Publicité

Glyphosate : un jardinier atteint d'un cancer fait condamner Monsanto

Il s'agit d'une décision historique. Le géant de l'agrochimie a été condamné à verser 290 millions de dollars à Dewayne Johnson, un jardinier atteint d'un cancer. Monsanto a annoncé vouloir faire appel. Sa maison-mère, le groupe allemand Bayer, assure que le glyphosate est «sûr et non cancérogène».

C'est une décision historique: un tribunal de San Francisco vient de condamner Monsanto à payer près de 290 millions de dollars de dommages pour ne pas avoir informé de la dangerosité de son herbicide Roundup à l'origine du cancer de Dewayne Johnson. Une victoire pour ce jardinier américain qui espère un effet boule de neige.

Les jurés avaient commencé à délibérer le 8 août après plus d'un mois de débats dans ce procès historique, le premier à concerner le caractère possiblement cancérigène des produits au glyphosate de Monsanto. Ils ont ainsi déterminé que Monsanto avait agi avec «malveillance» et que son herbicide Roundup, ainsi que sa version professionnelle RangerPro, avaient «considérablement» contribué à la maladie du plaignant, Dewayne Johnson.

Monsanto va faire appel

Le géant de l'agrochimie a immédiatement annoncé son intention de faire appel de cette décision. «Nous exprimons notre sympathie à Dewayne Johnson et à sa famille. La décision d'aujourd'hui ne change pas le fait que 800 études scientifiques et les conclusions de l'agence américaine de la protection de l'environnement (EPA), des instituts nationaux pour la santé et des autres autorités de régulation à travers le monde soutiennent que le glyphosate ne cause pas de cancer et n'a pas causé le cancer de Dewayne Johnson», affirme le groupe.

Même son de cloche du côté de la maison-mère. Un porte-parole du groupe allemand pharmaceutique Bayer, nouveau propriétaire de Monsanto, a déclaré samedi que le glyphosate est «sûr et non cancérogène». «L'arrêt de la Cour contredit les conclusions scientifiques selon lesquelles il n'existe aucun lien entre l'utilisation du glyphosate» et la maladie du jardinier américain, estime le groupe. «D'autres affaires peuvent être portées devant d'autres tribunaux et d'autres jurys, qui peuvent aboutir à des conclusions différentes», s'est encore justifié le géant allemand qui a bouclé le rachat de Monsanto pour 63 milliards de dollars début juin et souhaite faire disparaître le nom du géant américain des pesticides.

Moins de deux ans à vivre

«Comment [l'entreprise] ose-t-elle faire appel», s'est indigné l'un des avocats du plaignant, Brent Wisner. Le verdict «montre que les preuves (de la dangerosité du glyphosate) sont accablantes». Des gens «souffrent du cancer car Monsanto ne leur a pas donné le choix», a-t-il ajouté, se disant déterminé à «(se) battre jusqu'au bout».

Tombé dans les bras de ses avocats à l'annonce du verdict, partagé entre larmes et sourire, Dewayne Johnson, 46 ans, réclamait plus de 400 millions de dollars, estimant que les produits de Monsanto avaient entraîné son cancer et que la multinationale avait sciemment caché leur dangerosité. «J'ai reçu beaucoup de soutien depuis le début de cette affaire, beaucoup de prières et d'énergie de la part de gens que je ne connais même pas. Je suis content de pouvoir aider une cause qui me dépasse largement. Et j'espère que cette décision commencera à lui apporter l'attention dont elle a besoin», a réagi sobrement D. Johnson au cours d'une conférence de presse.

Dans le cadre de son travail de jardinier, ce père de trois garçons, a abondamment utilisé le désherbant Roundup, et sa version professionnelle plus puissante, le RangerPro, entre 2012 et 2014. Il a été diagnostiqué en 2014 d'un lymphome non hodgkinien, un cancer incurable du système lymphatique. Les médecins lui donnent moins de deux ans à vivre. Le jardinier, qui n'avait pas de problème de santé auparavant, a expliqué, lors de son témoignage fin juillet, qu'il n'avait aucune idée des controverses sur le glyphosate avant de voir des marques sur sa peau et de se renseigner sur internet.

Le verdict de vendredi «va provoquer une cascade de nouvelles affaires», selon Robert F. Kennedy Jr, membre de l'équipe d'avocats rassemblée autour du plaignant, qui compte demander à ce que l'appel de Monsanto soit traité en urgence compte tenu de l'état de santé de Dewayne Johnson. Actuellement, des milliers de procédures contre Monsanto sont en cours aux États-Unis, à des degrés divers d'avancement.

Glyphosate : un jardinier atteint d'un cancer fait condamner Monsanto

S'ABONNER
Partager

Partager via :

Plus d'options

S'abonner
621 commentaires
  • Celtique

    le

    C'est bien gentil d'interdire un produit dont nul ne peut démontrer formellement qu'il est cancérigène, et à mon sens, sans doute pas le jury populaire, sélectionné par tirage au sort, qui a pris cette décision.
    Et cela pour un jardinier qui, selon ses déclarations, traitait depuis des années, sans la moindre protection, ce qui est stupéfiant.
    Mais on fait quoi maintenant pour désherber ? Le chlorate de soude, qui avait plus d'un siècle, a été interdit en 2009 et les rayons désherbants sont vides. Il n'existe pas d'alternative efficace et fleurissent sur Internet des recettes hallucinantes où huiles de vidanges se mêlent à détergents ou eau de javel. Sans compter les chalumeaux à désherber hautement dangereux par temps sec, en été.
    C'est mieux tout cela ? Non c'est effarant.

  • J.C. Blanc

    le

    On se souvient des analyses indépendantes qui affirmaient que le tabac n'était pas dangereux pour la santé.
    On se souvient de ce déjeuner de sénateurs français avec le patron de Philip Morris France.
    Ce qui donne une idée de l'indépendance de ceux qui défendent l'indéfendable.
    Pour les dangers de l'amiante, on a eu beaucoup de rapports indépendants qui ont affirmé durant quatre vingts ans combien ce produit était anodin.
    Et les mêmes défendent encore ceux qui tuent pour le profit.
    Honteux.

  • Partnerfrance

    le

    Je me permets de mettre en garde tous qui pensent que cette décision « fait jurisprudence » aux USA. Il s’agit d’une décision d’une jury populaire dans la Californie, état bien connu pour ces décisions « anti-business ». Comme les USA ont un système judiciaire fédéral, cette décision ne lie aucunement les 49 autres États. Il y eu le même phénomène pour les décisions concernant le tabac - une décision en Floride condamne les fabricants de cigarettes, une autre dans un autre État fait le contraire.

À lire aussi

Boeing, le nouveau cauchemar des compagnies aériennes

Boeing, le nouveau cauchemar des compagnies aériennes

DÉCRYPTAGE - La multiplication d'incidents graves depuis plusieurs mois perturbe les livraisons d'avions du groupe américain. Contraintes de réduire leurs prévisions d'activité, certaines compagnies lui demandent des indemnités.