Introduction
Statut et expérience, transmission et
attention dans les pratiques de la
citoyenneté et de la diversité
Bianca BOTEA(1), Dana POPESCU-JOURDY(2)
(1) Université Lyon 2, Laboratoire d’Anthropologie des Enjeux Contemporains,
(2) Université Lyon 2, Laboratoire Éducation, Cultures, Politiques.
Résumé : Issu de différents chantiers de travail commun entre plusieurs disciplines au sein de l’Université
Lyon 2, élargis ensuite à d’autres réseaux de recherche, ce volume met en lumière quelques manifestations
contemporaines des discours et des pratiques de la diversité et de la citoyenneté. L’angle abordé est celui
pluridisciplinaire, par le prisme de quelques études de cas menées principalement en Europe, avec un
éclairage venant aussi des sociétés d’Afrique. L’introduction de ce volume présentera quelques clés de
lecture transversales à cette pluralité d’approches.
Mots-clés : citoyenneté, diversité, expérience, transmission, apprentissage, attention
Issu d’un colloque international1 et de différents chantiers de travail commun entre
l’anthropologie et les sciences de la communication au sein de l’Université Lyon 2 élargis ensuite à d’autres réseaux de recherche, ce volume met en lumière quelques manifestations contemporaines des discours et des pratiques de la diversité et de la citoyenneté. L’angle abordé est celui pluridisciplinaire, par le prisme de quelques études
de cas menées principalement en Europe, avec un éclairage venant aussi des sociétés
d’Afrique. L’introduction de ce volume présentera quelques clés de lecture transversales à cette pluralité d’approches.
1
Le point de départ des réflexions de ce volume se situe au niveau d’un colloque international organisé
à Bucarest en octobre 2016, intitulé Nouveaux lieux, discours et pratiques de la diversité et de la citoyenneté. Approches interdisciplinaires et mises en perspective européennes, par l’Université Lyon 2,
le Centre Régional Francophone d’Études Avancées en Sciences Sociales (CeReFREA) et l’Université de
Bucarest.
2
Introduction
Les théories récentes du multiculturalisme, du genre, de la diversité culturelle, de la
cohésion sociale posent la question de la transformation de la citoyenneté à la lumière
du pluralisme identitaire et de la diversité au sein des sociétés démocratiques.
Alors que la citoyenneté désigne traditionnellement le statut d’égalité individuelle
devant la loi et une unité plus large d’appartenance, cela est perçu à certains niveaux
comme étant en opposition avec des identités culturelles « locales ». La lutte pour
l’égalité entre communautés est doublée par celle pour l’égalité entre individus. Dans
quelle mesure, en termes d’identités, la notion de diversité peut-elle être pensée en
dehors d’une réduction binaire assez souvent conflictuelle : l’Autre est « différent »,
autrement dit incompatible avec soi. Car selon cette logique réductrice, cette qualité
de différence et d’incompatibilité attribuée a priori à l’Autre serait responsable de
tensions et blocages dans les processus de partage et d’action collective. Comme pour
la notion de citoyenneté, la diversité peut poser le problème de la dilution conceptuelle
dans des discours trop souvent idéologiques.
Nous avons souhaité réinterroger ici la diversité, en choisissant une articulation spécifique avec la citoyenneté, plus précisément avec la distinction que nous faisons entre
citoyenneté de statut et citoyenneté en acte. Cet éclairage nous semble intéressant
puisqu’il nous invite à réinterroger sous le même angle la question de la diversité.
Si ce volume a pour genèse un pari autour de l’intérêt d’articuler ces deux notions,
son résultat, par les textes présentés ici, ne porte pas tant sur cette articulation,
considérée en soi et de manière explicite, mais sur ce qu’elle a généré en tant qu’espace
de réflexion. Deux fils rouges se sont révélés par les correspondances établies au fur à
mesure entre les textes des auteurs : d’une part, la mise en lumière de deux approches
de la citoyenneté et de la diversité, une approche des statuts et une approche de
l’expérience ; d’autre part, deux conceptions de l’apprentissage que mettent en lumière
les dispositifs de diversité et de citoyenneté, la transmission et l’attention. C’est sous
cet angle et en partant de ces deux directions de recherche que les textes de ce volume
peuvent être lus.
1
La perspective des citoyennetés en acte
La citoyenneté est une notion amplement travaillée et discutée, et si nous nous plaçons
dans une démarche pluridisciplinaire, la tâche de faire un état de l’art de la question
pourrait devenir l’objectif en soi de ce volume. Par conséquent, il ne s’agit pas ici
de revenir sur l’ensemble de ces approches, mais de s’arrêter plus précisément sur
quelques axes de recherche de ce champ d’études, lesquels traversent de nombreux
travaux déjà réalisés et qui renvoient également aux positionnements théoriques que
nous adopterons.
La problématique de la citoyenneté s’est historiquement constituée autour de la relation entre individu et État, et par dérivation, entre individu et nation ou autre
communauté de type politique. La citoyenneté fait classiquement « référence à l’appartenance des individus à une communauté politique, la ville, la nation ou autre
communauté » (Lazar, 2014 : 65). L’articulation de la notion de citoyenneté à l’appartenance politique a ouvert le champ d’analyse de la citoyenneté vers quelques
Published in : BOTEA, Bianca ; POPESCU-JOURDY, Dana (dir.), Pratiques de la diversité et de la citoyenneté. Statut et
expérience, Editions des archives contemporaines, ISBN : 9782813004215, doi : 10.17184/eac.9782813004215
B. BOTEA, D. POPESCU-JOURDY
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questions centrales dans ce champ : la participation politique, les pratiques de gouvernance, les politiques et pratiques d’exclusion ou de reconnaissance.
Comme le montre Sia Lazar, le sens et le questionnement autour de la citoyenneté
se sont constitués historiquement via deux filons de la philosophie politique, qu’il est
intéressant d’évoquer puisqu’ils pointent des éléments qui restent encore dominants
dans les perspectives actuelles dans ce champ en sciences sociales. D’une part, il
s’agit de la conception civique républicaine développée à partir de la Grèce Antique
autour de la participation politique et de la compétence de citoyenneté2 . D’autre part,
une conception de la citoyenneté comme statut (juridique), mettant l’accent sur la
question des droits (civiques, politiques, sociales) et des responsabilités des membres
citoyens, s’est développée à partir de la conception libérale de Locke et des théoriciens
du contrat social.
