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Privés de futur

ANTHOLOGIE

Textes réunis par Gilles DUMAY & Francis MIZIO


Illustration de Vincent FROISSARD

BÉLIAL'
Dépôt légal : mai 2000
Première édition
Anthologie, 424 pages, catégorie / prix : 22,71 €
ISBN : 2-84344-029-7
Genre : Science-Fiction

Co-édité par "Orion Éditions et Communication".



Ressources externes sur cette œuvre : quarante-deux.org
Ressources externes sur cette édition de l'œuvre : quarante-deux.org

Quatrième de couverture
     Votre vie de star n'a jamais été aussi ennuyeuse, les caresses bucco-génitales de « Miss Japon » et la plastique de « Miss Chili » finissent par vous gonfler... Alors pourquoi ne pas jouer au « Shootin' Paparazzi ! »

     Ces derniers temps, je me fais appeler Herbert West Lovecraft et je suis plutôt sur une grosse affaire... coincé entre un cadavre dans une baignoire et des types qui passent leur temps à crier des trucs imprononçables du genre « Ktu-Lu ».

     A Hollywood, un homme répondant au signalement du réalisateur Preston Sturges a été retrouvé mort. Mais Preston Sturges se trouve à son domicile, vivant...

     Mungo Park, détective de l'étrange spécialisé dans les fantômes, est de retour à Vyenna. Et voilà qu'une belle jeune femme, sans doute fatale, l'engage...

     Vous trouvez dans une benne à ordures le corps d'une petite fille dont on a coupé un bras et la tête. Horrible. Mais n'est-ce pas pire quand le policier chargé de l'enquête vous explique qu'il s'agit simplement d'un déchet hospitalier ?


