Lisez l'intégralité du dernier discours de Barack Obama !

VIDÉO. Pour son ultime discours, le président est retourné là où tout a commencé : Chicago. Humour, émotion, hommage à Michelle et déclaration d'amour à l'Amérique.

Traduit par Romain Gubert

Temps de lecture : 20 min

Voici le discours prononcé mardi 10 janvier 2017 par Barack Obama à Chicago. Il était 21 heures, heure locale, 3 heures du matin en France, quand le 44e président des États-Unis a prononcé devant près de 20 000 personnes rassemblées au cœur de la capitale de l'Illinois (Nord) une adresse qui entrera sans doute dans l'histoire. Le Point.fr a traduit ce discours historique et vous le propose en intégralité.

« Merci, merci à tous

Merci, merci, merci, merci, merci…

Oh qu'il est bon d'être à la maison…

Tout le monde a un siège ?

Mes chers concitoyens américains, Michelle et moi-même avons été très touchés par tous les vœux que nous avons reçus ces dernières semaines. Mais ce soir, mon tour est venu de vous remercier. Que nous ayons eu des conversations les yeux dans les yeux ou que nous nous soyons seulement croisés ces dernières années, mes discussions avec vous – dans les écoles, dans les exploitations agricoles, dans les usines, sur les avant-postes militaires éloignés, ces rencontres m'ont permis de rester honnête. Elles m'ont inspiré. Chaque jour, grâce à vous, j'ai appris.

Et grâce à vous, j'ai été un meilleur président et un homme meilleur.

Quand je suis arrivé à Chicago, j'avais une vingtaine d'années et j'essayais encore de comprendre qui j'étais. J'étais toujours à la recherche d'un but dans la vie. J'ai commencé à travailler dans un quartier non loin d'ici dans des églises installées à l'ombre des aciéries fermées.

C'est dans ces rues que j'ai été témoin des miracles que peut produire la foi. Mais aussi de la dignité des travailleurs face aux difficultés.

C'est à cette époque que j'ai appris que, pour changer les choses, il fallait que les gens ordinaires s'impliquent et qu'ils s'engagent. Après huit ans comme président, je le crois encore. Et ce n'est pas seulement ma conviction. C'est le cœur battant de l'idée américaine : nous sommes tous égaux, notre créateur nous a donné des droits et des devoirs : la vie, la liberté et la poursuite du bonheur. C'est grâce à cela, grâce à notre démocratie, que nous pouvons former une union plus parfaite.

Quelle belle idée les pères fondateurs nous ont donnée ! La liberté de pouvoir poursuivre nos rêves grâce à notre travail et à notre créativité.

Depuis 240 ans, notre nation a procuré du travail à chaque génération. C'est ce qui nous a amenés à choisir la démocratie contre la tyrannie, ce qui a encouragé les pionniers à parcourir le Grand Ouest de notre continent, c'est ce qui a encouragé les esclaves à choisir la liberté.

C'est ce qui a attiré les immigrants et les réfugiés chez nous, et les a poussés à traverser les océans et le Rio Grande. C'est ce qui a poussé les femmes à obtenir les mêmes droits que les hommes.

C'est pour tout ça que les GI ont donné leur vie à Omaha Beach, en Irak et en Afghanistan.

C'est cette idée qui nous permet de dire que l'Amérique est exceptionnelle. Non que notre nation ait été impeccable dès le début, mais nous avons fait de notre mieux pour améliorer la vie des générations suivantes.

Obama et son équipe, dont Hillary Clinton, dans la Situation Room en mai 2011 le jour de l'assassinat d'Oussama Ben Laden.

La démocratie n'est pas facile à entretenir. Elle avance de deux pas pour reculer ensuite. Mais, sur son long chemin, l'Amérique a toujours été vers l'avant. Et notre pays a toujours eu les bras grands ouverts pour accueillir tout le monde et ne laisser personne au bord de la route.

Si je vous avais dit, il y a huit ans, que l'Amérique dépasserait une grande récession, que notre industrie automobile redémarrerait et que nous assisterions au plus grand nombre de créations d'emploi de toute notre histoire, si je vous avais dit que nous ouvririons un nouveau chapitre avec le peuple cubain, que nous arrêterions le programme d'armes nucléaires de l'Iran sans tirer un coup de feu, que nous éliminerions le cerveau des attentats du 11 Septembre, si je vous avais dit que le mariage pour tous serait une réalité et que 20 millions de nos concitoyens supplémentaires seraient couverts par l'assurance maladie, vous auriez dit que tout cela n'était pas possible. Mais c'est ce que nous avons fait. C'est ce que vous avez fait !

