Analyse. Le « Dandy de muraille sur fond bleu » du peintre Gaston Chaissac... |
Peint en 1948, le « Dandy de muraille sur fond bleu » fait partie d’une collection de personnages composés d’objets du quotidien, une source d’inspiration chère à Gaston Chaissac.
 Cher Dubuffet, […] dans ma nouvelle série de dessins je m’inspire d’objets et j’ai obtenu : Mr Ciseaux, Mme Cruche…Â
Ainsi est né, d’une variation autour des ciseaux, le « Dandy de muraille sur fond bleu ». Pour Christian Berst, directeur de la Galerie de l’art Brut (Paris), cette peinture réunit plusieurs éléments caractéristiques de l’œuvre de Gaston Chaissac : les cernes noirs, les couleurs vives, et surtout ces ciseaux, qui forment ici les pieds et les jambes et témoignent de l’intérêt que portait le peintre aux objets du quotidien.
Art brut ou art naïf ?
 Chaissac est certes très libre, mais moins qu’à d’autres époques, souligne Christian Berst. Il atteindra une forme d’expression figurative et abstraite beaucoup plus transgressive qu’à ce moment-là où il fait davantage appel à une imagerie populaire ou naïve.Â
De fait, ce type d’œuvre et de personnages particulièrement figuratifs relève plus explicitement de l’art naïf que de l’art brut – une assimilation qui n’est pas franchement du goût de l’artiste : Il y a une sorte d’excommunication de Chaissac de la part du Dubuffet, qui l’avait d’abord assimilé à l’art brut, avant de se raviser.Â
En effet, certains codes, notamment le formalisme utilisé par Gaston Chaissac relèvent spécifiquement de l’art naïf et de cette  infantilité assuméeÂ
qui ne peut qu’être l’œuvre d’un adulte. Les cernes noirs peuvent également s’apparenter à quelques pratiques enfantines : les lignes font office de limite, de séparation et rendent en un sens les choses plus claires et compréhensibles.  Avec ce type d’art, on essaie de retrouver une forme de joliesse, explique Christian Berst. Le personnage du Dandy est mélancolique, ce n’est pas une Å“uvre joyeuse, malgré les couleurs franches et affirmées. On y retrouve des codes qui réfèrent naturellement à l’art naïf, notamment à celui des pays de l’Est, de la Croatie, de l’ex-Yougoslavie.Â
Le « dandy populaire »
Souvent assimilé à une figure Chaplinesque du fait de son chapeau melon et de son parapluie (c’était pourtant une canne !), le « Dandy de muraille sur fond bleu » fait l’objet de multiples interprétations. Mais pour Christian Berst, il s’agirait plus simplement d’une référence à Benjamin Péret, le poète surréaliste :  Quand il avait rendu visite à Chaissac à la fin des années 1940 ou 1950, Péret l’avait traité de Dandy populaire !Â
Une définition qui, selon quelques amis, résume avec justesse sa personnalité si particulière…