Suspicion - The Alfred Hitchcock Hour Saison 3
1. RETURN OF VERGE LIKENS Date de diffusion : 05 octobre 1964 Auteur : James Bridges, d’après une nouvelle de Davis Grubb Réalisateur : Arnold Laven Résumé : Le cacique d’une petite ville de l’Amérique rurale tue un homme dont il guignait les terres. Le shérif à ses ordres fait passer l’affaire pour de la légitime défense. Verge Likens, fils ainé de la victime, confie la ferme familiale à son cadet simplet et quitte la ville en déclarant qu’il va suivre des études. En réalité, il ourdit une vengeance en forme de crime parfait. Critique : Bien qu’il se soit également adonné au Fantastique (ses nouvelles alimentent aussi bien The Alfred hitchcock Hour que The Night Gallery de Rod Serling), Davis Grubb demeure surtout remémoré pour ses thrillers particulièrement angoissants, où il met le plus souvent en scène une Amérique profonde violente, aux hypocrites mœurs puritaines. Son bestseller La Nuit du Chasseur fut ainsi adapté avec retentissement au cinéma, en 1955. Ici, l’anthologie sélectionne judicieusement une nouvelle mettant particulièrement en exergue ces deux fondements de l’œuvre de Grubb. Toute la longue partie succédant au meurtre initial, filmé avec une véracité brute, dépeint ainsi une société seulement civilisée en façade, en fait à peine sortie de la violence de l’ouest sauvage. Ayant le shérif et les notables dans sa main, le cacique et ses hommes de main font régner leur férule sur la petite, avec la lâche complicité passive des habitants. La dénonciation sociale se montre éloquente, tandis que le suspense s’installe quant à ce que peut bien mijoter Verge (excellent Peter Fonda). La séquence finale vire au thriller horrifique, avec une scène non seulement électrique, mais aussi emboitant parfaitement les différentes pièces du puzzle. La mise en scène d’Arnold Leven se montre aussi efficace qu’imaginative. L’épisode marque réellement les esprits, d’autant que cette fois Hitchcock a le bon goût de ne pas venir contredire le crime parfait lors de son speech final. Anecdotes :
2. CHANGE OF ADDRESS Date de diffusion : 12 octobre 1964 Auteur : Morton S. Fine et David Friedkin, d’après une histoire d’Andrew Benedict Réalisateur : David Friedkin Résumé : Keith et Elsa forment un couple battant de l’aile. Afin de sauver leur mariage, ils déménagent et changent totalement d’environnement en s’installant dans une maison isolée de Malibu, proche de l’océan. Mais Elsa déteste l’endroit, ce qui la rend très irritable, tandis que Keith est sensible à la beauté d’une jeune surfeuse des environs. Bientôt celui-ci creuse une tranchée dans la cave, affirmant vouloir en drainer l’humidité. Critique : Change of Adress souffre d’un manque certain de changement dans le sujet ; En effet il s’agit d’une énième variation, ne brillant guère par son originalité, autour du thème du meurtre conjugal, soit le sujet largement le plus représenté au sein The Alfred Hitchcock Hour. Cela se ressent d’autant plus fortement que le récit se centre sur un autre cliché, celui du cadavre de l’épouse à enterrer dans la cave. De fait limitée essentiellement à ces figures imposées, l’intrigue manque de substance pour pouvoir maintenir l’intérêt tout au long du format long de l’anthologie. Il en découle un style redondant de narration, encore souligné par quelques scènes relevant du pur remplissage, telles les scènes de danse, même si elles se situent efficacement l’épisode dans son époque. Même la conclusion ne délivre pas le twist attendu, tant la chute se voit largement annoncée par les évènements précédents. Le récit tente d’utiliser le temps disponible pour dépeindre avec force détail les motivations des deux époux (solitude aigrie de la femme au foyer et refus de vieillir d’un vieux beau), mais avoir réparti d’emblée clairement les rôles entre gentille et méchant limite l’intérêt psychologique de l’entreprise. Cette tentative permet au moins de mettre en valeur la qualité de l’interprétation, seul réel atout de opus, avec un intéressant travail de production. Change of Adress demeure en effet l’un des épisodes à jusqu’ici comporter le plus de scènes en extérieur, ce qui met joliment en avant la douceur de vivre des plages de Malibu durant les années 60. Anecdotes :
3. WATER'S EDGE Date de diffusion : 19 octobre 1964 Auteur : Alfred Hayes, d’après une nouvelle de Robert Bloch Réalisateur : Bernard Girard Résumé : Le voisin de cellule du bandit Rusty Krause est sur le pont de mourir de pneumonie. Il lui révèle que le butin de son vol repose avec son ancien complice. Une fois sorti de prison rusty part à la chasse au trésor avec la fiancée du défunt, Helen. Tous deux découvrent l’argent dans une bicoque abandonné, située près d’un lac et remplie de rats. Ils se combattent alors pour la possession du magot, avec des conséquences abominables. Critique : L’épisode se montre inégal, avec deux parties relevant d’un intérêt fortement contrasté. L’e récit commence sur un tempo lent, avec des scènes de confessions rocambolesques en prison d’un grand classicisme (on pourrait faire remonter ce type d’histoire jusqu’à Edmond Dantès et l’abbé Faria). Par la suite, la chasse au trésor n’intéresse clairement pas l’auteur en tant que sujet. Cela peut tout à fait se comprendre, mais alors il aurait mieux fallut l’abréger plutôt que d’aligner les indices naïfs et les rebondissements fabriqués. Le récit revêt un tout éclat à mi-parcours, avec l’entrée en scène de la maison abandonnée et de ses habitants : l’épisode est clairement à déconseiller aux spectateurs souffrant de musophobie ! Sans que l’on puisse absolument parler de Gore, la fin dépasse en choc horrifique tout ce que l’anthologie a pu proposer jusqu’ici ! On y retrouve pleinement l’empreinte de l’esprit profondément macabre de Robert Bloch. Une conclusion tout à fait hors normes pour un Network de l’époque, en fait guère éloignée de ce que montrera Willard en 1971. Habilement l’abomination morale rejoint la physique, avec deux protagonistes dévorés par l’avidité, sinistres jusqu’au vertige. Cassavetes apparaît pleinement dans son emploi avec ce rôle ténébreux, tandis qu’Ann Sothern crée la sensation, loin des rôles comiques dans lesquels elle brilla durant les années 40. Anecdotes :
4. THE LIFE WORK OF JUAN DIAZ Date de diffusion : 26 octobre 1964 Auteur : Ray Bradbury Réalisateur : Norman Lloyd Résumé : Un mexicain pauvre, Juan Diaz, loue une tombe pour deux ans et avertit sa femme de ne pas se laisser avoir par le malhonnête propriétaire du cimetière. Il décède ensuite rapidement d’une maladie. Après une année le propriétaire exige de l’argent, sinon la dépouille sera mise à la fosse commune. L’épouse s’empare du cadavre momifié et entreprend d’en faire une attraction touristique, afin de pouvoir nourrir ses enfants. Ulcéré, le propriétaire décide de faire appel à la police. Critique : Le futur grand auteur Ray Bradbury revint extrêmement marqué d’un voyage de jeunesse effectué au Mexique. En effet sa vive imagination fut stimulée par la vision macabre des Momies de Guanajuato. Lors d’une grande épidémie de choléra survenue en 1833, les cadavres enterrés dans une catacombe furent momifiés du fait des propriétés asséchantes du lieu. Leur redécouverte en fit une attraction touristique, les dépouilles dont les pauvres familles ne pouvaient s’acquitter d’une taxe locale étant exhumées à cette fin. La pratique fut interdite en 1958. A partir de cette péripétie, Bradbury tisse une histoire où s’exprime sa fibre sociale coutumier, avec une condamnation de l’avidité humaine, faisant qu’un pauvre vaut plus mort que vivant. A travers le portrait de l’épouse se révèle également une histoire d’amour aussi forte que singulière, où une famille s’attache à ce que le défunt reste parmi elle et y remplisse son rôle de soutien, malgré les vicissitudes de la vie. Malheureusement Bradbury adapta lui-même sa nouvelle initiale et il s’avère clairement peu coutumier du langage télévisuel. Le rythme s’avère très lent et les dialogues résultent trop édifiants et pas assez mordants pour réellement convaincre. Très démonstratif, l’auteur n’évite pas non plus certains clichés usuels à propos du Mexique. Néanmoins cette maladresse se voit en grande partie par la qualité de l’interprétation et, davantage encore, par l’excellente mise en scène de Norman Lloyd. Même créé en studio, le village mexicain donne ainsi l’impression d’être réel. Les images des momies et de la catacombe exhalent une macabre étrangeté, également fort bien filmée et apportant tout un cachet supplémentaire à l’épisode. Le noir et blanc convient parfaitement à cette ambiance, grâce à une photographie superbement maîtrisée. La musique fait également l’objet d’un soin particulier. Anecdotes :