Vous avez été le changement. Grâce à vous, l'Amérique est plus forte que lorsque j'ai commencé mon mandat.

Dans 10 jours, le monde sera témoin de notre démocratie. Il verra le transfert pacifique du pouvoir d'un président librement élu à l'autre. Je me suis engagé envers le président élu Trump à ce que mon administration assure la transition la plus douce possible, tout comme le président Bush l'a fait pour moi. Parce que c'est à nous tous de nous assurer que le gouvernement est le mieux préparé à affronter les nombreux défis que le pays doit affronter.

Nous avons besoin de tous pour relever ces défis. Nous restons la nation la plus riche, la plus puissante et la plus respectée sur la terre. Notre jeunesse, notre dynamisme, notre diversité et notre ouverture, notre capacité à prendre des risques nous permettent de croire en l'avenir.

Obamas Attend National Christmas Tree Lighting © RON SACHS RON SACHS / DPA / dpa Picture-Alliance/AFP
Barack Obama en décembre dernier : l'élégance à la Maison-Blanche. © RON SACHS RON SACHS / DPA / dpa Picture-Alliance/AFP

Mais ce potentiel ne peut se réaliser que si notre démocratie fonctionne bien et si notre politique reste décente.

Ce n'est que si nous tous, indépendamment de nos convictions politiques ou des intérêts particuliers, nous travaillons ensemble que nous pourrons répondre aux défis du pays.

Ce sur quoi je veux mettre l'accent ce soir, c'est l'état de notre démocratie. Il ne s'agit pas de marcher au pas dans la même direction. Nos fondateurs se sont querellés, et finalement ils se sont mis d'accord autour d'un objectif commun. Ils s'attendaient à ce que nous fassions de même. Ils savaient que la démocratie exige un sentiment de solidarité. Ils avaient imaginé qu'avec toutes nos différences, nous nous lèverions comme un seul pour aller dans la même direction.

Il y a eu des moments de notre histoire qui ont menacé cette solidarité. Et le début de ce siècle, le XXIe siècle, a été un de ces moments. Un monde en déclin, des inégalités croissantes, des changements démographiques et le spectre du terrorisme… Ces forces nous ont menacés. Elles ont mis à l'épreuve notre sécurité et notre prospérité, mais aussi notre démocratie.

La façon dont nous relèverons ces défis déterminera notre capacité à éduquer nos enfants, à créer de bons emplois et à protéger notre patrie. En d'autres termes, notre avenir.

Notre démocratie ne fonctionnera pas sans le sentiment que tout le monde a des opportunités économiques. Et la bonne nouvelle, c'est qu'aujourd'hui l'économie se renforce. Les salaires, les revenus, l'épargne et les retraites progressent et la pauvreté recule.

Les riches paient des impôts équitables. Même si le marché boursier est proche de ses records, le taux de chômage est lui aussi proche du niveau le plus bas de ces 10 dernières années.

Le taux de personnes sans assurance maladie n'a jamais été plus bas. Les coûts des soins de santé n'augmentent plus aussi vite qu'auparavant. Et je l'ai dit, je serai toujours derrière ceux qui voudront améliorer encore notre système de protection sociale.

Parce que, après tout, c'est la raison pour laquelle nous avons choisi de servir la communauté : pour améliorer la vie des gens.

Malgré tous les progrès que nous avons réalisés, nous savons que ce n'est pas suffisant. Notre économie ne fonctionne pas bien lorsque quelques-uns prospèrent davantage que la classe moyenne. Et que, derrière, beaucoup ne peuvent rejoindre cette classe moyenne.

Les inégalités flagrantes sont dangereuses pour la démocratie.

Alors que 1 % des Américains les plus riches ont amassé la plus grande part de la richesse et des revenus, trop de nos familles sont encore laissées pour compte. Le travailleur d'usine licencié, la serveuse ou l'infirmier doivent lutter pour payer leurs factures.

Ils peuvent être convaincus que leur gouvernement ne sert que l'intérêt des puissants. C'est dangereux, car cela fait le jeu du cynisme.

