AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,67

sur 36 notes
5
5 avis
4
4 avis
3
4 avis
2
2 avis
1
0 avis
Il semblerait que Fritz Leiber ait été un fan de la légende Lovecraft avant de devenir lui-même une légende. Ce petit roman est un pur hommage au maître de Providence, dans la forme et dans le fond.

Si Leiber crée ses propres personnages qui subissent les mêmes avanies que les anti-héros de Lovecraft (cauchemars, somnambulisme, décès familiaux), il les intègre dans un tout qui reprend l'essentiel de tout ce que l'on trouve dans les écrits du maître : l'université de Miskatonic, Arkham (non, pas celui de Batman, quoique je suis convaincu qu'il y a une filiation) et de très nombreux personnages ayant subit les affres de leur auteur. Les Grands Anciens ne sont pas en reste, même si leur nom est un peu détérioré au départ . le scénario est typique, avec le style qui va avec, qui multiplie l'utilisation d'adjectifs décalés associés à des noms communs, genre « le monstrueux et primitif Pacifique ».

Cependant la dimension « hommage » est prégnante. Ce qui implique que seuls les grands fans de Lovecraft seront sûrs de ne pas rater les références à l'oeuvre originale. Pour les autres – dont je suis – je vous suggère de vous référer au H.P. Lovecraft Wiki dès que vous apercevez un nom propre (https://lovecraft.fandom.com/wiki/Main_Page). Ça aide à se situer.
Cette dimension hommage permet aussi une lecture assez second degré, renforcée par l'installation d'une mise en abîme avec Lovecraft et son oeuvre eux-mêmes.

Les amateurs du maître devraient y trouver leur compte. Ceux qui comme moi apprécient modérément cette prose seront sevrés pour une année. Bref, c'est sinistrement sympatoche.
Commenter  J’apprécie          432
J'ai lu ce livre deux fois de suite afin de trouver de l'inspiration pour mon petit billet…

C'est le premier livre de Fritz Leiber que je lis, mais comme il s'agit d'un pastiche il me faudra probablement en lire un autre pour pouvoir me faire une idée de son « vrai » style. Cela étant dit, j'ai trouvé que c'était bien écrit.

Ce texte fait partie d'une anthologie qui s'intitule « Les disciples de Cthulhu » dont l'une des nouvelles a été nominée pour le Nebula. Ce n'était pas celle de Leiber.

Je connais très peu l'oeuvre de Lovecraft. Je n'ai lu que Les Montagnes hallucinées et une nouvelle (La couleur tombée du ciel) mais cela m'a permis de reconnaître au moins les références à ces deux textes.

Je pense que ce genre d'histoires est destiné aux fans.

Ce que j'ai préféré c'est que l'on y parle des livres de Lovecraft (cela aurait pu être un autre auteur) et de ses personnages comme s'ils étaient réels. Et puis de lire : «Nous avons aussi parlé des histoires de Lovecraft, comme si elles n'étaient rien de plus que ça (des histoires). »

Sinon dans l'ensemble, pas une lecture inoubliable.



Challenge défis de l'imaginaire 2019
Commenter  J’apprécie          321
L'éditeur Mnémos a eu la riche idée de rééditer ce texte rare dans sa collection de poche Hélios.

"Ceux des profondeurs" de Fritz Lieber est un hommage à Lovecraft et à son oeuvre.

Publié en 1976, cette novella situe son action au début du siècle dernier, à une époque contemporaine de Lovecraft .

Un jeune homme, Georg (il a des origines allemandes comme Lieber),le principal protagoniste est un personnage typiquement lovecraftien ; brillant et solitaire, affligé d'une tare physique, il se pique de poésie, d'histoire et fait d'étranges rêves.

Il n'y a pas que les caractéristiques de Georg qui rappellent le canon lovecraftien, on retrouve des noms, des lieux familiers des amateurs du mythe de Cthulhu.
Il est aussi fait directement référence à Lovecraft en tant que personne réelle, puisque Georg le contacte, et certains écrits du maître, tels que "Les montagnes hallucinées", ou "L'appel de Cthulhu", sont évoqués sans équivoques.

