Agnès Bihl « avant-ringarde »

Quand beaucoup chantent un petit tour et puis s’en vont, Agnès Bihl réalise ses tours de chant depuis dix ans. Un « petit bonheur de chemin » au petit bonheur la chance, mais surtout grâce à son talent. Une chose est sûre, depuis que Charles Aznavour a pris la demoiselle sous son aile, on ne se fait pas de bile pour la carrière d’Agnès.

Agnès Bihl « avant-ringarde »

Agnès fait son cirque

Isabella Monnier Leland : Tes chansons, c’est pour remédier au « manque de magie du monde » ?
Agnès Bihl : D’une certaine manière. Prendre une plume, c’est vouloir repeindre le monde. Que ce soit pour enjoliver ou dénoncer, c’est une forme d’implication face à la vie. Partager, c’est déjà magique, sur scène notamment.
I.M.L. : En parlant de scène, comment se passe ton « numéro » sur scène ?
A.B. : J’ai été très influencée par le cirque. Ça s’entend dans ma musique. Au début je jonglais. Il y a toujours un côté très parade dans mes spectacles. J’aime l’idée d’un tour de chant à l’ancienne. Je fais dans l’avant-ringarde.
I.M.L. : Tu as fait les premières parties de Charles Aznavour ?
A.B. : C’était finalement très logique. Cela participe aussi de ma mythologie personnelle à l’ancienne. Je puise beaucoup de choses dans le music hall. C’est aussi une chance car pendant 40 ans il n’a pas voulu de première partie. C’est très rassurant. C’est une caution artistique.
I.M.L. : Qu’est-ce qui t’inspire pour écrire ?
A.B. : La vie, ce que je vois… J’ai baignée dans Barbara, Brassens, Ferré, Aznavour, le jazz, la musique classique, les romans, les films… Mais ça vient aussi de ce que je peux lire dans le journal, où lorsque j’attends le train à St Lazare. Les gens vous font des cadeaux de vie pour peu qu’on soit ouvert.
I.M.L. : Etre maman a beaucoup marqué ton album ?
A.B. : L’arrivée de ma fille a changé beaucoup de choses. Rosalie intervient sur la chanson « La complainte de la mère parfaite ». Je chante beaucoup avec Lili. Je lui fait aussi écouter beaucoup de musique. Elle connaît du Brassens par cœur et du « Jaznavour » aussi ! J’ai aussi commencé à écrire des contes pour enfants. L’écriture sous toutes ses formes me passionne.
I.M.L. : « SOS bonheur », c’est pour changer des disques d’Henri Dès ?
A.B. : « La complainte » est dans la dérision. Mais « SOS bonheur » je l’ai vraiment écrite pour ma fille. J’ai failli me faire écrasé l’année dernière. Heureusement, je faisais les soldes et la moto a percuté les sacs. En tombant, je me suis dit : « s’il m’arrive quelque chose, il faut que je lui ait dit ça ! » Au lieu de voir ma vie défiler, j’ai vu les paroles de la chanson.

Tout un programme

I.M.L. : « Fille ratée, garçon manqué », c’est ton côté Adrienne Pauly ?
A.B. : C’est générationnel. On a du mal à se positionner par rapport à l’héritage du féminisme. On a un côté très fille, très assumé, et en même temps, on doute, on a un côté garçon manqué. La femme est devenue kaléidoscope : il faut assurer, mais ça n’empêche pas la fragilité. On est des grandes gueules, on veut s’assumer. Mais des fois, on veut juste qu’un garçon nous prenne dans ses bras.
I.M.L. : Tu as trouvé le mode d’emploi pour trouver un garçon « en bon état » ?
A.B. : J’ai le mode d’emploi pour trouver, mais en bon état, ça n’est pas si facile. Je regarde comment ma fille de 5 ans s’y prend pour trouver un garçon. Ce qu’il faut c’est trouver un homme qui n’a pas de la fuite dans les idées. Je raconte quand même des contes de fées à ma fille. C’est mon côté midinette : je crois toujours au prince charmant.
I.M.L. : Tu fais la grasse matinée comme dans la chanson « Demandez le programme » ?
A.B. : Quand ma fille est chez son papa. Je me lève à 11 heures, j’enfile un jean sous mon tee-shirt et je vais me chercher des croissants. Je les mange au lit en mettant des miettes partout : c’est meilleur !
I.M.L. : Quels sont tes petits bonheurs en cas de « SOS » ?
A.B. : Prendre un verre avec des amis, une bonne bouffe autour d’un bon vin, me promener dans Montmartre, acheter des bonbons avec ma fille, lire un Arsène Lupin… Faire un tour en Bretagne si j’ai les sous. J’adore la Bretagne, ça me fait rêver. C’est magique et mystique. J’ai écrit « Demandez le programme » au Conquet et aux îles Ouessant. Ça m’inspire terriblement. C’est une région qui pousse dans les retranchements de l’imaginaire.
I.M.L. : Où peut-on te croiser à Montmartre ?
A.B. : Je vais souvent à la Divette de Montmartre, rue Marcadet, pour sa collection de vinyls. Le patron, Serge, a fait débuter Benabar, Sanseverino… J’aime me balader sur toute la butte. J’ai besoin d’avoir de la beauté sous les yeux : c’est plein de vie. J’y suis née. Je connais tout le monde. J’aime le Paris populaire. Mais si la rue des Martyrs de mes 6-7 ans a beaucoup changé ! C’est dommage…
I.M.L. : Niveau kilos, tu fais comment pour arrêter de faire « craquer le jean » ?
A.B. : Comme toutes les nanas j’ai toujours pris 2 kilos, donc j’en ai toujours 3 à perdre ! C’est une angoisse, mais je ne fais jamais de régime. C’est une chanson de dérision. J’ai besoin de rire et de me moquer de moi.
I.M.L. : Jamais deux sans trois, mais tu feras quand même un 4ème album ?
A.B. : Oui, j’ai même déjà commencé à travailler dessus. J’ai trois textes prêts. Ça fait dix ans que je fais ce métier. C’est un projet de vie. C’est une route que j’ai choisie. Je fais mon petit bonheur de chemin.

le 28/01/2008