Le Campaniforme et l’âge du Bronze dans les Pays de la Loire - Rapport d’activité 2015 Le Campaniforme et l’âge du Bronze dans les Pays de la Loire PROJET COLLECTIF DE RECHERCHE Mai 2016 RAPPORT D’ACTIVITÉ – ANNÉE 2015 Sylvie BOULUD-GAZO (coordinatrice), Jean-René CHATILLON, Sophie CORSON, Henri GANDOIS, Benjamin GEHRES, Céline LAGARDE-CARDONA, Patrice LAMOUILLE, Cécile LE CARLIER, Mikaël LE MAIRE, Axel LEVILLAYER, Muriel MÉLIN, Marilou NORDEZ, Bertrand POISSONNIER, Guirec QUERRÉ, Lolita ROUSSEAU, Thomas VIGNEAU. 1 Laboratoire de Recherches archéologiques Le Campaniforme et l’âge du Bronze dans les Pays de la Loire - Rapport d’activité 2015 Le Campaniforme et l’âge du Bronze dans les Pays de la Loire PROJET COLLECTIF DE RECHERCHE Coordination : Sylvie BOULUD-GAZO RAPPORT D’ACTIVITÉ – ANNÉE 2015 Laboratoire de Recherches archéologiques 3 Le Campaniforme et l’âge du Bronze dans les Pays de la Loire - Rapport d’activité 2015 LISTE DES AUTEURS ET COLLABORATEURS DU RAPPORT D’ACTIVITÉ 2015 Sylvie BOULUD-GAZO Coordinatrice du Projet Collectif de Recherche Maître de conférences, Université de Nantes – LARA, UMR 6566 CReAAH, Rennes Jean-René CHATILLON Artisan bronzier Sophie CORSON Gestion des collections archéologiques - SD 85/Pôle Culture/DPC/SPAMA/Secteur Archéologie Henri GANDOIS Doctorant, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, UMR 8215 – Trajectoire Benjamin GEHRES Docteur en archéologie, UMR 6566 CReAAH, Rennes Céline LAGARDE-CARDONA Archéologue protohistorienne - CD Dordogne, Service de l’Archéologie Patrice LAMOUILLE Artisan bronzier Cécile LE CARLIER Ingénieur d’étude CNRS, UMR 6566 CReAAH, Rennes Mikaël LE MAIRE Archéologue protohistorien en recherche d’emploi Axel LEVILLAYER Responsable d’opération, CD 85/Pôle Culture/DPC/SPAMA/Secteur Archéologie Muriel MÉLIN Docteur de l’Université de Rennes 1 - UMR 6566 CReAAH, Rennes Marilou NORDEZ Doctorante, Université de Toulouse II-Le Mirail – UMR 5608 TRACES, Toulouse Bertrand POISSONNIER Responsable d’opération Inrap Grand Sud Ouest Guirec QUERRÉ Ingénieur de recherche CNRS - UMR 6566 CReAAH, Rennes Lolita ROUSSEAU Doctorante, Université de Nantes - LARA, UMR 6566 CReAAH, Rennes Thomas VIGNEAU Archéologue topographe - CD 85/Pôle Culture/DPC/SPAMA/Secteur Archéologie Illustration de couverture : creuset avec métal en fusion lors d’une expérimentation (Clichés : M. NORDEZ) 4 Le Campaniforme et l’âge du Bronze dans les Pays de la Loire - Rapport d’activité 2015 SOMMAIRE Composition de l’équipe pour 2015 ........................................................................................................................... 6 1. Le projet collectif de recherche : introduction .............................................................................................. 9 2. L’activité scientifique en 2015 dans le cadre du PCR ................................................................................. 14 2. 1. Introduction (S. BOULUD-GAZO) ....................................................................................................... 2. 2. Les enclos circulaires dans les Pays de la Loire et dans le nord-ouest de la France (M. LE MAIRE) ................................................................................................................................................................................ 2. 3. La fabrication des parures annulaires de la fin du Bronze moyen. Rapport des expérimentations menées à Saint-Jean-Trolimon, Finistère (18-19 mai et 22-24 juin 2015) (M. NORDEZ, en collaboration avec J.-R. CHATILLON, H. GANDOIS, P. LAMOUILLE & M. MÉLIN) .................... 2. 4. Programme d’examens métallographiques sur les bracelets de l’âge du Bronze moyen 2 (M. NORDEZ & C. LAGARDE-CARDONA) .............................................................................................. 2. 5. Le dépôt de parures annulaires du Vrignoux à Aizenay, Vendée (M. NORDEZ & A. LEVILLAYER) ........................................................................................................................................................................... 2. 6. L’habitat du Bronze moyen du Chiron-Bordeaux à Oulmes, Vendée (B. POISSONNIER) 2. 7. Pour un réexamen des collections de l’âge du Bronze des réserves du musée SaintJean à Angers, Maine-et-Loire (M. MÉLIN & M. NORDEZ) ............................................................................. 2. 8. Les sondages réalisés en 2015 sur le site de la Conche Verte en forêt d’Olonne à Olonne-sur-Mer, Vendée : un premier bilan (L. ROUSSEAU & H. GANDOIS) ........................................... 2. 9. Auzay, Les Ouches (Vendée) : présentation synthétique des résultats de la campagne de fouille programmée en 2015 (S. BOULUD-GAZO & T. VIGNEAU) ........................................................... 2. 10. Quelques nouveaux éléments concernant le site de la République, Talmont-SaintHilaire (Vendée) : une datation sur caramel de cuisson et des indices supplémentaires pour une activité métallurgique domestique campaniforme (H. GANDOIS, B. GEHRES, G. QUERRÉ & L. ROUSSEAU, en collaboration avec C. LE CARLIER et S. CORSON) ............................................................ 2. 11. Un nouveau site dans l’anse de la République à Talmont-Saint-Hilaire (Vendée) : la République 3 (H. GANDOIS & L. ROUSSEAU) ........................................................................................................ 2. 12. Le site campaniforme de « La Pointe de la Grosse Terre » à Saint-Hilaire-de-Riez (Vendée) : état des connaissances et projet d’intervention archéologique (L. ROUSSEAU & H. GANDOIS) ..................................................................................................................................................................................... 14 16 26 54 66 79 95 130 150 189 208 214 3. Perspectives, projets et recherche ....................................................................................................................... 229 3. 1. Perspectives générales et projets pour 2016-2017 ..................................................................... 229 3. 2. Travaux universitaires ............................................................................................................................. 230 4. Annexes ................................................................................................................................................................................... 232 4. 1. Compte-rendu, réunion équipe PCR Bronze — Mai 2015 ......................................................... 4. 2. Compte-rendu, réunion équipe PCR Bronze — Octobre 2015 ................................................. 4. 3. Avis de CIRA ................................................................................................................................................. 4. 4. Jours PAS ......................................................................................................................................................... 5 232 238 242 247 Le Campaniforme et l’âge du Bronze dans les Pays de la Loire - Rapport d’activité 2015 Composition de l’équipe pour l’année 2015 NOM BORDAS BOULUD-GAZO Prénom Francis Sylvie BOUTOILLE Linda CORSON Sophie FAVREL GANDOIS GARDIN Quentin Henri Colette (du) Fonction - Spécialité Doctorant (dir. P.