Biographie de Woody Allen : pourquoi ne pas laisser le dernier mot aux lecteurs ?

L’éditeur Hachette a annoncé que les mémoires du réalisateur ne seront finalement pas publiées aux États-Unis. Et quoi qu’on puisse penser de Woody Allen, une telle autocensure pose question.

Par Samuel Douhaire

Publié le 09 mars 2020 à 14h10

Mis à jour le 08 décembre 2020 à 00h28

Les mémoires de Woody Allen ne seront pas publiés aux Etats-Unis. Ainsi en a décidé, vendredi 6 mars, Hachette Book Group (HBG), au lendemain de la manifestation à New York d’une dizaine de ses employés, qui dénonçaient la commercialisation du livre du cinéaste, accusé (ce qu’il nie) d’avoir abusé sexuellement de sa fille adoptive Dylan Farrow en 1992. L’annulation de Apropos of Nothing (« A propos de rien ») intervient par ailleurs après les protestations du journaliste Ronan Farrow, frère et soutien constant de Dylan, dont le livre sur l’affaire Harvey Weinstein, Catch and Kill (Les faire taire, dans sa traduction française), est également édité par HBG. Après avoir appris par la presse la publication du livre de son père, Ronan Farrow avait déclaré ne plus vouloir travailler avec le groupe Hachette. Lundi matin 9 mars, on ne savait pas si les mémoires de Woody Allen présenté par la filiale américaine du groupe Hachette comme « un récit exhaustif de la vie de Woody Allen, à la fois personnelle et professionnelle » pourraient être publiées en France comme prévu le 29 avril chez Stock, sous le titre Soit dit en passant.

Cette autocensure appelle deux remarques. Sur le cynisme de la maison d’édition qui, du moins jusqu’à la semaine dernière, n’avait aucun scrupule à manger à tous les râteliers – autrement dit à vendre et l’enquête de Ronan Farrow et l’ouvrage de son père. Et sur ce qui ressemble fort à une atteinte à la liberté d’expression : dans la mesure où le texte respecte la loi, pourquoi ne pas laisser aux lecteurs la possibilité de lire les mémoires de Woody Allen s’ils le souhaitent ? Le romancier Stephen King l’a parfaitement résumé dans une série de tweets : « Je me fiche de M. Allen. Ce qui m’inquiète, c’est qui sera muselé au prochain coup ». Avant de conclure : « Si vous pensez que Woody Allen est un pédophile, n’achetez pas son livre. »

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