Kadhafi-Sarkozy : le mystérieux circuit des millions libyens

Mediapart publie deux témoignages d'anciens dignitaires libyens. Ils affirment que des sommes en liquide ont été versées "pour la campagne de Sarkozy".

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Les juges tentent de prouver que Nicolas Sarkozy a financé sa campagne présidentielle de 2007 grâce à de l'argent libyen (Photo d'illustration : Nicolas Sarkozy et Muammar Kadhafi, en décembre 2007).
Les juges tentent de prouver que Nicolas Sarkozy a financé sa campagne présidentielle de 2007 grâce à de l'argent libyen (Photo d'illustration : Nicolas Sarkozy et Muammar Kadhafi, en décembre 2007). © AFP

Temps de lecture : 3 min

À quoi ont donc pu servir tous ces millions ? Les juges chargés d'enquêter sur un éventuel financement libyen de la campagne présidentielle de 2007 de Nicolas Sarkozy ont beaucoup avancé ces derniers mois. Selon Mediapart, les magistrats ont reçu le témoignage de deux anciens dignitaires du régime libyen. Le premier, Abdallah Senoussi, ex-chef du renseignement militaire, aurait avoué devant la Cour pénale internationale (CPI) avoir personnellement supervisé le transfert de 5 millions d'euros « pour la campagne de Sarkozy ». Le second, un membre des services du protocole libyen, entendu sous X et dont l'identité ne peut donc être confirmée, a affirmé que des versements avaient été faits à hauteur de 50 millions d'euros (20 millions en cash et 30 millions par virement bancaire).

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Ce second témoin, toujours selon Mediapart, a aussi confié que Boris Boillon et Claude Guéant, deux proches de l'ex-président français, avaient reçu des espèces en 2007 à Tripoli. Dès lors, une question se pose : pourquoi Nicolas Sarkozy aurait-il eu besoin d'une somme d'argent si importante (plus de 50 millions d'euros) pour financer sa campagne, alors que le plafond des dépenses des candidats au second tour était de 21,5 millions d'euros ? Et alors même que ses comptes de campagne ont, à l'époque, été validés ? Autre interrogation : comment une somme d'argent si importante a-t-elle pu transiter en France sans alerter les autorités ?

Où est passé l'argent ?

Là encore, Mediapart apporte des débuts de réponse. Un témoignage publié par le site d'information en juin 2013 précisait le circuit de l'argent. Une partie aurait transité par une banque de Beyrouth, avant d'être réexpédiée vers un compte bancaire en Allemagne relié au sulfureux intermédiaire Ziad Takieddine. D'autres sommes auraient circulé au Panama et en Suisse. La justice a ainsi pu déterminer que Takieddine avait bien reçu deux millions d'euros en 2006 en provenance de Libye.

Mais les enquêteurs n'ont pour le moment pas réussi à remonter le fil de cet argent. Des investigations sont en cours. Enfin, le témoin entendu sous X a affirmé que des virements étaient passés par la National Oil Company, entreprise publique libyenne, et que les 20 millions d'euros en espèces avaient voyagé dans un jet privé entre Syrte et Le Bourget, dans des mallettes contenant des coupures de 100 et 500 euros. « Claude Guéant et Boris Boillon étaient dans l'avion », affirme l'homme. « C'est un pur mensonge », a répondu Claude Guéant, interrogé par Mediapart.

« Ils ne cherchent pas au bon endroit »

Si les flux financiers n'ont, pour l'heure, pas pu être remontés, la justice s'interroge sur l'ouverture d'un mystérieux coffre-fort à la BNP pendant la campagne, et qui aurait servi, d'après Claude Guéant, à stocker des notes personnelles. En juillet 2013, Boris Boillon avait été interpellé, gare du Nord à Paris, en possession de 350 000 euros en liquide. Des sommes liées à une activité de consultant, a répondu l'intéressé aux enquêteurs, sans convaincre. Les investigations ont en effet permis de déterminer que les espèces en question... n'ont jamais été mises en circulation !

De nombreuses questions restent encore sans réponse depuis l'ouverture de l'information judiciaire en avril 2013. Dans un article intitulé « L'enquête impossible », Le Mondea publié le 3 novembre dernier la retranscription d'une écoute d'un avocat franco-djiboutien au téléphone avec un de ses confrères soupçonné d'avoir versé 500 000 euros à Claude Guéant dans l'affaire des tableaux flamands. « Oui, ils (les juges, NDLR) cherchent le lien avec Kadhafi, racontait l'avocat, mais ils ne cherchent pas au bon endroit. »

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Commentaires (89)

  • jms91

    Le plus grave dans cette affaire est que les juges, qui ne peuvent pas ignorer la vocation d'inquisiteur et de et le côté à la limite "psychiatrique" de Plenel, font leur miel des propos de cet individu. Quand va-t-il commettre la faute, aller trop loin dans le diffamation et la calomnie qui le mènera devant une vraie justice qui le mettra définitivement hors d'état de nuire. Et question subsidiaire : qui finance Médiapart, qui profite du flux nauséabond que produit cette société ?

  • Clicoeur

    J'aime bien vous lire, même si je ne suis pas toujours d'accord avec vous, mais là, vous exagérez beaucoup trop à mon goût. En effet, l'opération militaire de 2011 en Libye aurait été, d'après vous, l'initiative d'un seul homme, le Président Sarkozy, pour faire taire Kadhafi... Rien que ça ! Non seulement vous oubliez que c'est BHL qui est intervenu auprès de Sarkozy afin de le décider à sauver la population de Benghazi, mais surtout, le Président français n'aurait rien pu faire sans l'aval de la ligue arabe pour une mobilisation multinationale (une vingtaine de pays), le tout sous l'égide de l'ONU. Je vous rappelle aussi que nos Socialistes, Hollande en particulier, avaient eux aussi donné leur aval pour l'intervention militaire. Alors, je ne pense pas que tout ce beau monde ait été motivé par une soit-disant élimination d'un personnage qui aurait pu être, d'après vous, compromettant pour Nicolas Sarkozy.

  • Tousofns

    Seuls les juges ne peuvent pas y''croire'', faute de preuves suffisantes actuellement.
    Hélas, la reine des preuves est la guerre en Libye dont le seul but pour notre Trump
    était de "faire taire''Kadhafi pour toujours. Mais le président de l'époque, pourtant bavard, a su ne pas en parler à L'OBS.