-Y. Milcent & S. Boulud-Gazo) – Dépôts Bronze final atlantique 3 Maître de conférences Âge du Bronze européen COORDINATRICE Post-doctorante - Mobilier lithique/métallurgie âge du Bronze Assistante qualifiée du Patrimoine Gestion des collections archéologiques Organisme UMR 5608 TRACES, Toulouse francis.bordas@hotmail.fr Queen’s University, Belfast (Irlande) UMR 6298 ARTeHIS, Dijon l_boutoille@hotmail.com Université de Nantes Conseil Général Vendée Conseil Général Vendée José Directeur de recherche émérite - Âge du Bronze européen CNRS LE CARLIER Cécile CNRS LE CLÉZIO Laurence Ingénieur d'étude Analyses de composition élémentaire du métal LE GUEVELLOU Roland Responsable d'opération Céramique âge du Bronze INRAP GOMEZ DE SOTO LARGE LE MAIRE LIGER MAGUY MAITAY MÉLIN MOUGNE NICOLAS NORDEZ Jean-Marc Mikaël Ophélie Adrien Archéologue – Chercheur associé Responsable d'opération Protohistoire Archéologue protohistorien, en recherche d’emploi Etudiante en Master 1 (dir. S. Boulud-Gazo & T. Vigneau) Etudiant en Master 1 (dir. S. Boulud-Gazo & T. Vigneau) Responsable d'opération - Christophe Céramique âge du Bronze Muriel Caroline Post-doctorante - Dépôts milieux humides âge du Bronze Post-doctorante – Malacologie âge du Bronze Ingénieur d'étude - Théophane Céramologue - Âge du Marilou Bronze Doctorante (dir. P.-Y. Milcent & B. Armbruster – Tutrice S. Boulud-Gazo) Parures annulaires âge du Bronze Coordonnées Université de Toulouse II – Le Mirail Université de Paris Doctorant (dir. F. Giligny) – 1 PanthéonCéramiques campaniformes Sorbonne Doctorant (dir. P. Brun) Université de Paris Mobilier métallique - Âge 1 du Bronze Conservateur du Patrimoine Responsable du secteur archéologie Laboratoire UMR 6566 CReAHH, Rennes 1 sophie.corson@vendee.fr UMR 8215 Trajectoires UMR 7041 ArScAn, Paris 1 henri.gandois@gmail.com UMR 6566 CReAHH, Rennes 1 jgzdsoto@free.fr UMR 6566 CReAHH, Rennes 1 cecile.lecarlier@univrennes1.fr UMR 6566 CReAHH, Rennes 1 jlarge2@wanadoo.fr laurence.leclezio@eveha.fr UMR 6566 CReAHH, Rennes 1 roland.le-guevellou@inrap.fr mikael_le_maire@yahoo.fr Universités de Rennes 2 & Nantes INRAP quentin.favrel@gmail.com colette.dugardin@vendee.fr Evéha Universités de Rennes 2 & Nantes sylvie.boulud@wanadoo.fr ophliger@wanadoo.fr UMR 6566 CReAHH, Rennes 1 adrien.maguy@gmail.com christophe.maitay@inrap.fr muriel.melin@hotmail.fr Université Rennes 1 UMR 6566 CReAHH, Rennes 1 caroline.mougne@free.fr Université de Toulouse II – Le Mirail UMR 5608 TRACES, Toulouse marilou.nordez@gmail.com INRAP 6 UMR 7041 ArScAn, Paris 1 theophane.nicolas@inrap.fr Le Campaniforme et l’âge du Bronze dans les Pays de la Loire - Rapport d’activité 2015 Composition de l’équipe pour l’année 2015 POISSSONIER ROUSSEAU VIAU VIGNEAU Bertrand Responsable d'opération Âge du Bronze Yann Responsable d'opération Âge du Bronze Lolita Thomas INRAP Doctorante (dir. S. Cassen, J.-N. Guyodo) – Industrie lithique Néolithique final Université Nantes INRAP Conseil Général Vendée Ingénieur topographe Henri GANDOIS, Muriel MÉLIN et Marilou NORDEZ lors d’une expérimentation à Saint-Jean-Trolimon (Finistère) (Clichés M. NORDEZ et J.-R. CHATILLON) 7 UMR 5608 TRACES, Toulouse bertrand.poissonier@inrap.fr UMR 6566 CReAHH, Rennes 1 yann.viau@inrap.fr UMR 6566 CReAHH, Rennes 1 lolita.rousseau@etu.univnantes.fr thomas.vigneau@vendee.fr Le Campaniforme et l’âge du Bronze dans les Pays de la Loire - Rapport d’activité 2015 LE CAMPANIFORME ET L’ÂGE DU BRONZE DANS LES PAYS DE LA LOIRE PROJET COLLECTIF DE RECHERCHE Coordination Sylvie BOULUD-GAZO 8 Le Campaniforme et l’âge du Bronze dans les Pays de la Loire - Rapport d’activité 2015 1. Le projet collectif de recherche : tantes, base indispensable en vue de dynamiser les recherches sur ces périodes grâce, introduction notamment, à la reprise d’anciens dossiers Sylvie BOULUD-GAZO Le Projet Collectif de Recherches intitulé « Le Campaniforme et l’âge du Bronze dans les Pays de la Loire » a débuté en 2012, rassemblant alors une douzaine de participants. Au fil des quatre premières années de fonctionnement, des axes de recherche prioritaires ont été définis et plusieurs projets d’opérations archéologiques ont vu le jour. Leur réalisation, passée ou à venir courant 2016, atteste de la dynamique de recherche créée par l’équipe de ce PCR. En effet, à l’issue de cette quatrième année de fonctionnement, l’équipe est forte de plus d’une vingtaine de membres actifs issus des différentes institutions régionales (universités, CNRS, services archéologiques des collectivités territoriales) et des opérateurs d’archéologie préventive (Inrap et Evéha). La mise en place de ce PCR a très fortement contribué à fédérer la plupart des étudiants et des chercheurs travaillant sur la période campaniforme et l’âge du Bronze, et a engendré une véritable dynamique sur ces mêmes périodes à l’échelle de la région. Afin de poursuivre les recherches engagées depuis 2012, nous souhaitons vivement que le PCR continue à être soutenu par le SRA – DRAC Pays de la Loire. Description du projet Bien qu’abondamment représentés dans les collections archéologiques de la région des Pays de la Loire, le Campaniforme et l’âge du Bronze demeurent difficiles à appréhender de manière globale à l’échelle des cinq départements (Loire-Atlantique, Maine-et-Loire, Mayenne, Sarthe et Vendée), notamment du fait d’une documentation dispersée ou inédite et de synthèses lacunaires. Initié en 2012, le projet collectif de recherche s’est fixé pour objectif principal de remédier à ce constat. Dans un premier temps, il est apparu nécessaire d’établir un état des lieux quantitatif et qualitatif des données exis- 9 et à l’impulsion de nouveaux projets. Dans un deuxième temps, des axes de recherche prioritaires ont été définis afin d’orienter les énergies et efforts collectifs en direction des thématiques les plus porteuses et les plus pertinentes d’un point de vue scientifique. Le PCR s’articule ainsi autour de deux axes principaux. Le premier, intitulé « Le métal : production, consommation et circulation au cours de la période campaniforme et à l’âge du Bronze dans les Pays de la Loire » concerne le matériau le plus abondant et le mieux documenté au sein des corpus régionaux. Cet axe sur le métal se décline en deux grandes thématiques : « Les dépôts métalliques : dynamiques spatio-temporelles, rythmes des pratiques et évolution des sphères d’influence culturelles » et « Les premières métallurgies et l’identification des chaînes opératoires pour la fabrication des objets métalliques dans les Pays de la Loire ». La région Pays de la Loire a livré une quantité très importante de dépôts volontaires non funéraires, aussi bien en milieu terrestre qu’en milieux humides. Au cours de la période étudiée, les rythmes de cette pratique s’avèrent irréguliers : alors qu’elle est très significative durant le Campaniforme (dépôts de haches plates), le Bronze moyen 2 (dépôts de haches à talon et/ou de parures annulaires) et le Bronze final 3 (dépôts de l’horizon de l’épée du type en langue de carpe), peu de dépôts sont en revanche connus pour les étapes intermédiaires. Cette variabilité doit faire l’objet d’une analyse approfondie, à l’instar des dynamiques spatio-temporelles et de l’évolution des sphères d’influences culturelles qui leur sont liées. Les premières sociétés de la métallurgie et l’identification des chaînes opératoires mises en œuvre par ces dernières sont également examinées. Plusieurs travaux universitaires en cours contribuent au renouvellement Le Campaniforme et l’âge du Bronze dans les Pays de la Loire - Rapport d’activité 2015 extrêmement rares sur ce type de site dans notre région. Travailler uniquement à partir de cette documentation, ancienne et très lacunaire, paraissait peu prometteur. Nous avons donc décidé de redéfinir les contours de cette thématique pour la transformer en un sujet traitable dans le cadre d’un mémoire universitaire. Une approche plus synthétique sur l’ensemble des témoins d’habitat nous semblait pouvoir constituer un intéressant sujet de Master 1 et/ou 2, l’investissement d’un étudiant étant indispensable à l’avancée de ce type de travail de récolement, extrêmeLe deuxième axe de recherche est ment chronophage. intitulé « Dynamique des occupations du Deux orientations ont été propoterritoire au cours de la période campaniforme et de