La Normandie, la région qui a bien vécu sa fusion
Une étude de l'Ifop menée dans quatre régions montre que ce sont les Normands qui sont le plus satisfaits de la réforme territoriale et de leur président.
Par Louis ChahuneauTemps de lecture : 5 min
Et si la Normandie était une exception ? L'institut de sondage Ifop vient de publier quatre sondages commandés par les régions sur « Le regard des habitants sur leur région et l'action du conseil régional ». Les Hauts-de-France, l'Auvergne-Rhône-Alpes, la Normandie et l'Île-de-France ont voulu connaître les avis de leurs « ressortissants ». Les scores pour la Normandie sont plutôt positifs. Deux ans après la fusion de la Haute et de la Basse-Normandie, à la suite d'une réforme qui a vu la France passer de 22 à 13 régions en 2015, 73 % des Normands sont satisfaits de ce mariage territorial. Un bon résultat alors que cette nouvelle carte de France avait suscité plus ou moins d'enthousiasme selon les régions.
« Les Normands ne semblent pas avoir le même sentiment de déclin qu'on retrouve dans d'autres régions comme les Hauts-de-France. Lors de la fusion en 2015, le seul sujet qui a fait débat concernait le choix de la capitale politique entre Rouen et Caen. C'était bien plus compliqué en Nouvelle Aquitaine et en Alsace-Lorraine », se souvient Frédéric Dabi, directeur général adjoint de l'institut d'études.
Ce sont 93 % des Normands interrogés pour l'étude (1 004 personnes) qui se disent « satisfaits de leur vie » dans la région. D'après l'Ifop, seuls 17 % des sondés ont vu la situation se détériorer depuis 2015, contre 24 % dans l'Auvergne-Rhône-Alpes, et 33 % dans les Hauts-de-France et l'Île-de-France.
« C'est un bon sondage pour Hervé Morin, commente Frédéric Dabi, directeur général adjoint de l'Ifop. L'élément qui ressort est plutôt le bon vivre : 49 % des Normands se disent très satisfaits de la qualité de vie dans la région ! » insiste-t-il.
Hervé Morin, un président rassembleur
Si Hervé Morin a été élu d'une courte tête en 2015, il est loin d'être un personnage politique clivant dans sa région. D'après les chiffres de l'Ifop, 64 % des Normands considèrent que leur président a accompli « un bon travail » depuis son élection. Dans les autres régions, cette statistique est plus nuancée (58 % dans les Hauts-de-France pour Xavier Bertrand et 54 % en Auvergne-Rhône-Alpes pour Laurent Wauquiez), lorsqu'elle n'est pas tout simplement négative comme en Île-de-France pour Valérie Pecresse(47 %). Plus étonnant, la moitié des électeurs de l'opposition apprécie le travail de Morin (56 % pour le PS, 54 % pour le FN, 52 % pour les Verts, et 47 % pour le FDG).
Si le président de la région préfère attendre la fin de son mandat (dans quatre ans) pour faire le bilan, 69 % des Normands reconnaissent qu'« il a un projet pour la Normandie » et 62 % qu'« il est capable de réformer la région ». Une bonne nouvelle d'après Frédéric Dabi : « Il y a un alignement des planètes pour Hervé Morin. Souvent, on ne voit pas la cohérence de l'action, mais, là, le président incarne l'identité de la Normandie. »
Interrogés sur l'action de leur nouveau conseil régional, les Normands apprécient particulièrement « le rayonnement de la Normandie » (71 %) et l'animation de la région (66 %). Ils sont, en revanche, beaucoup plus mitigés sur les thématiques de l'emploi et du développement économique (29 %). Hervé Morin soupire : « Tous les matins, je rencontre des entreprises qui n'arrivent pas à embaucher. On découvre des centaines d'emplois non pourvus, comme les chauffeurs de poids lourds. Parfois, je désespère. »
Mais le président du conseil régional se démène pour améliorer la situation. « On a créé un fonds d'investissement de 100 millions d'euros pour les entreprises et un grand plan de numérisation de l'économie régionale, notamment pour les très petites entreprises (TPE) », détaille l'ex-ministre de la Défense de Nicolas Sarkozy. Sous l'impulsion de l'instance régionale, Morin a aussi mis en place l'Arme (anticipation, redressement, et mutation économique), un dispositif qui a déjà permis de remettre à flot 200 entreprises en difficulté, et de sauver 4 000 emplois, selon son instigateur.
« En Normandie, les trains c'est le Moyen Âge »
Si 71 % des Normands interrogés félicitent l'action du conseil régional pour « le rayonnement de la Normandie », ils ne sont plus que 41 % lorsque l'on aborde la thématique des « transports ». Pour 23 % des habitants de la région, l'amélioration du train constitue la deuxième priorité après le développement économique. Une demande qui a progressé de neuf points depuis 2015. Surprenant ? Pas vraiment pour Hervé Morin. « En Normandie, les trains c'est le Moyen Âge : on met plus de temps pour faire Paris-Le Havre qu'en 1950 », déplore le président de la région qui met en cause le matériel obsolète et les retards incessants.
Pour remédier à ce problème, l'ancien ministre prépare « un grand plan ferroviaire d'un milliard d'euros qui sera effectif en 2020. D'ici là, tous les trains seront à l'heure et équipés du wi-fi », promet-il. En novembre 2016, la région Normandie avait déjà passé une commande de 40 trains dernier cri, auprès de la société Bombardier. La collectivité a obtenu 720 millions d'euros de la part de l'État pour rénover les lignes Paris-Caen-Cherbourg, Trouville-Deauville et Paris-Rouen-Le Havre. En échange, la région s'engage à prendre en charge la gestion des lignes SNCF.
La situation catastrophique des transports en Normandie devrait donc s'améliorer grâce au volontarisme de la région. Mais pas sûr que la majorité des Normands sache qui remercier : d'après l'Ifop, 51 % des interrogés ne savent absolument pas qui est le président de la région. Problème de communication ? « Non, c'est plutôt un bon score, rétorque le principal intéressé, dans le Sud c'est plutôt 10 %. » Comme quoi, la réforme territoriale n'est pas encore tout à fait assimilée...