"Ceux des profondeurs" ("Terror from the depths" en anglais) n'est peut-être pas un chef d'oeuvre, car il reste si fidèle à son modèle, qu'il finit par manquer un peu d'originalité.

Cependant, il reste un hommage respectueux et réussi de la part d'un auteur, qui dans sa jeunesse correspondit avec Lovecraft qui l'encouragea.
Commenter  J’apprécie          310
Un jeune homme un peu atypique est sujet à des rêves et visions bizarres. Sa fréquentation des universitaires d'Arkham va bouleverser son existence...

---

Plutôt déçu par cette lecture dont j'espérais beaucoup. Pensez donc : Leiber X Lovecraft ! le père du duo le plus connu de la Fantasy qui rend hommage au père du mythe le plus connu du fantastique.
Sauf que... j'ai dû attendre une quarantaine de pages avant de trouver le récit intéressant, et malheureusement il n'en compte même pas une centaine au total...
Je n'ai pas trouvé que Leiber avait écrit là un texte parodique ou humoristique, et si le pitch est intelligent et agréable (les "héros" et situations décrits par Lovecraft existent réellement) son traitement est complètement raté à mon sens.
Je n'ai retrouvé ni mon Leiber caustique, polisson, critique du cycle de Lankhmar, ni ressenti l'angoisse, l'oppression, le malaise véhiculés par les écrits de Lovecraft.
Peut-être que ceux qui n'ont pas beaucoup lu de Lovecraft seront ravis, que ceux qui ne connaissent pas trop les écrits de Leiber apprécieront. Mais pour ma part c'est un flop. Trop de name dropping invraisemblable, trop de situations grandiloquentes inutiles (on a une sorte de compte à rebours qui ne sert à rien), et pas assez de fantastique au sens choquant-perturbant du terme (le seul passage wtf est balayé par les réactions minables des personnages "nous croisons un serpent-ailé-rose-fluo mais nous faisons comme si c'était normal"). J'ai beaucoup aimé le basculement et la structure des révélations autour des rêves et des visions du personnage principal (passage de Cutlu au monosyllabe (sic!) Cthulhu), mais c'est vraiment tout.
Bref, vite lu vite oublié.
Dommage.
Commenter  J’apprécie          240
Ceux des profondeurs est un roman fantastique qui joue sur la paranoïa de ses protagonistes, sans jamais qu'on voit réellement la menace qu'ils redoutent. Même si le roman date un peu, le procédé a été depuis éculé. Résultat, si le roman nous offre bien une ambiance délétère et pesante, la conclusion élude beaucoup de questions, et on ne sait pas vraiment ce qui tient de la réalité ou de la paranoïa.
Le format court du roman permet toutefois d'offrir un bon moment de lecture, même si je me suis sentie frustrée en le posant, avec beaucoup de questions qui me trottaient dans la tête.
Commenter  J’apprécie          200
Lieber fait ici du Lovecraft, du vrai, sans le copier, en donnant aux lecteurs une histoire effrayante et angoissante qui une fois commencée ne peux plus être posée.
Il y intègre un nombre certain de références connues et les manipulent pour en faire un maelström horrifique passionnant. Alors oui l'histoire est courte mais je vous dirais : de la même manière que H.P. Lovecraft le faisait.

Les personnages sont émotionnellement très bien travaillés, les décors sont dépouillés et intriguants, tout ce qu'il faut pour une lecture passionnante pour laquelle j'ai eu un gros coup de coeur.

"Ceux des profondeurs" est un véritable hommage à H.P. Lovecraft, Fritz Leiber réussi le tour de force d'écrire ici de la même manière et en plus d'y incorporer la mythologie propre au célèbre auteur de Cthulhu en en faisant sortir une histoire originale et captivante pour le plus grand plaisir du lecteur.

