Actes du 26ème Congrès International de l’AFM – Le Mans-Angers, 6 et 7 mai 2010
Les publicités émotionnelles : Quelle efficacité auprès des personnes âgées ?
Imen SAFRAOU-OUADRANI
Enseignant-Chercheur
ESG de Paris
Centre de recherche CERESG
25 Rue Saint-Ambroise, 75011 Paris,
i_mafarou@yahoo.fr,
0153364414
Denis GUIOT
Professeur
UNIVERSITE PARIS-DAUPHINE
Centre de recherche DRM-DMSP
Actes du 26ème Congrès International de l’AFM – Le Mans-Angers, 6 et 7 mai 2010
Les publicités émotionnelles : Quelle efficacité auprès des personnes âgées ?
Résumé :
Cette recherche propose de tester un cadre conceptuel qui permet de comparer les réponses
des plus de 60 ans et d’individus plus jeunes à différentes stratégies publicitaires. Les
principaux résultats sont les suivants : (1) l’âge chronologique exerce une influence sur les
réponses affectives et cognitives aux différents types de publicité, âgés est forte, les réponses
affectives des 60-75 ans à la publicité sont plus favorables, (2) lors de l’exposition à des
publicités à dominante émotionnelle positive, les 60-75 ans manifestent des réponses
affectives et cognitives plus favorables que lors de l’exposition à des publicités à dominante
informationnelle.
Mots clés
Âge chronologique, Personnes âgées, Publicité émotionnelle, Publicité informationnelle.
Emotional Ads: Witch efficiency toward older persons?
Abstract:
This research suggests testing a model which allows comparing the answers of the older
persons and the younger individuals to different advertising strategies. The results suggest
that: (1) chronological age has an influence on affective and cognitive responses toward the
different types of ads, (2) during the exposure to emotional ads, the 60-75 years persons
shows more favorable cognitive and affective responses than during the exposure to
informational ads.
Key words
Chronological age, Emotional Ads, Elderly, Informational Ads.
Actes du 26ème Congrès International de l’AFM – Le Mans-Angers, 6 et 7 mai 2010
Les publicités émotionnelles : Quelle efficacité auprès des personnes âgées ?
Introduction
Un phénomène important qui caractérise notre siècle est « le vieillissement démographique ».
Pour les années à venir, les personnes âgées vont représenter le segment de population le plus
important. En raison de leurs potentiels démographique et économique, les seniors ont attiré
l’attention des responsables marketing qui cherchent à les conquérir de façon efficace. Il
convient alors de déterminer la stratégie publicitaire la plus efficace pour influencer les
croyances, attitudes et comportements des seniors. Force est de constater que la littérature
actuelle académique et managériale n’apporte pas ou peu de réponses en matière de choix du
type de publicité à privilégier pour atteindre les seniors: les praticiens semblent recommander
le recours à des messages de nature informationnelle avec toutefois des éléments d’exécution
relatifs aux modes de présentation des plus de 60 ans et de leur entourage susceptible de
véhiculer des émotions (Tréguer, 2002 ; Wydouw, 1995). Quant aux chercheurs, ils
soulignent l’ambiguïté des résultats contrastant l’efficacité des messages informationnels vs.
émotionnels, compte tenu du nombre encore trop réduit d’études comparatives dans ce
domaine (Perrien, Guiot, Roy et Bastin, 1997). Afin d’y pallier, cette recherche propose de
tester un cadre conceptuel fondé sur la théorie de la sélectivité socio-émotionnelle (Fung, Rice
et Carstensen, 2005) qui permet de comparer les réponses des plus de 60 ans et d’individus
plus jeunes à différentes stratégies publicitaires variant en fonction de leur contenu
(informationnelles versus émotionnelles).
