de Monsieur, 't Beaumont-le-Vicomte; il mourut le 25 juin 1791. (S. Allais, l~ôbilictire, VIII, 273.)

l'?) Me Gabriel-Joseph Delélée à Fresnay le 9 septembre 1713, fut d'abord avocat au siège royal de Beaumont, puis par résignation de son père, lieutenant-général, civil et criminel en la sénéchaussée et siège royal, et subdélégué de l'Intendance de Tours. A cette époque sou frère Urbain-Henri Delélée, était vicaire de Chérancé. Parent de M. Yvard, il est rompté au nombre de ses héritiers en 178't. Ce rut son fils qui épousa Julie de Clinchamps, fondalrice de 1'liospice de Beaumont. (3) rle Jacques-Louis Le Sueur, baptisé à Beaumont le 16 septembre 1733, fut procureur du roi par démission de son père. Il fut l'avant-dernier procureur, ayant vendu cette charge en 1781 au célébre Bardou-Boisquetin.

l1) Joseph-Bernard-Louis Lehault, notaire royal à Vivoin, avait été baptisé à Beaumont le 2L juillet 1722, et il avait eu pour parrain son oncle Beruard Lehault, curé de Vivoin.

Etienne-l'rançois Guitton, notaire royal et avor.al à Beaumont naquit à Vicoin en 17:3'2.

René-Charles Percheron, avocat au siège de Beaumont et docteur en médecine, habitait la rue des Boucheries, aujourd'hui rue de Paris. Emmauuel-Louis Péan était premier huissier audiencier.

(5) Me 9lichel-Claude Ronsard, baptisé à Cormes le 22 février 1740, fut avocat en Parlement. Ayant épousé le 21 juin 1768, Perrine-Françoise de btoloré de Saint-Paul, il devint en février 1769, lieutenant-général à Beaumont, et maire perpétuel en 1777. Il mourut en 179t. Son fils âgé de 9 ans eu 1778, est François-Michel le 9 avril 1769, qui devint oflicier du génie maritime, et fut père, entr'autres, de Me]'- Elise de Ronsard morte à la Cour Saint-Paul le 31 août 1866.

Voir Moulard, .Saint-Patvl-le-Gaultier, 1~>3.)


comme premier échevin M. Leret d'Aubigny, second échevin (1), et NI. Martin, comme procureur du roi de l'Hôtel de Ville. 11. le Maire complimenta aussi le pontife et lui offrit le vin de ville. C'était vingt bouteilles de vin blanc et rouge du meilleur qu'on eÙt pu trouver.

» Ensuite M. Lorin (2), principal, fit chanter une ode latine par le fils de M. Ronsard, âgé de 9 ans, à la louange de Sa Grandeur.

» Parut ensuite Mlle Coulon de la Maire qui instruit les petites filles dont deux avaient un dialogue à prononcer sur" l'arrivée et les vertus du prélat, mais elles n'avaient pas eu le temps ni l'aisance de l'apprendre, les occupations du saint ministère m'ayant empêché d'y vacquer elles dirent seulement il genoux, avec leur maitresse, devant Monseigneur, une strophe d'un cantique dont nous faisons grâce au lecteur, et qui se terminait ainsi

Monseigneur, donnez-nous votre bénédiction.

,) Et]e prélat, charmé, la leur donna, de mîeme qu'à deux maîtres des petites écoles, Pierre Desseaux (3), qui complimenta aussi Sa Grandeur, et Bernard Esuault. Monseigneur répondit à tous les compliments avec une présence d'esprit, une charité, une bonté et une affabilité qui gagnaient tous les cœurs.

» Ensuite tout étant préparé pour introduire le pontife 11 l'église. on procéda ainsi son entrée. Le clergé de la Il) René-Norbert Leret d'Aubigny, avocat au siège de Beaumont, liceucié ès-lois, cotitrôleiii, des actes, échevin de l'hôtel de ville, était tils \Inique de Pierre Leret, sieur d'Aubigny, bourgeois, et de Marie-Anne Lemeunier. Il fut b3ptisé à Beaumont le li juin 17'27.

1'2) M. Valérien Lorin au Pré, en '1716. fut d'abord icairc à Doucelles. \ommé vicaire et principal du collège de Beaumont le 11 avril 1-j 17, il exerça cette charôe jusqu'à sa mort arrivée en li8\). ia~ Pierre Desseaux fils d'uu tireur cl~élaina, était encore instituteur en -18fHi. v avait donc en 1778 quatre écoles à Beaumont.


paroisse (t), c'est-à-dire ViM. Lorin, principal du collège, Le Pelletier, sacriste ('2), Chevalier, desservant de SaintLaurent, prêtre. et vicaire, et Brochard, clerc tonsuré, et plusieurs curés et vicaires des environs qui étaient venus pour honorer Sa Grandeur, tous en surplis, moi seul en chappe sans étole, mais portant un reliquaire d'argent. « Nous partimes de la sacristie vers 5 heures du soir en silence, les cloches sonnantes et les tambours battant,>, nous allâmes au presbytère. Le pontife en rocher, camail, étole et mitre nous attendait dans la salle du presbytère, je lui présentai le reliquaire, il le baisa humblement au-dessous de la croix et des reliques. Je lui dis ce peu de mots

» Benedictus qui re~zit i~z izomine Donzi~zi. Hreu dies yttcznz fecit Domimcs, emeltemzzs et l~ternur üz ea, Izeec dies, int~zt.cz~rz, sole»t~zis, q«ica z~ere Do~izi~zzts Deu, ill~t.,r.~it ~zobis, (1) Un autre prétre fut mentionné dans le procès-verhal de ,'isite ce fut ~Ie René Gaullier qui desservait la chapelle du prieuré de SaintPierre, et était titulaire de la chapelle de la Lardière, desservie à l'autel du Rosaire, dans l'église de Beaumont. Ce saint pi,étk~e né a Beaumont le U~ mai 1740, avait été vicaire il Rouessé-Foutaine d'abord, puis dans sa paroisse natale en 1769, et était mort le jeudi 15 octobre 1778. Il était cousin de Me Jacques-Louis Lesueur, procureur du roi et de hlonsieur au siège de cette ville, et de lliz Jacques Quentin-Aubert, notaire royal. Il eut pour successeur Dh Joseph-Gervais Guimont, lui aussi il Beaumont, et qui fut plus tard curé de Saint-Almer de Grées, près La fertéBeruard

13) Félix-Jean Lepellelier, baptisé :i Chantenay en lï38, fut d'abord vicaire à Chassillé, puis prêtre-sacriste de Beaumont le 1" oclohrel77. il était en même temps procureur de la Confrérie du Tr.-S. Sacrement, en 1782. Devenu curé d'Asnières, il succédait il MI Charles-Marc Gobin de la Vallée, ci -devant vicaire à Bonnétable et auparavant prêtre de Beaumont.

Gervais Clievalier, vicaire de Beaumont, fut reçu dans la Confrérie de Vivoiti en deviiit vicaire de Congé-sur-Ome et membre du conseil épiscopal de Pi-udlioinme de la Boussiuiére. Il s'associa, en 179' avec l'ancien curé de Nnuans, pour la fabrication au Mans, de toiles de Cholet. Il acquit ensuite le presbytére de Cherré, et ce fut lui qui en fit abattre l'église, dont il ne laissa que la tour. Après avoir acheté le presbytère du Petit-Saint-Pierre, au lI!allS, et l'avoir fait rebàtir, il acquit aussi celui de Saint-Pavin, où il est mort.


da~xa rxobis pastorenx sectraxdacnx cor 3uzcux, pa~to~·e~rx gestarxtenx irx ~ector·e sxeo judicitsrrx orrx~xixe>rx di~cesa~xorx<rn szxorurra i~x co~xapectu Donxiui se>rr.Per. Ef·go, fratr·es et co~zsacerdotes ~nei zelatissi>rri (paulo ver·terxs ~ne a dextris et a si~xistris) et i~os ornnes filii rrxei Chay·i,ssirni r~xag~zi ficate Donzi~aurrx 7rxecunx et exalternus rxornerx ejrcs im idipsa~.rrx. »

Après les différentes cérémonies de l'entrée dans l'église, et un sermon sur la Confirmation par le P. Isaac, capucin d'Alençon, qui avait déjà prêché la première semaine d'octobre et la première de novembre pour préparer les paroissiens, Monseigneur donna la bénédiction du Saint Sacrement avec le ciboire. Le pontife, qui avait édifié tout le monde accouru en foule pour le voir et l'admirer, se retira, avec tout le clergé, dans la sacristie où il quitta les habits pontificaux, remettant au lendemain les autres cérémonies ordinaires dans la visitE. épiscopale.

Après s'être un peu chauffé et reposé dans la salle du presbytère, et après avoir vu mon Cabinet qu'il trouva grâces à Dieu, à son goût, vu le nombre et la bonté de mes livres, je le conduisis dans ma chambre que je lui avais fait préparer il voulut bien m'entretenir avec M. Bonnet, son secrétaire, sur les affaires de ma paroisse, il dit ensuite son office, et ne descendit qu'à la fin, au souper qui lui était préparé et pour Messieurs ses assistants et les susdits prêtres voisins qui avaient pu y rester avec notre clergé. Car, soit par mortification, soit pour ménager sa santé qui paraît délicate, quoiqu'il soit infatigable dans tous ses travaux apostoliques, il ne mange jamais rien le soir, le dîner étant le seul repas qu'il fasse, excepté quelquefois un peu de lait qu'il prend après sa messe. Messieurs ses assistants couchèrent chez de mes amis, et les domestiques avec les chevaux couchèrent eux à l'auberge, où ils payèrent, contre rnon esT~éy·a~xce, leur gite; M. le secrétaire avait aussi donné 12 livres à ceux qui avaient apporté le vin de ville, et 6 livres à ma servante.


Le dimanche matin 8 novembre entre 7 et 8 heures le prélat étant prêt, comme le jour précédent, nous allâmes le prendre sous le dais au presbytère. Dès que le prélat eut adoré le Saint Sacrement avec sa piété ordinaire et la plus édifiante, il quitta son étole et son camail, et prenant les ornements qu'on lui avait préparé sur l'autel, il célébra la sainte Messe que je lui servis avec M. son secrétaire. » Monseigneur commença ensuite à donner la Confirmation comme il a été dit ci-dessus.

(t Rien ne fut plus édifiant que la piété avec laquelle toute la paroisse se porta à profiter de la Confirmation, les uns en la recevant, les autres tâchant de ressusciter en eux la grâce qu'ils avaient reçue autrefois par l'imposition des mains. Le nombre des confessions et des communions égala au moins celui de la Paque pendant toute la semaine de la Toussaint.

» Les plus anciens habitants se souvenaient de l'avoir reçue il y a environ 75 ans sous Msr de Tressan, évêque du Mans par les mains de lf~~ Dalton saint évêque d'Ossory, que le roi d'~ln~leterre avait chassé, comme catholique, hors de son royaume quand Louis XIV révoqua l'édit de Nantes ce grand monarque reçut avec joie ce respectable prélat et lui donna deux mille livres de rente sur l'abbaye de la Couture du Mans, où il vint demeurer. Mgr de Tressan déjà âgé, se servait de son ministère pour bien des choses. Il donna donc la Confirmation à Beaumont vers 1704, dans l'église, dans le cimetière et sous les halles, disent les anciens, vu l'a[fluenCiJ du monde qui venait des environs pour être confirmés ('1).

» En 1728, h16~ de Froullay, évêque du Mans, donna la Confirmation llieurcé à différentes paroisses, entre autres à la nôtre depuis ce temps, il n'y avait point eu de confirmation publique dans nos cantons quelques personnes (1) bie~ Dalton mourut au Mans le mèmejour que 111s~ de Tressan, le 27 janvier 1712 (et non 1672, ce qui évidemment est un coquille).


étaient seulement allées au Mans en certains temps oil Monseigneur la donnait. 11f~~ de Grimaldi la donnait, dans les jours d'ordination, ~t tous ceux qui se présentaient avec un billet.

)) Tandis que Monseigneur confirmait en notre église les femmes, M. Bonnet son secrétaire, fit sur le banc de l'autel, le procès-verbal de visite, parce que de il pouvait voir en détail tout l'état de l'église, il me retint -t il côt~ de lui pour l'instruire du nombre des vases sacrés, du litige, etc. C~ruces à Dieu, il trouva tout en règle. Monseigneur et moi signèrent ce procès-verbal au sortir de la cérémonie. n Les procès-verbaux n'étaient pas de simples nomenclatures, mais de vraies descriptions des objets et des rapports historiques sur les usages divers des églises. Ils formaient de ,gros cahiers, dont on conservait le double dans les papiers de Fabrique, et faisaient souvent l'objet d'une ordonnance épiscopale, concernant ce qu'il y avait règler dans chaque paroisse. Celui de Beaumont fut renvoyé]e 3 décembre 1778, revêtu de la signature de Mgr de Gonssans. Mais le vénérable curé, absorbé par la confection de l'Inventaire de son église, n'avait pas terminé. le récit de la Confirmation, u cette époque. Dans un autre Registre, il y revient avec des détails complémentaires.

) Le lundi 7 et le dimanche 8 novembre, Mgr de Gonssans notre évêque, très zellé, très pieux, honoré, estimé, aimé et respecté de tout son diocèse, a visitté cette église et y a donné la Confirmation à 1200 personnes, dont environ une cinquantaine seulement étaient des paroisses voisines. Grâces à Dieu, Sa Grandeur a été contente de la réception que le clergé, la magistrature, les officiers municipaux, et tous, grands et petits luy ont faite, et telle qu'il la mérite. Elle a aussi tout trouvé en ordre et autorisé les anciens usages de notre église, comme les avait approuvé; ill5~ de Grimaldy.


» Monseigneur partit du Mans le 20 septembre et y rentra le 17 novembre. Dans cette visite du grand Archidiaconné et d'une douzaine de paroisses du doyenné de Bonnétable par où il commença, et finissant par Ballon, il a confirmé en tout 48,935 personnes. »

L. BESNAnD.

LX. 10


DAILLON ET TALHOUET

UNE ALLIANCE PEU CONNUE

Daillo~z et Tallcozcët, pour les lecteurs habituels de cette Reuzce, sont deux noms qui se présentent immédiatement et en même temps à la pensée dès qu'il est question du château du Lude.

Daillo~z, d'après l'ordre chronologique, évoque plus particulièrement l'époque déjà lointaine oii l'ancienne forteresse du Lude, sérieusement endommagée lors de la reprise de la place sur les Anglais (1427) par les troupes du vaillant Ambroise de Loré, fut relevée de ses ruines et transformée en une magnifique habitation seigneuriale, ce qui nous reporte à la dernière partie du LVe et à la première moitié du lVIe siècle.

TalILOUët, pour notre génération, représente plus spécialement la longue suite d'efforts, d'ailleurs couronnés de succès, faits pendant ces cinquante dernières années en vue de « réparer des ans les réparablex outrages et de redonner au château restauré sa splendeur d'autrefois. Daillon et Talhouët sont du reste deux noms dont les ancêtres appartiennent incontestablement à notre contrée. Elle est d'origine angevine (commune des Cerqueux de Maulévrier, arrondissement de Cholet) la nzaison de Daillom


dont la branche cadette acquit en 1456-1457 la terre et le château du Lude.

Elle est d'origine bretonne (paroisse de Pluherlin, canton de Rochefort-en-Terre, arrondissement de Vannes) la nzaison de TaLhoz<ët, dont la branche de Bonamour possède la terre et le château du Lude depuis 1798.

Également anciennes, ces derc~ araai.sorzs sont surtout connues l'une et l'autre depuis le 11V° siècle.

La notoriété de la :Ilaisoaz de Dailloaa grandit rapidement et sa puissance pendant les XVO, 1VI° et YVII~ siècles atteignit un degré éminent dont on retrouve la trace dans les plus belles pages de l'Histoir·e de Fraazce.

Demeurée plus longtemps modeste, la iilaisoaz de Talhoarët ne s'éleva que peu à peu, mais conquit finalement une illustration que l'histoire de la province de Bretagne revendique, d'une façon spéciale, jusqu'à la fin du XVIIIE siècle. Entre ces deux familles dont le dévouement à la chose publique se manifesta si généreusement en maintes circonstances mémorables, il s'établit au commencement du XVII" siècle des relations intimes dont l'existence est fort peu connue.

Attirer l'attention un instant sur ces relations qui se traduisirent par un mariage, voilà ce que nous désirons faire aujourd'hui en attendant que nous donnions, d'après un manuscrit illustré, l'histoire généalogique de la Maison de Daillon.

C'est le 28 novembre 1626 « qu'Henry de Volvyre, conte du Bois de la Roche, épousa Hélaine de Talhouët, de la maison de Querse.rvant en Bretagne ».

HÉLÈNE DE TALHOUET

Hélèrae était fille de Nicolas de Ta.ll,ot~ët-Kea·serua~zt et de Béata°i.~ de Lcaarua~.


« Seigneur de Kerservant, du Dréors, de Crémenec, Lisleho, Beloir, Tremedern, Grand Bois, Kergouët, etc. Nicolas de Talhouët hérita de son père en 159'1, prit, comme lui, une part importante aux guerres de religion, et se distingua, à partir de 1594, parmi les capitaines du parti royaliste ».

Nicolas de Tallcoxcët se maria trois fois mais il n'eut d'enfants que de sa première femme, Béatri;c de Lac«xa~ qui lui donna un fils (Nicolas, 2mc du nom) et une fille (Hélène).

« Béatx·i~ de Laxmxay était fille de François de Latc~xay, seigneur de Tallevert, lieutenant de M. de Bouillé au gouvernement de Bretagne, et de Gx~illexnette Baud, dame de Propiando.

» Elle apporta en dot à son mari les importants domaines de la maison de Pontsal en Plougoumelen, Guergelin, Kerronic, Propriando Besidel etc. dont elle hérita a la mort de Louise de Launay, sa soeur.

» Par l'étendue de ses biens, comme par les distinctions dont le Roi récompensa ses services, Nicolas de TalhoxcëtIïerserL~a~xt devint l'un des seigneurs les plus considérables du pays. Dès l'année 1604, il a le titre de capitaine du ban et de l'arrière-ban de la noblesse de Cornouailles ». Nous venons de dire qu'Hélè~xe avait un frère. Celui-ci fut un des principaux bienfaiteurs du sanctuaire vénéré de Sainte-Anne-d'Auray. Étant mort sans laisser d'enfants des deux femmes auxquelles il s'allia, c'est Hélène qui recueillit la succession.

L'auteur de la Gé~xéalogie de la Viaison de Talleoxcët à qui nous empruntons ces divers renseignements (Voir appendice p. Ul)-366) a eu soin de prouver que le rameau de TalhoLCët-Kerserzant, détaché de la tige. vers la fin du XV" siècle, tirait son surnom de l'un des fiefs qu'elle possédait dans la principauté de Guéméné.


« Jusqu'au milieu du YVIIe siècle, fait remarquer en outre cet auteur, les Talhozzët-herserurx~zt, se distinguèrent au premier rang parmi les principaux vassaux des Rolmnz et prirent une part active aux événements dont cette partie de la Bretagne fut le théâtre.

B. HENRI DE ,"OL\'IRE

He~zz~i était le 2me fils de Plcilippe de Volzire et d'Anne de Daillorz.

Philipye de Voluiz~c était guuverneur pour le roi Henri III des provinces d'Angoizmois, Saintonge et Aunis, en même temps qu'il commandait les villes et citadelles d'Angoulême, et de La Rochelle.

Chevalier du Saint-Esprit, de la 3me promotion, en 1582, il avait épousé, en l'année 1567, Amze de Daillo~z, seconde fille d'Azzree de ï3cestar~zccy et de Jaan de Dcaillo~z, petit-fils de l'acquéreur du Lude, lequel obtint l'érection de la Terre du Lude en comté.

La famille de Daillon compta trois dames portant le prénom d'Anne: "10 Celle dont il est ici question et que l'on désigna parfois comme la belle A~zne cle Daillo~z du Lzzde 2" Une tante de cette dernière, fille de Jacqzces de Daillo~z et de Jeanne d'lllier~z, laquelle épousa Lozzqs Laro~z d'Estissac, en l'année 1526 :30 Une nièce de celle qui nous occupe, fille de Gvz~ de Dctillo~z et de Jacqczelizze de La Fayette, laquelle, née en 1562, épousa Jean de Dueil, comte de Sancerre, en l'année 1583.

« Henri de Volvire, suivant l'auteur de la Généalogie de la Dlaisoiz de Tallzozzët, tenu sur les fonts baptismaux par le roi Henri IlI et la duchesse de Savoie et élevé à la Cour, fit toutes les guerres de son temps, et fut récompensé, d'abord par Henri IV, qui érigea en comté, au mois de février 1607, la vicomté du Bois de la Roche, qu'il avait eue en partage de puîné; puis par Louis XIII, qui le fit maréchal-de-camp


le 20 septembre 1627, et qui, deux mois plus tard, le 8 novembre, le choisit pour remplacer le feu maréchal de Thémines dans le commandement de la Bretagne. » 1\1. de Volvire avait déjà eu l'honneur de présider la noblesse de la province aux États tenus à Plohermel en 96tG, et de la commander, lorsqu'elle s'était armée volontairement pour repousser la tentative de M. de Soubise et des Anglais sur Port-Louis.

» Plus tard, il fut désigné pour avoir l'ordre du SaintEsprit; mais, enveloppé dans la disgrtlce du garde des sceaux Marillac (1630), il quitta la Cour sans avoir été reçu chevalier, et se retira dans ses terres de Bretagne, oit il mourut le 8 octobre 1645, âgé de 74 ans. Son oraison funèbre fut prononcée, le 16 du même mois, dans J'église des Carmes de Ploërmel, par le H. P. Basile de Saint-Jean, et dédiée l'année suivante à sa venve.

») Ct:-lle-ci (Hélène de Talhouët) mourut 1 Paris, au mois de juillet 1663. Elle avait eu trois fils et une fille ».

Au moment de la célébration de ce mariage (128 novembre ~162G ) TJai>rzoléo~z de Daillo~a cousin d'Henri de Volvire, était seigneur du Lude marié récemment (22 avril 1622) à dlarie Feydau, laquelle venait de lui donner un fils (19 juin 1626 ), nommé Henr~.

On ne se doutait guère alors que ce fils, à qui un avenir des plus brillants était réservé (1), mourrait cinquante-neuf ans plus tard (1685) sans enfants pt que la maison de Daillon du Lude finirait en quenouille comme la branche aînée. On ne soupçonnait certes pas non plus alors que le château du Lude serait vendu un jour (1751) par les descenil) C'est lui qui devint plus tard grand maitre de l'artillerie de France, etc., etc.


da.nts de Charlotte de Daillo~i, sœur d'Henry, et qu'un Tallioitët en deviendrait possesseur en 1798 comme héritier, par sa femme, de madame de La Vieuville, laquelle l'avait elle même reçu (1785) comme part d'héritage au titre de nièce de l'acquéreur de 1751 (M. du Velaër) mort sans postérité directe.

Docteur CANDÉ.


THORIGNÉ FÉODAL

CHAPITRE II

FIEFS SITUÉS SUR LA PAROISSE DE NUIf.LÉ-LE-J:1L~1IS NUILLÉ, LOISELLERIE, LES VERDERIES

1~ Nttillé

Le fief de Nuillé-Je-Jalais, auquel était annexée la sei~ueurie de paroisse, relevait à foi et hommage simple de la châtellenie de Thorigné. Ses possesseurs jouissaient des droits de justice foncière sur la paroisse, de prières nominales et de litre funèbrE; en l'église.

Dès le XV. siècle le. fief primitif était divisé en deux domaines distincts appartenant à des propriétaires différents, qui conjointement devaient acquitter les devoirs dils pour l'ensemble de la propriété. C'est ainsi que chacun d'eux payait au seigneur de Thorigné sa part d'un cheval de service et contribuait pour sa portion à la fourniture de l'attelage, qui devait aller chercher au Pont-de-Gennes les meules du moulin du Champs (1).

(1) (Item le hernoys de six bœufs et ung charroy de hernoys de deux boeufs, oultre ung charroy que sont tenus faire la femme feu Jeham EUore, (seigneur de Loiselleriel, et André Cormier, (seigneur de Nuillé), à cause de sa femme, sur la terre de Nuillé. polir admetier les meulles audict moulin à blé, quant il estnécessité, lequelles meulles ils sont tenus aller quérir jusques au pont d'Huynne. ». Aveu et dénonabrenaent de Larxcelot Turpin, seigneur de Thorigné, du 12 octobre 1405. Arch. Nat., P. 345/2 fb 43 vo et suivants.


De ces deux domaines le plus important, sinon par son étendue territoriale, du moins en raison des prérogatives qui lui étaient attribuées, conserva le nom du fief ancien l'autre s'appela le fief de Loisellerie.

Le premier seigneur connu du fief de Nuillé est ANDRÉ CORMIER, qui, en 1405, le possédait du chef de sa femme (1). Il était remplacé le 14 mars 1462 (2), par JULIEN Fmoux, dont le nom figure encore dans le dénombrement fait le 28 novembre 1469 (3) par Jean Bellange\ Nous trouvons ensuite agissant comme seigneurs de Nuillé JEAN Fmoux, le °1 janvier 1513 (v. s.) (4) RENÉ Fmoux, le 26 juin 1536 et le 2 avril 15I(i (5); PIERRE GALLOY¡;:R, à cause de (1) a Item, André Cormier, à cause de sa femme, mon homme de foy simple par deux fois, à cause et par raison de la moitié de sa mestaierie de Nuillé, avec la moitié de toutes et chaeunes ses appartenances et appendances et avec le réaige qui en despend, ouquel sont subgés, c'est assa\'oir: Jehan Devron, son homme de foy simple, à cause et par raison d'une pièce de terre et une iioë contenant journel à ung homme fauscheurs ou environ; item Perrot Le Prevost soit homme de foy simple, à cause et par raison d'une pièce de terre contenant quatre journelx ou environ. Et monte cest présent féaige que ledit Cormier tient de moy, tant en cens, rentes, comme services, envirou onze souls maille, ung bouesseaulx et demy de saigle et m'en est tenu faire la moitié d'ung cheval de service et taille seloti la grandeur des dictes choses, quant cestes choses ou l'une d'icelles adviennent estre levées par coustume, et une mine de saigle de voyerie chacun au une fois, et la moitié d'uug charroy et hernoys de bmufs pour emmener mes fains de la rivière de Dué à mon chastel et ville de Thorigné et demy charroy et hernoys de bmufs pour aller quérir les meules du moulin du Champs toutefois qu'il en est nécessité, lesquelles meulles il est tenu aller quérir jusques au pont Duigne. » Ibidetn.

(2) Aveu et dénotnbretncnt de Guilfau»te Bellan~er, dit 14»tars 1462. Arch. Nat., P. 3n/2 f~s 23 à 36.

(3) Aveu et dénotnbrement de Jean Be(langer, du 28 ttouentbre 14fi9. Ibidem f~~ 10 à 22.

(~1) Aveu à Jehan Fidoux, seigneur de Nuyllé, par Mathurin Le Verrier, pour certains objets tenus de Nuillé à cinq deniers tournois à la SaintJean-Baptiste. Charlrier de Thorigné, pièce ,,00.

15) Aveu à René Fidoux, seigneur de Nuillé, par Mathurin Le Verrier, le 26 jnin 156:J, et par Philippot Le Verrier, le 2 avril 15'16. Ibide» pièces W2 et 503.


MARTINE FIDOUX, sa femme (1), et PIERRE SAUION, le jeune, époux de Michelle Galloyer, le 18 mai 1584 (2).

Pierre Salmon vendit., par acte passé en la cour du roi de Navarre, devant Alexandre des Vaux, le 8 novembre de cette année 1584, il GmLLAUl\IE LE VERRIER, seigneur de Loisellerie, époux de Jeanne Fidoux, le fief de Nuillé et tout ce qui lui appartenait en ce fief, « à cause de la mort de défunte Martine Fidoux, femme de Pierre Galloyer », sa belle-mère. La vente fut faite pour le prix de « 420 escuz sols en principal et 16 eS3UZ deux tiers en vin de marché (3). Cette acquisition de Guillaume Le Verrier avait, comme on le voit, pour résultat de réunir en ses mains le domaine entier de l'ancien fief de Nuillé. Le nouveau seigneur fit le 10 juin 1593 serment dE: fidélité René de Villiers, époux de Renée de Bellanger, dame de Thorigné, et lui rendit deux fois et deux hommages pour l'ensemble de sa propriété (4).

Guillaume Le ~'erriPr, qui avait épousé Jeamac Fidol~.c, mourut en 1611, laissant trois fils Joachim, Jean et René. Ceux-ci partagèrent ensemble l'héritage paternel, le 28 février -16-12, ce qui a nouveau divisa Nuillé et Loisellerie. JOACHJM LE VERRIER eut dans son lot le fief de Nuillé (5), Il) Remeir~bra~ace.s de la cl~nlelleraie de.Thorigué, t. I, lu 40 vo. 1°-i Il comparut à celle date aux assises de Thorigné. Rernembrances de la cleàtellenie de Thorigné. t. l, fo H rD. Le H juin 1584, « Guillaume Le Verrier. (sei~neur de Loisellerie), et Pierre Salemon, raary de Michelle Galloyer, sont surcis bailler par adveu jusqu'aux prochaines assises, après qu'ils ont payé If> cheval de service deu par la mort et mutation des delfuncts Jehan Le Vp.rrie, père dudit Guillaume, et Martine Fidoulx, mère de ladite lltichelle, et de deffunct Franezois de Hellanger, dernier seigneur, pour raison des domaines et fiefs de Nueillé et Loysellerie, et porté à la somme de cent aols tournois qu'ils ont payé chacun pour leur moitié n. Ibideni, fo 2'J c^.

l;~) Ibident, f^ 40 v'.

r41 Ibidem, fo 99 vo.

i.5) A\'I'it 1fi12. n Vénerahle et discret maitre Jehan Le Verrier, prebtre, curé de Nuillé, subrogé par acquest au lieu de Joachim Le Verrier, a esihé un contract de partaige de la succession de défunt Guillaume


mais il ne le conserva que fort peu de temps et le céda le 3 avril de la même année à son frère JEAN LE VERRIER, prtitre, curé de Nuillé-le-Jalais, pour le prix de 1100 livres (1). Jean Le Verrier comparut pour rendre ses devoirs, aux assises de la châtellenie de Thorigné, tenues le 11 juin 1615 (2) et le 6 novembre 1636 (3). Cette dernière année il fut taxé à 15 livres, sur le rôle du ban et de l'arrière-ban de la province du Maine (4). Il était décédé le 18 novembre 1647 et son fief, réuni à Thorigné, appartenait alors à Henri de Saveuse (5).

Deux arrière-fiefs :Vo~ztpotsLLe et la Sérendière relevaient de Nuillé.

Le Verrier et Jehanne 1~ idoulx, leur père et mère, passé devant roui-iny, le 2R février 1GL2, ta la choisie du 13 mars, contenant que au partaige dudit Joachim lui serait demeuré: 1·~ La maison des Fourueaulx. avec sa garenne 2" une pièce de terre labourable nommée le Champ de la Noë une autre pièce de terre nommée la Groye des Noyers +~~ iilie autre pièce de terre nommée la Fourmentel 5" deux arpents de landes et de pessaig-es eu la lande des Estaugs G' une planc:he de vigne Item demeure à ce present tout aussy à perpétuité le fief et seigneurie ne Nuillé avec les hommes, subjects, cens et rentes dependanls tenus de cette seigneurie à foy et hommaige simple». Remeutbrances cie la chà~ellenie da Thorigrac, t. Il, fo 8.

iU 10 mai 1G1`?. (1 Maître Jehan Le Verrier, curé de Nuillé, présent eu personne, a exibé un <:onll'at d'acquest passé en la court' royal du Rians, pardevant François 1I10l'eau, le 3 avril 1G1`?, contenant qu'il a acquis de Joachim Le Verrier, une maison, yssue, garenne et quatre pièces de terre, appelées, l'une le champ de la Noë, l'autre la Groye du Noyer la tierce la Fromentay et la quarte les Petits Champs aux Bregeons, avec deux petites de pré, contenant deux hommées, comprins une portion de jardriu et taillis plus deux arpents de pessaige ou environ à prendre en plus grande pièce appelée les Landes et encore une pièce de ,igne sittuée au clos de Nueillé, contenant le tout ?2 journaulx plus tout droict de lief deppendant des dits héritages, le tout sittué en ladite paroisse de Nuillé, qui est tout le lief et domaine de Nuillé, tenu à foy et hommage simple de ceste seigneurie. fors le pré du Bouillon, La vendicion faicte pour le prix et somme d'unze cens livres », IGidem, f^ 'Il v". l'?) Ibidc~n, f~~ 41 v~~ et !i8 r~-

t31 ILider>t, fo, ?oll Vo et 201 r«.

ix) daiis la Semai~te dit hidèle, t. VI, 196.

(: Charlrier de Thorigné, pièce lit 8


Montpoulle fut possédé en 1405, par Jean Desvron en 1462 et 1465, par Guillaume Desvron, son fils en 1507, par Jean Vallée en 1543 par Jean Menard licencié èslois (1); en 1586, par Mathurin Menard, notaire à Nuillé-leJalais (2), et en 1611 par ses enfants Françoise Menard, épouse de René Le Verrier seigneur de Loisellerie Mathurin et Julien les Menards (3).

La Sérendière appartint en 1405, à Pierre Prevost en 14fi2 et '1465, à Mathie La Heallesse en 1622 à Marin Couldray (4); enfin er. '1632 à Jean Toutain époux de Marie Couldray, à LouIs Gigou, mari de Jehanne Couldray, et à Antoine Ragot, mari de Renée Guillemin « les dites Couldrays, fille de Marin Couldray et de Saincte Pinçonnet, et ladite Guillemin, fille de Louys Guillemin et d'Anne Couldray, petite fille desdits Marin Couldray et Saincte pjnçonnet » (5).

Les possesseurs de Montpoulle et de la Sérendière, outre la foi et l'hommage simple qu'ils faisaient à Nuillé, avaient à acquitter certains autres devoirs envers la ch âtellenie de Thorigné. Celui de Montpoulle devait « ung boisseau et demy de bled seigle de voyerie au jour de Saint-Remy, une corvée à byenner au moulin du Champ, et deux boeufs de charroys attelez avec une charrète pour aider à mener les meules de Pont d'Yuisnt: audit moulin ». Celui de la Serendière était obligé à faire une corvée pour « bienner » en la rivière dit Dué (6).

2~ Loisellerie aliàs Les Bruyères

Le fief de Loisellerie :,e composait, nous l'avons dit, d'une partie distraite de l'ancien fief de Nuillé-le-Jalais. Le siège Il) Cliartrier de Thorigné, pièce 72-

(2) Chartrier de Cheronne, pièce 33.

13~ Chartrier de Thorigné, pièce 1I8.

(4) Pièce du cabinet de M. :Brière.

(5) Ibide~n.

(6) Chartrier de Thorigné, pièces 72 et 128.


de sa juridiction était situé à environ cinq cents mètres du bourg, au lieu de Loisellerie autrement appelé les Bruyères. JEHAN ETTORE, qui possédait ce fief avant 1405 (1), eut pour héritière sa fille, GERVAISOTTE, qui en épousant MACÉ LE VERRIER, lui apporta le fief de Loisellerie. Macé en était seigneur en 1462 et 1469 (2). Il eut pour successeurs MATHURIN LE VERRIER, seigneur de Loisellerie, le 12 décembre 1513 (3), puis JEAN LE VERRIER, qui reçut pour cette terre, le 16 mars 1537, l'aveu d'un nommé Etienne Houdebou (4), (1) « Item la femme feu Jehan Rttore, bail de ses enffans, ma femme de foy simple par deux fois, à cause et par raison des domaines et féages qui s'ensuivent, c'est assavoir de son habergement de Nuillé ainsi comme il se poursuit avec les maisons et autres choses contenant cinq journels de terre ou emiron, ouquel lieu elle advoue droit de garenne à connins et justice foncière Item une pièce de terre ainsi comme elle se poursuit, tant en terres arables que en boys, quarante journelx de terre Item neuf Journelx de terre, tant en terre arable que en boys et gasts avec journel à six hommes de vigne de besche ou emiron Item une pièce de terre contenant tant en terres arables que non arables, prés, pastures, bruyèrAs, cinquante journelx de terre Item demi journel de terre en pastis Item son bordaige des Bruyères, anciennement de Loysellerie ainsi comme il se poursuit; Item un jouruel à dix hommes de vigne bescheurs ou environ Item six journelx de terre que arables que en boys Hem quatre journelx de terre arable 011 environ Item son féaige dudit lieu ouquel est subgjet; Jehan Dugué, son homme de foy simple à cause de certaines choses qu'il tient d'elle Item Jehan Chevalier son homme de foy simple il cause de '~ertaines choses qu'il tient d'elle, ouquel féaige ladite femme, ou nom que dessus, a environ dix et sept souls deux bouesseaulx de saigle. Et m'en est tenu faire la moitié d'un cheval de service et taille selon la grandeur desdictes choses, quant icelles choses ou l'une d'icelles adviennent estre levées par coustume, et une mine de saigle de voyerie chacun an une fois, et la moitié d'ung charroys et hernoys d<! hŒUfs pour emmener mes foings de la rivière de Dué à mon chastel ou ville de Thorigné chacun au une fois, et demi charroys et hernoys de bmufs pour aller quérir les meules du moulin du Champ, toutesfois qu'il en est nécessité, lesquelles meules elle est tenne aler quérir jusques au pont Duigue. » ~li~e~t et dé~tornbrenvent de Lancelot Turpin, aeigueur de Tleouigné, dae 1~~ octobre 1405. Arch. Nat, P 345/2 f" 43 Vo et suivants. (2) « Item Tlacé Le Verrier, à cause de Gervèsote, sa femme fille de feu Jean Ellore, homme de foi simple. » Ibide~a N 23 à 36 el10 à 22. (3) Chartrier de Thorigné, pièce 467.

(4) Ibidem, pièce 468.


Jean Le Verrier fut père de GUILLAU111E LE VERRIER, seigneur de Loisellerie et de Nuillé, de 1584 à 1611 (1). Le fils de ce dernier, RENÉ 1 LE VERRIER, comparut le 24 mai 1612 aux assises de Thorigné, où il exhiba un partage passé le 30 janvier précédent, constatant qu'il lui était échu, « la principalle maison du lieu de Loysellerie, la moitié d'une pièce de terre nommée le Petit-Bois, une autre pièce de terre nommée le champ de la Couldre, trois pièces de terre nommées, l'une le champ de la Croix, les autres les Grands Champs, et le fief et seigneurie de Loysell,3rie, comme il appartenait à défunt Guillaume Le Verrier, vivant son père » (2). Il fit serment de fidélité à Renée de Bellanger, sa suzeraine, le 11 juin 1615 (3). Le 5 novembre 1636, il fut poursuivi par le procureur de la châtellenie de Thorigné, qui lui réclamait le paiement du cheval de service en raison des décès de son père et de François de Bellanger, aïeul de la dame de Thorigné, et qui voula..t en outre l'obliger « à bailler par adveu le lieu do Loysellerie ». René Le Verrier représenta qu'il avait déjà payé le cheval de service le 19 février 1620; quant à l'aveu qu'on lui demandait, bien qu'il l'eut précédemment rendu le 17 ~uillet 1625, il s'offrit cependant à le rendre à nouveau si on voulait lui donner « terme suffisant pour faire tenir son assize pour avoir cognoissance de ses subjets ». Le procureur lui accorda en conséquence un délai jusqu'au mois de mars suivant et se désista de la demande du cheval de service (4). De son mariage avec Françoise bTe~aard, René eut plusieurs enfants, qui le 15 mars 1642 se partagèrent sa succession. Le fief de Loisellerie échut à l'ainé RENÉ II LE VERRIER (5). Celui-ci (1) Rensembrances de la cle~ztellemie de Thorignz, t. 1, P~° 14 1'29 v~ et Chartrier de Thorigné, pièces 469, 470, 471.

(2) Remembrancea de la cl«3teLlenie de Thorigné, t. Il.

(3) Ibide~n, f~~ 41 el 42.

(4) Reneernbrances de la ch~itellenie de Thorigné, t. II, fo' 1\19. ) « René Le Verrier, fils de défunts René Le Verrier et Françoise Menard, vi,'ant sa femme, a présenté un contrat de partage de la suc-


ne posséda que quelques années ce domaine dès 1646 il était réuni à celui de Thorigné (1).

:3° Les Ve~·de~°ies aliàs La Busao~araière

Le fief des Verderies plus anciennement appelé La Bussonnière, situé comme les précédents sur le territoire de la paroisse de Nuillé-le-Jalais, relevait comme eux de la châtellenie de Thorigné. Au ~V~ siècle, le fief des Verderies était divisé en deux domaines possédés par deux familles différentes.

En 1398 l'un de ces domaines appartenait à JEAN FORTIER à cause de .TEANNC sa femme (2). Ce Jean Fortier ou Forestier, surnommé Brenlevaust, était mort en 1405, laissant sa part des Verderies à sa fille alors mineure et sous la tutelle de JEAN DE VILLIERS (3). Un autre JEAN cession de sesdits père et mère faict devant maitre Baltazar Le (;ouz, notaire royal, le 15 mars lfri2, contenant qu'il seroit demeuré audit René pour son lot et partage, le fief, "assaulx, subjects, dit lieu de Loisellerie, avec partie du lieu de Loisellerie consistant en logis manable, grange, estable, court, puits, fosse à eaue, jardins, terre, prés, passaiges, garennes de9'eusables, boys, tenus à foy et hommage simple de céans n. Beme»ibrances de ia chàtelleraie rle Thorig>aé, t. nI, fo 189 w.

(1) Chartrier de Thorigné, pièce 480.

\2.1 ,( De vous, noble et puissant seigneur monseignour monssour Guy Turpin, checalier, seignour de Thorigné, je, Jehan Fortier, à cause de ,1ehanne, ma femme, tiens et avoue a tenir, au regard de votre dicte terre de Thorigllé, à foy et hommage simple les chouses, dont je jure la féauté en votre court de Thot'igné, tant en fié coume en domaine, et par raison desdictes eliouses vous suy tenu fere trente soulx tournois pour la moitié d'un cheval de service Scellé du contre scel des contratz de la court de Vaux-eii-Beliii. » Pièce ou~ sceaev ~erdu du Cabinet dc J[, Briè~ne.

(3) « Item Jehan de Villiers, comme bail de la fille feu Brenlevaust, mon homme de foy simple, à cause de la moitié de l'estre de la Bussonnière autrement appelé la Verderie et de la moitié des appartenances et du fié qui en despend qui monte tant en cens que rente environ neuf soulz tournois, et m'en est tenu faire demi cheval de service, tout ledit cheval abourné à soixante sous tournois, et tailles, quant cestes choses adviennent estre levées par droit et coustumes avec droit et obéissance comme à seigneur de fié. » ar~ere et dé~aombre»ient de Lancelot Turpin,


DE VILLIERS était homme de foi simple de Thorigné en 1462 et 14fi5, « à cause et par raison de la moitié de l'estre de la Bussonnière » (1).