Cette double dimension, à la fois juridique (une citoyenneté de statut et des rôles)
et une citoyenneté qui s’acquiert par l’action de participation politique, ainsi que la
tension entre les deux, traverse la pluralité des études de la citoyenneté en sciences
sociales, et en particulier les études qui relèvent d’une approche ethnographique. Cette
dernière perspective, adoptée aussi par une grande partie des auteurs de ce volume,
a permis de
« relever et documenter des écarts déterminants entre ce qui est dit de la
citoyenneté et ce qui est fait en son nom, entre une citoyenneté énoncée
dans ses principes formels et institutionnels et une citoyenneté mise en
œuvre, mise en politique, mise en controverse, dans les différents domaines
de l’expertise et de l’expérience. » (Battegay, Derycke, Roux, Têtu : 2012).
Des travaux collectifs s’appuyant sur des recherches auprès des migrants, réfugiés et
autres personnes qui se trouvent exclus des cadres légaux de la citoyenneté (Gonzales,
Sidona : 2017), mettent en avant la richesse des espaces d’élaboration de la citoyenneté
et le spectre large de ces zones grises au-delà de la dichotomie entre citoyenneté
et non-citoyenneté, statut légal/illégal. Au-delà des formes légales de citoyenneté,
associées à l’exercice des droits légaux, des formes participatives de citoyenneté sont
à observer, signifiant une présence effective de ces personnes dans l’espace public et des
manifestations routinières de la citoyenneté (leur présence dans des relations sociales
locales, marché du travail, etc.). C’est par cette présence réelle et quotidienne dans
l’espace public que se construisent ces appartenances, au-delà des exclusions légales.
Les perspectives ethnographiques ont également permis un élargissement du champ
d’études de la citoyenneté et du politique au-delà de la sphère conventionnelle ou
institutionnelle de la politique, à savoir dans des pratiques sociales connexes (économiques, religieuses, écologiques, urbanistiques, etc.), autrement dit partout où la
question de la formulation et de la défense des biens communs et du vivre-ensemble
se pose et permet l’agencement des collectifs (Cefai, 2007 ; Neveu, Carrel, 2014).
2
Deux éléments sont présents dans la conception d’Aristote sur la citoyenneté chez les Grecques. Dans un
premier temps, est citoyen « un membre de la polis qui participe au gouvernement, qui donne son jugement
et occupe des fonctions ». Dans un second temps, la citoyenneté fait référence à une compétence détenue
par une personne de vivre dans une collectivité donnée. (Lazar, 2014 : 66)
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expérience, Editions des archives contemporaines, ISBN : 9782813004215, doi : 10.17184/eac.9782813004215
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Introduction
« La citoyenneté n’est pas celle du “un individu, une voix”, ni celle du “un
peuple, un parti” : elle se joue dans le déploiement de collectifs concrets et
provisoires qui pour certains gagnent l’opinion et parfois s’institutionnalisent, pour d’autres s’abîment dans le néant de l’indifférence publique. »
(Cefaï 2007 : 720).
À propos de ce prolongement de l’analyse de la citoyenneté à des sphères multiples
en dehors du champ conventionnel du politique, certains auteurs mettent en avant
des formes de « citoyenneté ordinaire » (Neveu, Carel : 2014), qui s’élaborent en dehors ou en marge des pratiques et des lieux « labellisés » par les approches classiques
de la citoyenneté (comme le vote, la campagne électorale, les réunions publiques, les
concertations ou les conseils de quartier). Dans un quartier lyonnais en rénovation
urbaine, Laetitia Overney (2014) montre les pratiques de la « petite politique » mises
en place par un réseau d’habitants. L’auteur désigne par « petite politique » des petites ressources, des arts de faire forgés au gré des attachements singuliers aux lieux et
par une vue de très près sur les problèmes, des pratiques orientées vers une forme de
vigilance sur les choses et sur les évènements qui arrivent dans le quartier, une veille
pour le bien commun de ses habitants. Pour donner un autre exemple de ces pratiques
de citoyenneté ordinaire, dans des zones de friches industrielles des quartiers de Bucarest dans la Roumanie postcommuniste, des habitants et des artistes récupèrent des
objets et des restes de ces zones abandonnées pour les réorganiser dans de nouvelles
scénographies dans des galeries d’art et provoquer autour d’eux des débats publics
sur le devenir de ces lieux. L’enjeu est aussi un travail autour de ce passé et autour
de cette mémoire à laquelle une grande partie de la population est attachée, mais qui
est en train de disparaître en absence d’une politique mémorielle et patrimoniale de
ce passé industriel (Chelcea, 2015). Dans l’ouvrage présent, Mathilde de Blignières
met en avant des pratiques de citoyenneté ordinaire qui s’élaborent dans le quotidien
de vie des habitants de deux villes de Tanzanie, à travers des pratiques de voisinage,
de réinvestissement de la rue et de quelques lieux publics, ou de la pratique de l’espace intérieur du chez-soi. D’autres auteurs comme Marc Derycke et Nadja Monnet
mettent en avant dans ce volume des pratiques de citoyenneté qui se déroulent dans
des foyers familiaux d’adoption et qui se prolongent (pour Nadja Monnet) dans les
pratiques de coexistence dans l’espace public.
Cette perspective portée sur les citoyennetés ordinaires présente un double intérêt.
D’une part, elle montre la pluralisation des espaces de production de la citoyenneté
et de la politique, d’autre part elle formule des critiques intéressantes par rapport
à certaines études réalisées dans le champ de la citoyenneté. Pour Catherine Neveu
et Marion Carrel, les perspectives institutionnelles de la citoyenneté s’appuient « sur
une conception spécifique pré-établie de ce que doit être/faire le citoyen, mesurant
davantage la conformité à cette norme que l’effectivité des pratiques citoyennes »
(ibid. : 7). L’approche des citoyennetés ordinaires relève quant à elle d’une démarche
non-normative, qui ne cible et ne définit pas préalablement le champ du politique et
de la citoyenneté, […] afin de saisir et de comprendre
« quand, comment et dans quelle mesure des attachements intimes ou sensibles à des lieux, à des modes de vie, à des relations, comment des formes
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de “ commune appartenance” peuvent constituer autant de supports de
citoyenneté ou de faire commun. » (ibid : 13).