1
Actes du 26ème Congrès International de l’AFM – Le Mans-Angers, 6 et 7 mai 2010
1
1.1
Cadre théorique et conceptualisation de la recherche
Influence de l’âge chronologique sur le processus de persuasion publicitaire
En vieillissant, certaines personnes âgées deviennent physiquement de plus en plus faibles ;
elles ont donc des besoins différents dus au vieillissement de leurs corps. De plus, les plus de
60 ans présentent des particularités sur le plan psychologique. En effet, comparés aux
individus plus jeunes, ils ont plus de difficultés à traiter l’information. Ainsi, il paraît logique
de conclure qu’ils doivent être considérés différemment du reste des autres segments des
personnes moins âgées. Ils ont des besoins, des attitudes et des comportements différents. Il
faut aussi noter que les plus de 60 ans présentent des différences significatives avec les plus
jeunes en matière de traitement de l’information (Phillips et Sternthal, 1977). Par ailleurs, un
grand nombre de chercheurs (McGuire, 1985 ; Schlinger 1979) postulent que les réponses
cognitives et affectives à la publicité ainsi que l’efficacité de cette dernière peuvent être
affectées par des facteurs comportant les caractéristiques démographiques des individus telle
que leur âge chronologique. En effet, il a été établi, et à maintes reprises, que des personnes
d’âges différents répondent différemment aussi bien à des publicités émotionnelles (Mroczek
et Kolarz, 1998) qu’à des publicités informationnelles (Moore-Shay et Lutz, 2000). On peut
donc conclure que les plus de 60 ans réagissent de manière différente que les individus plus
jeunes à l’égard des différents types de publicités.
1.2
Influence
du
contenu
de
la
publicité
(à
dominante
émotionnelle
vs
informationnelle) sur le processus de persuasion des seniors
Afin de bien cerner le fonctionnement des publicités émotionnelles vs informationnelles
auprès de la cible particulière des plus de 60 ans, il convient, tout d’abord, d’étudier et de
comprendre les processus cognitifs et affectifs des personnes âgées. Comme nous l’avons déjà
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Actes du 26ème Congrès International de l’AFM – Le Mans-Angers, 6 et 7 mai 2010
souligné, certaines vieilles personnes présentent, avec l’âge, des difficultés physiques et
psychologiques. En effet, comparés aux individus plus jeunes, elles ont plus de difficultés à
s’engager dans un processus de raisonnement, à se concentrer, à se souvenir ou à comprendre
des informations complexes. La littérature en marketing (Cole et Houston, 1987) et en
gérontologie (Perlmutter, 1979) suggère que les plus de 60 ans ont plus de difficultés à traiter
l’information et surtout dans le cas où cette dernière est véhiculée de manière rapide ou
encombrée dans les messages publicitaires (Stephens, 1982). Il a été démontré que les seniors
ont des difficultés au niveau de l’attention sélective (Plude, 1990), de la mémorisation (De
Ladoucette, 1997), de la résolution des problèmes (Salthouse, 1996)…
Par ailleurs, plusieurs chercheurs en psychologie sociale et en gérontologie ont établi
différentes théories afin de mieux comprendre et d’expliquer les motivations et
comportements des personnes âgées. Parmi les plus connues ont peut citer la théorie de « la
sélectivité socio-émotionnelle » (Carstensen et Charles, 1998 ; Carstensen, Isaacowitz et
Charles, 1999). Cette dernière postule que plus on approche de la fin, plus on réorganise la
hiérarchisation de nos buts de manière à donner la priorité aux buts à sens émotionnels par
rapport à ceux liés au savoir (Fung, Rice et Carstensen, 2005). Puisque l’âge chronologique
est inversement corrélé au temps perçu restant à vivre, la TSS postule que les buts
émotionnels deviennent plus importants avec l’âge. On peut donc conclure que des stratégies
publicitaires à dominante émotionnelle (qui véhiculent des émotions positives) seraient plus
efficaces que celles à dominante informationnelle afin de mieux influencer les attitudes et
comportements des plus de 60 ans.
Le cadre conceptuel de notre étude découle directement de nos objectifs, à savoir expliquer et
analyser la formation des attitudes des personnes âgées à l’égard de la marque lors de
l’exposition à des styles publicitaires différents. Nous avons donc décidé d’inclure dans notre
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cadre conceptuel les effets de l’âge chronologique et du type de la publicité sur les réponses à
la publicité des plus de 60 ans (voir figure 1).