Sur le blog :
Lien : https://unbouquinsinonrien.b..
Commenter  J’apprécie          172
Parmi les premiers textes de l'ami Fritz, on en trouve un qui s'intitule le jeu de l'initié (Adept's gambit en VO). le récit met en scène Fafhrd et le Souricier gris, donc futur Cycle des Épées, donc fantasy. La femme de Leiber a envoyé le papelard de son mari à Lovecraft (oui, LE Lovecraft, celui de Providence, vu qu'on n'en connaît pas cinquante). Lovecraft l'a retourné (le texte, pas la femme de Leiber), accompagné de moult commentaires et encouragements. Là-dessus, correspondance intense entre les deux L, écourtée par la mort d'HPL, victime de son karma et d'un cancer de l'intestin. Il en restera une grosse influence de Lovecraft sur Leiber, lequel fera son fonds de commerce des histoires mêlant fantastique, science-fiction et horreur, avec du mythe de Cthulhu dedans pour certaines. Et ça tombe bien, parce que Ceux des profondeurs est un de ces textes, à la fois pastiche, compilation et palimpseste.


Roman hommage au pote Lolo qui a tant pesé sur le parcours de l'auteur, Ceux des profondeurs procède du même esprit que Retour à Arkham de Robert Bloch (réédité sous le titre Étranges Éons chez le même Mnémos). Bloch et Leiber sont aux lovecrafteries ce que Black & Decker est au bricolage : de la grosse référence incontournable.
Et des références, il y en a plein Ceux des profondeurs et Retour à Arkham. Rien que les titres, déjà… le jour où on créera des palmes académiques de l'intertextualité, il faudra les décerner aux deux compères.
Alors tu vas me dire que claquer dans un texte la ville d'Innsmouth, l'université Miskatonic ou des divinités dont le nom ressemble à un tirage foireux au Scrabble est à la portée du premier scribouillard venu. Oui-da, que je te répondrai comme ils disent dans les vieux bouquins. Des bronzes inspirés par Lovecraft, il s'en coule plus que de migrants en Méditerranée (remake IRL de Ceux des profondeurs à 20000 figurants qui passionne moins les foules que GoT). Alors oui, c'est facile de lovecraftiser à la va comme je te pousse et je connais quelques auteurs qui mériteraient qu'on leur coupe les mains pour leur passer l'envie d'écrire et les pieds pour être raccord avec ma phrase suivante. Bloch et Leiber, eux, sont des pointures.
Ceux des profondeurs et Retour à Arkham se rattachent à l'oeuvre de Lovecraft sans chercher à se faire passer pour du Lovecraft. Au lieu d'un pastiche sans âme de moine-copiste, leurs auteurs pondent leurs propres romans, où les références font sens et ne servent pas qu'à clamer “regardez, j'ai lu Cthulhu, je suis super balèze”.
Les deux ouvrages sortent presque en même temps, 1976 pour Leiber, 1978 pour Bloch. Bob est d'ailleurs mentionné page 55 par Jo la Fritz, via un certain Robert Blake. Lovecraft avait tué Blake dans Celui qui hantait les ténèbres pour se venger gentiment de Bloch qui l'avait buté dans le Visiteur venu des étoiles. Après on se demande pourquoi les gouvernements autoritaires mettent les auteurs en prison… Ces gens passent leur temps à s'assassiner pour de faux. Des fous dangereux, je vous le dis !


Dans Ceux des profondeurs, Leiber part sur une base de pastiche classique. le récit se présente comme un manuscrit retrouvé dans une maison en ruine, un topos chez Lovecraft et ses épigones. Une nouvelle de Robert Bloch va jusqu'à s'intituler Manuscrit trouvé dans une maison abandonnée, ça annonce la couleur (tombée du ciel) dans la catégorie lovecrafterie récurrente.
Schéma habituel : le narrateur explique de façon hyper posée et tranquille qu'il lui reste peu de temps avant de se faire pulvériser par une bestiole épouvantable (ce flegme !…) et qu'il a décidé d'occuper ses dernières heures à raconter sa vie à coups de longues phrases noyées sous un déluge d'adjectifs, voici son histoire sans le poum poum final de New York Unité Spéciale.
J'avoue n'avoir jamais accroché à cet artifice littéraire, pas plus qu'à son équivalent cinéma, le found footage. Impossible de croire une seconde à ce procédé du vrai faux truc authentique créé de toutes pièces. Après, peut-on reprocher à un artifice d'être artificiel ?… Vous avez quatre heures, perso j'ai autre chose à glander que me perdre en questionnements débiles.


