Yves Coppens, dernier géant de la Préhistoire

Yves Coppens au Collège de France en 1988. ©Getty - © Sophie Bassouls / Coll. Sygma
Yves Coppens au Collège de France en 1988. ©Getty - © Sophie Bassouls / Coll. Sygma
Yves Coppens au Collège de France en 1988. ©Getty - © Sophie Bassouls / Coll. Sygma
Publicité

Hommage à Yves Coppens dans Carbone 14, le magazine de l'archéologie de France Culture, avec la rediffusion d'une très belle émission sur la vie et les découvertes de ce grand "Monsieur".

Dernier géant de la Préhistoire, Yves Coppens vient de s’éteindre, sa disparition est un séisme. Professeur au Collège de France, membre de l’Institut, directeur du musée de l’Homme, Yves Coppens a tout eu, « une vie passionnée, passionnante et heureuse », aimait-il à commenter.

Yves Coppens "Je ne suis pas sûr qu'à l'âge où cette passion m'a pris, j'ai eu vraiment des problèmes métaphysiques et des problèmes de m'imaginer ce que je pouvais faire dans l'univers et quelle était ma place. C'est pour ça que je ne sais pas expliquer d'ailleurs pourquoi j'ai eu cette attirance, cet attrait irrésistible. [...] Quand toute la passion se tourne vers différents domaines, en l'occurrence, pour moi, ça a été clairement l'Antiquité. [...] C'est encore comme ça aujourd'hui, car à travers le courrier que je reçois, je vois que beaucoup d'enfants, et quelquefois très jeunes, ont cette attirance et je suppose que c'est lié à l'imaginaire."

Publicité

Il avait eu aussi la chance de découvrir des fossiles hors norme : Australopithecus aethiopicus, puis Australopithecus afarensis, la fameuse Lucy, mise au jour en compagnie de Maurice Taieb et Donald Johanson. Toutefois, sa notoriété, n’était pas issue de la simple découverte de quelques grands fossiles. Conteur hors pair, l’œil vif et brillant, courtois et élégant, il avait su faire aimer, à tout un chacun, les lointaines origines de l’homme, devenant à la préhistoire ce que Paul Emile Victor était aux pôles, Haroun Tazieff au volcan. Il avait ainsi reçu l’affection d’un public de tout âge, de toute condition.

Yves Coppens (à propos de Lucy) "Il s'est trouvé que ce fossile représenté par 52 ossements, ce qui n'est pas beaucoup sur l'ensemble des ossements d'un corps, mais c'est quand même pas mal, a permis de reconstituer l'être en question, en tout cas sa silhouette. Le fait d'avoir, face à soi, un petit personnage que l'on voyait sur pied, qui participait à l'origine de l'homme, là-bas, au fond de l'Éthiopie, qui plus est un sujet féminin auquel on avait donné le prénom de Lucy, tout cela réuni a fait que c'est devenu le symbole de l'histoire de l'homme. On a trouvé plus ancien, plus complet, mais Lucy reste ce petit symbole, attachant, sympathique, qui survole toute l'histoire."

Yves Coppens en 2003
Yves Coppens en 2003
© Maxppp - © L. THEILLET / SUD OUEST / PHOTO PQR

Yves Coppens "Il se trouve que je suis né à Vannes et à Vannes, il y a dans un vieux château du XVᵉ siècle, Château-Gaillard, un musée d'archéologie. Ce musée a été mon rêve pendant des années au travers des vitrines, et puis, après quelques années de professionnalisme, dans les vitrines elles-mêmes. Mais c'est là, en effet, que j'ai rêvé devant des poteries, des morceaux de pierres, des morceaux de bronze."

Auteur à succès, son dernier ouvrage vient tout juste de paraitre (mai 2022, Ed. Odile Jacob). Nous l’avions donc contacté pour envisager, sans succès, l’émission d’aujourd’hui. Ainsi s’achèvent plus de 35 années de liens, débutés au cœur du musée de l’Homme, puis à maintes et maintes reprises dans l’émission, chroniqueur de France Info, celui-ci venant en voisin.

Yves Coppens "L'archéologie a commencé lorsque j'ai été emmené sur le terrain par un vieux monsieur. C'était la première fois que je voyais un gisement sur le terrain et un petit site des rives du golfe du Morbihan qui contenait des poteries fines".

Yves Coppens "Quand j'ai commencé mes études supérieures à Rennes, je me suis tout de suite inscrit aux enseignements très confidentiels des circonscriptions des Antiquités préhistoriques et historiques. [...] J'ai proposé mes services à ces gens, et je n'ai plus eu de vacances dans ma famille car j'ai passé tout mes congés d'étudiant sur des chantiers de fouilles et j'ai eu la chance de participer à des chantiers fantastiques."

Yves Coppens soutenait nos disciplines, l’art pariétal et la grotte de Lascaux, l’environnement passé et présent… il s’était aussi largement engagé pour l’archéologie préventive dans les heures les plus sombres de celle-ci. Avec conviction, il œuvrait tout récemment pour l’entrée de l’art préhistorique au Musée du Louvre, ce temple du classicisme...

Yves Coppens "J'ai toujours essayé de garder l'émerveillement devant, à la fois, la découverte d'objets, mais la découverte d'idées aussi. Et puis, le rapport avec les humains. J'aime bien les gens, TOUS les gens, je n'y peux rien. Je n'ai jamais fait de différence, quelle qu'elle soit, aussi bien de générations que de couleurs, bien sûr, à plus forte raison, ça va de soi. Et comme j'aime bien les gens, ça m'est facile de voir dans chacun ce qui est intéressant, important, agréable et sympathique."

Comment lui rendre hommage ? Toute l’équipe s’est mise à l’écoute de nos nombreuses archives. Fallait-il inviter un témoin évoquant le parcours du grand homme ?  Après concertation, chères auditrices, chers auditeurs, nous avons décidé de lui laisser la parole, ultime plaisir de l’entendre, là même où celui-ci se raconte, Yves Coppens et sa mémoire d’éléphant…

Yves Coppens lors du concours Miss France 2002, entre Sylvie Tellier et Mme de Fontenay
Yves Coppens lors du concours Miss France 2002, entre Sylvie Tellier et Mme de Fontenay
© Maxppp - © MICHEL LUCCIONI

1ère diffusion de cette émission le 21 janvier 2018.

Pour aller plus loin

Bibliographie

À écouter ou à réécouter : Yves Coppens est mort, Lucy est vivante
L'Humeur du matin par Guillaume Erner
2 min

L'équipe