     Une bouteille de whisky bas-de-gamme dans la poche droite du trench-coat, la cigarette au bec, rien n'a changé pour les privés, les flics, du futur : kidnapping, disparitions, meurtres, magouilles, corruption... Sauf que là, clones, sectes étranges, extraterrestres et autres robots s'en mêlent.
Sommaire
Afficher les différentes éditions des textes
1 - Gilles DUMAY & Francis MIZIO, Avant-propos, vaseline, et élargissement du cercle de nos ennemis, pages 13 à 13, introduction
2 - Fabrice COLIN, Retour aux affaires, pages 17 à 38, nouvelle
3 - Kim NEWMAN, Le Grand éveil (The Big Fish, 1993), pages 39 à 68, nouvelle, trad. Patrick MARCEL
4 - John KESSEL, Le Miracle d'Ivar Avenue (The Miracle of Ivar Avenue, 1996), pages 69 à 98, nouvelle, trad. Frédéric SERVA
5 - Brian STABLEFORD, La Balle magique (The Magic Bullet, 1989), pages 101 à 119, nouvelle, trad. Bruno B. BORDIER
6 - Robert CANOVARO, La Langue fondamentale, pages 121 à 139, nouvelle
7 - Michel LEYDIER, Delite, pages 141 à 144, nouvelle
8 - Jacques VETTIER, La Langue de l'océan, pages 145 à 159, nouvelle
9 - Nancy KRESS, Évolution (Evolution, 1995), pages 161 à 182, nouvelle, trad. Thomas BAUDURET
10 - Christo DATSO, Copie conforme, pages 183 à 199, nouvelle
11 - Marie-Pierre NAJMAN, Un monde qui nous parle, pages 201 à 228, nouvelle
12 - Andrew WEINER, Méfiez-vous des contrefaçons (Fake-Out, 1987), pages 229 à 243, nouvelle, trad. Fabienne ROSE
13 - Francis MIZIO, Shootin' Paparazzi, pages 245 à 255, nouvelle
14 - Jacques MONDOLONI, Pourquoi j'ai tué mon clone, pages 257 à 262, nouvelle
15 - Jean-Hugues OPPEL, Dégaine, crapule !, pages 263 à 275, nouvelle
16 - Roland C. WAGNER, S'il n'était vivant, pages 277 à 288, nouvelle
17 - Jean-Bernard POUY, La Feuille jaune, pages 291 à 302, nouvelle
18 - Johan HELIOT, Le Petit éveil, pages 303 à 310, nouvelle
19 - Jean MILLEMANN, Joe (Tango dancin'), pages 311 à 314, nouvelle
20 - Stéphanie BENSON, Gluco block alpha, pages 315 à 321, nouvelle
21 - Richard CANAL, Moi, le maudit, pages 323 à 336, nouvelle
22 - Sylvie DENIS, Paradigme party, pages 337 à 360, nouvelle
23 - Vivian ROBERT, La Crise de curiosité, pages 361 à 370, nouvelle
24 - Robert James SAWYER, Ce qu'une main donne… (The hand you're dealt, 1997), pages 371 à 386, nouvelle, trad. HEATHER
25 - Thomas DAY, Paradise city, pages 387 à 405, nouvelle
26 - Jacques BAUDOU, Postface, pages 409 à 421, postface
Critiques
     Après Histoires de cochons et de science-fiction en 1998 et Invasions 99 l'année dernière, la collection Bifrost/Étoiles Vives (co-éditée par Orion & Bélial) nous propose Privés de Futur, une nouvelle anthologie thématique, cette fois-ci consacrée au polar-SF.
     Réuni à la fois par Gilles Dumay – dont la fusion entre les genres est un des chevaux de bataille – et Francis Mizio, cet épais recueil ne contient pas moins de 24 récits. Avant de les entamer, le lecteur devra subir (ou sauter) un avant-propos grotesque co-signé des deux anthologistes, une provocation à deux balles qui semble avoir pour seul but de décrédibiliser la SF en la confortant dans son cliché de littérature pour adolescent acnéique obsédé par le contenu de son slip...
     Vingt-quatre récits, donc, répartis comme suit  : trois dans la partie « Hier », douze dans « Aujourd'hui et demain », et le reste, soit neuf textes, situés « Ailleurs et demain ». Six des nouvelles sont anglo-saxonnes (sélectionnées par Gilles Dumay) et donc dix-huit francophones (choisies par Francis Mizio). La proportion des auteurs masculins et féminins est similaire. Et d'après son sommaire, l'anthologie semble pencher du côté « écrivains de SF s'essayant au polar » plutôt que l'inverse...
     Mais voyons cela de plus près.
     Fabrice Colin ouvre le bal avec Retour aux affaires. Et nous plonge illico dans tous les clichés attendus  : le privé en manque de clients, la vamp dangereuse, l'affaire louche... mais le décor est steampunk et le détective plutôt exorciste puisque sa spécialité consiste à passer dans le monde des esprits pour traiter avec les fantômes récalcitrants qui ennuient ses clients... Un mariage réjouissant, réussi et maîtrisé.
     Le cocktail suivant nous est servi par un spécialiste du genre, l'anglais Kim Newman. Dans Le Grand Éveil, il opère un croisement entre Hammett et Lovecraft sur fond de Californie juste après Pearl Harbor. Un récit tout en atmosphère, glauque et humide...