Et le narrateur, donc, de coucher son histoire sur le papier. Quatre-vingt-dix pages. En quelques heures. À la plume. Quiconque s'est déjà servi d'une plume – et j'en suis – applaudira l'exploit. Ce poignet d'acier bat tous les records de vélocité et d'endurance, mieux qu'un clavier et un traitement de texte !
Sur le détail de l'histoire, je te renvoie au bouquin. Je suis chroniqueur, pas recopieur de romans.
La lecture demande une connaissance de l'oeuvre de Lovecraft sans la nécessiter pour autant. Je m'explique. Si tu as lu Lovecraft, tu capteras les multiples références explicites aux entités et créatures (Azathoth, Dagon, Cthulhu, Nyarlathotep), ouvrages fictifs (Necronomicon), lieux réels (l'Antarctique des Montagnes Hallucinées, l'Australie de Dans l'abîme du temps) ou imaginaires (R'lyeh, Innsmouth, Y'hanthlei, Arkham, l'université Miskatonic), personnages (Wilbur Whateley et Henry Armitage de L'Abomination de Dunwich, Randolph Carter du Cycle du rêve, Georges Gammell Angel de L'appel de Cthulhu, Edward Pickman Derby du Monstre sur le seuil), idem les références implicites (i.e. ce qui se trame sous la maison du narrateur n'est pas sans rappeler la nouvelle Les rats dans les murs). Et encore, je ne cite pas tout, parce qu'il y en a beaucoup beaucoup, pour ainsi dire la totalité des écrits de Lovecraft et de l'univers étendu de Cthulhu (mention des chiens de Tindalos, inventés par Frank Belknap Long dans la nouvelle éponyme et repris par Lovecraft dans Celui qui chuchotait dans les ténèbres).
Si tu n'as pas lu Lovecraft, l'intertexte va te passer au-dessus, merci La Palice. Soyons clair, tu perds une bonne moitié de l'intérêt du roman. Cela dit, ne pas capter les allusions n'empêche pas de comprendre le récit et l'histoire d'horreur fonctionne quand même.
Elle suit un développement classique. le narrateur raconte le début de sa vie, normale dans les grandes lignes, avec juste quelques bizarreries sans conséquences (pour le moment), glissées çà et là comme autant d'indices. Ensuite, un cran au-dessus des excentricités pittoresques, poignent des trucs aussi chelous que la conjugaison du verbe poindre. La trame horrifique se met en place quand on relie ces signes disparates. de machins étranges en bidules mystérieux, le narrateur commence à se poser des questions sur la réalité de ce qu'il voit/entend/ressent, dans une ambiance d'entre-deux propre au fantastique. Vient enfin la confrontation avec l'horreur et la révélation finale qu'on va tous crever dévorés par des monstres innommables et périphraseux (au hasard, ceux des profondeurs).