RADA
Types de publicités
Croyances envers
l’annonce
Emotionnelle
Informationnelle
Croyances envers
la marque
Âge chronologique
Attitudes envers
l’annonce
Jeunes adultes
Personnes âgées
Attitudes envers
la marque
Rappel
Figure 1 : Cadre conceptuel
2
Hypothèses de la recherche
Nos hypothèses de recherche résument les différents liens qui existent entre les variables de
notre modèle. Elles sont formulées dans le cadre de l’exposition de deux groupes d’âge (20-35
ans et 60-75 ans) à deux types de publicité (émotionnelle et informationnelle). Nous
aborderons dans ce qui suit les hypothèses relatives à l’influence de l’âge chronologique et du
type de publicité sur les variables du processus de persuasion publicitaire.
2.1
Les hypothèses relatives à l’influence de l’âge chronologique sur les variables du
processus de persuasion publicitaire
Dans ce qui précède, nous avons pu conclure que les plus de 60 ans réagissent de manière
différente que les individus plus jeunes à l’égard des différents types de publicités. D’où les
hypothèses de recherche suivantes :
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H1-a : Lors de l’exposition à des publicités informationnelles, les plus de 60 ans (60 à 75
ans) se rappellent moins facilement du nom de marque que les jeunes adultes (20 à 35
ans).
H1-b : Lors de l’exposition à des publicités informationnelles, les plus de 60 ans
développent des croyances à l’égard de l’annonce moins favorables que les jeunes
adultes.
H1-c : Lors de l’exposition à des publicités informationnelles, les plus de 60 ans
développent des croyances à l’égard de la marque moins favorables que les jeunes
adultes.
H1-d : Lors de l’exposition à des publicités émotionnelles, les réactions affectives
positives déclenchées par l’annonce sont plus intenses chez les plus de 60 ans que chez
les jeunes adultes.
H1-e : Lors de l’exposition à des publicités émotionnelles, les réactions affectives
négatives déclenchées par l’annonce sont moins intenses chez les plus de 60 ans que chez
les jeunes adultes.
H1-f : Lors de l’exposition à des publicités émotionnelles, les plus de 60 ans développent
des attitudes à l’égard de l’annonce plus favorables que les jeunes adultes.
H1-g : Lors de l’exposition à des publicités émotionnelles, les plus de 60 ans développent
des attitudes à l’égard de la marque plus favorables que les jeunes adultes.
5
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3
3.1
Méthodologie de la recherche
Contexte de l’étude
L’objectif principal de cet article étant d’apporter d’avantage d’éclaircissements sur les
mécanismes de la persuasion publicitaire et des processus de formation des attitudes des
seniors, on a été amené à travailler dans un contexte d’exposition publicitaire particulier. En
effet, nous avons décidé de sélectionner des publicités variant au niveau de leur contenu
(émotionnel vs informationnel) et ce pour des marques inconnues.
Le choix de ce contexte d’étude particulier a été motivé par plusieurs raisons. Tout d’abord,
les différentes stratégies publicitaires vont nous servir de base de comparaison afin de
déterminer la stratégie la mieux adaptée à la cible particulière des seniors. De plus, on a arrêté
notre choix sur des annonces publicitaires pour des marques inconnues car l’impact d’une
annonce publicitaire est moins important lorsque le consommateur connaît déjà la marque. En
effet, l’attitude envers la marque après exposition peut être fortement influencée par les
croyances et l’attitude à priori envers cette marque (Derbaix, 1995).
3.1.1 Sélection du produit et de la marque
Dans la présente recherche, nous allons étudier deux groupes d’âge (les personnes âgées de 20
à 35 ans et celles âgées de 60 à 75ans). Ainsi, pour s’assurer de la familiarité des individus
avec le produit testé, c'est-à-dire que le produit soit consommé aussi bien par des jeunes
adultes que par des personnes âgées, nous avons opté pour un produit intergénérationnel, à
savoir le voyage.