5. SEE THE MONKEY DANCE Date de diffusion : 09 novembre 1964 Auteur : Lewis Davidson Réalisateur : Joseph M. Newman Résumé : George voyage en train pour passer le week-end avec sa petite amie, dans sa maison de campagne. Il est abordé par un inconnu lui déclarant tout savoir de cette relation et être le mari de la jeune femme. L’homme se montre menaçant et tente d’effrayer George en creusant une tombe dans le jardin de celui-ci. Lors d’une confrontation, il s’avère que les deux hommes sont manipulés par la femme, qui souhaite qu’ils s’entre-tuent. L’inconnu admet alors n’être en fait qu’un autre de ses amants et conseille à George d’assassiner sa maîtresse. Mais la vérité est encore différente... Critique : L’histoire entend se positionner en thriller, en développant la narration d’une complexe manipulation. Le suspense se développe autour de diverses questions s’entrecroisant. Qui est au juste le mystérieux inconnu ? Le complot va-t-il réussir ? Quel est son but ultime ? Une situation évoquant effectivement le cinéma d’Alfred Hitchcock, d’autant que la rencontre impromptue dans le train effectue comme un lointain clin d’œil à L'Inconnu du Nord-Express. Le scénario soigne son versant psychologique, détaillant comme l’inconnu manœuvre George, d’abord en suscitant la peur puis la dissipant, le soulagement lors ressenti favorisant la connivence, puis la complicité (un schéma bien connu des émissions de caméra invisible). Malheureusement cette intéressante situation ne se concrétise que médiocrement. L’histoire résulte très statique, avec une mise en scène échouant totalement à électriser les nombreuses scènes de dialogues entre l’inconnu et George. La narration ne sème aucun indice ludique permettant au spectateur de jouer au détective et de tenter de deviner le pot aux roses. Elle préfère tout parier sur la surprise finale, ce qui ne représente pas forcément le meilleur choix dans le cadre du format long des épisodes de l’anthologie. Cela se ressent d’autant plus fortement que la chute, certes appréciable, paraît loin d’être a plus retentissante de The Alfred Hitchcock Hour. Demeure une interprétation convaincante, même si légèrement théâtrale, et le charme certain de Patricia Medina. Anecdotes :
6. LONELY PLACE Date de diffusion : 16 novembre 1964 Auteur : Francis Gwaltney Réalisateur : Harvey Hart Résumé : Un couple de cultivateurs de pêches vit chichement de leur exploitation très isolée. Afin de gagner plus d’argent, le fermier embauche un vagabond, qu’il entend bien exploiter. Mais l’homme s’avère agressif envers l’épouse, qu’il ne cesse de tourmenter de manière toujours plus cruelle et obsessionnelle. Le mari demeure indifférent, davantage sensible aux quelques dollars de plus de gagnés. Alors que la situation devient insupportable, la jeune épouse s’interroge sur la vraie personnalité de son mari. Critique : Le retentissant succès de cet épisode tout à fait remarquable repose sur plusieurs atouts. Il nous fait ainsi découvrir une Californie pauvre et rurale, bien moins connue que celle des grandes villes des rivages du Pacifique ou que les rouages de l’Usine des rêves. Bien loin du rêve californien, la vie apparaît ici très âpre, cette vision à la Steinbeck apportant un cadre déjà sombre à la tragédie se déroulant. Celle-ci s’appuie sur le ressort dramatique entre tous que constitue la solitude, celle du couple au sein de son exploitation reculée, mais aussi de chacun de ses membres entre qui l’incommunicabilité semble avoir été toujours présente. La crise signifiée par la présence du vagabond et l’indifférence du mari est ressentie avec force comme une révélation plutôt qu’un bouleversement. La mise en scène intègre fort efficacement la dimension théâtrale du récit en se conformant au mieux la toujours intense triple unité d’action de temps et de lieu. La caméra souligne également avec intelligence l’excellent jeu des comédiens, à commencer par une bouleversante Teresa Wright. Le scénario revêt rapidement la forme de la chronique d’une mort annoncée, mais avec un saisissant retournement de situation quand sonne le glas. La narration s’offre même le luxe d’un dilemme moral lors de sa conclusion, dont elle laisse le spectateur être le juge : un meurtre peut-il se justifier dès lors que l’on est acculé, mais sans se situer dans le strict cadre de la légitime défense ? Une fin savoureusement ambivalente, mais battue une nouvelle fois en brèche par un Hitchcock toujours gardien de l’orthodoxie d’un Network familial, sous un humour au simple vernis d’irrévérence. Anecdotes :
7. THE MCGREGOR AFFAIR Date de diffusion : 23 novembre 1964 Auteur : David Friedkin Réalisateur : David Friedkin Résumé : A Edinburgh, en 1827, John McGregor travaille dur afin de subvenir aux besoins de sa femme Aggie, une ivrogne parfaitement désagréable. Il songe régulièrement à assassiner celle-ci, mais ne parvient pas à trouver un moyen sûr d’agir. McGregor sert de transporteur aux sinistres Burke et Hare, qui livrent des corps secrètement aux facultés de médecine. McGregor comprend un jour que tous les cadavres ne proviennent pas des cimetières, mais qu’ils sont aussi le produit d’assassinats. Il va alors avoir une idée. Critique : En propulsant l’action au sien de l’Ecosse du XIXème siècle The McGregor Affair apporte une originalité bienvenue à une anthologie se déroulant jusqu’ici essentiellement dans son Amérique contemporaine. De fait, l’opus impulse déjà un mouvement voyant The Alfred Hitchcock Hour explorer de nouvelles voies lors de son ultime saison, entre étrange et Science-fiction. De plus, le déplacement temporel s’avère une vraie réussite grâce à une reconstitution puisant pleinement dans le savoir-faire en la matière des studios hollywoodiens, également grâce à une superbe et évocatrice musique d’ambiance. Dans la même veine que les voyages temporels menés depuis l’année précédente par le Docteur sur la BBC, cette excursion dans le passé permet en outre de découvrir une véritable péripétie historique, le duo Hare / Burke ayant réellement existé, fournissant en cadavres à l’origine plus que douteuse les cours d’anatomie de l’innocent et digne Dr. Knox (rien à voir avec Scrubs !). C’est là où résident à la fois l’intérêt et la limite de l’intrigue. En effet l’anecdote est alors passée depuis longtemps dans la culture populaire anglo-saxonne, aussi bien britannique qu’américaine, et le récit n’apportera pas grand-chose de neuf à un sujet déjà maintes fois vu au cinéma et à la télévision (pour le public français cela signifiera par contre une piquante découverte). Le sujet supplémentaire autour du simplet McGregor et de sa monstrueuse femme apparaît en effet trop ténu, avec de plus une chute très prévisible. Si ce segment résulte trop bavard (avec notamment le protagoniste énumérant longuement les divers moyens d’occire son épouse), il peut néanmoins compter sur la faconde de comédiens n’hésitant pas à en faire joyeusement des tonnes en matière d’accent écossais pittoresque. Un épisode original au sein de l’anthologie et au ton joyeusement macabre, même si le récit s’étire trop. Anecdotes :