Texte lovecraftien sur la forme, Ceux des profondeurs l'est aussi sur le fond. On y retrouve les thèmes chers à HPL, les couleurs irréelles et hors du prisme, l'architecture bizarroïde, le mélange de surnaturel et de science-fiction, les rêves comme accès à une autre dimension de connaissance du réel, une vision du monde si nihiliste qu'elle redéfinit la notion de pessimisme… Ce court roman témoigne d'une connaissance et d'une compréhension rares du mythe de Cthulhu.
La vraie question à se poser est la suivante : jusqu'ici, on se situe dans la copie carbone, qu'est-ce qui différencie ce texte de ceux de Lovecraft ? Où est la touche Leiber ? Ceux qui ont répondu “je n'ai pas de touche Leiber sur mon clavier”, vous sortez.
Si le récit est écrit avec sérieux (on parle quand même d'un auteur cité par Stephen King et Terry Pratchett comme une de leurs influences), Leiber ne se prend pas au sérieux. Chez lui, l'écriture est un jeu, qu'il aborde avec recul, sans prise de tête ni melon surdimensionné, il le prouve tout le long de son livre (voire de sa bibliographie complète).
Chez Lovecraft, on croise du Grand Ancien à la pelle (de Cthulhu). S'il est un Grand Absent dans son oeuvre, c'est l'humour. Par chance, Leiber a un peu plus le sens de la rigolade. Certains passages de Ceux des profondeurs présentent un aspect si hénaurme que je me demande s'il faut les prendre au premier degré ou s'ils flirtent avec la parodie.
Une certitude, le narrateur sent la vanne à plein nez. Georg Reuter Fischer incarne le double de Leiber : le même Reuter en deuxième place, prénom et nom de famille germaniques. Premier clin d'oeil, Leiber a connu IRL un Harry Otto Fischer, qui est une des sources d'inspiration de son Souricier gris. Second clin d'oeil, le choix de CE nom dans CE contexte. Pour ceux qui n'ont pas collaboré avec les Allemands lors de la dernière guerre mondiale, Fischer signifie pêcheur dans la douce langue des vert-de-gris. Quand on sait la place qu'occupent dans l'oeuvre de Lovecraft la mer, les ruines sous-marines et les bestioles mi-ichthyeuses mi-batraciennes, y a de quoi se rouler par terre de rire. Enfin, ça fait sourire, quoi.
Idem le quotidien de Fisher qui sur certains aspects sent bon le second degré. le coco a de quoi vivre sans bosser et occupe son temps libre à baguenauder par monts et par vaux, dormir douze heures par nuit et écrire des poèmes. Bref, un écrivain, l'incarnation de la glandouille dans l'imaginaire collectif.
En moins jovial, le prologue t'annonce que le manuscrit a été découvert le 16 mars 1937, le lendemain de la mort de Fischer. Or, le 15 mars 1937, qui c'est qui mort ? Lovecraft himself. le genre de “coïncidence” et de “comme par hasard” qui mériterait un épisode d'Alien Theory.
Sur Lovecraft, Leiber s'est fait plaisir en enchâssant les incarnations. Son double de papier Fischer possède certains traits de Lovecraft. Sa santé chancelante, par exemple, ferait passer Elric de Melniboné pour un modèle de corpore sano où ranger du mens sana à foison. Sa poésie imbitable renvoie l'écho des Fungi de Yuggoth et autres poèmes fantastiques (quand on les a lus, on comprend pourquoi Lovecraft est connu pour sa prose plus que pour ses vers). Cet hybride Leiber/Lovecraft va rencontrer Albert N. Wilmarth, personnage de Celui qui chuchotait dans les ténèbres, utilisé ici comme doublure de Lovecraft. La correspondance entre Wilmarth et Fischer, le “rôle d'un mentor professionnel” du premier envers le second sur les questions d'écriture, ces éléments relèvent de l'autobiographie. Là-dessus, Leiber réalise un triple combo, puisque Wilmarth va conseiller à Fischer de lire des nouvelles parues dans un magazine pulp, Weird Tales… et écrites par un certain Howard Phillips Lovecraft.
À ce niveau de mise en abyme, la fosse des Mariannes peut rougir de honte devant sa propre petitesse.


Là où beaucoup ont tendance à refaire du Lovecraft à l'identique, Leiber apporte sa touche personnelle en osant le changement. Bouh le vilain ! ne manqueront pas de s'écrier les gardiens du temple. Souhaitons-leur une mort lente et douloureuse et revenons à nos shoggoths.
Plutôt qu'une énième visite de la Nouvelle-Angleterre, Leiber plante son décor en Californie. de l'est à l'ouest, de l'humidité à la sécheresse, de la forêt ombragée aux champs de caillasse recuits par le soleil. Fini de barboter dans la flotte au large de Boston la traditionnelle, la thématique sera chtonienne aux abords de Los Angeles l'avant-gardiste. Paf ! Après, rassure-toi, la senteur marine figure au programme des réjouissances : le Pacifique est à portée de main et de tentacule.
J'ai apprécié que Leiber instaure une certaine distance par rapport au cadre habituel de Lovecraft et de ses descendants littéraires, dont beaucoup ont oublié le concept d'horreur cosmique, soit une échelle bien plus vaste que le confetti du Rhode Island. Si Leiber cite l'ensemble des patelins visités par les nouvelles de Lovecraft, il insiste dans le texte sur leur éloignement. le Massachusetts, le Vermont, Providence font figure de bout du monde.
Au-delà des 270 000 références, je me demande s'il n'est pas là, le principal hommage de Ceux des profondeurs. Sortir le mythe de Cthulhu du canon sans le dénaturer pour autant. Prolonger en la nourrissant l'oeuvre qui l'a nourri.