En ce qui concerne le choix de la marque, nous avons opté pour une marque inconnue
« ALPHA TOUR », et ce pour deux principales raisons : 1. La marque inconnue limite
l’influence de l’attitude préalable à la marque et permet d’engendrer chez les individus une
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première attitude dont l’impact serait plus important (Mitchell et Olson, 1981 ; MacKenzie et
Spreng, 1992), 2. Travailler avec une marque connue limite l’impact d’une annonce
publicitaire car les individus vont se baser sur les informations préalables pour se forger une
attitude à posteriori (Brown et Stayman, 1992). De plus, l’attitude à l’égard de la marque sera
fortement influencée par les croyances à priori (Derbaix, 1995).
3.1.2 Sélection du média et des annonces publicitaires
Pour cette étude, nous cherchons des publicités pour des marques inconnues qui varient au
niveau de leur caractère émotionnel et informationnel. Mais avant de déterminer les annonces
qui feront l’objet de notre expérimentation, nous tenons tout d’abord à préciser la nature du
média sélectionné.
Pour notre étude nous optons pour le média presse (annonces magazine). Ce choix a été
motivé par plusieurs raisons : Tout d’abord, le média presse représente pour les personnes
âgées le moyen le plus approprié pour acquérir des informations concernant les produits et les
services (Neyrac, 1997). En effet, contrairement au média télévisé, où il est difficile de
maîtriser les flux d’information, le média presse permet aux personnes âgées de s’informer à
leur rythme et de revenir sur les informations complexes, mal comprises ou oubliées. Ensuite,
selon une étude Interdeco (2000), les personnes âgées sont les champions de l’abonnement
aux journaux, revues et magazines avec une moyenne de 38%. Enfin, et en cas de la nécessité
de création ou de modification des annonces à tester (caractère émotionnel vs informationnel
de l’annonce), le média presse permet de le faire plus facilement et à un moindre coût.
En ce qui concerne le choix des annonces publicitaires qui feront l’objet de l’expérimentation,
nous avons tenu compte de notre objectif principal, à savoir, tester l’efficacité des publicités à
dominante émotionnelle positive auprès des seniors. Nous devons donc les comparer à l’autre
autre type de publicités, à savoir, à dominante informationnelle. Afin de réussir la
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comparaison, nous avons opté pour une même catégorie de produit et pour une même marque.
De
plus
nous
avons
sélectionné
deux
annonces
publicitaires
(émotionnelle
et
informationnelle) de contrôle, où il n’y aura aucun personnage présent dans la publicité.
Par ailleurs, il faut signaler que comme pour la marque, nous avons opté pour des annonces
inconnues afin de limiter l’influence de l’attitude préalable à l’annonce. Nous allons donc
tenter de créer nos propres annonces publicitaires. Pour ce faire, deux cas de figures sont à
prévoir : une publicité à dominante émotionnelle et une publicité à dominante
informationnelle.
3.2
Échantillon
600 individus ont participé à notre étude, 300 personnes âgées (entre 60 et 75 ans) recrutées
dans des universités de 3ème âge à paris et 300 jeunes adultes (de 20 à 35 ans) issus
d’établissements universitaires parisiens. Chaque individu a été exposé aux deux publicités et
a été amené à répondre à un certain nombre de questions et de fournir des informations,
notamment, concernant leur âge chronologique, leurs réactions affectives, leurs croyances et
attitudes à l’égard de la publicité et à l’égard de la marque.
3.3
Mesures
Pour mesurer l’âge chronologique, nous avons choisi la mesure relative à l’année de
naissance. En effet, les personnes âgées peuvent ne pas vouloir donner leur âge exact ou leur
catégorie d’âge d’appartenance. Ils risquent de vouloir mentir sur leur vrai âge. Pour éviter
cela, nous leur avons demandé d’indiquer leur année de naissance.
Afin de mesurer les réactions affectives déclenchées par l’annonce, nous avons opté pour
l’échelle de Derbaix (1995) qui présente l’avantage d’avoir déjà été utilisée, à plusieurs
reprises, dans un contexte d’exposition à des publicités émotionnelles francophones. Cette
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échelle se compose d’une liste de 21 items dont 14 adjectifs décrivant des réactions affectives
susceptibles d’être déclenchées par la publicité et 7 émotions que nous retrouvons dans les
huit émotions primaires (la peur, la surprise, la tristesse, le dégoût, la colère, l’anticipation, la
joie et l’acceptation) décrites par Plutchik (1980). Pour chacun des items, les répondants sont
invités à préciser dans quelle mesure ils ont ressenti cette réaction affective sur une échelle
en 4 points allant de « pas du tout » à « beaucoup ».
