L'Energy Observer, inauguré ce jeudi 6 juillet par Nicolas Hulot, est à Paris jusqu'au 15 juillet. — O. Aribaud / 20 Minutes

ENERGIE

Energy Observer: Un laboratoire flottant lancé dans un tour du monde pour tester les énergies du futur

Fabrice Pouliquen

Le catamaran high-tech sera inauguré ce jeudi soir par Nicolas Hulot. Il embarque à bord un mix d’énergies vertes en vue de boucler un tour du monde avec un bilan carbone nul…

  • Pendant six ans, l’Energy Observer naviguera sur toutes les mers en utilisant pour avancer une mixité d’énergies renouvelables.
  • A bord, il y a des éoliennes et des panneaux photovoltaïques bien sûr. Mais aussi une aile géante de kite, pour soulager les moteurs à propulsion électrique, ou encore un système d’hydrogène utilisant l’eau de la mer pour stocker de l’énergie sur du long terme.

On passe difficilement à côté d’Energy Observer. Le catamaran high-tech, tapissé de panneaux solaires, en impose et détonne bien souvent avec les navires qui l’entourent. C’est encore plus vrai à Paris où le bateau est à quai, cerné par des péniches, au port du Gros Caillou, juste en face de la tour Eiffel.

Nicolas Hulot baptisera lui-même le navire ce jeudi soir. Un parrain de luxe pour une aventure porteuse d’espoir pour les énergies du futur. Car Energy Observer s’apprête à s’engager dans la plus belle des odyssées maritimes, un tour du monde. Le tout en autonomie énergétique et sans émission de gaz à effet de serre.

Victorien Erussard et Jerome Delafosse, respectivement capitaine et chef de l'expédition sur le projet Energy Observer. - AFP

« Un laboratoire flottant »

Pour se faire, le catamaran embarque 130 mètres carrés de panneaux solaires et deux éoliennes à axe vertical. C’est le minimum qu’on puisse attendre d’un bateau ne fonctionnant qu’aux énergies renouvelables.

Mais Energy Observer est bien plus que cela. « Il faut le voir comme un laboratoire flottant de ce que pourrait être le monde énergétique de demain », raconte son capitaine, le navigateur Victorien Erussard, engagé sur ce projet avec l’explorateur-réalisateur Jérôme Delafosse, chef de l’expédition. Sur ses 30,5 mètres de long, le catamaran condense tout un ensemble de technologies qui visent à améliorer le rendement des énergies renouvelables, leur stockage, leur gestion…

Transformer l’eau pour stocker de l’énergie

Plus que les panneaux photovoltaïques et les éoliennes, Victorien Erussard s’attarde sur l’hydrogène, précisant qu'Energy Observer « sera le tout premier bateau à hydrogène à faire le tour du monde ». C’est la véritable originalité du navire : utiliser l’eau de mer comme source de stockage de l’énergie à long terme. « A quai, les panneaux photovoltaïques et les deux éoliennes de l’Energy Observer continueront à produire de l’électricité, indique Didier Bouix, ingénieur au CEA-Liten, le laboratoire des énergies renouvelables du Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives mobilisé pour la conception d’Energy Observer. Ce surplus d’énergie, notamment solaire, va être utilisé pour transformer de l’eau de mer, préalablement dessalinisée, en hydrogène. Pour cela, on utilise l’électrolyse, un courant électrique qui sépare l’hydrogène et l’oxygène contenus dans la molécule d’eau. »

L’hydrogène est stocké, sous forme gazeuse, dans huit réservoirs étanches. « Et en pleine mer, lorsqu’il n’y aura ni soleil, ni vent, cet hydrogène pourra être retransformée en énergie via une pile à combustible, poursuit Didier Bouix. Cette énergie permettra de produire soit de la chaleur réutilisée dans le navire (de l’eau chaude pour la douche typiquement), soit de l’électricité pour alimenter les deux moteurs à propulsion électrique du navire. » L’intérêt de cette technologie est double : elle est 100 % verte et « surtout représente une capacité de stockage quasi infini d’énergie, explique Victorien Erussard. On peut stocker de l’hydrogène à foison. »

Une aile géante pour faire avancer le navire

L’hydrogène n’est qu’un exemple de technologies qu'Energy Observer veut tester en grandeur nature et dans des conditions extrêmes. Il y en a bien d’autres. A bord, on trouvera ainsi un kite, une aile volante géante de 50 mètres, inspirée de celle utilisée par les adeptes dukitesurf. « On travaille sur ce projet avec Beyond the sea, une entreprise innovante qui a mis au point une technologie de kite pour tracter les navires, notamment ceux de la marine marchande », indique Victorien Erussard.

En condition optimale, le navigateur imagine très bien que l’aile soit la seule à faire avancer le bateau, mettant alors les deux moteurs électriques au repos. Elle permettra sinon d’assister les moteurs et accroître la vitesse d'Energy Observer. « Mais elle fera plus encore en permettant de produire de l’énergie, complète Didier Bouix. Le kite permettra de faire de l’hydrogénération. En freinant un petit peu le bateau, l’aile transformera le moteur en génératrice. L’hélice fournira alors de l’énergie à la manière d’une dynamo de vélo. »

101 escales à travers le monde

Même sur les panneaux solaires, technologie aujourd’hui éprouvée, Energy Observer vise des améliorations. Au cours de son tour du monde, le catamaran testera des panneaux photovoltaïques à « hétérojonction », dont le rendement est supérieur aux solutions aujourd’hui commercialisées.

Victorien Erussard en est alors convaincu : « Energy Observer est un accélérateur de la transition énergétique. Nous allons vers une décentralisation de l’énergie dans les années à venir. Les bâtiments deviendront énergétiquement autonomes alimentés par des petites centrales de production d’énergie. Notre catamaran est dans cette optique-là. »

Ce tour du monde visera tant à améliorer les technologies embarquées à bord qu’à les montrer au plus grand nombre. Cent et une étapes sont prévues sur les cinq continents en six ans et ça commence par un tour de France cet été. A Paris, Energy Observer est à quai jusqu’au 15 juillet. Un village, à proximité du bateau, retrace le projet. Il est ouvert de 10h à 18h le week-end et de 12h à 18h en semaine.

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