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Donc, la CGT est farouchement opposée à tout système de retraite par capitalisation. La répartition, c'est aux yeux de la Centrale emmenée par Philippe Martinez le seul système juste, équitable, etc. D'ailleurs, les cégétistes ont ces derniers jours attaqué bille en tête BlackRock, au motif que le gestionnaire d'actifs américain profiterait de la réforme des retraites en cours pour « vendre » des produits d'épargne-retraite – ce que BlackRock ne fait pourtant pas directement. Et puis on tombe sur une brochure de la CGT datant de 2010. Plus précisément, un livret publié par la section CGT de la Banque de France. Et là, ô stupeur, on découvre que le syndicat est très fier du système par capitalisation de la Banque de France, qui assure à ses agents (près de 10 000) une retraite assez dorée.
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Benoîtement, la CGT explique dans un langage de gestionnaire d'actifs que « la caisse de réserve des employés de la Banque de France est fondée sur le principe de la capitalisation. Les cotisations des actifs [7,85 % des rémunérations] alimentent un capital, et le revenu du placement de ce capital sert à payer les retraites ». Et si les gestionnaires de ce fonds investissent mal, pas de problème : la Banque de France complétera le manque à gagner. BlackRock, tremble !
Certes, un peu plus loin, la brochure cégétiste prévient : « Ces revenus sont insuffisants pour faire face au montant réel des retraites à payer et la banque, comme elle s'y est engagée solennellement, comble l'écart par une subvention. Financièrement, tout se passe donc comme si la Banque payait une cotisation patronale. » Sans doute. Cette « cotisation patronale » s'élève d'ailleurs, selon un rapport du Sénat de 2018, à 428 millions d'euros.
La bénévolence, un dispositif très… spécifique
Cette subvention s'explique par le déséquilibre démographique du régime spécial de la Banque de France, institué en 1808, huit ans après la création par Napoléon de la Banque de France. Il compte aujourd'hui 17 000 bénéficiaires, pour près de 10 000 cotisants. L'autre explication, c'est son coût. Le régime de retraite de la Banque de France passe pour être l'un des plus avantageux, donc parmi les plus coûteux, de France. Il doit s'aligner, depuis 2007, sur celui de la fonction publique, mais comprend toujours quelques privilèges. L'âge de départ à la retraite se rapproche année après année du régime commun (62 ans), sauf pour les agents nés avant 1959 – les plus âgés d'entre eux pouvant partir à 60 ans, comme avant la réforme. Certains peuvent encore avancer l'âge de la retraite, jusqu'à… 55 ans. S'il a cotisé la durée requise, l'agent touchera 75 % de son salaire calculé sur les six derniers mois.
Plusieurs majorations sont prévues. Un enfant né avant le 1er avril 2007 donne droit à un an de service en plus ; si un agent en a élevé trois, sa retraite est majorée de 8,5 %. Mais c'est surtout un bonus très singulier qui attire l'attention. À la Banque de France, on l'a longtemps appelé « bénévolence ». Depuis 2001, ce dispositif a pris le nom plus classique de « complément spécifique de retraite ». Spécifique, sans doute parce qu'il n'existe nulle part ailleurs. Il permet à tout agent de toucher une pension majorée de 14 %, sans aucune condition. À noter que les agents ne paient aucune cotisation particulière pour financer ce dispositif.
Poire pour la soif
Créée en 1812, la bénévolence s'appelait alors « secours », puis « supplément de pension ». Une poire pour la soif, en quelque sorte. Il y a une dizaine d'années, la Cour des comptes avait critiqué ce bonus, notant son « absence de fondement législatif ou réglementaire » et « dont les motifs apparaissent aujourd'hui souvent dépassés ». La bénévolence est pourtant toujours en vigueur.
Les syndicats entendent bien défendre leur régime très spécial. Le 13 janvier, CGT en tête, ils ont commencé à bloquer les sites de La Courneuve (Seine-Saint-Denis) et de Sainghin-en-Mélantois (Nord), qui assurent l'approvisionnement en billets des distributeurs. Fabienne Rouchy, secrétaire générale de la CGT Banque de France, espère que le mouvement s'étendra à l'ensemble de trente-sept centres similaires de la Banque de France. « Nous voulons le retrait du projet de réforme », dit-elle, croisant les doigts pour que le pays soit, en conséquence, à court de billets de banque. Attention toutefois : il ne faudrait pas non plus bloquer l'économie du pays, les investissements de la caisse de retraite de la Banque de France, celle que défend la CGT, pourraient en pâtir…
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Avec les majorations pour enfants (6 ou 7), sauf erreur, la pension à taux plein d'un fonctionnaire ou assimilé, atteint 100% du dernier salaire.
Et bien sûr, personne ne parle jamais des petites retraites du privé à 600€ calculées sur 50 pour 100 des 25 meilleures années !
Et plusieurs personnes appartenant à la même famille y sont employées ?