Le second domaine appartenait, en 1405, à MICHEL OUOINEAU (2), de 1462 à 14fi'3 à son gendre HUBERT PIOGER (3). Le fief entier était dès le XVIe siècle entre les mains d'un seul seigneur. JULIEN VALLÉE et MATHURIN I VALLÉE, le possédèrent ou simultanément ou plus tôt successivement (4). Il passa ensuite à MATHURIN II VALLÉE, qui, le 18 mai 1584, assisté de « Maistre Mathurin Menard, son curateur pour la conservation de ses immeubles, et de damoiselle Héti~abetlt Synxeau, sa femme et admini,;tratrice de ses biens », jura foi et hommage à Marie d'Amilly (5). Aux assises de Thol'igné tenues le 10 juin 1593, coniparut Ysabelle Syneau « femme ordonnée par justice à la conservation des biens » de son mari elle paya deux écus sols pour deux chevaux de service « deubs à la seigneurie par les mors et mutations de defunts messeigneurs Françoys et Françoyslesde Bellanger, seigneur de Titorigné, dit I< octobre 1405. Arch. Nat., P ::M-5/2, £0' 43 v" et suivants. Dans le même dénombrement on trouve « Item Jehan de Villiers, bail de la fille Jehan Forestier, à cause de la moitié dudit estre et appartenances deux bœufs. »

(1) Aaeuaï et dénornbrememts de Guillamue et de Jean Bellarager du 14 ~nars 1462 et dit 28 nozerubre 14E9. Arch. Nat. P 345/2, £0' 23 à 66 et -10 à 22.

(2) Hem Michel Oudineau, mon homme de foy simple à cause et par raison de la moitié de l'estraige de la Bussonnière autrement appellé la Verderie et de la moitié des appartenances et du fié, qui en despend, qui monte tant cens comme rente neuf souls tournois et quatre quarts de vil], et m'eu est tenu faire demi ~_heval de service, tout ledict cheval abourné à soixante souls tournois el deux souls six deniers de taille D ~lreu et dénombrernent de uancelot Tttrpin, seigneur de Thorirpaé, ctie 12 octobre 1405. ArcU. Nat. P 345/2, £0' 43 v~ et suivants.

(3) u Hubert Pioger, à cause de sa femme, fille de feu Michel Oudineau, homme de foi simple pour I"estre de la Bussonnière » .3ueu.~ et dénombrernent de huillaunce et leara Bellanger, 14 mars 1462 et 28 nouembre 1469. l6idem fOB 2:1 à 36 et 10 à 22-

(fj Ber~aembrances de la chdtellenie de Thorigné, t. (0100. (5) l6idesn, (013 v'.


vivans elievalliers de l'ordre du Roy, et de deffuncts Julliau et Mathurin les Vallées, vivans seigneurs. des Verderies » (1). Mathurin II et sa femme vivaient encore le 24 avril '1607 (2).

Le 3 août 1617 (3) le seigneur des Verderies était MATHURI.N III ~'aLL~E, officier de chez la reine, époux de Ch,arlotte Pezé. Celle ci était en août 1622 veuve et tutrice de ses enfants mineurs CJtarles Fnaraçoise et Ccatherive, au nom desquels elle rendit aveu à Thorigné le '12 septembre de la même année (4). Sa fille Françoise étant venue il mourir, le procureur fiscal de Thorigné réclama à Charlotte Pezé, le 6 novembre 1636, le droit de déport de minorité en raison de ce décès. Charlotte refusa de payer ce droit, disant qu'elle l'avait acquitté « pour tous ses enfants au décès de Mathurin, son mari (5). Catherine Vallée épousa Jacques 'Richard, sieur de la Rousselière, porte manteau du roi, avec qui elle vivait, en 16.!1Ü, au lieu seigneurial des Verderies. Ce lieu appartenait alors il son frère, CHARLES VALLÉE, sieur des Charmes et des Verderies, qui le posséda jusqu'après 1G~8 (G). Il eut ensuite pour propriétaires ARNOUL LE V:>.ssECrR, avocat au siège présidial du Mans époux de ~9largrset'éle-Françoise Gaetaaira puis lPUr fils FR.NÇOIS-AUGUSTIN LE VASSEC1R, marié, par contrat du 12 juillet 1720, à Anne Vlaltot, fille de Nicolas 111ahot, maitre des forges de Lauue, et de Marguerite Jarry (7); enfin (-r--R\7-IS-JEAN fi--IR131N DE LA BOULLEHIE, (11 Remembrances de la chctlellenie de Thorittné, t. If, fo ll)f.l. i,>? :Lrett et dénwubremettt cl~ René~ cle Bellanyer, dame de TJtorigné (lit 1 aL-il 1607. Arcli. Nat., P '>30.

(JI Rententbrnnces de la chütellenie de Thorigné, t. Il, fo G't. I Ibidem, t. II, f' 61.

I,j) Ibiclerra, fl 9D r,

(G) Contptes des certs deues ~e la chtit~~llenic de Titorigué,l6+8-1E49. Du cabinet de 14I. Brière.

(7) L'abbé G. Esnault. Inventaire cles toittutes ancientzes des ~otaires du Jlaras, t. V, 5fi.

LX. 11


conseiller du Roy, lieutenant de police à la sénéchaussée de Chuteau-du-Loir, époua de .llcx~ ie-!llcc~~gverite Le 4'assetc~ Le 21, aoùt t7G9, Gervais-Jeau Barbiu donna procuration à :Monsieur Robert, curé de Nuillé-le-Jalais, pour rendre aveu en son nom au marqui~,at de Thoriôné (1).

CHAPITRE III

L11iI3:1UDIÈRE TSEbiDART LA ROUSSELIf:RE; I..1 COSSEnIE LA CIIACQUlNIÈRE; nOIS-TI\AVEI1S; L.1 PELOUSE ET MONT:IIGU LE GUÈ-AUX-A:'IfES; LE GLAND; f:_ASSEt3fF: LA I:OU:ILTIi:RE LE VAU-DE-CRANNE S:1SNIÈRE~.

Jo Limbattdiè~~e

Le fief de Limbaudière (~), situé au nord du bourg de Thorigné relevait de la châtellenie à foi et hommage simple. Le logis seigneurial aujourd'hui détruit s'élevait très prohablement sur l'emplacement où a été construite la ferme moderne de La Cour, près de laquelle se voit encore une cave voùtée du ZIII° oi du :~IVe siècle.

ANDnÉ QUENTIN é cait seigneur de Li,nbaudière en 1405 (3). 1hrié à Renée Thibergeau, il fut père de JE:1~ I QUENTIN, seigneur de la Quentinière (en Valennes), et de (1) RememLrances rie La ~leàtelLenie de Thm~igrec, t. IV, p. n7. 1.21 Limbaudière, l'Imbaudiere ou Laimbaudière.

y3) « André Quentiu, seiiiieiii- de Laitnhaudière, mon homme de foy simple, à cause des domaines et staiges qui s'ensuirent, esqudx il CI justice telle comme ses predecesseurs ont acoustume user. C'est assavoir de son herbergement de Laimbaudière avec les maisons et autres choses et avec la fuye el les boys d'enciron sou dict herbergement, contenant le eircuite de l'estre dudit lieu environ quatre journelz et lesdiz bois huit arpeiis item uug vergier appellé le Clox de Lestolle item deux pièces de terre arable avec les plesses d'environ toutes celles choses en ung teuaul; item ung doux de vigne appelé le Buron coutenant journel à quatre vings Vorrrnes de liesclie ou environ; item une pièce de terre en boys et plesses conlenant en tout quinze arpans ou environ item


Limbaudière, en 1462 et 1465 (1). Nous avons vu que Jean 1 Quentin avait épousé avant 1464, ltTar°ie de Tiercent, veuve de Patry Le Voyer, seigneur de Pescheray. D'une première alliance il avait eu JEAN n QUENTIN, qui s'unit, t Gino'de Le ~'oyer`, fille de sa belle-mère. Nous ne saurions dire si ce dernier posséda Limbaudière il était mort et sa femme était remariée avec Vlacé de Coustances, sieur de la Frédonnière, le 9 juin 14J4 (2).

Le fief de Limbaudière appartenait en 149!J, à JEAN DE NUPORT, que l'on voit assister comme témoin, le 5 avril de cette année, au contrat de mariage de Mathurin Quentin, une pièce de terre en boys et plesses contenant eu tout quinze arpens ou environ item une autre pièce de terre partie en boys et partie en terre arable contenant environ dix arpens ilem une pièce de vigne appellée le Vigwau partie eu fa;on et partie en ga~t item sa mestaierie et appartenances :i sondict hahergementLaimbaudiére, contenant le eircuite de l'estre d'jcelle mestairie environ troys journelz et les terres arables en plusieurs pièces contenant six yin"s et dix journelx ou environ et journel a dix hommes de prés six eu troys pièces en la riviere de Dué item en pasturaiges avec les boys et hayes qui y sont vings et troys journelz ou environ item une pièce de hoys appellé la Gallebruniére item son bordaige qui est sis entre la ville de Thorigné et le Vaudecrene; item une maison avec l'estre, courtils et appartenances sises en la \ille de Thori~'1Jé; item son féaige dudit lieu auquel et subject André de Marcé. son homme de foy simple, il cause et par raison de six journelx de terres arables et six journelx de pasturaiges sis entre ses domaines, et monte le féaige qu'il a il cause des choses dessus dictes tant en cens, renles, que services, vings et sept souls maille et quatorze poucins. Par raison desquelles choses il m'est tenu faire ladite foy et hommaige simple, ung chaval de service abourné il soixante souls et cinq souls de taille quant cestes choses ou l'une d'icelles adviennent estre levées par la cousturne, avec drois et oheissance comme a sei~neur de lief n.uers et dénoricbreme>rt de Lct>acelot Tw~iu, seiynenr r!e 1'horigné, du 12 octobre 1405. Arch. Nat., P. :~k5/l fo 43 c~ et suivatits.

(1) .4z~rae.c el dénom6rements de Guillamue et .Jean Bellanyar, 14 raars l4fi? et ?8 no~~euabrc 14(i~i_ Ibidem, f~~ 23 à 3ti et 10 il 22. t219 9 juill UU~. Aveu ;i Jean Bellanger, seiôneur de Tlrorigné, par Dtacé de Coustances, sieur de la Credonniére, à cause de damoiselle Girarde Le sa femme ),, pour son bordaige du Gast, « qui fut anciennement feu Jouenne, en son vivant veufve de Syrnon Le Lievre ». Uriginal parchemin du cabinet de M. Hriere.


sieur de la Quentinière et d'Anne des Hayes. Jean de Nuport rendit l'aveu de ses terres, le 30 août 1522, à ~larôuerite de Villiers, veuve d'Adam de Bellanger (1). Il était remplacé avant P1ai ~1536 par MltDARD DE NUPORT, écuyer, seigneur de Limbaudière (2).

En 1575, le seigneur de Limbaudière était JEAN 1 LEROUX., écuyer, qui, lE '15 juin, donna procuration à Franç,oi,s Surgère, notaire, pour en son nom déclarer ce qu'il tenait à cens de la châtellenie de Thorigné (3). Il eut deux fils JEAN Il LEnou1 et. CHARLES LEROUX. Ce dernier qui se qualifiait de « fils puisné et héritier bénéficiaire de defunct Jehan Leroux, seigneur de Limbaudière), comparut, le 18 mai 158~, aux assise3 de Thorigné pour rendre son aveu. Il n'y fut pas admis, le procureur de la cour exigeant qu'auparavant il apport'it « ses lettrcs royaux par bénéfice d'inventaire, ensemblE le jugement d'entherinemeut d'icelles » (4), ce qu'il fit aux assises tenues le 23 août 1584 (5). Charles renonça à la succession de son père en faveur de son frère Jean II I,eroux, écuyer, seigneur de la Gombardière, qui, en vertu de cette renonciation, était unique possesseur de Limbaudière le 15 mai 1596 (6). Jean II se maria deux fois d'abord avec Jea~t;te de l'augirattlt puis, avant le 6 avriI1~,9!) avec Gallcaise de bfella~zger (7). Aveu àleaii Bellatiger, seigneur de Thorigné,

i?) IGideu2.

Bn Chartrier de Thorigné, pièce 382.

( i'~ Ilr:membraT~ces da la rlu'<tUfenie de Thori~né, I, f" 21.1 v(,. I~~) Ibiclent, f' 35 c~.

(lJ¡l/¡idel/l,t. t. f" 1',7,

i7i Par acte du h a\TiL 15\Æ, passé devant Raphaël biarye, notaire de la cour royal du Nlaiis, noble dehau Leroux, escuyer, sieur de la Gombardiére et de Limbaudière, lant en son nom que comme procureur de damoiselle Gallaise de Mellanger, son épouse, ,) vendit pour le prix de 21.10 écus, ;¡, maitre Marin Amellon, sieur de Villarceau, acliaptaiit pour dame Catherine Roger, sa mère )), le lieu et hordaôe de la Gautelerie, situé à Thorigwé, tenu de Limbaudière à 3 deniers de cens à la SaintBaumer. Arch. du château de la Gautelerie à Thorigné.


Il vivait encore en -1610 (1) et devait ètre décédé en -1G1~ en cette année le fief de Limbaudière était réuni à la châtellenie ('2),

De Jean If Leroux et de Jeanne de VaugirauIt naquirent_ .lane Lerort. sieur de Cossé et de ~Iontréal, qui épousa de Srr(lairaea, fille de René de Sallaines et de Françoise Le Boindre (3

`?~ Catlrerine Leoorr.

René Lenou.c, sieur de Cossé et de Montréal, baptisé il Thorigné, le -1G décembre 1591 (.+1.

.llarie Leroux, baptisée il Thorigné, le '28 novembre 1593 (5).

Un document des :lnclr-iues dit Coyaer, daté de mars 1G?`?, concerne « Amie et René Le Roux, frères, escuyers, sieurs de Cossé et d:e Montréal ». Il nous apprend, que « Anne, partant du païs dit Mayne, pour aller passer et embarquer sur mer, fut accusé culompuieusernent devant le vis-1),tilly d'Alençon de complicité » en certains méfaits que quelque temps après il fut poursuivi pour « une risque qu'il eu~t pour des droits honorificques en J'église de Thorigny o et i I) Remerrabraraces ri~ la clr«tclfenic~ de TAoeigtaé, t. II. r, ;l. ('2) Chartrier de pièce 383.

1:11 L'abbé L.-J. Denis, Ijistoire généalogique cte la J'anuiüe de Sallaines, p. 625. C'est tort que nous ayons dit dans ce travail 'u'Annü Leroux était fils de Gallaise de ~Iellanger,

(i) a Le 15' jour de décembre 15DI, fut 1)~iptizC~ René, fils de noble Jehan Leroux, sieur de Gombardière et de Limbauldière, et de damoiselle Jellanne de Vaugirault, Parrains noble homme René de Villiers, chevallier de l'ordre du Roy, notre sire, sieur dudit Iteu et de Lauberdière, et René Roôer, sieur de Lauriére. Narraine damoiselle Renée de Bellanger, dame de Thuriôné. Reg. ~a~ cle Thorigné.

p51 Le 28 novembre lut lr,tptizée Nlaiie, fille de noble homme Johan Le Roux, sieur de Limbaudière et de la Goubardière, et de dame Jehanne de V3»â1l'anlt, son espouse. Parrain noble Jehan de Bellanger, escuier, sie1ll' de Glerrnont et de Conuahier. Marraines nobles dames Marie d'Amilly, dame duuliet Thol'ig-lJé, et damoiselle Reliée de Vaugirault, veufce de défunct uohle homme Jacques des Herses, sieur des Hoies IDiclcm.


qu'au cours de la bataille « il reçut cinq coups d'espées, d'harquebuse et pistollet ». C'est tout ce que nous pouvons tirer de ce parchemin déchiré et en fort mauvais état (1).

.`3° Fief Ysembart

Le fief Ysembart, corlsistait en un « féaige. en la ville et paroisse de Thorigné », montant « environ vingt et huit souls huit deniers touvnois et deux poules », pour lequel il était du il la chittellenie de Thorigné douze deniers de service à la Saint-Baumer. GERVAISE YSEMUART et sa femme, le vendirent, avant 1405 à ANDRÉ QUENTIN, seigneur de Limbaudière (2). Ysemhart suivit dans la suite la fortune de ce dernier fief (3).

+~ La Rozdsseliè~'e

Le lief de la Rousselière, qui relevait foi et hommage simple de la châtellenie appartenait à JEAN LECHAS, le jeune, en -1405 (4), u se:; enfants mineur: en 14G2 et 14(39 (5), à CUARLES BRESLAY, dit Guitonière, époux de liadegonde l,il Archives du Cogner, E. '1.51),31.

('2) « Item ledit André Quentin, mon homme de foy simple il cause et par raison de son féaige qu'il a en la ville et parroisse de Thorigné, lequel il a acquist et acheta de feu Gervèse Ysembart et de sa femme ainsi comme il se poursnit tant en reutes que en cens qui monte environ viu;~t et huit souls huit deniers tonrnois et deux poules que cens que rente, et m'en est tenu faire douze deniers de service il la Saint-Bomer. » A ver< et dénorobr~ement de Lancelot Torpin, seiyaeun de T(roriyaé, do 1':2 octobre 1405. Arch. Nat.,P 3~5/2, f`~ 1,3 v~ et suivants.

131 Tous les seigneurs de Limbaudière dèclarent dans leurs aveux « douze deniers de service chacun an pour le d'Ysembart », (4) ,( Item Jehan Le Gras, le jeune, mon homme de foy simple il cause et par raison de sa terre de la Rousselière, n .tvao et rléraorabrerirent de Lancelot Tnrpiu, seirtneur e(e Thnnigué, dit 1' ootobne 1405. :irch. N~t., P ::J}3/2, th 43 v" et suivants,

15) .tve!r et dénombrerrent de Goillnmre et Jme ~3ellnru~cr, 14 mnrs 14ü':2 et ?8 raouem6ne 1-EG'J. lbidene, f" 23 à 3i et 10 il 22,


cle Gontil, de 1588 il 1609 ('1). Les biens de ce dernier seigneur furent saisis et le lieu de la Rousselière vendu aux enchères fut adjugé à demoiselle CATHERINE DU Tnorrc:H~,r, épouse de Jacqi<es Le Ballevr, écuyer, sieur de Landres, pour la somme de neut cent trois livres (2), Catherine rendit aveu à Thorigné le ~1(3 février 1638 (3). Le 22 octobre 1643 Rober·t Le l3allettn, son fils et procureur, comparut en son nom aux assises de la châtellenie (4),

Dans un acte du 16 mars 1645, JM:QUES RICHARD, époux de C.'atherine L'ollée et beau-frère de Charles Vallée, sieur des Verderies, est dit seigneur de la Rousselière (5). Cette terre fut ensuite possédée par JEarr-Fanrrçors LE GUERNEY DE LONCH:111rr', notaire et greffier de Ballon, mari d',1nne l'osté, qui, le 28 janvier 1 î61·, la vendit à 1\L'RrE-MARGl1ERITE E BRÉTEurL, veuve du sieur ,Teav-FrcwÇoi~ C,ailloli Bo~trdonraière, marchand au Mans (6).

~B I,e Co.~ser~ie alins le F'rn·aoin

Dans le dénombrement qu'il lit le 12 octobre 1405, Laucelot Turpin cite parmi ses vassaux « .TEHaN LAIIIBELLE, à cause de sa femme, mon homme de foy simple, à cause de ses vignes de la Roussellière, ung clo~ de vigne appellée les Joncaux, contenant journel u trente et cinq hommes bescheurs, et six souls de rente que les hoirs feu Jehan Travers luy sont tenus faire chacun an au jour de la Saint-Rémy; item douze deniers de ceus que les hoirs feu Jehan Travers luy sont tenus faire avec le droit de féaige qu'il a ès dictes choses. Et m'en est tenu faire ung cheval de service abourné dl de la clmilelle>iie tic Thoniyné, L l, f' iCI v~ et Chartriar Je Tliot,i~tié, pièces 6311 et 53\.

I~¡ Arcliices ~lu Coôner.

(:J) Cliartrier de Thorigné, pièce G2'J.

(~) Remen~brances de la chcitellcnie de Tieori~né, t. Il.

(5) Chartrier de TUorigné, pièce +00,

(6~ Rerne>nbrances de la chcïtellenie de Tl~oniyné, IV, p.


à quinze soul~ » (l). Le fief ainsi déclaré est celui qui dans les actes plus r:3cents est nommé La Cosserie ou le Pressoir. Jehan Lambelle le possédait dès février 1393 (2). Le 26 avril 1456 il était la propriété d'ÉTIENNE 1 DE i\L-\RCÉ (3), qui dans le dénombrement de Guillaume Bellenger fait en "1462, est dit « héritier de feu Jehan Lambelle et sa femme » (4). En 14Ei9 Étienne de Viarcé était mort (5) son successeur JULIEN DE MARCÉ rendit aveu en juin 1476 « pour le bordaige du Pressouer autrement appelé la Cosserie, ouquel bordaige y a fief et seigneurie ) » (6). Ce fief fut ensuite possédé de 1494 à 1497 par ÉTIENNE II DE MARCÉ, « fils de Theriot de Marcé» (7), qui, le 1!a juin "1496, reçut la déclaration que lui nt Jehan de Marcé pour plusieurs pièces de terre qu'il tenait de lui à cens (8). Il mourut avant le 5 juin 1505. A cette date, .r ULŒ¡NE, sa veuve, est tutrice d'É'l'IENNE DE M altcÉ, le ur fils mineur, et rend en son nom aveu au seigneur de Thorigné (9). MATHL'HlN DE lll~sc>i, « tila aistié et principal héritier de feu Julien de Marcé », était, le 30 juillet 159.7 et le 28 mai 1533, seigneur de la Cosserie (10). Il eut pour successeurs, MATH URI~ LEVnu,. paroissien de Saint-Micliel-de-Cliavaignes, dès le 12 juillet l Arch. Nat., P 345/2, 1,; ~k~ et suivants,

(2) Note de \t. l'abbé G. Esnault.

(3) 26 acril 1!i<5.i. Aveu rendu par Eslienne de ]\Iarcé. t maistre Guillaume Bellanger, pour le « hordAif;e du Pressoller". Ori~. pai-cli. scellé du cabinet de \I. Bi-iè t~e

1'.) \1 Eslieune de Marcé, héritier de feu Jeli-,tit Lambelle et sa femme, mou homme de foy simple pour son fief et domaine, c'est as.savoir le bordaige du Pressouer Arch. Nat., P 3t5/2, f" 23 i :.Iii (5) « Les enfants feu Estieune de Marcé ~lreu et c(énombrmuent cfe Jeara l3ellanger~ dic 28 nocernbre 14ü!J, Ibiddm, f~ 10 à 22, (6) Note de M, l'abbé G. lanault.

(71 Pièce du cabinet de M. Brière et note de NI. l'abbé G. Esnault. 171) Chartrier de Thorigné, pièce 376.

t9~ Note de !II. l'abbé G. ranault.

1111) Pièces du cabinet de M. Brière.


-1565 ("1), puis MARIN LEDRL, avant le 29 juillet 1574 (2). Ce dernier vendit son fief en 1575 à François de Bellanger. pour la somme de 80 livres tournois (3).

fi~ l.ct. Cliacdtti~tière

Le fief de la Chacquinière. situé près du château de Thorigné, sur la route de Connerré, appartenait, le '2'-? décenlbre 1393, à GEOFFROY TORCHÉ (4). Il fut ensuite la propriété de GUILLAUIIIE S,VOIÈRE, qui, par son testament, constitua au profit de l'église de Thorigné, «( une mine de seigle de rente perpetuelle sllr soit fief (5). CrUILL:TnILTE, sa fille, l'apporta avant 'I!~115 a JEAN Gmarls (6), son mari. GUILC,.yU9IC: LE INIOIJLNIER, qui l'acquit des héritiers de Guillaumète, en était seigneur en 1462 (7) et Chartrier de Tlioriôné, pièce 3i;,

n2~ Ibidena, pièce aîN.

nii Note de M, l'abb," G. Esnault.

14) Chartrier de Thori~ni·, pièce 1.

i:y Ibidem, piécc. t;.

l6~ Iten Jehan Guiars, il cause de sa femme, mon homme de [oy simple à cause et par raison de son habergement appelé la Chacquinicre avec les fiez et appai-teiiatices d'icelui, tant en maison que autres choses avec ung \'i\'icr iL rnectre poisson, deuz jouruelc ou environ itern journel i, trente hommes ou enciron de courtils avec boys et Imyes tout en une pièce et avec un:,¡ pastis eliclox avec icelle choses; item une pièce de terre arable contenant troys journelx ou environ item une autres pièces de terre contenant, tant en terres arables que non arables, pastis, tiiiiais comme autres choses, soixante et cinq journelx de terre ou ewirou et avec ce, journel à troys hommes faucheurs ou environ de prés, et l'estraige qui er~ deppend qui monte tant en cens comme en rente environ et deux souls six deniers et une mine de saigle et m'en est tenu faire ung de service abourné è cinquante souls tournois, et quatre souls de taille quant cestes choses ou rune d'icelles adviennent estre levées _lcezr d dr~norrrltremetat cle Lamelot Tryrita dit 1_~ octobne 14()5, ArcL. Nat., P. ai;`3 f~~ f3 et suivants.

(7p Guillaume Le Maulnier, homme de roi simple pour son habergement appelé la Clme'luinière. fiefs et appartenances lesquelles choses furent il feu Jehan Guixrs, à cause de Guillemette, sa femme, des héritiers de laquelle Guillemette, ledit Le nioulnier les a acquises n. _1 ncu.r et clénornbreme~rta de r uillarmne et Jean BellamJer, 14 titars 14(ï_' et ?n taorem6re 14G'J. Ai-eli. Nat., P. 34512 fbs 23 à 36 et 10 à 22.


1477 ('1). La terre de l.1 Chacquinière demeura à la famille Le Vioulnier jusqu'il la fin du 1~'Ie siècle (2), dans la suite elle fut divisée et vendue il de nombreux particuliers qui restèrent tenus à en faire foi et hommage par depié de fief à la seigneurie de Thorigné.. 70 Bois-Trnvers aliàs Le Corriaier

Ce fief appelé anciennement le Cormier fut plus tard nommé Bois-Travers du nom de la famille qui le posséda pendant deux siècles. Il relevait Ü une foi et hommage simple de la seigneurie de Montfort et à une autre foi et hommage simple de celle de Thorigné; à cette dernière ses détenteurs devaient offrir une paire de gants blancs chaque année au jour de Saint-Baumer.

JEAN THA YERS, fils ainé de Jean Travers en était seigneur en 1405 (3) et en 'l406 (4). Un ou plusieurs individus 1.1) Aveu de Jeliaii Oudineau raine, à Monseignenr Guillaume Le Dioulnier, seigneur de la Chacquinièrc. Original parch. du cabinet de M. Brière.

i2) mai 158î. Julian Li:,Li-et exibe un contrat contenant qu'il avait acquis, le 12 juin 15fi11, de Julian de ylehahert, demeurant à Saint-.Nlichelde-Chavaiônes, de Nicollas 13eaudoux, demeurant à Saint-Antoine-deRocherol et d'Antoine Beaudow, demeurant audit Saint-Michel, deux hommées de pré, dependant de la Cheequinière, constant. au pré de François Ligeret, à cause de ses enfants, par la succession de defunte nlichelle Le Atoulnyer, leur mère, d'autre côté un pré à messire :1mbroys Le llenant, prêtre, qui l'a acquis de Jacques Le ~Ioulnier. Lesquelles deux hommées de pré appartenaient aux femmes des dits venl1t:urs, qui les tenaient de Gilles :llallet leur père, qui les avaient achetées de Bertrand Le i~lotilnier. ilernen~bnances de la châtellenie de Thorigrté, t. I, 25 r".

1.,3) a Item Jehan Travers, fils aisné de feu Jehan Tr;n'ers, mon homme de foy simple à cause d'ang sextier mine de seigle de rente que lui est tenu faire T3laise Calu, chacun an au jour de la feste sainct Rerny, à cause de partie de sa mestsierie appellée la Brouce messire Macé, et d'ung sextier mine de saigle (lue lui est tenu faire Guilleminet Bruueau audict jour de la sainet REmy, à cause d'icelle mestaierie et de partie des appartenances et m'en est tenu faire une paire de gans blatis. .1 r~etr et déaaornbremerzt de Lancelot Tuynira, seiyaaur cle Thoriyné, dIt l octobre 1405. Arch, nat. P. 3t5/2 f~ 43 VO et suicants.

(4) Item Jehan de Travers, mon homme de foy simple à cause de


du même nom le possédèrent jusqu'en 1501 (1). Les aveux de ce fief Thorigné furent rendus, le 6 décembre 1505 (2), par JEANNE, veuve de feu Jean Travers, et le 31 juillet 1517 (3), par son fils HENÉ TRAVERS. Celui-ci ne vécut que peu, en effet Jeanne, sa mère, reparait le 23 juillet 1519 (4) et avoue le fief au nom de J OVIN TIIA VERS, son fils et de ses autres enfants mineurs- Le `?1 juin '1543, il appartenait à JEAN DEHOUYNEAU, fils et principal héritier de défunte CATHERINE TRA VERS, fille de feu Jean Travers et veuve de G.1LLCT DEROUYNEAU Le seigneur de Bois-Travers de 1581 à 1599 fut 1LLTHUnIrr BOURDIN, prêtre, chanoine prébendé de Saint-Pierre de la Cour (6).

La succession de Mathurin Bourdin ayant été partagée le 1-1 octobre '159~ entre ses héritiers (7), la majeure partie de mrt sous tournois et un sextiot, mine de seigle que lui est tenu faire Blaise Calu, chacun an, au jour de la saint Remy, par raison de partie de la métairie du Cormier, sise en la l'arroisse de Thorigné, et de la Brosse messire ;\lacé d'Ailléres, et par raison d'un sertier mine de seigle de reute flue lui est teiili Guillaume Bi~uitieaut, chacun an, audit terme, liai- raison de partie de ladite métairie, de XXII denier5 de cens que lui sont teiitiz faire chacun an à Noël, c'est assavoir ledit Calu, x deniers. et ledit Bruneau xii deniers; et ledit Jehan Travers m'eti est tenu fei-c ladite foy et hommaige et droit et obéissance comme à sigtieur de fié DéreorirRrerirent de la cleàtelle~aie de 3fout/~ort yiw Jean, xienr dc lvrnier~es, cJr~c~alier, rirari de 3larguerile d'Harcortrt, dit 15 juin 140lj, ~lrclr. nat., P. 3h:J Jjl. pièce 31.

1.11 :lr~eo et déuombreroerats de Goillamne et Jeara Rt!lla>t!/er 14 mars 14G2 et ?8 norerubm 1 SGJ_ Ibidena, p, :H5/2, l'os 23 ;1 3li et 10 a 22 Chartrier de Thorigné, pièce 3/'2,

12) Chartrier de Thorigné, pièce 373.

I::J) Ibidenr, pièce, aïf.

1+) Ibidem, pièce 375.

(5i Pièce du cabinet de ni. 13t,ièi-e.

ILi) Il r.omparut pour son lief aux assises de la chàtellenie de Tlrorigné, le Ii juin 15"\l. pal' maitre Geoffroy Jobin, prètre, clranoine prebelllll' de Saint-Pierre, son procureur, et le 9 novembre '1594, par .Tehau Piron, prebtre, chanoine de la même église aussi son procureur. Remerirbr·ances' de la chcitellenie de Thori~(rté, t. 1, f~~· 29 r~ et -112 V",

i71 Ses héritiers daient: .Julienne Bourdin, veuve de René Daussan les enfants de défunts Jean' Le Verrier et de Patience Bourdin Joachim


la terre et la maison d'habitation du Bois-Travers, revint a l'un d'eux JULIEN BOUlIDIN, qui, le 21 juin -1606, y habitait avec Vias·ie Botvrdirt, fille qu'il avait eue de sa première femme llvric Cherdon ~1). Julien Bourdin était mort en 1636, sa seconde femme .lurbroi~e Ledr·t~ fut après lui dame du Bois-Travers (2).

La l'elou~e et J[o¡¡tai[J1I

Deux fiefs situés à Montaigu relevaient a foi et hommage simple de la châtellenie de Thorigné. Le premier nommé Montaigu ou la Pelouse, fut possédé, en -1-1.05, par PERIWT LE VASSEUR, chevalier (3), et ensuite par son fils JEAN LF V-ISSEUR (4). Son domaine était uni à la, châtellenie de Thorigné en 1462.

Le second fief de Müntaigu eut pour seigneur BON AUBES Le Tecier, il cause da!liathiE Bourdin, sa femme Marin t a cause de ~Iathuriue Bourdin, sa femme, et ,Tulien Bourdin. Remetn6raraces de la chàtelleuie de T/torigni, 1, f-Il 26G-2G\J.

(1) I6idem, t. II, fo 50.

t`!i "Ambroise Le Dru, veuve de Jullien Bourdiu, ma femme de foi simple. par raison de sa mEStairie dit Cormier, autrement Bois-Tracers, en TOI'igné n Dértmn5renteitt dte ~nart/ttisnt de bfoulfont rertdtc le .=r décenebre 2G.`1G par Rogen dte P(essis de Liancottrt. Arch. Nat., R, :J;L (;~) Item Perrot Le Vasseur mon homme de foy simple, a cause de sa mestaierie, féaige et appartenancEs de Montaigu, autrement appellé La Pelouse, et le l'éaige qui en despend, qui monle en cens quatre souls quatre deniers, et m'en est tenu faire ung minot de saigle appellé utestare le jour de Sainct Denis chacun an, et douze deniers appellé past le landeinaiti de Noël chacun ait, et ~uatre souls de service chacun an le jour de la feste aux :\101'5, et demy charroy et hernoys de bœurs pour emmener mes fains de la ricicre de Dué à mon chastel ou ville de Thorigné ~tt~ett et dénombcernent tie Larxcelot Tnrpin, seigneur de Thorigué, dts 1-2 _r octoLre 9405..lrch. Nat., P ~;4:i/1, 4.3 vo et suivauls.

(4) n Jelian Le Vasseur, Iils de feu maitre Pierre Le Vasseur, ehe\'aliel', souloit estre mon homme de foy simple pour la rnestairie de \loutaigu autrement appelée La L'eloii.3e, et l'estraige qui eu desl'end laquelle meslaierie,j'ai adjointe a mon domaine de Thorigué. At~ett et déromGrwtrtent cle Grtillanuta Beldaru~er, seigueter de Tktrrigné dit 14 ntars 1'rlï`?. Ibideut f~; 23 à 31i.


DE TussÉ, chevalier, avant 1405 (1). Ce seigneur fut ainsi que son frère Guillaume de Tussé du nombre des conjurés qui sous les ordres de Pierre de Craon tentèrent d'assassiner le connétable Olivier de Clisson, le 13 juin 1392. Les biens des coupables furent saisis et ils furent eux-mêmes dans la nécessité de fuir au plus vite pour mettre leur personne en sûreté. A la suite de Pierre de Craon ils s'en allèrent en Bretagne, où le roi Charles Vl s'acheminait avec son armée pour les rejoindre, lorsqu'il fut pris d'un accès de folie en la forêt du Mans. Charles VI accorda des lettres de rémission ~l Pierre de Craon et à ses complices et les remit en possession de leurs biens un 'Í~99 (~).

Donabbes de Tucé était remplacé comme seigneur de Montaigu, dès 1405, par GUILLAUME DE Tosst;, (peut-être son frère), et en l'année 1462 le domaine de ce fief était adjoint celui de Thorigné (3).

Le C:ué-att.~c-A~tes aliàs .llontor·iav

Le fief du Gué-aux-Anes anciennement appelé Montauriau, situé au côté gauche de la route de Connerré à Nuilléle-Jalais, s'étendait jusque sur la paroisse de Connerré. (1) Itein Guillaume de Tucé, une foy et liommaige simple à cause d'une meslaierie appellée Montaigu qui fut messire Bonabbes de Tucé, chevalier. et m'en est tenu faire clacun au douze deniers de service au jour de la Seiut-Bomer, et douze deniers de past landemain de Nouël, chacun an, et iiiig charroy de hernoys de 1)(eufs pour emmener mes faings de la rivière de Dué à mou cttastel de Thorigné et troys bouesseaulx de saigle appellé mestice chacun ail une fois. -treo ~ct clénooabrec~~eut de Larucelot 7'm·pirc, seiyuenr de Thoriyté, du 1~~ octob~~e 240~. 9rch, nat., f~~ I;f v~~ et suivants.

(21 L'abbé L.edl'Ll, La folie de Cieat~les l'I Picrre de Craota dans La l'rouicace clu. Jlainc, {\' ~t V.

(:3) Item Guillaume de Tucc souloit estre mon homme de foy simple, à rause et par raison ,l'une mestairie appelée Montaigll laquelle mestairie je de nag'uél'es mise et adjoincte acecques mon domaine de Thorigné- .-1 oeu et ctétaociabremetat de Guillatcme Bellacayer, seiyneur de Thorigrcé, dit 14 ~nars 1.~+E1. Arch. Na! P 31,5/2, 1'°' ~3 à 36.


Il était possédé, en 1405, par JucQuET VIYEN (1), en 1457 (2) et 1462 (3), par ANDRÉ 1 DE LA PERRIÈRE, le 'lO juillet '1469 (4), par JEAN DE LA PERHIÈRE et le 28 novembre 1469 (5), par ANDRÉ II DE LA PERRIÉIlE. Nous ignorons en quelles tnains passa dans la suite ce fief, qui était consolidp en 1636 (6).

IU° Le ~~lancl aliàs Le Jartt

Le Jaut aujourd'hui nommé le Gland sur la limite des paroisses de Thorigné et de Connerré, appartenait, le 20 juin 1403 (7), « aux hoirs la femme feu BAYÈRE )J. PERRl! LE Roy en était propriétaire, -'IL cause de sa femme, en 1405 (8). (1) .4reo rersdte èi Lancelo~ Twryin, le 10 jarerier 1404 linr .lnc~aet l'iven, Poi«· le liete de Monto~·ian. Chartrier de Thorigné, pièce 36~). y2~ Ai~erc re>uZrs à Guillann,e Bellenger, par :lndré de la Perri~~re~, le 4 r>rai 146?, pour le Iieu de ~lloratoriao. Ibidem, pièce 370,

13) « André de la Perrière, homme de foy simple pour. le clos de 3lontoriau et pour le féaige dudit lieu montant en cens à 17 deniers mailles dus par Jehan de Mard, cause de sa femme, lille. de feu Jdmet Espinette, au jour de la Saint-Bomer. un denier les procureurs de l'église. de Connerray, maille J. Blanclielatide, maille les hoirs feu Guillaume de la Perrière, maille les hoirs à la femme feu Thomas Cleraunry, quatre deniers; les hoirs feu maistre Jehan de \loré, prebtre, maille à la SaiiiL-Jelian-Baptisie Et m'en doit ledit de la Perrière douze sols tournois à la Sai rt-Bomer. en ma ville de Thorigné et un minot seigle de voyerie :lueo et dénonebremeut de Grrillnmue l3ellarxger, setgzaeur de Tieorigué, rlu 14 nrnrs 1 iG_ Arch. Nat., P 3i5¡'2, f«~ 23 à 36,

(ri _lnea remin à maislre Jean flellarrger, le 10 juillet 1lfli!I, par Jeart de la Perrièrv, pour M,>ntoriao. Chartrier de Thorigné, pièce 37L 15).3nen et dénombremerat de Jeana Bellanger, seigneor de Thorignc, dit 28 raoventbre 1!r0'cJ. Arch. Nat., P 3.iEi/`>, P~~ 10 à 2'2.

161 En 1636, les détenteurs duaieu « du Gué aux Asnes antiennement Montoriau, situé ès parrOlsses de Connarray et Tauriné sont censitaires de la châtellenie de Thorigné. Remembrances de la cl`rztelleuie de Tlrorigné, t. Il, passina.

(7) Chartrier de Thorigné, pièce 6.

(81 « Item Perrin Le Roy, cause de sa femme, mon homme de foy simple à cause et par raison de partie de sa mestaierie du Jaut et de partie des appartenances et m'eu est tenu faire douze deniers tournoi.3 de service chacun an au jour de Saint-Borner, et douze deniers de pasl lan-


Il le laissa à son gendl'8 JEAN LE TONNELIER, l'aîné, époux de PERIUNE LE Roy, qui en était seigneur en '1462 (1) et en -1169 (2). La terre du Jaut passa ensuite à JACQUES VAL'JON, mort avant le 27 août 1490 (3), pu is elle échut en partage à sa fille FRANÇOISE VAUJON, épouse de PIEBRE Bouju, sieur de Verdigny, bourbeois du Mans (4). Les deux époux le donnèrent à l'église Saint-Nicolas du Mans, comme dotation de la chapelle qu'ils fondèrent en cette paroisse. En faveur de cette fondation Jean de Bellanger exempta cette terre de toutes charges et redevances féodales, le !) novembre l-,lk9,2 (5). Toutefois nous voyous ces redevances payées dans la suite par les chapelains René Sauleau, le mai 1536 (6) Michel Besnard, le 16 novembre 1594 (7) Guy d'Assanis, le 29 juillet 1604 (S), Pierre d'Assanis, le 11 juin 1615 (9), demain de Noël, et quatre bouesseaulx de saigle de mestive la mesure de Thorigné chacun an, et ung charroy el hernoye de boeufs chacun an pour enmener mes fainas de la rivière de Dué à mon eliastel de Thorigné toulesfois qu'il en sera semons et requis chacun an une fois. n _~uevt et dénorubremertl de Laucelot 1'orpin, seigrmur de Titorigué, dit 1'2 octoLre 1405. Ai-eli. Nat., P 3¡':)1~, fo 43 v~ et suivants.

(II « Jehan Le Tonnelier l'ainé, à cause de Perrine, sa femme, fille de feu Pierre Le Roy, mon homme de foy simple, pour la métairie du Jaut, paroisse de Thori~né lesquelles choses furent audit feu Pierre Le Iioy a .luett et tlénombreritent de l:millamrte BelJau~er, seignettr cle Tltoi~iyné, du 14 titar.s 1462. ILidern, f~= 23 i*t 3{j.

y2) .1 t~eu el tléttombrement de Jeatt Bellatager, seignenr de Thorign4 dtt ~~8 nouautbre 14GJ. Al'l;h. Nat., 3ti/' f" 10 à 22.

1:3) 27 aotit 149(l. at~eu dtt Jattt randv à nuaïtre Jeata Bellanger, Pnr Jacques I-ttil~0rt, JiLs airaé de Jacques T'aujon, era .sora uom et aH nom de ses col~eritieus. Piéce du cabinet de 111. Briére.

