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Les miracles existent toujours en médecine, et n'ont pas cessé. Les guérisons spontanées, voire les guérisons de paralysies par la suggestion, sont parfaitement connues. La dénomination des manifestations paralytiques d'origine psychologique est le pithiatisme. Ce nom (utilisé en substitution du nom d'hystérique) signifie « accessible à la suggestion », ce qui veut dire que ces pathologies, au moins avant qu'elles soient complètement irréversibles (liées aux rétractions tendineuses), sont susceptibles d'être corrigées par la suggestion ou par l'hypnose. C'est aussi ancien que l'expérience de Charcot, et j'ai personnellement vu dans ma jeunesse des paralysies guéries par la suggestion, à une époque où ces paralysies étaient fréquentes.
Un autre aspect des miracles est l'effet placebo, effet favorable d'un médicament factice. Celui-ci est complexe, il est maintenant relativement bien identifié et, en fonction des situations, il peut améliorer les signes cliniques, voire les faire disparaître dans 15 à 40 % des cas, sans « médicament actif ». Ceci a un effet, y compris sur des douleurs extrêmement violentes. Il est possible qu'un certain nombre de thérapeutiques, dites alternatives, fonctionnent essentiellement sur cet effet placebo. Il est clair aussi que certaines thérapeutiques qui sont censées avoir des principes actifs, chimiques, n'ont en fait qu'un effet placebo. Un effet miraculeux bien connu est celui de la guérison des verrues, le Pr Mollaret, à l'hôpital Claude Bernard, les guérissait en les regardant fixement pendant dix minutes de suite. Il avait une consultation spécialisée dans ce domaine.
Fausses vaccinations
Mais la malédiction existe aussi. Si vous prédisez à quelqu'un qu'en prenant tel traitement ou en subissant tel examen il va avoir des douleurs ou des effets secondaires, ceci se produit dans un nombre non négligeable de cas. Ainsi, les fausses vaccinations ne contenant que du sérum physiologique peuvent entraîner des épisodes de fièvre, de démangeaison, de boutons, de maux de tête, de douleurs articulaires dans 8 à 10 % des cas. Si vous prévenez les gens que le début du traitement que vous leur prescrivez va être associé avec une aggravation des symptômes, celle-ci se produit relativement communément. Ceci est dû à l'effet nocebo, qui est aussi maintenant parfaitement identifié sur le plan neurologique, et lié à une connexion entre le cortex cérébral et la moelle épinière.
L'existence de « miracles » et de « malédictions » est mal admissible à notre époque. Les patients refusent de croire qu'il s'agit d'effets induits subjectivement, malgré toutes les preuves biologiques que nous en avons, et certains médecins refusent de croire que l'amélioration qu'ils ont obtenue chez certains patients, pour des traitements (dont l'effet n'est pas reconnu par les autres), est purement liée à une induction psychologique. Les miracles et les malédictions existent en médecine depuis l'aube de l'humanité, et ils continueront à se produire, car la suggestion joue un rôle extrêmement important dans nos manifestations maladives.
Le "miracle", la suggestion, les effets psychologiquement induits ne sont pas une découverte. La médecine, comme la maladie, du simple malaise à la néoplasie, ne sont pas séparés de la psyché. D'aucuns sautent sur ce rappel pour venir à la rescousse des charlatans. Depuis plus de 200 ans, le lobby homéopathe ment, délire, organise des colloques pompeux pour vendre du vent antiscientifique à des décideurs politiques, à une poignée de praticiens incompétents et à un public crédule qui, évidemment, ne demande qu'à croire. Ces homéopathes s'insurgent quand on parle de placébo-thérapie, revendiquent des guérisons extraordinaires, glosent sur des explications fantaisistes en récupérant maladroitement les dernières notions de la physique quantique (après l'atome, les ondes etc. ) et soutiennent contre toute évidence que leurs granules ont des propriétés spécifiques. Tout cela répond à la définition du charlatanisme, lequel constitue parfois une perte de chance et toujours une faute déontologique majeure. Un scandale médical et économique à faire enfin cesser.
Si les grands penseurs voulaient revenir toujours aux fondamentaux, tout le monde se porterait mieux, les médecins et les malades. Le but de la médecine et donc de tous les médecins et de tous les soignants, devrait être et rester la guérison ou le soulagement des malades. Qu'importe la technique et ses moyens d'action, seul le résultat, bon si possible, est important. Un bon résultat avec une mauvaise technique est préférable à l'inverse. On peut simplement comprendre que la collectivité, qui paie la plus grosse part dans notre société, s’inquiète du coût ou plutôt du rapport prix/résultat, mais ce n'est pas en excluant des techniques discutables mais prouvées efficaces que le bilan financier sera meilleur.
Le chaman existait bien avant l'autre "plus vieux métier du monde", et la médecine actuelle comporte encore la suggestion, les runes magiques inscrites sur une "ordonnance", un cérémonial (salle d'attente, consultation, opération) avec baguette magique (le bistouri), déguisement (la blouse blanche, tenue de bloc, maque) etc. Etc.