     La première référence du recueil à Hollywood est à l'actif de Joseph Kessel. Au centre du Miracle d'Ivar Avenue se trouve en effet le réalisateur Preston Sturges. Dont le corps vient d'être retrouvé sur la plage... alors qu'il est toujours vivant. Sur le thème de la deuxième chance, une histoire mélancolique et humaniste qui fait flirter la quincaillerie SF avec la biographie de Sturges.
     La partie « Aujourd'hui et demain » débute avec une nouvelle de Brian Stableford intitulée La balle magique. L'enquêteur est ici une enquêtrice, une sexagénaire qui tente de découvrir pourquoi on a tiré sur son ancien amant et professeur – expert en génétique – et exterminé à coups d'explosifs ses souris de laboratoire. Stableford ne lésine pas sur les détails et précisions scientifiques, qui passeront sans aucun doute hors de portée de nombreux lecteurs, au risque de leur faire oublier l'originalité de ses personnages.
     Le deuxième texte français est dû à Robert Canovaro. La langue fondamentale. Impressionnant par son côté cyberpunk sans technologie, il manque sans doute un peu de clarté dans le passage d'un point de vue à un autre.
     Delite de Michel Leydier nous conte les démêlés d'un assassin professionnel avec son véhicule intelligent. Je n'ai été séduit ni par le fond (convenu), ni par la forme (qui n'a rien de bien original non plus).
     Après cette déception, l'originalité du crime parfait par 2000 mètres de fond relaté par Jacques Vettier dans sa Langue de l'océan ressort d'autant plus nettement.. L'élément SF est très discret, voire inexistant. Comme quoi il n'est nul besoin de transporter le lecteur chez les extraterrestres pour lui faire perdre ses repères.
     Nancy Kress, avec sa sensibilité coutumière, nous peint dans Évolution le portrait d'une femme meurtrie par la vie qui se bat pour sauver sa famille dans un monde que la prolifération de virus létaux a poussé au bord de l'effondrement. Ici, le crime est secondaire.
     Copie conforme met en scène le premier clone de l'anthologie. Dans cette intéressante vision d'un monde futur, Christo Datso oppose un privé très branché à son nouveau client, à l'apparence de qui on aurait tort de se fier. Un récit dense et foisonnant.
     Facture classique, multiples clins d'œil ou références à Wells, Verne et Méliès. Normal, après tout, puisque dans Un monde qui nous parle (signé Marie-Pierre Najman) tout part de la Lune, ou plutôt d'une virée familiale et virtuelle sur notre satellite, laquelle a très mal fini pour le père de famille. Bien menée, la nouvelle est peut-être un peu trop sage. Un peu trop classique, justement, et l'intérêt réside plutôt dans ce qu'on devine de la société dépeinte en filigrane.
     Andrew Weiner est un chouchou de Bifrost/Étoiles Vives, qui a déjà publié deux recueils de cet auteur. Méfiez-vous des contrefaçons est tout à fait dans sa manière habituelle. Sous des dehors de facilité, l'histoire utilise très habilement le thème du clonage pour nous faire sourire... et peut-être même réfléchir  !
     Shootin' Paparazzi, aimable mais anecdotique pochade, séduit par son cynisme. En ces temps de « politically correct », l'audace dont fait preuve Francis Mizio a quelque chose de réjouissant.
     Encore le clonage  ! Cette fois-ci, un professeur d'ancien français, depuis sa cellule, nous relate comment il en est venu à être sélectionné pour « bénéficier » d'un clone.. et à tuer ce dernier. Jacques Mondoloni retourne astucieusement l'idée reçue « clonage = addition ». Dommage que sa négligence de l'inné et de l'acquis nuise à la crédibilité de Pourquoi j'ai tué mon clone.
     Jean-Hugues Oppel signe Dégaine, crapule  ! Clin d'œil sympathique au western et au film Mondwest, mais fin trop prévisible.
     Les aficionados du détective « transparent » Temple Sacré de l'Aube Radieuse et de sa fidèle Gloria les retrouveront avec plaisir dans S'il n'était vivant où le couple fétiche de Roland C. Wagner s'applique à arracher un jeune homme des griffes d'une secte. Une dénonciation toujours bienvenue, mais un peu trop légère en l'occurrence  : là aussi, l'humeur est au clin d'œil (vers Dick essentiellement), et là aussi, c'est sympathique, sans plus.
     Les nouvelles suivantes constituent la partie « Ailleurs et demain » et sont donc toutes situées sur un monde extra-terrestre.
     La feuille jaune de Jean-Bernard Pouy laisse le goût amer – on aime ou on n'aime pas – des histoires de pion sacrifié par les dirigeants du monde. Mais quoi de plus normal de la part du créateur du Poulpe  ?
