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Le Luron, ange et démon

Pour les 30 ans de sa mort, une biographie fouillée explore la personnalité complexe de l’humoriste.

, Mis à jour le
Thierry Le Luron, dans sa loge avant un spectacle, en novembre 1979.
Thierry Le Luron, dans sa loge avant un spectacle, en novembre 1979. © Abacapress

"On me prend souvent pour quelqu'un d'autre", déclarait-il à Alain Pacadis dans Libération en 1984. Thierry Le Luron, humoriste star des années giscardiennes et mitterrandiennes , aura réussi en quinze années d'une carrière fulgurante à tromper son monde et en premier lieu lui-même. "C'était un enfant non désiré et il le savait. Quand elle était enceinte, sa mère le surnommait Surplus. Ce sentiment d'abandon ne l'a jamais quitté", explique Patrice Guérin, auteur de l'imposant Thierry Le Luron, le rire pour oublier aux Éditions du Moment. "Imiter, c'était combler ce vide. Il lui fallait se glisser dans la voix des autres. Être dans la sienne le mettait mal à l'aise."

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Un imitateur délirant

Cela expliquera l'échec de la carrière de Le Luron chanteur – sa velléité première. Au lieu de cela, le garçon deviendra un imitateur délirant, dégommant tout sur son passage, mais surtout les politiques en place, sous un air de premier communiant. Et gare à ceux qui le blessaient : "Ses sketches les plus virulents sont nés de rancœurs personnelles." D'avoir un jour été snobé par Mitterrand chez Lipp vaudra à celui-ci d'être cloué au pilori, notamment avec le tube parodique L'Emmerdant c'est la rose.

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Un grand mélancolique

Dans la biographie de Patrice Guérin, on découvre un grand mélancolique cherchant par le rire à masquer de vives angoisses, sans cesse à la recherche de bruit, de monde, de nuits sans sommeil dans le Paris interlope dont il se fait l'homme-orchestre (en 1978, il ­rachète L'Échelle de Jacob, une ­mythique boîte à chansons rive gauche qu'il transforme en bar gay avec backroom, le Trap). L'ange se veut démon.

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Mais, de peur de perdre son public, Le Luron restera toujours très discret sur sa vie privée. À sa mère qui, après l'avoir rejeté, finira par trop l'aimer jusqu'à l'étouffer, il écrira une dernière lettre : "Le seul amour que j'aie jamais reçu est celui de mon public." Lettre que sa mère emportera à son tour dans sa tombe. Comme beaucoup, elle ne s'était jamais remise de la disparition du Petit Prince de l'humour. 

Source: JDD papier

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