(' ?;ï nnvetnbre 1452.ll'ell rettdv ci maitre.lean Bellaragen, seigneter de T'ltorigné, liar l'ierre Boojn, pour raison de la ntétairie dit Jattt ci lui éclme de la successiort de .lacquet T'alljon, In-re de Frnrz,çoise T'attjo>x, sa fc~mue. Ibidem.

13) Note de M, l'abbé G. Esnault.

IGl Fememebrnrtces de la chci(ellenie de Thorigné, t. I, f~ 50 r~ ~7~ Ibiderri, f~= 129 Vo et '130 ('°,

(~I ILiderit, (LS `o2f ,0 et 225 l'°.

(\J) ILide~rt, t. Il, fo 41 c~.


et Louis Le More. le 17 juillet 1615 (1) et le 15 octobre 1643 (2).

l~e La Gasserie

Le fief de la Gasserie était possédé, le 10 juin 1401 (3) et en 1405 (4), par G., veuve de GUILL_lUlVIE PINSSOJS'NET. Le 1Ar mars 14115 (v. s.) Jean Pinssonnet rendit aveu puur ce fief, en son nom et comme tuteur de MACÉ et JEAN les PINSSONNET, ses l1eveu:c (5). Un autre JEAN PINSSON:IET, boucher, fils ainé d'Étienne Pinssonnet, fut seigneur de la Gasserie de 1461 u 'l48G (fi).

12~ L~x Gottadtière (7)

Le lieu de la Goualtière, situé près. de Limbaudière, appartenait à GUILL~1U\II's LE CHARRUEURS en 1403 (:-3) et à ses héritiers en 1462 et't-Ui9 (9).

(1) Ret>tembrances r1e la chc~tellenic de Tlrorigué, 1'° 1:2 1'°, 12) Ibiderrr, t. III, f~'1.

1;)) Note de M. l'abbé G. Esnault.

( 1) Itein la femme feu Guillaume Pinsonnet ma femme de foy simple par cinq fois à cau~e et par raison de son habergement et appartenances appellé la Ga"serie et de plusieurs autres choses, et m'en est tenu faire cinq souls de taille chacun an au jour de saint Bomer a =tt~eu et clénombrenrent de La>zcelot Turpict, seiynear de Tlrorigné, dit 1'1 octobre 14(I: Arcb, nat. P. 3a5/? 1'° 43 Vo et suivants.

15) Note de M. l'abbé G. Esnault.

i6) Ibid. et .4 l'e ItX et dénomurements de Guillamueet .lean Bellanger, I-+ ritnrs 14G?et 28 norembre 14G9. Arcli. Nat., P. :3-i5;2 l') a 3fi, et 10 it 22(ï) Dans l'énumération des fiefs rele\'ant de Thorigné nous acons fait deux propriétés distinctes du fief possédé par Guillaume Le Charrueurs en 1105 et de celui de la Goualtière alors qu'en réalité c'est bien la mème terre. y;i) a Item, Guillaume Le Charrueurs, mon homme de foy simple a cause et par raison de troys journelx de terre, joignant aux choses André Quantin et la quarte partie par indivis d'uno journel de terre, sis prés la mestaierie de C1rduu et de journel à ung homme de pré ou emiron sis près le bordaige de LaimbalLdière, et m'en est tenu faire tailles quant elles eschiet par la couslume r .-tl'et! et d,éuom6remcnt de Lancelot Torpita, seigneur de Thorigm·, du 12 octobre 240~. Arch, Nat., P. :H[)/2 fo 4:3 v~ et suivants.

(9~ .4uea~ et déraoraboemenls ;le Guillaunie et Jean Bellauger, 14 mars 14G2 et 28 nouembr~: 146cJ. Ibide~rt, fu, 23 à 36 et 10 il 22.


Il est tout probable que ce fief, dont on ne possède pas d'aveux pour le XVI~ siècle et la première partie du XVIIe siècle, fut pendant cette période réuni à Limbaudière. Quand on le retrouve mentionné il appartient à la famille Le Roux. Le 25 juin 16L)5, RENÉ DE BEAUVAIS, écuyer, sieur de la Cailbrdière, le détient au nom des enfants mineurs qu'il a eus de défunte RENÉE LE Roux, vivante sa femme (1). M:1RIE-GAHRIELf.E MESNARD, veuve de MÉDARD-D.\NIEL DE SÉrOND, écuyer, demeurant Versailles paroisse SaintLouis, tutrice de 1~IARTHE-MARIE FRANÇOISE DANIEL DE SÉFOND, sa fille mineure, chargea le 4 septembre 1769, maître Daniel de Beauvais, son beau-frère, de se présenter en son nom devant le bailli de Thorigné pour rendre aveu du fief de la Goualtière a elle appartenant (2,).

13~~ Le I'ao-cle-Ciwntnte

Le Vau-de-Cranne, fief dont nous ne pourrions exactement indiquer la situation, était possédé en 1405 (3), par ETIENNE CAUSSELIN en 'l462 et 1469 (4), par JACQUET LE VASSEUR -1 VerS 1580, par GERV?.IS ANIELLON, époux de Crxlltet·itte Rogen· (5) de 1584 (6) à 1622 (7), par leur fils i I) Renre»rbj~arzces de la ulrdtelleraie de Tleor·igné, t. Il, fo -128 rO. 12) lbide» l. IV, p. 161.

(3) « Item Estienne Causselin, mon homme de foy simple. à cause de sa femme, par raison de son bordaige de Vau-de-Crenne, el m'en est tenu faire chacun au le jour de Saint-Bomer, quatre souls sept deniers avec droit et obéissance comme à seigneur de fié, » J uen et dénornbrernent de Lancelot Trcryin, seiJraeor de Tleoni~né, dit 1? octobre 140.5. Arch. Nat. P 3i5/?, N 43 vo et suivants.

1 « Jacquet Le Vasseur, mon homme de foi simple, pour partie de son bordaige de Vau-de-Crenne, qui fut feu Estienne Causselin ~aeu.T et déno» rbre»aents de Gttillmerne et Jean Belfanyer, seignenr de Tliorigné, 14 niars 14ü2 et 2N rtouernbre 14(icJ. Ibiclern, f~a 23 il 36 et 'JO à 22. (5) Remernbraaces de la clecitellertie de Tlaoriyné, t. 1, 1, 89 vo, (6l 1~ juin 1581. roi et hommage fait pour Vau-de-Cranne, par Jacques Pinçounet, procureur de maitre Marin lmellou, bailli de Saint-Calais, fils ainé de maitre Gen'aise Ainelloti- l6idem P~ 30 vo,

17) Pièces des archives du chartrier de la Gautellerie il Thorigné. Lx. 42


aîné MARIN AMELLON, bailli de Saint-Calais de 1631 à 1678 ("1), par JACQues ~.hIT;LLOIV, conseiller au Présidial du Mans, seigneur d'Amigné,

14~ Sas~ai~~·es

Au sud-est du bourg de Thorigné se voit encore l'ancienne demeure de Sasnières, '30nstruction à tourelle du XVIe siècle, qui maintenant sert d'habitation aux fermiers. La métairie de Sasnières n'était pss encore au XVe siècle une terre bommagée, elle relevait alors simplement de la chàtellenie sous le devoir de trois boisseaux de seigle et quatorze deniers de cens. JEAN LEGRAS, le jeune, qui la possédait en 1405 (2), était décédé en 1462 (3). Le seigneur de Sasnières était, en 1553, PIERRE BRE:;LA y: Il acquit le 11 octobre, des échevins du Mans, seize livres treize sols quatre deniers de rente à prendre sur les huitièmes de la ville (4). Il était remplacé, dès le 24 août 1607 (5), par CATHERINE et JACQUINE nu TRONCHAY, tilles de Jérôme du Tronchay et de Renée Breslay (6). Catherine., à qui Sasnières demeura, jura foi et hommage pour cette terre le 3 juin et le 29 juillet 1610 (7). (1) Reirte~:rbrancas de la chcitellenie de Tieorigrté, t. Ill.

12) (, Item Jehall Legras le jeune, pour partie de sa mestairie de Sanyiéres et pour partie des appartenances d'icelles un bouesseaulx de saigle de mestive. Item Jehan Legras le jeune pour son hostel et mestaierie de Sannières el de partie des vignes et des prés et terres de ladicte mestaierie audict jocr (saint Jean-Baptiste) six deniers item ledit Jehan pour partie des prés et terres de ladicte mestaierie audict jour huit deniers n.tvezt et dénornbrement de Lancelot Turpirx, seiyneicr· de Thorigné, dit 12 octobre 1495. Arch. Nat., P. 5't:r,~ ro 43 v, et suivants. y3) « Les héritiers de feu .lehan Legras pour partie de leur mestairie de Sasnières, trois bouesseaux .4ucit.c et dénombrements de Guillaur>re et Jeara Bellarager, 14 rnc,rs 1462, 28 nouembre 1469. Ibidem, f09 23 à 36 et 10 à 2'"2.

(4) Arch. de la Sarthe. pièce non classée.

(5) A uen et déntrrnbremer~.t de Renée de Bellanyer, dnrne de T)corigné, dit 2 aoitt 1607. ArcL. nat., P. 430,

i6) Registres paroissiaux rle la Coutnre au Jlaras.

(7) Reneembrnnces de la chtitellenie de Ticonag~aé, t. I, fb '1!J7 vo et t. II, f. 2


Le 18 avril 1613 et le 22 octobre 1643 (1), son fils et procureur Robert Le Balleur, écuyer, sieur de Landres, comparut en son nom aux assises de la châtellenie et avoua pour elle Sasnières et la Rousselière. Ce, dernier fief, on l'a vu, avait par elle été acquis sur les biens saisis de Charles Breslay dit Guittonnière, Catherine du Tronchet, veuve, dès l643 (2), de Jrzcqztes Le Balleur, vivait encore en 1649 (3). La terre de Sasnières appartint dans la suite à JACQUES DE THIESLIN, prêtre, qui, le 2 septembre 1718, donna procuration pour en rendre aveu à Thorigné (4), puis à ÉTIENNEGuy TAHUREAU, chevalier, seigneur de Couture et de Sasnières, lieutenant-colonel d'artillerie et chevalier de Saint-Louis, mari de Jeamze-Fra~içoise Prtcdhornrrte de Itellé. Étienne Tahureau, envoyé par le roi à Saint-Domingue, en 1763, y était encore le 9 février 1769, lorsque sa fille JEANNE-FRANÇOISE TAHUREAU, contracta mariage avec RENÉFRANÇOIS DE CHAMPAGNÉ, seigneur de Moré (5). Comme procuratrice de son man et de son père, Jeanne-Françoise vendit Sasnières, le 5 septembre 1777, à JEAN-Louis HODEBOURG, sieur de Verbois, ancien lieutenant de dragons en l'ile de la Martinique (6). Ce dernier seigneur vivait encore au moment de la Révolution il testa au Mans, en son logis, section de la Liberté, le 20 avril 1808.

L. DENIS.

(A sztiureJ.

1 l Re>nem6rances a'e la clrdtellereie de Tlronigné, f~ 32 et t. III, P~ 10. (-2) Ibidenz_

pf) Recetle des cens, rentes et deb~roirs de la chastellenie de Thorigné n p. 2. Cabinet de 11i. Brière.

(4) Original papier. Ibidem_

l,51 L'abbé G. Esnault. Iraverataire des mireutes anciennes des notaires drc dlnns, t. II, p. 203.

(6~ Rerr~e~rrbrances de la chdtellenie de Thorigué, t. IV, F~ 131.


STATUTS

DE LA

.CONFRÉRIE DU S~~1NT-SACRCMI:IVT D'ÉCOMMOY (1673)

Il est pour le chercbeur des heures vraiment délicieuses, celles, par exemple, où il découvre, en flânant chez les bouquinistes ou les revendeurs, un document vainement cherché ailleurs.

Je savais déjà qu'une confrérie du Saint-Sacrement existait à Ecommoy, quand, par hasard, j'ai rencontré le placard suivant ( 0,37 X 0,30)

Lozcé soit et adoré le Très Sai~at

Sacae~ne~at a'.e !'Autel à iayraais (1).

STATUTS ET RÈGLES

DE LA

CONFRAIRIE DU TRÈS SAINT-SACREMENT DE L'AUTEL

É'rigée en la ~aroiase d'Éconaorcé, diocese d2c b~~xtis, ri perpétuité.

1. Que tous ceux et celles qui se feront admettre en ladite Confrairie, se confesseront et communieront le jour de leur entrée, pour gaigner l'Indulgence plenière.

(1) Au milieu de ce texte e:¡lune vignette très noire représentant deux anges à genoux soutenaut uni,, raonstrance.


Il. La Confrairie sera sous la Direction du sieur curé d'EcomoÜé, par l'autorité de Monseigneur l'Évêque, III. Tous les ans sera eleu un Procureur par le sieur curé et Confrères, ou l'ancien sera continué, ayant au préalable rendu compte xau (sic) susdits.

IV. Tous les Confrères feront leur possible pour assister, tous les jours à la Sainte Messe, particulièrement le Ieudy, jour consacré au très-Saint Sacrement, duquel on célèbre à tel jour en l'église dudit EscomoÜé et plus particulièrement le premier Ieudy de chaque mois que l'on chante une messe solemnelle, à la fin de laquelle le celebrant donnera la bénediction aux assistants avec le saint Ciboire. V. Le premier Ieudy de chaque mois on fera à la messe la recommendation de Monsieur et Madame de Chanteloup (@1) Fondateurs d'icelle et de tous les Confrères et Soeurs, tant vivans que trépassés.

VI. Le Procureur aura soin des choses concernantes la Confrairie,qu'il fera par l'avis du sieur curé et des principaux Confrères il avertira deux des Confrères chaque jour le dimanche pour porter le dais durant la semaine quand on portera le très-Saint Sacrement aux malades, qui seront lioniiestement vètus et feront durant la semaine leur devoir devotement.

VII. La principale reste de la Confrairie sera le jeudi de l'octave du très-Saint Sacrement et sera fait le service et la procession solennellement comme le jeudi précédent, on fera à, la messe la prièrc des Confrères et Sœurs decedez, dont on nommera le nom et à cause de la Confrairie on chantera vêpres.

VIII. Ceux qui seront éleus pour porter le dais les deux jeudis de la fète se doivent confesser et communiér et aucun ne doit s'ingérer de prendre un bâton par entreprise ou (1) Paul Fréard de Chanlelou, seigneur de Fontenaille époux de Crançoise Marielle, Prouinre dit Vfnine, t. VI, p. 193.


vanité, mais attendre d'en être requis et inscrit dans la Confrairie.

IX, Il sera fait deux flambeaux de cire aux frais de la Confrairie qui seront portez allumez par deux Confrères quand on portera le très-Saint Sacrement en procession ou aux malades jusqu'à la sortie du bourg, seront faites aussi deux torches qui seront tenües allumés par deux Confrères aux messes du très-Saint Sacrement depuis le Sanctus jusqu'après la communion du prêtre.

X. Chaque confrère fera faire une torche à se" frais qu'il portera allumée le jour qu'on fera la procession du très-Saint Sacrement, marchant en ordre bien dévotement. XI. Le premier jeudy de chaque mois, pour honorer le très-Saint Sacrement, six des Confrères ou Soeurs, s'il ne s'en trouve plus grand nombre, se prépareront à la sainte communion alternativement, étans avertis par le Procureur dès le premier jeudy du mois pour le suivant et si quelqu'un étoit empêché il en donnera avis au plutôt.

XII. Quand il faudra porter le très-Saint Sacrement à quelque malade, on sonnera la grosse cloche treize coups pour avertir les ConUères d'accompagner le très-Saint Sacrement ou prier Dieu pour le malade.

XIII. Ceux qui feront leur demeure en la maison du malade prendront garde de ne s'absentez quand on luy portera le très-Saint Sacrement et ceux qui ne seront occupés viendront au-devant et à la rencontre du très-Saint Sacrement pour le conduire devotement.

XIV. Les voisins scachans que l'ou portera le très-Saint Sacrement à un autre leur vuisin malade, se rendront à la maison dudit malade portans un cierge ou chandelle qu'ils tiendront allumez jusqu'après la communion dudit malade. XV. Chacun des Confrères et Soeurs dira une ou plusieurs fois le jour ces mots Loüé soit et adooé le très-Sai~at Sacoenreiat de l'autel ~s ,janaais, et si faire se peut aura une


image du très-Saint Sacrement où seront imprimés lesdits mots.

XVI. Les Confrères et Smurs feront leur devoir d'assister chaque jour l'espace d'une heure devant le très-Saint Sacrement durant toute l'octave de la Fête et les jeudy et vendredy de la semaine Sainte quand il est au lieu préparé en l'Église. XVII. Quand quelqu'un des Confrères et Sœurs sera malade les autres le visiteront et assisteront spirituellement et corporellement selon leur possible, et quand ce malade sera à l'agonie on sonnera la cloche treize coups pour avertir les Confrères et Soeurs de venir devant le très-Saint Sacrement prier Dieu pou!' l'agonisant.

XVIII. Les Confrères et Soeurs assisteront à la sepulture des defunts autant que faire se pourra, où deux d'iceux porteront chacun une torche allumée pour accompagner le corps quand on ira au Convoy et quand on se levera de devant le crucifix pour le porter au lieu de la sepulture, lésquels Confrères se tiendront des deux costé de la croix durant icelle sepulture et Convoy.

XIX, Les Confrères et Smurs qui ne pourront pas assister à la sépulture des défunts scachans la mort d'iceux diront pour le repos de leur ame cinq foirs (sic) Pate~· uoster et Aue illarica.

~1. Tous les ans la semaine d'après l'octave.de la fête du très-Saint Sacrement sera chanté un anniversaire, scavoir est, Vigiles, trois messes hautes pour le repos des arnes des Confrères et ScEUrs décédés, ou les autres assisteront selon leur possible-

XXI. Il se trouvé quelquefois des personnes qui désirel'oient se faire inscrire en des Confrairies mais s'excusent, disans qu'ils ont crainte de ne s'en pas bien acquitter, il est à remarquer que de tout ce-cy il n'y a rien qui oblige sous peine de péché.

D'autant qu'il convient de faire quelques frais pour r l'entretien de ladite confrairie, ceux qui s'y feront inscrire


donneront le jour de l~~ur entrée la somme de deux sols six deniers et pour J'entretien par chacun an la somme de quinze deniers, si leur devotion n'est de donner davantage. FIN

Nous vicaire ge~zer·al de Vlorzseir~aeur d'lllz<str·issirrze et Reoererzdissizne Evéqzte dit 3la~rs, ayaitt leu et e.carrzi~zé les vi~zgt-deu.c articles cg-~Lessrcs dits Statuts et Règles ~le Ici Corr frairir: drc très-Saiz;t Sacrezne~zt de L'Aectel, énigée eiz la Paroisse d'Ecornoüé de Diocèse (sic) n' avorzs rien tr·oravé de co~ztraire ci la solide ~iété p02G7'qc4o7l ~rozcs les arorzs loiiés et approuz~és, loüons et apprnrcL·orrs pozcr ètne exécz<tés e~z ladite Paroisse selorz lez~.7· for~zze et terzeze~~ ci co~zditiou neant~rzoi-ns qzte les Pazwres (aya~zs d'aillez~rs les qzealités et devotio~z necessaires~ serozzt recezcs gratzcitemerzt e~z icelle, et e~z l'égard des per·sorzzzes r·iclzes ou accor~zodées, qu'elles ne pourrozzt être co~ztrai~zte par aztci<.rze pr·océdicne de Jrestice ccv payerne~zt desdits deux sols siz de~zier,~ d'eiztr·ée et des qicize deniers d'eTZtretie~z; ctirrsi elles dorznenont pagerraent et liberalenzent par fos·rrze ~'azc.rnoze, ci qoog nozzs les exlrorto~zs. Fait au Ma~zs ce treizièrrze jozer de mzay rnit six cens soixa~zte et treize.

Signé: LE VAYER (1).

Par cummandement de mondit sieur le grand vicaire.

Cette confrérie datait déjà de plusieurs années. Du temps de Jean Drouet, « l'humble curé comme il s'appelait lui-mème (2), M. et 1l~e de Chantelou léguèrent à cette Charles Le Vayer sieur de Bois-l'.ibbé, grand archidiacre du 111ans. Cf. abbé Cllambois, Répertoirc de la Se»aairae dit Fidèfe du diocèse du llans, t. r, p. r07.

(°'~ L :-l~rii ctes Fair~illc.s. Bulletin yaroissial d'I:'corrcmod, mai-juinjuillet 1902, p. 1~.


confrérie par acte passé devant Mi Rousseau, notaire à Écommoy, les 12 mars et 2 avril 16(i5, la somme de trentedeux livres de rentes à prendre chaque année et à percevoir sur la terre de la Christophlère ('1),

La dévotion au Saint Sacrement semble du reste avoir été très vivace à Écommoy, au LVII~ siècle. Barbe Rodier, par exemple, avait, « en reverence du très-Saint Sacrement », acheté et embelli le tabernacle de l'église, donné des rideaux brodés pour l'envelopper, une custode en argent et une autre pour porter la Communion aux malades, « un beau grand soleil d'argent doré qui « avait bien coùté 150 1. » (2). Après la Révolution, la confrérie reprit un peu de sa splendeur d'autrefois. Les précédents statuts furent à nouveau approuvés ainsi que le confirme cette attestation manuscrite placée au bas de notre placard: « Vu et approuvé. Au Mans le deux juin mil huit cent trois, treize prairial an onze. Du PEHRIER, vic. gen. » (3~).

Par contre, la rente de trente deux livres avait été transférée, par les agents du gouvernement, à l'hôpital du Mans, 28 thermidor an IX- 16 août 1801. Elle a été depuis remboursée au dit hÔpital par M. le marquis d'Effiat, propriétaire de Fontenaille, suivant la quittance du sieur Demende, receveur des hospices du Mans du 8 octobre 1824 ( i.).

LOUIS CALENDINI.

iy La Province riu ~llaine, t. VI, p. 193.

('2) Elle mourut le 18 septembre 1656, cr. Abhé 111. Leveau, Une confirmatiorr. em 1654 dans l'lrrei des Fnmilles, avril l901, p. 27. M. A. Renard dans son Hisloire d'~commoy et des erauirons, p. -]08, Écommoy, Motreul, li<D6, date la fondation de cette confrérie du 2 avril 1665. Elle devait exister avant ce temps.

(3) Ce placard ne mentionne pas le nom de l'imprimeur.

(x) Procince dv illaine, VI, t!J3. Cr. l'Étude du R. P. Bélin, missionnaire diocésain, sur les Confréries du Saint Sacrement au diocèse du Mans, dans le (:omple rendrc du Congri~s Tr~cl~aristique international d'rlmgers, ~lugers 1~)(J-l, in-8 pp. 4iO-448,


CH]RONIQUE

Depuis la publi~ation de la dernière livraison, le Bureau a admis, comme membre honoraire de la Société M. KNIGHT, bibliophile et collectionneur, High Street, à Ventnor, île de Wight (Angleterre).

Continuateur fidèle des traditions de son père qui fut un érudit et un collectionneur distingué, M. Knight a réuni un ensemble unique d'ouvrages et de documents sur l'ile de Wight dont il est le principal libraire. Mieux que tout autre il en connaît l'histoire, et chaque jour il met, avec autant d'obligeance que de désintéressement, sa précieuse bibliothèque à la disposition des chercheurs. Plusieurs de nos confrères eux-mêmes ~iennent de trouver auprès de lui un accueil particulièrement sympathique, qui leur permet de préparer pour cette Rpi,zie d'intéressants articlrs. En offrant aujourd'hui à M. Knight le titre de membre honoraire de la Société historique et archéologique du "Maine, le Bureau est heureux de rendre hommage à son obligeance et à son érudition il est heureux aussi de se créer un nouveau lien avec cette ile de Wight, si hospitalière, où il compte déjà tant d'amis et de collaborateurs dévoués. Le Bureau a également admis comme membre de la Société

M. Amédée MOULLÉ;, à Saint-Rémy-de-Sillé, par Sillé-leGuillaume (Sarthe),

qui a bien voulu prendre part avec un aimable empressement à l'excursion du 5 juillet.


Nous avons malheureusement ~i annoncer en même temps deux pertes bien sensibles

NI. le duc de Broglie député de la Mayenne enlevé d'une manière bien imprévue quelques mois seulement après le brillant succès qu'il remportait aux del'l1ières élections.

M. Louis-Pierre Griffaton, ancien vice président du tribunal du Maiis, décédé le 5 août 190fi, dans sa quatrevingt cinquième année,

Né à Ambrières (Mayenne) le 15 juin 1822, M. Griffaton, après avoir fait d'excellentes études au collège de Mayenne, Louis le Grand et à la Faculté de droit. de Paris, avait débuté dans la magistrature en 1849, comme juge suppléant à La Flèche. Juge titulaire chargé de l'instruction dès l'année suivante, il était nommé, en 1860, au tribunal du Mans et en devenait vice-président en 1873. Il fut mis à la retraite d'office en 1883 par suite des événements politiques.

NI. Griffaton était, dans la meilleure acception du terme, un magistrat de vieille roche, d'une droiture et d'une intégrité scrupuleuses, d'une dignité et d'une indépendance de conscience qu'aucune considération ne fit jamais fléchir. Il fut, en outre, pendant toute sa carrière, l'un des représentants les plus respectables et les plus respectés des catholiques de la Sarthe. Profondément croyant, il se donna tout entier, dans les del'l1ièl'es années de sa vie surtout, aux œuvres de charité chrétienne, et Dieu seul, qui l'en a maintenant récompensé, connait tout le bien qu'il fit au Mans, par son infatigable dévouement, par son apostolat aussi désintéressé que convaincu. M. Gl'iffaton qui eut la consolation de donner à la Patrie, dans ses nombreux enfants et petits-enfants, toute une génération formée à ses enseignements et à ses principes, était toujours prêt à servir les intérêts de ses compatriotes il les défendit pendant deux


ans au Conseil d'arl'Ondlssement du Mans et ne cessa, on peut le dire, de s'intéresser ~t toutes les grandes questions sociales de son temps.

Nous saluons respectueusement la mémoire de ce magistrat d'autrefois, dont la fermeté de principes et de caractère demeurera un salutaire exemple, et nous unissons nos regrets bien sincères à ceux de sa famille.

Divers travaux urgents, d'intérêt tout spécial, ainsi que les délais toujours longs qu'exige une illustration abondante ne nous ont pas permis de terminer encore le compte-rendu de l'excursion archéologique du 5 juillet. Nous espérons en commencer la publication dans la prochaine livraison, mais, en attendant, nous prions nos confrères d'excuser des retards involontaires, imposés par les circonstances,

L'une des questions qui doit préoccuper le plus vivement, en ce moment, tous ceux qui s'intéressent à la conservation des monuments de l'architecture nationale, est celle du classement des édifices religieux.

Aux termes de la loi du 9 décembre 1905, en effet, aucune église ne peut désormais recevoir de subvention de l'État, des départements ou des communes, si clle n'est pas classée au nombre des monuments historiques, et d'autre part, en présence des incertitudes de l'avenir, ce classement apparait comme la seule et meilleure garantie contre les actes de vandalisme prémédités ou inconscients.

Jusqu'ici, très peu cle nos monuments religieux de la Sarthe les plus importants seulement ont été l'objet


d'un arrêté régulier de classement. Leur liste ne comprend même encore que la Cathédrale, la Couture, le Pré, l'église de la Visitation (classée tout récemment par arrêté du 6 mars 1906), les églises de La Ferté-Bernard, Saint-Calais, Vivoin, Neuvy-en-Champaône, Poncé, Bazouges et l'église abbatiale de Solesmes avec ses célèbres statues.

Notre département possède cependant bon nombre d'autres églises, moins connues mais d'un très réel intérêt architectural, elles aussi, qu'il importe de faire bénéficier au plus vite du classement, sous peine de voir la conservation de plusieurs d'entre elles bientôt compromise, faute de ressources suffisantes pour leur entretien.

Déjà, il notre vive satisfaction, certains conseils municipaux se sont émus de cette situation et ont pris dans leur session d'aoùt l'initiative de demander le classement. Les Conseils municipaux de Fresnay, Saint-Mars-sous-Ballon, Saint-Rémy-de-Sillé, Rouessé-Fontaine, Tenuie, Auvers-leHamon, Chevillé, entre autres, ont voté l'maa~ai~nité des délibérations pour réclamer le classement de leurs églises, Nous les en félicitons chaleureusement, mais cela ne saurait suffire,

Nous nous permettons donc d'appeler tout spécialement l'attention de nos confrères sur la liste suivante d'édifices dont nous croyons devoir dès maintenant réclamer le classement, d'accord avec M. Laffillée, architecte en chef des monuments historiques de la Sarthe, et M. Pascal Vérité, inspecteur des édifices diocésains du département A~·r·onzdissenze~zt do ~llans

Églises de Saint-Mars-sous-Ballon, Tennie, Saint-Rémyde-Sillé.

A7·rorzdisserrae~zt de Mar~ze~·s

Églises de Série, Saint-Christophe-du-Jambet, Fresnay, Théli~ny, Cormes, Notre-Dame de inlamers, Saint-Nicolas de


Mamers, Saint-Rémy-du-Plain, Courgenard, Gréez-sur-Roc, Saint-Ulphace, Rouessé-Fontaine (tour), Vernie, Vezot. Arronadi~serne7zt de La Flèche

Saint-Louis du Prytanée, à La Flèche, Pirmil, Chevillé, Auvers-le-Hamon (nef et peintures), Luché, Pringé, Vaas, la Bruère (chœur, les vitraux déjà classés), Coulongé, Châteaul'Hermitage (propriété particulière).

Nous serons d'autant plus reconnaissant à tous nos correspondants de vouloir bieu joindre leurs efforts aux nôtres eu faveur de ces églises que jusqu'à présent la Commission départementale des monuments historiques ne s'occupe que du classement des objets mobiliers.

Tous les érudits de notre région avaient remarqué et lu avec grand profit, au fur et à mesure de leur publication dans le Bzclleti~z histor~:que de la 3laye~a~ze, les articles si documentés de notre confrère M. d'Achon sur les seigneurs de Courceriers. Plusieurs, même, avaient du y revenir à différentes reprises, car la famille de Courceriers a occupé une si bonne place dans l'histoire du Maine par son ancienneté et par ses alliances, qu'en maintes circonstances le travailleur la rencontre sur sa route. Qu'il nous suffise de rappeler ici que le nom de Courceriers demeure étroitement uni à celui d'Ambroise de Loré, l'intrépide champion de la cause nationale au xv- siècle.

La consciencieuse étude de M. d'Achon avait, d'ailleurs, d'autant plus de portée qu'elle rectifiait bien des points jusqu'ici obscurs et qu'elle apportait notamment des aperçus nouveaux sur la propre généalogie d'Ambroise de Loré, On ne pouvait lui reprocher que f~ d'ètre frag-


mentée en un trop grand nombre d'articles, difficiles à consulter.

C'est donc un réel service que M. d'Achon vient de nous rendre à tous en réunissant ces articles dans un élégant volume auquel une préface de M. Laurain, très agréablement écrite, et une excellente table dressée par M. Paul de Farcy avec le soin et la compétence qu'on lui connaît, donnent encore plus de valeur. La généalogie des seigneurs de Courceriers devient ainsi un précieux instrument de travail, en mème temps qu'elle reste une source aboudante de documents qu'on ne saurait trop remercier M. d'Aclrou de nous avoir conservés et révélés.

M. l'abbé Dumaine, vicaire-général de Séez et lui aussi l'un des membres les plus fidèles de notre Société, vient de publier dans un tout autre genre, un ouvrage des plus intéressants, que nous avons hâte de signaler.

Sous ce titre t( Il y a cerat ans » cet ouvrage nous apporte un el at détaillé des communautés de l'Orne au lendemain de la pacification religieuse, si féconde pour le pays. La comparaison avec les temps présents est bien suggestive, certes, et elle évoque bien des contrastes « Il y a cent ans, c'était une lumineuse éclaircie après les jours aombres. Aujourd'hui c'est une aurore brumeuse pour le xx" siècle naissant ». Nous n'insisterons pas sur ces contrastes, mais au nombre des communautés dont M. J'abbé Dumaine fait revivre le souvenir, il en est une qui nous appartient d'une manière plus directe et plus intime, l'abbaye des Bénédictines de Montsort, autrefois du diocèse du Mans. Le chapitre qui lui est consacré mérite spécialement l'attention des lecteurs du Maine, qui y trouveront en outre la reproduction d'un


très curieux tableau commémoratif avec 11~i~~ Le Paulmier de la Livarderie la dernière abbesse. Ajoutons que l'intérêt de ce volume, rempli de faits peu connus ou trop oubliés, est encore accru par une illustration aussi riche que variée. Ce n'est pas seulement un livre d'actualité bien qu'il ne remonte qu'a cent ans, c'est déjà un livre d'histoire et d'histoire fertile en enseignements, dont nous nous permettons de félicIter M. l'abbé Dumaine. R. T.


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EXCURSION ARCHÉOLOGIQUE

DU 5 JUILLET 1906

A SAINTE SUZANNE ÉVRON ET JUBLAINS

Les excursions ont leur place de plus en plus marquée dans le programme des Sociétés de province car, à notre époque de locomotion à outrance, on demande à la science de se présenter sous une forme attrayante, et on préfère la poursuivre 11 la mode du jour, en parcourant les routes de droite et de gauche.

L'archéologie aurait mauvaise grâce, il est vrai, à se plaindre de ces tendances; elle est avant tout une science de comparaison et si superficielles qu'elles soient les excursions lui sont toujours profitables par les observations et les aperçus imprévus qu'elles provoquent. De plus, elles sont de nature à attirer de nouvelles sympathies sur ces vieux monuments qu'il importe plus que jamais de mettre sous la protection des touristes intelligents pour les sauvegarder des méfaits néfastes de la politique. C'est surtout en vue de répondre ces considérations d'utilité pratique et d'affirmer la persévérance de son activité, que la Société historique et archéologique du Maine conviait ses membres, le 5 juillet dernier, à une nouvelle excursion. Les agréables souvenirs des précédentes n'eussent pas


paru, peut être, un motif s uffisant au milieu des circonstances présentes, mais à ces souvenirs se joignaient la pensée de faire mieux connaitre quelques-uns de nos monuments et l'espoir d'entretenir en leur faveur un courant d'opinion qui déju a ét. avantageux pour plusieurs d'entr'eux.

L'empressement avec lequel on a accueilli l'appel de la Société a montré que le but était compris et approuvé. Dès les premiers jours, soixavie-dezc:c membres envoyaient leurs adhésions, entre autres plusieurs confrères des départements voisins, une députation de la Commission historique et archéologique de la Mayenne, et même, pour la première fois, un groupe de quatorze dames ou jeunes filles, qui, fort gracieusement, avaient revendiqué le privilège d'unir leurs efforts à ceux des archnoloâues (1). Non moins significati\'es, cinqua~~te-lmit lettres d'excuses nous apportaient les encouragements et les regrets d'excellents collègues retenus par des circonstances indépendantes de leur volonté (2). (t') Ont pris part à l'excusion du 5 juillet 1906;

Robert Gasselin, Thyébault, de Saint-Rémy, de Linière et L'lîleu Tlioré, Blot, Dugué, Ferrand, y, de Gastines, M. dc Lorière, AI. C. du Martray, M, G. de Saint-Rémy, M. T. de Saint-Rémy. MM. Alleaume, Auburtin, le marquis dé Beauchesne, Ed. Bodin, l'abbé Brière, Brindeau, docteur Delaunay, l'abbé Devatix, P. de Farcy, Fleury, le vicomte de 1~ ollin, E. Fouché ancien député, L. Garnier, le vicomte Ed. de Gastines~, colonel Gasselin, X. Gasnos, Giraud, Goupil, Gouvrion, de Grandval, Guillotin, Laurain, L'Éleu, le commandant Le Sassier-Boisauné, M. Le Sassier-Boisauné, de Linière, Ed. de Lorière, llartin-Fortris, Mautouchet, de Monhoudou, Ch. de Montalembert, J. Morancé, A. Moull, l~Tiv·ert, l'abbé Patard, Poirier-Béalu, G. Renault, A. Romet, Saloion, 0. de Saint-Albin, de Saint-Denis, Thibaudin, Tournouer, Trentasaux, Robert Triger, Tual, chanoine Urseau, de Vaublanc.

(2) Membres de la Société excusés:

11tR1. le marquis d'Agoult, L. d'Aillières, le comte d'Angély-Sérillac, l'abbé Angot, le baron L. d'Albigny, le comte Ch. de Beaumont, les abbés P. et L. Calendiui, le commandant Cambuzat, A. Celier, Ch. Chardon, H. Chauvin, général comte de Cléric, l'abbé Corbin, l'amiral Coulombeaud, A. Colirdoux, Degoulet, Deschamps-la-Rivière,


La dernière excursion des 7 et 8 juillet 1904 ayant eu lieu dans la vallée du Loir, on avait choisi cette année une région toute ùifférente, la région des Coëvrons, qui forme pour ainsi dire frontière entre la Sarthe et la Mayenne, offrant, dans un genre plus agreste, plus rude peut-être, un mélange fort intéressant aussi de sites pittoresques et d'importants monuments. Toutefois, l'obligation de limiter le programme à une seule journée n'avait permis d'y comprendre que quatre des principaux points d'attraction Sainte-Suzanne, Évron, le château du Rocher et le célèbre camp romain de Jublains. Au vif regret des organisateurs, il avait fallu laisser de côté les beaux châteaux de MontécJerc et de Foulletourte où l'on eût reçu, de la part de \\1. le marquis de Montéclerc et de M. le comte de Malherbe (1), un si aimable accueil, ainsi que les curieuses ruines gallo-romaines du Rubricaire dont le savant historien de la Mayenne, M. l'abbé Anoot, vient de révéler toute la valeur (2)

G. Duplay, le comte 0. d'Elv. Grosse-Duperon, F. Guérin, P. Héry, Latouche, le vicaire-général Le Febvre, l'abbé Lemercier, P. Le Vayer, Albert 111aignan, Cli. Monnoyer, le marquis de Montéclerc, l'abbé Morancé, Mauduit, le vicomte de Noailles, Parker, Passe, le vicomte de llomanet, Roulleau, le vicomte de Sars, Singlier, Surmont, Verdier, etc.

Membres d'autres Sociétés MM, A. Gentil président, Guy, Rebut (Société cles Scicnce~ et .lrts de la Santiae) E. Moreau président, Léon de Loriére, A. de lfontalembert, Thuau, (G'ormnission de la bladenrae) le eliatinine Dupuy, R. Descoutures (Société de l'Orne); le docteur Tuvache, l'abbé Vedet du nlesuil (La Flècloe) Doltineust, le docteur Houquette médecin-major au 31~ d'artillerie, R. de Rasilly, Robiche, M. Jauneau, le docteur Vincent.

(1) Retenu ce même jour à Évron par les examens de l'enseignement libre, notre confrère M. le marquis de Montécler voudra bien néanmoins se joindre à nous pour la visite de l'église. Quant à M. le comte de Malherbe, alors en Anéleterre, il avait eu l'extrême obligeance, avant son départ, d'envoyer à l'un des secrétaires de la Société tous les renseiônements nécessaires à l'organisation matérielle de l'excursion, et nous lui en renouvelons ici nos sincères remerciements. (2) Abbé Augot. Le balneum dts Ritbricaire, Laval, Goupil, 1003, in-


Tel quel, le programme était attrayant et varié. A SainteSuzanne, on devait rencontrer, avec l'un des donjons romans les mieux conservés du Maine, un type très caractéristidue de vieille ville fortifiée du Moyen-Age; à É\Ton, le plus bel édifice religieux du département de la Mayenne, l'église Notre-Dame-de-l'Épine au château du Rocher, un charmant spécimen de l'architecture civile du XVlO siècle 1 Jublains, une cité g~.Ilo-romaine tout entière, avec un castcll2tnx qui passe à bon droit pour l'un des monuments militaires les plus rares de l'occupation romaine. Partout, comme nous le dirons, l'excursion avait été facilitée et secondée par de précieuses bonnes volontés. M. Lecomte, maire de Sainte Suzanne, et son secrétaire de mairie, Il. Bouvet, le:; premiers, avaient ouvert leurs archives au président avec la plus parfaite bonne grâce, et avaient même offert lo garde-champêtre pour guider la Société dans le dédale des anciennes fortifications, alors que M. l'abbé Durand, curé doyen, mettait à sa disposition la terrasse du presbytère et lui assurait l'obligeant concours de son vicaire, M. l'abh5 Leroy.

De son côté, la Compagnie de l'Ouest avait bien fait les choses, et par une faveur spéciale de Il. le chef de gare du Mans, un wagon du dernier modèle, que la composition ordinaire du train ne comportait pas, était accordé aux membres de la Société historique et archéologique du Maine.

C'est donc dans les meilleures conditions que, le 5 juillet, à 8 h. 32 du matin, tous s'embarquaient dans le wagon de la Société, à destination d'Évron, Les dames ont été les premières à donner l'exemple de l'exactitude, et le soleil lui-mème a eu l'attention de se trouver au rendez-vous, en modérant honnêtement la chaleur de ses rayons. La comcentration se p~ursuit peu à peu aux stations interrr.édiaires: elle s'achève, li 10 Il. 15, en gare d'Évron, où un


train de Laval amène à dix minutes d'intervalle les amis de la Mayenne,

On part aussitôt en voitures pour Sainte-Suzanne. Il a fallu mobiliser toutes les voitures disponibles d'Évron sous la direction du correspondant du chemin de fer, Di. LandaisBouland, et même leur adjoindre une voiture 1 vingt places fournie par 1{, Martineau, loueur à Sillé. ~INI. LandaisRouland et Martineau ayant mis tous leurs soins à la bonne organisation du convoi, la colonne se forme sans difficultés et s'ébranle au premier c~up du sifflet « présidentiel ». A 1'1 Il. 15, heure fixée par le programme, elle s'arrête sur la grande place de Sainte-Suzaune. Il eut été préférable d'arriver par la route de Youtré d'où la vieille cité se présente sous un aspect si pittoresque et si saisissant mais le détour eut été trop long et on a du suivre la ligne droite, la route d'Évron qui ne laisse pas soupçonner la vraie situation de Saiute-Suzanne.

La surprise, du moins, n'en est que plus complète lorsque les excursionnistes, sans perdre un instant, commencent le tour des remparts,

Du chemin de ronde extérieur, le panorama est réellement splendide. C'est l'un des plus vastes du Maine, car le promontoire escarpé que couronne Sainte-Suzanne domine un horizon complet. Au N.-E., la vue s'étend sur la chaîne des Coëvrons et la forêt de Sillé à l'Est sur la forêt de la Charnie au Sud sur les grandes plaines de l'Anjou; à l'Ouest sur la vallée de la Dlayenne. Enserré par la rivière l'Erve qui coule au fond d'un ravin profond, le promontoire ne se rattache pour ainsi dire 1 la terre ferme qu'au Nord, du côté de la route d'Évron, L'ensemble est moins enchanteur peut-être qu'1 Trôo et à Lavardin et les jeux de lumière sont moins féél'iques, mais c'est un autre genre, et, comme l'a dit 11, de La Sicotière, « la plus singulière, la plus rare petite ville qui se puisse imaginer ».


