Illustration d'une femme utilisant un smartphone. — FRED SCHEIBER / 20 MINUTES

VIOLENCES CONJUGALES

Toulouse : Le « téléphone grave danger », un outil utile mais loin d’être suffisant

Béatrice Colin

Depuis quatre ans, cinq « téléphones grave danger » sont mis à disposition des femmes victimes de violences conjugales en Haute-Garonne

  • Dans le cadre du grenelle des violences conjugales, Marlène Schiappa a indiqué qu’elle voulait que le dispositif « téléphone grave danger », mis à disposition des victimes, soit plus utilisé.
  • La Haute-Garonne dispose de cinq appareils de ce type. Depuis janvier, ils ont été remis à six reprises à des victimes.
  • Pour les associations, ce dispositif s’il peut être utile, doit surtout être complété par le déploiement de bracelets électroniques portés par les auteurs.

Elle avait déjà déposé une main courante contre son conjoint en mai dernier pour des violences conjugales. Dimanche 25 août, Eliane, une jeune femme de 26 ans, est morte dans le quartier Saint-Simon à Toulouse, victime d’une vingtaine de coups de couteau pour lesquels son compagnon a été mis en examen.

Depuis le début de l’année, 15 féminicides ont eu lieu en Occitanie, soit deux de plus que sur toute l’année 2018. « Il faut changer les choses car ce n’est pas acceptable », a relevé mardi le préfet de la Haute-Garonne, Etienne Guyot, lors d’une rencontre avec les associations à l’occasion de l’ouverture du Grenelle consacré à la lutte contre les violences conjugales.

Dans leurs témoignages, deux femmes victimes ont pointé du doigt la complexité du parcours pour quitter leur conjoint, la longue errance d’hôtel en hôtel donnant l’impression à l’une d’elle que c’est lui qui « avait gagné ». Mais aussi le sentiment d’insécurité face au risque de récidive, demandant la mise en place par exemple d’un téléphone spécifique après le dépôt d’une plainte.

Un dispositif qui existe déjà, mais qui est très peu déployé comme l’a souligné récemment la secrétaire d’Etat à l’Egalité femmes-hommes, Marlène Schiappa. Depuis novembre 2015, la Haute-Garonne dispose de cinq de ces appareils « téléphone grave danger ». Géolocalisés, ils permettant aux femmes victimes de violences d’accéder à une plateforme téléphonique 24h/24 en appuyant sur une simple touche.

Remis à six victimes depuis janvier

« Ils sont utilisés et nous n’avons jamais été confrontés à un manque d’appareils. Depuis le début de l’année, nous en avons remis à six reprises, ils ont parfois été restitués lorsque le danger a été écarté, notamment lorsque l’auteur s’est trouvé sous écrou. Depuis leur mise en service, à deux reprises, ils ont été déclenchés. Une fois il a permis l’arrestation du conjoint, la seconde fois, la victime a pu être raccompagnée chez elle par la police », explique Françoise Passuello, la directrice de France Victimes, association d’aide aux victimes qui rend un avis sur leur mise à disposition.

Mais cette technologie arrive « en bout de chaîne » et est mise en place lors de situations graves. Comme récemment lorsque les services pénitentiaires ont eu écho qu’un détenu devant sortir affirmait qu’il serait bientôt de retour derrière les verrous suite aux violences qu’il comptait faire subir à sa femme.

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« Les femmes qui l’ont utilisé indiquent que cela leur a permis de reprendre confiance, de se sentir en sécurité. Mais c’est aussi très contraignant, car il est géolocalisé, elles doivent dire notamment si elles partent en vacances », explique Sophie Troianiwski de France victimes.

Déployer des bracelets électroniques

Cet outil a fait ses preuves, mais n’a pas toujours permis d’éviter le pire. Comme en juillet 2018 en Alsace, lorsqu’une femme battue de 36 ans est morte sous les coups de son mari alors qu’elle était détentrice d’un « téléphone grave danger ».

« Toutes les femmes n’ont pas la possibilité de le déclencher et avec ce système, on refait porter aux victimes le devoir de se protéger. Il ne sert à rien seul, il faut que les auteurs portent des bracelets électroniques et  qu'il y ait unservice d’aide aux victimes d’urgence dans tous les commissariats, pour que lors de leur dépôt de plainte, les victimes s’y sentent en sécurité », plaide Sarah Sanders, psychologue au sein de   l’Association commingeoise de contrôle judiciaire socio-éducatif.

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