"Je me demande si je ne suis pas maudite", lâche-t-elle au cours d'une soirée après le suicide d'un de ses anciens amants (le troisième), Richard Chanfray. Elle est depuis longtemps psychologiquement fragile et traverse à nouveau une grosse dépression, qui l'entraînera quelques mois plus tard à mettre fin à ses jours avec pour seul dernier mot : "La vie m'est insupportable Pardonnez-moi".

Son frère et producteur, Orlando, revient sur les raisons de sa mort tragique vendredi 12 juillet, dans un documentaire diffusé sur France 3 et consacré au destin de la diva, Dalida, la femme qui rêvait d'une autre scène.

La vie m'est insupportable. Pardonnez-moi.

Sa solitude

Elle se sentait seule, comme de nombreuses célébrités, parce qu'elle se sentait incomprise, soulignait la psychologue Alice Miller.

Une sorte de mise en abîme pour les personnalités qui sombrent alors dans la dépression "parce qu’elles ne peuvent pas se comprendre elles-mêmes". "Elles ne sont pas en situation de pouvoir se comprendre parce que leur entourage ne leur renvoie pas de la compréhension, mais uniquement de l’admiration."

Une enfance formatée

Entourée par ses deux frères dans une famille patriarcale d'origine italienne de la petite bourgeoise du Caire, aux idées très formatées, Yolanda Gigliotti grandit tranquillement. Mais est-ce déjà le signe d'un caractère très volontaire qui va pousser l'ancienne petite fille complexée (lunettes de vue à triple épaisseur) à candidater au concours "Miss beauté" en maillot de bain ?

Le scandale passé et le prix gagné, la jeune femme décide de réitérer en 1954 en se présentant au prix de Miss Egypte qu'elle remporte également. Mannequin, elle devient actrice avant de s'envoler pour Paris qu'elle rêve de conquérir. Elle s'essaie alors à la chanson où sous la tyrannie d'un professeur exigeant elle se révélera une grande artiste dotée d'un grand professionnalisme. Sa carrière est lancée, elle s'appelle désormais Dalida.

Vidéo du jour

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Des amours malheureuses

Trois des hommes qui ont partagé la vie de Dalida se sont suicidés et aucun ne lui apporte la sérénité d'un foyer stable qui lui a toujours manqué dans une carrière où elle fût exposée à l'amour des admirateurs comme aux critiques d'une presse à scandale qui la surnommera "la veuve noire".

Tout d'abord, son premier amour et fiancé, Luigi Tenco. Ensemble, ils participent au Festival de San Remo qui doit enfin lancer la carrière du chanteur. Terriblement angoissé, il va boire et prendre des calmants avant d'entrer en scène. Il rate sa prestation. À la suite de cet échec, Luigi se tire une balle dans la tête. Un mois après, Dalida fera une tentative de suicide.

Rien ne peut remplacer le bonheur d'avoir un mari, un enfant. Rien.

Sa rencontre à 34 ans avec un étudiant italien de 22 ans - qui inspira très largement la chanson de Pascal Sevran Il venait d'avoir 18 ans - est l'une des explications du malaise permanent de Dalida. Enceinte, la jeune femme est obligée d'avorter pour éviter notamment le scandale. Elle restera stérile et ne pourra jamais assouvir le désir d'enfant qui aurait pu, pense-t-elle, donner un sens à sa vie. Elle révélera à la fin de sa vie : "Rien ne peut remplacer le bonheur d'avoir un mari, un enfant. Rien."

Dalida n’espérait plus grand-chose de sa vie. Elle était passée à côté de l’essentiel : la maternité.

Si Dalida se reconstruit en s'initiant à la spiritualité dans les bras de l'auteur et bouddhiste Arnaud Desjardins, son mal de vivre ne s'est jamais vraiment dissipé. Elle épouse en 1961 son pygmalion et ami de jeunesse Lucien Morisse, alors directeur artistique d'Europe 1. Un mentor qui se révélera être son pire ennemi quand elle le quittera un mois après leur mariage pour un autre. Il se suicide par arme à feu, neuf ans plus tard.

Une période durant laquelle elle a rencontré celui qui partagea 9 ans de sa vie en la personne du flamboyant mais non moins mythomane Richard Chanfray, qui se faisait passer pour le comte Saint Germain. Les dettes et les frasques du mondain le pousseront au suicide deux ans après leur rupture amoureuse en 1983.

"À cinquante-quatre ans, Dalida n’espérait plus grand-chose de sa vie. Elle était passée à côté de l’essentiel : la maternité. Son seul et unique mari était mort. Et aujourd’hui, l’amour, même s’il vibrait encore parfois sur sa peau, se faisait de moins en moins dense, de moins en moins profond", écrira Bernard Pascuito dans sa biographie.

Le 2 mai 1987, l'idole se donne la mort en avalant des barbituriques avec un verre de whisky.