Pour dépasser la dichotomie entre approches institutionnelles ou approches ordinaires
de la citoyenneté, entre les pratiques « par le haut » ou pratiques « par le bas », entre
les pratiques formelles ou informelles de la citoyenneté, certains auteurs adoptent
l’expression de « citoyennetés profanes » (Battegay, Derycke, Roux, Têtu : 2012). Le
terme de « profane » renvoie, d’une part, au fait que ces pratiques ne s’appuient pas
forcément sur une quête de visibilité dans l’espace public. D’autre part, le profane
n’est pas équivalent de non-expert. Ces pratiques composent avec des publics et des
registres différents de la citoyenneté puisque, comme ces auteurs l’affirment, l’appropriation démocratique s’actualise dans les croisements multiples entre ce que font
les institutions et ce que font les individus et les groupes. Ces approches sont ainsi
« attentives autant aux pratiques institutionnelles et administratives qui tendent à
modeler voire à contrôler les cadres formels ou pratiques de la citoyenneté officielle,
qu’aux activités générées par les individus ou les collectifs qui mettent en œuvre le
sentiment du “droit d’avoir des droits” […] » (ibid. : 8). Pour saisir ces pratiques de
citoyenneté, les auteurs proposent de regarder les « milieux traducteurs », autrement
dit l’ensemble d’acteurs, d’opérations, de lieux et milieux, de types de supports, de
connaissance et compétences, à travers lesquels l’expérience de citoyenneté se fait et
est rendue possible. C’est dans l’analyse de ces « milieux traducteurs », dans la dynamique de ces échanges de procédures et pratiques, de savoirs, de compétences, ainsi
que dans le dépassement de la dichotomie entre l’expert et le profane, que l’usage de
la notion de « citoyenneté profane » prend tout son intérêt.
En nous appuyant sur ces contributions sur les citoyennetés « ordinaires » et « profanes », sur l’engagement public et l’action collective, notre intention ici n’est pas
d’élaborer un (nouveau) modèle de pensée sur la citoyenneté et la diversité ni de
revenir sur la dichotomie entre les formes institutionnelles (ou institutionnalisées) de
la citoyenneté et leurs formes d’élaboration hors les murs. L’objectif de ce travail est
celui de partir de « lieux » et de dispositifs à travers lesquels se formulent et se définissent aujourd’hui des expériences et des discours pour l’affirmation, la défense et la
transmission des biens communs et des diversités, afin de saisir le sens et les utilisations de la citoyenneté et de la diversité qui découlent de ces pratiques. L’approche
principale de ce numéro vise des citoyennetés à l’œuvre, tel qu’elles sont élaborées et
vécues via des situations et dispositifs concrets, lors desquels les cadres institutionnels
sont compris et reformulés, et à travers lesquels se formule continuellement le sens de
la citoyenneté. C’est vers une perspective pragmatiste de la citoyenneté, telle qu’elle
est défendue aussi par certains travaux cités précédemment (Cefai : 2008, Carrel et
Neveu : 2014, Battegay, Derycke, Roux, Têtu : 2012), que s’oriente le questionnement
transversal de ce volume, et cela même si certains articles considérés en soi ne relèvent
pas de cette approche.
La lecture transversale des différentes contributions présentées dans ce volume nous
permet, dans un premier temps, d’identifier quelques pratiques et dispositifs contemporains d’exercices et d’élaborations de la citoyenneté et de la diversité, dans un
second temps, de dégager quelques fils d’analyse à partir des études de cas présentées.
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Introduction
Nous avons ainsi repéré un spectre large d’actions : des pratiques de patrimonialisation
et des formes d’engagement collectif pour des causes environnementales et démocratiques, des actions de résistance et résilience face à des réhabilitations urbaines, des
expériences de défense des droits des minorités, des pratiques de mise en œuvre de
l’adoption (inter)nationale, des dispositifs éducatifs d’apprentissage de la citoyenneté.
En outre, il sera également question de quelques cadres de réflexion en philosophie
politique, lors desquels s’élaborent certaines propositions pour penser la citoyenneté
et la diversité.
Nous proposons trois fils de lecture à partir desquels nous organisons les articulations
entre les chapitres et qui permettent de faire des propositions pour prolonger les études
menées jusqu’à présent. Dans une première partie, nous aborderons la perspective des
citoyennetés en acte, articulée à une approche des citoyennetés de statut. Dans un
deuxième temps, nous montrerons que cette double approche de la citoyenneté offre
des clés de lecture pour mettre en perspective les pratiques et les discours sur la diversité. Nous reviendrons sur l’articulation entre diversité et citoyenneté afin de réinterroger la normalisation d’une certaine conception de l’espace public et pour montrer
que cette articulation permet de penser de nouvelles expressions du vivre-ensemble.
Dans un troisième temps, nous porterons notre attention sur les élaborations de la
citoyenneté à partir de l’espace domestique, une articulation moins explorée dans l’ensemble des études déjà réalisées. Enfin, dans un quatrième temps, nous focaliserons
notre attention sur les modes de partage, d’agencement des citoyennetés et de son
apprentissage, que révèlent les pratiques et dispositifs de travail de la citoyenneté et
de la diversité présentés dans ce volume. Nous proposons plus particulièrement deux
modes d’apprentissage : la transmission et l’attention.
2
La citoyenneté : statut et expérience
Comme nous l’avons mentionné précédemment, la citoyenneté est souvent regardée
ou restreinte à une question d’appartenance ou de non-appartenance politique des
individus à un corps de la société, que celui-ci soit l’État ou une autre communauté
politique. C’est au nom de ce statut que cette communauté garantit des droits (civiques, sociaux, politiques) à des individus, et que ceux-ci doivent remplir un ensemble
de responsabilités. Cependant, ces citoyennetés décrétées et formelles constituent très
souvent « des charnières des contextes d’expériences et d’activité » des citoyens ordinaires (Cefaï, 2007 : 720) et parfois un nœud de départ dans l’agencement d’actions
diverses de mobilisation ou d’engagement public (luttes contre l’exclusion, pour la reconnaissance, pour la défense des droits, mobilisations pour l’élargissement des droits
à d’autres catégories d’individus ou groupes, actions collectives au nom des biens
communs à défendre tels que le patrimoine, le paysage, le vivant, etc.).
« En contrepoint de la citoyenneté formelle qui concède des droits politiques, civiques et sociaux, une citoyenneté concrète, individuelle, collective s’exprime […], une citoyenneté en acte, tel qu’elle est vécue conçue et
pratiquée concrètement par des citoyens ordinaires. […] Comment les définitions explicites de la citoyenneté s’incarnent-elles et se déclinent-elles
dans des contextes d’expériences et d’activités ? En quoi toutes sortes d’exPublished in : BOTEA, Bianca ; POPESCU-JOURDY, Dana (dir.), Pratiques de la diversité et de la citoyenneté. Statut et
expérience, Editions des archives contemporaines, ISBN : 9782813004215, doi : 10.17184/eac.9782813004215
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périences et d’activités pratiques génèrent-elles un sens de la citoyenneté
qui échappe à ces définitions explicites ? » (ibid. : 717).