l’âge du Bronze dans les sées pour tenter d’aborder judicieusement Pays de la Loire : une fenêtre d’observa- la problématique de l’occupation du territion privilégiée pour l’étude de l’évolution toire : synthèse des données archéologiques des contacts et influences entre le techno- (anciennes et récentes) et bilan critique, sur complexe atlantique et le technocomplexe la base d’un corpus constitué par l’ensemble continental ». Il vise l’étude de l’évolution des témoins d’occupations de l’âge du des dynamiques d’occupation du territoire Bronze. Les données funéraires et les dépôts au cours des périodes campaniforme et de métalliques ont volontairement été écartés l’âge du Bronze. Il se décline lui aussi en deux de cette synthèse, au moins dans un premier thématiques : « Les occupations des sites de temps, le travail devant se concentrer unihauteur et leur rapport avec les autres don- quement sur les occupations de type habitat, nées archéologiques et topographiques » et tout type de configuration, de structure et de « Le mobilier céramique et le mobilier lithique relief confondus. L’aire géographique précise dans les différentes formes d’occupation du restera à déterminer : soit la région, soit un territoire : construire un référentiel typolo- ou deux départements tests dans un premier temps (Maine-et-Loire et Vendée, par gique régional ». exemple, pour lesquels la documentation est À l’intérieur de cet axe, la thématique facilement accessible), avant d’étendre enla plus problématique restait celle des habi- suite à l’ensemble de la région. Un SIG pourtats de hauteur. Aucun membre du PCR ne rait être mis en place afin d’interroger la base travaillant directement de près ou de loin de données à partir de différents critères et sur cette question, il s’est avéré impossible, de générer une cartographie propre, ces asau fil du temps, d’amorcer une véritable pects étant encadrés par Thomas VIGNEAU recherche menant à des résultats tangibles. et/ou Laure DÉODAT, ingénieure d’étude En effet, la documentation sur les sites de CNRS récemment arrivée au laboratoire LAhauteur datés de l’âge du Bronze dans les RA-POLEN de Nantes. Pays de la Loire provient essentiellement Parallèlement aux deux axes de rede données anciennes dont la qualité est souvent très médiocre. Sauf exception, ces cherche définis dès la mise en place du PCR sites ne sont quasiment jamais touchés par en 2012, l’équipe a proposé en 2015 la créales travaux d’archéologie préventive et les tion d’un troisième axe de recherche : « Les projets d’archéologie programmée restent témoins de l’exploitation du sel sur le littodes connaissances sur les sociétés campaniformes et du début du Bronze ancien, se basant sur un support d’étude différent : la céramique (Q. FAVREL), le mobilier lithique (L. ROUSSEAU) et le métal (H. GANDOIS). La thématique des productions métalliques du Bronze moyen et du Bronze final, de même que celle de la pratique des dépôts donnent également lieu à des travaux universitaires, l’un sur les parures annulaires du Bronze moyen (M. NORDEZ), l’autre sur les dépôts du Bronze final atlantique 3 (F. BORDAS). 10 Le Campaniforme et l’âge du Bronze dans les Pays de la Loire - Rapport d’activité 2015 Afin d’amorcer le travail de l’équipe du PCR sur cet axe de recherche, un atelier de travail sur les vases à sel, toutes périodes confondues, a été mis en place début 2016 à l’Historial de Vendée, aux Lucs-sur-Boulogne. L’Historial présente l’avantage de conserver de nombreux témoins d’exploitation du sel (contenant, mais aussi éléments structurels). L’atelier a pour objectif de permettre aux participants de se familiariser avec ce mobiLe constat ayant mené à la proposition lier très particulier qui n’est pas forcément de création de ce nouvel axe est le suivant : simple à reconnaître. pour la période néolithique, les données arLa création du Projet Collectif de chéologiques en lien avec la fabrication du sel sont de plus en plus nombreuses, de même Recherche sur le Campaniforme et l’âge du que pour la période gauloise pour laquelle Bronze dans les Pays de la Loire répond à une le mobilier, de même que les structures, sont nécessité de renouvellement des recherches particulièrement bien documentés dans dif- dans la région. Il a d’ores et déjà permis férentes régions littorales. Étonnamment, un l’obtention de nombreux résultats, compilés véritable hiatus apparaît pour une longue dans les rapports d’activité (Boulud-Gazo et période allant de la période campaniforme al., 2013, 2014 et 2015) et déjà présentés, au Premier âge du Fer. Les données archéolo- pour certains, dans le cadre de colloques, de giques deviennent alors extrêmement rares, séminaires et de conférences grand public. lacunaires et se résument, pour notre région En parallèle, plusieurs opérations de terrain comme pour la plupart des régions voisines, ont pu voir le jour avec, notamment, en 2014 à seulement quelques indices sporadiques. et en 2015 : - une fouille programmée sur le site Quelques sites, comme celui du Pontreau II à Beauvoir-sur-Mer (85), ont en effet livré campaniforme de la République à Talmontdes vases à sel, mais ce matériel reste encore Saint-Hilaire en Vendée (dirigée par H. GANtrès mal défini et mal connu. Les structures DOIS et L. ROUSSEAU) ; - une campagne de prospections géoparticipant à la fabrication du sel sont encore moins bien documentées et ne permettent physiques sur l’emplacement de la nécropole absolument pas, dans l’état actuel de nos de transition Bronze moyen 2/Bronze final 1 connaissances, de restituer des chaînes opé- des Ouches à Auzay, en Vendée (dirigée par S. ratoires. Ce constat pose différentes ques- BOULUD-GAZO, en collaboration avec V. MAtions dont celle, centrale, des modalités THÉ et A. CAMUS – ULR Valor, Université de d’exploitation qui ont pu exister au cours La Rochelle) - une fouille programmée sur le site de de la période observée. Cela revient aussi à s’interroger sur les raisons de l’absence de la Conche Verte à Olonne-sur-Mer, en Vendée (dirigée par L. ROUSSEAU et H. GANDOIS) ; témoins archéologiques. - une fouille programmée sur le site - Ces indices n’existent-ils pas car les modalités d’exploitation sont différentes de des Ouches à Auzay, en Vendée (dirigée par celles du Néolithique et du deuxième âge S. BOULUD-GAZO et G. HAIRY). du Fer, et n’ont donc pas laissé les mêmes Pour l’année 2016, deux nouveaux traces ? - Ces indices existent-ils bien, mais ne projets de fouilles programmées ont été prépassent-ils pas inaperçus, faute d’être claire- sentés : - fouille programmée sur le site de la ment identifiés ? ral atlantique (Vendée, Loire-Atlantique) de l’époque campaniforme à la transition entre le Bronze final et le Premier âge du Fer ». Ce nouvel axe de recherche s’attachera à rassembler les données existant à la fois sur le mobilier (godets à sel) et sur les structures, sachant que les indices de fabrication du sel restent extrêmement rares pour notre région. 