8. MISADVENTURE Date de diffusion : 7 décembre 1964 Auteur : Lewis Davidson Réalisateur : Joseph M. Newman Résumé : Alors que son mari vient de partir à son travail, une femme attend l’arrivée de son amant. Or l’employé du gaz chargé de relever les compteurs se présente de matière inattendue à sa porte. A peine est-il entré que l’homme exige de prendre une douche, affirmant souffrir d’une attaque de malaria ! Surprise, la femme accepte mais va vite comprendre que son visiteur n’est pas du tout ce qu’il prétend être. Que cherche-t-il en réalité ? Critique : L’épisode constitue un thriller entendant jouer la carte de l’étrange et du mystère. Un choix ambitieux qui nécessite un scénario maîtrisé, or c’est précisément là que le bas blesse. En effet le récit peine tout du long à se remettre de l’incongruité de son lancement, tant l’on peine à croire que l’épouse ait gobé cette ridicule histoire de malaria et de douche. Ce manque de crédibilité se retrouve dans l’enchaînement des diverses péripéties, empêchant toute réelle intensité de s’installer. On ressent le sentiment de se trouver face à un exercice de style tournant à vide, malgré la présence d’une excellente Lola Albright à qui l’on doit le seul intérêt subsistant de l’entreprise, malgré un personnage passablement artificiel. Le reste de la distribution se montre en effet bien davantage inégal. Le vague suspense relatif à l’action encours et le twist final ne suffisent pas à contrebalancer le manque de substance d’un ensemble totalement irréaliste. Anecdotes :
Date de diffusion : 14 décembre 1964 Auteur : Arthur A. Ross Réalisateur : Harvey Hart Résumé : Une épidémie de choléra de choléra faisant rage dans la jungle hindoue, un couple de missionnaires, John et Lucy Sprague, vient en renforcer un autre, Thomas et Mary Fitzgibbons, qui gérant un établissement médical. Mary considère avec hostilité les nouveaux venus, les considérant comme des rivaux. Quand elle s’imagine que son mari se rapproche de Lucy et se rend dans la chambre de cette dernière, un scalpel à la main. Absent des lieux, John apprend que sa femme est morte du choléra. Méfiant, il demande à ce que le cercueil soit ouvert. Critique : Triumph représente un très bel épisode d’ambiance. Il reconstitue à merveille l’environnement oppressant de l’étouffante jungle indienne. Le savoir-faire des studios répond une nouvelle fois à l’appel. Quelques séquences visuellement fortes apparaissent également au fil du récit, notamment l’excursion en bateau de Thomas et Lucy. Cette grande qualité du travail de production ne constitue pas une performance gratuite. En effet il recrée à la perfection l’un des décors chers à Agatha Christie et Conan Doyle, celui des contrées hostiles de l’Empire, Soit le cadre idéal pour le Whodunit à l’anglaise s’y déroulant, d’autant que l’atmosphère poisseuse exacerbe l’hostilité s’installant entre les personnages antagonistes. Malheureusement, malgré des personnages agréablement classiques et fort bien interprétés, le Whodunit ne tient pas toutes ses promesses initiales. La faute en revient à un scénario insuffisamment maîtrisé, débouchant sur une conclusion trop soudainement accélérée. Le récit comporte ainsi plsuieurs lacunes (comment John a-t-il pu ne pas reconnaître le corps présent dans le cercueil ?). Un Whodunnit doit manifester une grande clarté concernant l’identité du coupable, sa motivation et son modus operandi, autant d’éléments que l’épisode laisse par trop dans le flou. Au spectateur de deviner, alors qu’il ne dispose pas d’assez d’éléments pour connaître une certitude. Anecdotes :
10. MEMO FROM PURGATORY Date de diffusion : 21 décembre 1964 Auteur : Harlan Ellison Réalisateur : Joseph Pevney Résumé : Jeune écrivain, Jay désire écrire un livre sur les gangs de jeunes à New York. Afin d’en trouver le matériel, il entreprend de devenir membre d’un gang important, dirigé par Tiger. Au fil des épreuves d’admission, il gagne le respect et l’amitié de Tiger, ainsi que l’amour d’une groupie du gang, mais aussi la haine du bras droit du chef. La situation va déboucher sur un drame. Critique : Harlan Ellison reste avant tout connu comme l’une des grandes plumes de la Science-fiction américaine, avec une œuvre notamment peuplée de saisissantes visions surréalistes. Toutefois, avant de connaître un sursaut salvateur, il connut une jeunesse aventureuse et fugueuse, l’amenant à exercer de nombreux métiers mais aussi à fréquenter ces gangs new-yorkais du début des années 50, composés de garçons à la dérive. Une expérience qu’il retranscrira dans un ensemble de nouvelles largement autobiographiques, Memos from Purgatory, publié en 1961. L’anthologie a l’excellente idée de confier l’adaptation du texte au propre Harlan Ellison (qui travailla régulièrement pour la télévision, comme nombre d’écrivains de l’époque). Cela apporte au scénario une formidable valeur documentaire. En effet, aussi amendé et édulcoré soit-elle afin de satisfaire aux exigences du diffuseur, l’intrigue se montre étonnamment sombre et violente, avec des personnages restitués dans leur complexité parfois fascinante. Tout ceci sonne autrement plus juste que la version romantique et musicale donnée par West Side Story, dont on retrouvera l’écho jusque dans Le Gendarme à New York ! Cette intensité du récit, aux nombreuses scènes fortes et captivantes, se voit portée par l’excellente interprétation de comédiens encore peu connus. Crevant l’écran, James Caan domine l’ensemble, mais on apprécie également la surprenante prestation de Walter Koenig, dans le rôle d’un chef de gang à l’opposé absolu du futur Chekov de Star Trek ! L’ironie veut que cet épisode si réaliste souffre d’une curieuse impression de déjà-vu. Le héros s’infiltrant dans un gang en gagnant l’amitié du chef mais aussi en éveillant la méfiance du bras droit constitue en effet l’un des poncifs des séries d’aventures des Sixties, mais la conclusion s’en distingue par sa résonnance tragique. Anecdotes :
11. CONSIDER HER WAYS Date de diffusion : 28 décembre 1964 Auteur : Oscar Millard Réalisateur : Robert Stevens Résumé : Quand le Dr Jane Waverleigh se réveille, elle a la surprise de découvrir qu’elle est alitée dans une maternité et qu’elle est devenue obèse. Confrontée à l’Historienne, Jane découvre progressivement qu’elle s’est trouvée transportée dans un monde post apocalyptique, où seules les femmes ont survécu à une terrible épidémie. Une société totalitaire s’est mise en place où chacune se voit cantonne à rôle précis, elles les abeilles d’une ruche. Janet est une « Mère », inséminée artificiellement et dédie à la reproduction de l’espèce. Mais tout ceci est-il réellement en train d’arriver ? Critique : Le choix de retenir un texte purement de Science-fiction de l’Anglais John Wyndham (Le Jour des Triffides) illustre particulièrement la volonté de l’Anthologie de développer de nouvelles voies en cette ultime saison. Ainsi, en saison sept, Alfred Hitchcock Presents avait par contre choisi une nouvelle policière de cet auteur relevant, Maria. Et de fait l’ambiance étrange du récit, son mystère et ses résonances morales évoquent bien davantage La Quatrième Dimension de Rod Serling. Le scénario ne se contente pas de l’incongruité troublante d’un lancement perçant l’héroïne face à l’incompréhensible, en parfaite concomitance avec le spectateur. A ce procédé toujours efficace vient s’ajouter celui consistant à petit à petit dévoiler les contours d’une dystopie par touches progressives distordant le réel et non pas en la décrivant de manière scolaire. Les discussions entre Jane et l’Historienne (impeccable Gladys Cooper) s’avèrent idéalement profilées pour obtenir cet effet d’imprégnation progressive du cauchemar. L’intrigue s’offre également le luxe de deux twists absolument renversants, à mi-parcours et en conclusion. Clairement si le sujet de l’opus apparaît singulier au sein de l’anthologie, son budget s’inscrit lui dans la normalité et c’est donc avec une grande économie de moyens que le réalisateur vétéran Robert Stevens parvient à créer une authentique atmosphère surréaliste. Le metteur en scène se voit puissamment aidé par les mélodies très évocatrices de Bernard Herrmann, compositeur ayant précisément œuvré pour La Quatrième Dimension. Le jeu bouleversant de Barbara Barrie se voit également efficacement mis en avant, avec une Janet dont l’humanité crève l’écran au sein de cette société robotisée. Bien davantage qu’à l’accoutumée dans The Alfred Hitchcock Hour, Consider Her Ways n’hésite pas à interpeller moralement le spectateur. Bien davantage que l’approche misogyne que pourrait inspirer cette vision d’un monde abominable exclusivement peuplé de femmes le récit développe sans fards les cruelles extrémités engendrées par la lutte pour la survie, poussant le public à se demander si cette dernière mérite réellement l’abdication de notre humanité. Par ailleurs si le moyen de fécondation des « Mères » demeure ici dans le flou, pour le spectateur contemporain il résulte désormais grandement validé par les progrès scientifiques. A sa manière certes particulièrement tranchée, l’opus vient ainsi apporter sa pierre à l’un des grands débats de société actuels. Anecdotes :
