Le duplex de France 3 Nouvelle-Aquitaine devenu viral. — capture d'écran

FAKE OFF

VIDEO. Une journaliste de France 3 a-t-elle été «censurée» pendant un direct sur les «gilets jaunes»?

Alexis Orsini

France 3 Nouvelle-Aquitaine est accusé par de nombreux internautes d'avoir censuré un direct réalisé auprès de « gilets jaunes », samedi 17 novembre...

  • Lors de la mobilisation des « gilets jaunes », samedi 17 novembre, France 3 Nouvelle-Aquitaine a notamment couvert la mobilisation en cours près du pont d'Aquitaine.
  • Alors que la journaliste présente sur place évoque l'arrivée de CRS, la présentatrice du JT l'interrompt soudainement.
  • Si nombre d'internautes crient depuis à la « censure », la chaîne était en réalité obligée de rendre l'antenne... elle qui a par ailleurs longuement couvert la présence des CRS par la suite.

C’est l’une des vidéos de la journée de blocage du 17 novembre les plus partagées sur les réseaux sociaux : la prétendue « censure » du JT de mi-journée de France 3 Nouvelle-Aquitaine lors d’un direct réalisé auprès de « gilets jaunes » mobilisés à proximité du pont d’Aquitaine.

L’extrait de 46 secondes partagé par plusieurs pages Facebook – et visionné plus d’un million de fois, notamment, sur celle du Discord Insoumis, qui regroupe les militants de la France Insoumise (LFI) –, montre la journaliste-présentatrice en plateau introduire sa collègue : « On retourne sur la rocade de Bordeaux afin de faire un dernier point sur la situation. »

Sa collègue, entourée de manifestants, indique alors : « […] Quelques voitures ont pu passer sur le pont d’Aquitaine mais c’est vraiment très peu de véhicules, cela se fait au goutte à goutte. Et puis malheureusement, la situation se tend, cela ne vient pas des manifestants, qui sont toujours plutôt bon enfant, mais des forces de l’ordre. Les policiers les ont menacés de relever leurs plaques d’immatriculation pour leur mettre des amendes. Et puis, derrière moi, les CRS sont arrivés avec leurs matraques et leurs boucliers… »

Elle est alors interrompue de manière un peu brusque par la présentatrice du JT, qui lui lance : « Merci ! Merci beaucoup […] ! Je suis désolée, on est obligés de couper ce direct. Au revoir, à ce soir, on reviendra bien sûr sur ces informations ».

ll n’en fallait pas plus pour que nombre d’internautes crient à la « censure » : « France 3 COUPE UN DIRECT lorsque une journaliste parle de CRS QUI MENACENT LES MANIFESTANTS », « Le JT de France 3 Aquitaine qui panique et censure une journaliste qui évoque les menaces et la violence des policiers/CRS à l’égard des gilets jaunes »…

Or, cette interruption ne doit rien à une quelconque censure, mais simplement à la nécessité de rendre l’antenne en temps imparti. Ce qui n’a pas empêché la chaîne de revenir sur la présence des CRS dans son édition du soir.

FAKE OFF

Comme on l’entend très brièvement au tout début de l’extrait, la présentatrice débute sa phrase par « avant de refermer ce journal », signe que le JT est sur le point de s’achever. L’extrait en question intervient en effet à moins d’une minute du rendu d’antenne, comme on peut le vérifier sur le replay de France 3 Régions, long de 19 minutes 46.

France 3 Nouvelle-Aquitaine est en effet obligé de tenir les délais qui lui sont imposés, comme l’explique à 20 Minutes sa déléguée au numérique, Delphine Vialanet : « L’obligation de rendre l’antenne est mécanique. Les JT régionaux sont diffusés lors d’un décrochage de l’antenne nationale, on nous dit : "aujourd’hui, vous avez l’antenne pour un JT qui va faire 19 minutes 43 ou 19 minutes 12", et, à la fin, le national reprend la main. »

« En l’occurrence, comme il restait 30 secondes d’antenne, l’équipe a décidé de refaire un petit point sur la situation [à la rocade de Bordeaux]. Mais, dans le brouhaha ambiant et avec la tension qui régnait sur place, la journaliste n’entendait pas qu’on lui disait "il faut que tu coupes" dans l’oreillette, et elle s’est lancée dans une explication plus longue que prévu. Elle a donc été coupée de manière un peu abrupte par la journaliste en plateau, mais pas par rapport à ce qu’elle disait » poursuit-elle.

La chaîne s’est en outre expliquée en commentaire Facebook et a remercié Pierre Guillaume Crenou, un collègue de France 3 Bretagne, d’expliquer pourquoi le direct avait été coupé.

Une couverture assurée le soir même

Les accusations de « censure » sont d’autant plus injustifiées que, le soir même, dans son JT du 19/20, France 3 Nouvelle-Aquitaine revenait longuement sur l’évolution de la situation à la rocade de Bordeaux. Et notamment sur l’intervention des fameux CRS arrivés avec « leurs matraques et leurs boucliers ».

Un reportage (à partir de 2 :30) les montre en train de faire face aux manifestants, sans heurts, avec ce commentaire : « Sur le barrage, l’ambiance est bon enfant. Et quand les CRS se mettent en place, on tente le dialogue. Les voitures passent au goutte-à-goutte. […] En début d’après-midi, CRS et policiers ont finalement quitté le barrage, laissant les gilets jaunes seuls. »

Le retour des forces de l’ordre, plus tard dans la journée, est en outre ensuite évoqué par la journaliste en plateau pour réintroduire un duplex de sa collègue : « Où en est la situation à cette heure ? Les forces de l’ordre sont revenues et je crois que la tension est montée d’un cran aussi… ».



« Ici, sur le pont d’Aquitaine, les forces de l’ordre sont revenues vers 18 heures, elles ont été accueillies par les slogans des gilets jaunes, qui leur ont demandé de se joindre à eux. Et puis on a entendu la Marseillaise et le leitmotiv de cette journée, « Macron démission ». A l’heure où je vous parle, [elles] sont reparties, on sait que le péage de Virsac a été libéré, les manifestants ont été délogés avec des fumigènes, mais ici pour l’instant, plus de police » lui explique alors la journaliste présente sur place.

Loin d’avoir « censuré » un direct pour « taire » l’arrivée de CRS, France 3 Nouvelle-Aquitaine a donc bien assuré le suivi de la mobilisation sur la rocade de Bordeaux (et ailleurs en région) lors de ses différentes éditions. « C'est une non-polémique pour nous » conclut Delphine Vialanet, alors que les gilets jaunes de Bordeaux entendent continuer leur mobilisation

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