11 Le Campaniforme et l’âge du Bronze dans les Pays de la Loire - Rapport d’activité 2015 ment les travaux réalisés sur la thématique plus récente du sel. La table ronde pourrait être accompagnée de plusieurs manifestations parallèles : une exposition présentant soit des focus sur certains sites, soit des thématiques particulières, des panneaux plus « méthodologiques » pouvant aussi être enLes opérations programmées en 2014 visagés ; des expérimentations autour de la et 2015, comme celles prévues en 2016, métallurgie. Cette table ronde pourrait avoir n’auraient probablement pas pu voir le jour lieu à l’Historial de Vendée : le lieu se prête si rapidement sans l’existence du PCR et sa parfaitement à ce type de manifestation et conséquence directe qui est l’émergence l’espace extérieur permettrait d’organiser d’une équipe de recherche dynamique. La les expérimentations sans problème de sécuvitalité de ce projet, qui repose à la fois sur la rité. conduite d’opérations programmées, l’intéPlusieurs nouveaux membres sont gration des résultats des diagnostics et des fouilles préventives régionales, ainsi que sur venus rejoindre l’équipe du PCR Bronze en l’analyse et le traitement des données an- 2015. Il s’agit des personnes suivantes : ciennes et récentes disponibles, nous semble - Laurence LE CLÉZIO : responsable justifier la reconduite du PCR sur deux nouvelles années. En effet, les premières années d’opération pour Evéha, spécialiste de Prode fonctionnement ont permis d’établir un tohistoire travaillant régulièrement dans les état des lieux, de constituer une équipe opé- Pays de la Loire ; rationnelle et réactive. Il convient mainte- Ophélie LIGER : étudiante en Masnant de poursuivre les recherches et de commencer à récolter les fruits de ces dernières ter 1 à l’université de Rennes 2/Nantes. Son avant de pouvoir réfléchir collectivement sujet porte sur la réalisation d’un inventaire à leur restitution, leur présentation et leur critique des moules de l’âge du Bronze dans les Pays de la Loire et en Bretagne. Tous les mise à disposition d’un plus large public. matériaux sont concernés par cette étude Les modalités de restitution des tra- : pierre, métal et terre cuite ; vaux engagés dans le cadre de notre PCR ont - Adrien MAGUY : étudiant en Masd’ailleurs commencé à être envisagées. Ce rapport d’activité correspond à la 4e année ter 1 à l’université de Rennes 2/Nantes. Il de fonctionnement. Si le projet continue à travaille sur l’occupation du sol pendant être soutenu par le SRA, il semble raison- l’âge du Bronze dans les départements de la nable de projeter son arrêt à l’issue de la 6e Vendée et du Maine-et-Loire. Il s’intéressera année, soit en 2017. L’année 2016 permet- plus particulièrement aux différentes formes tra donc de réfléchir précisément à la ma- d’habitat à partir d’un inventaire des sites nière de rendre compte des travaux accom- connus. L’utilisation du SIG est préconisée plis. Plusieurs possibilités existent parmi afin de faciliter le traitement et l’intégration lesquelles l’organisation d’une table ronde des données. Ce sujet de Master correspond semble la plus adaptée à la restitution d’un à celui qui a été défini en cours d’année afin projet collectif tel que notre PCR. Son pro- de pallier aux difficultés de l’équipe à réellegramme pourrait reprendre l’architecture ment avancer sur la thématique de l’habitat ; générale du PCR en développant différentes - Francis BORDAS : doctorant inscrit thématiques autour des deux premiers axes définis auxquels s’ajouteront éventuelle- depuis 2015 à l’université de Toulouse II-Le Pointe de la Grosse Terre à Talmont-SaintHilaire (dirigée par L. ROUSSEAU et H. GANDOIS) ; - 2e campagne de fouille programmée sur le site des Ouches à Auzay, en Vendée (dirigée par S. BOULUD-GAZO et G. HAIRY). 12 Le Campaniforme et l’âge du Bronze dans les Pays de la Loire - Rapport d’activité 2015 Mirail, sous la direction de P.-Y. MILCENT et la tutelle de S. BOULUD-GAZO. Son sujet porte sur les dépôts et les productions métalliques du Bronze final atlantique 3 dans l’ouest de la France. Lors d’une réunion d’équipe, nous avions envisagé l’intégration de Laure DÉODAT, ingénieure d’étude CNRS qui était alors en disponibilité et demandait son intégration à l’UMR 6566 CReAAH, et plus particulièrement au LARA-POLEN de Nantes. Le poste de Laure DÉODAT n’a été transféré à Nantes qu’en 2016 et son intégration à notre PCR sera donc actée pour cette nouvelle année. BIBLIOGRAPHIE BOULUD-GAZO S. (dir.), BOUTOILLE L., CORSON S., GANDOIS H., GARDIN C. DU, GOMEZ DE SOTO J., MAITAY C., MÉLIN M., NORDEZ M., ROUSSEAU L. (2013) – Le Chalcolithique et l’âge du Bronze dans les Pays de la Loire, Rapport d’activité 2012, Projet Collectif de Recherche, Nantes, février 2013. BOULUD-GAZO S. (dir.), GANDOIS H., GOMEZ DE SOTO J., LARGE J.-M., LE GUÉVELLOU R., MÉLIN M., NORDEZ M., POISSONNIER B., ROUSSEAU L., VIAU Y. (2014) – Le Campaniforme et l’âge du Bronze dans les Pays de la Loire, Rapport d’activité 2013, Projet Collectif de Recherche, Nantes, avril 2014. BOULUD-GAZO S. (dir.), CAMUS A., CORSON S., DUPONT C., FAVREL Q., GANDOIS H., GOMEZ DE SOTO J., LARGE J.-M., LE CARLIER C., MATHÉ V., MÉLIN M., NORDEZ M., ROUSSEAU L., VIAU Y., VIGNEAU T., WELLER O. (2015) – Le Campaniforme et l’âge du Bronze dans les Pays de la Loire, Rapport d’activité 2014, Projet Collectif de Recherche, Nantes, avril 2015. 13 Le Campaniforme et l’âge du Bronze dans les Pays de la Loire - Rapport d’activité 2015 2. L’activité scientifique en 2015 dans le cadre du PCR 2. 1. Introduction Sylvie BOULUD-GAZO Pour l’année 2015, deux réunions d’équipe ont rassemblé les membres du PCR Bronze en mai et en octobre ; elles ont permis de réfléchir à de nouveaux projets, ainsi qu’aux différentes formes et modalités de collaborations (Cf. Annexes : 4.1 et 4.2). Ces deux réunions ont été complétées par de très nombreuses rencontres plus informelles nécessitées par la mise en place d’opérations archéologiques ainsi que par l’étude d’un certain nombre d’objets et de collections conservés dans différents musées et dépôts archéologiques dont le présent rapport rend en partie compte. D’autres séances de travail ont été consacrées à l’élaboration de communications collectives et/ou d’articles. Le rapport d’activité présente les résultats de différents travaux et recherches menés au cours de l’année 2015 par l’équipe du PCR Bronze. Les articles compilés appartiennent à quatre grandes catégories : des travaux universitaires, des présentations de sites découverts en contexte préventif, des reprises d’étude de collections anciennes et enfin, des présentations d’opérations archéologiques programmées. Ces catégories ne sont évidemment pas étanches et plusieurs contributions relèvent du croisement de plusieurs d’entre elles. Comme chaque année, les étudiants ont participé très activement à la rédaction du rapport d’activité. Les contributions rassemblées ici témoignent à nouveau de leur très forte implication dans le projet, contribuant ainsi à insuffler un grand dynamisme aux recherches sur l’âge du Bronze dans notre région. L’un des travaux universitaires réalisés récemment et présentés ici est celui de M. LE MAIRE sur la thématique des enclos circulaires dans les Pays de la Loire et dans le nord-ouest de la France (cf. infra : 2. 2). La contribution de M. LE MAIRE synthétise les deux mémoires réalisés en Master 1 puis en Master 2 sous la direction de S. BLANCHET et S. BOULUD-GAZO et en donne les principaux résultats. L’article suivant présente les expérimentations réalisées par M. NORDEZ, en collaboration avec H. GANDOIS, M. MÉLIN, J.-R. CHATILLON et P. LAMOUILLE, ces deux derniers étant artisans bronziers. Ces expérimentations visaient à tenter de répondre à différentes questions techniques concernant la fabrication des parures annulaires du Bronze moyen (cf. infra : 2. 3). Les résultats présentés dans le cadre de ce rapport attestent de l’importance de cette phase pratique dans les processus de réflexion sur la restitution des chaînes opératoires. Comme l’étude suivante, réalisée en collaboration avec Céline LAGARDE-CARDONA et consacrée à l’analyse métallographique de plusieurs parures annulaires régionales datées du Bronze moyen 2 (cf. infra : 2. 4), ce travail de recherche s’insère dans le doctorat en cours de M. NORDEZ. Les expérimentations comme les études métallographiques constituent deux approches distinctes, mais complémentaires destinées à apporter de nouvelles informations sur les modes de fabrication et de décoration des bracelets et anneaux de cheville de l’âge du Bronze moyen. La thématique des parures annulaires se développe à nouveau dans la contribution suivante qui présente la découverte récente d’un dépôt de l’âge du Bronze moyen en contexte préventif (cf. infra : 2. 