12. CRIMSON WITNESS Date de diffusion : 4 janvier 1965 Auteur : David Friedkin Réalisateur : David Friedkin Résumé : L’ingénieur Ernie a pris sa secrétaire comme maîtresse, finançant leur romance par des malversations. Un beau jour Ernie apprend qu’il est rétrogradé et remplacé par son propre frère Farnum. Son épouse et sa maîtresse lui annoncent également le quitter pour Farnum, jugé irrésistible. Ernie touche ensuite le fond quand Farnum découvre ses entourloupes. Dès lors, il projette de se venger en ourdissant l’assassinat de son frère. Critique : Cet épisode essentiellement humoristique montre certes l’épaisseur d’une bulle de savon et souffre de plus d’un manque d’ambition dans sa mise en scène. Celle-ci aurait pu lui insuffler davantage de tonicité, mais l’inventivité nécessaire reste absente. Par contre la narration commence largement cette faiblesse grâce à des moteurs comiques d’une grande efficacité. Le comique de répétition s’instaurant via l’hallucinante succession de catastrophes s’abattant sur le nouveau Job que devient Ernie se montre irrésistible. Le scénario soigne suffisamment ses effets pour que cette avalanche flirte agréablement avec l’absurde, jusqu’à avoiner, sans tout à fait rejoindre, les distorsions du réel chères à La Quatrième Dimension de Rod Serling. La distribution joue également un rôle crucial dans le succès de l’opus. Le contre-emploi de Peter Lawford, membre tonique du Rat-Pack et grand séducteur d’Hollywood, en perdant absolu s’avère délicieux, d’autant que l’acteur joue crânement le jeu, non sans panache. Dans le rôle du crispant et imbuvable Farnum, Roger C. Carmel se montre également excellent, aussi convaincant que son Harry Mudd de Star Trek Classic. Les jolies actrices blondes, épouse et secrétaire, accroissent encore le pétillement de l’épisode. Jusqu’au bout les anthologies d’Alfred Hitchcock auront su retenir des comédiennes aussi belles que talentueuses. L’affaire du meurtre et sa conclusion résultent plus anecdotiques, mais restent efficaces, permettant de rattacher le récit à l’anthologie Anecdotes :
13. WHERE THE WOODBINE TWINETH Date de diffusion : 11 janvier 1965 Auteur : James Bridges Réalisateur : Alf Kjellin Résumé : Quand la petite Eva devient orpheline, elle part vivre chez sa tante Nell, fille d’un capitaine navigant sur le Mississipi. Nell s’avère vite agacée devant la manie d’Eva de parler à des amis invisibles. Cette habitude atteint des sommets quand le capitaine offre Numa, une poupée noire, à sa petite fille. Eva déclare qu’elle et Numa sont désormais inséparables. Un jour Nell, excédée, découvre Eva en train de jouer avec une petite fille noire, qu’elle chasse. Critique : Ce récit fantastique poursuit la diversification des sujets entreprise par l’anthologie durant son dernier segment. Il s’y insère néanmoins avec aisance, le scénario ne basculant ouvertement dans le surnaturel qu’en toute fin de parcours. Jusque-là il s’agit avant tout d’un thriller psychologique, habilement mené autour de l’opposition des caractères de la petite Eva, fuyant son chagrin dans une monde imaginaire, et sa rude et prosaïque tante, ayant à s’occuper seule d’un foyer. S’appuyant sur une magnifique interprétation, L’intrigue développe habilement une crispation grandissante, annonçant un drame à venir. L’environnement du Mississipi apporte également de la saveur à l’ensemble Parallèlement l’Etrange s’insère par petites touches subtiles habilement orchestrées au sein d’une histoire demeurant ancrée dans le réel. L’auteur tente manifestement de jouer de l’ambiguïté de la situation et du suspense quant à savoir si Eva imagine tout ou si le Fantastique va sa donner libre cours. Mais ce ressort-là ne fonctionne guère, l’opus prenant place dans une riche veine de scénarios de poupées animées, notamment ceux développés par Rod Serling pour La Quatrième Dimension (dont Living Doll, avec Telly Savalas). L’ambigüité paraît d’autant moins de mise que la présente narration partage nombre de points communs avec l’épisode The Doll de Night Gallery. Autant dire que la conclusion choc résulte quelque peu éventée. Anecdotes :
14. FINAL PERFORMANCE Date de diffusion : 18 janvier 1965 Auteur : Robert Bloch Réalisateur : John Brahm Résumé : En route vers Hollywood sur une route isolée, Ralph, auteur de scénarios, fait la connaissance de la jeune Rosie. Celle-ci est fiancée au propriétaire de l’hôtel local, Rudolph, lui-même grand nostalgique de sa carrière d’acteur. Rosie déclare à Ralph ne pas vouloir épouser Rudolph et demande à partir avec lui à Hollywood. Le lendemain, alors que Ralph s’apprête à partir, Rosie semble avoir inexplicablement changé d’avis. Critique : Même si elle met un tantinet trop de temps à se mettre réellement en place (le format long demeure bien un défi permanent pour l’anthologie), l’intrigue présente le mérite de pleinement préserver l’impact d’une histoire caractéristique de l’esprit aussi fécond que sinistre de Robert Bloch. Les amateurs des films d’Alfred Hitchcock apprécieront d’ailleurs les nombreuses convergences avec son Psychose (1960) : route déserte, hôtel isolé, tenancier à l’esprit pour le moins déséquilibré, meurtre épouvantable et inattendu d’une jeune femme… Toutes proportions gardées entre cinéma et télévision, le travail de production apparaît également soigné : décors, musiques et costumes s’avèrent de grande qualité, de même que l’interprétation. S’il autorise un nouveau détour apprécié par la Californie rurale, le récit évoque néanmoins avec force l’attractivité exercée par Hollywood et l’empreinte du cinéma sur l’esprit des hommes. Il y a du Z.Z. von Schnerk chez cet hôtelier vivant dans le mirage de son passé cinématographique et dont l’esprit malade entremêle de manière morbide le réel et l’imaginaire, jusqu’à mettre en scène sa destinée et celle de sa jeune compagne. Final Performance se montre très évocateur sur ce point, évoquant à plusieurs reprises cette immense réussite de Chapeau Melon et Bottes de Cuir que constitue Caméra Meurtre. Anecdotes :
