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Alan Moore, le minotaure de la contre-culture

L’écrivain a d’abord secoué la bande dessinée, dans les années 1980-1990, avec « V pour Vendetta » ou « Watchmen ». Au tour du roman : le vertigineux « Jérusalem » en résulte.

Par  (Collaborateur du « Monde des livres »)

Publié le 17 septembre 2017 à 07h00, modifié le 07 août 2023 à 15h24

Temps de Lecture 6 min.

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L’écrivain britannique Alan Moore.

Sis à Londres, dans le quartier de Soho, le Groucho Club, cosy repaire pour artistes et gens de médias, est un terrier magique aux tons pimpants, tout en escaliers fantasques et salons embusqués. C’est là, au dernier étage de ce douillet labyrinthe, qu’avait été organisée par son éditeur, en septembre 2016 – à l’occasion de la sortie britannique de Jérusalem –, une rencontre avec Alan Moore, minotaure de la contre-culture, mythique scénariste de comics et de récits graphiques, magicien, showman, icône pop et surtout œil d’un salubre cyclone narratif qui n’en finit pas, depuis les années 1980, de bouleverser l’imaginaire contemporain.

On ne peut pas dire qu’Alan Moore entre dans une pièce. Il s’y matérialise. Crinière léonine pacifiée par une impeccable raie centrale, barbe de barde, fluviale et sans remous, regard de dragon triste, scintillant costume mauve de dandy psychédélique, doigts crénelés de chevalières gothiques enserrant la torsade serpentine d’une canne en bois blond : imaginez Joe Cocker peint par Gustave Klimt et vous brûlerez. Assis sur un fauteuil bas que sa stature de chaman chamarré élève immédiatement à la dignité de trône gnostique, Moore raconte les moments de sa vie liés à la genèse et aux secrets architecturaux de cette Sagrada Familia littéraire anglo-saxonne qu’est Jérusalem.

« Mes handicaps m’équilibrent »

1 300 pages assemblées dix ans durant. Une saga qui s’amorce et se poursuit dans un lieu et un seul, Northampton, ville historique des Midlands, située à 100 kilomètres au nord de Londres et où il est né, en 1953, dans une famille ouvrière du vieux quartier populaire des Boroughs. De cette cité où il s’est enraciné, inviscéré, au point d’en sortir le moins possible, il a fait le sous-texte de nombre de ses œuvres. Une stratégie mûrement réfléchie pour échapper aux « impressions horizontales et passagères du voyageur ». Comme pour « parcourir, immobile et vertical, l’axe du temps et de la mémoire ».

Aveugle de l’œil gauche et quasi-sourd de l’oreille droite (« Mes handicaps m’équilibrent »), inscrit dès 5 ans à la bibliothèque municipale, le roux garçonnet est, à l’image de son père, un grand dévoreur de papier imprimé, récits mythologiques et romans de fantasy avant tout. Son premier livre de chevet est L’Ile magique, reportage dans une Haïti fantastique de l’Américain William ­Seabrook (1884-1945). Sa découverte, en 1962, des DC Comics (Superman, Batman) et surtout de l’univers Marvel (les Fantastic Four) sera décisive. A partir de 1965, son passage à la Grammar School de Northampton le fâche rapidement et à jamais avec l’institution scolaire. Mais l’épreuve est atténuée par la découverte d’autres classiques américains comme le Spirit de Will Eisner (1917-2005), ou le magazine humoristique Mad. Dessins et scénarios le magnétisant de plus en plus, il noue également avec la littérature fantastique et d’épouvante (Stoker, Lovecraft) et les classiques anglais (Chaucer, Shakespeare, Blake) des liens définitifs.

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