Le diesel, la plus belle invention depuis l’amiante…

Charlie Hebdo – 01/11/2017 – Guillaume Erner –
On a inventé la roue, mais ça, c’était un détail. Et puis on a fabriqué la voiture diesel, et là, véritablement, l’humanité a fait un grand bond en avant. Et grâce à qui ? Au génie français, car il fallait sa force, sa puissance, pour créer ce machin à produire des particules cancérigènes.

Comme pour la poubelle, le moteur diesel a été inventé par un monsieur qui lui a donné son nom, allemand de son état. A l’origine, il était destiné à motoriser les bateaux ou des camions, là ou on a besoin de « couple », autrement dit de puissance. Car l’intérêt du moteur diesel, c’est qu’il est particulièrement adapté aux travaux de force. Voilà pourquoi il n’a rien à faire, à priori, dans une voiture. Du coup, il a fallu des années de recherche aux ingénieurs pour forcer ces pauvres pistons carburant au gazole à carburer comme s’ils étaient alimentés en super. Un peu comme si on entraînait un âne à gagner le prix de l’Arc de triomphe… Peugeot remporta à cet égard une victoire décisive en 1959, avec la 403. A la suite de cela, les constructeurs allemands et français se sont lancés dans une compétition pour améliorer les performances de ce moulin, à l’origine tout juste on à labourer les champs.
Turbo diesel, HDi, common rail, tout y est passé, on a créé des moteurs OGM, destinés à aller contre leur nature, au risque de fabriquer des ensembles de plus en plus fragiles pour leur permettre de fonctionner au diesel. Car, pour la première fois dans l’histoire de l’humanité, la technique s’est adaptée à la fiscalité. C’est cela, le miracle français : conduire tout une filière à préférer le diesel. avec des résultats surprenants : au sommet de sa gloire, ce type de moteur représentait 77 % de ventes de voitures dans l’Hexagone . La même année, en 2008, cette motorisation ne concernait qu’une voiture sur deux en Europe, tandis qu’aux États-Unis, le diesel n’a jamais eu qu’une place anecdotique.   
Que se serait-il passé si on avait augmenté la TVA sur l’eau et baissé celle sur le Coca ? Bon, soit, la comparaison est excessive puisque les moteurs fonctionnant au super polluent – mais ceux qui consomment au diesel polluent encore plus. Il a donc fallu tout le génie français pour inciter Renault, Peugeot et consorts à inonder la France de particules fines. Parce que le moteur diesel ne peut pas ne pas nous tue, c’est cela la vraie leçon du « dieselgate ». Souvenez-vous, quand l’affaire a éclaté en septembre 2015. A l’époque, cela se déroulait chez Volkswagen sur une poignée de véhicules, ou presque : 11 millions… Un logiciel truqué « comprenait » qu’on lui faisait passer un test visant à mesure les émissions polluantes, le logiciel mettait alors le moteur en mode « triche ». A l’époque, les éléments de langage pour défendre le diesel étaient directement importés de Fukushima. Le style Fukushima, ça consiste à dire : au japon, les centrales nucléaires ne sont pas sûres, alors qu’en France, nous, on est sérieux… Du coup, on a tranquillement expliqué que les constructeurs allemands n’étaient pas des gens fréquentables, tandis qu’en France…
Deux ans plus tard, la vérité apparaît sous forme de grosses particules. tous les constructeurs ou presque ont magouillé. Résumons-nous : Volkswagen a avoué, donc Audi, Seat Skoda et Porsche ont trafiqué les tests. Renault et Peugeot-Citroën sont fortement soupçonnés d’avoir triché, et une récente enquête nous apprend que Fiat-Chrysler, c’est-à-dire aussi Jeep, Alfa Romeo et Lancia ont soigneusement camouflé combien leurs moteurs diesels nous asphyxiaient. Avant, on mentait comme un arracheur de dents, maintenant, on ment comme un constructeur automobile, et ce qui passait il y a trois ans pour le mensonge d’un ingénieur radicalisé apparaît désormais comme le plus gros mensonge industriel de tous les temps, une triche totale, systématique et sans complexe.
Heureusement, les voiture diesels vont être interdites. En 2040, c’est-à-dire quand nous serons tous morts, ou presque. Ça ne vous fait pas envie, cette belle perspective pour la Toussaint 2040 : des cimetières débarrassés de toutes particules fines ?

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