5). Le site du Vrignoux à Aizenay (Vendée) a été découvert en 2015 lors d’une opération de fouille préventive placée sous la responsabilité d’A. LEVILLAYER. Il a livré des témoins très originaux et jusqu’alors inédits dans le département d’une occupation de l’âge du Bronze caractérisée par des stèles anthropomorphes, sans doute remaniées, et à proximité desquelles un dépôt de bracelets métalliques a été découvert. Plus loin, 14 Le Campaniforme et l’âge du Bronze dans les Pays de la Loire - Rapport d’activité 2015 réalisées au cours de l’été 2015 sont synthétisés dans deux articles. Le site de la Conche Verte à Olonne-sur-Mer (Vendée) a fait l’objet de sondages destinés à caractériser une occupation repérée par prospection pédestre. Les acquis de la campagne sont présentés par L. ROUSSEAU et H. GANDOIS (cf. infra : 2. 8), ainsi que le projet d’intervention sur un autre site littoral vendéen, lui aussi identifié grâce à des prospections pédestres, le site de la Pointe de la Grosse Terre à Saint-HilaireLa reprise de l’étude de collections an- de-Riez (cf. infra 2. 12). Enfin, le site des ciennes fait partie des travaux régulièrement Ouches à Auzay (Vendée), connu jusqu’à préinitiés dans le cadre de notre PCR afin de sent pour son occupation à caractère funéréévaluer ces ensembles, de discuter la pro- raire de la transition Bronze moyen/Bronze venance, la typologie et/ou la datation des final, a livré au cours de l’été 2015 des téobjets. Ce travail, fastidieux, mais incontour- moins d’une occupation plus récente, datée nable, est souvent très fructueux, permettant du Bronze final, et qui semble être de nature de retrouver des objets perdus, de préciser uniquement domestique. Les principaux rédes provenances ou des datations, ou encore sultats de la campagne 2015 sont exposés de de réévaluer l’authenticité de certains en- manière synthétique, de même que les objecsembles. M. MÉLIN et M. NORDEZ ont ainsi tifs retenus pour la deuxième campagne de repris l’étude de plusieurs dépôts et objets fouille programmée en 2016 (cf. infra : 2. 9). métalliques conservés au Musée Saint-Jean Pour la quatrième année consécutive, d’Angers. Elles proposent ici un regard neuf sur ces collections anciennes en remontant les travaux compilés et présentés dans le aux sources bibliographiques et en nettoyant rapport d’activité témoignent, si besoin est, les données d’un certain nombre d’erreurs du grand dynamisme de notre équipe, de la qui continuent à être reprises de génération complémentarité de ses membres et de la qualité scientifique des recherches menées en génération (cf. infra : 2. 7). sur la période campaniforme et l’âge du La dernière partie du rapport d’acti- Bronze dans les Pays de la Loire. Le rapport vité rassemble différentes contributions pré- d’activité épaissit d’année en année, mais sentant les résultats d’opérations de fouilles surtout, son augmentation atteste de la mulpréventives réalisées récemment. Certaines titude des projets qui sont nés et qui conticontributions reviennent sur des sites déjà nuent à naître grâce aux collaborations susprésentés précédemment, mais revisités et cités par le PCR lui-même. complétés grâce à de nouvelles analyses ou À l’issue des quatre premières années études. C’est le cas, par exemple, du site campaniforme de la République à Talmont-Saint- de fonctionnement de l’équipe « PCR Bronze » Hilaire (Vendée) qui apparaît ici à deux re- et au regard des contributions proposées, prises : une première fois pour des données nous nous félicitons de la mise en place de ce inédites obtenues suite à des analyses de projet dont la forme, souple et relativement mobilier (cf. infra : 2. 10), puis une seconde peu contraignante, permet une grande réacpour la découverte d’une nouvelle structure tivité et offre un cadre réellement propice mise au jour par l’érosion naturelle du trait au développement de la recherche archéolode côté (cf. infra : 2. 11). Les résultats les plus gique régionale. remarquables des opérations programmées une deuxième occupation de l’âge du Bronze moyen, également découverte en contexte préventif il y a maintenant plus de 20 ans, est présentée par B. POISSONNIER : l’habitat du Chiron-Bordeaux, à Oulmes (Vendée), est caractérisé par des trous de poteaux ne permettant cependant pas de restitution de plan et par des lambeaux de sol et des structures ayant livré un petit corpus céramique qui est présenté ici (cf. infra : 2. 6). 15 Le Campaniforme et l’âge du Bronze dans les Pays de la Loire - Rapport d’activité 2015 2. 4. Programme d’examens métallographiques sur les bracelets de l’âge du Bronze moyen 2 Marilou NORDEZ & Céline LAGARDE-CARDONA 1. Présentation du programme 1.1. Objectifs et problématiques Au cours de l’âge du Bronze moyen 2 et de la transition avec le Bronze final, la production métallique du nord-ouest de la France est essentiellement représentée par des haches à talon et des parures annulaires massives, ces dernières étant souvent ornées d’un décor géométrique. Une reprise des données typochronologiques régionales concernant le mobilier métallique de cette période a été initiée depuis quelques années, dans le cadre du Projet Collectif de Recherche « Le Campaniforme et l’âge du Bronze dans les Pays de la Loire », du colloque international de Strasbourg (Boulud-Gazo et al., à paraître) et d’une thèse de doctorat (Nordez, en cours). Des résultats intéressants ont déjà pu être obtenus à travers l’analyse spatiale, typologique et chronologique de ces objets, très souvent retrouvés en contexte de dépôts (Nordez, 2015a). Les questions concernant la fabrication de ces objets ont aussi été abordées au cours de plusieurs travaux récents (Gabillot, 2003 ; Lagarde-Cardona, 2012 ; Mélin, 2012 et 2014), permettant d’apporter de nombreux éclairages, notamment sur les chaînes opératoires mises en œuvre pour la réalisation des haches. Cependant, de nombreuses interrogations demeurent au sujet de la fabrication des bracelets. Bien que des observations macroscopiques aient été systématiquement réalisées sur les objets étudiés de visu, un certain nombre de questionnements technologiques ne peut être résolu que par l’intervention d’examens métallographiques. Voici un aperçu des principales interrogations qui demeurent (Cf. Nordez, ce volume) : – Quels étaient les types de moules utilisés et quels modes de fonderie étaient mis en œuvre (fonte à la cire perdue, en moule à plusieurs pièces, à usage unique/multiple, etc.) ? – Les bracelets étaient-ils mis en forme dès la fonte ou cintrés par martelage de la tige lors du travail post-fonderie ? Dans ce dernier cas, le cintrage est-il total (barre rectiligne obtenue lors de coulée, intégralement cintrée ensuite) ou partiel (obtention d’une ébauche de bracelet, déjà en partie cintrée, puis resserrage partiel autour du bras du porteur, par exemple) ? Quels stigmates visibles à l’œil nu pourraient être associés à l’une ou l’autre de ces possibilités ? Peut-on estimer le nombre de recuits et leur température ? – Y a-t-il une explication technologique à la présence de méplats latéraux de part et d’autre de la tige ? Sont-ils dus à l’usure ou à un mode particulier de fabrication ? Ont-ils été réalisés sur un modèle malléable et alors obtenus dès la fonte ? Pour quelles raisons ? Ou bien ont-ils été ménagés directement sur le bronze ? – Pour les objets décorés, l’ornementation a-t-elle systématiquement été réalisée par ciselure ? Dans ce cas, le métal a-t-il subi des traitements thermiques et mécaniques particuliers ? Quelles informations peuvent être déduites quant au type d’outil utilisé ? Certains exemplaires ont-ils été coulés dans des moules portant déjà l’empreinte de ce décor ? Celui-ci a-t-il été repris lors du travail post-fonderie ? – Quelles sont les opérations