Tour à tour, l'attention se partage entre le panorama et l'examen des remparts qui amène le président à rappeler quelques notions de fortification du 1\Ioyen-Age.

On traverse ensuite de vieilles rues aux silhouettes originales, et on gagnE: l'entrée du chateau dont l'enceinte et les tours recouvertEs de lierre forment un bien joli tableau.

Tout le temps resté libre est alors consacré au donjon, morceau capital d'architecture militaire. En quelques mots, le président et le vice président, M. le marquis de Beauchesne, résument son histoire et en font ressortir les particularités.

Contrairement au plan des comptes-rendus précédents, nous réservons pour des articles complémentaires l'exposé de ces explications, de même que l'étude archéologique des principaux monuments visités, et nous nous restreignons ici à un simple jourml de marche. Non-seulement des monuments tels que le donjon de Sainte-Suzanne, l'église d'Évron, le chàteau du Rocher et le camp de Jublains, méritent des développements de quelque étendue, mais l'expérience nous a prouvé que les excursions sont une excellente occasion de remettre au point l'étude des édifices, et qu'on est heureux plus tard de recourir comme à un guide aux notions ainsi réunies il semble dès lors préférable de les dégager des détails anecdotiques ou personnels qui n'ont d'attrait que pour les.seuls excursionnistes, en leur faisant revivre une agréable journée. A l'examen du donjon succède la visite du chàteau proprement dit. Malgré son absence très regrettée, le propriétaire actuel, M. le vicomte de Vaulogé, a bien voulu autoriser tl l'explorer de fond en comble. C'est le cas, certes, de dire de fond en comble, car on monte jusque dans les greniers pour en admirer les be~.les charpentes, aux combinaisons ingénieuses, et y contempler une dernière fois le panorama dans sa plus vaste étendue.


Déjà il est plus de midi 30 quand les derniers retardataires consentent à redescendre de ces hauteurs. En toute hâte, il faut se diriger vers l'hôtel du Lioiz d'Or où doit avoir lieu le déjeuner. A peine quelques infatigables, plus agiles, peuvent-ils au passage jeter un regard sur l'église, dédiée à sainte Suzanne et reconstruite depuis dix ans. Le temps échappe absolument pour répondre u l'obligeante invitation de M. le doyen d'envahir sa terrasse, pour recourir aux bons offices du garde-champêtre, et, ce qui est plus fachem, pour aller remercier Ai. le Maire.

Au reste, l'excursion devant conserver un caractère exclusivement privé, les membres de la Société prennent seuls part au déjeuner, sous la présidence de M. Robert Triger et de l~i. le marquis de Beauchesne. Comme de juste, les places d'honneur ont été réservées aux dames. M. et M~~l° blorte~-eille, du Lio~z d'Or, ont fait, d'ailleurs, les efforts les plus méritoires pour satisfaire leurs hôtes. Ils ont soigné le menu de leur mieux, et par une attention très appréciée ils ont dressé la table de soixante-deux couverts dans une spacieuse remise, décorée avec beaucoup de goût: au-dessus de la table principale, se détache même en lettres éclatantes cette aimable inscription ,( Homiez<r aua; Étrexngens! » Au dessert, le président se lève et selon l'usage prononce le toast suivant destiné il fixer quelques-uns des traits particuliers de la journée.

Mesdames,

Messieurs et chers Confrères,

« S'il est un reproche qu'on ne puisse faire à la Société historique et archéologique du Maine au cours de ses excursions, c'est assurément celui de s'attarder longtemps n table. Dédaigneux des exigences de la vie matérielle, nous élevons plus haut nos esprits nous ne nous préoccupons que des monuments qui font la ;;loire du Pays et des sites qui en


font la beauté, et nous traversons nos campagnes du Maine en explorateurs toujours avides de découvertes nouvelles, mais toujours pressés.

» Je romprai d'autant moins aujourd'hui avec ces traditions, dont nous nous honorons, que le programme de la journée est fort chargé, et que je me reprocherais de vous enlever par un mauvai:; discours quelques-uns des trop courts instants que no\;s pouvons consacrer à cette belle région des Alpes mancelles.

» Plusieurs d'entre vous, mes chers confrères, veulent bien dire que votre président conduit ses expéditions avec une précision quelque peu militaire. Permettez-moi de vous parler en soldat, sans phrases inutiles.

n La ville de Sainte-Suzanne, je ne crains pas de le dire tout d'abord, a le droit d'ètre fière de notre visite, car son prestige irrésistible a introduit dans les antiques coutumes de la Société historique et archéologique du Maine une innovation mémorable.

» Pour la première fois, il vous a entraînées, Mesdames, dans les sentiers ardus de l'archéologie, et il nous a procuré l'honneur de vous ouvrir aujourd'hui nos rangs. Je me hâte d'ajouter que vous ne pouviez choisir un meilleur terrain pour vos débuts.

» Sainte-Suzanne est par excellence la ville des chevaliers, et il me semble que les mânes des illustres chevaliers dont je vous rappelais tout à l'heure les exploits ont dû singulièrement tressaillir en voyant votre gracieux escadron parcourir avec tant d'intérêt les ruines qu'ils défendirent jadis héroïquement. Sans aucun doute, ils ont estimé leurs efforts bien récompensés et leur sang bien payé par cet hommage que leur rendaient après de longs siècles des femmes françaises et chrétiennes qui comme vous Mesdames, restent toujours dignes d'ètre des épouses, des soeurs et des filles de ch3valiers. (Applaz~disaemer~ts).


» Vous avez jeté sur la vieille forteresse un éclair de poésie et passé à travers ses murs délabrés comme des fées bienfaisantes, ramenant avec elles la jeunesse, l'enthousiasme et l'espérance. Merci, Mesdames, de nous avoir ainsi rajeunis et encouragés. Grâce à vous et aux patriotiques souvenirs qu'évoque Sainte-Suzanne, nous rentrerons ce soir dans nos foyers plus ardents non seulement à l'étude mais la défense de toutes les gloires de notre chère France. (Appla.udissernerits).

» Bon nombre d'amis, malheureusement, ont manqué à l'appel, retenus par des coïncidences regrettables ou par des obligations impérieuses, C'est un gros regret pour nous de ne pas revoir, entre autres, autour de cette table plusieurs de nos plus fidèles et de nos plus charmants compagnous de la vallée du Loir, messieurs Singher, d'Angé]y-Sérillac, Léon de Lorière, Degoulet, abbé Morancé, Roulleau, de Beaumont, Courdoux, Verdier, etc. Je suis assuré d'être votre interprète, mes chers confrères en leur adressant ainsi qu'à tous les absents un bien amical souvenir.

» En revanche, nous avons la joie de voir les vides comblés par de nouveaux amis auxquels j'ai hâte de souhaiter la bienvenue. Pour la première fois, M. Ernest Fouché, le vaillant patriote que tant de bons Manceaux ne cesseront d'acclamer, le commandant Le Sassier-Boisauné, messieurs de 1\Ionhoudou, de Follin, Édouard de Gastines, Tuai, Salmon, de Saint-Albin, Bodin, Guillotin, le docteur Delauilay, l'abbé Brière, qui fait revivre parmi nous le souvenir d'un confrère toujours regretté, ont bien voulu prendre part il l'excursion. Le plus vif désir du Bureau de la Société est qu'ils en conservent bonne impression et qu'ils daignent plus tard récidiver. (Applcea~dissevxents). » Au reste, s'ils avaient besoin d'exemples, ils en rencontreraient de très flatteurs pour nous dans le dévouement inlassable et la fidélité des collègues accourus à notre


rescousse des départements voisins Monsieur Tournouer, le distingué président de la Société historique et archéologique de l'Orne notre maître à tous en fait de brillantes excursions, M. le chanoine Urseau, secrétaire-général de la Société des sciences et arts d'Angers, 11i. Georges Renault, conservateur du musée de Vendôme de la Société archéologique du Vendômois. Ils n'ont pas reculé, pour nous témoigner leurs sympathies, devant de longs et pénibles déplacements. Nous leur en sommes vivement reconnaissants.

» Je ne parle maintenant que pour mémoire de la Commission historique et archéologique de la Mayenne. Des liens si intimes nous unissent il elle qu'il nous est un peu permis de considérer ses membres comme de la famille. A défaut de son président, notre excellent ami M. Moreau, que nous espérons encore voir ce soir à Évron, elle est dès maintenant représentée ici par tout un groupe de ses meilleurs travailleurs, messieurs Paul de Farcy, l'un de ses vice-présidents, Laurain, son dévoué secrétaire, Louis Garnier, Gouvrion, Poirier-Béalu, Alle:mme, Goupil. Nous leur savons d'autant plus de gré que nous avons envahi, somme toute, leur territoire, et que, par leur présence ils nous acquittent du crime de violation de frontières et nous mettent la conscience à l'aise. De plus, leurs savants commentaires sur des monuments qu'ils ont si bien étudiés nous seront fort profitables et nous dédommageront des regrets que nous éprouvons de n'avoir pu arracher leur éminent confrère, monsieur l'abbé Angot, aux ruines de son cher Rubricaire, où il nous attend, Messieurs, un autre jour.

» Laissez-moi ajouter, tout bas, mes chers confrères de la Mayenne, que vous avez été bien inspirés en venant ainsi représenter en nombre votre beau département. La Société historique et archéologique du Maine a, en effet, l'honneur d'avoir en M. le marquis de Beauchesne, un vice-président


très érudit qui aime et connait à fond votre histoire. Si vous n'étiez venus, nous lui aurions demandé de vous suppléer et il l'eût fait avec une compétence et une science dont vous ne sauriez prendre ombrage, car il se considère comme beaucoup des vôtres.

» Et maintenant je termine au plus vite, de peur que vous ne me trouviez, après mon préambule, quelque peu bavard. » J'ai dit que Sainte-Suzanne était la ville des chevaliers. » Au nombre de ces chevaliers, il en est deux qui dominent toute son histoire ou mieux il est deux héros qui dominent l'histoire militaire du Maine tout entière le vicomte Hubert, défenseur de Sainte-Suzanne contre Guillaume le Conquérant au YI~ siècle, et Ambroise de Loré, défenseur de Saiute-Suzanne contre les Anglais au XVo siècle.

» Ces deux héros sont dignes de compter parmi les gloires nationales, et si la France savait se souvenir de ceux qui le méritent réellement, il y a longtemps qu'ils devraient avoir leurs statues au chef-lieu de la province.

» La Société historique et archéologique du Maine n'a pas le pouvoir d'élever des statues, mais elle a le devoir de se souvenir et d'honorer la mémoire de tous les grands patriotes.

» Je vous propose donc, Mesdames, Messieurs, de clore notre visite Li Sainte-Suzanne par un hommage de patriotique gratitude il ces deux vaillants chevaliers, modèles de courage, de foi et d'honneur. Je vous propose de porter un toast de respectueuse admiration au vicomte Hubert. et v Ambroise de Loré, dont les exemples, en ces temps de défaillances, demandent plus que jamais à être rappelés et médités ». (~lpplnzedissernent~ i~.nuni~nes).

M. Tournouer prend alors la parole et, dans une très heureuse impro~-isation que nous ne pouvons qu'analyser bien imparfaitement, exprime à ses confrères du Maine les


cordiales sympathies de la Société historique et archéologique de l'Orne, ou mieux, les sentiments de fraternelle amitié que la rencontre de l'année dernière lt Ambrières a ravivés davantage encore. Avec beaucoup d'à propos, il rappelle les communs elForts faits récemment par les deux Sociétés pour assurer la protection des édifices religieux, ainsi que les résultats d'ensemble réunis par Di. Robert Triger et en fait ressortir tout l'intérêt. Puis il invite les Manceaux, dans les termes les plus séduisants, à se joindre à la prochaine ercursion de l'Orne qui doit avoir lieu dans le Perche. Son éloquence est si persuasive et la renommée des excursions qu'il dirige si bien établie, que tous, certes, voudraient pouvoir répondre à l'appel. Tous au moins accueillent par de chaleureux applaudissements ce toast si bien pensé et si bien exprimé.

Mais l'heure est inexorable. A peine les applaudissements ont-ils cessé qu'il faut, au plus vite, remonter en voitures, et reprendre la route d'Évron, où l'on doit s'arrèter quelques instants au passage pour visiter l'église, avant de gaôner le château du Rocher et JJblains,

Il est déjà près de 3 h. 1/2 quand le convoi double les files et se masse en colonne de rassemblement sur la place de l'église d'Évron.

Très aimablement M. l'abbé Gascoin, curé-doyen d'É\Ton, et M. le marquis de Montéclerc sont venus y attendre la Société. On les remercie de cette gracieuse démarche on renouvelle à 111. de Montéclerc les regrets de n'avoir pu visiter son intéressant <;h~îteau (1), et après un rapide coup(lj Très vaste bien qu'inaehevé, le chàteau de Montéclerc appartient à la fin du XVI' et au X. VII' siècle l'ensemble est ,( vraiment beau a comme le dit lil. l'abbé Angot, qui, avec raison, n'admet pas le jugement trop sévère de M. Palustre. L'une des parties les plus remarquables et surtout la plus originale est le pavillon du poilt-levis, dont la Géograyjiie ~ittoresgue et mont~>nentale de la France donnait récemment une excellente reproduction. A l'intérieur se voient une grande salle de 14 mètres de long et une chambre avec une belle cheminée


d'œil sur la façade de l'ancienne abbaye, après un souvenir rétrospectif aux vieilles halles jadis si curieuses mais aujourd'hui démolies, on s'empresse de pénétrer dans la magnifique église Notre-Dame.

M. le curé-doyen veut bien en faire lui-même les honneurs, présenter les excursionnistes à Notre-Dame de l'Épine, et leur rappeler l'origine d'un pélerinage demeuré cher à tous les catholiques du Maine. Il a eu, en outre, l'attention d'exposer dans la sacristie les richesses artistiques du trésor, la vierge d'argent du XV- siècle, le merveilleux reliquaire Renaissance attribué à Simon Hayeneufve, le buste de l'évêque saint Hadouin etc.

Volontiers on s'oublierait dans ce bel édifice où l'architecture romane du XII- siècle et l'architecture gothique du 1IV~ se mélangent pour former un ensemble si imposant, si instructif, et où les œuvres d'art abondent. Ce n'est pas sans effort même, qu'on s'arrache à certaines sculptures, au très amusant motif du ~noine con fes~ant u~a pé~aitent (XIVe siècle), au remarquable bas-relief du maitre-autel (1VIIIe siècle).

Heureusement, si les minutes sont comptées, les visiteurs sont bien documentés. Ils ont pour guides dans l'église Notre-Dame et la chapelle Saint-Crépin les savants articles de M. Lefèvre-Pontalis et de M. l'abbé Angot de plus, ils ont la bonne fortune de compter parmi eux l'excellent architecte qui a dirigé les dernières restaurations, M. Louis Garnier, inspecteur des édifices diocésains de la Mayenne. Avec de tels guides on apprend beaucoup en peu de temps.

Une heure plus tard, les voitures s'arrêtaient devant la grille du château du Rocher de Mézangers. Le propriétaire, NI. le comte Horric de Beaucaire est retenu à Paris par ses en lambris peints et sculptés. Depuis ciraq cents aile, ce chàteau s'est transmis héréditairement dans la famille de Montécler.


fonctions il a bien voulu quand même ouvrir son parc à la Société du Maine avec; une parfaite courtoisie dont nous tenons à le remercier i'3i.

Au double point de vue pittoresque et architectural, le château du Rocher est un ravissant bijou. Dès les premiers pas, il suscite d'enthousiastes exclamations,

Toutefois, ces exclamations sont presque aussitôt interrompues par un étrange incident. A l'extrémité de la vaste pelouse, en face même -lu château, se produit tout-à-coup un formidable écroulement dont le fracas ébranle les échos du parc comme un roulement de tonnerre. C'est à croire qu'une partie du château vient de s'effondrer, et cependant au premier moment on n'aperçoit rien. Serait-ce quelque méfait inédit de cette fameuse Dawe Verte dont il va être tant parlé N'en déplaise aux imaginations vagabondes et aux amateurs de merveilleux, la cause de l'aventure est beaucoup plus naturelle et prosaïque.

Par une coïncidence bizarre, à l'instant même où les excursionnistes entraient dans le parc, une charrette de ferme, emportée par un coursier impatient, a heurté un grand arbre et versé dans toutes les règles de l'art, projetant sur l'herbe tendre sans aucun mal Dieu merci les deux femmes qu'elle ramenait.

Pendant quelques secondes l'archéologie est délaissée d'aimables curieuses se précipitent, à la recherche d'émotions, et il se forme autour du cheval tout un cercle de brillants officiers qui discutent gravement les meilleurs moyens de remettre le coupable sur pieds.

Pour rappeler la foule des sauveteurs au drapeau. de la science, il ne faut pas moins que l'évocation de la Da~rae Verte, faite solennellemEnt autour du puits par le président en personne. En dépit des plus consciencieuses objurgations, la Da-nxe j'erte, hélas, né) daigne pas paraitre. On doit se contenter du récit de la légende, et ce qui est plus pro-


fitable, d'un résumé des conjectures architecturales de M. Palustre sur la construction du château.

Comme pour Sainte-Suzanne nous rejetons plus loin, dans un chapitre spécial, les notions historiques et archéologiques. Pour l'instant nous nous bornons à constater que cette courte conférence donnée sur la margelle du puits du Rocher, dans un charmant décor et au milieu d'un auditoire singulièrement attentif grâce à la Dame Perte ne fut pas banale. Plusieurs clichés photographiques le témoigneront 1 la postérité.

Mais la façade Renaissance avec son élégante galerie et ses belles lucarnes n'est pas seule intéressante. En arrière, l'ancien manoir du XVe siècle reflète son pittoresque profil dans les eaux limpides d'un magnifique étang,

De ce côté, le château se présente, on peut le dire, sous un aspect idéal. On l'admire longuement des bords de l'étang, u l'ombre des grands bois qui complètent le tableau. On voudrait, comme jadis Josué, arrêter le cours du soleil personne n'en a le pouvoir, et des coups de sifflet précipités mettent trop tôt fin aux douces rêveries. Cinq heures viennent de sonner, il reste juste le temps d'achever le programme.

Pendant qu'une voiture se détache pour ramener en gare d'Évl'On un petit groupe de déserteurs involontaires, les autres s'acheminent donc il grande allure sur la route de Jublains ('1). A cette heure de la journée, par un temps radieux, les paysages revêtent des teintes délicieuses, plus (1) Bien que le temps n'ait pas permis de s'y arrêter, il serait injuste de ne pas signaler au moins l'intéressante église de Mézangers dont on a pu, faute de mieux, entrevoir l'extérieur au passage. D'origine très ancienne, l'édi1ice comprend une nef romane flanquée de deux chapelles, l'une du ~I~'e siècle, dite chapelle du Rocher, l'autre de 1880. A cette dernière époque, l'église de Mézangers tout entière a été très heureusement restaurée et elle a reçu depuis une riche décoration murale, a uvre de notre compatriote, M. A. Vivet, peintre décorateur, au Mans.


délicates, moins heurtées, et des jeux de lumière indescriptibles donnent aux lointains des profondeurs inattendues. Très nette, la vieille chapelle de Montaigu se dresse à l'horizon au sommet de son étrange mamelon, tandis qu'au premier plan s'étend étincelante la belle nappe d'eau de l'étang du Gué de Selles, qu'encadrent de fraîches prairies et des bois touffus. Dans les voitures les conversations s'animent si bien aux charmes du paysage que les kilomètres s'oublient.

Enfin, voici Jublains, la célèbre cité gallo-romaine et sur la route, au bas de la côte qu'elle couronne, un groupe de promeneurs. Ce groupe, avouons-le, n'a rien de galloromain. Ce sont les automobilistes de la caravane, arrivés bons premiers sans pannes, qui viennent au devant des chars archéologiques, La rencontre ne comporte aucun discours latin avec toute la simplicité moderne les descendants des Cénomans abordent leurs frères les Diablintes. Ils leur apportent même sans scrupules les usages les plus contemporains, car leur premier soin, au milieu des ruines de Jublains, e,t de luncfier· d'un excellent appétit. L'étude, parait-il, est salutaire à tous points de vue. Au reste, bien que les brioches de Jub!ains ne remontent plus 11 l'époque romaine, elles semblent conserver une propriété spéciale, celle de ranimer l'ardeur archéologique, En tout cas, la visite du fameux castelhi~rx n'y perd rien. On le parcourt en tous sens on en examine les diverses enceintes et les moindres détails avec la plus vive curiosité, Pour plusieurs des excursionnistes, cette forteresse de Jublains est une révélation. Pour tous elle apparait ce qu'elle est en réalité un monument unique, en son genre, de l'occupation romaine. Le Président se fait un devoir d'en retracer l'histoire en quelques mots, d'après les consciencieux travaux de MM. Barbe et Lio r, puis il profite de la présence du groupe de:; anciens officiers pour soulever une


discussion des plus intéressantes sur le rôle militaire du castellnnz dt'. J ublains.

Tous sont unanimes à y voir un réduit, occupé en temps de paix par un poste d'un effectif très restreint, mais destiné, en temps de guerre, à servir de point d'appui ou de refuge il une troupe plus nombreuse, en abritant ses magasins d'approvisionnement ce serait un véritable blocklzau.sa, de tous points analogue à nos blockhauss d'Algérie où quelques hommes ont tenu tète plus d'une fois :t de furieuses attaques et maintenu le drapeau de la France au milieu d'une contrée insurgée. Il semble difficile néanmoins de présumer que le fort primitif de Jublains ait jamais pu abriter, dans son enceinte des premiers siècles, plus de 100 à 1~0 hommes, et encore faut-il admettre que cette petite troupe ait campé tant bien que mal dans l'aty~izcna. La situation du poste était, d'ailleurs, admirablement clloisie, Des remparts, on domine un vaste horizon, et on peut apprécier du premier coup d'oeil la valeur toute particulière du point d'observation.

En cette journée du 5 juillet 1906, le territoire des anciens Diablintes demeurait d'un calme absolu, mais on pouvait encore y contempler un spectacle qu'admirèrent plus d'une fois jadis les légionnaires romains, le spectacle d'un beau coucher de soleil sur la chaîne des Coëvrons les hommes et les civilisatious passent, les œuvres du Créateur ne passent pas.

De même, l'esprit humain conserve à travers les siècles toute la diversité de ses aptitudes. Pendant que plusieurs d'entre nous, s'attardant dans des rêveries de philosophie historique, ne quittent du'a regret ces ruines « émouvantes », d'autres, plus pratiques, se lutent de courir au temple, au théâtre, avides de tout voir, de ne rien laisser de côté d'autres, passionnés toujours pour le Moyen-Age, partent sous la direction de M. de l3eauchesne pour le vieux château LX, 14


Mes Écottais, célèbre dans l'histoire des guerres anglaises dit 1`·° siècle ('1). L'expédition a si bien réussi qu'on peut, comme au soir d'un suc,~ès, laisser la discipline se relâcher et accorder quelques instants de maraude archéologique. Le butin de la journée n'en est (lue plus riche quand le soir, à 8 h. ~l/'2, tous se retrouvent pour le diner v Évron, à l'laôt~l dtc Corrmaerce.

Les tables sont dressées, cette fois, dans la grande salle du Comice agricole que bi. et Mme Panager, eux aussi, ont fort biell décorée, D'aw:re part, le menu rivalise dignement avec celui du déjeuner, ~t réunit de justes suffrages. A vant de rejoindre la gare, le président renouvelle ses brefs remerciements et donne la parole à M. Georges Renault, conservateur lu musée de Vendôme, qui a aimablement réclamé l'autorisation de conclure.

Malgré les appréc.iations trop amicales de M. Renault en certain passage, nous ayons le devoir de reproduire le texte de son toast

Mesdames, Messieurs,

« .Te ne sais pas faire -les discours et je n'ai pas l'habitude de porter des toasts. Pourtant il me serait doux de répondre aux aimables paroles que notre bienveillant Président m'a adressées ce matin, et de témoigner à la Société historique et archéologique du Maine toute ma gratitude.

» Je suis donc fort embarrassé, mais heureusement une réminiscence classique est venue tout à l'heure m'enhardir, Il) Le chàteau fort des Écottais avait été construit pendant la première période de la guerre d~ Cent-Ans. Aujourd'hui, il ne reste debout qu'une aiguille effilée de 20 m. de haut du donjon principal et la base d'une grosse tour percée de meurtrières étroites. L'enceinte formait un carré irrégulier dune soixantaine de mètres de côté et était entourée de douves pleines i'eau. Cf. l'abbé Angot, Dictionnaire de la bfa~emae.


et si j'ose prendre la parole, c'est la faute. c'est la faute 11 Boileau (Applazsdisseme>its).

» N'est-ce pas lui, en effet, qui a dit que ce que l'on conçoit bien s'énonce clairement » ? Eh bien, Messieurs, il est plusieurs choses que, ce soir, je conçois très bien, et j'espère pouvoir aussi les énoncer clairement.

» Ce que je conçois bien, c'est que je suis enchanté de la superbe excursion, si yariée et si intéressante, que nous ~·enons de faire.

» C'est que je suis l'a vi de la charmante cordialité de tous les membres de la Société.

» C'est aussi et surtout que j'apprécie hautement l'érudition impeccable de notre cher Président, son infatigable dévouement pour la Société, son aménité sans égale qui lui conquiert toutes les sympathies, j'allais dire tous les C~YllI'S

» Messieurs, je sais me borner, profitant ici encore du précepte de Boileau « Je sais surtout me borner » D'ailleurs tout ce que je pourrais dire n'ajouterait rien à ma reconnaissance.

» Mesdames, Messieurs, au nom de la Société archéologique du Vendômois et en mon nom personnel, je lè~-e mon verre en l'honneur de la Société historique et archéologique du llfaine, je lève mon verre en l'honneur de son président, NI. Robert Triger (A~plao.disse~neats y~épétés) ». 1\1. Georges Renault parlait en ami

D.=. ces sentiments si délicatement traduits nous sommes heureux de retenir au moins ce qui concerne la Société historique et archéologique du Maine, très sensible u la sympathie qu'il a bien voulu lui exprimer tant au nom de la Société du YendÔlllois qu'en son nom personnel. Nous nous permettons aussi de retenir son appréciation sur l'intérêt et la variété de l'excursion.


La journée avait été, en effet, particulièrement fructueuse, instructive et variée, réunissant par une bonne fortune peu commune, et comme l'avait annoncé son programme, des monuments importants, de toutes les grandes époques monuments de la féodalité militaire à Sainte-Suzanne, monuments de l'architecture religieuse du Moyen-Age à Évron, de l'architecture civile de la Renaissance au Rocher, vestiges très rares de la civilisation gallo-romaine à Jublains. Cette variété si profitable demeurera le caractère dominant de l'excursion du 5 juillet 1906 et lui assurera une place honorable parmi les diverses chevauchées de la Société, Sans aucun doute, elle lui vaudra même l'honneur d'être recommencée un jour.

Le Bureau ne pouvait souhaiter de meilleure conclusion qu'une telle impression unanimement proclamée pendant le retour en chemin de fer d'Évron au Mans (1).

(1) Le surlendemain et jours suivants, le ~'ouuelliste de la Sarthe, La SnrtAe, l'E:ryress de la Sa~ lloc, le C.'ourrier de Vfa~enne, et le hlnncen~e de Paris voulaient bien publier un compte-rendu de l'excursiou nous leur adressons tous nos remerciements.

Dès aujourd'hui, nous sommes en mesure de faire suivre cette introduction d'un premier et important article de M. de Beauchesne sur Les Seigneurs de Saimte-Su:a~ane; dans les livraisons suivantes nous donnerons les articles consacrés à l'histoire militaire et à l'étude archéologique de la forterease, des circonstances particulières ne nous ayant pas permis de suivre rigoureusement l'ordre chronologique.


LES SEIGNEURS

LA BARONNIE DE SAINTE-SUZANNE

Si le donjon de Sainte-Suzanne était, dès le milieu du 1I~ siècle, un des plus forts châteaux: du Maine, il ne faudrait pas en conclure que la châtellenie du même nom eitt dès lors l'importance territoriale qu'on attribue d'ordinaire à une baronnie et qu'elle devait avoir, en réalité, quelques siècles plus tard. Quelles étaient à cette (,.poque les limites du territoire possédé féodalemetit par les seigneurs primitifs de Sainle-Suzanne ? C'est ce que, faute de documents à cet égard, il nous serait difficile d'établit' d'une fa~on précise. Il est certain en tous cas que la future baronnie ne coi-npreiitit, antérieurement au XI\'o siècle, ni la châtellenie d'AmIH'iel's, ni celles de Mézangers, de la Ramée et de Thorigné. Quant à celle de Sourches, nous verrons qu'elle aussi n'a dit être rattachée à Sainte-Suzanne qu'à cette dernière époque.

Les plus anciens sei~neurs connus de la terre clui nous occupe sont les vicomtes de Beaumont. D'après le chanoine Le Paige, cette terre avait été portée en dot par Lucie de Sainte-Suzanne à Raoul Il de Beaumont (1) qui vivait à la (U Comme la pluliai-t des historiens rnodernes qui se sont occupés de la question, nous appelons Raoul 1 le père de celui par qui nlénaôe et le P- Anselme font commencer la Généalo~ie des anciens Bea2~mont

ET


fin du 1~ siècle et au commencement du C'est ce scigneur qui avait dû donner en 994 aux religieux..le Marmoutier l'église de Saint-Hyppolite de Vivoin au pays du Maine (1), et c'est lui qui après l'an 1000 maria sa fille Odeline avec Hugues de Lavardin, tige des seigneurs d'Amboise et filleul d'Hugues Capet. Les Gestes des seigneurs d'Amboise qui nous apprennent ce dernier fait, le qualifient à cette occasion vicomte de Sainte-Suzanne (2). Il eut pour fils Raoul Il, mari de Emmeline de Montreveau, lequel vivait encore en 1061 et pour petit-fils Hubert 1 le célèbre défEl1sem du donjon de Sainte-Suzanne contre Guillaume-le-Conquérant en 1083.

Celui-ci, qui avait épousé Ermengarde de Never~, en eut Raoul III du nom, le fondateur de l'abbaye d'>Jtival-enCharnie. Ainsi que nous le rappelle la teneur même de l'acte de fondation de cette abbaye, ce sei~;neur de SainteSuzanne avait aumôné au serviteur de Dieu Alleaume homme d'une vertu plus grande encore que sa naissance, le lieu de Saint-Nicolas, situé dans la forêt de Charnie, avec toutes ses dépendances, ainsi que la dime du moulin et du four de Sainte-Suzanne et des droits d'usage dans ladite forêt de Cliarnie.et les Lois environnants, appartenant audit vicomte. Mais, plus tB.rd, le lieu de Saint-Nicolas étant devenu insuffisant par suite de l'affluence des personnes des deux sexes qui étaient venues s'y livrer à la vie religieuse, il avait fait abardon Alleaume d'un autré endroit, pourvu d'eau (chose qui manquait à Saint-Nicolas) sis également dans la forêt de Charnie, et au suiet duquel il ne se réservait aucun droit que la participation au divin service. C'est là, à Étival, qu'AlleaUine avait bâti un monastère en l'honneur de Dieu et de Notre-Dame, et y avait établi une communauté. de femmes puis Raoul de Beaumont ne (1) Voir la Gértéaloyie des ~anciens Beamnont, par le P. Anselme. (2) A. Ângot. Dictioryiaire de la bia~e~rne, Saitite-Suzanne.


voulant pas qu'après la mort d'Alleaume le troupeau de celui-ci restât sans pasteur, avait fait venir de l'abbaye du Ronceray d'Angers sa propre sceur., nommée Godehilde, et l'avait placée comme abbesse ~t la tète dudit monastère. Par l'acte même de fondation il avait donné et assigne tant aux religieuses, qu'à l'abbesse pour toutes leurs possessions et notamment pour leur métairie de la Vacherie, le droit de féage et d'usage dans la forêt de Charnie et bois adjacents, depuis le lieu d'Éti~-al jusqu'à l'Erve il leur accordait en outre le droit d'acquérir en main morte dans toute l'étendue de ses fiefs et arrière-fiefs, ne demandant cri retour que la participation aux prières de la communauté et la célébration il perpétuité de son anniversaire il stipulait cependant qU'11 lui seul et à ses successeurs, seiâneurs de Sainte-Suzanne, appartiendrait le droit de faire exécuter les malfaiteurs condamnés Lt mort par la justice des religieuses enfin il leur concédait une foire qui se tiendra chaque année -t ÉtinÜle lendemain de Pàques (~1). Raoul III de Beaumont fut enterré à Étival dans l'abbaye (lui'il avait fondée (2). De sa femme dont on ignore le nom, il eut, entr'autres enfants, Richard l qui fut, comme ses ancêtres, seigneur et vicomte de Beaumont, seigneur de Sainte-Suzanne, de Fresnay et du Lude. A l'exemple de son père, il se montra pour les religieuses d'Étival un généreux bienfaiteur; il leur fit don en 1'H)4, peu de temps par conséduent avant sa mort, pour la célébration de son anniversaire, de divers droits en la ville et châtellenie de Fresnay, et des vignes, cens, revenus et autres redevances ayant appartenu Li Constance, sa saeur (3).

Marié avec N. de l'Aigle, il en avait eu deux fils, Richard et Raoul Richard eut, en sa qualité d'ainé, avec la vicomté de Beaumont, la terre de Sainte-Suzanne. C'est en cette (1) Arch. de la Sarthe, H. 137~.

(2~ P. Anselme.

(3) Arcli. de la Sartlie, H. 13î 1-


dernière qualité qu'en. 1205, il donna aux religieuses d'Étival un lieu près de Loué, avec tout ce qui en dépendait, et des droits d'usage ([ans la forèt de Charnie, pour l'en- tretien et la réfection des vignes du monastère (1). Il mourut peu après sans postérité et eut pour successeur son frère cadet Raoul IV.

Raoul IV de Beaumont, avant succédé en 1212 à son frère Richard, continua les ibéralités de ses prédécesseurs envers l'abbaye d'Étival. En 1218 il avait pris la croix et était sur le point d'aller à la guerre sainte en cette grave circonstance, il crut de"oir donner aux religieuses de la Charnie dix livres dix sols mançais de rente, savoir trente sols sur son moulin de Sainte-Suzanne et neuf livres sur sa prévôté et seigneurie de Beaumont (2).

Cette même année, il concède à l'abbaye d'Étival une rente sur son donjon de Sainte-Suzanne, « Quatuor solidos Cenomanenses de turrc med quæ sita est in castro Sancta Suzanna singulis annis per tnanum villici dicti castri monachia Hebronientibus persolvendos (1218) (3). Enfin en 1236, il abandonne à sa nièce, l\Iarguerite, comtesse de Fif, sa maison du Parc d'Orques, avec ses appartenances, où dès l'année suivante celle-ci devait établir un couvent de Chartreux (4). Raoul I~l de Beaumont mourut en l'année 1235, il fut inhumé comme son frère dans l'abbaye ll'Étival (5).

Son fils Richard II lui succéda dans ses terres et seif;neuries. llientaiteur, lui aussi, des religieuses d'Étival, il ne tarda pas à leur donner pour le remède de son âme et de 1) Arch. de la Sarthe, H. ~1371.

(2) Ibident.

(3) Noti.ce historique sur ~vron, par l'abbé Gérault, pièces justificatives, no 19.

(41 Voir la très intéressa..lIe introduction placée par notre savant confrère D. Léon Guilloreau en tète de ses Tragmerats d'vr Obitoainc de la Charlrense dit Parc-d'rqnes en Cüarnie.

(5) P. Anselme.


celles de ses parents, cent sols de rente sur sa prévôté de Sainte-Suzanne. Cette donation, datée de juillet 1239 (1), fut promptement suivie d'une autre par laquelle il donna à ces mêmes religieuses, dans une semblable intention, tous ses droits sur le manoir du Livet, près du bois de Songé,, en Saint-Léger (1240) (12). Deux ans après, il donne encore il l'abbaye d'Éti\'a], pour le remède de son âme et de ses amis et pour les anniversaires de lui et de Mahaut, sa femme, dix livres tournois de rente sur la prévôté de Sainte-Suzanne (septembre 12412) (3). Cette même année '12i2, il faisait don à la Chartreuse du Parc-d'Orques de trois livres de rente sur sa châtellenie de Sainte-Suzanne ( 4). Il mourut en 1249 sans enfants de Mathilde d'Amboise et fut inhumé, auprèsde son ayeul, de son père et de son frère Guillaume, dans l'abbaye d'Étival (5).

Après la mort de Richard II de Beaumont, sa sœur Agnès, devenue la principale héritière des biens de sa maison, porta u son mari Louis de Brienne, avec la vicomté et le nom de Beaumont, les terres de Fresnay, du Lude, et de Sainte-Suzanne. Comme seigneur de SainteSuzanne, Louis de Brienne augmenta vers l'an '1263 de 1200 livres la fondation de la Chartreuse du Parcd'Orques (6) de même en 1285, il reconnait par un actc solennel les donations faites par ses prédécesseurs il l'abbaye d'Éti\'al, entr'autres la rente de soixante sols faite en 12'18 par Raoul IV de Beaumont sur les moulins de Sainte-Suzanne (7). Il se fit enterrer la Chartreuse du Parc-d'Orques. Agnès dc Beaumont, sa femme, testa en 1311. Dans son testament, elle n'oublia pas les religieuses

(1) 1) Arcli. de la Sarthe, H. 1371. ~12) Ibidem.

(a~ l6ide>n.

14) P. Anselme.

(5) I6ide»~.

pi) P. Anselme.

(7) Arcli. de la Sarthe, H. 1371.


d'Étiva], il qui elle lé,5"ua soixante sols de rente de la prévôté du Lude, pour pitance, le jour de son anniversaire, et cent livres une fois payées pour acheter des rentes ou augmenter les biens de la maison ('1),

Louis de Brienne et Agnès de Beaumont eurent pour fils aîné et principal héritier Jean de Beaumont-Brienne qui se qualifiait baron de Sainte-Suzanne, et dans son testament, en ~1331, fit une libéralité à l'abbaye d'Éti\'al (2). Marié avec Jeanne de la Guierche, il en avait eu entr'autres enfants, Robert de Beaulnont-Ilrienue, qui, comme son père, se qualifiait baron de Sainte-Suzanne. De Marie de Craon, ce dernier eut Jean de Bea.umont-Brienne, lIe du nom, époux en premières noces d'Isabeau de Harcourt et en deuxièmes noces de Marguerite de Poitiers; seigneur de Sainte-Suzanne, dont il se qualifiait lui aussi baron, il acquit après 1330, de concert avec sa seconde femme, la châtellenie d'Ambriers qui s'étendait dans les paroisses de Viviers et de Voutré, et était contiguë au nord, à celle de Sainte-Suzanne (3). Jean II de Beaumont-Brienne avait eu de son second mariage, deux fils, Louis et Geoffroy. Geoffroy, qui fut seigneur du Lude, meut-ut avant l'an 1355 sans enfants de Jeanne de Bauçay. Quant tt Louis, qui fut après son père vicomte de Beaumont et baron de Sainte-Suzanne, il fut tué en 1364 la bataille de Cocherel, et fut enterré dans la Chartreuse-du-Parc-d'Orques (4). Il ne laissait, lui non plus, pas d'enfants de son union avec Isabelle de Bourbon, et eut pour héritière Marie de Beaumont- Brienne, née du premier mariage de Jean Il avec Isabeau d'Harcourt, et femme de Guillaume Chamaillard, seigneur d'Antlienaise. Ce dernier était donc devenu en 1364, à cause de sa femme, seigneur de Sainte-SU2.anne. Or, il possédait déjà de son Il) Arch. de la Sarthe, H. 'l3'i1.

(2) Ibidern.

(3) A. Angot, article Ambriers.

(4) P. Anselme.


chef, nous le savons, la chàtellenie de Chources (1) et celle de Mézangers (2) qui toutes les deux, après avoir appartenu ~i la maison d'Anthenaise, étaient passées aux Chamaillard par suite du mariage de Jehan Chamaillard, vers '1259, avec Emmanuelle d'Anthenaise. Ainsi grâce à l'accession de ces deux châtellenies, dont l'une, celle de Chources, lui était contiguë à l'est, la châtellenie primitive de SainteSuzanne, était en ces temps-là en train de prendre un notable accroissement, très suffisant pour justifier le titre de baronnie porté depuis quelque temps par ses seigneurs, !\lais ce n'était pas tout. Vers la même époque, deux autres c.hutellenies, non moins importantes que les précédentes, les châtellenies de la Ramée et de Thorigné, toutes les deux également voisines, la première à l'ouest, la seconde au sud, étaient encore venues augmenter, pour ne pas dire doubler, le territoire de la haronnie. Possédées à l'origine par des seigneurs distincts, les de Vai-es et les de Thorigné (3), ces deux châtellenies s'étaient trouvées dès la première moitié du XI lIe siècle réunies par un mariage entre les mains des puissants seigneurs de Thorigné bien connus dans l'histoire du Bas-1aine et dont le château, situé près du bourg du même nom, devait être considérable, ~t en juger par ce qui (1) Voir Le cl~citenrt de Soui~ches et ses seigraertns, par le duc des Cars et l'abhé A. Ledru.

(2~ Voir A. Angot, articles Laru~é et .llé_angers. En 1?l><J, Savary Li'Anthenaise était garant de Geoffroy de Chélé dans un procès que celui-ci avait au sujet de droits d'usage dans la forêt de Langé avec l'abbaye En 1::J2i-'1325, Guillaume (Chamaillard¡ d'Anthenaise, père de notre Guillaume (Voir A. Ledru'¡, était seigneur de la chàtellenie de Mézangers.