15. THANATOS PALACE HOTEL Date de diffusion : 1 février 1965 Auteur : Arthur A. Ross, d’après une nouvelle d’André Maurois Réalisateur : Laslo Benedek Résumé : Dépressif, Norman Manners tente de suicider, mais est sauvé par les pompiers Un certain John Smith l’invite alors à séjourner au Thanatos Palace Hotel. Cette superbe résidence est dédiée aux suicidaires, afin qu’ils puissent se préparer confortablement à leur passage dans l’autre monde, qui survient sans qu’ils en soient avertis et sans souffrance. Norman y fait connaissance avec la belle Ariane, qui s’y trouve depuis six mois. Chacun apporte à l’autre une raison de vivre. Mais qui est exactement Ariane ? Critique : Les prémices de l’épisode séduisent indéniablement, avec cet original concept du Thanatos Palace Hotel, dont l’aspect insolite, sinon étrange, propulse de nouveau l’anthologie du côté de La Quatrième Dimension, une habitude cette saison. L’intéressant décor, très Western, oscille agréablement entre acception mythologique (temple de Thanatos, le Dieu grec de la Mort) et psychanalytique (le récit opposant Eros et Thanatos, à l’instar de Sigmund Freud). Au passage, on se dit que les rencontres entre clients du Thanatos Palace Hotel constitueraient un cadre joyeusement macabre pour ces productions à mi-chemin entre anthologie et série qui connaîtront le succès durant les années 70, comme Fantasy Island ou Love Boat. Malheureusement, après la mise en place réussie du concept, l’intrigue connaît un long surplace, aussi confus qu'ennuyeux, jusqu’à, il est vrai, déboucher sur une mémorable chute. Un format court aurait dans doute davantage convenu à l’épisode. Le personnage central d’Ariane bénéficie bien entendu de la beauté et du grand talent d’Angie Dickinson, mais le scénariste ne sait visiblement pas vraiment quoi faire d’elle, au-delà de son intrigante présence. Le solide Steven Hill, habitué aux rôles d’autorité, éprouve également des difficultés à retranscrire le tempérament suicidaire de Norman. Anecdotes :
16. ONE OF THE FAMILY Date de diffusion : 8 février 1965 Auteur : Oscar Millard, d’après une nouvelle de James Yafee Réalisateur : Joseph Pevney Résumé : Devant prochainement partir en voyage en Europe, un jeune couple fait appel à l’ancienne nounou du mari pour s’occuper de son bébé. Celle-ci donne entièrement satisfaction mais la mère soupçonne bientôt que la nourrice est en fuite après l’empoisonnement d’un autre bébé, drame dont les journaux parlent abondamment. Le mari reste sceptique. Critique : L’épisode bénéficie d’une excellente distribution, notamment grâce à l’actrice austro-américaine Lilia Skala jouant avec beaucoup de naturel une nourrice d’origine allemande. Ce personnage rude, avec son vocabulaire pittoresque, mais aussi certains poncifs liés à l’Allemagne (la discipline, le ton cassant…), permet ainsi d’associer habilement la méfiance envers l’étranger à la peur ancestrale du péril planant sur le berceau, largement exploitée par le scénario. Par ailleurs, tenues et éléments de décor nous indiquent de manière plaisante que la série s’insère désormais totalement dans les années Soixante, loin des premiers opus d’Alfred Hitchcock Présente. Les amateurs de Chapeau Melon s’amuseront d’une certaine ressemblance entre Emma Peel et l’épouse (excellente Kathryn Hays). Malheureusement l’intrigue gâche ces éléments, par paresse. En effet, dans une longue première partie, elle se contente d’aligner les scènes fades, ponctuées d’indices aiguillant la méfiance de la mère, mais ne tentant jamais de créer une tension dramatique allant croissant. La mise en scène apparaît d’ailleurs en phase avec cette atonie, se contentant de filmer platement de longs et répétitifs dialogues. La résolution de l’énigme survient de manière trop anticipée, avant de virer totalement au mélodrame outrancier. Il reste particulièrement dommageable pour le suspense que la mère, jusque-là protagoniste de l’histoire, ne joue aucun rôle dans la résolution de celle-ci, la coupable s’effondrant purement et simplement avec l’excuse tellement pratique de la folie pour justifier l’incohérence. De fait, même la chute manque cruellement d’intensité, ce qui s’avère très pénalisant dans ce type d’anthologie. Anecdotes :
17. AN UNLOCKED WINDOW Date de diffusion : 15 février 1965 Auteur : James Bridges, d’après une nouvelle d’Ethel Lina White Réalisateur : Joseph M. Newman Résumé : La police ne parvient pas à arrêter un serial killer étranglant des infirmières. Deux infirmières, Stella et Betty, veillent sur un patient gravement malade du cœur vivant dans une maison isolée. Lors d’une nuit orageuse, elles reçoivent un menaçant appel téléphonique du tueur. Elles se barricadent, mais Stella oublie de fermer une fenêtre donnant sur la cave. Critique : An Unlocked Window, l’un des épisodes les plus marquants de l’anthologie, s’appuie sur une véritable confluence des talents. On y retrouve ainsi l’un de ses meilleurs metteurs en scène en la personne de Joseph M. Newman (10 épisodes à son actif) ainsi que l’autre pilier de The Alfred Hitchcock Hour que représente James Bridges (16 épisodes). Celui-ci va effectuer un travail d'adaptation efficace et subtil de l’œuvre d’Ethel Lina White, sachant en préserver toute la sourde angoisse, jusqu’à avoisiner non plus le thriller mais bien le récit d’épouvante. Le choix de Dana Wynter pour le rôle clef de Stella s’avère également précieux, tant sa sombre beauté participe toujours efficacement à l’ambiance paranoïaque, que son personnage en soit l’instigateur ou la victime. La musique de Bernard Herrmann vaut une force supplémentaire à ce huis clos quasi onirique. Mais l’apport le plus déterminant demeure sans doute celui de Stanley Cortez. Le directeur de la photographie de La Nuit du Chasseur effectue ici son unique participation à l'anthologie et lui apporte tout son art consommé de l'utilisation des contrastes du noir et blanc afin de créer une atmosphère semi-surréaliste et cauchemardesque. Grâce à lui l’opus se hisse au niveau d’authentique œuvre d’art morbide. La présence de Louise Latham et de l’emblématique manoir gothique de Psychose, ainsi que le style quasiment pré hitchcockien d’Ethel Lina White confère à An Unlocked Window une affinité particulière au maître du Suspense, bien davantage que lors de la majorité des épisodes de l’anthologie. On apprécie une montée implacable du suspense horrifique, similaire à celle du remarquable et très similaire épisode de Chapeau Melon qu’est Ne vous retournez pas. Les frissons seront immanquablement au rendez-vous. Ils seront scandés par la formidable idée de mise en scène que constituent les retours silencieux et terrifiants retours sur la fenêtre fatidique, auxquels Joseph M. Newman et Stanley Cortez confèrent un impact tout particulier. On pourra caractéristiquement comparer l’intensité paroxystique du récit au précédent opus, par contre plat comme une limande, alors qu’il jouait pareillement sur l’idée d’un serial-killer possiblement introduit dans une maison. La chute se révèle également mémorable, elle reste l’une des plus dérangeantes et inattendues de The Alfred Hitchcock Hour. Anecdotes :
Date de diffusion : 22 février 1965 Auteur : Lee Kalcheim, d’après une nouvelle de Stanley Abbott Réalisateur : John Brahm Résumé : La très sensuelle Peg Beale s’éprend du viril et ambitieux nouvel assistant de son époux, fabricant de jouets étant lui-même resté un grand enfant. Peg trame alors un sinistre complot pour se débarrasser de son ennuyeux mari, mais l’issue va s’en révéler aussi sinistre qu’imprévue. Critique : L’épisode aurait certainement été meilleur s’il se situait au sein d’Alfred Hitchcock Presents. En effet le format court d’une demi-heure aurait mieux convenu à cette intrigue, de fait basée avant tout sur sa chute. Pour le reste on se retrouve avec un triangle fatal ultra classique, une situation d’ailleurs déjà maintes fois rencontrées au cours de la présente anthologie et sur laquelle il n’y a guère manière à broder. Tout le premier des deux segments de l’opus se montre ennuyeux, tant l’auteur délaye son récit à profusion, jusqu’à multiplier des allées et venues totalement inutiles à travers les couloirs. Les jouets des années 60 meublent toutefois agréablement les décors. Au lieu d’un marivaudage très convenu, s’il fallait meubler alors il aurait mieux valu se centrer sur la personnalité du mari passionné de jouets, seule véritable originalité de l’épisode et élément clef de la résolution de l’affaire. Ce type de personnage a valu de grands épisodes chez Chapeau Melon (Game) ou chez Le Saint (The Man Who Liked Toys) et l’on apprécie d’en retrouver ici une version américaine, aussi excentrique qu’impitoyable homme d’affaires. Malheureusement l’opus joue insuffisamment la carte de la satire sociale, misant tout sur une chute valant par son côté morbide, mais trop largement prévisible. Demeure une nouvelle superbe prestation d’Anne Francis, dont le talent apporte une surprenante émotion à Peg, personnage par ailleurs enseveli sous les clichés. Anecdotes :
