Coronavirus : « C'est une occasion unique d'opérer une véritable transition écologique »

ENTRETIEN. La pandémie du Covid-19 pourrait servir d'électrochoc pour changer notre modèle économique, estime le chercheur François Gemenne, membre du Giec.

Propos recueillis par

Les plans de relance étatiques une fois la crise du coronavirus terminée pourraient être l'occasion d'entamer une véritable transition écologique.

Les plans de relance étatiques une fois la crise du coronavirus terminée pourraient être l'occasion d'entamer une véritable transition écologique.

© PHILIPPE LOPEZ / AFP

Temps de lecture : 3 min

Usines à l'arrêt, avions cloués au sol, consommation et déplacements en chute libre… Les mesures de confinement prises en Chine et désormais dans de nombreux pays pour endiguer la pandémie du Covid-19 ont porté un coup d'arrêt sans précédent à l'activité économique. Et pendant que les êtres humains se battent contre le virus, la planète, elle, profite d'un répit bien mérité.

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C'est l'effet inattendu de cette crise sanitaire mondiale. En Chine, et maintenant en Italie, on observe une diminution drastique de la pollution de l'air. Dans certaines villes chinoises d'ordinaire embrumées dans la pollution, les habitants découvrent le ciel bleu. Et si cette pandémie était l'électrochoc tant attendu pour que l'être humain prenne conscience de son empreinte sur l'environnement ? Entretien avec François Gemenne, chercheur à l'université de Liège et membre du Giec.

Le Point : En nous forçant à réduire notre consommation, notre production et nos déplacements, cette crise sanitaire peut-elle avoir des effets bénéfiques pour la planète ?

François Gemenne : Certainement. C'est tout le paradoxe de la crise actuelle. Le niveau de pollution va se trouver réduit, grâce à des mesures drastiques qui n'ont pas été choisies. On voit la qualité de l'air qui s'améliore, en Chine ou ces derniers jours en Italie, les dauphins qui reviennent nager dans les ports de Sardaigne… Les chiffres sont impressionnants. Finalement, c'est la pandémie qui aura le plus d'impact sur le réchauffement climatique. En Chine, elle pourrait presque avoir des effets bénéfiques en termes de santé publique ! La surmortalité liée à la pollution atmosphérique y est estimée à un ou deux millions de personnes chaque année, et la pollution a diminué de 20 à 30 % pendant la crise. Pour un bilan d'environ 3 500 morts du coronavirus, combien de vies épargnées par une meilleure qualité de l'air ?

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Un recul de cette ampleur et aussi soudain des émissions de gaz à effet de serre, c'est une première ?

Le seul élément de comparaison, c'est la crise économique et financière de 2008-2009. On avait vu une diminution drastique des émissions de gaz à effet de serre. Mais il y avait eu un très fort effet rebond après… Peut-être qu'après la pandémie les émissions vont à nouveau repartir à la hausse comme après la crise de 2008. D'où la nécessité de penser la sortie de crise dès maintenant, et la manière de transformer notre modèle.

Est-il utile de sauver toutes les compagnies aériennes ? Les compagnies pétrolières ?

Justement, quand la crise sanitaire sera terminée et que les gouvernements voudront relancer l'économie, n'y a-t-il pas un risque que l'environnement passe au second plan et ne soit pas la priorité ?

Il est fort possible que des mesures en faveur de l'environnement soient remises à plus tard ou tout simplement abandonnées. À l'issue de cette crise, comment voulez-vous par exemple reparler de la taxation du kérosène alors que les compagnies aériennes auront beaucoup souffert ? Ce sera totalement inaudible.

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Dans son allocution du jeudi 12 mars, Emmanuel Macron a estimé que cette crise devait nous pousser à revoir notre modèle. N'est-ce pas l'occasion de mener une politique ambitieuse de transition écologique ?