Ces questions nous inspirent aussi dans ce volume, dans une approche qui tente de
soulever les tensions entre des citoyennetés de statut et l’expérience de citoyenneté. La
dimension de l’« expérience », pour emprunter ce terme à John Dewey (2010, 2005),
et la perspective pragmatiste de la citoyenneté qui nous intéresse ici mettent en avant
l’idée que les « choses sont telles qu’elles sont expériencées » et qu’il n’existe pas de
« réalité » de la citoyenneté en dehors de ses mises à l’épreuve dans des pratiques,
dispositifs et usages par des individus. Cette approche de l’expérience de citoyenneté
qui s’appuie sur la perspective de Dewey a été mise en avant de manière explicite par
d’autres auteurs déjà mentionnés. Ces auteurs ont montré que
« l’accès ou le refus d’accès à des droits ne se résument pas à des positionnements de type juridique et à des réponses en oui/non. Ils s’inscrivent
dans des situations, des interactions, des confrontations, au sein desquelles
les personnes et les groupes concernés font l’expérience des règles, de ce
qu’il est possible de faire ou de ne pas faire, de négocier ou d’accepter, de
défendre ou de composer » (Battegay et al. 2012 : 23).
Il est important de noter que mettre l’accent sur l’expérience de citoyenneté ne veut
pas signifier une réduction du champ de son analyse à une perspective « par le bas ».
L’approche de l’expérience permet justement de dépasser cette dichotomie bottom
up/top down et d’adopter un positionnement plus souple. Selon cette perspective, des
individus performent des rôles variés les uns par rapport aux autres dans différentes
situations d’action et contextes de vie, endossant au cours de leurs actions des qualités
et des fonctions variées (usagers, habitants, décideurs, acteurs de projet, etc. rôles
assurés ou non par les mêmes personnes). Ils composent avec des cadres institutionnels
qu’ils transforment, et à travers des interactions et des milieux qui construisent ou
reformulent le sens même de leurs actions. Les rapports de force et de pouvoir, le
statut assuré par ces rôles ou fonctions, ne peuvent être pensés a priori, en dehors de
ces situations et actions concrètes.
Les recherches menées auprès des réfugiées ou des personnes qui se trouvent en dehors
du statut légal de citoyenneté montrent que l’inclusion et les appartenances réelles sont
incorporées et enracinées dans des espaces et interactions de la vie quotidienne, que
les frontières de ce statut de membre citoyen sont négociées, redessinées et contestées
(Gonzales, Sigona : 2017). Le statut de membre citoyen n’a de force en soi et n’attribue
de droits réels que s’il est éprouvé comme tel dans les pratiques de la vie ordinaire.
C’est ce que montrent dans ce volume les contributions de Nadja Monnet et de Cristina
Popescu. S’appuyant sur une analyse des mises en œuvre des dispositifs d’adoption
internationale à Barcelone, Nadja Monnet montre les paradoxes dont relèvent les
statuts et les qualités d’habitant, de citadin et de citoyen pour des enfants nés à
l’extérieur de la société catalane, mais ayant grandi dans son intimité, au sein des
familles des classes moyennes et aisées catalanes. Citoyens de droit par l’adoption,
ces enfants sont dans les faits des « étranges citoyens », ce qui révèle un phénomène
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Introduction
paradoxal de « citoyenneté des non-citoyens ». Ils sont souvent stigmatisés (considérés
souvent par rapport au délit de faciès), renvoyés à une société d’origine avec laquelle
ils n’ont pourtant plus de lien réel, le processus d’adoption intervenant justement
dans cette coupure. Cette citoyenneté de droit et de statut associée à une nationalité
espagnole acquise via l’adoption est continuellement mise à l’épreuve des faits et gestes
quotidiens dans les relations de coprésence dans la ville, à l’école, dans la rue, voire
même dans les cercles familiaux plus élargis. L’étude de cas présenté par Nadja Monnet
ouvre la voie vers une analyse intéressante des lieux et des processus d’émancipation
urbaine à partir de l’exemple des enfants adoptés. L’analyse que l’auteure fait de la
frontière citadin/citoyen nous amène à penser que la citoyenneté et les « droits à la
ville » s’acquièrent par une inscription citadine et par une compétence de citadinité
et de l’habiter urbain en permanente négociation, des compétences que ces personnes
arrivent ou non à développer ou à se faire attribuer par les autres.
Cette tension entre une citoyenneté de statut et l’expérience de citoyenneté ressort
également de l’article de Cristina Popescu dans son analyse des pratiques d’inclusion
scolaire des jeunes personnes en situation de handicap, dans le contexte de la mise
en place dans les écoles d’une politique pour « l’égalité des droits et des chances, la
participation et la citoyenneté » (conformément à la loi introduite en 2005). Cette
politique de la diversité accorde une citoyenneté de plein droit pour ces élèves, indépendamment des différences physiques ou psychiques, militant pour leur respect et
non-discrimination, que ce soit à l’école, dans le travail ou au niveau de l’accessibilité de l’espace public. Cependant, à travers la recherche de Cristina Popescu nous
pouvons observer que ces nouveaux droits et statuts ne prennent sens qu’au cours
d’actions, lorsqu’ils sont éprouvés et mis en situation au sein des environnements
particuliers qui sont impulsés dans ce sens, et qui permettent des apprentissages et
des expériences de faire-ensemble. Ces qualités de citoyenneté ne se décrètent pas en
accordant un droit, un statut, une identité à ces élèves – et cela même avec des politiques volontaristes dans ce sens – elles peuvent ou non advenir dans les pratiques
quotidiennes à l’école, comme dans l’espace public.
À partir d’un exemple très différent, Jean-Louis Tornatore met en avant un lieu intéressant où les conceptions de la citoyenneté se forgent et se renouvellent, en l’occurrence les initiatives autour du patrimoine et les mobilisations radicales contre le
capitalisme. L’auteur montre que le contexte de l’élargissement du champ d’action
du patrimoine aux questions du vivant amène à un renouvellement des formes de
communauté, dans le sens où on passerait des communautés de la « nation » vers une
communauté des vivants. Ces initiatives patrimoniales entraînent en même temps un
renouvellement de l’exercice et des conceptions de la citoyenneté. À travers des mobilisations radicales telles que celles de Notre-Dame-des-Landes contre la construction
d’un aéroport (et du « monde » dont elle est le porteur), s’exercent des expériences
citoyennes à part entière, sortant du cadre normatif et conventionnel des actions citoyennes. Défendant une conception pragmatiste du patrimoine et de la citoyenneté,
Jean-Louis Tornatore montre que cette dernière peut se construire à travers des actions considérées comme anti-citoyennes et illégales par leurs opposants. Cependant,
ces actions procèdent de la cristallisation et de la thématisation en commun d’un problème selon une dynamique bottom up, qui permet de nouvelles expérimentations du
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pouvoir d’agir et de démocratisation de la démocratie au-delà d’une démocratie représentative. D’une part, ces mobilisations sont patrimoniales en ce sens qu’elles sont
menées au nom d’un patrimoine paysager et d’un territoire rural à préserver. D’autre
part, elles mettent en avant des citoyennetés en acte, relevant d’une « politique de l’attention » envers « les êtres, humains et non-humains, animés et inanimés qui peuplent
la zone », ainsi que d’une « politique de l’héritage » orientée vers ce qu’on laisse aux générations futures. Enfin, ces actions élaborent (et sont fondés sur) « un souci constant
de laisser s’exprimer toutes les différences sans vouloir chercher à les résoudre, ni dans
un point de vue dominant, ni dans un consensus factice ». Ces nouvelles formes de
mobilisations autour du vivant ne relèvent pas tant d’une « conception statutaire de
la citoyenneté inscrite dans le droit, quasi naturalisée, que d’une conception tout aussi
statutaire, mais insistant sur la nécessité d’une “citoyenneté active”, c’est-à-dire qui
doit sans cesse être réaffirmée et mise en œuvre, et donc être placée sous le signe de
l’engagement ».
