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Le cadran solaire du mur de l'église clame fièrement : « Lou plus aouto coumunoutas inte se mangeu lou pan de Diou » (La plus haute commune où l'on mange le pain de Dieu). À 2 040 mètres au-dessus du niveau de la mer, Saint-Véran a longtemps dominé les villages montagnards de France et d'Europe. Même si une guéguerre lui oppose Tignes et Val Thorens, la star du Queyras conserve le privilège de l'âge.
Ici, l'altitude n'est pas qu'un slogan marketing, mais une réalité bien physique, sans cesse rappelée aux poumons du promeneur. Le souffle court, on arpente les deux kilomètres de boucle accrochés à la pente ; le vertige apporte un autre frisson, celui des à-pics surgissant à tout moment.
Du temple à l'église
L'été, les restaurants rivalisent en terrasses avec vues sur le gouffre de la vallée et l'éventail de sommets coiffés de neige. Une partie des cimes du Queyras caracole ici, une vingtaine d'entre elles dépassant les 3 000 mètres. Le légendaire alpiniste Edward Whymper en conquit certaines, vers 1848, et contribua à mettre ce bout du monde sur les cartes de l'aventure montagnarde. Le village était alors un repaire farouche où s'étaient réfugiés des protestants persécutés sous Louis XIV. Leurs descendants continuent d'aller au temple, dont le clocher auréole le bas du bourg – à ne pas confondre avec l'église catholique située en haut.
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Le grand plaisir consiste à cheminer de l'une à l'autre, en ménageant des pauses pour reprendre son souffle devant de multiples splendeurs : les géraniums exubérants sur fond de lauzes, et surtout la collection de beaux chalets à l'architecture étudiée – en bas, d'épais murs chaulés pour résister au feu. En haut, un enchevêtrement de mélèzes ajourés qui laissaient autrefois sécher les récoltes de seigle. D'innombrables cadrans solaires ornent les façades, rappelant que dans cette partie des Alpes le soleil brille trois cents jours par an. Leurs devises brodent sur le temps qui emporte les hommes.
Quant aux pierres, elles ont résisté aux assauts du temps au point que tout paraît tel qu'il y a un siècle. On évite de justesse l'écueil du village-musée. Un ou deux sculpteurs sur bois produisent des marmottes et autres frises chargées d'edelweiss. Et on n'échappe pas au parcours pédagogique menant de l'ancien four à pain au musée sur la vie des paysans. On remarque aussi la présence d'un hôtel quatre étoiles avec spa, dont l'entrée chic trouble un peu l'authenticité paysanne.Mais il y a aussi une vraie vie à Saint-Véran, autour de sa Poste, son école primaire et sa mairie. L'un des deux éleveurs de la commune, Jean-Marie Imbert, vient d'y entrer au conseil municipal. On peut voir sa crinière grisonnante menant ses moutons au pâturage, ou ramassant le fourrage à flanc de montagne. La viande se déguste à la table des Sonnailles, la belle ferme-auberge qu'il a ouverte au bout du village.
Marmottes et perdrix
La vraie vie de Saint-Véran se passe aussi beaucoup plus haut. En chemin, les marmottes sifflent et on peut apercevoir des perdrix des neiges se faufilant à l'abri des rochers. Au sommet, l'Observatoire astronomique offre au randonneur bien plus que le frisson d'un 3 000 mètres. Entre le chaos rocheux et le ciel pur, un dôme blanc abrite trois télescopes. On s'installe en mission d'un jour ou d'une semaine dans ce cercle restreint de passionnés, pour observer supernovæ ou comètes. La tête dans les étoiles, pour de vrai.
Y aller
Dormir à La Baita du loup, auberge idyllique à La Chalp, où paresser dans le jardin et profiter d'une table d'hôtes chaleureuse. À partir de 70 euros la nuit.
Déjeuner à La Marmotte, où tartiflettes et crêpes sont servies sur une terrasse en bois avec vue panoramique sur les cimes. 30 euros le repas. 04 92 45 84 77.
Observer les étoiles d'un des ciels les plus purs d'Europe, en séjournant à l'Observatoire.
Lire les précédents épisodes :
Là où les coqs picorent les étoiles ! Magnifique village, la nature a l'état pur !
Jeune étudiant à Paris, faisant une colo comme moniteur à Molines-en-Queyras, étant de repos ce jour là, j'ai eu le bonheur, en faisant de l'auto stop de monter dans la voiture ou se trouvait un passager exceptionnel (coté chauffeur)... Laurent Terzieff!
Il allait précisément à Saint Véran passer quelques jours de repos chez l'homme (son ami) qui conduisait une DS servant de Taxi, d'ambulance.
Pendant une heure environ j'ai pu lui poser toutes les questions sur le théâtre (à l'époque il jouait Nicomède de Corneille)... Quel bonheur !