récurrentes lors des finitions (polissage, abrasion, lustrage, etc.) ? Les bracelets et anneaux de cheville à tige massive ont fait l’objet de diverses 54 Le Campaniforme et l’âge du Bronze dans les Pays de la Loire - Rapport d’activité 2015 interprétations technologiques depuis les années 1970, la plupart basées sur des observations macroscopiques, plus rarement complétées par des analyses métallographiques. La chaîne opératoire la plus fréquemment proposée consiste en la coulée d’une barre dans une lingotière, impliquant son cintrage lors du travail post-fonderie. C’est souvent cette restitution du mode de coulée qui induit que le décor serait réalisé par ciselure après le cintrage par martelage, car les auteurs considèrent que cette opération altérerait l’ornementation, du fait du martelage de la barre. Or, plusieurs éléments viennent aujourd’hui contredire cette restitution des procédés de fonderie. L’un des objectifs majeurs sera donc de mettre de l’ordre dans les chaînes opératoires jusqu’ici envisagées pour la fabrication des parures annulaires du Bronze moyen 2 et de déterminer la part des opérations réalisées avant ou après la fonte. ratoire donnent accès aux informations qui permettent de restituer quasi complètement la fabrication et l’utilisation de l’objet étudié. Les examens métallographiques consistent en l’étude, à l’échelle microscopique, de la structure interne de la matière métallique, permettant de déterminer les actions thermiques et mécaniques subies par les objets. Elles apportent de précieuses informations sur les techniques employées, les étapes de fabrication et sur l’utilisation des objets, permettant la restitution d’une partie des gestes et méthodes mis en œuvre par l’artisan, du déroulement de la chaîne opératoire, la déduction des outils employés et de certains usages (Scott, 1991 ; Lagarde-Cardona, 2012, p. 117-119). Les résultats obtenus lors des examens métallographiques réalisés à ce jour confirment qu’en l’état actuel de nos connaissances, l’observation de surface n’est pas suffisante (Véber, 2009 ; Lehoërff, 2007 ; Lagarde-Cardona, 2012). Ces analyses ap1.2. Pourquoi réaliser des analyses métallo- portent des réponses sur les pratiques des artisans, laissant apparaître une conception graphiques ? particulière de la chaîne opératoire, avec des La paléométallurgie est une discipline choix qui ne sont pas seulement techniques, spécifique qui vise à comprendre et restituer mais semblent mettre en évidence des les procédés techniques et les savoir-faire des groupes culturels. Il est donc très intéresartisans des sociétés anciennes, leurs évolu- sant de pouvoir enfin aborder une même aptions. Les moyens d’étude des objets archéo- proche technoculturelle pour le nord-ouest logiques en alliages à base de cuivre passent de la France, si riche en productions métalpar l’examen et l’analyse de la matière métal- liques, afin de mieux comprendre les groupes lique, à différentes échelles macroscopiques humains qui y vivaient au cours de l’âge du (étude tracéologique en surface) et micros- Bronze moyen. Des résultats concluants ont copiques (étude métallographique au cœur par ailleurs été obtenus lors de l’examen méde l’objet). Ces examens sont menés par un tallographique des huit bracelets du dépôt spécialiste capable d’identifier et d’interpré- de la plage de l’Amélie VIII à Soulac-sur-Mer, ter les indices de fabrication présents en sur- Gironde, ou encore des trois exemplaires du dépôt de Sermizelles, Yonne (Lagarde-Carface et au cœur de l’objet. dona, Pernot, 2009 ; Lagarde-Cardona et al., L’étude tracéologique est essentielle, 2007 ; Lagarde-Cardona, 2012, p. 141-159). mais ne peut répondre à toutes les questions, car la chaîne opératoire de fabrication des al- 2. Stratégie d’échantillonnage liages cuivreux est complexe, avec plusieurs Une demande de devis a été effecsolutions techniques, économiques ou culturelles possibles. Seuls les moyens du labo- tuée par C. Lagarde-Cardona auprès du labo- 55 Le Campaniforme et l’âge du Bronze dans les Pays de la Loire - Rapport d’activité 2015 ratoire du Centre International Recherche Analyse Marquage (CIRAM)1 pour six analyses métallographiques. Le montant s’élève à 1 200 € TTC, incluant la mise à disposition des matériaux nécessaires à la préparation des échantillons, la location et l’utilisation du microscope et du MEB, ainsi que les produits nécessaires aux attaques chimiques. De plus, la réalisation de six prélèvements est facturée 250 € TTC par l’Institut des Matériaux de Nantes, qui met à notre disposition une tronçonneuse à disque diamantée. Ce programme représente donc un budget de 1 450 €, auxquels s’ajoutent les frais de déplacement des agents concernés. 2.1. Présélection des objets et principales observations macroscopiques Loire, ceux répondant aux différents critères définis : – trois parures annulaires incomplètes sans provenance précise (« Saumurois », Maine-et-Loire) conservées au Château-musée de Saumur ; – six fragments de bracelets massifs et rubanés du dépôt de Saint-Lumine-deClisson (Loire-Atlantique), actuellement en dépôt au laboratoire Arc’Antique à Nantes ; – cinq fragments et bracelets incomplets provenant de Loire-Atlantique (Plessé, Moisdon-la-Rivière, Blain ou provenance inconnue) conservés au musée Dobrée à Nantes. Plusieurs exemplaires ligériens fragmentés étaient initialement considérés comme des objets dont l’analyse serait pertinente. Cependant, après une nouvelle lecture des données préalablement collectées, les questionnements technologiques les concernant ont été au moins partiellement résolus. Il s’agit notamment du bracelet très massif décoré de Montaigu (Nordez, 2015b, fig. 1b), dont la morphologie générale et l’ornementation ont clairement été réalisées sur un modèle malléable et obtenues dès la fonte. Quant au fragment de bracelet du dépôt récemment reconstitué de Héric, Loire-Atlantique (Ibid., fig. 7a), sa surface est très altérée et l’observation macroscopique vraiment limitée, nous conduisant à l’évincer du corpus d’objets à analyser. Les artefacts ne sont pas analysés au hasard : il s’agit bien de tester ou de vérifier des hypothèses émises suite à l’observation macroscopique, d’acquérir des informations inaccessibles par une autre méthode, et de documenter la microstructure du métal afin de restituer scientifiquement les techniques employées pour la fabrication des objets considérés (Lehoërff, 1999, p. 788-789). En effet, les analyses métallographiques nécessitent le prélèvement d’un échantillon de l’objet. Il est réalisé sur une partie de l’artefact qui doit permettre de répondre aux problématiques posées, mais l’état de conservation de l’objet et son intégrité constituent également des critères de sélection. En effet, la présence de métal sain à l’emplacement Ce panel présélectionné était volonde l’analyse est nécessaire et les pièces fragmentées sont privilégiées afin de ne pas por- tairement plus abondant que le nombre d’échantillons à prélever, afin que nous puister atteinte à l’intégrité d’un objet complet. sions sélectionner conjointement les six obDans un premier temps, ont donc été jets qui apparaîtront les plus pertinents, aussélectionnés, au sein des fragments de bra- si bien du point de vue de l’archéométrie que celets provenant de la région des Pays de la de l’archéologie : ils doivent permettre de répondre aux problématiques présentées et le métal doit être suffisamment bien conservé 1. Technopole Bordeaux Montesquieu, 9 allée Jacques pour pouvoir se prêter aux analyses métalloLATRILLE - 33 650 MARTILLAC, France. Mail : contact@ciram-art.com ; Tél. : +33 (0)5 56 23 45 graphiques. 