3
Diversité et citoyenneté dans l’espace public
Nous proposons maintenant de nous tourner vers la question de la diversité culturelle
et de porter sur cette question le même regard que celui sur la citoyenneté, à savoir
d’aborder la diversité culturelle dans l’espace public par cette double perspective,
comme statut et comme expérience.
Pendant plusieurs décennies, le concept d’espace public s’est construit une notoriété
proche de la norme dans les recherches en SHS. Lieu de légitimation politique, d’affirmation des communautés politiques et de mise en scène du politique (Dacheux, 2008),
il est synonyme de fondement de la démocratie, de modèle de fonctionnement de nos
sociétés. L’articulation entre diversité et citoyenneté vient relancer le débat et remet
en question la qualité de « modèle de pensée et de pratiques » de l’espace public à
la lumière des enjeux et des situations de diversité et de « vivre-ensemble ». Une critique formulée généralement à l’utilisation du concept d’espace public concerne son
acculturation.
« Des chercheurs ont tenté d’acculturer ce concept à des contextes historiques non occidentaux et/ou non contemporains, pas tant cependant,
pour mesurer quelque écart relatif à une norme que pour profiter de ces
situations “étrangères” afin de mettre à l’épreuve un concept déjà polysémique et d’en révéler ainsi les potentialités. » (Capitant, S., Leclerc-Olive
M., 2013 :10).
Le texte de Jean-Baptiste Duez met en avant des crispations visibles dans les pratiques
de vie des populations « roms », mais aussi des professionnels qui interviennent dans le
cadre des dispositifs d’intégration destinés à ces populations. Une certaine normativité
qui gouverne ces actions est responsable de ces difficultés, mais elle peut être également
détournée en ressource par les Roms, comme d’autres travaux sur ce sujet le montrent
(Clavé-Mercier, 2015).
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Introduction
L’observation des pratiques citoyennes et des interactions des individus avec leur environnement nous permet d’aller au-delà de l’approche par modèle et par consensus
et d’envisager les différentes facettes et pratiques de la diversité dans l’espace public.
Dans une approche communicationnelle, la manifestation des interactions de la diversité instaure des rapports spécifiques entre les acteurs. Un des « axiomes » de Bateson
(1972) portant sur la « réciprocité » affirme que tout échange de communication implique soit un rapport d’égalité (symétrie), soit de complémentarité (différence). Il
s’agirait de deux modèles d’interaction. Même si la différence implique dans l’interaction de comportements qui se complètent, elle reste une source de renforcement des
écarts. L’auteur voit ici la source d’une possible dégradation de la relation qui peut
conduire au conflit. Le caractère potentiel conflictuel de la différence est pensé dans
la position relative de deux personnes dans la communication.
L’articulation entre citoyenneté et diversité peut être définie comme un questionnement particulier sur l’identité sociale collective, mais également comme une série
d’interactions et des pratiques mettant en évidence la construction symbolique de
l’environnement et des cohésions. À travers le concept de « communauté politique »,
Éric Dacheux (2008) pense le lien social non pas uniquement comme résultat des « solidarités primaires endogènes à un groupe culturel », mais aussi comme un processus et
formes de mise en commun qui se construisent lors des manifestations « des solidarités
secondaires entre individus appartenant à des groupes culturels différents ».
Par conséquent, l’approche des diversités en acte nous semble s’éloigner de la proposition de partir d’un cadre de référence supposé unique et d’observer le rapport entre
norme et écart de la norme à ce niveau. La notion de diversité implique plutôt une
pluralité de cadres de référence qui coexistent et sont concomitants.
En observant la diversité dans la ville, par exemple, Bernard Lamizet parle de l’existence des appartenances, des sociabilités, des cultures et des identités qui se retrouvent
dans la communication urbaine définie comme une « polyphonie, qui s’exprime dans
les formes conflictuelles de la communication politique et dans les formes intégratrices
de la médiation culturelle » (Lamizet, 2007).
Un espace polyphonique est une espace (public) où plusieurs voix distinctes, plusieurs
systèmes de représentation s’articulent. Si pour Bakhtine, qui traite de la polyphonie
dans la littérature, l’articulation entre ces langages s’inscrit dans une logique esthétique, nous pensons que c’est la logique de l’interaction qui assure la cohérence des
discours/pratiques polyphoniques. Ainsi, nous pensons que le concept d’espace public polyphonique nous permet d’envisager les conflictualités de la diversité non plus
comme une opposition et un piège à la citoyenneté, mais comme un cadre de référence
de l’interaction permettant le déploiement d’une citoyenneté en acte.
Il reste intéressant de voir comment la notion de polyphonie est reprise dans des
études récentes concernant des formes actuelles d’intervention dans l’espace public,
des mises en visibilité des causes ou des mobilisations. Les pétitions en ligne, par
exemple, représentent l’objet d’étude des dispositifs sociotechniques comme « énonciation polyphonique, co-construite par des voix multiples, et bâtie autour d’objectifs
parfois très différents » (Boure, R. et Bousquet, F., 2011). La construction polypho-
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expérience, Editions des archives contemporaines, ISBN : 9782813004215, doi : 10.17184/eac.9782813004215
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nique est ainsi pensée comme un processus de construction de l’unité en acte des voix
participantes. Etienne Tassin (1991) plaide pour un retour à la conception arendtienne
de l’espace public, un espace défini comme un espace d’action. Pour nous, l’espace
public est construit autour de l’usage pratique du langage, qui permet la cohabitation
de l’égalité et de la différence et où la diversité constitue un cadre facilitant l’expression d’une polyphonie identitaire citoyenne. Dans cette perspective, le texte publié
dans ce volume par Jean-Baptiste Duez sur les projets d’insertion des Roms s’appuie
sur le concept de « super-diversité » proposé par Steven Vertovec. Il s’agit ici d’envisager la diversité comme des interactions successives synchroniques et diachroniques
et, ainsi, d’identifier des statuts, des places et des positionnements très différents à
l’intérieur même des communautés ou des groupes. L’auteur montre que des cohésions
et des points de vue peuvent s’établir à plusieurs niveaux, dépassant ainsi la réduction
identitaire binaire avec l’Autre.