Il a complètement raison. La question c'est de savoir comment on fait pour réinventer ce modèle. Les mesures économiques et les aides qui seront versées aux entreprises à l'issue de la crise peuvent être un vecteur de transformation, et ne pas seulement servir à compenser les pertes pour revenir à la situation d'avant. L'État va devenir un planificateur économique et investir des centaines de milliards d'euros. Il pourrait saisir l'occasion pour aller vers une économie décarbonée. Est-il utile de sauver toutes les compagnies aériennes, notamment les low cost ? Va-t-on sauver les compagnies pétrolières ? C'est une occasion unique d'opérer une véritable transition écologique.

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Commentaires (84)

  • @OLEG

    Si c est pour ajouter le bordel de la transition écologique au bordel économique de l après pandémie, NON MERCI.
    arrêtez ne nous emmerder. J rappelle simplement que toute l Europe ne représente que 9% des émissions de CO2.
    envoyons nos génies de l écologie prêcher leur religion en Inde et en Chine.

  • Papyboss

    Juste une petite correction qui a son importance. On a accusé à tord les plantations de palmiers à huile de détruire la forêt tropicale. Non c'est un fake new véhiculé par les verts. Il y a une vingtaine d'années au moins, les hévéas produisant le latex sont devenus beaucoup moins rentables. Ils occupaient environ 12 millions d'hectares. Ils ont été abattus et remplacés par les palmiers à huile d'origine africaine. Ces arbres sont de véritables puits à CO2 car leur productivité est très importante plusieurs régimes pouvant porter plus de 40 kg de fruits chacun. De plus le tronc de ces palmiers constituent de petits jardins suspendus abritant fougères et de nombreuses autres plantes épiphytes, qui servent d'abris à de très nombreux insectes. Ces jarinets suspendus attirent donc une faune très importante, et l'on s'est aperçu que les populations d'orang outangs augmentaient. De plus cette huile de palme que l'on dénigre à tord à des utilisations importantes et souvent insoupçonnées. Elle est la seule huile tropicale et constitue une source de vitamine D indispensable pour les enfants en pays tropicaux. Chez nous, cette huile très riche en acide palmitique est utilisée pour fabriquer le lait maternisé. Il faut savoir que le lait de la femme contient environ 40% d'acide palmitique, et qu'il est parfaitement digéré par le nouveau né. C'est cet acide palmitique qui entre dans la constitution du lait maternisé. Autre avantage très sérieux de cette huile de palme c'est qu'elle est solide à la température ordinaire sous nos contrées et elle a été très utilisée, non transformée, en biscuiterie et dans les pâtes à tartiner. Par contre deshydrogénée pour rentrer dans la composition de certaines huiles de consommation courante peu chère, elles ne doivent surtout pas être soumises à la cuisson car elles donnent alors au dessus de 160°C de l'acroléine un composé toxique, comme toutes les autres huiles déshydrogénées.

  • petrus6524

    En effet la lutte contre l'orpaillage clandestin en Guyane est difficile. La forêt ne se laisse pas pénétrer facilement, néanmoins on peut regretter que lorsque des délinquants sont pris ils ne soient pas condamnés, faute de moyens, comme toujours...
    Bien sûr que les haies ont un rôle dans nos campagnes, mais rassurez- vous, si la situation ne change pas pour nos agriculteurs, dans quelques années il n'en restera plus que la moitié et la nature reprendra vite ses droits... A moins que les Chinois ne viennent acheter les terres qui seront abandonnées faute d'hommes pour les cultiver et là, tout est à craindre car ils n'auront certainement aucun scrupule pour cultiver de manière encore plus intensive... Et achever d'épuiser des sols déjà fragilisés par cinquante ans de "remembrements".
    Regrettable projection à partir de la situation actuelle... Nous avons perdu les haies, mais aussi tous ce qui y nichait, oiseaux, lapins, lièvres, faisans, etc. Nos campagnes sont de plus en plus silencieuse, seuls les corbeaux et les pies prolifèrent, avec les vanneaux...