Est-ce le roman de l'année ? Non. Est-ce LE roman de Leiber ? Non. Et faut pas être allergique au style vieillot et surchargé. Mais sans s'imposer comme une oeuvre majeure, Ceux des profondeurs mérite qu'on y jette un oeil. Parce que l'hommage estampillé “du Lovecraft sans en être” est réussi. On peut même imaginer un quiz ou un jeu à boire autour des références à découvrir dans cette centaine de pages (je sens qu'il va y avoir des comas éthyliques…).
À mon avis, pas le titre le plus indiqué pour démarrer, mais après tout, ça peut être une occasion d'entrer dans Lovecraft ou Leiber par la petite porte. Je parle bien sûr de leur oeuvre littéraires pas de leurs fesses, vu qu'ils sont morts. Encore que… Entre Lovecraft qui a bossé sur la nouvelle le nécrophile de son pote Clifford Martin Eddy et Leiber qui te parle d'une “absolue union charnelle” entre le père de Fischer et sa dulcinée morte et enterrée… hein… je me dis qu'on pourrait bien voir Cthulhu tourner dans le prochain Jacquie et Michel.
Lien : https://unkapart.fr/ceux-des..
Commenter  J’apprécie          121
Après la disparition de son père dans un étrange trou, Georg Reuter Fischer se lance dans une sinistre enquête qui le mènera aux portes de l'indicible...

Si j'adore Lovecraft, je suis en revanche moins fans des textes d'autres auteurs qui s'en inspirent ouvertement, mais il y a une exception à ce désamour : les auteurs qui l'ont réellement côtoyé. Fritz Leiber en fait partie, et entre ce détail et la superbe couverture de Zdzisław Beksiński, je ne pouvais que me laisser tenter.

Ceux des Profondeurs est un court roman qui fait la part belle à l'intertextualité : ici, tout renvoie à Lovecraft. Les noms des personnages (qui sont présents dans les oeuvres du maître mais sont ici présentés comme des personnes existant réellement), les lieux, les dates, les événements... tout est clin d'oeil et allusions, comme un jeu de pistes géant qui raviront les amateurs de Lovecraft (pour les autres par contre, j'aurais tendance à déconseiller la lecture, sous peine de passer à côté de tout l'intérêt du texte). Mais si le fond renvoie au maître de Providence, la forme le fait aussi, avec un style et un déroulement qui collent parfaitement.

Néanmoins, Leiber ne fait pas que copier, et il a intelligemment choisi de placer son action en Californie, là où le soleil vient remplacer le temps morne et gris de Providence. Ce changement n'est d'ailleurs pas dénué d'intérêt, et l'auteur sait intelligemment en jouer avec l'arrivée d'Albert Wilmarth dont le comportement oscille en fonction du jour et de la nuit. La forme du journal rédigé juste avant la catastrophe est respectée elle aussi, permettant de poser l'ambiance d'urgence et de d'angoisse. Autre changement, Leiber a beaucoup orienté son texte sur les liens qui existent entre Georg et son père, ce qui tranche avec les textes de Lovecraft et qui permet de voir la situation sous un angle très différent.