Pour mesurer les croyances à l’égard de l’annonce, nous avons choisi l’échelle développée par
Derbaix (1995). Inspirée des travaux de Minard, Bathla et Rose (1990) et réalisée avec Embs
et Kapferer, elle se compose de 11 items. Les éléments d’exécution sont appréciés au moyen
de 7 supports sémantiques portant sur les personnages, la musique, les couleurs, le rythme, la
qualité de l’histoire, le scénario et l’atmosphère générale tandis que 4 autres se focalisent sur
l’importance des arguments, leur pouvoir convaincant, leur contenu informatif et la qualité de
leur développement.
Dans le cadre de notre étude, nous avons opté pour l’élimination de 4 items des éléments
d’exécution focalisés sur la musique, le rythme de la publicité, la qualité de l’histoire et le
scénario et ce dans un souci d’adaptation de l’échelle à nos publicités (impossibilité d’évaluer
l’importance de ces éléments d’exécution dans le cadre d’annonces publicitaires dans le
média presse).
Par ailleurs, cette échelle a déjà fait l’objet d’études récentes en publicité telles que les
travaux de Onnein-Bonnefoy (1999), Chevalier (2000) ou encore Boulbry (2003). La fiabilité
et la validité de cette échelle ont bien été vérifiées lors de ces études. De plus, la qualité de
cette échelle a été démontrée auprès des plus de 60 ans, aussi bien dans la recherche de
Chevalier (2000), que dans celle de Boulbry (2003).
En ce qui concerne la mesure des croyances à l’égard de la marque, nous avons eu recours à la
méthode de Mittal (1994) en interrogeant, au préalable, 13 personnes appartenant à la cible du
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produit présenté dans l’annonce publicitaire. Nous leur avons posé la question suivante
« quels éléments ou caractéristiques du produit peut-on prendre en considération lorsqu’on
achète (type du produit) ? ». Nous avons ensuite sélectionné cinq attributs les plus souvent
cités.
Afin de mesurer les attitudes à l’égard de l’annonce, Gardner (1985) ; MacKenzie, Lutz and
Belch (1986) retiennent cinq items et ce au moyen de 5 échelles à sémantique différentielle en
7 points sur les items suivants : publicité bonne/mauvaise, aimer/ne pas aimer la publicité,
intéressante/sans intérêt, créative/non créative et informative/non informative.
D’après Gardner (1985), l’attitude à l’égard de la marque est mesurée par 4 échelles à
sémantique différentielle en 7 points sur les items suivants : bonne /mauvaise marque,
aimer/ne pas aimer la marque, plaisante/déplaisante et bonne/mauvais qualité.
4
4.1
Validation des hypothèses de recherche
Influence de l’âge chronologique sur les réponses à la publicité
Afin de tester l’influence de l’âge chronologique sur les réponses à la publicité, nous avons
comparé entre les réponses affectives et cognitives des personnes âgées (300 individus) et des
jeunes adultes (300 individus) à des publicités émotionnelles et des publicités
informationnelles, et ce moyennant des tests T de comparaison de moyennes. Les résultats
obtenus sont les suivants :
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Actes du 26ème Congrès International de l’AFM – Le Mans-Angers, 6 et 7 mai 2010
Moyenne
RAPPEL
J
0.95
V
0.51
CROYPUB J
5.5325
V
3.4025
CROYPROD J
5.3980
V
3.3080
T
Sig
8.028
0.000
11.544
0.000
12.168
0.000
Tableau 2 : Influence de l’âge chronologique sur les réponses cognitives
lors de l’exposition à des publicités informationnelles
On peut constater que l’âge chronologique exerce une influence significative aussi bien sur le
rappel du nom de la marque (t=8.028, p=0.000) que sur les croyances (respectivement
t=11.544, p=0.000 et t=12.168, p=0.000) au seuil de 5%. Ainsi on peut dire que, lors de
l’exposition à des publicités informationnelles, les personnes âgées se rappellent moins
facilement du nom de la marque que les jeunes adultes. De plus, les réponses cognitives des
personnes âgées sont moins favorables que celles des jeunes adultes, lors de l’exposition à des
publicités informationnelles. L’hypothèse relative à l’influence de l’âge chronologique sur les
réponses cognitives à la publicité est totalement validée.