4
Espace domestique et pratiques de citoyenneté
Alors que les pratiques de citoyenneté sont souvent analysées sous ses déploiements
dans les espaces publics (considérés comme plus à même d’instaurer de l’espace public3 ), nous souhaiterions revenir ici sur l’espace domestique comme lieu de pratique
et d’exercice de la citoyenneté, à la lumière de quelques contributions de ce volume.
Comme nous venons de le voir, la pensée de Hannah Arendt a largement influencé
l’approche de la politique et de l’espace public dans la philosophie politique contemporaine et dans d’autres disciplines, et en particulier la conception de la citoyenneté.
Selon l’héritage arendtien, le champ de la politique est celui de manifestation d’un
espace public d’action et non celui de l’appartenance et des communautés d’identification culturelle, il n’est pas celui du domaine privé, mais du domaine public comme
espace de construction et d’affirmation de la subjectivité politique (Arendt : 1983,
Tassin : 1991, 1997). Plusieurs auteurs ont souligné les limites de cette dichotomie qui
réduit le champ du politique à des domaines particuliers et ciblés à l’avance, montrant
les connexions du politique (ou de l’espace public) aux différents domaines de la vie
sociale, y compris celui des appartenances religieuses, ethniques, des civilités et des
pratiques ordinaires4 .
Malgré ces critiques et malgré l’affirmation de l’idée d’une pluralisation des espaces de
citoyenneté, un domaine reste peu exploré dans le champ de la citoyenneté, celui de
l’espace domestique, de l’intime et du chez-soi. Certaines études ont été menées dans
cette direction, notamment dans le champ des approches du genre, et elles ont montré
que le territoire domestique est le lieu principal de production du statut minoritaire et
de la non-citoyenneté des femmes, avec des effets de domination politiques, matériels,
culturels dans d’autres sphères de la vie (Thanh-Huyen Ballmer-Cao et al. : 2007,
Tabet : 1979, Mc All : 1995). C’est aussi à l’intérieur de cet espace domestique et
3
L’emploi du singulier (espace public) renvoie au concept forgé par la philosophie politique, alors que le
pluriel (espaces publics) désigne la multitude d’espaces concrets et physiques où se déploie et se construit
un espace public.
4
Les travaux dans ce sens sont nombreux, nous évoquons ici juste quelques-uns : Lefort : 1986, Carrel
et Neveu, 2014, Berger et Viaud-Gayet : 2011, Viaud-Gayet : 2011, Breviglieri et Trom : 2003, Battegay,
Derycke, Roux, Têtu : 2012, Botea : 2013.
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Introduction
de ces rapports de domination que des formes de résistance des femmes et d’une
conquête des droits et de la citoyenneté sont possibles (Casa-Nova, 2012). Les liens
entre participation politique et économie domestique, recoupés avec les questions de
migration, de classe et de race, sont également mis en avant dans des études féministes
par exemple sur le travail de care au sein des espaces domestiques. La sous-traitance
des femmes des sociétés du Sud, lesquelles abandonnent leurs propres enfants pour
prendre soin de ceux des femmes du Nord et pour effectuer un travail domestique, ont
incité à des questions autour du défi politique à casser ces chaînes de domination de
classe et raciale au sein même des femmes, et la reproduction de la division du travail
sexuée par ce système même de faire appel à ces femmes de ménage (Molinier, 2009,
2013).
Une contribution intéressante qui porte sur ces croisements entre espace domestique
et citoyenneté est aussi celle de Ioana Carstocea (2002), laquelle met en lumière les
espaces de solidarité et de mobilisation collective impulsés par un hebdomadaire de
Roumanie à haute audience, avec un lectorat à majorité féminine (Formula As). Axé
principalement sur la famille et les questions ordinaires de la vie ou de l’espace domestique, constitué en partie des correspondances des lecteurs, la revue est qualifiée
par les milieux intellectuels de « publication pour les coiffeuses et les femmes de ménage ». Si l’auteure met en lumière, d’une part, que le ton général de la revue relève
d’un certain populisme et d’une idéologie conservatrice, d’autre part elle montre que
cette revue est un espace d’expression des « sans voix », un lieu de formulation des
problèmes partagés et des critiques de la transition postcommuniste et néolibérale, un
espace de cristallisation des formes d’empathie, de réseaux d’entraide et d’émergence
des premières grandes actions de mobilisation collective en Roumanie.
Trois contributions de ce volume apportent des éléments intéressants dans ce champ
peu exploré de la citoyenneté qui est l’espace domestique, ouvrant vers de nouvelles
thématiques et directions de recherche par rapport aux travaux déjà réalisés. Développés en lien avec les questions de l’habiter, du chez-soi et de la parenté, ces articles
montrent les implications politiques et les débordements publics de ces pratiques domestiques.
À partir d’ethnographies menées dans deux grandes villes du Nord de la Tanzanie
(Arusha et Moshi), Mathilde de Blignières met en lumière des formes de citoyenneté
ordinaire à l’intérieur et autour des lieux de vie domestiques des classes moyennes.
La citoyenneté est ainsi saisie à travers « l’habiter, compris dans des interstices de
la société civile, c’est-à-dire dans la rue comme sur des seuils et des pas de porte de
maison, dans les ruelles d’un quartier, du voisinage, dans son espace domestique ».
Dans une première partie de sa contribution, l’auteur montre comment se construit
un espace d’appartenance nationale et une « citoyenneté de base », de statut, une résistance passive, plus réconfortante que revendicative, de ses interlocuteurs. Elle les
saisit à travers les récits de vie de ces personnes, passées toutes par l’expérience de la
migration du rural vers la ville, et travers l’observation des objets et décors hybrides
de leur espace domestique. Dans un second temps, l’auteure met en avant des formes
de citoyenneté plus actives, observées tout d’abord au niveau des voisinages, dans les
pratiques et les stratégies de cohabitation mises en place ici, par exemple à travers
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différents rapports de contrôle et d’intersurveillance entre voisins, de monstration,
d’invite, de négociation des seuils de tolérance vis-à-vis de certaines intrusions sensorielles (visuelles, sonores, olfactives, physiques). Enfin, sur un autre plan et échelle de
l’habiter, l’auteure met en lumière des formes de résistance active des habitants par
un détournement d’usage de certains espaces urbains par des ritualités domestiques,
espaces touchés par des actions de réhabilitation urbaine violentes. L’affirmation du
« droit à la ville » par ces pratiques dans les espaces publics est doublée, sur le plan domestique, d’un rêve d’autonomie et d’émancipation sociale via le projet d’acquisition
d’une maison et l’accessibilité à la propriété.
