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Libération
Critique

UN ETE 98. Un Poche par jour. Trois vies.Mario Benedetti «La Trêve»; Traduit de l'espagnol par Annie Morvan, le Livre de poche-Biblio, 192 pp., 30 F.

par Mathieu Lindon
publié le 6 août 1998 à 8h54

'est un roman de vacance par excellence, quand le vide est un

espoir. Il se présente comme le journal de Martin Santomé, travailleur de bureau, et la première phrase en est: «Dans six mois et huit jours, toutes les conditions seront requises pour que je puisse prendre ma retraite.» Veuf (alors que sa femme et lui avaient une entente sexuelle parfaite), le narrateur a des problèmes familiaux, un de ses enfants se révélant avoir des moeurs inacceptables pour lui, et de toute façon c'est trop compliqué d'éduquer qui que ce soit. Une nouvelle jeune employée va lui rendre, un temps, son travail plus agréable et l'approche de la retraite pas aussi souhaitable qu'à la page une. «Avellaneda a quelque chose qui me plaît. C'est évident, mais quoi?» Le caractère introspectif du narrateur, pour qui le veuvage semble une habitude, ne suffit pas à en faire un expert de sa propre personnalité. A travers les notations de son journal apparaissent les vies sentimentale, professionnelle et familiale, de plus en plus mêlées, de Martin Santomé, et les trois sont à la fois drôles et émouvantes. Il y a, entre Courteline et Kafka, une sorte de désinvolture dans la description de la vie de bureau qui donne à celle-ci une grande efficacité. «L'Uruguay est le seul bureau dans le monde qui se soit haussé à la catégorie de république», écrit Mario Benedetti, né en Uruguay en 1920. La Trêve date de 1959.

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