(3'i En 1?11, I'ayen de ~'aiges, avait, comme seigneur de la Ramée, fondé le prieuré de ce nom. Ce fut Marquise, sa fille, qui, ayant épousé Fouquerand de Thorigné, porta dans cette dernière maison la chàtellenie de la Ramée. Nous trouvons ensuite comme seigneurs de Thorigné et de la Ramée, Raoul de Thorigné (123f-1~), Payen (1251-'1203) et Raoul (li:112). Peut-étre la fille de ce Raoul avait-elle porté en mariage les chàtelleuies de Thorignè et de la Ramée à Guillaume CbamaillarLi [ du nom, dont la femme nous est inconnue.


en reste actuellement. Comme on le voit, au moment oit le successeur de Louis de Beaumont-Brienne en prenait possessiou, la baronnie qui nous occupe n'avait désormais rien à envier comme étendue à ses puissantes voisines de Laval et de Mayenne, puisque, sauf quelques enclaves ecclésiastiques vers le nord (~1), elle s'étendait sans interruption depuis lfézangers jusqu'à Bannes, et depuis la ChapelleRainsouin jusqu'à Saint-Symphorien-en-Champagne. Quant au domaine attaché à la baronnie de Sainte-Suzanne, il consistait dès lors, indépendamment du château même de Sainte-Suzanne, dans le moulin et deux étangs situés au pied du château, dans Lue partie de la forêt de la Charnie, dans le château et la terre de Thorigné, et dans la terre, l'étang et le moulin de la Ramée,

Mais revenons à Guillaume Chamaillard. Comme seigneur de Sainte-Suzanne, nous le voyons, en 1:369, essayant de contraindre les religieu~ abhé et couvent du Parc-d'Orquesen-Charnie à envoyer leurs « hommes, subjects et serviteurs, demourans ès ville et paroisse d'Orques, faire guet et garde » à sa forteresE,e, ce dont Charles V leur accorda du reste des lettres d'exemption ('2),

Cependant l'épom de Marie de Beaumont-Brienne ne devait pas jouir longtemps de la baronnie de SainteSuzanne. Dès l'année 1371 il l'avait cédée en dot à sa tille Marie Chamaillard en la mariant avec Pierre d'Alençon. Le premier acte que fit celui-ci en cette qualité fut d'exercer sur Jehan Turpin, seigr,eur de Tennie, le retrait féodal de la châtellenie de Chources que son beau-père avait vendue à réméré en décembre 1370 à ce seigneur (3). Ce fut aussi (1) Les terres de la baronnie d'Évron et celle d'Assé-Ie-l3éranger qui appartenait au chapitre du :54ans.

(2) Bibliothèque nationale, manuscrits latins, 17048 f' 277. (3) Bibl. nat., fonds français, 18944 et 189~. Inventaire des titres trouvés au château d'Alençou en '1525, f- 427 et suivants, liasse relative à la baronnie de Sainte-Suziniie.


Pierre d'Alencon qui, de concert avec Marie Chamaillard sa femme, fonda par charte donnée Alençon le 19" mars 1380 « une chapelle perpétuelle au chastel de Satinte-Suzanne » en appuyant cette fondation de 25 livres de rente assignée sur la « recepte ordinaire dudit lieu » ladite chapelle devait être d'ailleurs chargée de trois messes par semaine, et les fondateurs en retenaient pour eux et leurs successeurs le droit de patronage ('1). En 1386, Marguerite de Poitiers, qui posséliait dans son douaire la chàtellenie d'Ambriers, la céda par échange au comte et tlla comtesse d'Alençon (2). Cette châtellenie fut dès lors annexée il la baronnie de SainteSuzanne comme membre dépendant.

En 1403 le même Pierre d'Alençon céda au seigneur de la Motte ferrand le droit de pacage sur les rivages de l'étang de la Ramée « au retrait des eaux » (3). Il mourut l'année suivante, mais Marie Chamaillard lui devait survivre jusqu'en 1425, Ils eurent pour fils aîné et principal héritier Jehan I, comte d'Alençon, qui nous apparaît en 1405 « comme aiant la garde, gouvernemeris et administration de très noble et puissante dame Madame la Vicomtesse de Beaumont, sa mère, et de tous ses biens » (4), et reçoit en cette qualité, au regard de la baronnie de Sainte-Suzanne, l'aveu de la terre et châtellenie de Chources (5). Deux autres obéissances féodales lui furent rendues en la même qualité, en '1409 au regard de la chàtellenie de Thorigné pour Moncorps en Chammes (6), et en 1411 au regard de celle (1) Bibl. nat., fonds français, '189" et 18915.

('2') A. Angot, article Amabries~s.

(3) A. Angot, article La Ramée.

14) Il avait fait le 19 mars de cette année-là en qualité de curateur de madame Marie de Beaumont sa nièce foi et hommage à Louis, roi de Jérusalem et de Sicile duc d'Anjou et comte du Maine, pour raison du vicomté de Beaumont et autres terres déclarées en l'acte d'hommage, Inventaire d'Alençou fo 266, d'après Bry de la Clergerie, FJi,sloire des pays et cornté dit Penche et duché d'Alençort.

(5) A. Ledru. Le ckciteau de Sourciaes et sea seigneurs.

(6) A. Angot, article bloncors.


de Mézangers, pour l'office de la seigneurie de Langé (~1). On sait que Jehan I d'Alençon fut tué en octobre 1415 11 la bataille d'Azincourt. De Marie de Bretagne, qu'il avait épousée en 1396, il laissait, entr'autres enfants mineurs, Jean II, destiné il lui succéder.

Ce prince avait été marié dès l'année 14U2 avec Yolande d'Anjou, et, à cette oc~asion, son père Jehan l lui avait cédé « la vicomté de Eeaumont avecque toutes les autres terres et seigneuries » (Sainte-Suzaiine par conséquent), que lui, « tant comme aiant le gouvernement » de sa mère Marie Chamaillard, tenait en Anjou et au Maine « à les prendre et avoir après le trespas » de celle-ci (12' )

Aussi voyons-nous, en 1416, Marie de Bretagne recevoir comme bail de ses enfants mineurs deux obéissances féodales au regard de la chàtellenie de Mézangers, l'un des membres dépendant de 11 baronnie de Sainte-Suzanne. C'est d'abord un aveu de Jehan le Maire pour sa terre du Rocher, puis une déclaration du procureur de la fabrique de Mézangers pour le droit que ladite fabrique avait de prendre en la forêt de Langé du bois pour réparer l'église (3). En 1419, les Analais, déjà maitres de la Normandie, semblaient sur le point d'envahir le Maine. C'est alors que la duchesse d'Alençon songea à faire mettre en état de défense ses différentes forteresses mancelles entl"autres celle qui nous intéresse. Or il parait qu'en 2.ette conjoncture les « religieux, prieur et couvent du monastère de NotreDame du Parc en Charnie, de l'Ordre des Chartreux, ès mettes de la châtellenie et terre de Sainte-Suzanne », lui avaient donné à eiitené-re qu'ils avaient « environ 25 a 28 subjetz en la ville et paroisse de Saint-Denis-d'Orques, près ledit moustier », lesquels n'étaient « aulcunement (1) De \ismes, Le bfaine et d'.4~ijou, notice sur le Rocher de hfe:angers.

(2) Arch. nat. P. 1334, cote fi;.

(3) De Wismes, notice sur L~; Roclaer.


subjetz » de la châtellenie de Sainte-Suzanne, mais l'étaient au contraire « partie du comté du Mayne, et partie de l'abbaye d'Esvron»). Les religieux cependant, étant données les graves circonstances où l'on se trouvait, étaient loin de se refuser en réalité à contribuer à la défense du pays contre l'envahisseur étranger en envoyant, comme on leur demandait, leurs sujets « faire guet ou garde audit chasteau ». Ce qu'ils réclamaient c'était que Marie de Bretagne reconnût par un acte authentique leur droit de ne pouvoir y être forcés, et c'est ce que cette princesse s'empressa de leur accorder par des lettres spéciales (1).

Marie Chamaillard, mourut, avons-nous dit, en 1425. C'était l'année où les Anglais s'emparèrent du château de Saint~Suzanne et du pays environnant. D'un autre côté le jeune Jehan II d'Alençon était alors aux mains des ennemis qui l'avaient fait prisonnier l'année précédente à la bataille de Verneuil. Afin d'obtenir sa liberté, moyennant rançon, il fut obligé de mettre en vente une partie des terres qui lui étaient échues de la succession de son ayeule. Parmi celles-ci figurait la terre et châtellenie de la Ramée dont un des vassaux de cette châtellenie, Jehan de la ChapelleRainsouin, s'était rendu acquéreur sous la condition de la relever de Sainte-Suzanne, et non compris dans l'acquisition l'étang, le moulin, les mouteaux et pêcheries de la Ramée et les forges de Bray. L'acte est du 30 aoCtt 1427 (2). De même, en 1I3 r, pour subvenir aux frais d'une expédition qu'il préparait contre les Anglais en Normandie, Jean II d'Alençon dut engager à Ambroise de Loré, avec faculté de reméré, la terre et châtellenie de Thorigné (3). En 14!~8, la province du Maine fut entièrement évacuée par les Anglais, et la baronnie de Sainte-Suzanne, si tant est que soit château avait été repris par ceux-ci depuis (1) Bibl. nat., man. lat. 17M fo 278.

[2.1 A. Angot, article la Ciaapelle-Rainsovüz.

(3) Arch. nat., Rj5IUt.


que Jehan de Bueil s'en était emparé en 1439, fut définiti rement rendue au duc d'Alenç,on.

En 1451, Jehan Il re{ut au regard de cette baronnie l'aveu de René de la Chapelle pour ses terres de la Ramée et de la Chapelle-Rainsouin, document grâce auquel nous voyons que de ce côté le territoire féodal de Sainte-Suzanne comprenait en tout ou en partie les paroisses de Ruillé-surOuette, de La Chapelle-Rainsouin, de Brée, et mème la terre de la Roche-Pichemer en Saint-Ouen-des-Vallons (1). On sait comment, dans les années suivantes, le duc d'Alençon encourut la disgrâce de Charles VII qui, après l'avoir fait condamner pour crime de lèse majesté, le fit emprisonner d'abord à Melun, puis Loches, et le dépouilla de ses biens, lesquels furent mis en la main du Roijusqu'à ce que ses enfants fussent en àge de lui succéder, Jehan Blosset, chevalier, seigneur de Carrouges, fut alors établi il SainteSuzanne comme capitane et représentant du pou~·oir royal. Fort de l'autorité que lui donnait sa charge, il prétendait contraindre les habitants des différentes châtellenies faisant partie de la baronnie, à faire le guet dans les tours et sur les remparts de la forteresse confiée à sa responsabilité, ce à quoi les habitants de la ch~tellenie de Thorigné se refusèrent. De là une série de procédures qui, d'abord portées devant le bailli de Touraine, le furent ensuite devant le Parlement de Paris le litige était encore pendant en juillet 1462 (2).

A cette dernière date, Louis XI venait de succédér à Charles VII, et un des premiers actes du nouveau roi avait été de remettre le duc d'Alençon en liberté et de lui rendre les biens, honneurs et dignités qu'il avait avant sa condamnation. Aussi voyons-nous ce dernier à la date du 13 août 1465 envoyer devers Charles d'Anjou, alors comte du Maine, son II: très cher et bon amy messire Jehan Auvé, chevalier, (1) Voir Moutard, bfonographie de la Ciaapelle-Rainsouin. (2) Arch. nat., X/1a 8307 f~~ 214 vo et suivants.


seigneur de Genestay », son « maistre d'ostel et procureur », afin de faire en son nom foy et hommage lige « cause de la restitution à lui faite par mondit seigneur le Roy de ses terres et seigneuries de Beaumont Fresnay SainteSuzanne, etc., (1).

Cependant à Jehan Blosset avait succédé, comme capitaine de Sainte-Suzanne, Guy de Chourses, seigneur de Malicorne conseiller et chambellan du Roi, il qui pour ses « bons et agréables services ce prince avait donné l'office de « capitaine et garde du lieu et place dud. Sainte-Suzanne » (2). Ce dernier se trouva ainsi substitué, par la force des choses, à son prédécesseur dans le procès pendant entre lui etles habitants de Thorigné au sujet du guet. Or, en 1464, un arrêt de Parlement avait condamné le nouveau capitaine de Sainte-Suzanne rendre les biens confisqués jadis par Jehan Blosset sur lesdits habitants et lui avait fait défense de contraindre dorénavant ceux-ci à faire guet. Mais cet arrêt n'avait pas mis fin au débat, car Guy de Chources s'était opposé, en ce qui le concernait, à son exécution. Pour toute réponse, il annonça qu'il contraindrait les habitants de Thorigné et qu'il les ferait trainer jusque sur les murs de la forteresse. C'est alors que le sergent royal, pour punir le capitaine de sa désobéissance à l'arrêt du Parlement, mit la terre de Malicorne en la main du Roi, ce dont Chources appela en prétendant que l'arrèt n'était pas donné contre lui, mais contre son prédécesseur (3). Les choses en étaient là quand éclata, entre Louis XI d'une part et presque tous les grands du Royaume de l'autre, la guerre du Bien public, où Jean II d'Alençon prit avec ces derniers parti contre le Roi. Cette nouvelle révolte du duc contre l'autorité royale, bientôt victorieuse, eut les mêmes (1) Arch. nat. r..13ID.

(Z) Bibl. nat., Cab. des titres, dossiers bleus, analyse de titres relatifs a la Maison de Chources, fo 57.

(3) Arch. nat., X/l' 8309 fo 181.

LX. 15


conséquences que celle du règne précédent. Pour la seconde fois l'infortuné Jean II ;e vit emprisonné et privé de ses biens.

Après sa mort arrivée en 1476, Louis XI s'empressa de restituer à René d'Alen,;on comte du Perche fils du défunt, toutes les terres et seigneuries qu'avait jadis possédées son père, à l'exception cependant de plusieurs places, parmi lesquelles se trouvait Sainte-Suzanne, qui demeurèrent entre les mains du roi en leur qualité de places frontières (1). Jehan de Bruges, seigneur de la Gruthuse, fut alors chargé de la garde des places et châteaux de Beaumont, Fresnay et Sainte-Suzanne (2).

Toutefois si René d'Alençon n'avait pas en ces années-là le château et laville de Sainte-Suzanne, il n'en était pas de même du reste de la baronnie dont il jouissait au même titre que ses ancêtres, C'est ainsi qu'en juillet 1477 nous voyons Charles le Maire lui faire foi et hommage, au regard de Mézangers, pour le Rocher (3). C'est ainsi encore qu'en septembre 1478, nous le voyons octroyer au seigneur de la Chapelle-Rainsouin des lettres par lesquelles il érige cette terre en châtellenie et maison forte, avec permission de lever fourches patibulaires, et avoir bois de justice à trois piliers (4).

En ces années-là du reste, tout en ne possédant pas le château de Sainte-Suzanne, il n'en allait pas moins chasser de temps à autre dans la forêt de la Cbarnie qui lui appartenait quand en août H81, sur le point de passer en Bretagne, il se rendit de La Flèche à la Roche-Talbot, où il. .devait être pris par Daillon, il avait, dira-t-il plus tard au cours de son interrogatoire, intention « de chasser dans la forêt de Charnie où il avait jà envoyé ses chiens » (5). (t) Histoire des co»ztés d'.4lençort et du Perche, par Dry de la Clergerie, p. 34\01 et 360.

(2) Bibl. nat., fonds français, 2832.

(3) De Wismes, notice sur Id Rocleer.

~4) Moulard, La Claapelle-Rninsotcin.

(~) Hisloire des comtés r~'Alençon et dtt Perche, p. 40.


Ce n'est pas ici le lieu de raconter de nouveau, comme nous l'avons fait ailleurs, la dramatique arrestation du comte du Perche -t la Roche-Talbot. Nous dirons seulement qu'emmené à La Flèche, puis il Chinon, enfin à Vincennes, il fut soumis à un long interrogatoire, dont le résultat lui aurait sans doute été fatal, si la mort de Louis XI et l'avènement de Charles VIII n'étaient venus lui rendre, avec la liberté, ses honneurs et ses biens. Pour ce qui est de la forteresse de Sainte-Suzanne, il lui en fut accordé mainlevée par le nouveau roi dès l'année '1483, en même temps que des places de Beaumont et de Fresnay, dont le seigneur de la Gruthuse obtenait décharge (1),

Ce fut, sans doute, également à cette époque que René d'Alençon confia le gouverneme6t de la vicomté de Beaumont à Baudouin de Champagne, seigneur de Coulans. Toujours est-il qu'en 1499 il lui fit don du revenu en deniers de la taille de l'Angevine sur la terre et seigneurie de Sainte-Suzanne, sa vie durant seulement (2).

Ce prince mourut le '1 er novembre 1492, laissant de Marguerite de Lorraine un fils mineur, le jeune duc Charles dont sa mère eut le bail et gouvernement.

C'est en cette qualité que la veuve de Hené d'Alençon reçut, en 1498, au regard de la baronnie de Sainte-Suzanne, l'aveu' de Jean de Bouillé pour sa terre et seigneurie de Bouillé située paroisse de Torcé-en-Charnie et autres circonvoisines (3). L'année suivante, le même Jehan de Bouillé lui fit hommage, cette fois en regard de la châtellenie de Mézangers, pour le Rocher et la segrayrie de la forêt de Langé (4).

Vers cette même époque, la duchesse d'Alençon était en procès, devant la juridiction des requêtes du Palais, à Paris, avec messire Jehan de Bouillé, prieur de Torcé, « pour (1) BibI. nat_, iiis. fonds fr. -18937.

(2) BibL uat., ms. fonds fr. 21T215 fo 118.

(3) Cabinet des titres, pièces originales, dossier Bouillé.

(i) De Wismes, notice sur le Rocher.


raison de certains droi ~s que prétendoit led. prieur en la fomest de Charnye b (1). En 1502, elle retire sur Ambroise IV de Loré la terre et châtellenie de Thorigné que le duc, son époux, avait engagée en '1485 -t Roberde de Tesnières veuve de Ambroise III seigneur de Loré, et au jeune Ambroise IV leur fils ('2). En 1503, REné du Bouchet lui rendit par aveu, sa terre et châtellenie de Sourches (3). En 1508, nous trouvons, parmi les repl't)sentants des grands feudataires présenta au Mans à la promulgation de la Coutume du Maine, « maistre Nicolas le Camus, procureur de Madame Marguerite de Lorraine, duchesse d'Alençon, ayant le bail de Monseigneur le duc d'Alençon son fils, per de France, pour la vicomté de Beaumont en tant que touche Beaumont Fresnay et Sainte-Suzanne deppendant d'icelle vicomté ». Cependant en 1509 Charles d'Alençon avait atteint sa majorité le 10 octobre de cette année-là il fit en personne foy et hommage à Louis XII pour le duché d'Alençon, la vicomté de Beaumont, 1'3s « terres et seigneuries de Beaumont-le-Vicomte, Fresnay et Sainte-Suzanne, tenues du Roy 11 cause de son comté du Maine », etc. (4). Comme seigneur de Sainte-Suzanne, il eut en 1513 un différend avec les religieuses d'Étival qui prétendaient un droit d'usage en la forèt de Charnie (5). En 1515 il reçut l'aveu de Pierre du Fay, écuyer, seigneur dudit lieu de Launay, pour raison du lieu, domaine ét appartenances de la Vente, sis près Blanquenet, en la paroisse de Viviers (6). Dans le cours de cette même année, il soutenait, par l'intermédiaire de son procureur de Sainte-Suzanne, un procès en matière de (1) Inventaire des titres trouvés au chàteau d'Alençon, déjà cité, liasse Sainte-Suzanne.

(2) Arch. nat., R/5 501.

(3) A. Ledru, Le chdtears de Sourches et ses seigneurs.

(4) Histoire des comtés d'Alenço~a et dit Perche, p. 35fi.

(5) Inventaire d'Alençon, dejà cité.

(G) Ibidern.


chasse contre Magdelon de la Jaille, seigneur d'Avrillé, devenu au droit de sa femme, F rançoise Crespin, seigneur du Chastelet, de Saint-Jeau-sur-Erve et de Bonne-Marie, terres relevant ~t foy et hommage de la baronnie de SainteSuzanne et de la chàtellenie de Thorigné, Voici à quel sujet s'était élevé ce litige.

Le procureur du duc d'Alençon « disoit-et proposoit que Monseigneur à cause de sa baronie de Sainte-Suzanne est seigneur d'une belle forest segreal nommée Charnye, en laquelle, ses circonstances et dépendances, mondit seigneur et non aultre a droict de chasse, tendre et traisner à grosses bestes noyres et rousses. » Or ledit Magdelon de la Jaille, ,( combien que en icelle terre du Chastelet n'y eut aulcun droit à grosses bestes, et que ladite terre du Chastelet soit joignant et contigue ladite forest de Charnye », toutefois, sans avoir aucunement le droit d'agir ainsi, avait « tendu et trais et prins plusieurs bestes noyres et rousses sur sondit domaine dudit lieu du Chastelet et depuis trois ans euvyron a prins en ladite seigneurie du Cha:3tclet deux ou troys bestes noyres, en outrepassant sur les droits et libertés de mondit seigneur ». Bref, le procureur concluait « à l'encontre dudit cheyalier defendeur qu'il fùt « condampné ~,l payer par cltascune desdites bestes qu'il a prius la somme de cent livres tournois, et que pour l'advenir, il cesse de chasser et traisner audit domaine du Chastelet », etc.

A quoi Magdelon de la Jaille faisait répondre par son avocat qu'il reconnaissait bien la vérité des faits allégués contre lui, mais que ce qu'il avait fait, il avait eu droit de le faire. Il disait que ,e à cause de ladite dame Françoise Crespin son espouse. il est vray seigneur propriétairc et possesseur desdites terres et seigneuries du Chaste]et, Saint-Jean-sur=Erve et dl' l3oune-blarie, partie desquelles seigneuries sont tf'nues à fuy et hommabe simple et autre partie moiennant on en ressort de mondit seigneur ti cause


de sadite baronie de S,Ünte-Suzanne, et lesquelles terres et seigneuries sont de belle et grande estendue et en icelle plusieurs hommes et ~3ul)jects et a plusieurs beaux droits et prérogatives cause de sadite terre et seigneurie, et entr'autres a en lesdites terres et seigneuries le droit de chasser, tendre et tresner et prendre cerfs, biche: chevreuils, sangliers, et toutes autres bestes sauvaibes, grosses et petites, et t,int rouges que noyres, de quelque essence ou nature qu'elles soient, et tant luy que ses prédécesseurs en ont jouy et lisé. »

Tel était le sujet du litige qui s'était élevé entre le duc d'Alençon comme seigneur de Sainte-Suzanne et son vassal Magdelon de la Jaille, litige qui se termina le `?? juillet 1505 par une transaction passée devant Emery Piau, « licencié ès loix, bailly de la baronnie, terre et seigneurie de Sainte-Suzanne, et de la cl1âteUenie de Thorigné, membre dépendant de ladite baronie o, et d'après laquelle le seigneur du Chastelet se vit maintenu dans son droit de chasse (1). Pendant qu'il est question de la forêt de la Charnie, n'oublions pas de signaler ici un assez curieux document qui se trouvait parmi les papiers de la baronnie pour la même époque. C'était un mémoire en papier non signé commençant ainsi « S'enssuy vent les articles et remonstrances faictes à Monsieur d'Alençon des larrecins, pilleries et exactions qui sont faictes par les officiers de la seigneurie de Sainte-Suzanne ès forests de Charnye » (2).

Il semble d'ailleurs que la duchesse douairière d'Alençon, Marguerite de Lorraine, eût conservé même après 1509 quelques droits de jouissance sur le domaine de la baronnie. Nous savons en effet que c'était elle qui avait en octobre 1515, baillé à ferme 1: our douze ans à René Boyer et à Guyon de Rouez les étangs de Sainte-Suzanne. De même nous la voyuns, par lettres données à Saint-Just-lès-Lyon le ~1) ArcU. du château de llLdevilain, fonds la Jaille.

~3~ Inventaire d'Alençon.


5 octobre 1524, soubscriptes Marguerite et signées de Launay, scellées sur simple queue à cire rouge », mander au Président des comptes d'Alençon et à Guillaume le Coustellier, « bailler à ferme au plus offrant les estangs de

Sainte-Suzanne ('1).

Charles d'Alençon mourut d'une façon prématurée le 11 avril '1525, et comme il n'avait point d'enfants de son union avec Marguerite d'Anaoulème, la vicomté de Beaumont avec toutes ses appartenances et dépendances passa .après lui à" sa sœlll' aînée Françoise d'Alençon, alors mariée en deuxièmes noces -'IL Charles de Bourbon- Vendôme. Comme vicomtesse de Beaumont et dame de la baronnie de Sainte Suzanne, Françoise d'Alençon reçut, en 1541, trois fois et hommages simples que lui devait noble homme Claude de la ,Taille, seigneur du Cliastelet et d'Avrillé, l'une pour raison du domaine, fief et seigneurie de Bonne-Marie, la deuxième pour raison de sa terre fief et seigneurie du Chastelet, et la troisième pour raison de la haute justice qu'il avait au bourg de Saint-Jean-sur-Erve et des droits qui en dépendaient, et ce il cause de la châtellenie de Thorigné, membre dépendant de sa baronnie (2). Deux ans après, Françoise d'Alençon obtenait l'érection en duché de sa vicomté de Beaumont dont faisait toujours partie, d'après les lettres même d'érection, la terre et seigneurie de Sainte-Suzanne (3). Veuve de Charles de Bourbon depuis 1537, elle mourut elle-même en septembre 1550 au château de La Flèche. Après elle le duché de Beaumont échut à son fils aîné Antoine de Bourbon, le mari de Jeanne d'Albret. Dev·enu ainsi seigneur de la baronnie qui fait l'objet de cette étude, celui-ci reçut, en cette qualité, le 10 septembre 1554, l'aveu de Baudouin de (1) Inventaire d'Alençon.

(2) Arch. du chàteau de Badeuilaiu, fonds la Jaille.

(3) Bibl. nat. man. fonds français 1319C~.


Champagne, pour la terre et châtellenie de la ChapelleRainsouin (1).

Antoine de Bourbon mourut en 1562. Illais&'lit, pour lui succéder comme roi de ;i[avarre et duc de Beaumont, un fils en bas-âge, qui devait, comme on sait, ètrelun jour roi de France sous le nom d'Henri IV.

Quand ce dernier fut majeur, il s'aperçut que sa maison était chargée de « grandes et excessives doibtes », et obtint en conséquence, le 7 septembre 1574, du roi Henri III, dont il avait épousé la sœur, des lettres-patentes l'aotorisant Lt mettre en vente, « les boys et foretz de Charnye, Langé et Montaigu, situez.en la baronie de Sainte-Suzanne, ensemble les terres vacques, vaines et incultes dudit lieu. » (2). Vingt ans après, ce n'était plus seulement quelques parties du domaine dépendant de la baronnie de SainteSuzanne, mais tout l'ensemble de ce domaine que Henri IV se décida j'aliéner,

D'abord par acte du :30 août 1594 il vend à Honorat du Bouchet, seigneur de Sourches, « les étangs de la Rochette et du Breil le taillis du Pouillay avecques les buttes et garennes de Sourches, Chamaillard, en Tennie, ',t la charge de les tenir à foy et hcmmage simple de la haronie de Sainte Suzanne, au delwoir annuel d'une maille d'or, apretiée à 12 sols 6 deniers, au terme de la Nativité de Notre-Dame, vulgairement appelée l'engevynne; à la charge aussi que Sa Majesté et officiers d'icelle en sa dite baronie de Sainte-Suzanne y pourroient, toutesfoiz et quantes, faire tenir et exercer les pleds et assises de sa chastellenie dudit Sourches-Chamaillard, et v recepvoir les liommaiges, et de payer le prix de la vente dedans le dernier jour du mu5-s de septembre prochain, en la ville de Beaumond » (3). Dans les mêmes jours, le roi vend à Claude de Bouillé, ~1c)ulard. La Cliapclfe-R~einsonin..

1.2) A. Ledru. Le ci~àleate ete Sot<rcl~es et ses seigiie~ers.

(3) lbiclem_


pour 2,666 écus, la seigneurie, sans domaine, dépendant de la châtellenie de Thorigné (1).

Enfin, par un troisième acte du 16 septembre 1594, il cède, par engagement, à la ~~ein,e Marguerite de Valois, moyennant la somme de 18,000 écus, le reste du domaine de la baronnie moins les moulins et étangs de Sainte-Suzanne et de la Ramée, des bois taillis et certains autres droits qui furent engagés, le 31 octobre suivant, à Jehan de la Vigne (2). « La reine Marguerite ne garda pas longtemps cet engagement en 160~, elle le cède à Guillaume Fouquet de la Varenne. Mais, celui-ci, pour donner à son acquisition plus de solidité, voulant tenir ces biens du domaine lui-même, profita du temps auquel le domaine de Navarre n'était pas encore réuni u celui de la couronne de France, et voulut devenir propriétaire incommutable. Aussi les formes qui devaient lui procurer le plus de sitretz, furent-elles employées. « Les commissaires du roi Henri IV vendirent, le 20 septembre lfi0l;, à Guillaume Fouquet de la Varenne, par contrat passé devant notaire, le droit de rachat perpétuel appartenant au Roi, de l'engagement fait à la reine Marguerite, de la baronnie, terre et seigneurie de Sainte-Suzanne, pour jouir en cette baronnie de tous les droits de propriété, domaines, ensemble des hommes, vassaux, sujets, droits honorifiques, provisions d'étaLs, et tous autres droits crénéralement quelconques, appartenances et dépendances, sans aucune réserve.

Il) Arcli. nat. TI¡5 'LOI.

1,2) Ce document ainsi que La plupart de ceux qui vont s uivre et dont IIOUS nous dispenserons d'imüquer séparément la provenance, nous contentant de les mettre entre guillemets, sont tirés d'un mémoire sur l'engagement du domaine de Sainte-Suzanne présenté en 1792 aux autorités de l'époque par Marguerite Philippine de Durfort de Lorges, veuve de Arnault César Louis de Choiseul-Praslin, au nom de ses enfants mémoire qui fait partie des archives de l'ancien château de La Flèche appartenant au marquis de Bagneux et dont notre très obligeant confrère, M. l'abbé Calendini, a bien voulu nous donner communication.


« A la charge ioDe tenir la baronnie de Sainte-Suzanne du Roi à foi et homm[cge simple, cause de son duché de Beaumont 20 De payc:r à chaque mutation de seigneur un fer de lance doré et autres droits seignemiaux suivant la coutume des lieux ~l;o De payer 13,500 livres outre le remboursement de 42,600 livres à faire à la Reine Marguerite de pareille somme qu'elle avait payée sur celle de 18,000 écus, prix de l'engage.:nent de 1594.

» A ces conditions Guillaume Fouquet de la Varenne fut subrogé à tous les droits qui appartenaient au Roi. » Dès le mois de novembre suivant, il prit possession solennelle de la- baronnie et de la ville de Sainte-Suzanne. » L'année suivante) iL compléta son acquisition par celle. d'autres biens, tenus en engagement du domaine dans l'étendue de la baronnie. C'est ainsi qu'il acquit de Jean de la Vigne par contrat du 12 décembre 1605 tous les objets qui avaient été engagés à celui-ci le 31 octobre ~1594 par les commissaires du Roi, et ce moyennant une finance liquidée à `~1,300 livres de principal et -1075 livres pour les frais savoir,: 10 Les moulins au Vicomte, le moulin des Forges, situés sur la rivière de Sainte-Suzanne et la banalité de ces moulins.

Les étangs neufs de la Grenelle et de la Chauvinière. L'étang et le moulin banal de la Ramée.

Les Minerais de la Cliarnie et le droit d'y faire la miue. Le sixième du platage du moulin Angot.

Les bois taillis du Boulonnois, Riderais, et Boismob. Le droit de pêche jans la rivière de Sainte-Suzanne. Quel était iL cette époque l'état du chàteau dont venait de

se rendre acquéreur Guillaume Fouquet de la Varenne et où il se disposait à habiter? C'est un point sur lequel nous sommes très suffisamment renseignés grâce à une enquète qui, ainsi que nous le verrons, sera faite à ce sujet en l'année 1655 (1).

(1) Cette enquête, qui forme un gros cahier d'une soixantaine de pages, fait aussi partie des archives du château de La Flèclie.


Des dépositions unanimes des diffél'ents témoins qui avaient ~-u le château avant 1604, il devait résulter que « lorsque ledit défunt sieur de la Varenne achepta la dite baronnie, il n'y avait autres bastiments et logements qu'une ceinture de murailles avec quelques tours et une masse de pierre en forme de donjon, qui y sont encore à présent (en 1655) lequel donjon n'a de vie d'homme esté habité pour estre entièrement ruiné proche laquelle ceinture de murailles et ledit donjon estoit une petitte maison et une court appelée la court Marye, et ung petit appenty au long d'icelle et de ladite ceinture de murailles, dans laquelle petitte maison demeuraient Estienne Deslandes et Marie Arthuis sa femme en qualité de concierges, et que ledit petit appenty sen'oit de cuisine et de boullangerye. » Tel était, d'après l'enquête de 1655, l'état du château de Sainte-Suzanne en 1604 et dans les années suivantes, lorsque le ~ieur de la Varenne, après l'avoir acheté, « conçut le dessein de s'y retirer et d'y construire des bâtiments pour y loger avec sa famille» Il ne se mit d'ailleurs à l'ceuvre que quatre ou cinq ans après ladite acquisition, et non sans s'ètre muni auparavant « d'un brevet de S. M. du dernier janvier 1608 qui luy avoit permis de faire bastir sur ladite terre jusques à la somme de 36,000 livres ». C'est alors, disaient les témoins interrogés en 1655, qu'il « fist bastir le grand corps de logis du chasteau dudit Sainte-Suzanne dans l'enclos de ladite ceinture de murailles et en faict fist ruisner ledit petit logis comme inutile et condampna l'autien portail, et construisit à neuf celluy qui y est à présent (en 1G55) avecq le corps de garde et des escuiryes fist faire plusieurs gros pilliers de pierre autour de ladite ceinture de murailles pour la soustenir parce qu'elle estoit fendue et preste à cabrer (sic) en plusieurs endroictz, et menaçoit ruisne, répara toutes les courtines extérieures, ou contre icelles fist faire à neuf une muraille vers la ville, une poterne avecq ung n corps de garde et des guérittes à toutes


les tours, et refist presqu'à neuf les parapets, le tout pour la commodité, utillité et seureté dudit chasteau !L Les témoins ajoutaient que, pour faire lesdtts « bastiments et réparations, ledit deft sieur de la Vare.nne, avait fait venir ledit tuffeau d'Angers, et les pierres de taille du degré et des cheminées et aultres matériaux du lieu de Bernay distant de cinq à six lfeues. »

Marié avec Catherine Foussard qui lui avait apporté la terre de la Varenne, érigée depuis en marquisat, Guillaume Fouquet (1), en avait eu plusieurs fils dont le second, René, prit dès 1606 le titre de baron de Sainte-Suzanne et succéda à son père, en 1617, co nme seigneur de cette baronnie, René Fouquet de la Varenne vivait encore en "1655, à l'époque où eut lieu l'enquête dont nous a\'ons parlé tout à l'heure, Voici à quelle occ~sion elle eut lieu. L'édit du mois de décembre 1652 ayant ordonné de procéder à la revente des domaines, celui de la baronnie de Sainte-Suzanne fut mis à l'enchère et, le 14~ janvier 1655, le fils de Guillaume Fouquet s'en rendit adjudicataire « moyennant une finance de 46,200 1. outre celle de l'ancien engagement qui seroit liquidée avec les loyaux cousts ». A ce prix, il lui fut concédé, en même temps, le droit de réunir au domaine les portions qui en avaient été démembrées.

Le sieur de la Varenre s'occupa donc de faire préparer la liquidation de la finance de l'engagement fait il son père en 1604. Il dut faire constater l'état et la valeur des constructions qui avaient été fait?s par ce dernier à Sainte-Suzanne depuis 1604. Le proc.ès-verbal d'information et de vente fut dressé le 15 mars 16~05 par le lieutenant général de la sénéchaussée d'Anjou en exécution d'un arrêt de la chambre souveraine du domaine, il y fut vérifié que les (1) ~'oir pour l'ensemhle :le la vie de ce personnage la très intéresrante monographie que notre érudit collègue, le baron Sébastien de la Bouillerie, a publiée récemment dans cette Revue.


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conatructions dont la nécessité était reconnue, se montaient à la somme de 72,400 1. Ainsi elles avaient une valeur double de celle qui avait été fixée par le brevet de 1608, Nous avons déjà montré, d'après les dépositions des témoins cités dans l'enquête, le détail des travaux exécutés par Guillaume Fouquet au château de Sainte~-Suzanne en 1608 et dans les années suivantes. Une autre partie du procès-verbal de cette même enquête mérite d'être reproduite ici c'est la description du château tel qu'il était en 1655 faite en présence de noble homme maistre Mathurin Richer, sieur de Boisclos, conseiller du Roy au siège présidial de La Flèche, procureur de René de la Varenne, et des experts nommés pour la circonstance.

« Un grand corps de logis et chasteau contenant 90 pieds de longueur et 3 estages de haulteur, sous lesquels sont les caves, offices, cuisines et galleryes, le tout voulté, et lesd. 3 estages composez de 3 grandes salles et autant de grandes chambres les unes sur les :1Ultrés, accompagnées d'un cabinet chascune icelles salles et chambres séparées par un grand escallier brizé de 5 pieds de large dont les marches sont de pierre de taille, lequel conduist à touttes lesdites chambres ». Le procès-verbal signale en outre ~c longeant les murailles du dit corps de logis 15 croisées de 15 pieds de haulteur et de 6 pieds de largeur et 4 grandes lucarnes, et une grosse tour à l'un des coings du dit chasteau vers la ville, contenant 3 chambres, les unes sur les aultres, touttes à cheminées, et chascune d'icelles accompagnée de deux cabinets et une garde robbe plus un perron, avec deux degrés aux deux costez, couvert en dosme pour entrer au dit chasteau lequel, ensemble touttes les dites croisées, escallier, lucarnes, cheminées, sont faictes et parementées en tuffau, avecq ornements et architecture, et tout le dit chasteau couvert d'ardoise ». On signale enfin dans le procès-verbal « les escuiries, corps-de-gardes, portail, une poterne, six guérittes, pont-levis et planchette, courtines,


double muraille contre icelles, six gros pilliers de pierre contre les ceintures des dites murailles ».

René de la Varenne :~nourut au mois de janvier de l'année suivante (1656), laissant de Jeanne Picard, deux fils et deux filles Claude I, l'aîné de ces deux fils, fut après son frère, seigneur de Sainte-Suzanne. Il obtint, en 1670, des lettres de confirmation de l'engagement fait en 1604 à son grand père, et en 1679, des lettres de surannation les unes et les autres furent enregistr(les, tant en la Chambre des Comptes qu'en celle du Domaine.

Il est à remarquer qu'à cette époque, ce n'était pas aux La Varenne, mais au Roi à cause de son duché de Beaumont et de sa baronnie de Sainte-Suzanne, que les vassaux de cette baronnie avaient à pr~senter leurs obéissances féodales ainsi, en 1656, c'est à la Chambre des Comptes de Paris et au roi Louis XIV que Nicolas Leprestre avait eu à faire foi et hommage pour sa chàtE:llenie de La Chapelle-Rainsouin (1), et en 1683, dans un mémoire sur la composition du marquisat de Sourches, il est dit que cette terre relevait nuement du roi à cause de sa baronnie de Sainte-Suzanne, à laquelle elle ne faisait d'ailleurs arcune rente, sinon, mutation de seigneur, une maille d'or abonnée à huit sous (2). Remarquons aussi que c'est en 11¡95, par conséquent du vivant de Claude l de la Varenne, que fut fait le dessin représentant le château et la ville de Sainte-Suzanne qui fait partie aux estampes de la Bibliothèque nationale de la collection Dangeau, et que nous reproduisons ci-contre. Claude I, mourut en janvier 1697. On ignore le nom de sa femme dont il laissait deux fils, entr'autres Claude II, qui lui succéda.

Pour pouvoir jouir comme ses prédécesseurs de la baronriie de Sainte-Suzanne, Claude II paya dès le 1 cr août 1698 entre les mains du juge du trésor royal, 330 1. pour droit de (1) Moulard. bfonographie de la Chayelle-Rainsov~in.

(2) A. Ledru. Le château de Sourches et ses seigneurs.


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confirmation de l'engagement de 1604. Il avait épousé, l'année précédente, Marie-Françoise-Philiberte de FroullayTessé, et mourut avant 1709, laissant de celle-ci un fils, Anonyme de la Varenne, lequel mourut sans alliance en 1719, La baronnie de Sainte-Suzanne passa alors à René Brandelis de Champagne marquis de Villaines, petit-fils par sa mère, de René de la Varenne, et à son neveu Louis Hubert de Champagne. Les nouveaux propriétaires eurent soutenir aux environs de 1730 un long procès contre la grande niaitrise des eaux et forêts. Un arrêt du conseil du 3 juillet 1725 avait en effet ordonné qu'il fùt procédé, par des arpenteurs commis par le grand maitre des eaux et fon~ts, il l'arpentage général de la grande et petite forêt de Charnye et des bois de Sainte-Suzanne, à l'occasion duquel arpentage tous ceux qui prétendroient avoir des droits de propriété, seraient tenus de représenter leurs titres pour être sur le tout statué par le grand maitre, sauf appel au Conseil.

Ces arpentages eurent lieu en effet Thérèse Le Royer de Forges, veuve depuis peu de René Brandelis de Champé1gne, au nom et comme tutrice de ses filles, et Louis Hubert de Champagne, en leur qualité d'engagistes du domaine de Sainte-Suzanne, produisirent tous les titres des acquisitions particulières faites dans la Charnie par Guillaume et René Fouquet de la Varenne. Or ils se virent condamner par le Grand maitre il quelques amendes pour certaines coupes de baliveaux, et, comme ils avaient appelé de ce jugement, un arrêt du conseil du roi fut rendu le 26 août 1732, contenant les dispositions suivantes: 10 Étaient déclarés domaniaux les cantons de bois situés dans la Charnie appelés de la Baronie, le Vieux Mineray, le Bouillonné, le Rideray, Melu et le Taillis de La Suze à la Heuzaye.

20 Sa Majesté ordonnait l'exécution des formes établies par l'ordonnance des eaux et forèts de 1669 relativement


aux quatre étangs appelés l'Étang Neuf, de la Hamée, de la Grenelle et de la Chauvinière.

3" La marquise de Villaines était tenue de représenter dans six mois les titres primordiaux de sa possession pour justifier à quel titre elle possédait les bois taillis et les landes situés dans les confins de la Charnie.

Elle était maintenue dans la propriété incommutable et non domaniale de hauts taillis de bois situés au lieu de, la Brosse-Bedault, contenant 200 arpents.

Elle était tenue de faire planter à ses frais dans six mois, en présence du procureur du roi de la maitrise, la quantité de bois néce:.saire pour distinguer les bois qu'elle possédait en propriété de ceux qu'elle tenait en engagement.

La veuve de René Brandelis de Champagne de Yillaincs fit inutilement des recherches pour se procurer les titres primordiaux des acquisitions portées au contrat de 1608 et 1638, Du reste, grâce la réunion de 70 quittances de payement:, faits en 1576 et 1577, elle put prouver que la possession des vendeurs de 1606 et 1638 remontait une épcque bien antérieure à 1589, et' que les objets vendus, qui consistaient en 218 arpens de bois et landes, devaient être déclarés patrimoniaux. Au moyen de ces pièces produites au Conseil du Roi, elle y obtint le 27 janvier 1739 un arrêt qui, sur le dire de l'inspecteur général du domaine, la maintenait et confirmait, tant en son nom que comme tutrice de ses enfants mineurs, dans la propriété incommutable des bois et landes en question, pour en jouir, elle et ses successeurs, comme de choses à elles appartenantes.