Le texte de Marc Derycke sur les pratiques quotidiennes au sein des « familles d’accueil » où des enfants sont placés par la justice montre que l’espace intime est un lieu
où se jouent des pratiques de négociation et d’apprentissage du vivre-ensemble : entre
enfants accueillis et accueillants, entre leurs parents respectifs, et dans un décor complexe qui comprend aussi des institutions (institution juridique, école). L’ethnographie
auprès d’une famille étudiée par l’auteur met en avant l’idée que l’apprentissage du
vivre-ensemble ne s’effectue pas par une tentative de normaliser des identités préjugées, stigmatisées par un « handicap » particulier (des parents jugés comme « illettrés », des enfants pensés comme ayant des comportements déviants). Au contraire, les
relations au sein de cette famille se déploient plutôt dans le sens d’une désidentification de ces identités préjugées et par une possibilité à l’autonomie et à l’émancipation
de l’enfant, via la confiance et en supposant son « égale capacité à vivre-ensemble ».
Accorder la confiance c’est poser un acte de citoyenneté au sens complet du terme et
cette « supposée égale capacité à vivre-ensemble » accordée à l’autre est finalement
une « supposée égale capacité » à la citoyenneté, instaurée à partir de l’espace de la
maison.
La contribution de Nadja Monnet sur l’adoption des enfants à Barcelone s’inscrit
dans la même réflexion autour de la portée citoyenne des pratiques déployées dans
les espaces domestiques, mais aussi publics. Dans son texte, l’auteure met en avant
les attentes négatives et les stigmatisations dans l’espace public dont font preuve les
enfants adoptés, notamment par leurs traits physiques distinctifs, et malgré leurs manières de faire qui sont les mêmes que celles de leurs familles adoptives. Ces contrastes
sont déjà annoncés ou détournés dans les cercles de la famille élargie, autrement dit
dans les espaces d’intimité, de protection et d’interconnaissance : « Mon Dieu, quand
tu parles catalan, on oublie que tu es noir ! », sont les paroles d’une grand-mère à
l’adresse de son petit-enfant adopté par une famille catalane. De la même manière
que l’observe Marc Derycke, Nadja Monnet met en avant l’idée que c’est dans la négociation des règles de l’espace-temps intime que s’initient les pratiques de savoir-vivre
et les approches de la diversité dans l’espace public.
5
Transmission, attention et care dans l’apprentissage de la
citoyenneté
Nous souhaitons aborder un dernier fil transversal saisi à la lecture de l’ensemble
des textes de ce volume. Il porte sur les processus d’expérience et d’initiation à la
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Introduction
citoyenneté. Il est intéressant de réfléchir aux modalités par lesquelles cette initiation
se réalise et à l’apprentissage de la citoyenneté.
Nous souhaitons aborder ici la question de l’apprentissage sous deux angles : la production de sens collectif lors des pratiques de transmission et l’interaction comme
source de développement de la connaissance.
Dans les approches éducationnelles, telles que celles proposées par Piaget, « croissance
physique, mentale (cognitive) et affective (émotionnelle) sont indissociables et se nourrissent réciproquement » (Dambirn C., Löning H., 2008), le lien entre environnement
et individu se faisant par « l’expérience acquise ».
Dans la continuité de ces idées, il nous semble important de voir, à travers les textes
de ce volume, la manière dont l’expérimentation et l’interaction se définissent aussi
comme des dispositifs de construction des sens communs. Piaget met en évidence la
« fonction sémiotique » dans les processus d’apprentissage et d’interaction. Celle-ci est
selon lui une fonction fondamentale « qui consiste à pouvoir représenter quelque chose
(un « signifié ») au moyen d’un « signifiant » différencié : langage, image mentale, geste
symbolique. » (Piaget et Inhelder, 1966). Il est intéressant de remarquer que pratiquement à la même époque Harold Garfinkel publie les « Studies in Ethnomethodology »
(1967) et définit l’objectif de cette méthode comme l’étude du raisonnement pratique
de sens commun dans des situations courantes d’action. Il s’agit ici d’analyser les pratiques ordinaires comme des dispositifs de visibilité et de rationalisation et d’identifier
les mécanismes de leur construction narrative. Ainsi, en partant de ce type de constat,
nous pouvons également penser l’occurrence comme dispositif d’apprentissage défini
en tant que résultat de l’activité des acteurs pour donner sens à leurs pratiques quotidiennes. Le texte de Laurent Müller, dans ce volume, pose la question de la norme
comme occurrence des pratiques. En partant de la conception du philosophe JeanMarie Guyau, qu’il analyse amplement dans son texte, Müller pose la question de la
pluralité éthique. Face au dilemme de l’effacement de la norme universelle dans la
diversité, la solution proposée par Guyau repose sur le domaine pratique, plus particulièrement sur l’« association » (des sensibilités, des intelligences ou des volontés),
qui définit le vivre-ensemble par rapport à un engagement, des valeurs et des projets.
Une tension pourrait ainsi apparaître au moment d’observer les rapports entre, d’une
part, l’« agir stratégique », spécifique à une logique d’intentionnalité de la transmission, et d’autre part les « relations communicationnelles », lesquelles donnent lieu à des
formes spontanées d’interaction apprenante. Comme Armand et Michèle Mattelard
le faisaient remarquer (2004 : 80), Habermas oppose à la visée étroitement utilitaire
et instrumentale (dont les moyens de communication de masse constituent le dispositif privilégié), d’autres modes d’action ou de rapports au monde qui ont leur propre
critère de validité : l’action objective, cognitive qui s’impose de dire le vrai, l’action
intersubjective qui vise la justesse morale de l’action, l’action expressive qui suppose
la sincérité. Pour lui, la rationalité n’a pas trait « à la possession d’un savoir », mais à
la façon dont les sujets doués de parole et d’action acquièrent et emploient un savoir.
Habermas identifie la crise de la démocratie, et donc de la citoyenneté, comme due
au fait que les dispositifs sociaux qui devraient faciliter les échanges et le déploiement
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de la « rationalité communicationnelle » se sont autonomisés, qu’ils s’administrent
comme des « abstractions réelles », faisant certes circuler l’information, mais entravant
les activités d’interprétation au niveau des individus et des groupes sociaux.