19. WALLY THE BEARD Date de diffusion : 1 mars 1965 Auteur : Arthur A. Ross Réalisateur : James H. Brown Résumé : Walter Mills, informaticien chauve et falot, est quitté par sa fiancée. Il fait alors l’acquisition d’une perruque et d’une barbe, afin de changer de vie. Il devient alors Philip Marshall, yachtman aussi racé que viril, ce qui va améliorer ses relations avec les femmes, mais aussi lui créer d’autres problèmes quand son secret est découvert par un maître chanteur. Critique : Le récit aurait pu aisément basculer dans La Quatrième Dimension, avec un véritable transfert de personnalité et une morale sur le thème de la véritable nature d’une personnalité primant sur la superficialité de l’apparence. D’une manière certes cohérente avec la tonalité de l’anthologie, l’épisode refuse ce choix, ce qui rend malgré tout difficile à croire qu’un homme puisse autant changer par la simple intercession d’artefacts capillaires. En l’occurrence, l’habit fait le moine ! Larry Blyden effectue toutefois une jolie performance d’acteur sur son registre humoristique naturel de la comédie. De fait on s’en tient essentiellement à un registre comique, certes léger mais distrayant. Quelques éléments plus dramatiques viennent cependant apporter de la consistance à cet opus agréablement Sixties (ah, ces ordinateurs à cartes perforées !) et à la chute réussie, mais s’appuyant un peu trop sur les épaules de son interprète principal. Anecdotes :
20. DEATH SCENE Date de diffusion : 8 mars 1965 Auteur : James Bridges Réalisateur : Harvey Hart Résumé : Nicky, fille du célèbre mais vieillissant réalisateur Gavin Revere, tombe amoureuse d’un pauvre mais ambitieux garagiste, Léo. Revere s’oppose à leur mariage, soupçonnant que Léo est intéressé par la fortune qui reviendra à sa famille, il change d’avis quand Léo contracte une importante assurance vie en faveur de Nicky. Toutefois Léo se moque de l’un de ses films, Death Scene, ce qui le fait définitivement refuser le mariage. Mais Léo ne m’entend pas de cette oreille. Critique : L’épisode sait à merveille utiliser le format long de l’anthologie afin de nous emmener dans le Hollywood des célèbres superbes manoirs de Beverly Hills. Cela nous vaut quelques splendides images, mais la visite se teinte rapidement d’amertume. C’est d’abord le cas lors d’une évocation sans fards des criantes inégalités sociales caractérisant la Mecque du Cinéma, concernant aussi bien les revenus que ce mépris de classe se retrouvant jusque chez une radieuse jeune femme comme Nicky. Mais le récit s’imprègne surtout de la mélancolie du temps qui passe. Ces somptueuses mansions furent souvent édifiées durant les années 20 et 30, pour une génération de stars connaissant le déclin et la vieillesse lors des années 60. Ce sentiment crépusculaire s’incarne avec force chez Revere, désormais en fauteuil roulant dans a résidence transformée en musée de sa gloire passée, s’étendant jusqu’au Muet. Ce sentiment d’une Atlantide désormais révolue (avec l’insertion habile d’une télévision criarde) évoquera par moments Caméra meurtre aux amateurs des Avengers, d’autant que les deux récits convergent en fin de parcours. On apprécie d’autant plus que la psychologie des personnages se voit réellement développée que les comédiens les incarnent admirablement. Vera Miles rayonne encore davantage qu’au cinéma tandis qu’un jeune James Farentino apporte du flamboiement à son Rastignac hollywoodien et John Carradine une formidable véracité au metteur en scène en prie aux affres de l’âge et du déclassement. Toute cette dimension humaine n’entrave en rien la mise en place d’un efficace récit à suspense, avec plusieurs scènes forte (la projection, la piscine). Si le tout demeure quelques peu prévisible, l’épisode sait réserver une tonitruante surprise lors d’une chute renversant totalement la table. Anecdotes :
21. THE PHOTOGRAPHER AND THE UNDERTAKER Date de diffusion : 15 mars 1965 Auteur : Alfred Hayes, d’après une nouvelle de James Holding Réalisateur : Alex March Résumé : Dissimulés sous leur couverture respective de photographe et de croquemort, Arthur Mannix et Hiram Price sont en fait des tueurs professionnels. Tous deux travaillent pour la Compagnie, une grande organisation criminelle. Or, pour réduire ses coûts, celle-ci ordonne à chacun de tuer l’autre, avec une promotion à la clef. Cela arrangerait particulièrement Arthur, fiancé à la belle Sylvia, mais devant gagner plus pour pouvoir se marier. Critique : L’opus a la bonne idée de tenter une approche originale, en s’éloignant d’un énième récit de roman noir, pour initialement développer une parodie critique du management dans les grandes entreprises américaines. Le féroce parallèle dressé avec les méthodes cruelles de la Compagnie et celles du service GRH d’une firme se montre ainsi joyeusement goguenard et relevant d’un excellent humour noir. Malheureusement, cette prometteuse piste se voit promptement abandonnée au profit de la relation chargée en poncifs entre le Photographe et Sylvia (superbe Jocelyn Lane) et d’un pseudo duel entre les deux tueurs, traité avec beaucoup de maladresse. En effet le combat apparaît totalement déséquilibré, et donc sans suspense, tant il résulte totalement déséquilibré en faveur du Photographe. Il domine totalement son adversaire et, même si leur ultime confrontation délivre quelques étincelles, elle demeure essentiellement verbeuse et statique, à l’image de l’ensemble de l’épisode. De fait le Photographe est traité comme s’il était le héros récurrent de sa série, à contresens d’une anthologie. De plus le talentueux Jack Cassidy insuffle beaucoup de charme et de suavité au photographe (en plus d’une scène de travestissement assez pesante), là encore en contradiction avec sa nature d’assassin professionnel. Cela conviendrait à un justicier comme Simon Templar, mais la spécificité du Photographe reste sa noirceur morbide, or l’on ne la ressent ici qu’a minima. Anecdotes :
22. THOU STILL UNRAVISHED BRIDE Date de diffusion : 22 mars 1965 Auteur : David Friedkin, d’après une histoire d’Avram Davidson Réalisateur : David Friedkin Résumé : Inspecteur à Scotland Yard, Tommy Bonn fait face à un serial killer étranglant des jeunes femmes avec des bas de soie. Bonn est également sur le point d’épouser Sally Benner, sa fiancée américaine. Mais la jeune femme décide de faire une promenade dans Londres peu de temps avant la cérémonie et se rend dans plusieurs boutiques. Or elle n’apparait pas au mariage et Bonn, inquiet, se lance à sa recherche. Critique : L’épisode souffre d’un certain manque de rythme dans le déroulement des évènements, jusqu’à un dénouement peu stimulant. L’anthologie subit une nouvelle fois son format long, une faiblesse perceptible dès lors que le scénario du jour manque de substance. De fait ce dernier ici où se limite longtemps aux différentes boutiques visitées par Stella, jusqu’à une peu retentissante chute. L’ensemble se suit néanmoins avec plaisir du fait de la plaisante excentricité très british des personnes rencontrées par Sally durant sa promenade. Les amateurs de Chapeau Melon et Bottes de Cuir y seront évidemment particulièrement sensibles ! Le sujet de l’épisode devient dès lors le prétexte dans d’une balade dans le Londres des années 60, moderne ou intemporel, d’autant que tout ceci n’est pas sans évoquer de loin Jack l’Eventreur. La distribution se montre également solide et expérimentée (Alan Napier, toujours excellent). On y remarque deux jeunes comédiens encore peu connus, mais appelés à connaître une belle carrière télévisuelle, Sally Kellerman (la Hot Lips de MASH) et David Carradine (Kung Fu). Anecdotes :