Afin d’affiner nos résultats et de déterminer la présence de différences statistiquement
significatives entre les effets moyens provoqués par des variables indépendantes (catégorie
d’âge chronologique), après avoir fait la part de l'influence causée sur les résultats par des
variables dépendantes (réponses cognitives), nous procéderons à une MANOVA. Les
principaux résultats sont présentés dans le tableau ci-dessous.
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Actes du 26ème Congrès International de l’AFM – Le Mans-Angers, 6 et 7 mai 2010
Catégorie d’âge
F
Ddl de l’hypothèse
Erreur ddl
Signification
74.524
3
196
<0.001
Tableau 3 : Résultats de la MANOVA concernant l’influence de l’âge chronologique sur
les réponses cognitives lors de l’exposition à des publicités informationnelles
Ce tableau nous montre que la catégorie d’âge (J/V) exerce une influence très significative sur
les réponses cognitives à la publicité. Nous allons maintenant étudier l’influence de chaque
catégorie d’âge sur chacune des réponses cognitives à la publicité.
J
V
F
Sig
RAPPEL
0.950
0.510
64.447
0.000
CROYPUB
5.533
3.403
133.253 0.000
CROYPROD 5.398
3.308
148.059 0.000
Tableau 4 : Résultats de la MANOVA concernant l’influence de l’âge chronologique
(J/V) sur chacune des réponses cognitives
Nos résultats nous indiquent que la catégorie d’âge influence significativement les réponses
cognitives à la publicité. En ce qui concerne le sens des relations, il apparaît que les réponses
cognitives des jeunes adultes à la publicité sont plus favorables que celles des personnes âgées
lors de l’exposition à des publicités informationnelles.
Nous allons, dans ce qui suit, tester les hypothèses relatives à l’influence de l’âge
chronologique sur les réponses à la publicité, lors de l’exposition à des publicités
émotionnelles. Les résultats obtenus sont les suivants :
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Moyenne
RADAP
J
2.8325
V
3.2808
J
2.8375
V
5.4125
ATTPROD J
2.6600
V
5.3175
ATTPUB
T
Sig
-2.976
0.003
-12.849
0.000
-12.822
0.000
Tableau 5 : Influence de l’âge chronologique sur les réponses affective lors de
l’exposition à des publicités émotionnelles
On peut constater que l’âge chronologique exerce une influence significative sur les RADA
positives (t=-2.976, p=0.003), les attitudes à l’égard de la publicité (t=-12.849, p=0.000) et à
l’égard de la marque (t=-12.822, p=0.000) au seuil de 5%. On peut donc conclure que lors de
l’exposition à des publicités émotionnelles, les personnes âgées (plus de 60 ans) développent
des réponses affectives (RADA et Attitudes) plus favorables que les jeunes adultes. Notre
première hypothèse est totalement validée.
Afin d’affiner nos résultats, nous procéderons à une MANOVA. Les ésultats sont :
Catégorie d’âge
F
Ddl de l’hypothèse
Erreur ddl
Signification
55.786
3
196
<0.001
Tableau 6 : Résultats de la MANOVA concernant l’influence de l’âge chronologique sur
l’ensemble des réponses affectives lors de l’exposition à des publicités émotionnelles
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Ce tableau nous montre que la catégorie d’âge (J/V) exerce une influence très significative sur
les réponses affectives à la publicité. Nous allons maintenant étudier l’influence de chaque
catégorie d’âge sur chacune des réponses affectives à la publicité.