Les deux filles issues du mariage de René Brandelis de Champagne avec Thérèse Le Royer de Forges étaient AnneCatherine qui avait éf ousé en 1736 Louis-César Le Tellier de Louvois, et mourut sans postérité, et Marie unie en 1732 à César-Gabriel de Choiseul, créé plus tard duc de Praslin.


Ce fut à cette dernière qu'échurent vers 1764, après la mort de la marquise de Villaines sa mère, tous les biens de la maison de Champagne-Villaines, y compris la terre de Sainte-Suzanne.

Cependant il y avait eu il cette époque-là un nouvel arpentage des bois et landes dépendants du domaine de la baronnie. Il s'y était trouvé un déficit de 246 arpents qui fut vérifié, et il fut constaté que cette énorme différence provenait de ce qu'on avait confondu avec le Buisson de la Baronnie des bois qui y sont contigus et qui font partie de la forêt de Bouillé. 1\1, et Mme de Choiseul-Praslin présentèrent au conseil Ulle requète dans laquelle ils développèrent la cause et les preuves de cette erreur dont ils obtinrent la réformation. En conséquence un arrêt du 3 juin 1766 ordonna que les bois du Buisson de la Baronnie enaux auteurs de la dame duchesse de Praslin, dépendants du domaine de Sainte- Suzanne, seraient fixés à 363 arpens qu'il serait procédé à l'adjudication des bois faisant la lisière de séparation entre le~'bois du Président Portail (seigneur de Bouillé) et les bois de la Baronnie qu'il serait fait le partage de la lisière' en deux parties égales qui seraient marquées par des bornes et séparées par des fossés desquelles opérations serait dressé procès-erbal. Nous avons déjà eu l'occasion de faire remarquer que l'engagement de la baronnie de Sainte-Suzanne il Guillaume Fouquet de la Varenne et il ses descendants ne comprenait pas les obéissances des grands vassaux: de cette baronnie qui relevaient direclement du roi -t cause de son duché de Beaumont et baronnie de Sainte-Suzunue. Nous en trouvons encore deux exemples il l'époque 0\1 le duc de ChoiseulPraslin était possesseur de la terre dont il s'agit. C'est ainsi qu'en 1756 c'est au roi Louis XV, a cause de la baronnie de Sainte-Suzanne, que Jean-Baptiste Joseph de Bailly, fait foi et hommage pour raison de ses terres et LX. 16


barum~ie de Bourg-Lùprestre châtellenie de la Ramée, partie de celle de Saint-Christophe du Luat et autres réunies et annexées, situées au pays du Maiue (1). C'est ainsi encore quO en 17G8 Jean-Louis Portail, conseiller du roi en ses conseils, président honoraire en son Parlement, seigneur chàtelain de Vaudreuil Bouillé, Torcé, Vivien, Maucorps et autres lieux, rend aveu audit Louis XV de sa terre, fief et seigneurie de Bouillé, située paroisse de Torcé-en-Charnie et autres circonvoisines, qu'il confesse tenir de ce prince à foi et hommage par son château de Sainte-Suzanne (2).

Il en était du reste de même de la châtellenie de Thoriôné, qui aliénée, comme nous l'avons vu, par Henri IV en 1594 au profit de Claude de Bouillé, revendue par celui-ci il René de Bouillé, son neveu, portée ensuite par alliance aux Martel et aux. Thibault de Noblet, avait été acquise vers 1752 par Marcel Prault de Saint-Germain, bourgeois de Paris, et appartenait vers 1771 la dame de Hault (3). C'était il Louis XV et non pas il. cette dernière qu'en 1770 le président Portail avait rendu aveu pour sa terre, fief et seigneurie de Maucorp3 en Charnie, et Saint-Jean-sur-Erve, tenue à foi et hommaô~~ du roi à. cause de sa châtellenie de Thorigné (4).

Pour revenir à la baronnie de Sainte-Suzanne, elle avait été, en ce qui concemait la partie réservée à la couronne, donnée en1771 en apanage ail comte de Provence, et c'est à cette occasion qu'une montrée avait eu lieu des réparations il faire aux remparts, tours et autres fortifications qui forment l'enceinte de Sainte-Suzanne, ainsi qu'aux bâtiments des halles, de l'auditoire et des prisons de ladite ville cette montrée avait été faite à la requéte de Messire Mesnard (t) Moulard. bfonographie de la Chapelle-Rainsouin.

12i Arch. nat. Q/1 700.

(3) Voir A. Angot, article Thorigné.

(4) Arcli. nat., Q/1 700.


de Sérillac, intendant des finances du futur Louis XVIII (1). En 1789, des lettres-patentes de Monsieur, frère du Roi, duc d'Anjou et comte du devaient donner commission au sieur Serveau, t'eudiste à É\Ton, de faire savoir à tous les vassaux et tenanciers de la baronie de Sainte-Suzanne qu'ils amont 11 faire la reconnaissance des devoirs et redevances par eux dus il lad. baronnie (2).

Cependant vers 1777, au temps oit le Paige publiait son Dictioman.ir~e, César Gabriel de Choiseul, duc de Praslin, était toujours, du chef de sa femme, seigneur engagiste de la baronnie de Sainte-Suzanne. Toutefois cet engagement semble avoir cessé avec lui. En ~1789, lors des élections aux États-Généraux, c'est Marguerite de Paralery, veuve de Gaston des Hayes, qui figure sur la liste de la nohlessè du Maine en qualité de dame de la baronnie de Sainte-Suzanne.

En 1792, il est -rai, il la suite du décès de Arnault César Louis de Choiseul-Praslin, fils de Cé"<ll'-Gabriel et de AnneMarie de Champagne, marié en 1754 avec nfargueritePhilippine de Durfort, duchesse de Lorges, nous voyons cette dernière revendiquer, au nom de ses enfants, la jouissance de la ci-devant baronnie et du domaine de Sainte-Suzanne Li titre d'engagement. De fait les Choiseul étaient rentrés en possession de cette terre dans les premières années du siècle, et c'est par suite d'une avec cette famille que le prince de Beauvau la possédait vers -1820, époque oit il la yemlit au baron de Damas. Elle appartient depuis 1844 par acquisition u la famille de Yauloger.

1~I~9 DE BEAUCHESNE.

111 Arch. de la 51a5-enne, 13. 1 i'j:

(~) Arch, de la IltaS-enne, B. I4m.


CHANSON DE LA MARIÉE UN US.\GE LOCAL, ENCORE E'" HONNEUR A BOURG-LE-ROI ET DANS LA RL:GIOr1 DU VOISIN.\GE, P.\RTICULIf:8EMENT SURLETERUTITOIRE DE L'ANCIENVICOMTÉ DE BEAUMONT.

Il est difficile de préciser exactement l'époque où remonte « la Chanson de la Mariee dont nous donnons ici et les paroles et la mU5ique. On la chante en effet à Bourg-le-Roi de temps immémorial, et les vieillards les plus anciens, interrogés ce point de vue, déclarent la tenir de leurs parents qui la leor ont transmise, sans doute un peu déformée, après l'avoir reçue eu~-mèmes des générations précédentes. Les paroles, si l'on en juge par la facture du vers, sont probablement antérieures à 1î00. Et la musique, elle aussi, évoque plutôt les compositions de Lully et les phrases en mineur du XVIIe siècle.

Quoi qu'il en soit, comme l'usage de la « Chanson de la Mariée)) tend aujourd'hui à disparaître ou plutôt perdre son caractère primitif, il est peut-ètre bon d'en fixer le souvenir et de faire connaitre aussi les conditions dans lesquelles on chantait encore cet épithalame il y a quelque quarante ans à tous les mariages, mais surtout aux grands mariages suivis « de danses ».

Le festin des noces, ce festin pantagruélique et que ne sauraient plus supportcr nos débiles estomacs modernes,

LA


commençait ordinairement dès. l'après-midi, suivant une courte promenade des c;: nociers », violoneux et mariés en tète, dans les pr incipales rues du village, Le menu en était aussi simple que chargé il comprenait tuus les plats de viande estimés dans le pays, COmlIlt:nç'ant par la soupe et le bœuf, continuant par le veau le mouton et les volailles pour revenir au bœuf, aux volailles, au mouton et au veau, servis successivement et alternativement à toutes les sauces réputées « de cérémonie ». A ce point de vue le porc était exclu du repas.

Aucun plat de légumes ne venait apporter son repos à l'estomac fatigué. On dédaignait le dessert.

Un mets sucré, « la millée », faisait seul exception à cette débauche de « chiair », pour employer l'expression locale, et terminait le repas, précédant le café et les chansons au rythme monotone desquelles commençait la digestiün. L'on était demeuré sept ou huit heures à table.

Alors venait la présentation des cadeaux, le défilé du « cochelin » au cours duquel chaque invité allait embrasser «Madame la Mariée» et lui remettre son souvenir vaisselle, parures, argent discrètement dissimulé dans un vase ou un objet de décoration très primitivement artistique. Les bons vivants de la société profitaient naturellement de l'occasion pour donner au défilé une note cOlTlique; on ollrait un berceau, des menus objets de layette, des jouets pour nouveau-né. La présentation des cadeaux pouvait même devenir le point de départ de gauloiseries plus fortes encore, gauloiseries toujours les tnèmes d'ailleurs, et dont la manifestation avait pour résultat de provoquer cette grosse hilarité, favorable, heureusement aux digestions laborieuses.

Puis c'était la circulation; toujours au chant des violons, de «(]a queue du mouton ». On donnait ce nom il une tirelire, improvisée avec deux assiettes, quelques rubans et des touffes de laine, que les invités se passaient en s'em-


brassant, de voisin il ..Toisine, et dans laquelle on déposait, par pièces de deux sous, le pourboire des ser·ueor,, et des 3erLez4ses.

Le repas était enfin terminé. L'obscurité, depuis longtemps, avait fait place lU jour. L'heure attendue des danses allait sonner.

Tout-Ll-coup, dans un silence qui ne manquait ni de grandeur ni de poésiE, silence évocateur des chevauchées il'antan, des conquètes lointaines et des passages de chevaliers, discrètement, mystérieusement, trois coups étaient frappés il la porte du festin.

Et de la nuit, dans le calme de la campagne, sur un rythme lent et presque religieux, montaient les voix mules des plus beaux gars du pays.

De l'ile de Bourbon,

Nouvelle mariée,

Nous venons sans façon

Chanter votre hyménée.

La salle entière était saisie d'une véritable et très douce émotion; les parents de l'épousée cachaient les larmes qui montaient à leurs yeu:c; c'était l'heure des souhaits et des vœux, l'heure où la jeune tige allait se séparer de l'arbre paternel pour vivre de sa vie propre.

Doucement émue, 1,L voix de la mariée, encore sur la défensive, répondait

Messieurs ne connais point

Ni vos chants ni vous -mêmes,

Passez votre chemin

Je vous le dis moi mème.

nIais des chevaliers, retour de l'ile Bourbon, ne pouvaient accepter sans protestation un pareil il congé. Ils insistaient donc.


Avant de s'en aller,

Nouvelle mariée,

Nous voudrions chanter

Cette heureuse journée.

Et l'épousée capitulait. Et les vœux, naïfs et pleins de douce mélancolie, montaient dans la nuit, poétiquement soulignés par la réponse de tous les gens de la noce chantant avec leur mariée, jusqu'au moment oii les chevaliers de passélge étaient admis 't partager la fète et reçus dans la salle du festin.

Dernière évocation lointaine des mœurs du Moyen-Age, ils recevaient alors chacun un ruban J'ouge, :< aux couleurs de la dame », dont ils s'empressaient de parer leur boutonnière; puis ils prenaient immédiatement part il lafète en se précipitant sur les reliefs des plats.

En somme, cet usage de « la chanson de la mariée », usage local et qui malheureusement tend Ü disparaître, mériterait Ull meilleur sort car il ne manque. ni de charme ni de sens pratique. Certes les rimes de l'épithalame ne sont pas toujours riches. La versification, ceuvre d'un poète, local sans doute, et dont le nom n'a pas été conservé, laisse beaucoup à désirer.

Mais ces vœux, qui montent mystérieusement au ciel dans la nuit, portés par la voix grave des jeunes campagnan1s ne nIent-ils pas le toast clu monsieur, qui se croit orateur, au mariage bourgeois de la ville voisine '1 Et ces beaux gars, improvisés chevaliers de passage, qui viennent en chantant mettre à la disposition des danseuses le renfort de leurs jarrets d'acier, n'ont-ils pas autant d'allure que les petits jeunes gens gantés de blanc qui dans les grandes cités arrivent, le diner terminé, saluent gauchement, gênés dans leurs bottines neuves, engoncés dans leurs faux-cols trop empesés ?


Les uns etles autre~, sont indispensables, car la maitresse de maison, à la ville comme à la campagne, sait que pour amuser les jeunes filles on n'a jamais assez de danseurs au bal.

Recevons donc avec bienveillance les petits hommes distingués de la ville mais de grâce ne traitons pas en sauvages les jeunes mâles de la campagne. Leur geste est plus noble que celui des citadins, et il apporte dans la cérémonie du mariage une évocation chevaleresque et une note de poésie qu'il est agréable dc fixer et de saluer tandis que nous en 2von~ encore le loisir.

Dr F. JOUIN.


CHANSON DE LA MARIÉE

I

LES CHEVALIERS

De l'île de Bourbon,

Nouvelle mariée,

Vous venons sans façon

Chanter votre hyménée.

II

LA ~IARIÉE

Messieurs, ne connais point Ni vos chants ni vous-mêmes, Passez votre chemin

Je vous le dis moi-même. III

LES CHEVALIERS

Avant de s'en aller,

Nouvelle mariée,

Nous voudrions chanter

Cette heureuse journée.

IV

LA MARIÉE

Chantez, Messieurs, chantez, Tout le monde s'empresse A vous bien écouter, Je Vous en fais promesse.


V

LES CHEVALIERS

Vous vivrez très longtemps Sans peines sur la terre, Et votre époux constant Sera dodx et sincère.

VI

LA biARIÉE

Continuez, chantez,

Chevaliers de passage,

Puisque vous connaissez Les dons du mariage.

VII

LES CHEVALIERS

Dès l'àge du berceau

Votre bcn ange même

Vous préparait l'anneau

Aussi le diadème.

VIII

LA 11IARIÉE

Vous me comblez de lJien" De vœux et de richesses,

Et vos doux entretiens

Me font en allégresse.

IX

LES CHEVALIERS

Dieu qui vient de bénir

Cet hymen, époux tendres, Va sur votre avenir

La richesse répandre.



X

LA MARIÉE

Le ciel :30it adoré

Les anges et Dieu lui-même, Et vous qui prédisez

Soyez bénis de même.

XI

LES CHEVALIERS

Vous tous qui contemplez La nouvelle épousée,

Par bonté demandez

Qu'on nous donne l'entrée. XII

LA MARIÉE

Entrez, Messieurs, entrez Partagez notre fête,

Car vous le méritez,

Sans savoir qui vous êtes. XIIJ

L l':S CHEVALIERS

Pour vous remercier,

Nouvelle mariée,

Oui nous allons entrer

Et vous voir couronnée.

XIV

LES CHEVALIERS (e72t1'nnt~. Salut, respect, honneur

A l'assenblée aimable,

Nous ertrons de grand cœur Partager votre table.


ORIGINES MANCELLES

DU

MARQUIS DE DANGEAU

A PROPOS D'UN LIVRE RÉCENT (1)

Le Joxtr~xad des éuénenxerxts de la Coxcs~, du marquis de Dangeau, constitue un document de premier ordre pour la connaissance de la période de notre histoire qui s'étend de 1684 à 1720 mais si ce document a été consulté et utilisé par les érudits, les historiens, le public, en général, ne connaît guère que dé réputation cet ouvrage, dont la longueur effraie d'avance bien des gens et les empêche d'en affronter la lecture. C'est ce qui a poussé 11t. Pilastre à publier un abrégé de ces longs volumes, « dont le nombre, comme la forme, n'encouragent guère, dès l'abord, ceux qui voudraient les connaitl'e ». Il a pensé avec raison qu'il ne serait pas sans intérêt de mettre il la portée des « simples amateurs du temps passé » une analyse, un résumé, contenant les faits principaux, la substance même, la moelle de (1) :lbrégé dzc Jotcrnal du ~nnrqttis de Dangeaxt, disposé dans un ordre nouveau suivant la nature des matiéres et annoté par E. Pilastre. Paris, Firmin-Didot, s. d. ('190G), in-S, VI!17 p., avec portr. et facsimile.

LES


ce Joicrnnl, source prucieuse de tant de renseigneme[jts sur la dernière moitié du règne de Louis XIV et sur la Régence. M. Pilastre a réalisé une idée émise jadis par Sainte-Beuve, qui avait signalé l'utilité qu'offrirait la réunion, dans un tableau général, des nombreux faits épars dans ces longues éphémérides. En faisant un choix, en relevant, parmi ces faits, les plus significatifs pour les mettre en relief, M. Pilastre les a en même temps, comme il l'indique dans le titre de son livre, disposés dans un ordre nouveau, suivant la nature des matière~~ il a substitué l'ordre logique à l'ordre chronologique. Sôn livre se divise naturellement en deux parties le Règne de Louis XIV, et la Régence. Après avoir étudié la vie de Dangeau, il extrait du Journal d'abord les renseignements relatifs à Louis XIV, ses actes, ses habitudes, son caractère, puis aux membres de la famille royale après quoi il rel1te les événements divers rapportés par Dangeau faits de guerre, finances, politique concernant l'Espagne la litttirature, les moeur~ et usages, enfin les affaires religieuses révocation de l'édit de Nantes, quiétisme, jansénisme, etc. Dans la seconde partie, Itf. I'i= lastre range les extraits de Dangeau dans plusieurs chapitres relatifs au Régent, à Louis XV, aux principaux éV2nements de la Régence, ail voyage de Pierre le Grand u Paris, aux princes légitimés, à la noblesse et au Parlemcnt, aux fêtes et à la littérature, aux finances, à Law, -l l'abbé Dubois et aux aflaires religieuses.

Ce rapide exposé du plan suivi par 1\1. Pilastre, cette brève indication des matières sur lesquelles on trouve des renseignements dans ton Abrégé dit Joicr-nal de Dangeazc, suffisent à en montrer l'intérêt. En permettant aux lecteurs de se faire une idée du contenu de ce Jozarnal sans avoir besoin de lire les dix-neuf volumes que comporte l'édition complète publiée en 1854 chez Firmin-Didot, M. Pilastre a fait une œuvre utile, dont il convient de le remercier.


Si, dans cette Rez~oe, consacrée à l'étude des.questions qui intéressent l'histoire du Maine, nous nous occupons d'un ouvrage relatif à Dangeau, c'est que ce personnage n'est pas étranger notre province, à laquelle il se rattache, sinon par sa naissance, du moins par ses origines. Où naquit Philippe de Courcillon, marquis de Dangeau ? Est-ce au château de Courcillon, dans la commune actuAlle de Dissay-sous-Courcillon, canton de Château-du-Loir? « Nous n'avons pu, déclare M. Pilastre, retrouver un document établissant d'une façon certaine la date et le lieu de sa naissance. » En effet, sa famille appartenait à la religion protestante, et les actes de baptême, inscrits sur 'les registres paroissiaux tenus par les curés, étant alors les seuls actes d'état civil constatant les naissances, un pareil document nous fait défaut.

J'ai compulsé, la Bibliothèque nationale, les différents dossiers contenant des pièces sur la famille de Courcillon (1) je n'y ai trouvé aucun renseignement sur le lieu de naissance de Dangeau en revanche, ils en contiennent de nombreux sur les liens qui rattachent sa famille au Maine.

Pesche se trompe, quand il dit dans son Dictio~~naaire topogn·ap)tique de la Snrtlae, qu' & il ne parait pas » que la terre de Courcillon ait appartenu à la famille de Dangeau; c'est d'elle, au contraire, que cette famille est originaire. Une note généalogique, dans la Collection Chérin, débute ainsi

« La terre de Courcillon, située dans la baronnie de Chàteau-du-Loir, au Maine, est l'origine de cette maison, dont les premiers seigneurs, connus dès les XIe et 1II~ (1) Bibliothèque nationale, 1\188. fr., 27.368 (Pièces originales, 884), 2\:J,761 (Dossiers 6le~es, 216), 30.436, 30.437 (Carrés d'Hozier, 207, 208), 30.~JE)0 (Cabinet d'Hozier, 109), 31.332 (Not~ueau d'Hozier, 107) et ::11.623 (Collection Chérin, 61).


siècles, portaient les qualités de sires de Courcillon et de chevaliers, que leurs successeurs ont continué de prendre. » Et une autre (1) est ainsi conçue

« La maison de Courcillon a pris son nom du château de Courcillon, situé dans le Maine, et Guillaume en était seigneur en l'année 1150.

» Par un aveu de cette terre rendu en l'an 1199 aux seigneurs du Château-du-Loir, il est fait mention d'un Guillaume de Courcillon, mais il est incertain si c'est le même dont il est parlé dans le titre de ~1~150 on ne sait pas même non plus en quel degré de parenté pouvait être ce Guillaume avec un autre du mèii-,e nom, qualifié seigneur de Courcillon dans un autre aveu de la terre de Courcillon rendu en 1250, de tous lesquels il est fait mention dans les titres qui se trouvent à la Chambre des Comptes de Paris. Mais il est prouvé par plusieurs actes des années 1277, 12812 et 1288, passés avec le comte de Dreux, seigneur du Châteaudu-Loir, que Geoffroy, sieur de Courcillon, y est qualifié chevalier, fils de Guillaume.

» On prétend que ce Geoffroy de Courcillon eut pour un de ses fils Brisegaut de Courcillon. »

La note continue en mentionnant le petit-fils de ce Briseôaut, Guillaume, chambellan du dauphin Louis qui, monté sur le trône, lui donua la charge de bailli de Chartres. Geoffroy, fils de ce Guillaume, chambellan du roi et bailli de Chartres, seigneur de Mauléon et de Teillei, devint seigneur de la terre de Dangeau, située dans le pays chartrain, par son mariage avec Marie, fille unique de Jean Cholet, chevalier, chambellan et maitre d'hôtel du roi, et depuis maitre général de l'artillerie de France, -'IL qui appartenait cette terre de Dangeau.

Geoffroy eut, de ce mariage, Jacques de Courcillon, qui hérita de la terre de Dangeau vers 1518, et mourut en (~1) Pièces originales, 884, p. ti!J vo.


1539. De son mariage avec Anne Levavasseur, dame de 1\folitard, il eut un fils et trois filles. Le fils, Louis, servit dans les armées du roi de Navarre, fonda vers 1570 l'église réformée de Dangeau, reprit llliers aux Ligueurs en 1589 et mourut vers la fin de 1591. De son mariage avec Jacqueline de Saintray, il eut un fils et trois filles. Le fils, Jacques de Courcillon, était un des principaux o fficiers d'Henri IV u la bataille de Coutras. Après la bataille d'Arques, Henri IV l'envoya en ambassade Li Londres. Il mourut vers l'année 1620. De son mariage avec Suzanne de Baudrais, naquirent plusieurs enfants, dont l'ainé, Louis, prit part en 1614 aux travaux du synode provincial tenu à Châtillou-sur-Loiné, fut député de l'Orléanais au synode national de Tonneins et assista en 1619 à l'assemblée de Loudun. Il épousa Charlotte des Noues de la Tabarièl'8, petite fille du fameux Duplessis-Mornay. Il mourut en juillet 1658, laissant deux fils et cinq filles. Les deux fils étaient Philippe, le 21 septembre 1638 (c'est l'auteur du Joztrnal) et Louis, en janvier '1643 (1).

On voit que la famille de Dangeau est bien issue des seigneurs de Courcillon, dans le Maine. La Collection Chérin contient l'indication d'un grand nombre de « titres communiqués par l\fme la princesse de Rohan (MarieSophie de Courcillon, petite-fille de Dangeau, veuve eu premières noces de Charles-François d'Albert duc de Picquigny, et en secondes noces du prince de Hohan). Beaucoup de ces documents intéresscnt le Maine. Je signalerai une série de pièce,; e'>:tL'aites « du cartulairo de. l'abbaye royale de la Couture, au faubourg du Mans » « du second cartulaire de l'abbaye de Saint-Vincent du Mans, copié en 1617 » a de, ti tre,; de de Notre-Dame de Bonlieu, en Berçay, paroisse de Banne-surLoir )). On trOl'H:, par exemple, l'indication d'un « Accord (lj Cf. Haag, la F9·artce protestc~rate, IV, 798-803.

Lx. 17


passé devant l'official ~lu Mans, la veille de Saint-Laurent l'an '1246, entre l'abbé et le couvent de Saint-Vincent du et Guillaume de Corceillon, chevalier, sur leurs différends et débats touchant deux pièces de prés assis en la paroisse de Saint- Vincent-du-Lorouër, appelés les prés des Chalonaes »; une « Donation faite au mois d'aoust 1265 aux religieux abbé et couvent de Saint-Vincent du Mans par Guillaume de Corceillon, chevalier, de son vivier scis audessous du prieuré de Saint-Vincent-de-Lorouër », etc. ùn « Accord passé le vendredy après l'Ascension l'an 1292, entre religieux hommes l'abbé et le couvent de NotreDame de Beaulieu, jouxte Le Mans, d'une part, et Monsieur Joufiroi de Corcillon, chevalier, d'autre, sur les différends qu'ils antient pour raison de terres, cens, roches, maisons, vi-ties, hommes et autres choses assises ez fiefs de Corcillon, ès parroisses de Dicey (Dissay) et de Villeboureau » et encore un « Original en parchemin étant au chartrier de l'abbaye de Notre-Dame de Vaas, au diocèse'du lllans )) un ~( Bouleau en parchemin en quatorze feuilles cousuës les unes aux autres, de la longueur de 23 pieds, 9 pouces et 10 lignes, étant au trésor du château de Courcillon, parroisse de Dissay, puis du Maine » des extraits « des titres du trésor du château de Courcillon, en la parroisse de Dissay dans le Maine », etc., etc.

Ainsi la famille de Courcillon de Dangeau se rattache étroitement au Maine. Pour en revenir à Dangeau lui-même et au problème de son lieu de naissance, voici les vagues renseignements que j'ai trouvés se rapportant à cette question.

Dans les Dossier~ bleus (Courcillon, pièce 3), une note indique

ç( Philippe de Courcillon, marquis de Dangeau. Né 1644 au pays chartrain, huguenot. »

« Au pays chartrain ): donc Dangeau serait né au château de Dangeau. Mais cette note donne 1644 comme date


de sa naissance, et il naquit le 21 septembre 1638; elle donne comme date de sa mort le 13 mai 1720, et il mourut le 9 septembre. Ces inexactitudes ne peuvent nous inspirer grande confiance dans cette note, et le renseignement qu'elle contient relativement au lieu de naissance perd ainsi beaucoup de sa valeur.

Parmi les pièces communiquées par la princesse de Rohan, une, la dernière, fournit un renseignement sur les parents de Dangeau. Je la transcris textuellement « Contract de mariage du 11 octobre 1648, passé devant Michel Derreau (ou Deneau ?), notaire royal au pays et comté du Maine demeurant à Mondoubleau entre Mre Charles de la Gouppillière, chevalier, seigneur, baron de Dollon, fils aîné de Mre Marin de la Gouppillière, chevalier, seigneur dudit lieu et de Dollon, et de deffunte De Elisabeth d'Annet, d'une part et D~~e Judith du Voizin, fille de feu haut et puissant seigneur Mre Daniel du Voizin, chevalier, seigneur de Vitannut (sic, pour Vitenval), la Cour, le Conte, etc., mareschal de bataille des camps et armées de Sa Majesté, sergent-major général des troupes françoises entretenues en Holande pour le service de Sa Majesté, et de De Marie de CourciIlon, demeurante alors au lieu seigneurial et parroisse de Con¡"'11ers. De l'avis et consentement, sçavoir, du costé du futur époux, dudit seigneur de la Gouppillière, son père, de Mre Jacques de Cremainville, chevalier, seigneur des Champs, y demeurant, parroisse (le Melleray, mary de De Marguerite de la Gouppillière, sa tante et de la part de la future épouse, de haut et puissant seigneur M~~ Louis Le Vasseur, chevalier, seigneur de Congners, Thouars, Fargoteu et Beaumont-la-Ronce, et de De Suzanne du Voizin, son épouse, sœur; de DBes Marie et Élisabeth du Voizin aussi ses soeurs de haut et puissant seigneur Mrc Louis de Courcillon, chevalier, seigneur de Dangeau, la Motte et Dizier, son oncle, et Do Charlotte des Nouhes, son épouse, demeurant audit lieu de Dangeau. Il y est dit que


les parties, suivant les articles art'estés entre eux dès le 30 aoust dernier, se p-'endronll'un l'autre en foy et loy de mariage, les solennités de l'Église réformée, dont ils font profession, observées 3t gardées. Le futur a don de son père, en avance d'hoirie, de la terre noble, fief et seigneurie de la Gouppillière, qui s'étend ès parroisses de Saint-HihÜre, Boissé, etc., sur le pied de 3,500 1 de revenu par chacun an, etc. Ce contract, par copie collationnée sur une expédition en parcliemin, représentée par Do Marie-Louise Bordel de Viantes, veuve de Mra Pierre-Guillaume de la Gouppillière, chevalier, seigneur dudit lieu, Dollon, etc., le 9 juin 1î49. Signée Vérité, controllée et scellée. »

Louis de Courcillon et Charlotte des Noues, le père et la mère de Dangeau, sont donc indiqués, en 1648, dix ans après la naissance de leur fils aîné comme demeurant au lieu de Dangeau. Mais y habitaient-ils d'une façon permanente'l Leur second fils, Louis, était né à Paris, cinq ans auparavant, en 1643. Ce document ne nous renseigne donc pas encore d'une façon certaine sur le lieu de naissance de Dangeau.

La lettre d'invitation aux obsèques de Dangeau, qui se trouve parmi les Pièces originales (pièce 73), le qualifie des titres suivants

« Très haut et très puissant seigneur Monseigneur Philippe, marquis de Courcillon et de Dangeau, comte de Civrai, Melle et Usson, baron de Sainte-Hermine, de Bressuire et de Chàtea'l-du-Loir, seigneur de Chausserais et autres lieux, chevalier des Ordres du Roi, conseiller d'État d'épée, grand maître des Ordres royaux, militaires et hospitaliers de NotrE.-Dame-de-Mont-Carmel et de SaintLazare-de-Jérusalem, tant deçà que delà les mers, gouverneur et lieutenant général pour Sa Majesté de la province de Touraine, gouverneur particulier des ville et château de Tours, doyen de l'Académie française, ci-devant chevalier d'honneur de feues Mesdames les Dauphines. »


Dangeau était donc, non-seulement marquis de Courcillon, au Maine, mais baron de Château--du-Loir. Cette baronnie passa, après sa mort, u Henri-Ghurles d'Albert, duc de Luynes, qui avait épousé en 1694 Marie-AnneJeanne, née en 1671 du premier maria~e de Dangeau avec Françoise bforin fille de Jacques Morin seigneur de Chàteauncuf. La baronnie de Chftteau-du-Loir, au temps de Le Paige, appartenait, Ü titre d'engagement, à CharlesAmable d'Albert, duc de Luynes, arrière-petit-fils des époux d'tllbert-Gourc.illon (1).

Si la question où est né Danoeau reste encore sans réponse, du moins ses attaches avec le lliaine ne font aucun doute, tant par son titre de baron de Château-du-Loir que par les origines de sa famille tel est le résultat des recherches que j'ai faites sur cette matière, recherches d'ailleurs très incomplètes, je ne fais aucune diftlculté de le reconnaitre. Je ne me suis pas proposé d'étudier en ces quelques pélges l'histoire des seigneurs de Courcillon; j'ai simplement voulu signaler le problème du lieu de naissance de Dangeau aux érudits manceaux, plus versés que moi dans l'histoire de notre province, plus u même que moi de fouiller dans les archives locales. Je souhaite qu'un chercheur plus heureux découvre un jour un document qui lui permette de trancher définitivement la question que je n'ai pu résoudre. P. MAUTOUCHET.

Il) Je remercie M. le uarquis de Beauchesne des renseignements qu'il a eu l'oùligEance de communiquer sur cette question à mon frère, M. Albert Mautoueliet, renseignements qui ont complété ou confiriné ceux que j'ai trouvés dans les dossiers de la Bibliotbèque nationale.


UN ACADÉMICIEN MANCEAU

LE CII4l'fl's DE TRESSAN

v

L'ÉCRIVAIN

« La destinée de Tressan comme écrivain, fut d'être jugé sévèrement par les gens de lettres et lu avec avidité par les gens du monde ».

Ainsi s'exprimait, en 1823, M. Campenon. Cette phrase ne contient pas seulement un jugement sur l'auteur mais aussi une accusation contre le lecteur qui commençait déjà à s'émanciper dans le romantisme, que de Tressau appelait courtoisement « le romantisme des chevaliers de l'ancienne France ».

Il faut cependant regarder son oeuvre de près et à un autre point de vue, car si on ne l'admet point comme romancier on ne peut que l'appeler traducteur, et c'est justement ce côté de l'écrivain qui fut méprisé par les hommes de lettres. Ses contemporains l'ont regardé comme un travailleur acharné ;'t arranger, rajeunir et habiller un roman qui n'était point de lui et dont il se prétendait cependant un peu l'auteur; la, discussion de ses titres à l'Académie


justifie d'ailleurs cette prétention puisque Buffon lui-même le présenta comme « l'auteur des Romans de Chevalerie ). Les critiques ont été injustes de Tressan à eu des ennemis ambitieux, il n'a pas été suivi dans son évolution littéraire.

Quoi qu'il en soit, son œuvre doit être jugée tout autrement.

D'abord, prenons ces fameux Rorrzarzs de Clrec~alerie, laissons de côté la question de célébrité des auteurs, regardons seulement le mérite de celui qui les présente. De nos jours nous pourrons l'apprécier d'une façon plus impartiale, car il est facile de recotinaitre la somme de travail que s'est imposée le traducteur. Il ne suffit pas, en effet, de produire la traduction littérale, mais il faut y joindre aussi le talent de la présentation.

De Tressan eut ce talent au plus haut degré, il a voulu relever un monument qui gisait ignoré au Vatican et en faire une maquette réduite au dixième. Les romans provençaux formaient une bibliothèque de 150 volumes in-8° de Tressan eut la.patience de les condenser en une dizaine de tomes et ceci est tout à son honn8ur. On ne peut reprocher au traducteur sa concision, car dans ces romans d'amour, le murmure du ruisseau, le gazouillement de l'oiseau, le soupir de l'ingénue et les entreprises galantes viennent tron souvent ralentir l'action principale du récit. De Tressan prit la peine d'épurer le roman de ces longueurs et je crois même du'il eut l'excellente idée d'en supprimer les parties où l'esprit libertin etgrivois se donnait trop large carrière. C'est dans cet ordre d'idées qu'il traduisit lin(a~zd frcrieo.c Antlzzcr· de Bretagne Flo>°e et Blanc7re F(eur, Tni,~tan de Léorzois, rirard de lVeL~ers, 1cc Flersr des Batailles, Zélie, Dorz Llrsirzo et le Rorirarz de la Rose. Ce dernier ouvrage fut considéré comme étant un peu trop réduit et dépouillé des qualités premières.


Cette série qui occupa toute la vieillesse de l'académicien ne doit pas être dédaignée; elle montre les qualités qui caractérisent le traduct3ur. On y remarque, outre l'unité de travail, une grande facilité pour exprimer la pensée sous une forme à la fois concise et harmonieuse.

Nous retrouverons plus tard l'occasion d'insister à nouveau sur une méthode qui a été l'excellente initiatrice des travaux de Tressan depuis son jeune âge. « De Tressan, dit Hauréau, ne fut ni un profond géomètre, ni un savant naturaliste, mais on reconnait sans peine, dans plusieurs passac'es de ses écrits, un esprit exercé de bonne heure par des choses sérieuses. 7J Le dernier mot est exact, bien qu'il puisse faire croire au paradoxe, en qualifiant ainsi la morale de celui qui sema tant d'épigrammes sous les pas des courtisans.

Il arriva dans la vie de Tressan ce qu'on pourrait appeler un accident, mais un accident heureux. C'est celui qui le conduisit à l'Académie des Sciences pour ~on Olérnoir~e sur~ l'électr·icité. On est en droit de se demander ce qu'un tel ouvrage scientifique poL.vait avoir de rapport dans la vie, les moeurs et le caractère de celui qui chantait

Rimailler est mon faible mais,

Paresseux bien plus que poëte,

Mes ouvrages les plus parfaits

Ne passent pas la chansonnette.

Et cependant, la vérité est, qu'en 174$ le ~·izftaillert. endurci présentait à l'Académie des Sciences L'Esscti mtr la ~zcztzcz~e et les effets dit /luide électrique, co~zsidéré corrzr~ze l'ngerzt zr.rzi~~er~sel. Il réclama des juges et ;4ibf. Morand père, de La Condamine, de Réaumur et l'abbé Nollet vinrent s'asseoir au tribunal. Nous n'entrerons pas dans les détails de ce travail, bornons-nous de dire que, six mois après, l'abbé


Nollet au nom de la commission faisait son rapport en ces termes

« La lecture de ce mémoire prouve incontestablement que son auteur, M. le comte de Tressan, a beaucoup lu de phisique, de toute espèce, et qu'il a réfléchi sur toutes les connaissances qu'il a acquises qu'il a joint à ces connaissances beaucoup d'imagination de sa part, plusieurs idées neuves qui ont de la vraisemblance, et qui sont exposées clairement, avec ordre et en bons termes. »

Il nous reste à parler maintenant des discours et études détachées qui forment la part la plus importante des œuvres du comte. La critique en sera moins superficielle, car nous y trouvons les plus éminentes qualités de l'écrivain. Ses Ré/Iea;io~is sorimxair·es stw l'Esprit sont des leçons de philosophie et dc morale données à ses petits enfants elles forment un ensemble de dissertations d'une saveur toute particulière. En philosophie, de Tressan était de l'école de Condillac, il critiquait âprement Viallebranche qui, disait-il, avait une logique si subtile qu'elle allait parfois jusqu'à l'erreur, et il se complaisait par dessus tout à se dire « honoré de l'amitié et des leçons de NI. de Fontenelle, de l'aimable évêque de Luçon, de l'abbé Monçaut, de M. de Voltaire. )) Il apprit d'eux ce qu'il répétait dans ses leçons de morale qui furent soigneusement moralf's et il ne s'écarta des idées de ses maitres que sous l'influence de son caractère libéral. Il ne voulut pas surtout renier les traditions qui étaient les raisons d'être de sa conduite. Ses principales leçons sur le génie, l'esprit en général, la sensation et la pensée, l'esprit de la littérature antique et moderne, sont habilement conçues, le style en est clair et plus simple que dans ses autres écrits C'est la perfection de son œuvre.

Le Port~·ait historique de Sta~aislas le Bie~afceisant est d'une tout autre facture. On y reconnait davantage la mobilité du caractère de de Tressan. Son âme, d'un lyrisme


parfois exagéré, y tient une large place et le mot lristoriqrce qui tranche sur le titre est un peu mis à l'aventure. Sa critique y est bien dans lE: ton de sa jeune philosophie et les idées sont piquantes, nais les appréciations laissent deviner la fatigue morale qui l'accablait, lorsque parlant des vertus du roi de Pologne, il dit avoir perdu un ami « C'est ce dernier titre, s'écrie-t-il, ce nom sacré d'ami, si ,·a~·e dans la bouche dea Roia, si vrai, si tendre dans celle de Stanislas )). Cette expression suffit.pour révéler l'éternel mécontent. Ses Di~cozsrs représentent également une autre forme d'exécution. Chaque discours possède un type spécial. L'allocution à l'ouverture de l'Académie de Nancy est l'apologie du Aloi, ce qui est incontestablement d'une certaine saveur sur la terre Lorvaine. Les autres discours qu'il prononça dans cette société n'offrent qu'une légère teinte de critique et on y rencontre quelquefois des traces de cette courtisanerie que de Tressan ne faisait qu'effleurer mais qu'il possédait au plus haut degré. Son Éloge de Loa~is ÎV est un modèle du genre, Ces quelques pages écrites au lendemain de la mort du roi qui l'exila et lui fit subir le sort réservé aux mauvais serviteurs, paraissent même d'une naïveté trop grande pour un homme de son âge.

L'Éloge de bfavcpertuis est peut-être le morceau le plus soigné de sa production littéraire. La façon dont il traite ce portrait le détache de son œuvre entière. Il avait pour Maupertuis beaucoup de condescendance les nombreux titres qu'il possédait l'impressionnaient et le respect qu'il lui témoigne a quelque chose de mesuré. Néanmoins il faut tenir compte de l'effort de l'auteur pour se maintenir dans le système de critique qu'il avait adopté au début. L'Éloge de Forzteaelle n'est pas classé il doit être placé au. dessus de¡oute son œuvre, non pas pour la qualité du style, mais à cause des idées qui y sont exprimées. Fontenelle avait dirigé les premières études de de Tressan et celui-ci le considérait comme son véritable maitre. Son


éloge est cependant d'un lyrisme trop poussé, l'imagination a parfois des transitions prétentieuses et le petit-fils de Fontenelle lui-même en a fait une sévère critique « Je ne trouve pas juste, lui écrivait-il, ce que vous dites que, si M. de Fontenelle n'eût pas été à cent six ans, nous aurions perdu les bfonde3, non plus ce que vous dites ensuite que les ~llo~zdes sont fondés sur le cartésianisme, ~i. de Fontenelle eût pu faire les Vlondes, étant newtonien, et tels qu'ils sont, il n'y a pas plus d'une vingtaine de pages où il soit question du tourbillon.

» Je n'aima pas la comparaison qui est vers la fin je ne puis voir Fontenelle comme un rocher ce n'est pas qu'il n'ait une grande contenance et une véritable immobilité, mais il est si ingéuieux, si doux, qu'il y a dans l'idée de ce rocher, « je ne sais quoi de trop imposant ».

De Tressan n'avait vu aucun inconvément à tracer en termes intimes le portrait de celui qui avait été son professeur il estima même de son devoir d'en faire un acte public en le proposant au prix d'éloquence de l'Académie. Les idées de l'auteur n'ont été partagées ni par la famille, ainsi qu'on vient de le voir, ni par l'Académie qui fut très sobre dans ses conclusions ainsi que le témoigne le compterendu de la séance du 25 août 1783.

L'œuvre littéraire de de Tressan dont nous venons de donner une rapide appréciation n'est certainement pas exempte de critique. Nous considérons toutefois après les circonstances atténuantes que nous lui avons accordées, que des censeurs implacables ont mesuré sa valeur avec trop de si.vérité. Son compatriote, Hauréau, a été trop dur pour lui quand il a dit que son style était « naïf comme le jargon d'une bergère d'opéra ». Certes il était naïf, mais sa naïveté avait quelque chose de noble et d'élevé qui lui était personnel.

En résumé, de Tressan fut un bon ouvrier des lettres ses matériaux avaient du caractère son aeuvre eut de l'origina-


lité et le mélange de ses qualités très diverses lui assigna un sens que le temps ne devait pas lui conserver. VI

L'ACADÉ:MICIEN

Son talent littéraire fut peut-ètre le seul mérite de sa vie.