Il n'y a pas de solutions simples à ce problème. Notre économie ne doit pas seulement être libre, mais être juste. Les dangers ne viennent pas de l'étranger, mais de la robotisation qui rendra obsolètes beaucoup de bons emplois de la classe moyenne. Et nous devrons forger un nouveau pacte social pour garantir à tous nos enfants l'éducation dont ils ont besoin.

Il faut donner aux travailleurs le pouvoir de se syndiquer pour de meilleurs salaires. Mettre à jour nos filets de protection sociale. Faire plus de réformes des impôts afin que les sociétés et les individus qui profitent le plus de cette nouvelle économie n'évitent pas leurs obligations envers le pays qui a rendu possible leur succès.

Nous pouvons discuter de la meilleure façon d'atteindre ces objectifs. Mais nous ne pouvons pas être complaisants sur les objectifs eux-mêmes. Car si nous ne créons pas d'opportunité pour tous, la désaffection et la division bloqueront nos progrès.

Il y a une seconde menace pour notre démocratie. Et celle-ci est aussi vieille que notre nation elle-même. Après mon élection, on parlait d'une Amérique post-raciale. Et une telle vision, bien intentionnée, n'a jamais été réaliste.

Je sais que les relations raciales sont meilleures qu'il y a 10, 20 ou 30 ans, peu importe ce que certains disent. Vous pouvez le voir non seulement en statistiques, vous le voyez dans l'attitude des jeunes Américains. Mais nous avons des progrès à faire.

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Commentaires (19)

  • chauformas

    "On sait ce qu'on perd on ne sait pas ce qu'on va y gagner. " C'est la formule que j'employais quand tous les 2 ou 3 ans le responsable de notre agence était muté. Parfois c'était pas mal mais souvent c'était nettement moins bien.

  • danmariepoint

    Je pense que l'on ne découvrira que dans quelques mois les progrès qu'ils ont mis en oeuvre... Sans fanfares ni trompettes... Une évolution positive de la vie de nombreux citoyens américains modestes... Une sortie de guerre d'Afghanistan... Et d'Irak... Donc des vies sauvées... Le maintien de l'activité économique malgré la crise des subprimes et les attentats...
    Mais les Français et beaucoup des lecteurs du point ont la critique plus aisée que la révélation des points positifs...
    Cette humeur morose des Fraçais fait échouer la France dans tous les domaines : Politique par l'élection d'un faiseur de discours incapable en 2012, Economique par des grèves paralysantes dès que l'on veut réformer. ; et culturelle par la dégradation de notre niveau d'enseignement dus à des fonctionnaires de l'En qui justifient (?) leur paye par des réformes ineptes...
    Alors reconnaissons à un Homme qui a eu le respect de la vie de ses concitoyens, la valeur de ses actions... Personnellement je le préférais à celui qui lui succède...
    Pas Vous ?

  • Alain (Paris)

    Bravo au Président Obama :

    - pour avoir contenu avec brio les effets de la grave crise financière de 2008, héritée des excès des années Bush, en évitant la faillite en chaîne des banques et assurances

    - pour avoir sauvé directement l'industrie automobile américaine de la faillite

    - pour ne pas avoir joué une partie du peuple américain contre l'autre, pour avoir été le président de tous les américains

    - pour avoir conduit l'Iran à négocier sur son armement nucléaire

    - pour avoir normalisé les relations des USA avec Cuba

    - pour avoir résisté aux provocations militaires de Poutine

    - pour ne pas avoir bombardé les populations civiles en Syrie

    Bien sûr, son mandat a connu aussi des zones d'ombre. Il n'a pas sû faire avancer le processus de paix au Moyen-Orient. Mais franchement, qui a fait mieux que lui jusqu'ici...
    On lui reproche (ici) d'avoir réduit l'influence des USA, de n'être pas intervenu militairement dans tous les coins. Il faut savoir ce que l'on veut.
    Obamacare (l'assurance maladie universelle) est une bonne idée, mais qui n'a pas été mise en oeuvre correctement. Elle fera tout de même son chemin, même parmi ses détracteurs.
    On lui reproche de ne pas avoir fermé Guantanamo. Mais qui a envie de voir relâchés dans la nature ceux qui y sont internés ? Nous verrons bien si Trump fera le malin sur ce dossier.

    Merci, Président Obama, d'avoir agi pendant huit ans avec mesure et intelligence.

    Le peuple américain vous regrettera certainement, quand le nouveau locataire de la Maison Blanche aura donné la pleine mesure de sa personnalité.