35 56 Le Campaniforme et l’âge du Bronze dans les Pays de la Loire - Rapport d’activité 2015 2.2. Les objets retenus pour examens Parmi les quatorze bracelets présélectionnés, seuls les six les plus pertinents ont été retenus en vue d’être prélevés et analysés (fig. 2-7). a. Prélèvement n° 1 : bracelet incomplet du Saumurois (Château-musée de Saumur, n° 208 ; ici : fig. 2). Fig. 2. Localisation du prélèvement du bracelet n° 208 (cliché C. Lagarde-Cardona). Ce bracelet incomplet est à tige massive, de forme ouverte et de section planoconvexe flanquée de deux méplats latéraux obliques marqués. Le jonc est orné de motifs organisés en panneaux. La cassure est ancienne et localisée à proximité de l’extrémité supposée du bracelet. L’extrémité conservée est dotée d’un tampon, caractérisé par un élargissement et un épaississement de la tige (fig. 1). b. Prélèvements nos 2 et 3 : les fragments du bracelet de Plessé (musée Dobrée, Nantes, nos d’inv. 859.8.1 et 563 533). Il s’agit d’un bracelet massif, complet, mais brisé en deux fragments, probablement mis au jour à Plessé, Loire-Atlantique (Nordez, 2015b, p. 40-42). Il a fait l’objet d’une importante déformation volontaire, qui a certainement provoqué sa fragmentation Des traces transversales parallèles, (fig. 3). L’étrange morphologie de sa tige, usuellement considérées comme dues au dotée d’un méplat et présentant une convemartelage de la tige en vue du cintrage de xité de la face interne, son décor appareml’objet, sont visibles sur la face interne. Le dé- ment ciselé et cette importante déformation cor est profond, bien marqué. Certains motifs sont autant d’éléments nécessitant l’interdébordent sur le méplat latéral. vention d’analyses poussées, afin de mieux comprendre à la fois sa fabrication et le traiIl a probablement été mis au jour tement infligé avant l’enfouissement. Un prédans le Saumurois, sans davantage de pré- lèvement a donc été réalisé sur chacun des cision ni de renseignement au sujet de son deux fragments, permettant respectivement contexte d’enfouissement (Cordier, Gruet, de documenter le mode de réalisation de 1975, p. 233, fig. 31, n° 4). l’ornementation et la mise en forme du méplat, ainsi que les opérations ayant engendré la cassure. c. Prélèvement n° 4 : fragment de bracelet déformé de provenance indéterminée (musée Dobrée, Nantes, n° d’inv. 58,76). Le fragment de bracelet de provenance indéterminée n° 58.76 permettrait également d’aborder Fig. 1. Bracelet n° 1 - Musée de Saumur, n° 208 (clichés M. Nordez). 57 Le Campaniforme et l’âge du Bronze dans les Pays de la Loire - Rapport d’activité 2015 Fig. 3. Bracelet de Plessé (Loire-Atlantique) - Musée Dobrée, nos d’inv. 859.8.1 et 56.3533. En haut : avant prélèvements (cliché M. Nordez) ; en bas : après prélèvements (cliché C. Lagarde-Cardona). cette question de la déformation volontaire qui précède l’enfouissement : ce fragment de tige massive, de section sublosangique et orné d’un décor continu est complètement resserré sur lui-même, formant une sorte de petit anneau (fig. 4). d. Prélèvement n° 5 : fragment de bracelet de Moisdon-la-Rivière (musée Dobrée, Nantes, n° d’inv. D997.1.63) Le cinquième prélèvement a été réalisé sur l’un des trois fragments du bracelet complet, mais brisé du dépôt récemment reconstitué de Moisdon-la-Rivière, LoireAtlantique (Mélin, Nordez, 2015). Il appartient à un bracelet de forme ouverte, dont la tige est de section biconvexe est flanquée de méplats latéraux marqués relativement irréguliers, cantonnant le décor au sommet de la face externe (fig. 5). e. Prélèvement n° 6 : bracelet incomplet de Blain (musée Dobrée, Nantes, n° d’inv. 58.74) Le sixième et dernier prélèvement concerne le bracelet incomplet de Blain (fig. 6 ; Nordez, 2015b). De forme très certainement ouverte, bien que les deux extrémités manquent, il possède une tige de section plano-convexe à méplats latéraux marqués. Il s’agit du seul objet sans décor analysé ici, permettant de comparer la structure interne du métal d’objets ornés et non ornés. Il présente des traces de martelage marquées sur la face interne, permettant de questionner Fig. 4. Bracelet de provenance inconnue - Musée Dobrée, son mode de cintrage. n° d’inv. 58.76. En haut : avant prélèvement (cliché M. Nordez) ; en bas : après prélèvement (cliché C. Lagarde-Cardona). 58 Le Campaniforme et l’âge du Bronze dans les Pays de la Loire - Rapport d’activité 2015 Fig. 5. Bracelet du dépôt de Moisdon-la-Rivière (LoireAtlantique) - Musée Dobrée, n° d’inv. D997.1.63. En haut : avant prélèvement (cliché M. Nordez) ; en bas : après prélèvement (cliché C. Lagarde-Cardona). 2.3. Les objets non retenus pour analyses Les bracelets nos 224 et 226 provenant du Saumurois et conservés au Châteaumusée de Saumur n’ont pas été retenus pour faire l’objet de prélèvement. En effet, leur analyse métallographique ne nous a pas semblé présenter un réel intérêt en vue de mieux comprendre la fabrication des bracelets, du fait de leur état (corrosion, absence de métal sain) et de leur morphologie déjà équivoque. Tous deux sont à tige massive, de forme ouverte et de section plano-convexe à méplats latéraux, ornée de motifs continus sur l’ensemble du jonc, matérialisés sous la forme de chevrons successifs. Aucune trace de martelage n’est visible sur leur face interne, les méplats sont très lisses et irréguliers. Le décor est très altéré, en partie effacé. Parmi les bracelets du dépôt de SaintLumine-de-Clisson (Loire-Atlantique), plusieurs bracelets fragmentés auraient pu faire l’objet d’analyses métallographiques, l’autorisation ayant été accordée par le Service Régional de l’Archéologie des Pays de la Loire. Il présente l’avantage de regrouper différents types de parures annulaires, certaines à tige massive et d’autres à tige rubanée, provenant d’un ensemble clos (Boulud-Gazo et al., 59 Fig. 6. Bracelet de Blain (Loire-Atlantique) – Musée Dobrée, n° d’inv. 58.74. En haut : avant prélèvement (cliché M. Nordez) ; en bas : après prélèvement (cliché C. Lagarde-Cardona). 2012). Cependant, le mauvais état de conservation et l’absence de métal sain nous ont conduits à évincer la totalité des bracelets du corpus d’échantillon. De plus, les modes de fabrication des séries de bracelets massifs ne sont pas vraiment soumis à des questionnements importants et sont déjà plutôt bien appréhendés. 3. Méthodes d’étude 3.1. Les prélèvements L’examen métallographique, reposant sur l’observation de coupes polies, nécessite l’analyse du métal sain. Un prélèvement de matière (de l’ordre de quelques mm3) sous la forme d’une coupe est donc indispensable. La localisation du prélèvement est choisie pour chaque objet en fonction de la qualité de l’échantillonnage (métal sain, problématique) sans modifier sa forme générale. Conformément à la problématique posée en Le Campaniforme et l’âge du Bronze dans les Pays de la Loire - Rapport d’activité 2015 Fig. 7. Dessins des objets examinés et positionnement des échantillons prélevés (dessins M. Nordez ; DAO M. Nordez et C. Lagarde-Cardona). 60 Le Campaniforme et l’âge du Bronze dans les Pays de la Loire - Rapport d’activité 2015 l’échantillon replacé en trois dimensions. 