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La guerre au Yémen, qui fait rage depuis trois ans, a fait plus de 10 000 morts civiles, quasiment dans l'indifférence générale. À des milliers de kilomètres de là, la France poursuit activement ses ventes d'armes aux pays membres de la coalition emmenée par l'Arabie saoudite et les Émirats, qui soutiennent le président yéménite Abdrabbo Mansour Hadi, reconnu par la communauté internationale, face aux rebelles yéménites houthis, aidés par l'Iran. L'ONG française Aser (Action sécurité éthique républicaines) a engagé le 1er mars une démarche juridique pour obtenir la suspension des licences d'exportation accordées à plusieurs industriels français de l'armement. Elle s'apprête à poursuivre cette procédure devant le Conseil d'État. Interview de son vice-président, Benoît Muracciole.
Le Point : De nombreuses ONG ont lancé une campagne pour demander que la France cesse de vendre des armes aux pays arabes engagés dans la guerre au Yémen. Quelle est votre position ?
Benoît Muracciole : Elle est très claire : l'ONG Aser, soutenue par l'association Droit-Solidarité (section française de l'Association internationale des juristes démocrates, AIJD), a engagé une démarche juridique pour demander que les licences d'exportation accordées par le gouvernement français aux industriels livrant des armes aux belligérants du conflit au Yémen, notamment l'Arabie saoudite et les Émirats arabes unis, soient suspendues. Nous savons que ces licences existent, puisque plusieurs industriels français, dont Dassault et Nexter, ont fait publiquement état des succès opérationnels de leurs productions, précisément dans cette guerre atroce. Ces armes ont donc été vendues et livrées. Elles sont actuellement utilisées dans les combats.
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N'est-ce pas précisément le rôle des armements ?
Certes, mais ce que nous dénonçons, c'est l'utilisation de ces armes françaises par des armées qui agissent en contradiction formelle avec les lois françaises et les traités internationaux signés par notre pays. Ces usages illicites sont notamment liés à de nombreuses et graves violations du droit international humanitaire et des droits humains. Ces pratiques, qui sont celles de toutes les parties au conflit, sont sans cesse dénoncées par l'ONU depuis 2014. Cinq ans auparavant, en 2009, Amnesty International avait déjà pointé du doigt les violations exercées par les Émirats arabes unis et l'Arabie saoudite. La France n'a pas été la seule avertie par les ONG. Tous les pays vendeurs d'armes à ces clients l'ont été. Ces ONG, avec l'ONU et le Parlement européen, ont réclamé la mise en place d'un embargo.
Les belligérants s'en prennent à des populations civiles sans défense, de manière totalement indiscriminée.
Les États sont souverains. Ils vendent en fonction de leurs règles et des garanties qu'ils prennent. Que leur reprochez-vous précisément, et à la France en particulier ?
Les États vendeurs sont garants du suivi de leurs ventes et du respect des engagements pris par les acheteurs. Autrement formulé, les États parties au traité sur le commerce des armes (TCA) n'entendent pas cesser d'en vendre, mais ont un intérêt commun à la régulation de ce commerce face à la mondialisation croissante des échanges. Les déplacements massifs de populations, l'accès de plus en plus facile à des armements sur les marchés illicites, de même que le développement du terrorisme sont autant de conséquences néfastes pour les gouvernements d'un marché de l'armement dérégulé. Il devient de plus en plus difficile de justifier aux yeux de l'opinion publique notre inertie face aux horreurs de la guerre et des violations massives du droit international humanitaire.
Or, s'agissant seulement de la France, ces règles contraignantes ne sont pas appliquées. Pire : notre pays viole le TCA. Il écrit dans son préambule qu'il « reconnaît aux États des intérêts légitimes d'ordre politique, sécuritaire, économique et commercial dans le commerce international des armes classiques » ; il n'en souligne pas moins « la nécessité de prévenir et d'éliminer le commerce illicite d'armes classiques et d'empêcher leur détournement vers le marché illicite ou pour un usage final non autorisé, ou encore à destination d'utilisateurs finaux non autorisés, notamment aux fins de la commission d'actes terroristes ». La France sait que, depuis le début de cette guerre, les lois de la guerre sont systématiquement violées. Les belligérants s'en prennent à des populations civiles sans défense, de manière totalement indiscriminée. Dans un rapport de janvier 2017, l'ONU recensait déjà 987 frappes sur des cibles civiles. La France le sait parfaitement. Et il faudrait que nous laissions passer ça ?
Avez-vous obtenu des réponses officielles à vos questions sur ces ventes ?
Jamais. Pas une seule. C'est pour cette raison que nous nous sommes adressés le 1er mars au Premier ministre et secrétariat général de la sécurité et de la défense nationale (SGDSN), afin de demander la suspension immédiate des licences d'exportation de matériels de guerre et matériels assimilés destinés aux pays impliqués dans la guerre au Yémen. Il s'agit d'obtenir du gouvernement qu'il respecte les engagements internationaux souscrits par la France et de demander à la juridiction administrative qu'elle sanctionne l'action illégale de l'administration ; nous n'obtiendrons rien sans une vaste campagne d'opinion. Le droit reste la traduction d'un rapport de force au sein de la société. Nous convions les représentants des associations dont l'objet social recoupe ces objectifs et les parlementaires à se rassembler pour renforcer notre saisie prochaine du Conseil d'État aux fins de voir la France suspendre ses exportations d'armes destinées aux pays impliqués dans la guerre au Yémen.
Ce serait qu'il ne faut pas vendre d'armes à qui que ce soit dans le monde... ! Allez faire comprendre ça à Trump, Poutine et autres. ; et même des Airbus pouvant servir à transporter des militaires... !
On vous vends les armes... ,
à condition de ne pas les utiliser, car hélas, les armes tuent !
La découverte !
Et peut-être celles de concurrents étrangers...
Je ne vois pas pourquoi une petite asso de rien du tout, qui se découvre tout soudain une âme charitable, ne réagit que maintenant aux horreurs de la guerre ; est-elle partie au conflit Yémen-Arabie ? Depuis quand ? Et les autres guerres, elle sait ?
M'est avis que ce n'est qu'un coup d'épée dans l'eau, histoire de présenter à ses parrains un bilan édifiant ! Oui, ma brave dame, c'est ainsi !