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Archéologie

La "Joconde Nue", une œuvre de Léonard de Vinci? Pas si vite !

Retour sur "La Joconde Nue", une œuvre énigmatique présentée comme un double de Mona Lisa… Mais qu’en est-il réellement ? 

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Le dessin de La Joconde Nue, et Mona Lisa.

Le dessin de "La Joconde Nue", et celui de "La Joconde".

Crédits: RMN -Domaine de Chantilly-Gérard Blot /Electa/Leemage/AFP

La posture, les mains, des détails du sourire… Depuis plusieurs jours, ces éléments figurant sur un dessin au charbon de bois du XVe/XVIe siècle appartenant aux collections du musée Condé de Chantilly (Oise) ont fait courir les bruits les plus fous. Il pourrait s’agir – rien de moins  – que d’une Mona Lisa dénudée, la célèbre Joconde, qui plus est, sans doute de la main même de Léonard de Vinci, le célèbre peintre du XVe-XVIe siècle! Est-ce si sûr ?

«Des analyses de ce dessin intitulé la 'Joconde nue' sont bien en cours, reconnaît Nicole Garnier, conservatrice en chef du musée Condé de Chantilly (Oise), ces examens étant réalisés à Paris sous la direction du conservateur en chef Bruno Mottin. Pour autant, rien n’atteste que ce carton soit de la main de Léonard lui-même ! ». C’est dans les laboratoires du Centre de recherche et de restauration des Musées de France (C2RMF), situés sous une des ailes du Louvre, que La Joconde Nue a été soumise pendant plusieurs semaines à une batterie d’examens (réflectographie infrarouge, microfluorescence X, rayons ultraviolets). « Ceux-ci ont permis de mettre en valeur certains composants du dessin et de faire ressortir des éléments qui ne sont plus visibles à l’œil nu », précise Mathieu Deldicque, conservateur adjoint au musée Condé de Chantilly.  

Pourquoi tant d’intérêts soudain envers une œuvre connue, qui plus est déjà analysée en 1995 ? « Parce que nous ne disposions pas à l’époque de ces premières investigations des technologies disponibles aujourd’hui, et que nous préparons une importante exposition pour 2019 ! », poursuit Mathieu Deldicque. Conservé au musée Condé – qui abrite la seconde plus grande collection de peintures de France –, le délicat dessin avait été acheté par le duc d’Aumale en 1862. A la tête d’une grande fortune, ce fils du roi Louis-Philippe, alors exilé en Angleterre, en avait fait l’acquisition pour un montant de 7000 francs, une somme énorme à l’époque. « Le duc d’Aumale était convaincu qu’il s’agissait d’un dessin de la main de Léonard de Vinci», explique Nicole Garnier.

A l’exception des seins, peu de traits sont féminins

Les analyses en cours à Paris viennent cependant de livrer des informations capitales. Elles établissent notamment que le dessin a été abondamment repris et travaillé à différentes époques. « Ce buste de femme nue avec ses mains posées au premier plan, dans une composition identique à celle de La Joconde, est constitué de plusieurs feuilles de papier collées entre elles, avec une figure centrale réalisée au charbon de bois », décrit Nicole Garnier. A l’exception des seins, peu de traits sont féminins, notamment la musculature et les épaules. « Il était très fréquent à l’époque que l’on fasse poser un jeune homme de l’atelier, ce que Léonard a souvent fait avec ses propres apprentis, poursuit l’experte. Il a aussi été proposé que 'La Joconde Nue' ait été l’œuvre d’un collaborateur de Léonard de Vinci d’après une des compositions perdues du maître ».

« Ce dessin aurait pu être un modèle préparatoire à une peinture à l’huile »

Il faut savoir qu’il existe en effet une quinzaine d’autres œuvres proches de ce dessin, certaines notamment au musée de l’Hermitage à Saint-Petersbourg (Russie), qui ne sont pas de la main de Léonard. « Ce dessin aurait pu être un modèle préparatoire à une peinture à l’huile », ajoute Nicole Garnier. Ce que semble confirmer la présence de trous d’épingles identifiées par les analyses autour de l’œuvre, indiquant que celle-ci a été reportée sur un panneau. L’analyse des filigranes du papier italien a également permis de préciser que l’œuvre a été exécutée entre 1485 et 1538. Léonard de Vinci étant mort en 1519, « nous pensons que ce dessin a été réalisé au moins dans l’atelier de Léonard ou par quelqu’un proche de lui, comme un de ses élèves », estime Mathieu Deldicque. Léonard est-il intervenu lui-même, dessinant de sa main quelques traits ? Les analyses ne permettent pas pour l’heure de l’affirmer. Les traces d'intervention d'un possible gaucher, ce qu'était Léonard sont ainsi recherchées.. Une quête pour l'instant infructueuse.

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