Cependant l'exil le priva des joies qu'il pouvait en tirer. De Tressan regarda toujours le titre d'académicien plus comme une situation remarquable que comme une sinécure honorifique. Pendant près de cinquante ans il fut de plusieurs académies il en fut parfois le promoteur le fondateur, l'inspirateur partout il en fut le plus bel ornement.

De Tressan avait quelque quarante ans lorsqu'il fut sacré académicien. Son ouvr3-e sur l'électricité lui valut en effet l'honneur d'entrer à l'Académie des Sciences de Paris. Si ce n'est son caractère, l'Académie française l'eüt accueilli de bonne heure, mais le protecteur de la docte compagnie en l'envoyant en exil lui fit comprendre qu'il n'avait rien à espérer.

Le comte de Tres~an s'en tira d'ailleurs fort bien en répondant, aux amis qui le pressaient de se présenter, que l'éloignement du Louvre était la seule cause de sa renonciation.

Chaque disgrâce lui assura la faveur d'entrer dans un corps savant et rien n'est plus curieux que la sollicitude de Frédéric de Prusse pour Tressan.

Nous avons dit déjà que tout jeune, alors qu'il habitait chez son oncle, le grard aumônier, de Tressan, s'était lié d'amitié avec Voltaire et que par celui-ci il avait fait la connaissance de Diderot, d'Alembert et autres encyclopé-


distes fameux. Il n'en fallut pas davantage pour mettre en circulation un bruit fâcheux sur ses tendances philosophiques.

Le roi de Prusse voulut profiter de l'occasion pour s'allier ce français de talent et de bonne volonté.

Lors de la disgrâce de Tressan en Lorraine, Frédéric le nomma membre de l'Académie de Berlin. Il chargea Maupertuis de le féliciter et lui offrir une place d'officier général dans l'armée prussienne. On sait comment il refusa.

Le plus grand acte littéraire de la vie de Tressan fut la fondation de l'Académie de Nancy. Retiré en Lorraine où il avait reçu l'accueil le plus charmant de la part du roi Stanislas, de Tressan ne se sentait pas à l'aise dans l'entourage de la maison de Pologne.

11Z. de la Galaizière, principalement, regardé comme l'agent secret de Louis XV, manifesta toujours une froideur raisonnée envers les fonctionnaires de la cour de Lorraine. Nommé grand chancelier, M. de la Galaizière, tenta de s'interposer à la fondation de l'Académie, mais, comme au fond, il était homme loyal et d'un peu d'esprit, il finit par céder.

Ce fut le 16 janvier 1751 que Stanislas institua officiellement la Société et la première séance d'ouverture eut lieu le 5 février 1751. M. de Polignac, chancelier du roi, donna d'abord lecture des règlements de l'Académie, puis de Tressan prononça un discours très goûté, dans lequel il faisait profession de foi de la façon suivante « L'indulgence de quatre célèbres Académies qui m'ont adopté ne m'aveugle point, Mes5iieurs, et la reconnaissance que je leur dois m'oblige à déclarer moi-même le peu de droits que j'avais Li leur élection)J. C'était, en peu de mots fort bien amenés, la façon la plus discrète de faire valoir ses titres. Tuut le discours fut sur ce ton louangeur, allant de sa personne au roi et du roi à quelques éminents confrères


dont il avait besoin pour donner plus d'envergure il sa manifestation littéraire il réussit dans ses prévisions. Le roi Frédéric ne manqua pas de lui envoyer ses compliments dans une lettre un peu flatteuse « Je m'intéresse trop particulièrement à la gloire de l'auguste fondateur de l'Académie de Nancy, disait le roi, pour ne pas vous savoir gré de la marque d'attention que vous m'avez donnée en m'envoyant les discours qui y ont été prononcés, ils ont tous des beautés et vaus avez fait connaitre dans le vôtre combien les connaissances les plus étendues des sciences et des arts ont d'agTément quand elles se trouvent jointes aux gràces du style et de l'éloquence il y avait longtemps que j'étais instruit des qualités brillantes que vous réunissez pour la guerre et pour les lettres et je suis charmé de vous assurer ici des droit:3 qu'elles vous donnent sur mon estime ».

Cette lettre fut suivie par toute une avalanche de félicitations de la part des notoriétés ecclésiastiques, littéraires, scientifiques et militaires. Il y avait certainement de quoi séduire un ami des lettres, mais, en somme, le comte de Tressan, trop occupé de ses nombreux travaux, n'y prit pas l'attention désirée en pareille circonstance.

En 1780, le comte de Tressan était membre des Académies des Sciences de Paris, Londres, Berlin et Édimbourg, faisant en outre partie des académies provinciales de infontpellier, Nancy, Caen et Rouen. C'étaient des titres bien suffisants pour faire un Immo-tel de l'auteur des Ro~naaas de Chevale~·ie et on est en droit de se demander pour quelle raison il n'était pas déj¡l sous la Coupole.

Très jeune, il fut sollicité, au moment où l'amitié du roi lui était un gage de rérssite, mais son caractère se refusa -t considérer l'époque comme opportune, et dans la crainte d'essuyer un refus du royal protecteur il s'abstint pendant longtemps, si bien que ce fut à 75 ans qu'il se présenta, au moment où il n'était plus attendu, et rien ne fut plus


curieux que de voir l'aimable et spirituel vieillard entrer en lutte dans des circonstances exceptionnelles, agissant Me ruse, pour arriver à cette situation qu'il avait dédaignée trente ans durant, compromettant sa légendaire loyauté à quelques petitesses qui ont étonné ses contemporains. Le 3 août 1780, mourait l'abbé de Condillac, laissant vacant à l'Académie le 290 fauteuil dont le P. de Boissat avait été le fondateur et qui avait eu comme titulaire Furetière, la Chapelle et d'Olivet. Aussitôt la mort de l'abbé de Condillac connue, les candidats s'agitèrent autour de la succession et le jour où le comte de Tressan se mit sur les rangs, trois concurrents le précédaient déjà c'étaient Bailly, Le Mière et ChampfOlt.

La valeur de ces trois candidats était appréciable. Bailly s'était déjà fait remarquer par ses études sur le disque de la lune et avait fait paraitre l'Histoire de l'ast~·o~~onzie ancien~ze et 77aoder·nxe. En 1784, la renommée de Bailly avait décidé le roi de le nommer membre de la dé'légation chargée d'étudier et d'examiner la doctrine du magnétisme animal sous le double rapport de sa réalité et de son influence sur la morale publique. Enfin, par de nombreux ouvrages et rapports sur les sciences, Bailly avait conquis la célébrité.

Le Mierre avait des titres tout aussi sérieux que le précédent. « Le l\lierre est la tragédie populaire en personne », disait-on à l'époque. Ses références étaient nombreuses après Hyhe~·rn~aestre, il avait fait représenter Tercé, puis Atr·ée et Tla~este. Enfin il avait donné au théâtre la Vezcve de dlal.abar qui mit son nom en vogue par suite des critiques qui s'attaquèrent à cet ouvrage.

Champfort, le dernier candidat, était le moins apte à recueillir les suffrages de messieurs de l'Académie. Il avait cependant été couronné plusieurs fois par la Compagnie et il possédait les plus beaux titres littéraires pour succéder à


l'abbé de Condillac, mais sa naissance obscure lui faisait tort.

La situation de M. de Tressan envers ces divers candidats était donc des plus délicates. Les personnalités littéraires s'en occupaient vivement et les membres de l'Académie se trouvèrent fort perplf:xes pour donner un titulaire ce fauteuil.

Cependant, sur ces entrefaites, un événement vint changer lu face des choses. L'abbé Batteux vint Ü mourir laissant une place de plus u pourvoir aux prochaines élections. La politique académique entra alors en pleine lutte. Quelques académiciens voulaient se montrer humanitaires et proposaient d'élire de Tressan Ü cause de son grand abe. Beaucoup se rallièrent à ce raisonnement en reconnaissant en conscience qu'il aurait pu appartenir à la Compagnic depuig de longues années. On pesa sa valeur littéraire, on ajouta un peu de ses anciens titres militaires pour donner plus de poids, et la balance pencha en sa faveur. En public on commentait les faits sans se soucier d'ètre bien exact. Dès le 11 août 1780, Bachaumont écrivait dans ses blé~noires secrets

cr Il est fort heureux pour M. Le Mierre qu'il soit venu à vaquer une seconde place a l'Académie Française car malgré les promesses qu'il avait reçues de M. d'Alembert, il était décidé qu'il ne remplacerait pas l'abbé Batteux. On était convenu dans le comité de nommer M. de Tressan qui, plus que septuagénaire n'avait pas le temps d'attendre. Il n'est pas même sûr aujourd'hui que M. le Mierre ait la place de l'abbé de Condillac. M. de Champfort la lui dispute et comme ce dernier à beaucoup d'intrigue et de manège, qu'il a eu l'honneur d'appartenir au prince de Condé et que l\lmo la duchesse de Bourbon le porte, ce concurrent n'est pas sans espérance et fait trembler les amis du premier, qu'on s'est trop accoutumé refuser ».


Bachaumont semblait diriger les débats il recrutait de-ci de-là ses observations qu'il ne prenait pas la peine de contrôler et qui contiennent quelques écarts, car, il l'encontre de sa chronique, dès l'ouverture de la vacance des fauteuils, de Tressan avait toujours brigué la succession de l'abbé de Condillac et avait posé sa candidature bien ayant la mort de l'abbé Batteux.

Cependant Bachaumont continuait sa eampagne en faisant l'éloge du comte de Tressan. Le 17 août il écrivait: « On est ~urpris, sans doute de ne voir M. le comte de Tressan se mettre sur les rangs pour entrer à l'Académie française que plus que septuaôéuaire. Un lieutenant-général des armées du Roi, membre de l'Académie des Sciences et (le plusieurs autres compagnies savantes, homme de lettres, ayant depuis nombre d'années fait des preuves suffisantes pour un homme de qualité, favori du feu roi Stanislas de Pologne, aurait pu avoir cette prétention plus tôt et la réaliser. L'anecdote est qu'il n'a jamais osé du temps de Louis XV, dont il avait été le courtisan intime, mais qui u'awit pu lui pardonner deux couplets contre la duchesse de Ghàteaurou~. Ce royal amant était d'autant plus outré contre le comte qu'il lui a\'ait fourni l'occasion de le nier en disant qu'il ne pouvait croire que cette méchanceté fut de lui parce qu'elle était trop bête. L'amour propre aveugla l'auteur sur toute autre considération et sans avouer les vers il les défendait avec une chaleur qui le trahissait. On sait combien Louis XV était rancunier et le disgracié s'il eùt été nommé, eùt cmint de recevoir de Sa Majesté une exclusion formelle. Aujourd'hui l'apathie de l'àge le rend personnellement assez indifférent sur cet honneur; mais ses amis de l'Académie l'eacitent et veulent l'avoir, d'autant qu'il ne peut faire longtemps tort aspirants )), L'élection du comte de Tressan, en remplacement de Condillac, semblait acquise bien avant le vote; aussi, Bailly, LX. 18


homme pratique et pleir, de pénétration, voulut se retirer avec les honneurs de la guerre. Il prévint de Tressan qu'il fallait considérer sa candidature comme non avenue, lui laissant la place par déférence, pour ses qualités, son âge et sou talent. De Tressan remercia son collègue de l'Académie des Sciences de cette marque de sympathie et lui donna tt entendre qu'il saurait lui rendre son amabilité en lui assurant déjà sa voi·: s'il était élu.

Toutes les chances fa~~orisaieut donc le traducteur de l'alrtzadis. Il a\'ait de nombreux amis dans la place de La Harpe, l'abbé de Boismont, l'évêque de Senlis, Buffon et Suard lui avaient déjà promis leurs voix dans des épitres sympathiques. Cependant un obstacle s'élevait celui de connaître le sentiment lu duc de Nivernais à son égard, car depuis longtemps leurs rapports étaient des plus tendus et ce fut bien à contre cœur que le candidat fit savisite au duc. Celui-ci reç,ut le futur académicien avec complaisance, il écouta l'énumération des titres, laissa parler son interlocuteur sans l'interromfre, puis lorsque tout fut fini il lui dit d'un ton ironique « Je vous félicite 'i~l. le comte de votre bonne santé, dE: vos nouvelles espérances et surtout de vos œuvres d'autrefuis ».

En sortant de Tressan manifesta son mécontentement et crut la partie perdue. C'est peut-ètre ce qui fit croire aux chroniqueurs du temps que le vieillard semblait indifférent aux suites de l'élection. Mais en même temps on publiait ses vers à M. de Saint-Lambert membre de l'Académie Française.

Calculer, lorgner une étoile, Lever un petit coin de voile Qui cache à nos yeux l'Univers, J'aime ce docte radotage

Mais, ami, quelquefois j'enrage De ne plus écouter tes vers.


L'espoir re~·int à la surface et l'intrigue académique formée entre les philosophes, ayant décidé d'Alembert de, ne point mettre Condorcet sur les rangs, la bat~ille fat définitivement; gélgnée le 30 novembre 1780, Le 1\Iiene était élu en remplacement de l'abbé Batteux et de Tressan il la place de l'abbé de Condillac. Seul, Champfort l'ambitielix, avait été écarté (1).

Dès l'annonce du résultat le candidat malheureux fit courrir par toute la ville le quatrain suivant

Il. de Tressan il qui l'on rapporta cet acte de vengeance répondit avec une parfaite bonne humeur « Pourquoi Il. de Champfort s'en plaindrait-il'! Il aurait deux voix de plus ».

On voit que déjà de Tresaau avait l'inconséquence de faire des académiciens en promettant ses Plus tard les résultats s'en feront cruellement sentir pour leur auteur. Toutefois, il part quelques voix médisantes, la majorité applaudit à cette élection. Le nouvel Immortel reçut de partout des félicitations. La date de la réception fut fixée au `?5 jall\"iel' 1781, et l'Académie conyint que les deux récipiendaires élus le même jour seraient reçus à cette (1) Ce qui ne l'empécha d'être élu à la première vacance.

La fière et céleste Uranie

Vaut moins que le divin génie Qui t'éclaire et sait t'enflammer; Je sais qu'il est beau d'être utile. Chez nous on pétrit bien l'argile Mais chez vous on sait animer.

Honneur à la double cédule

Du Sénat dont l'auguste voix

Couronne par un digne choix

Et le vice et le ridicule


séance. On ne sait trop ce qui se passa dans l'esprit du comte de Tressan, toujours est-il qu'il demanda a la Compagnie de ne pas être reçu en même temps que son confrère. Bachaumont, toujUUl'S en quête des nouvelles sensationnelles trouve bientôt à sa manière la cause de cette démarche.

« On assure, écrit-il le 21 janvier, que M. le comte de Tressan a effectivement écrit une lettre à l'Académie Française pour demander que sa réception n'ait pas lieu le même jour que M. Le Mierre ou du moins pour avoir une tribune particulière afin que Madame la comtesse de Tressan et sa compagnie ne fus~,ent pas confondues avec la femme de son confrère et sa société. On ajoute que Monsieur d'Alembert lui a répondu au nom de la Compagnie qu'elle n'admettait aucune distinction de rang et que sa délicatesse était très mal placée, que Monsieur le prince de Beauvau n'avait pas repugné cl'êlxe reçu avec Monsieur Gaillard et que Madame la princesse de Beauvau s'était fait un devoir de faire les honneurs de la loge 11 la sœur de monsieur Gaillard. Madame la nomtesse de Tressan, au surplus pouvait avoir un motif d'amour-propre mieux fondé c'est qu'étant vieille et laide, Madame le l~fierre jeune et jolie, celle-ci n'attirât tous les regards et les hommages des spectateurs ».

La raison n'était ps qualifiable mais personne n'osa ouvrir Ü ce sujet une discussion et il semble que cette idée était invraisemblable. La lettre suivante que Le Mierre écrivait au comte de Tressan, le 6 avril 1781 en fait foi « J'ai été bien fàché, monsieur le comte, de l'obstacle qui vous a empêché de venir à l'Académie et m'a privé de l'honneur (le vous y voir, plus fâché encore de la cause qui vous a retenu à Franconville. J'espère que ma lettre vous trouvera en meilleure santé et que la violence même de votre mal aura pu l'al.,réger.


» Madame Le llfierre est très sensible à l'honneur de votre souvenir et vous en fait ses très humbles remerciements. » Je désire hien vivement vous voir à nos séances et vous assurer de vive voix que personne ne vous est plus respectueusement attaché ».

[tien dans le ton et les sentiments qui y sont exprimés !Je fait valoir l'autipathie qui existait entre les deux confrères et Mme Lemierre.

Cependant le grand jour de la réception arriva.

Nous sommes encore obligé de recourir à Bachaumont, qui est le seul à el1l'egistrer les petits faits au jour le jour hieu que parfois il procède avec une pointe d'ironie ou une méchanceté mal placée, mais on est assuré que s'il a ~~u trop gros, il a toujours vu quelque chose, et déduction faite de l'exagération, il uous initie aux grandes solennités littéraires de l'Académie.

Dès le lendemain, 26, il écrivait ses impressions sur l'ensemble de la salle et la tournure de la séance. Il s'exprimait ainsi

« L'assemblée publique de l'Académie Française pour la réception de 1\l. Lemierre et du comte de Tressan a eu lieu hier avec une affluence de femmes plus considérable encore que ce qu'ou avait vu. L'empressement n'a pas été moins grand de rendre de bonne heure et Madame la duchesse de Chartres s'y est trouvée en place ~i deux heures et demie. Les académiciens, au coiu du feu dans leur salle d'assemblée, ont laissé Son Altesse se morfondre impitoyablement. Au surplus elle ne semblait pas s'ennuyer. Des virtuoses plus zèlées encore que les autres, malgré leur (liligerice, n'ayant pas trouvé -"t s'asseoir, sont restées debout. » 11i. le comte de Tressan a atTecté de mettre dans son discours la naïveté et la loyauté de nos anciens chevaliers. Mais on n'y a plus trouvé que les efforts languissauts d'un vieux paladin. L'abbé Delille, directeur, dans ses deux


réponses a fort amusé l'lssemblée, on a cru voir revivre en lui l'abbé de Voisenon, si fécond en saillies gaies ». Cette séance fut un régal littéraire pour tous ceux qui y assistèrent. De Tressan y parla le second et cette place lui était une double charge cause de la longueur de la séance. Il sut plaire néanmoins par sa bonne grace., sa naïveté, son charme habituel.

Il eut bien, comme le dit Bachaumont, l'air d'un vieux paladin, mais d'un vieux paladin toujours capable de tenir bien haut l'épée. Il fit frissonner l'assemblée sous l'émotion de sa voix claironnante lorsqu'il parlait de Fontenoy, et ce poète léger fut bien accueilli lorsque jetant au loin sa lyre impuissante près des nobles poètes qui l'entouraient, il s'appliqua à analyser Il vie de son prédécesseur. Il le fit avec gravité et avec LI} ensemble de vues profondes et savantes. D'un seul coup il devint moraliste, et dans cette minute il étonna son auditoire en critiquant les principes de la vraie philosophie.

En cette séance mémorable il sut se montrer sous un jour nouveau, l'on dut penser que cette vie joyeuse et presque sans but n'éÜit qu'une enveloppe trompeuse et frivole, un mannequin vivant sur lequel on avait mis un masque à la tête et une lyre au côté et ce fut le seul jour où de Tressan montra son ¡¡mc eu public. On trouva en lui une trilogie qui eût été capable d'unifier sa vie et la rendre utile, et l'on convint évidemment que de Tressan était autre que lui-même. On comr-rit également que, comme poète et comme écrivain, tout faux en lui. Mais on ne se douta peut-être pas qu'il était le germe d'une France nouvelle et les philosophes qui l'entouraient et l'applaudissaient comme penseur, savant et soldat, n'étaient pas tous des psychologues inspirés par les sensations qu'éprouveront les hommes des temps futurs.

De Tressan se confEssait publiquement, il avouait qu'il n'était qu'un enfant de la tradition, égaré dans un monde


inconnu et étranger Ü son âme et ce fut sur ses sensations bien personnelles à lui qu'il édifia son mouvement « Pardonnez, Messieurs, s'écriait-il, au vieillard que vous faites asseoir près de vous, d'oser parler de ses premières années. Mon exemple peut être utile it ceux qui commencent leur carrière avec des dons supérieurs aux talents du'ou m'avait soupç.onnés. Puisse cet exemple encouraôcr mes jea<iaes conzPatriotes à mériter que deux illustres compagnies ~~ouronnent un jour leurs cheveux blancs ».

Et ce fut toute sa thèse. Il parla longtemps encore, et après avoir rendu hommage il Condillac, embouché une dernière fois le clairon de la Renommée en l'honneur du Roi Bien-Aimé et de Fontenoy, il s'effondra sous les applaudissements et le triomphe.

A cette lleure suiprème, de Tressan avait racbeté toute sa vie de désorganisation intellectuelle, et il recevait dignement la couronne de l'illllllortalité. Vers la fin de sa carrière il rejetait le joug, c'était pour lui la tran;plantation de sa pensée sur une terre qui n'était ni celle de ses aïeux ni la sienne, et c'est en cette minute précise qu'il reçut la consécration de sa pensée fuyante, lorsque les élèves de rhétorique du collège du Mans lui envoyèrent des vers latins pour lui exprimer tout ce que les cœurs manceaux avaient éprouvé au tressaillemellt de la terre natale.

C'est rempli d'émotion qu'il leur répondit. Il le fit en français afin que tout le monde collabore Ü sa joie. C'est en ces termes qu'il s'exprima

A 111ES CHERS C03IP ~TRIOTES 11I11I. LES RHÉTORICIENS DU COLLÈGE DU nI_1NS

MOn cœUf ouvert la reconnaissance,

Jeunes concitoyens, vous appelle en mes bras;

Vous remplissez déju ma plus ferme espérance

Minerve guide vos pas,


Ses favoris éclairent votre enfance.

Aimables petits-fils de ces chers compagnon, Qui jouaient avec moi sur les bords de la Sarthe, Écoulez ces Mentors que rien ne vous écarte D'aimer et d'applaudir leurs savantes leçons. Faites honneur à la patrie

Qui vous a seni de berceau.

Que dans le cours de votre vie,

Une saine philosophie

Vous serve tou,iours de flambeau.

C'est à sa brilknte lumière

Que vous verrez le but où vous devez courir C'est au génie à le choisir

Consultez-vous volez dans la noble carriè~~e Qui, pour vous, dans peu va s'ouvrir.

Ciel écoute mes vœux, que ta céleste flamme Brille, éclaire, épure les cœurs!

Rends l'Éternel si présent dans leur âme Que de l'aveuglement les coupables erreurs N'égarent leur espr.~t et n'altèrent leurs maeuus

Ce fut une des dernières manifestations poétiques du comte de Tressan. Il ressentit il l'Académie le, poids de l'intrigue, nécessaire pour vivre à cette époque dans la Compagnie, et il fut en butte aux tracasseries les plus diverses. Peu de ternp:~ après sa réception, VI. de SaiutPalaye vint -t mourir Champfort il force de démarches parvint il forcer les memimes de l'Académie et à cause de sûs nombreuses candidatures on n'osa lui refuser l'entrée, mais lorsque quelques mois plus tard la mort de Saurin laissa une nouvelle vacance, Bailly se remit sur les rangs, bien déterminé il ne plu;; céder sa place ~i qui que ce fut. Il a\-ait comme concurrent sérieux le marquis de Condorcet fort appuyé pal' les philosophes; Bailly demanda à Buffon de pressentir de Tressan u ce sujet. Ce dernier répondit que


ses faveurs lui étaient toujours acquises. Mais au dernier moment, grâce à la défection de de Tressan, Condorcet fut élu à une voix de majorité.

Grimm raconte l'affaire en ces termes

« NI. de Tressan, qui avait promis à Buffon de donner sa voix à Bailly, fit la même promesse Li d'Alembert en faveur de Condorcet; mais d'Alembert, meilleur géomètre que le Pline français, jugea très bien qu'une promesse verbale du comte de Tressan n'était pas d'une démonstration assez rigoureuse; en conséquence il se fit donner la voix dont il avait besoin dans un billet convenablement cacheté, et ce petit tour de passe-passe a décidé le succès d'une des plus illustres journées du conclave académique» (1).

Bachaumont donne de son côté la relation des faits de la façon suivante -L la date du 24 février 1782

« 1I. Bailly jette les haut5 cris contre le cornte de Tressan, dont en effet l'ingratitude est bien noire si le trait est vrai. Le premier raconte du'il était déju sur les rangs lorsque le second briguait les suffrages de l'Académie, qu'instruit de cette rivalité, il avait déclaré à NI. de Tressan que par déférence pour son mérite, son ye et son rang, il se retirait de la lice il quoi l'autre répondit qu'il n'oublierait pas ce beau procédé et l'on a vu que c'est au contraire lui qui ù la dernière élection a fait pencher la balance en faveur de Condorcet )).

Bailly dut attendre la mort de de Tressan pour entrer à l'Académie, il prit possession du fauteuil de celui qui avait voulu lui en fermer les portes.

Peut-être était-ce une malice des Immortels pour se donner la joie d'entendre un critique ironique sur celui qui était diaharu. Si tel était leur but, ils en furent pour leurs frais, car Bailly- fut d'une correction remarquable. Il fit l'éloge de son prédécessem sans un seul mot d'arrière1 1) (iriinm, Corr2spo~xda~ace littéraire, t'enier 1î82, t. XIII.


pensée, et il y mit tout son talent pour ne point déplaire au public des lettres par de trop âpres critiques, ni Ü ses confrères par un lyri;~me trop exalté « C'est presque au bord du tombeau, disait Bailly, que vous l'avez couronné et l'on peut dire que c'est le chant du cygne qui vous l'a fait connaitre. M. de Tre.ssan, bien qu'il eùt écrit tard, quoiqu'il n'ait fait que se laisser entrevoir, a montré un talent naturel et un style qui avait un caractère.

Depuis son entrée l l'Académie Française M. de Tressan n'avait rien fait de remarquable que quelques vers pour distraire les douleurs de la goutte qui l'importunaient souvent. Il n'en fut pas moins un des ornements de la Compagnie qui le reconnaissait comme le dernier descendant de l'esprit de la vieille France, et s'étonnait, suivant Desessart, de le voir jouir de son titre avec toute la vivacité, toute la sensibilité d'un jeune homme qui l'aurait obtenu pour le prix d'un premier succès.

MARC PAH.KER.


ENTRÉE AU MANS

DE E

MGR CLAUDE D'ANGENNES

ÉVÊQUE DU MANS

LE 3 AVRIL 1588

C'était fête en la bonne ville du Mans, le 3 avril 1588, jour de la Passion de Notre-Seigneur. On y avait annoncé dans la matinée l'entrée de son nouvel évêque, M6P Claude d'Angennes de Hambouillet. Parti la veille de son château de Touvoie, en Saviôné-l'Évéque, il était venu dans la soirée, malgré une pluie abondante, coucher à l'abbaye des bénédictins de Saint-Vincent, dans un des faubourgs de la ville. Aussi voyait-on de bonne heure circuler dans la cité les différents corps constitués, tant civils qu'ecclésiastiques, le lieutenant-général, remplissant les fonctions de maire, Jacques Taron (1), les échevins (2), les juges, procureurs et (1) 1 L'office de maire de la ville du Mans, supprimé par Lettres patentes de Charles VIII, au mois de septembre '1488, ne fut rétabli qu'en t6(f2, par Louis XIV. pendant ce long intervalle, le lieutenant-général de la sénéchaussée eu remplissait les fonctions (Cauvin. De l'.4drninistn. nne~nàc. de la ~nou. cl~c 3lnüxe, p. ~H, ~117.

(2) Les échevins étaient Louis Blanche!. sieur des Ardillers Charles Chartier, sieur de Saint-Chereau Julien Le Maignan, sieur de la Primaudière, et Vincent Berthelot, sieur des Jonchbres, ayant rrançois Hardy, comme procureur (Ibid.).


avocats au siège Présièial et sénéchaussée du Maine, tous, reyêtus de leurs robes et de leurs insignes, les sei~neurs et notables de la ville, accompagnés d'une foule considérable, allant au devant du nouvel élu pour le fêter et l'acclamer. Chacun des habitants avait à coeur de recevoir dignement le repr~sentant de D.eu, de pavoiser de tentures et de guirlandes les rues par où devait passer le cortège avant de se rendre à la cathédrale et, dans l'antique basilique de Saint-Julieti, ornée d~ sa plus belle parure de fête le Chapitre attendait solennellement celui qui bientôt devait prendre possession de son trône.

C'est la Relation, au plutôt le Procès-verhal de cette entrée de llisr Claude ¡[' Angennes, 69" évèque du l~lans, dans sa ville épiscopale, qui, jusqu'à ce jour était restée inédite, que nous nous proposons de présenter ci-après aux lecteurs de la Remte historique et are)zéologiqtce dit Vlccine. Nous la ferons précéder d'une courte notice hiographique sur un éminent prélat dont on aime encore à se rappeler les bienfaits ('1).

Claude d'Angennes fils de Jacques d'Angennes (2), seigneur de Ratiibouillet, lieutenant pour le roi en Italie, et d'Isabelle Cottereé,u, dame de Maintenon, naquit au château de Rambouillet, le 26 aoùt 1538. Après avoir étudié la jurisprudence à Dourges, à Paris et à Padoue, il se rendit de cette dernière ville aL¡. concile de Trente, où il trouva son frère ainé, Charles, alors évêque du Mans. Revenu à Paris en '1563, il devint conseiller clerc au (t) Ce travail nous ayant été remis, quelques mois avant sa mort, par notre regretté confrère et orni Tl. Louis Briére, sans que nous puissions l'insérer jusqu'ici, nous n'wons cru pouvoir mieux faire que de prier sou fils, M. l'abbé Brière, d'en surveiller aujourd'hui la publication (Ilole de la rédaction).

(2) Jacques d'Angennes était seigneur des fiefs du Craonnais nommés la Croptiére, le Lathay, Usage, le Chemin, la Touche, et de la châtelleuie de la Boissière, 15W-15:)l), (V. abbé A. Angot Diction. hist. de la 111ayerane, t. l, p. 49).


Parlement, puis conseiller d'État. Trois ans plus tard, Charles IX l'envoya à Florence, chargé d'affaires importantes, vers le duc Côme de Médicis, et, en '1567, à Rome, auprès du pape Pie V ('1).

En 1577, Henri III le nomma président de la cinquième chambre des enquêtes et, quelques mois après, le fit évêque de Noyon Claude y fut sacré l'année suivante par Pierre de Goudi, archevèque de Paris. C'est dans ce diocèse qu'il entreprit avec succès de réprimer les nombreux abus qui s'y étaient glissés, par suite du défaut de résidence de son prédécesseur. Il s'y fit remarquer aussi pendant la peste qui vint décimer son troupeau, en assistant lui-mème les malades et ordonnant des prières publiques. Il fit vœu, pour fléchir la colère de Dieu, de jeûner les mercredi, vendredi et samedi de chaque semaine, durant toute sa vie, et eût le bonheur de voir ses prières exaucées. La réputation de son zèle et de sa vigilance s'étendit si loin qu'elle parvint aux oreilles du saint archevêque de Milan, Charles Borromée, qui lui écrivit pour le féliciter (2). Quelques années plus tard, en '1G83, il assista au concile provincial de Reims, assemblé par le cardinal de Lorraine, où il s'acquit la réputation d'un des plus éloquents prédicateurs de France. Mais son frère aîné, Charles d'Angennes, évêque du Mans depuis '1G56, qui avait obtenu le chapeau de cardinal en 1570, était venu à mourir, empoisonné, dit-on, ~t Cornetto (Toscane), le 23 mars 1587. Ses deux frères, Nicolas (3) (l) V. Dom Bondonnet Les T·ies des Eucsqoes dit .ila~zs, p. G8O-fi89. (2) V. cette lettre dans Le Corvaisior, p. 8G1. et Dom Piolin, t. V, p. 533. 1:) Nicolas d'Angenues, sor de Rambouillet, fameux capitaine, vidame du nlans et lieutenaut-flénéral du :lfaine, devint par son mariage avec Julienne d'rlrquenay, dernière héritière d'un beau nom et d'une grande. fortune, seigneur de la cbàtellenie d'Arquenay ~]ayenne) avec ses annexes: Champfleury, le Bignon, niaisoncelles, Daviet, et fut toujours, quoique catholique, ainsi que ses frères, atlach0 il Henri IV. Les Ligueurs ayant emmené Julienne d'Arquenay prisonniere il Sablé, il les poursuivit et reprit la ville, mais il fut battu à Craou par Mercoeut- (abbé Angot, Dict. )rist. de la bfayenne, t. l, p. 4\1,50, 78).


et Philippe (1), l'un goùverneur et l'autre sénéchal du Maine, entreprirent de faire nommer l'évêque de Noyon pour son successeur. Après bien des hésitations et sur leurs instances, Claude d'Angennes se démit de son siège et finit par accepter, un an après, l'évêché du Mans. Arrivé à Touvoie, le 31 mars 1588, il y fut salué par le lieutenantgénéral, les échevins, 12. bailli de la Prévôté (2), et le 2 avril au soir, il vint loger à l'abbaye Saint-Vincent. Le lendemain, 3 avril, et non le 3 août comme le rapporte Pesche (3), il fit son entrée solennelle au Mans, officia à Saint-Julien, puis offrit à diner au lieuterant-général, aux échevins, etc., qui lui présentèrent à l'issue de ce repas des flambeaux et de la bougie.

Claude d'Angennes inaugura son ministère au Mans par un grand acte d'humili ~é. Huit jours après son intronisation, dit Dom Piolin, le dimanche des Rameaux, avant le départ de la fameuse processicn qui se fait toujours de la cathédrale à l'église Saint-Vincent, et attire en notre ville un si prodigieux concours de peuple (4), on le vit monter en chaire pour y faire une confession publique des fautes de sa jeunesse qui avaient pl causer du scandale. Il en demanda pardon à Dieu et à son peuple en des termes si touchants et si entrecoupés de sanglots, qu'il fit pleurer tous ses auditeurs.

~11 Philippe, seigneur de rargis, s'était fait remarquer également par sa valeur, son esprit, sa capa3ité et fut chargé plusieurs fois de missions ort délicates, entre autres de se rendre auprès du roi de Navarre pour l'engager à abjurer l'hérésie. Devenu gouverneur du 111ans, ee fut lui qui créa dans chaquc paroisse des officiers de guerre chargés de défendre la ville contre les Calvinistes (1:Í86). Blessé à la jambe d'un coup d'arquebuse, au siège de Lavardin, il fut rapporté sur un brancard au Mans où il expira le 9 novembre 159,) (Dom Piolin, t. V, p- 531-, 5i4), 582

(2) Cauvin: Extrait des re~listras ~le L'HOtel-de-i'ille dit Vlans, p. lt (3) Chronolo~ie, p. LXIII.

(4) V. sur les usages et l'ancienneté de cette belle procession, le très intéressant ouvrage de 11i. Robert Triger La Procession des Ral~teau.r ait 3lar~,s, 1 vol. in-8-


Quelques mois après, il fut député par son clergé pour assister aux États de Blois, avec le théologal Pierre Primet et Dom Gilles Naudier, abbé de Saint-Vincent. L'année suivante, Heuri III le délégua avec son frère, le marquis de Pisani (Jean de Vivonne), pour aller à Home, auprès du pape Sixte V, afin de le justifier de l'assassinat du duc et du cardinal de Guise qu'il avait laissé commettre au mois de décembre précédent mais ils ne réussirent pas dans leur mission (1). C'est en s'en revenant de cette ville par mer qu'ils furent pris tous deux par des pirates turcs qui, apprenant leurs qualités, les relachèrent ensuite en leur offrant des présetits. Ils avaient à peine échappé à ce danger, qu'ils tombèrent dans un autre, c'est-à-dire entre les mains d'un écumeur de mer, le capitaine Gaspard, français d'origine, qui les conduisit à Narbonne mais l'intervention du duc de Joyeuse leur rendit la liberté (2).

Pendant ce temps de troubles et de guerres civiles, notre prélat fit preuve d'une grande prudence il fut exposé à de graves périls les ligueurs, dans le parti desquels il ne voulut jamais entrer, attentèrent plus d'une fois à ses jours. A la fin ils le contraignirent à quitter la ville et à chercher un refuge dans la cité angevine, auprès de l'évêque Charles ll~Iiron.

Toujours humble, pieux, charitable et désintéressé, il refusa de joindre au produit de son évêché le bénéfice de l'abbaye de Savigny (diocèse d'Avranches) qui lui fut om~rt, et de remettre au pape la lettre par laquelle le Roi, dans un de ses voyages à Home, demandait pour lui le chapeau de cardinal. Ami des lettres, ce fut lui qui transforma l'église et la maison presbytérale de Saint-Ouen-des-Fossés, près la cathédrale, en séminaire collège, où les l'ères de (1) V. la lettre qu'il écrivit au Roi a ce sujet dans les blé»eoires d;~ duc d'~pernon.

(2) Pesche Chronologie, p. LXII!.


l'Oratoire furent appelés par son successeur, 11~I~ Charles de Beaumanoir, à professer.

Henri III étant tombé sous le poignard de Jacques Clément, le 1er août 'l589, Henri de Bourbon devenait son successeur. Cependant il ne fut pas sans difficultés accepté sur le trône de France, et il dut conquérir par les armes une partie de son royaume. Après la prise de Yendôme, il vint donc avec ses partisans assiéger la ville du Mans, défendue alors par Urbain de Laval, maréchal de Bois-Dauphin (1) qui fit semblant de résister. Le prince fit son entrée royale dans notre cité, le 2 décembre, précédé de Claude d'Anoennes qu'il avait tenu à rétablir lui-même dans son évêché. Il fit eu même temps connaïtre aux habitants qu'ils devaient témuigner à leur pasteur une bien grande reconnaissance, car c'était lui qui avait sauvé le troupeau et la bergerie et empèché la ville d'ètre mise au pillage, le Roi s'étant contenté de donner aux Suisses la minime somme de vingtsept mille écus (2).

Claude fut chargé plus tard, en 1593, par le haut clergé de France, d'accompagner l'ambassadeur du Roi, le duc de Nevers, à nome, auprès de Clément VIII, pour lui assurer la conversion sincère d'Henri IV et lui expliquer les-motifs de son abjuration. Mais il ne fut pas plus heureux dans cette seconde mission que dans la première, et le pape n'accueillit aucune de ses raisons.

Revenu enfin au Mans, notre prélat s'occupa activement de l'administration de son diocèse et de la réforme des monastères de religieuses. Il se rendit d'abord pour ce motif dans l'abbaye du Pré, près Le Mans, où il rencontra tant d'obstacles qu'un jour (3), à la suite d'une discussion (1) V. sur ce personnage, !'intér(ssant travail de Ni. l'abbé A. Ledru L'rbain de Gaaal Bois-Daic[~liin, marquis de Sablé, etc. Jlamers, 1878, 1 vol. iii-8.

V. Guyard de la Fosse Hist. des l:uéqoes dit hiasas, p. 337. (3) Ibid., p. ;~il41; Dom Pioliii, t. V, p. GM-634 Pesche, Cleronologie, p. LXIV.


assez vive avec les récalcitrantes, il prit froid et contracta une pleurésie mortelle dont il ne devait plus se relever il fut emporté au bout de quelques jours, le 15 mai 1601, au milieu du deuil universel occasionné par une mort aussi soudaine. Ses obsèques furent célébrées dans l'église du :\[ans par son cousin François de la Guerle, archevêque de Tours, et son oraison funèbre prouoncée par Philippe de Cospéan, plus tard évêque d'Aire, de Nantes et enfin de Lisieux. Son corps fut enterré dans le choeur. de la cathédrale, près la chaire épiscopale, et l'on recouvrit son sépulcre d'une table de cuivre où l'on grava son épitaphe, qui fut enlevée en 1769.

Les armes de Claude d'Angennes, comme celles du cardinal, son frère, étaient ctc sai,le a~~ saxctoir d'argent (1). Son portrait, in-4, buste, le seul connu, a été gravé par Daret (2).

Telle est, en quelques mots, la vie de l'illustre prélat qui occupa durant treize années le siège épiscolaal du Mans et y fit revivre toutes les vertus de charité, de mansuétude, d'attachement aux petits et aux humbles, demeurées traditionnelles de nos jours encore chez le successeur de saint Julien. Il nous semble d'autant plus intéressant d'attirer l'attention de nos compatriotes sur la relation fort originale de son intronisation, qu'on y retrouve des détails précieux pour l'histoire de notre pays.

BRIÈRE.

(t, Caucin Essai sur l':Irinnnéal du diocèse dit 111ans, p. 9: rt~w~orial des l:vivlaes du 3la~es, p. 15, no 462 des planches.

(~) Voir 111autouclret Essai d-Iconographie rnnncelle, p. 11.

LX. 19


PfiOCÈS VERBAL DE L'ENTRÉE ET PŒCEPTIO:I DE IL P. EN DIEU, NI" CLAUDE n'NGENNES, L'EUESQLIE DU MANS, SEIGNEUI1 BARON DE TOUUO\E ~1), Di LA VILLE ET EGLISE DU MANS.

Le samedi second Jour dauril 1588 (2), l\Iondit sieur sortit du chasteau de TOUUOY'3, enuiron vne heure et demie après midy, estant habillé dune soutane et vn manteau noir de sarge de florence et par sur lad. soutane estoit ceint dune ceinture de tafetas, à laquelle pendoit vn chapelet de petenostres noires de Bois déhenne ou daloès, Monta sur vit Mulet enarnaché de cuir de Maroquin sans housse, ayant vne bride et Mors de cuisure doré, et si bien accommodé qu'il pouuoit bien valoir 60 escus et plus.

Et au partir dudit chasteau fut accompagné de Messire Jean d'Angennes, seign~;ur de Pougny son frere, chevalier des deux ordres du Roy, conseiller en ses conseils d'Etat et priué, capitaine de cent hommes darmes de ses ordonnances, accompagné de Guillaume de Quatre-Barbes, escuyer de la Rongère, françois Lemenager, sieur de la Plisse, et plusieurs autres Gentilshommes estant à la suitte dudit seigneur; de Messire René d'Angennes, chevalier de l'ordre, lieutenant des cent g:mtilshommes de la Maison de sa Maiesté, sieur de la Louppe, accompagné de plusieurs autres gentilshommes de Messire françois du Bouchet, cheualier de lordre du roy, Gentilhomme ordinaire de sa chambre, seigneur de Sourctes, SI Leonard des Bois et Bernay, et auec luy plusieurs autres gentilshommes; me3sire (11 V. sur l'importance et la composition de la baronnie de Touvoie, Dom Piolin, t. V, p. 4Jl

13) J'ai cru devoir adoptEr l'ancienne orthographe en établissant une certaine ponctuation qui manque toujours plus ou moins dans lçs anciens tnauuscrits, afin de rendre l'intelligence du teste plus facile.