Ces contributions venant du domaine de la psychologie, de la communication et de
la philosophie politique, sont à mettre en lien avec d’autres réflexions sur les questions de transmission et d’apprentissage, développées en anthropologie et en science
de l’éducation, et qui nous inspirent ici pour le champ de la citoyenneté. Les textes
de ce volume nous conduisent à réfléchir à la possibilité d’instaurer la citoyenneté
selon deux mécanismes distincts, celui de la « transmission » et de l’« attention », une
distinction formulée par différents auteurs à propos des pratiques d’éducation, et en
particulier par l’anthropologue Tim Ingold (2017). En s’appuyant sur les conceptions
de l’éducation de John Dewey et de Jan Masschelein, ou encore de James Gibson sur
l’écologie de la perception visuelle, Ingold met en avant que l’éducation – et nous pouvons dire ici l’apprentissage – ne doit pas tant être considérée comme un processus
de transmission, mais comme une pratique d’éveil à l’attention. Pour John Dewey,
mentionné par Ingold, la transmission n’est pas le « transport » (conveyance) d’une
génération à une autre, d’un corpus d’instruction et de représentations. La connaissance, les valeurs, les croyances se perpétuent et l’éducation se produit seulement s’il
existe une participation par les protagonistes de l’échange, un partage et une préoccupation commune quant aux termes des enjeux. Comme Ingold le montre, l’expérience
qui se joue dans cet exercice de communication ne peut pas se réduire à un processus
de décodage et d’encodage de l’information, mais elle se fait par l’instauration d’une
« correspondance » entre les protagonistes. L’introduction de cette idée de correspondance est en opposition avec le présupposé selon lequel la construction d’un contenu
d’information existe préalablement à l’échange même. Ce modèle de transmission
dans lequel on présuppose que l’information est censée pré-exister au processus qui
lui donne naissance est visible dans des disciplines et champs d’application variés,
comme par exemple celui du développement de la personne, à partir de l’idée de
la transmission d’un bagage génétique et ensuite culturel (Susan Oyama in Ingold,
2017 : 8). Contrairement à cette conception, il existe une manière différente de penser
l’éducation, et par conséquent l’apprentissage, à partir d’un processus de « correspondances » réalisées lors des échanges. La correspondance désigne plus précisément un
« le processus par lequel les êtres ou les objets quasi littéralement co-respondent ou
se répondent les uns aux autres » (ibid : 26). Cette capacité de réponse des individus
est à la base du sentiment et du sens de la responsabilité, la dernière ne pouvant pas
s’instaurer sans la première (Gert Biesta in Ingold, 2017 : 30). Cette idée nous semble
centrale si nous la plaçons dans le champ de réflexion de la citoyenneté : comment
penser les actions citoyennes sans cette capacité de réaction des individus, sans ces
résonances qui se construisent dans les relations des humains avec leurs semblables
ou avec d’autres vivants et éléments de l’environnement ?
Ce sens de l’apprentissage nous amène dans la direction du care et de l’attention.
Toujours selon Ingold, le « care », et nous pouvant dire l’apprentissage et l’exercice de
la citoyenneté comme geste de care, ne suppose pas tant de comprendre et d’expliquer
aux autres les choses et les êtres, mais plutôt d’être attentif à ce que les autres ont
à nous dire et d’y répondre. Cette conception de l’éducation s’appuie sur celle de
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Masschelein, pour lequel cet exercice « n’est pas d’amener les apprentis à développer
une conscience et une connaissance du monde qui nous entoure. C’est plutôt susciter une correspondance avec ce monde, un processus d’attention envers le monde ».
(Masschelein in Ingold : 30). Dans ce sens, plutôt que d’être perçue comme un processus classique de transmission, l’éducation est censée offrir « les moyens pour faire
une expérience et devenir attentif » (Ingold, 2017 : 33).
Ce débat et proposition nous amènent à penser l’apprentissage à la citoyenneté à
la lumière de ces deux processus différents, la transmission et l’attention. Les textes
présentés dans ce volume nous permettent d’observer des implications et des modes
très différents de réaction, de responsabilité et de responsabilisation aux problèmes
des uns et des autres, aux biens pensés comme communs. Prenons pour exemple des
dispositifs d’éducation comme les manuels scolaires, décrits dans le texte de Cecilia
Condei. À travers ces dispositifs, nous pouvons observer que l’accent est mis sur un
processus de « transmission » d’un contenu (des informations sur le patrimoine et des
biens communs), sur une acquisition de la connaissance qui est connectée en toile
de fond à l’idée d’une éducation à la citoyenneté. Dans les dispositifs d’intégration
des Roms décrits par Jean-Baptiste Duez dans ce volume, nous percevons les mêmes
modalités de penser la formation des « acquis » citoyens à travers des formes de transmission qui s’exercent par les différents dispositifs d’intégration (par l’éducation et
autres cadres de formation et d’accompagnement de ces personnes dans le domaine
de la santé, du logement, du travail).
Nous explorerons des pratiques différentes de réactivité et de sensibilisation de type
citoyen, par les textes de Marc Derycke, d’Aurélia Léon et de Jean-Louis Tornatore.
Dans la contribution de Marc Derycke sur l’apprentissage des pratiques de vivreensemble au sein du foyer, il est intéressant d’observer que cette transmission qui
se fait envers les enfants en tant « futurs citoyens » ne procède pas par des discours
normatifs et moralisateurs, mais, de proche en proche, par « contagion », par des pratiques banales du quotidien. Comme l’auteur le montre, l’instauration de la confiance
et la supposition d’une égale capacité de vivre-ensemble aux enfants placés
« ne relèvent pas d’une chose à suivre selon un contrat, ce qui nécessiterait
une attention ciblée sur les points où la capacité à développer est attendue
– condition pour qu’elle ne se manifeste guère. Mais, tout au contraire une
attention ouverte et patiente ».
Dans le texte d’Aurélia Léon, la question de comment amener un problème minoritaire à être pensé comme un problème commun trouve des réponses intéressantes
dans des modes d’expérimentation tels que les ateliers proposés par le groupe de féministes présenté par l’auteur. Il ne s’agit pas dans ce dispositif d’expérimentation d’une
transmission-réception d’un contenu et des informations sur la condition des femmes
et des rapports de genre, mais d’un apprentissage qui émerge par une expérience collective à travers laquelle le contenu même de ce qui doit être expérimenté se transforme
au fur à mesure que la performance se déroule. Dans le texte de Jean-Louis Tornatore, la mobilisation autour du cas Notre-Dame-des-Landes et les préoccupations de
type patrimonial élargies à la question du vivant, mettent en avant une « politique de
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l’attention envers les choses et les êtres qui comptent », construite non pas dans des
dispositifs de citoyenneté de type top-down, mais par l’expérimentation des formes
d’habiter ensemble, d’action collective et de nouvelles pratiques de la démocratie.
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