23. COMPLETELY FOOLPROOF Date de diffusion : 29 mars 1965 Auteur : Anthony Terpiloff Réalisateur : Alf Kjellin Résumé : Mari aussi riche qu’infidèle, Joe Brisson se découvre épié par un détective privé. Son épouse Lisa, qui a elle-même un petit ami, désire en effet obtenir un divorce très lucratif. Elle entend en effet obtenir les trois quarts de la fortune de Joe. La situation s’envenime et chaque époux envoie un homme de main assassiner l’autre. Critique : Le mariage, souvent décrit comme négatif, aura décidément été une source d’inspiration inépuisable pour cette anthologie. On assiste à un summum à l’occasion de cet épisode, qui nous vaut comme une version roman noir de La Guerre des Rose. L’ensemble manque certes quel peu de démesure et demeure enserré dans les conventions du genre. Mais on reconnaitra à Completely Foolproof de repousser très loin les limites du sordide. Cela vaut finalement moins pour le couple que pour son entourage, composé d’être veules ou cupides, avec une noirceur apportant une vraie force au récit. Au milieu de ce marécage, le couple fatal montre au moins une vitalité hors du commun dans sa détestation et sa volonté de destruction. L’opus doit d’ailleurs beaucoup à la performance des interprètes, avec un J.D. Cannon solide et ténébreux à souhait, mais aussi et surtout une Patricia Barry totalement déchainée. Grâce à sa prestation, Patricia compose le cœur vivant et authentiquement maléfique du récit, dans la meilleure tradition de la femme fatale. On pourra reprocher sa prévisibilité à la chute de l’histoire, mais elle reste cohérente face à la course à l’abîme irrémédiablement entreprise par ces époux davantage liés par la haine que bien d’autres ne le sont par l’amour. Anecdotes :
24. POWER OF ATTORNEY Date de diffusion: 5 avril 1965 Auteur : James Bridges Réalisateur : Harvey Hart Résumé : Un habile et cynique escroc séduit les femmes esseulées, avant de disparaître après avoir dérobé leurs économies. Il s’en prend à une dame âgée rencontrée dans un avion, et la ruine totalement en gérant frauduleusement sa fortune. Sa victime se suicide, mais son amie et dame de compagnie va ourdir une terrible vengeance. Critique : Certes le thème du vil séducteur n’apparaît en rien original au sein d’une anthologie aux thèmes moins variés que les traitements qu’elle y apporte. De fait l’intrigue apparaît longtemps ultra classique, même si un meurtre vient la pimenter en assombrissant encore davantage son protagoniste. Mais Power of Attorney s’impose en tant que brillant épisode d’acteurs. C’est avant tout le cas grâce à la forte prestation de Richard Johnson, qui rend particulièrement veule et haïssable son personnage d’escroc. Mais pas seulement car ce dernier s’avère lui-même un comédien accompli, sachant incorporer une part de véritable émotion dans son numéro afin de convaincre ses victimes. De ce point de vue, le récit devient comme une allégorie du pouvoir de conviction de l’artiste, pouvant aussi bien émerveiller que duper. La partie féminine de la distribution n’est pas reste pour autant. Les victimes savent rendre palpable leur souffrance intime tandis que la dame de compagnie (interprétée avec une froide crédibilité par Geraldine Fitzgerald) se montre à son tour d’une absolue cruauté quand elle prend le félon à son propre piège. Cette féroce conclusion demeure l’une des plus mémorables de l’anthologie, toute comme sa victime en compose l’une de ses figures les plus sinistres. Anecdotes :
25. THE WORLD'S OLDEST MOTIVE Date de diffusion : 12 avril 1965 Auteur : Lewis Davidson Réalisateur : Harry Morgan Résumé : Un mari souhaite se débarrassera de sa peu séduisante épouse, afin de convoler avec sa jeune maitresse. Il loue les services d’un tueur, mais sa concubine se montre scandalisée en apprenant le complot. Dès lors, l’infortuné mari doit tout faire pour rattraper l’assassin avant qu’il ne passe à exécution. Critique : L’intrigue du jour en revient une énième fois à la thématique du triangle amoureux fatal, tant de fois explorée au cours de l’anthologie et de cette troisième saison, si riche en histoires de mariages fatals. Au moins le traitement présent opte-t-telle clairement pour la comédie, ce qui rend l’end l’ensemble regardable à défaut de vraiment prenant. En effet si le tout distrait, il demeure relativement anodin et prévisible, à l’image d’une conclusion sarcastique mais également moralisante et constituant tout sauf une surprise. Comme souvent dans le cadre de ce programme, la distribution demeure un atout, même si aucun des quatre comédiens principaux ne quitte la zone de confort de son répertoire usuel (le gangster pittoresque pour Robert Loggia, le mari veule pour Henry Jones, la femme fatale pour Linda Lawson, l’épouse peu sexy pour Kathleen Freeman). Assez oubliable en soi, l’épisode évoque en creux une l’usure d’une anthologie à l’univers désormais délimité et aux ressorts usés dès lors qu’un scénario ne se montre pas hors normes. Anecdotes :
26. THE MONKEY'S PAW Date de diffusion : 19 avril 1965 Auteur : Anthony Terpiloff, d’après une nouvelle de W. W. Jacobs Réalisateur : Robert Stevens Résumé : Paul et Anne White se rendent aux Bahamas, où leur fils Howard Participe à une compétition automobile. Sur place, ils rencontrent une bohémienne qui leur procure une patte de singe censée pouvoir satisfaire trois souhaits. Paul va entreprendre d’utiliser l’artefact afin de sauver son entreprise battant de l’aile, mais il va découvrir que chaque souhait réalisé est aux dépends de son fils, de terrible manière. Critique : Cette adaptation Sixties du grand classique de W. W. Jacobs ne convainc guère. Un format court aurait ainsi bien mieux convaincu à un texte lui-même assez court et basé sur le rythme rapide des révélations horrifiques des conséquences inattendues des souhaits effectués. D’ailleurs, dans son essence-même, l’épisode aurait certainement été traité dans La Quatrième Dimension ou Night Gallery, tant le Fantastique pur vu par The Alfred Hitchcock Hour se traduit par des postures outrées jusqu’au ridicule. Afin de meubler ses cinquante minutes le récit a ainsi perpétuellement recours à des dialogues privés de tout impact par leur emphase et à une certaine obsession pour les rivalités féminines (entres amies, entre mère et fiancée, entre vaudou et tradition bohémienne…). La direction d’acteurs est au diapason, conduisant le vétéran Leif Erickson et l’épatante Jane Wyatt (bien connue des Trekkies pour avoir incarné la mère humaine de M. Spock) à cabotiner lourdement. A l’inverse le jeune Lee Majors résulte bien falot, loin de la si forte présence du Colonel Steve Austin. Il faut dire qu’afin d’accroitre la dimension tragique de son destin, le scénario rend son personnage gentil jusqu’à confiner à la niaiserie. Pour le reste la réalisation reste le plus souvent statique, avec des inserts encore bien plus voyants que ceux du Saint à la même époque. Demeurent toutefois les atouts intrinsèques de la si cruelle l’intrigue originelle et la fascination horrifiée qu’elle exerce, mais l’épisode n’en restitue qu’un écho bien atténué. Anecdotes :
27. THE SECOND WIFE Date de diffusion : 26 avril 1965 Auteur : Robert Bloch, d’après une histoire de Richard Deming Réalisateur : Joseph M. Newman Résumé : Martha épouse le frustre Like Hunter, charpentier, après avoir échangé avec lui par correspondance. La découverte de plusieurs indices la fait soupçonner que son mari a assassiné sa première épouse afin de s’emparer de son argent. Or l’histoire semble désormais se répéter. Critique : On pourra reprocher à l’épisode de ne développer qu’un suspense en bois, du fait de la structure même de récits à chute de l’anthologie. Dans ce contexte, accumuler un tel faisceau convergent d’indices sur un individu, c’est déjà en soi révéler la réponse à la question de sa culpabilité. A moins, bien entendu, que l’absence de chute ne devienne la chute, or jamais The Alfred Hitchcock Hour n’est jusqu’ici risqué à ce jeu. Mais cette prévisibilité ne constitue pas réellement une difficulté, car le suspense ne représente ici qu’un moyen. La véritable finalité du récit du toujours aussi surdoué consiste à décrire l’immersion d’un esprit dans une paranoïa toujours plus prégnante et absolue, quasiment sur un registre d’épouvante. Tout va concourir au succès de l’entreprise. Il en va ainsi de la narration savamment orchestrée par un auteur sachant accroître progressivement la tension dramatique mais aussi distiller les indices de manière à conférer une implacable apparence de logique au développement de la psychose. Bloch a la suprême habileté de se détourner de la description classique d’un profil psychologique. Il n’explique absolument rien du parcours de l’héroïne ni de ce qui l’a conduit à épouser un parfait inconnu après avoir échangé à peine quelques lettres avec lui. Martha n’existe qu’à travers la montée irrépressible de son angoisse, ce qui rend celle-ci particulièrement prégnante, à l’image de ce qu’installe un film récent comme Dunkerque La mise en scène se met idéalement dans les pas de l’écriture, avec une maison d’abord présentée comme frustre, puis devenant peu à peu un lieu d’épouvante, entre ombre protée des feux de cheminée et enfermement progressif de Martha entre des portes hermétiquement closes de plus en plus nombreuses. La clef de voute de cet opus particulièrement ambitieux et réussi reste toutefois l’effarante prestation de June Lockhart, qui nous fait littéralement suivre l’histoire à travers le regard angoissé de son personnage à la dérive. Anecdotes :