Detiis de Clinchamp, sieur d'Argenson et de la Cesnerie (1), Messire Anne de Montmorency, cheualier de lordre du Roy, Marquis de Turin et sieur de St Georges de Biars Marc de ]3eliii, enseigne des Gardes du Roy, sieur des Pins le sieur de Bùrdaigiié Frauçois de la Tour, escuyer commandant en la ville et chaussée du i~faiis, en labsence de Messire Philippe d'Angennes, cheualier de lordre du Roy, Lieutenant general pour sa maiesté en pays du Maine; du sieur de Borgré (?) frere de mondit sieur les deux sieurs du Luet frere5 laisné. conseiller du Roy av grand Conseil, et le puisné au parlement de Bretagne; Charles Cref:>pin, conseiller, sieur de Cheres (2), et plusieurs autres avec leurs gens.

De nous, Antoinne Le Roy, licentié ès droits, Baillly, Mo Nicolas Maudet licentié ès droits, procureur fiscal, et de 1I~ lacques Cadieu, Greffi,:r de lad. Baronnye de Touuoye, accompagné de pierre Pigne l'y et sergent de lad. Baronnie, gamis de houssines et verges. Et, depuis la porte de Touuoys jusquau boU!'g de Sauiôné l'Evesque fut trouuée grande quantité de peuple, auxquels (sic) mondit seigneur donna sa Bénédiction. Et entre le Ruisseau de Morteueille (3) et le dit bourg de Sauigné vinrent au devant de mondit seigneur les prêtres et gens d'église de laditte paroisse, auec la croix et l'enseibue ou Banniere de la paroisse vestus de surplis, auec petits eufans aussy reuestus de même, ayant leurs cierges allumés, chantant l'hymne 1 é~zi Crentor. Et lesquels mondit seigneur ayant apperçus il descendit et mit pied u terre prit la croix qui luy a été j Denis de Clincliamp, fils de François et de Jeanne de Ilfaulny, habitait au lieu de la Cesnerie, paroisse de Courcemont. ( llaiso~x de Clirtcl~a~rip par J. Noulens, p. 3~U).

\.2, V. Alouis Le /ie~' de Cleères et ses seigueu~·s, 111amers, 1877, 1 vol. iu-8.

(a) Le lieu de Dlorteville, en Savigné, dépem:ait de la baronnie de Touvoie.


presentée par le curé, laquelle il a adorée et baisée, puis remonta sur son mulet et passant par dedans ledit bourg où il y auoit aussy grande assemblee et affluence de peuple qui l'attendoit pour le voir passer, auixqt-iels il a donné sa bénédiction. Et à plusieurs endroits dudit Bourg et village furent fait plusieurs grélnds le tambour sonnant et plusieurs coups d'arquebuses tirés en signe de joie et d'allégressr~. Et sortant dudit bourg, près le lieu de l'Ardoise, sest trouué au deuaut de mondit seigneur. escuyer, sieur de la Douais, escuyer de l'Escurie du Roy, qui mit pied à terre pour receuoir la bénédiction de mondit seigneur et le saluer, puis l'accompa~na en son chemin lusque la ville dudit Mans. Et approchani de Sargé fut rencontré noble sieur de la Grange, prevost prouincial criminel du Maine, accompagné de ses archers estant au nombre de dix-huit, montés sur leurs cheuaux, esquipés et garnis de "leurs armes, ayant leurs casaques de liurées, lequel preu.ost auoit mis pied à terre, salué et fait la réuérence a mondit sl~igneur et offert tout seruice. Et entre les Ricordannes et la Fontaine-Saint-Martin sest trouuée sieur de Vaux, d'Yvré-l'Euesque et du fresne, bien accompagné de plusieurs gentilshommes tous bien montés sur cheuaux d'Espagne, de plusieurs auocats en cour d'Eglise, et assistés de Mc Michel Pean, in,3 adrninistrateur de l'hôte.1-I)ieu dit sepulchre (1) du Mans. Son greffier luy a fait' harangue en latin, à la louange de mondit seigneur, vertu et e~:cellence de sa lignée, qui a fait sa response aussy en latin. Et entre ledit lieu de la fontaine ('1) L'Hospice du Sépulcre, h9ti et doté par saint Innocent, 8~ évêque dut Mans, dans la 1'" moitié du VI" siècle, était destiné à recueillir et vehir en aide aux nombreux pélerins qui venaient honorer les reliques de saint Julien. Il se cornposait d'un assez vaste bâtiment, avec chapelle et un grand jardin. Ses revenus furent rcunis, en IG58, à ceux de l'Hôpital"énéral du Mans et une rue, percée depuis cette époque sur les terrains d(,, cet hospice, en porte en;ore le nom 1 Pesche, t. fil, p. 5-},1)).


S! Martin, eu approchant des Trois-Maillets, sont venus au deuant de mondit seigneur 11I° Iean Lepeltier, président au présidial de laditte ville ('1), accompagné de Michel Vasse, conseiller du Roy, lieutenant criminel en la seueschaussée du ~faus, 11i° Pompée de Yigno]es, conseiller du Roy, lieutenant particulier ciuil en lad. seneschaussée du Mans, Me c lace¡ ues Richer, lieutenant assesseur criminel en lad. seneschaussée, \I° Ieau Taron, sieur de la Roche, conseiller magistrat audit siège, doyen de la chambre, Me Charles davenel, conseiller audit siège, ~1° Le Boindre, sieur de Peruchay, Me Ieau Girard, Me laené Giuray,' Me lulien Le Couruasier, aussy conseillers mélgistrats audit siège, tous en robes longues, montés sur cheuaux garnis de housses qui, là, attendoient mon dit seigneur, lequel approchant Me Le Pellier, president a fait me harangue ù mondit seigneur, à son honneur et louange et de sa famille, et sestimant, comme faisoit tout le peuple, très heureux dauoir vu tel pasteur, disant qu'il n'y auoit preuiuce dans le Hoyaume plus heureuse que celle cy au surplus offert tout 5ervice. auquel iiiotid. spigneur aurait fait respouse et remerciment de leur bonne af1·ectiou. Et à l'entrée des paués près le lieu des ~Iaillet,; vinrent au deuant de mondit seigneur, au,%y en robe lou~;ue et a cheval, 11f~'S Marguerin de la Digne, doyen du l\lans l':2), lfartiu Funet l3) tous chauoiuea en lad. Eglise, lequel doyen approchant de mondit seigneur pour faire sa harangue, fut remis à ce faire par mondit seibneur à la Chambre, attendu liniure du temps et dune grande pluye quil faisoit lors et tout le long du chemin.

('1) Précédemment avocat, il avait été nommé pour remplir cette charge, en 156\J, lorsqu'elle fut crée I,Caucin, :lr~rn» ~ial, p. t3G¡.

~'2~ de la docteut, de 5ouboune, auteur le la première Bibliothèque des Pères, fut doyen Je l'église du Mans, de '1;>81 il 158D (Cauvin, p. :30,-

i3~ Un des bienfaiteurs de la cathéJralc du Mans (Dom Piolin, V, li. ::JÍ6, li'?5).


Depuis ledit chasteau de Touuoye fut rencontré grand nombre de peuple pour voir passer mondit seigneur qui latendoit tant ès dits chemins qu'aux Carefours, en fort grand nombre, auquel 1 auroit donné sa bénédiction, et descendit près ledit lieu des Trois-Maillets, entra dans la maison dudit Funet où l'attendoit î~i~ sieur de la Riuière, général des finances pour le Roy en la generalité de Tours, 1\[0 Simon Richer, lieutenant en lélection du Maine, noble Le Camus, sieur de la sieur de Souligné, élu en l'Election, NI,3 Rouillet (?), sieur de la Gasnerie, auocat du Roy en lad. Election, et ~1,3 Deschamps, sieur d'Ingrande, procureur du Roy aud. siège, et plusieurs autres nobles bourgeois de la ditte ville et fauxbourgs, et aussy grand nombre que, à toute difficulté l'on pouuoit passer par les Rues. En laquelle maison ledit général amoit fait harangue aussy à la louange de mondit seigneur, de sa maison et famille et spécialement de monsieur de Rambouillet, son frère, cheualier des deux ordres du Roy, capitaine des cent gentilshommes de la maison du Roy, Conseiller d'Estat, seneschal du Maine, lors absent et détenu de mal1die à Paris, et pour cette raison n'auoit pu assister mondit seigneur son entree. Et pendant que mondit seigneur a e:,té dans laditte maison, ledit Funet a fait distribuer, pain, vin, poires, pommes, et autres fmib. Tot après mondit seign=ur sorti dicdle maison audit Funet appartenant, ayant pris sou Roquet (sic) sur une robe longue de sarge de florence noüe, monta sur fort beau mulet noir garni de housse de drap noir, la bride, poitrail et frin (~ic) de cuiure doré qui pouuoit bien valoir avec son (harnois) et housse de drap noir la somme de cinquante escus, et a procédé à l'abbaye de Sl~ Vincent vers lheure de quatre heures de Relel1ée. Et à l'entrée du fauxbourg de St- Vincent, entre le pressoir de Chapitre et le carfour de laditte rue de St-Vincent qui estoit toute pleine de peuple, auquel mondit seigneur donna sa bénédiction, luy a été fait


vne saluade par Jean Berthelot, sieur de la Jonchère, l'un des Eschevins de la ditte ville et capitaine dudit fauxbourg, ayant vn espieu en sa main et suivi de cent arquebusiers et plus qui auoient lachés et tirés leur arquebuse en signe de joie, etant laditte rue reparée de portails faits de lauriers, lierre romain et autres belles fleurs et ayant les armes de mondit seigneur, lequel est allé à lad. abbaye de SI Vincent, au dedans de laquelle abbaye et sous le portail de la ârande porte dicelle est descendu de sur sondit mulet. Et en descendant monsieur lacques Richer, lieutenant assesseur criminel en laditte ville, mary d'Anne Dugué ('1), et à cause delle heritier de deflt Me lacques Dugué, viuant conseiller au Presidial de laditte ville, seigneur en partie de la Baronnie du Breuil (ou Breil) en la paroisse de Parignél'Euesque, vestu dune Robe longue de taffetas, ayant la teste nue et pris l'estrier dextre dudit mulet pour ayder à mondit seigneur :1 descendre, et mondit seigneur descendu, vouloit mondit Richer monter sur ledit mulet, luy a ledi~ llfaudet demandé en quelle qualité il entendoit prendre ledit mulet, lequel Richer luy c~ fait response quil le faisoit comme ayant priuilege et droit acquis à cause de saditte femme comme seigneur en partie dudit lieu du Breil, pour le seruice que led. seigneur ju Breil estoit tenu faire à l'entrée de mondit seigneur, pour raison de lad. Baronnie et seigneurie du Breil, et est monté de sur led- mulet et s'en est allé, dont led. llfaudet n requis acte. Et au deuaut de la grande porte de lad. Eglise et entre la porte de deuant sont venus les abbé et Religieux dud. SI Vincent et processionnellement, auec la croix et eau beniste, reuettus en chappes lequel abbé a presenté l'eau beniste à mond. seigneur et a adoré la croix et l'a baisée. Et l'Adoration faille, l'un des religieux de lad. abbaye a fait aussi vne belle harangue en latin en exaltant et louant la bonne vie, vertu (1) V. Pesche, 1-V, p. 355.


et lignée de mon dit seigneur, en luy recommatidant lestat de leur abbaye. Et ce fait lesd. Religieux ont commencé Lt chanter le Te Detcm, qU'Ils sont allé aclieuer au chœur de lad. Eglise, lequel fini fut ditte Loraison pour mond. seigneur par le dit abbé (1), et icelle finie fut fuite la bt'nédiction par uiond. seigneur, estant en chaire au haut, Ü côté dextre en entrant au chœur au bout devers le grand autel. Et ce fait, mondit seigneur sortit hors lad. Eglise, ès cloistre de lad. abbaye, et de là sest mond. seigneur retiré en vne chambre qui luy auoit été preparée, accompagné de plusieurs gens notables, et mond. seigneur a demandé les clefs du fort de lad. abbaye pour y'demeurer, loger et estre noury iusquau lendemain, avec vingt hommes et vingt cheuaux, lesquelles clefs luy ont été baillées par led. abbé, connoissant à ce estre tenu par concordat anciennement fait. Et lesd. clefs ainsi baillées a été dressé la collation en lune des salles de la ditte abbaye, où plusieurs de lad. abbaye tirent collation. Et quant à inotidit seigneur, il n'a collationné aucunement, parce quil ieunoit led. jour. Et coucha mond. seigneur en lad. abbaye, avec la plupart de son train. Et le lendemain au matin, tiers jour dud. mois dauril qui estoit le premier dimanche de la Passion de N. S. deuant Pasques llearies, inond. seigneur est sorti de la Chambre où Il auoit eouché en lad. abliaye, habillé de robe de sarge de florence, ayant son roquet par dessus, est allé à l'Eglise faire son oraison, laquelle finie il est allé au grand autel, luy a été baillé une étole par led. abbé et atteint le sacraire estant à la custode. Les mains buées il l'a visite et, la visitation faite et finie, est entré au reuestiere auec lesd. abbé et Religieux, a fait sortir hors dy celuy plusieurs I.l) Dom Gilles Naudier était ahbé régulier de Saint-Vincent depuis l'année précédente (t.r~R7). Il fut nommé, comme son évêque, député du clergé aux États de Blois, anec Pierre Primet, en 1588 (Pesche, t. V, 1'.681-


personnes qui y estoient, ne voulant que autres demeurassetit auec luy sinon lesd. Religieux. Et la porte dud. Reuestiere fermée, mondit seigneur leur a fait des remonstrances, et ce fait led. abbé a baillé à mond. seigneur dans vne bourse de velours cramoisi, neuf escus d'or sols et quatre simples ducats millerets en espèce, qu'il a dit faire la somme de quarante francs d'or pour la visitation et causes portées par le concordat, disant quil navoit pu recouurer quarante francs d'or en espèce, pour autant quil ne s'est trouué aujourd'huy qui ayeut cours, quelle bourse et neuf escus et quatre ducats millerets a. été reçue par ll10ndit seigneur sans préiudice de demander le surplus et de ses droits, protestant de ne se préiudicier ni à ses successeurs; et disant que du moins ledit abbé deuoit bailler quarante escus d'or en espèce, et que les francs d'or tant il pied qua cheual valent davantage que lEcu sol, etque qunnd il est fait mention de francs d'or par led. concordat cela ne se doit entendre des francs dargents, comme semble l'entendre led. abbé qui ne luy baille que lestimation de quarante francs dargent, ajoustant qu'il entend demander le surplus et se pouruoir par les voyes de droit. A quoy led. abbé auoit respondu qu'il ne scauoit quelles pièces ce sont que les francs d'or et quils uont plus cours, et quil pré.tendait par la somme contenue dans ladite bourse estre ereml~t du droit de procuration et visitation que mond. sei~neur pourroit prétendre :t lquenir sa vie durant, sur quoy mund. seigneur a dit quil ne les receuoit pour cette cause et quil ne seu contentait pour autant que led. abbé luy baillait quarante francs d'or, ce ne seroit pour le droit de procuratiun et visitation, ains seulement pour lentretien dudit concordat. Et sans entrer plus auant en question pour cette heure, il a ete protesté dune part et dautre que ce qui se foisoit, ne préiudicieroit aux vns ny aux autres ni à leurs successeurs. Puis après audit Reuestiere, a été baillé Li


mondit seigneur lamict et aube de fin lin, auec le parement, l'estolle, fanon de broderie, et une chappe de damas blanc qui auoit esté là apportée par le sacrjste de Monsieur saint Iulien; gants de fil de coulpur, anneaux d'or dessus. A été déchaussé audi, Reuestiere par (son serviteur) et pris une Mitre blanche, et ce fait et reuestu, luy ayant les (pieds nuds), la crosse episcopale deuant luy, trois de ses aumosniers au costé et derriere, ayant aussi chacun vue chappe de damas blanc, est party processionnellement de laditte abbaye de Saint ~'incent, accompagné desdits abbé et Religieux, ayant aussy ledit abbé sa crosse deuant luy, tirant vers la ville du Mans par la rue de Saint-Vincent, auec les Religieux de la Couture, les Heligieux de Beaulieu, ceux de la Maison-Dieu de Goiefort, doyen et chanoines de SaintPierre, Iacobins et Gordeliers et de plusieurs gentilshommes et grands seigneurs, et peuple de la ditte ville et des champs qui estoit venu dans laditte ville voir, et en tel et si g1'[lnd nombre, que les rues etoient si pleines quil ny auoit presque moyen de passer, et au~ fenestres et boutiques, ès quelles maisons, auoit esté dit et chanté plusieurs beaux Motets en musique et autres cantiques à la louange de mondit seigneur, même aux fenestres de la maison dudit Berthelot, eschevin.

Et estant entré en !Eglise de Saint-Ouen, a pris de l'eau heniste, sest mis à genoux deuant limage du Crucifix, et delà au .grand autel où il a fait oraison, puis visité le sacraire, est entré en la maison presbytérale dudit official, où ont esi ses pieds laués en un bassin puis chaussé, pris ses sandales, une chappe de drap d'or, belle et riche, et mitre de même drap d'or fort riche, auec autres choses nécessaires, et chappes pour les chapelains que le sacriste de Saint-Iulien auoit apportées.

Et pour ce que en laditte Eglise de St Ouen y a eu altercation entre le collège dud. St Pierre et les dits Reuerends


pères de SI Vincent, sur ce que chacun d'eux disoit auoir droit daller processionellement au plus près de mond. seigneur pour éuiter noise et débats, et à 1-i foule du peuple qui là faisoit grande presse, et en estoient les rues si pleines que Ion ne pouuoit tourner, mond, seigneur a ordonné, pour éuiter à linconuénient et confusion qui sen pourroit ensuiure que, pour cette fois et sans le tirer à consequence, lesdits de Saint-Pierre demeureront auec led. curé de Saint-Ouen auprès de luy, au moyen de quoy les dits abbé et Religieux de SI Vincent sen sont retournés en leur ditte abbaye, auec protestation que ce que dessus ne preiudicieroit à leurs droits.

Et au-deuant de la grande porte de la ditte Eglise ont esté appelés par Pierre Bouquet, sergent de Touuoye, en labsence du sergent Bouuier de Touuoye, qui dit auoir droit de le faire, les huit Barons et sieur., qui sont tenus porter mondit seigneur en chaise en la ditte Eglise de Monsieur SaintIulien du Mans (1), qui sont les sieurs de Pirmil, de Belin, de V~iux, de Neuuille, de Sillé-le-Guillaume, de Montfort, de Mondoubleau et du Breil, lesquels sieurs de Belin (2) et de nlondoubleau sont défaillants, et desquels en auons audit ~laudet, ce requérant, donné deffault. Et sont comparus pour led. sieur de Pirmil Me Levayer, sieur de Ridroys, et i~f~, Pierre Coisnon, bailly de Noyen, ses procureurs, par procuration en papier passée au lieu de la Roche-Grehenne, pays de Bretagne, du vinot-denx iour de mars signée Foulepré et Guillemin, qui ont offert faire pour et au nom dudit sieur de Pirmil la ceremonie requise (et quil deuoit faire), a quoy par ledit Maudet a esté dit que ledit sieur de Pirmil est tenu faire le seruice en personne et non par procureurs, et protesté que 11 faute dudit seruice perIl) V. Pesche, LVI, p. 357.

(~2~ François d'Averton, comte de Belin, ¡;ouverl1eul' de Paris, cél6bre par sa bravoure (Dom Piolin, t. V, p. fj95).


sonnellement fait, mondit sieur iouiroit de ses droits et de se pouruoir ainsy quil verrait bon estre, et tnême d'empescher comme de fait il a empesché que les dits procureurs dud. sieur de Pirmil se iouissent de faire aucune chose en la cérémonie réquise, ioint quil n'appert de la qualité de noble prise par le dit procureur et par lesdits Le Yayer et Coisnon, parlant par la bouche dudit Coisnon, a esté protesté au contraire, dont leur auons decerné acte.

Est comparu ledit sieur de Yaux en personne qui a offert faire le service, et sur ce que led. sieur de Vaux a dit quil est fondé de marcher au rang au plus près de la personne de mondit seigneur, a esté par nous ordonné quil maretieroit au plus près de mondit sieur, après luy, au costé droit. Et, quand au Baron de Pirmil, que sil estoit (present) en personne, il auroit droit de marcher deuant motidit sieur, au costé dextre, au plus près et ~mblablement est comparu en personne sieur de Neuville, qui a aussi offert faire le se ¡'vice quil doit; aussy Jean Greffier, au nom et comme soy disant procureur de demoiselle se disant dame usufruitière dudit Neuuille qui a offert faire led. seruice., et que ledit 1\faudet a empeschée pour nestre laditte veuue usufruictière personne capable pour le faire, et que ou aillEY seroit et pourroit estre reçu par prouisiou que ledit Greffier ne fait aparoir daucuu pouuoir, partant proteste comme dessus que motid. sieur iouira de ses droits.

Et pour led. sieur Baron de Si lié est comparu noble Lancelot du Chesnay, sieur du capitaine du chasteau dudit Sillé, qui a remonstré l'absence du dit sieur (et) offert faire le seruice que ledit sieur est tenu, encore quil nait aucune procure ny pouuoir special, ce que ledit l~faudet a empesché e'~ dit que ores que le dit du Chesnay eust procure dud. sieur de Sillé, quil ne doit estre reçu audit seruice qui est personnel, proteste comme dessus.


Et pour le sieur de Montfort est comparu André Leporc, escu5-er, bailly dudit Montfort, qui a remonstré que ledit sieur nt) pouuoit comparoir, pour estre prisonnier es mains des lierétiques où il fut prins h la journée du Coutras (1) lequel Maudet a dit que ledit sieur de Montfort nest prisonnier à laditte journée, et quil est maintenant en liberté en sa maison, et partant a requis deflault, nonobstant la remonstrance dudit Leporc, et protesté comme dessus que il faute que ledit sieur de Montfort a fait de comparoir et faire le seruice en personne, comme il y est tenu de iouir par mondit sieur de ses droits, dont luy auons decemé acte, et audit Leporc de ses dittes remonstrances.

Et quand au sieur du Breuil est comparu ledit Richer (2) en personne qui a offert faire le seruice qui sont tenus faire, ce que ledit Miudet n'a voulu empescher, sans preiudice des droits de mondit sieur.

Puis après mondit sieur a declaré quil estoit, grâce u Dieu dispos et quil ne voulait estre porté en chaire par lesd. Barons, et quil iroit à pied, protestant touttes fois que ce fabant il nentend préiudicier à ses successeurs. Ce fait, mondit sieur en habit de chappe et mittre dessus, sadicte crosse deuant luy, auec lesdits Collèges, ont procédé depuis laditte Eglise de Saint-Ouen iusquà la grande porte de laditte Eglise de Monsieur Saint Iulien, et depuis le bas de laditte rue de Saint-Vincent iusqu'à la porte de laditte Eglise, maitre, Martin Ourceau, sieur de (la Bionnière) (3), bailly et iuge de la Prevosté de cette ville, et capitaine de la porte du cliabteau dicelle, auoit mis gardes et gens en armes pour empescher quil ne se fist surprise pendant (1) Dom Pioliu, t. V, p- ~î7. Coutras est une petite ville du département de la Gironde.

(2, Jacques Richer, lieutenant particulier du sénéchal ùu Mans, seigneur tlu Breuil par Marie Dugué, son épouse 1 Pesche, IV, p. 355). (:3, Il avait épousé Louise Dagues et liabitait paroisse du Crucifix. V. mon dossier de la famille Ourceau.


laditte entrée, et aussy pour donner ordre et faire ranger le peuple qui estoit en l,elle abondance quil estoit immunerable (sic) estant ledit Ourceau reuestu d'un iupon et chausses de velour noir, lespée et poignard dorés, et uni espieu dans la main.

La porte de laquelle Eglise de mondit sieur saint Iulien a esté fermée à mondit sieur iusquà ce quil eust faict le serment que lesdits de Chapistre disent quil est tenu faire (et que) Ion a coustume dexiger à la nouuelle reception de chascun Euesque, et de tenir lad. porte fermée iusqul1 ce quil l'ait fait. Aux marches de la grande porte de laquelle Eglise Me René de Routy(1), grand archidiacre de laditte, et maistre (Mathurin) de Richot, procureurs dudit Chapistre, luy ont fait faire le serment.

Et ce fait, a esté laditte porte ouuerte en laquelle mondit sieur est entré, où il estoit attendu par les Doyen et Chanoines de lad. Eglise, tous en chappes belles et riches, où ledit sieur de Laviône, doyen de la ditte Eglise, luy a fait une fort belle et docte harangue en latin à sa louange et de deflunct Monsieur le Cardinal de Rambouillet que Dieu absolue, son frère, et de tous ceux de kt famille et maison de mondit sieur, lequel auoit fait Responce en latin audit doyen. Et ce fait ont tons Illesdits sieurs de l'Eglise commencé à chanter Te DEZrnz Laudanzus alternativement avec les orgues.

Ce fait est entré mondit sieur par la porte du costé senestre du chœue et allé à lautel de Monsieur SaintGeruais. Il n'y auoit lors (et) il ny a à présent autel de saint Geruais, mais bien se situais (trouvait) posée (placé) à la main droitte de celle de la Vierge posée sur le Restable du grand. de celle de Saint-Protais, en entrant par le costé senestre de lautel de Monsieur Saint-Iulien, et (1) M. René de Rosty, maîl.re et chef de l'église collégiàle de la MaisonDieu de Coëlfort, près la villE du Mans, avait été élu député aux États du Maiue, en 157ü. (Cauvin, États dit hfaine, p. 17).


s'estoit arresté, mis à genoux et fait sa prière. Puis (est) allé it la Chaire episcopale où il a esté mis et intronisé, estant laditte Chaire toutte en parement du haut en bas dicelle, parée de riches tapisseries. Et durant le Te Dezina sonnoient touttes les grosses cloches et petittes, et le Te Dezcrrz finy, mondit sieur a dit Loraison en la ditte Chaire episcopale, et icelle acheuée est allé au Reuestiere de la ditte Eglise, auquel Reuestiere luy a esté donné à lauer d'eau et de vinaigre par Me Jean Le Monnier, archidiacre de Sablé, à ce tenu, comme il!'a confessé; et audit Reuestiere a esté orné et reuestu dhabits pontificaux beaux et riches à merueilles, et (est) allé au grand autel où il a celebré la Messe fort solennellement audit autel de mondit sieur Saint-Geruais et sieur Saint-Protais dont l'Introït est ~llihi atiteiii, etc. Et durant laquelle Messe, auant l'epistre, a esté chantée par trois chanoines, à costé dud. autel, une prose ou listange de louanges et vertus que doit auoir un Euesque, où il a esté l'es pondu en choeur par les vicaires et autres, ainsy quil est contenu ès liures d'icelle Eglise. Et semblablement après Loraison et deuant Ite Jlissa est, a esté chantée vne autre prose par quatre chanoines, estant entre lautel et le choeur, et respoudu comme deuant, et à laditte Messe ont serui de diacre (et sous diacre l'archidiacre du Mans et l'archidiacre de Sablé). Et ont assisté à lad. Messe, au costé droit dudit autel, assis sur sièges, les personnes qui s'ensuiuent, c'est à sauoir Et au costé gauche Lad. Messe finie, mondit sieur est retourné au Reuestierc pour laisser ses dits habits pontificaux, et ce fait, est allé en la maison episcopale accompagné de tous les nobles gentilshommes et sieurs susdits, et de tout le Clergé, en la grande salle dudit lieu qui estoit tendue de tapisseries belles et riches et auparauant dentendre à aucune autre chose, ne parler à aucune personne, est mondit seigneur entré en la Chapelle où il a fait ses prières à genoux. Puis après a esté fait le disner et banquet somptueux.


Et au commencement du disner a esté donné à louer il mon dit sieur par ledit sieur des Pins, >t faute que ledit sieur de Pirmil qui estoit tenu à ce faire, a faite de comparoir en personne, pour deffalit de laquelle comparution personnelle a ledit Maudet protesté comme dessus, que mondit sieur jouiroit de ses droits. Auquel mondit sieur, après quil a esté laué, a esté présenté une seruiette pour soy essuyer par le sieur des Vaux-Pouteaux. Auant lequel disner sest ledit sieur des VaLix-Poute,.iux offert à mon dit sieur le seruir audit disner d'escuyer tranchant, lequel mondit sieur na voulu permettre, ains en a dispensé ledit sieur des Vaux pour son ancien âge, maladie et indisposition, sans toutes fois et auec protestation faitte par mondit sieur de ne preiudicier (ni) à ses droits ni à ses successeurs.

Et le disner fini a eu led. sieur des Vaux les gaisnes et cousteaux dont iiiondit sieur auoit esté servi, sous les protestations susdittes. Et audit disné sest allé mondit sieur seoir auec ceux du Clergé, où ont esté en ordre les personnes qui suiuent, scauoir à la première et plus grande table, estant posée le long de lad. salle du costé du iardin estuit mondit sieur et auprès de luy, à ses costés, VI~ sieur de la Vigne, doyen, Me Claude Le Febure, chantre de laditte Eglise, 1\[e Relié de Routy, grand archidiacre, ledit Jean Le Monnier, archidiacre de Sablé, Nicolas Crestot, archidiacre de Passais Jean Brouard archidiacre de Chasteau-du-Loir, Le Bert, archidiacre de Montfort, Jean Le Porcher, sous-chantre, Martin Funet, Richard Berthe, GeotIroy Bellanger, Denis Dauenel, Victeur Lepeltier, Jean Brouiller, Jean Mincher, Paul Mariette, Marin Goudet, Pierre Croissé, Labbé, Pierre Taron, Nicolas Aubert, Paschal Leperuier, Christophle Foucault, Gohier, Pierre Primet, Guillaume Mairet, Jean Martin, François Noël, Nicolas Dutertre, Guillaume du Goutel, Millet, Pierre Crinier, du Li Richet, Herault, d'Embroise, Ouen,


Estienne Montauban Jean Bouttier, Jean Le Vasseur, Jacques Godeau, tous chanoines de laditte Eglise. A la seconde, estant près le pignon et bout de laditte salle qui ioint IEglise, estoient lesdits sieurs

la tierce table estoient les Juges, Conseillers et Magistrats du siège Presidial, scauoir

A la 4~ table estoient les chantres, vicaires et ceux du Da:3-chœur de lad. Eglise, scauoir

A la 5c estoient les maistre:3 et enfans de psalette. A la fie estoient les officiers de l'Election du Mans, auocat et procureur du Roy audit siège Présidial de l'Election du Mans, scauoir

Tous lesquels seigneurs et personnes estoient au nombre de

troisième

A l'issue dudit disner ont esté dittes

(les prières) par les en fans de psalette et chantres de la ditte Eglise en musique, et icelles finies et pendant que les assistauts se leuoient de table, ont été chantés deux motets en musique, à la louange de mondit sieur et de ceux de sa maison. Et ce fait, ce sont la plus grande partie des assistauts retirés, après avoir pris congé de mondit sieur. Et sur les quatre heures de releuée dudit iour, mondit sieur seroit retourné à l'Eglise et assisté à vespres, et le sont allé quérir deux enfans de chaeur, ayant deux cierges allumés, auec un grand nombre desd. chanoines pour ly conduire, pendant lesquelles (vespres) auroit esté fait donner du pain, poisson et autres viures aux pauures qui sestoient assemblés en tel nombre que la cour de l'Officialité en estoit remplie. Et Li l'issue desd. vespres, mondit sieur est retourné en sa maison episcopale et auec luy plusieurs LX. 20


chanoines et gentilshommes, puis (après) il sest fait un souper magnifique.

Dont et de ce que dessus auons dressé le présent nostre procès-verbal par nom. Antoine Le Roy, licentié ès-droits, bailly de Touuoye, en presence de nostre procureur et greffier, les iour et an que dessus.

Ainsy signé LE Roy.

Le Concordat passé entre Pierre de Sauoisy, 57c ou 58c Euesque du Mans (1) et l'abbé et Religieux Benedictins de SI Vincent du Mans, au sujet de la première et solennelle entrée en lad. abbaye de St-Vincent, en la ville et Eglise cathedralle du Mans, est du 8 auril 1385, après Pasques. Voir le Cartulaire rCl1ge de l'Euesché, fol.

Une copie de cette pièce, qui n'était elle-mème qu'une autre copie, vrai seni'-)l abl einent écrite dans la première moitié du XVIIIe siècle, malheureusement tronquée en tète, par l'effet de l'usure ou autrement, fut laite en 1840, par le chanoine Lottin, qui l'avait trouvée fort intéressante, et ajouta à la fin cette note Calte pièce cx ét~ tr·oteuée ctccns les pcepiens de la sxecces~ion de l'abbé Pichon (Thomas-Jean, mort en "18"12) et nx'a été ,conxryxcc~xiqccée 1](1)' Il. Caovin, 7 f~or. 1840 (2).

(ll Pienre de Savoisy, ,ucce~seUI' de Gontier de Baigneux, était le 7,8~ évêque du Mans. LI fut nommé à l'évêché de Beauvais en 1~J98 (Pesche, Chronologie, p. LII-LITI).

('2) V. Dom l'iolin = Histaire de l'Église du Jfarzs, t. V, p. `?li~?.î9 Entrée de François de Luxl~mbourg, évêque du 9lans et baron de Touvoie, en la ville et église du Mans, le samedi 1" mai 1507. (fircliives municipales du Mans, no 888).


CJIRONIQUE

Depuis la note publiée clans notrc dernière cbrunique, l'attention s'est portée de plus (211 plus sur l'importante question du classement lIes monuments historiques de notre département.

La nouvelle Commission des sites ct monuments pittoresiluea s'est réunil' pour la première fois u la Préfedurc lu yendredi 16 uovembre, et la Commission des monuments hi5turidues le lundi suivant, 19 no\"embre. L'une et l'autre se sunt empressées d'adoldcr un neu de 111. le sénateur tl'Estoul'l1elles teudant à faire comprendre aux communes rurale~ tout l'avantage qu'elles unt, etu point de vue même de leurs intérêts économic¡ue, il hrésenteu aux tuuriatea et aux étrangers des édifices ou des ol¡jet, d'art bien conservés et susceptibles d'attirer leurs vi:ites. De soii cùte, le Cumité départemental du l'oori~a~-Clnb continue arec la plus louaLle persé\'l~rance de ses stalistiqUl's monumentales et pittoresques.

En ce qui l'oncenw spucialenmnt les efTurts de notre Société, nous a\'ons eu la "atisfaction dc qu'ils ne bissaient pas l'opinion inrlilTl"L"ente. Si les propriétaires de l'église de ChÙteau-I'Hermitêlge 1'lioiiiieut- d'cn assurer seuls la les coiiseils municipaux de Pirmil et dc Saint-Jean-tlea-Ecl~elle; ont pris des déliliéralions en vue. d'appuycr les propositions de classement, et des demandes instantes nous ont été adressées eu faveur des églises de Nugent-le-Bernard et de Sarcé.

Une revue. locale a trou\"é, eulin, que notre liste n'était pas assez longue et lui a ajouté d'un seul coup trente-neuf


autres églises Nous nous bornerons à faire remarquer que nos premières propositions n'avaient nullement pour but de viser tous les édifices qui méritent d'être classés dans la Sarthe, mais seulem:;nt une première série, arrêtée de concert avec M. farchitecte en chef des monuments historiques et M. P. Vérité. En demandant lt la fois le classement de soixante-six: édifices on aurait assurément chances de ne pas l'obtenir, et il semble plus rationnel de procéder par séries.

Dès maintenant, nous en préparons une deuxième, et mème nous appuierons bien volontiers la nouvelle liste indiquée, sous la résen'e de rectifier les erreurs rru'elle présente en demandant le classement d'édifices déjà c\tssès comme l'église de Vivoill, et en plaçant dans l'arrondisseme.ut de Saint-Calais une partie des églises de l'aLTondiss8ment de liainers. R. T.

Lcc Toier Orbri~adelle dit Vlctns. Les étymologies furent de tous temps le sujet de bien des controverses, où les plus savants ont souvent échoué, entrainés par trop d'imagination ou par des cléductiollS fantaisistes. Le nom de la tour Orbrindelle de l'enceinte du Mans n'a pas échappé il cette curiosité. Le Corvaisier de COUl'teilles fut un des premiers historiens connus à l'roposer une solution que nous avons toujours estimée plus poétique que raisonnée.

D'après lui Guillaume-le-Conquérant, après la prise du Mans, voulant constru.re un donjon pour assurer sa conlluète, aurait chargé de cette cnuvre « une dame anglaise, veufve d'un seigneur normand, fort versée au mestier de la guerre et dans l'art des fortifications, laquelle s'appelait Orberindelle, qui depuis a laissé son nom au clongeon de cette forteresse qu'elle avait fait bastir » (1).

(9) Histoire des Evesqi<es d~e Vlan.s.


Pesche (1) et bien d'autres auteurs, après lui, ont répété cette version. L'abbé Voisin (2) fut un des premiers à critiquer cette étymologie. s'appuyant sur ce que la cité de Châlon-surS.:tÓne, qui possédait des remparts semblables il ceux du Mans, avait été surnommée l'0~·bandale par les romanciers. Nous-même dans une étude sur la tour Orbrindelle et le Mont-Barbet au Mans (3), avions observé que l'enceinte d'Auxerre avait aussi possédé une tour dit même nom. Aujourd'hui la légende donnée par Le Corvaisier ne peut plus être acceptée. 11I. Blanchet, dans une communication il la Société des Antiquaires de France (4) vient de prouver que non seulement Chfllon-sur-SaÓne et Auxerre possédaient une tour Orbrindelle comme Le Mans, mais encore que les murs romains de Sens portèrent le nom d'Orbandelle. Dans les chansons de geste ce nom d'Orbendelle est souvent cité, même suivi de la qualification de ville sarrasine, et cette dernièl'0 qualification est également attribuée aux enceintes antiques de Senlis, de Beauvais, de No5·on, de Boulogne-sur-Mer, de Poitiers, de Vannes, de Nantes, du Mans. M. Blanchet pense que ce rapprochement pourra servir il éclairer la fluestion; son ouvrage sur les enceintes gallo-romaines, qui doit paraître prochainement, nous dunnura probablement une solution définitive. En tous cas, dès aujourd'hui, il nous faut renoncer à la légende de la dame Orbrindelle pour Le Mans. Ce nom que l'on pouvait croire, d'après Le Corvaisier, rappeler une individualité locale, doit être classé maintenant parmi les termes généi-alix qui désignaient, au moyen-fige, les fortifications d'un méme type dans différents pays.

GABRIEL FLEURY.

(1 ) Dict. de la Sanlhe, t. 1. Précis historique.

~21 1x blans à tous ses ciyes, p. 3i8.

ni ficcve hist. et arcli. dv Vfaine, t. p. 137 et suivantes. (4) Troisième trimestre, HK~), p. 210 et suivantes.


TABLE DES MATIÈRES DU 501.1NTIÈTIE VOLl1l\lE

t~:l~e9.

Les Possessions des abbayes mancelles et angevines en Angleterre, d'après le Dor~aesday

Book, par Dom Léon Guilloreau. 5 Le Culte public à Arizage avant 1789 par M. le chanoine Louis Froger. -)4 Le Traité de l'Indult du Parlement de Paris, de Claude Regnauldin, procureur-général

au Grand Conseil (Hi32-'1675), (soite et fi~aJ,

par Dom Paul Renaudin prieur de l'abbaye

de Saint l4a.ur. 38 La première visite paétorale de Mgr F.-G. de J oufIroy Gonssans, 17 78, pur 1\1. l'abb~

Louis Calendini. 63 Le dialJle de Montaigu (Mayenne), par 112. Robert Triger. 78 Un académicien manceau: Le comte de Tressan, par M. Marc Parker. 07,2l12 La première visite pastorale de Mgr de JoufIroy.Gonssans, 11 Beaumont-Ie- Vicomte en 1778,

par M. l'abbé Besnard curé doyen de

Beaumont. 1:34 Daillon et Talhouët, une alliance peu connue, par M. le docteur Candé. 1M3 Thorigné féodal (sz<ite!, par M. l'abbé Denis. 152


Statuts de la !Confrérie du Saint-Sacrement

d'Écommoy (1673), par M. l'abbé Calendini. 180 Excursion archéoloôique, du 5 juillet 1906, de

Sainte-Suzanne, É\TOn et Jublains.. 191 Les seigneurs de Sainte-Suzanne, par M. le

marquis de Bcauchesne. 213 La chanson de la mariée, par M, le docteur

F. Jouin. 244 Les origines mancelles de Dangeau, ~l propos

d'un livre récent, par NI. Paul bfautouchet. 253 Entrée au Mans de Claude d'Angenties, évêque

du Mans, le 2 avril 1528, publié par

VI. l'abbé Brière `!83 CHRONIQUES El' LIVRES NOUVEAUX

Nécrologie; S. E. le cardinal Labouré le

comte de Gastines; MM. Chédeau et Appert;

M. le duc de Broglie 1\1. Griffaton. 85,187,307 Souvenir à nf. Louis Brière. 86 Excursion archéologique du 5 juillet. 87, '188 Au conseil municipal du Mans. 87 Réception, à Saint-Benoît, d'une nouvelle

relique de sainte Scholastique. 88 Rétablissement à Fresnay de la messe de la

saint Bonaventure. 88 Une lanterne de bronze de l'époque païenne. 89 La famille des Xaintrailles, dans le Maine. 89 Publications récentes de M. Chardon. 90 La llfa~e~a~ae réi~ol2<tionnair·e, par M. le docteur

Delaunay. 91 Épisode de la Guerre de trente ans, Le ca~·di~zal

de la Valette, par le vicomte de Noailles. 92 M. Édouard Piette. 95


Admission de nouveaux membres. 186 Classement des édifices religieux. -188, 307 Les seig~zeu~~s de Courceriey~s, par M. d'Achon. 190 Il y a ce~at ans, par M. le vicaire général

Dumaine. 191 La Tour Orbrindelle du Mans. 308 PLANCHES ET GRAVURES

Portrait du comte de Irressan. 97 Sainte-Suzanne (vue générale) 193 (château de Fouquet de la Varenne, 1VII~

siècle. 237 Sainte-Suzanne (d'aprèE, Gaignières). 239 La chanson de la mariée. 251

Mis de Beauchesne. 213 Besnard. 134 Brière. 2¡.J3 L. Calendini. 65, 180 Dr Candé. 146 Denis. 152 G. Fleury. 308

NOMS D'AUTEURS

~11~. mm.

L. Froger. 24 Dom L. Guilloreau. 5 F. Jouin. 244 P. Mautouchet. 253 iM. Parker. 97, 262 P. Renaudin. 38 R. Triger. 78, 92,186,307

Le Géra~at G. FLEURY.

MAMERS. 131PRIMERIE FLEURY. 1906


\11)IL;I~ 1 \il'],[ \1 1 1 1 I I.I 1 1 1~1I,llj.