3.2. La préparation des échantillons Les six coupes ont ensuite été enrobées dans une résine polymérisant à froid, puis polies à l’aide de différentes bandes abrasives et disques imprégnés de pâte à base de poudre de diamant. Le but de cette préparation est d’obtenir, pour chaque échantillon, une surface polie et plane pour l’observation Fig. 8. Prélèvement n° 4 : l’échantillon se présente sous microscopique. La micrographie optique de forme de demi-section au profil triangulaire (cliché la surface polie apporte des informations sur M. Nordez). les différentes phases et inclusions présentes dans la surface métallique (nature, nombre, amont, les six bracelets ont été observés de taille, répartition). manière identique, à l’aide de sections transversales, au niveau des traits incisés pour les Les échantillons sont ensuite attaexemplaires décorés (fig. 7-8). qués chimiquement à l’aide d’une solution alcoolique de perchlorure ferrique qui va Dans des conditions idéales, les pré- révéler les grains du métal (fig. 10). L’obserlèvements sont effectués en laboratoire par vation microscopique de la microstructure la personne en charge de l’étude métallo- apporte des informations sur les dernières graphique, afin d’assurer la précision de la phases des procédés de mise en forme applidécoupe et la traçabilité de l’échantillon- qués sur les objets (Lagarde-Cardona, 2012, nage. N’ayant pas obtenu l’autorisation de déplacer les objets, les prélèvements ont été réalisés à l’Institut des Matériaux de Nantes par N. Gautier à l’aide d’une scie à disque diamantée (fig. 9). Afin de pallier aux risques de perte d’informations, les objets ont été photographiés, avant et après prélèvement, et Fig. 10. Échantillon enrobé et poli trempé dans la solution permettant l’attaque chimique (cliché M. Nordez). p. 139-14). La préparation ainsi que les observations microscopiques, avant et après attaque chimique, ont été réalisées au laboratoire Fig. 9. Scie à disque diamanté de l’Institut des Matériaux de Nantes ayant servi à réaliser les prélèvements CIRAM (Centre International Recherche Analyse Marquage). (cliché M. Nordez). 61 Le Campaniforme et l’âge du Bronze dans les Pays de la Loire - Rapport d’activité 2015 Des analyses élémentaires ont été effectuées par spectrométrie de rayons X (EDXS, Energy Dispersive X-Ray Spectrometry) dont le dispositif est couplé au microscope électronique à balayage (laboratoire CIRAM). 3.3. Les résultats La préparation des échantillons ainsi que leurs observations microscopiques et analyses se sont déroulées dans le courant du mois de janvier 2016. Le tableau ci-après (fig. 11) rassemble les résultats des analyses de composition. Comme attendu, il s’agit d’alliages binaires cuivre-étain ; les éléments traces n’ont pas été dosés, les résultats n’indiquent que la valeur en étain. Hormis le bracelet n° 208, les observations mettent en évidence un même faciès de microstructure, bien que des variations soient visibles pour chaque échantillon : structure hétérogène avec des pores de petites dimensions, parfois plus gros et concentrés à cœur, nombreuses inclusions de sulfures de cuivre qui peuvent être polylobés ou légèrement allongés et orientés à 30° par rapport au bord externe (fig. 12). Généralement l’alliage est biphasé, avec quelques nodules d’eutectoïdes α-δ dispersés. Les microstructures sont caractéristiques d’un état recristallisé. Ces indices attestent que les cinq bracelets ont subi des opérations de Inventaire 208 D.997.1.63 56.35.33/ 859.8.1 58.76 58.74 Nombre d'analyses 3 3 5 3 3 mise en forme par plusieurs séquences de déformation plastique et recuits. Il reste à déterminer, pour chaque pièce, l’importance de ce travail de reprise de la forme et de la surface en post-fonderie, ainsi que la technique du moule. Les décors témoignent également d’une déformation plastique assez conséquente, induisant la mise en œuvre de la technique de la ciselure dans leur réalisation. Le bracelet n° 208 présente des indices technologiques particulièrement atypiques (fig. 13) qui montrent une chaîne opératoire associant fonderie (le produit obtenu à la fonte est une ébauche à section plano-convexe flanquée de méplats latéraux) et opérations de post-fonderie (cintrage et décor par ciselure). Bien qu’encore partiels, notons que ces premiers résultats ne semblent pas aller dans la même direction que ceux obtenus lors des différentes sessions d’expérimentations (Cf. Nordez, ce volume : infra 2. 3). Afin de préciser la chaîne opératoire de chaque pièce examinée, les observations microscopiques doivent désormais être comparées aux résultats d’autres études métallographiques et éventuellement d’objets issus d’expérimentations. Le traitement des données et la discussion des résultats se feront au cours du 1er semestre 2016, et seront présentés de manière exhaustive dans le rapport d’activité 2016, puis dans une publication. Sn % 6,4 14,4 13,4 5 15,4 6,5 14,5 13,6 5,2 15,6 6,6 14,6 14 5,3 15,7 Fig. 11. Analyses de composition des six objets prélevés. Les teneurs en étain sont indiquées en pourcentage massique, par la valeur moyenne et par la dispersion des différentes analyses (en italique). 62 3.4. Et après les analyses ? Généralement, les musées ne restaurent pas les artefacts ayant fait l’objet de prélèvements, et au contraire les présentent en l’état. Par exemple, lors de l’étude du dépôt métallique du Chalet I à Saint-Germain-d’Esteuil (Gironde), conservé au musée Le Campaniforme et l’âge du Bronze dans les Pays de la Loire - Rapport d’activité 2015 Fig. 12. Bracelet n° 859.8.1 en microscopie électronique. La structure est hétérogène avec la présence de pores de petites dimensions en surface et plus gros au cœur de l’échantillon. On aperçoit les profils des traits du décor. d’Aquitaine de Bordeaux, une exposition a été mise en place autour du dépôt. Le conservateur, V. Mistrot, a choisi de mettre en valeur l’étude technologique réalisée en présentant aux visiteurs les objets prélevés, accompagnés des échantillons et de panneaux explicatifs. Le prélèvement permet de dégager une zone au sein de laquelle le métal est sain, donc de couleur dorée, et apparaît ainsi la véritable couleur de l’objet lorsqu’il était utilisé à l’âge du Bronze (fig. 8). Cela avait étonné le grand public, habitué à la couche de corrosion verte, et avait suscité de nombreuses questions sur le métal et les techniques de fabrication à l’époque. Fig. 13. Micrographie optique du bracelet n° 208. La surface observée, au niveau du profil d’un trait du décor montre une corrosion périphérique importante. Le bord externe est recouvert de grains de recristallisation, témoins d’une reprise de l’objet après la fonderie (déformation plastique et recuit) alors qu’à cœur, la microstructure dendritique est encore présente. Remerciements Nous tenons ici à remercier Mesdames J. Mongellaz et L. Barthet, respectivement conservatrices du Château-musée de Saumur et du musée Dobrée à Nantes, pour avoir autorisé la réalisation de ces prélèvements. Merci également à N. Gabdin, adjointe du patrimoine au Château-musée de Saumur, à C. Québriac, régisseuse des collections du musée Dobrée, ainsi qu’à L. Bouquet, pour la gestion de ce dossier ainsi que pour le transport des objets. Nos remerciements vont aussi au SRA des Pays de la Loire pour leur soutien dans ce projet, ainsi qu’à N. Gautier de l’Institut des matériaux de Nantes pour la réalisation des prélèvements. Une fois les analyses terminées, le Enfin, un grand merci à S. Lemoine, L. Rosprélèvement, l’ensemble de la documentasetti et C. Pelé d’Arc’Antique pour leur disponibilité, tion collectée ainsi que le rapport d’étude et à l’ensemble du laboratoire pour leur accueil, seront restitués aux institutions ayant actoujours aussi chaleureux. cepté ce protocole, l’objectif étant ultérieurement d’aboutir à la publication des résultats. D’éventuelles recherches ultérieures pourront bien sûr réutiliser l’échantillon, conservé dans le musée ou la collection détenant l’objet auquel il se rattache. 63 Le Campaniforme et l’âge du Bronze dans les Pays de la Loire - Rapport d’activité 2015 BIBLIOGRAPHIE dings, Aquileia, Italie, 17-21 juin 2007, cederom. BOULUD-GAZO S., NORDEZ M., BLANCHET S., BOUVET J.-P. (2012) – Des bracelets placés en dépôts. Trois découvertes récentes dans le Grand Ouest, Bulletin de l’Association pour la Promotion des Recherches sur l’Âge du Bronze, 10, p. 75-81. LEHOËRFF A. (1999) – Le travail en laboratoire au service de l’Histoire de l’artisanat métallurgique du début du premier millénaire avant notre ère en Italie, Mélanges de l’École française de Rome. Antiquité, 111, 2, p. 787-846. BOULUD-GAZO S., MÉLIN M., NORDEZ M. 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