     Johan Héliot est un jeune auteur que l'on voit de plus en plus souvent. Une référence au Neuromancien de W. Gibson ouvre son Petit Éveil (d'autres références à l'œuvre du porte-drapeau du cyberpunk suivront), qui met en scène, comme Copie conforme, un privé du monde « réel » associé à une IA œuvrant dans la Matrice. Mais ici c'est plutôt la forme qui charme, avec son téléscopage improbable de vocabulaire cyberpunk et d'argot du milieu évoquant Gabin dans Touchez pas au grisbi.
     Que dire de Joe (Tango Dancin') de Jean Millemann  ? L'atmosphère de fatalité qui s'en dégage me convient plutôt, mais j'eusse préféré un peu plus de finesse.
     Stéphanie Benson nous propose ensuite Gluco Block Alpha. Que l'on trouve dans une anthologie de polar-SF une enquête autour du grain de sable qui menace une société parfaitement organisée était sûrement prévisible. Il s'agit en l'occurrence d'une disparition, alors que tout citoyen est constamment sous surveillance. Pour son propre bonheur, bien sûr. L'histoire se lit sans déplaisir mais ne laisse pas plus de souvenir, malgré le petit électrochoc final, que la carte postale d'un paysage mille fois vu.
     Dans Moi le Maudit, Richard Canal rend un hommage appuyé, voire trop appuyé, à Hollywood. On passe son temps à rechercher les innombrables références au lieu de se laisser entraîner par l'enquête étrange d'un détective obsédé dans une ville aux relents brussoliens.
     SSylvie Denis livre avec Paradigme Party la deuxième aventure de Johanne Epstein (cf. Magma-Plasma in Étoiles Vives n° 1). La présentation du texte nous prévient qu'il n'est pas nécessaire d'avoir lu la précédente pour apprécier celle-ci. On me permettra de ne pas être tout à fait d'accord... En effet, si cette enquête au cœur de stations spatiales d'exploitation minière est loin de manquer d'intérêt (essentiellement par les pistes de réflexion sociologique qu'elle suggère), il me semble qu'elle aurait gagné en épaisseur si les liens entre Johanne et ses amis avaient fait l'objet d'un rappel ou d'un développement plus poussé.
     La Crise de curiosité est le premier texte publié de Vivian Robert. Un meurtre commis sur une planète dont on ne connaît pas l'apparence réelle des habitants puisqu'ils prennent toujours celle de leur interlocuteur, voilà qui ne manque pas d'originalité. Hélas, après ces prémices prometteuses, le récit se perd un peu dans des espaces intérieurs...
     Le canadien anglophone Robert J. Sawyer, lui, ne nous est pas inconnu en France (cf. ses romans Mutations et Expérience terminale chez J'Ai Lu). Ce qu'une main donne s'interroge sur la prédestination grâce à une enquête sur le meurtre d'un devin... dans un monde où la divination est une science exacte. Impeccable.
     La dernière fiction de l'ouvrage est de Thomas Day (précision pour ceux qui ne le sauraient pas, et afin qu'ils puissent savourer tout le sel – hum  ! – de l'avant-propos évoqué au début de cette chronique  : ce pseudonyme est celui dont Gilles Dumay signe ses nouvelles). La société de sa Paradise City, une ville-nomade, est divisée en trois clans et privée de repères, comme la cité est privée du spectacle des étoiles par le dôme qui la protège au cours de son périple spatial. L'héroïne du récit ne croit plus en grand — chose et encore moins en elle-même, et si elle s'obstine à déclencher une enquête à propos de ce corps mutilé de petite fille qu'elle a trouvé dans une poubelle, c'est un peu comme si elle s'accrochait à sa dernière chance avant de sombrer. Et elle a raison, même si ce corps ne se révèle être qu'un déchet hospitalier, puisque l'enquête la conduira à une rencontre inattendue qui changera sa vie. Un texte fort et cru, bien que moins dérangeant qu'il ne voudrait l'être...

     Il ne reste plus qu'à s'instruire en compagnie de Jacques Baudou, qui souligne avec érudition dans sa postface les points communs entre polar et SF tout en nous relatant quelques-uns de leurs mariages.
     On referme ensuite le livre, on admire une dernière fois la superbe couverture de Vincent Froissard – cafardeuse à souhait – et on fait le point avant de ranger le bouquin dans la bibliothèque. Aucun grand texte, une grosse poignée de très bons, une petite poignée de pas terribles et le reste oscillant entre le moyen et le bien. Au total, Privés de Futur semble un peu en retrait par rapport à la précédente (et très réussie) anthologie thématique des mêmes éditeurs (Invasions 99), d'où un léger sentiment de déception. Mais dans l'absolu, elle atteint un niveau fort honorable, et en vaut bien d'autres.

Gilles GOULLET (site web)
Première parution : 21/7/2000 nooSFere

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