Raphaël Albert - Les extraordinaires & fantastiques enquêtes de Sylvo Sylvain, détective privé... .
A l?occasion des Utopiales 2013 à Nantes,
Raphaël Albert nous présente les deux premiers volets des extraordinaires & fantastiques aventures de Sylvo Sylvain, détective privé : «
Avant le déluge » et «
Rue Farfadet » publiés aux éditions Mnémos. Pour en savoir plus : http://www.mollat.com/livres/albert-raphael-les-extraordinaires-fantastiques-enquetes-sylvo-sylvain-detective-prive-avant-deluge-9782354082123.html http://www.mollat.com/livres/albert-raphael-les-extraordinaires-fantastiques-enquetes-sylvo-sylvain-detective-prive-rue-farfadet-9782354082031.html Notes de musique : treasureseason, Return to Dope Mountain, Fjords ®
+ Lire la suite
Cette pulsion de mort, je l'avais vue à l'œuvre un million de fois, déjà. Elle germait dans les orgueils bafoués, déclenchait les bagarres de rue, attisait la colère des émeutiers ; elle rendait fou les maris jaloux, mettait des couteaux dans les mains des cigarières rivales, poussait le souteneur à cogner plus fort que nécessaire, par plaisir ; elle mouvait jusqu'aux marmots querelleurs et cruels, apprentis bourreaux se plaisant à tourmenter le petit, le moche ou l'esseulé. Je détestais leurs rires d'enfants dans ces moments-là. J'y entendais les adultes qu'ils seraient demain : futurs bagarreurs, futurs émeutiers, futurs époux jaloux...
La xénophobie rampante des humains était vraiment absurde. Bon, il est vrai que les elfes ne tenaient pas particulièrement orques et gobelins en grande estime : nous avions été ennemis mortels, à l'aube des temps, et il en restait quelque chose, une sorte de répugnance réciproque. Mais tant de préjugés dégradants et imbéciles circulaient à leur sujet que c'en était une insulte à l'intelligence ! Les gobelins, par exemple : ils étaient tour à tour sournois, voleurs, violents, incestueux... En quelques années, ils étaient devenus la cause de tous les maux de Panam. Un beau tissu d'âneries.
« Par les couilles de mon père ! cria-t-il. En voilà des manières, citoyen ! Veux-tu que je te saute dessus, moi aussi ? »
Quatre cents kilos de chair chevaline, cinquante de chair humaine, soit près d'un demi-tonne de pure susceptibilité, ça donnait moyennement envie.
« J'aimerais autant qu'on en reste à nos positions présentes. Accepte mes excuses, je te prie.
- Je les accepte. Pour cette fois. »
Un centaure pur jus. Soupe au lait, à cheval sur les convenances (passez-moi l'expression) mais débonnaire.
C'est que, tu vois, il n'a pas de visage, le Mal. Pas de mains, pas de jambes. Il n'est ni mort, ni vivant et il se moque du temps comme de l'espace. Il n'est nulle part en particulier, ne possède ni demeure, ni pays. Il est multiple. Il est insatiable. Ses noms sont Triste Solitude, Compagnie Néfaste, Mauvais Appétit. Ses enfants sont Seul contre Tous, Nuit du Cœur, Froide Couche, Esprit Tourne en Rond, Rumine-Rumine. Ses sœurs sont Foule Furieuse, Mauvaise Conseillère, Faim sans Fin, et ses frères sont Toujours Soif, Sentiment Menteur, Encore-Encore, Toujours Plus.
C'est ça, Panam, messieurs-dames! Du mystère et de l'aventure! De la magie et les toutes dernières innovations issues de la technologie de la vapeur!
La bienvenue, voyageurs, la bienvenue!
Et n'oubliez pas le guide, svp...
- Notre justice est peut-être expéditive, ma belle, mais nous, nous ne condamnons pas nos semblables à la misère pour mieux nous enrichir, nous ne laissons pas nos enfants mourir de faim, nous ne donnons pas dans la corruption, nous ne nous entre-tuons pas pour la terre, nous ne...
- Ça va, j'ai compris ! L'elfe est un être merveilleux, l'homme une bête immonde.
- Ça résume assez bien l'opinion de l'elfe moyen, dis-je en souriant. Reconnais que la société humaine manque singulièrement de fraternité !
(Sylvo Sylvain discutant avec son amoureuse des différences entre les elfes et les humains).
Non, décidément, les trolls n'étaient plus ce qu'ils avaient été tout juste des bêtes nuisibles, un conte effrayant, un genre de croquemitaine. Étais-je le seul à me souvenir qu'un seul d'entre eux, même moribond, était plus puissant que mille crétins ?
Un premier groupe s'élança à ses trousses sans plus attendre, des enfants surexcités le précédant avec entrain. Ça riait, ça criait, un vrai jeu ! (…)
Une foule est un mille-pattes sans tête.
Chassés de leurs prairies par l'innombrable bétail de quelques riches éleveurs, les centaures des Méandres étaient de plus en plus nombreux à migrer vers la capitale. La plupart finissaient comme travailleurs de force ou portefaix sur les marchés et les chantiers. Beaucoup devenaient cento, un métier qui n'assurait pas toujours le picotin du jour. Le Panaméen n'appréciait guère ce moyen de transport. Aussi inconfortable qu'un cheval, aussi bavard qu'un homme. Tous les défauts ! Par la force des choses, le cento était devenu le taxi du pauvre. Pour une poignée de deniers, il vous emmenait n'importe où dans Panam.
Mort aux vaches !
Mort aux condés !
Vivent les enfants de Cayenne, à bas ceux de la Sureté !
* note de moi ! du coup j'ai eu cette musique tout le long de ma lecture : https://www.youtube.com/watch?v=stHRnMQt_fw
La célébrité est un jeu qu'il ne nous plaisait pas de jouer, et de toute façon on n'avait rien compris aux règles.