En bref, un court roman hommage qui ravira les fans de Lovecraft.
Commenter  J’apprécie          60
Fritz Leiber est un écrivain de science-fiction et de fantasy auteur du Cycle des Épées et de bien d'autres livres. Fritz Leiber admirait aussi H. P. Lovecraft, d'ailleurs sa femme avait envoyé une nouvelle de Leiber à lire à Lovecraft, qui avait apprécié. Écrit en 1976, Ceux des profondeurs (The Terror from the Depths) est un court roman qui rend hommage à l'écrivain de Providence. le roman avait été publié en 1990 chez Phénix, un éditeur belge, dans la collection Pégase qui ne dura seulement que 2 ans. Les éditions Mnémos ont eu l'excellente idée de le ressortir pour le mois Lovecraft organisé par les Indés de l'imaginaire.
Fritz Leiber montre dans ce roman sa grande connaissance de la mythologie créée par Lovecraft et s'amuse à mélanger des personnages des textes de l'auteur à ceux de son propre récit, et à faire même de Lovecraft un personnage de son récit. On ne le croise pas mais il est en contact avec Albert Wilmarth, professeur à l'université de Miskatonic, qui entretient une correspondance avec lui. L'histoire de Ceux des profondeurs se déroule essentiellement en 1937 et la mort de Lovecraft est mentionnée par un télégramme de Danforth à l'intention de Wilmarth.
Ceux des profondeurs est sans conteste une grande réussite. Ce court roman est un hommage de Fritz Leiber rendu à Lovecraft et à sa mythologie. le récit est tout à fait dans la veine des écrits du maître de Providence et les références à son oeuvre sont nombreuses. Il vaut mieux connaitre un peu les textes de Lovecraft pour profiter complétement de cette novella.
chronique plus complète sur le blog:
Lien : https://aupaysdescavetrolls...
Commenter  J’apprécie          60
Merci à Mnémos de ressusciter (2019) cette petite perle de Fritz Leiber, Ceux des Profondeurs, un peu oubliée depuis sa première version française chez Phénix/Pégase en 1987. Ce texte de 1976 montre, s'il en était besoin, toute l'admiration du citoyen de Lankhmar pour notre auteur. Au point de nous donner une véritable oeuvre « intertextuelle » (comme disent les universitaires), se glissant dans l'oeuvre de Lovecraft pour y puiser tous les éléments de son récit (personnages, créatures, livres etc..) en les remixant astucieusement. Ce qui a pour effet de donner aux créations du Maître de Providence une impression de réalité troublante. Ce procédé sera régulièrement repris par la suite et produira de petits chefs d'oeuvre comme Providence d'Alan More.
Leiber nous retrace la vie de Georg Reuter Fisher, jeune californien handicapé qui mène une existence de reclus, entre une mère possessive et un père artiste victime d'étranges visions. Des visions qui évoquent des souterrains et des monstruosités rampantes que ne tardera pas à partager son fils. le père disparaît lors d'une chute mortelle dans un gouffre et Georg part pour Arkham afin de faire ses classes à l'université de Miskatonic. Mais sa mauvaise santé et notamment ses effondrements nerveux l'empêcheront de poursuivre son cursus et il rentrera au pays. Il avait acheté à la librairie de l'université Azathoth et autres horreurs d'un certain Edward Pickman Derby, ouvrage qui lui donnera le goût de la poésie et l'amènera à publier – à compte d'auteur- son propre recueil, le Tunnelier d'en-bas. Il en envoie un exemplaire à l'un de ses anciens condisciples, Albert Wilmarth, qui le remercie avec enthousiasme : ses visions s'inscrivent en effet parfaitement dans le programme de recherches sur « l'inconscient collectif manifesté dans les rêves » mené par l'université avec les professeurs Armitage, Peaslee, Morgan… le jeune reclus accepte bien volontiers de participer aux travaux et invite Wilmarth pour lui faire visiter sa région truffée de souterrains… et de serpents. On devine aisément la suite de l'histoire dont le point final se situera en mars 1937, lorsque Wilmarth apprendra la mort de Lovecraft
Commenter  J’apprécie          30




Lecteurs (58) Voir plus



Quiz Voir plus

Ce film d'horreur et d'épouvante est (aussi) un roman

Jack Torrance, gardien d'un hôtel fermé l'hiver, sa femme et son fils Danny s'apprêtent à vivre de longs mois de solitude. Ce film réalisé en 1980 par Stanley Kubrick avec Jack NIcholson et Shelley Duvall est adapté d'un roman de Stephen King publié en 1977

Le silence des agneaux
Psychose
Shinning
La nuit du chasseur
Les diaboliques
Rosemary's Baby
Frankenstein
The thing
La mouche
Les Yeux sans visage

10 questions
966 lecteurs ont répondu
Thèmes : cinema , horreur , epouvanteCréer un quiz sur ce livre

{* *}