J
V
F
Sig
RADAP
2.833
3.281
8.857
0.000
ATTPUB
2.837
5.412
165.101 0.000
ATTPROD
2.660
5.318
164.395 0.000
Tableau 7 : Résultats de la MANOVA concernant l’influence de l’âge chronologique
(J/V) sur chacune des réponses affectives lors de l’exposition à des publicités
émotionnelles
Nos résultats nous indiquent que la catégorie d’âge influence significativement les réponses
affectives à la publicité. En ce qui concerne le sens des relations, il apparaît que les réponses
affectives des personnes âgées à la publicité sont plus favorables que celles des jeunes adultes
lors de l’exposition à des publicités émotionnelles.
5
Discussion des résultats
Dans cette section on se propose de revenir sur les résultats, précédemment exposés, et de les
interpréter, en les confrontant aux conclusions des recherches déjà menées dans le domaine de
la persuasion publicitaire auprès des seniors, afin d’en apprécier leur portée.
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5.1
Influence de l’âge chronologique sur les réponses à la publicité
Les résultats de cette recherche ont conduit à conclure que l’âge chronologique exerce une
influence sur les réponses cognitives (mémorisations, croyances) et affectives (réactions
affectives, attitudes) à la publicité. Dans un premier temps, on a pu démontrer que les seniors
réagissent de manière différente que les individus plus jeunes à l’égard des publicités
informationnelles. En effet, les réponses cognitives, telles que la mémorisation du nom de
marque, les croyances envers l’annonce et envers la marque, sont moins favorables chez les
60-75 ans que chez les 20-35 ans. Ces résultats peuvent êtres expliqués par le fait qu’en
vieillissant, certaines personnes âgées peuvent rencontrer des difficultés physiques,
psychologiques et cognitives qui vont avoir des conséquences négatives sur les processus de
traitement de l’information, sur le processus de mémorisation et de résolution de problème, de
manière générale et dans le domaine de la persuasion publicitaire en particulier. L’influence
de l’âge chronologique sur les réponses cognitives à la publicité a été démontré dans plusieurs
recherches (Moschis, 1994 ; Park et al., 1996 ; 1997 ; Salthouse, 1996 ; Moore-Shay et Lutz,
2000 ; Perrien, Roy et Bastin,1991 ; Perrien et al., 1997). Par ailleurs, l’influence positive de
l’âge chronologique sur les réponses affectives des personnes âgées à la publicité constitue un
autre résultat intéressant de notre recherche. Cette influence a été plusieurs fois mise en
évidence auparavant. En effet, Mroczek et Kolarz (1998) suggèrent que les personnes âgées
répondent différemment que les individus plus jeunes, à des publicités émotionnelles. Perrien,
Roy et Bastin (1991) ont montré que les plus de 60 ans, se rappellent plus facilement, des
informations émotionnelles positives, développent des réactions affectives (émotions et
attitudes à l’égard de l’annonce et de la marque) plus favorables que les individus plus jeunes.
Les résultats de notre recherche confirment l’ensemble de ces constats. En effet, on a pu
conclure que les réponses affectives, telles que les réactions affectives déclenchées par
l’annonce, les attitudes envers l’annonce et envers la marque sont plus favorables chez les 60-
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Actes du 26ème Congrès International de l’AFM – Le Mans-Angers, 6 et 7 mai 2010
75 ans que chez les 20-35 ans lors de l’exposition à des publicités émotionnelles. Ces résultats
peuvent être expliqués par le fait que contrairement à certains processus cognitifs, la
régulation des émotions s’améliore avec l’âge. Plusieurs chercheurs (Gross, 1998 ; Carstensen
et Charles, 1998 ; Carstensen, Fung et Charles, 2003) ont démontré qu’en plus de leur
préférence pour les expériences émotionnelles, les personnes âgées régulent leurs émotions
plus efficacement que les jeunes adultes. De plus, comme un grand nombre de chercheurs
(Spotts, 1990 ; Ahlawat et Spotts, 1992 ; Perrien et al., 1991 ; Perrien, Roy, Guiot et Bastin,
1997) ont a pu montrer que, lors de l’exposition à des publicités émotionnelles, les plus de 60
ans mémorisent mieux les informations émotionnelles, développent des réactions affectives,
des attitudes à l’égard de l’annonce et à l’égard du produit plus favorables que des individus
plus jeunes.
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