28. NIGHT FEVER Date de diffusion : 3 mai 1965 Auteur : Gilbert Ralston, d’après une histoire de Clark Howard Réalisateur : Herbert Coleman Résumé : Lors d’un cambriolage ayant mal tourné, un policier un tué. Blessé, le jeune malfaiteur est hospitalisé sous bonne garde. Une infirmière sympathise avec lui et il entreprend de la séduire et de la convaincre de l’aider à s’évader. Critique : L’épisode résulte peu stimulant, du fait d’une action longtemps très statique et cantonnée dans les couloirs interchangeables d’un hôpital. Le huis clos ne véhicule aucune intensité particulière, d’autant que l’on reste totalement sceptique à propos de l’argument du jour du jour : un digne infirmière qui succomberait au charme d’un tueur de policier. Night Fever peut au moins compter sur sa distribution, avec une Colleen Dewhurst s’arque boutant à rendre crédible son personnage censé basculer amoureusement après une vie aussi rangée que terne et un Tom Simcox parfait en jeune truand viril. On s’amuse également d’une brève apparition d’une jeune Peggy Lipton, qui deviendra bientôt la Julie Barnes de The Mod Squad, probablement la plus Contre-culture des séries policières, puis la Norma Jennings de Twin Peaks. Quoique classique, la chute demeure également bien amenée. Anecdotes :
29. OFF SEASON Date de diffusion : 10 mai 1965 Auteur : Robert Bloch, d’après une histoire d’Edward D. Hoch Réalisateur : William Friedkin Résumé : John Kendall doit démissionner de la police, à cause de sa trop grande propension à la violence. Il s’installe dans une petite ville tranquille, où il est chargé de surveiller les maisons inoccupées des touristes. Il remplace Milt Woodman, licencié pour avoir eu une liaison en service. Ce dernier prend Kendall en grippe et s’intéresse à sa fiancée, Sandy. Critique : L’anthologie connaît l’heureuse fortune de se conclure sur un épisode de fort bonne tenue. Singulier également, tant il échappe au canon de The Alfred Hitchcock Hour. En effet, au lieu d’un thriller à suspense ou d’un récit à chute, Of Season apparaît avant tout comme le portrait psychologique d’un individu tourmenté, en prises à ses démons mais tentant de s’améliorer envers et contre tout. L’excellente prestation de John Gavin rend le récit très sensible, tandis que Robert Bloch sait également rompre avec le manichéisme en demeurant réaliste sur la nature intrinsèquement violente de son protagoniste. On lui sait également gré ne pas avoir opté pour une conclusion artificiellement choc, privilégiant au contraire la cohérence, quitte à être plus prévisible qu’à l’ordinaire. Le format court aurait toutefois sans doute été davantage efficace, le rythme paraissant assez lent, malgré la caméra habile de William Friedkin. La présence de Gavin et du décor du motel de Psychose apportent également un cachet hitchcockien particulièrement bienvenu à cette occasion. Anecdotes :
|
Date de diffusion : 09 novembre 1964
Auteur : Lewis Davidson
Réalisateur : Joseph M. Newman
Résumé :
George voyage en train pour passer le week-end avec sa petite amie, dans sa maison de campagne. Il est abordé par un inconnu lui déclarant tout savoir de cette relation et être le mari de la jeune femme. L’homme se montre menaçant et tente d’effrayer George en creusant une tombe dans le jardin de celui-ci. Lors d’une confrontation, il s’avère que les deux hommes sont manipulés par la femme, qui souhaite qu’ils s’entre-tuent. L’inconnu admet alors n’être en fait qu’un autre de ses amants et conseille à George d’assassiner sa maîtresse. Mais la vérité est encore différente...
Critique :
L’histoire entend se positionner en thriller, en développant la narration d’une complexe manipulation. Le suspense se développe autour de diverses questions s’entrecroisant. Qui est au juste le mystérieux inconnu ? Le complot va-t-il réussir ? Quel est son but ultime ? Une situation évoquant effectivement le cinéma d’Alfred Hitchcock, d’autant que la rencontre impromptue dans le train effectue comme un lointain clin d’œil à L'Inconnu du Nord-Express. Le scénario soigne son versant psychologique, détaillant comme l’inconnu manœuvre George, d’abord en suscitant la peur puis la dissipant, le soulagement lors ressenti favorisant la connivence, puis la complicité (un schéma bien connu des émissions de caméra invisible).
Malheureusement cette intéressante situation ne se concrétise que médiocrement. L’histoire résulte très statique, avec une mise en scène échouant totalement à électriser les nombreuses scènes de dialogues entre l’inconnu et George. La narration ne sème aucun indice ludique permettant au spectateur de jouer au détective et de tenter de deviner le pot aux roses. Elle préfère tout parier sur la surprise finale, ce qui ne représente pas forcément le meilleur choix dans le cadre du format long des épisodes de l’anthologie. Cela se ressent d’autant plus fortement que la chute, certes appréciable, paraît loin d’être a plus retentissante de The Alfred Hitchcock Hour. Demeure une interprétation convaincante, même si légèrement théâtrale, et le charme certain de Patricia Medina.
Anecdotes :
On ne dispose que du titre original de l’épisode, car celui-ci ne fut pas diffusé en version française.
L’insert montrant le train entrer en gare a visiblement été intégré à l’envers comme le montre l’écriture inversée des panneaux de signalisation.
Roddy McDowall (George) débuta dans quelques films de son Angleterre natale avant de se faire connaître à Hollywood pour son personnage dans Qu'elle était verte, ma vallée (1941). Il s'y lie d'amitié avec Elizabeth Taylor, aux côtés de laquelle il connaîtra plusieurs rôles marquants (Octave dans Cléopâtre, 1963). Sa longue carrière au cinéma fut également marquée par les quatre films de La Planète des Singes. Outre la série en découlant (1974), il apparut également à la télévision dans La Quatrième Dimension, Les Envahisseurs, Columbo, L'Île Fantastique, Wonder Woman, Code Quantum…
Efrem Zimbalist Jr. (Stranger) est connu notamment pour avoir tenu le rôle principal des séries 77 Sunset Strip (1958-1964) et The FBI (1965-1974), important succès d’ABC. Il assure également la voix d’Alfred dans l’excellent dessin animé Batman : The Animatd Series (1994-1995), ainsi que dans plusieurs autres productions de DC Comics. Il est le père de Stephanie Zimbalist, Laura Holt dans la série Les Enquêtes de Remington Steele (1982-1987).
Patricia Medina (Wife), d’origine anglaise et espagnole, arrive à Hollywood au début des années 50. Elle s’y fit connaître à travers un nombre prolifique de films historiques ou de mélodrames, où elle tint souvent des rôles de beauté exotique. A partir des années 60 elle se tourne vers la télévision, interprétant notamment Margarita Cortazar dans quatre épisodes de Zorro. Elle fut l’épouse de l’acteur Joseph Cotten, avec lequel elle connut plusieurs succès à Broadway.