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Immigration. Pierre Laurent rencontre Moussa Camara en prison et exige sa libération

Le secrétaire national du PCF a rendu visite, hier, au jeune Guinéen incarcéré à Lyon à la suite de son refus de monter dans l’avion qui devait l’expulser vers ses bourreaux. Il en a profité pour présenter le « Manifeste pour une France hospitalière ».

Persécutions homophobes, exil, rétention, prison… Le calvaire de Fodé-Moussa Camara semble interminable. Accusé d’avoir crié et de s’être débattu pour ne pas monter dans l’avion qui devait le renvoyer en Guinée-Conakry, ce jeune circassien de 30 ans est incarcéré, depuis le 3 mai, à la maison d’arrêt de Lyon-Corbas (Rhône), à la suite d’une comparution éclair devant la justice. Hier matin, le sénateur communiste et secrétaire national du PCF, Pierre Laurent, a tenu à le rencontrer derrière les immenses murs jaunes et gris de cette prison nouvelle génération. « Il faut tout faire pour le sortir de là, a lancé le sénateur à l’issue de sa visite. La mobilisation doit s’amplifier pour exiger sa libération. »

Après la visite très encadrée du lieu de détention, vers midi, Pierre Laurent se rend enfin dans la salle des parloirs normalement dédiés aux avocats. Moussa l’attend déjà, assis sur une chaise. Petites dreadlocks sur la tête, tee-shirt blanc et jogging gris, il paraît extrêmement fatigué. Les deux hommes s’isolent pendant une quinzaine de minutes. Le jeune Guinéen revient sur les violences subies dans son pays. Il raconte comment son compagnon est mort lynché puis brûlé vif devant ses yeux. Il évoque les coups qu’il a lui-même reçus lorsque, dans son pays, son homosexualité a été découverte. Il témoigne des amitiés qui se sont forgées au sein de l’association Aides, à Nîmes, où il a séjourné depuis son arrivée en France, en 2015. Et dit aussi son angoisse d’être enfermé ici, ses difficultés à dormir et à manger depuis son placement en détention préventive et dans l’attente de son jugement, le 12 juin prochain.

La situation de Moussa est à l’image de ces milliers de jeunes rejetés

« Aucun fait de délinquance ne lui est reproché, a insisté Pierre Laurent. Il a juste refusé de monter dans un avion. Moussa n’a rien à faire dans une telle prison. » Il s’agit d’un établissement carcéral construit en 2009, prévu pour accueillir 690 personnes, et qui compte aujourd’hui 900 détenus. Le quartier des femmes atteint même un taux de surpopulation de 160 %. Les cellules de 9 mètres carrés sont parfois occupées par trois prisonniers. « Nous avons une population pénale très hétérogène avec des personnes qui représentent une dangerosité importante, a expliqué le directeur, Emmanuel Fenard. 40 % des personnes incarcérées ici le sont pour des faits de violence. »

Rien à voir avec Moussa, qui tente de tenir le coup. L’homme de 72 ans qui partage sa cellule lui lit chaque jour les courriers de soutien qu’il reçoit et lui achète de quoi manger à la cantine, le jeune Guinéen ne disposant d’aucune ressource financière.

« La situation de Moussa est à l’image de ces milliers de jeunes que la France n’accueille pas dignement. Ce n’est pas en prison qu’il pourra bénéficier de la prise en charge dont il a besoin », a dénoncé le dirigeant communiste à sa sortie, avant de rappeler les grandes propositions du « Manifeste pour une France hospitalière et fraternelle, une Europe solidaire », dont vient de se doter le PCF. Un document travaillé avec des associations pendant près d’un an, qui avance des propositions concrètes pour de nouvelles politiques migratoires en France et en Europe. Les communistes appellent notamment à ce que la France prenne toute sa part dans l’édification du pacte international pour les migrations, initié en septembre 2016 par l’ONU, et qui pourrait voir le jour à l’occasion de la conférence intergouvernementale devant se tenir, fin 2018, au Maroc. Ils y font également une série de propositions concrètes pour un accueil digne des exilés, pour une intégration réussie et l’accès au travail, à la santé, aux transports, ou à l’apprentissage du français.

Car les annonces avancées mardi par le gouvernement pour « mieux intégrer les étrangers » sont loin d’avoir convaincu Pierre Laurent. « Elles ne peuvent pas être effectives si les gens ne sont pas véritablement accueillis », a-t-il lancé, rappelant que le projet de loi asile et immigration arrive sur les pupitres des sénateurs, et sera discuté dans l’Hémicycle le 19 juin. « Quand quelqu’un dort dans la rue, c’est impossible de lui apporter un véritable accompagnement sanitaire, linguistique ou administratif. Pour le faire, il faut créer des centres de premier accueil inconditionnel. La volonté du gouvernement est de restreindre toujours plus les conditions d’accès à l’asile et d’organiser des expulsions massives, estime Pierre Laurent. Même lorsqu’un dossier est refusé par l’Ofpra, la personne a le droit de vivre dignement. » Moussa est l’exemple type de ce genre de situation où, après avoir épuisé tous les recours possibles pour obtenir le statut de réfugié, une personne n’en reste pas moins vulnérable et peut être expulsée vers un pays où elle risque d’être maltraitée ou tuée. « Je demande à ce que Moussa Camara soit régularisé et obtienne rapidement une autorisation de travail, a lancé Pierre Laurent lors d’une conférence de presse. « Sa présence parmi nous n’est pas moins légitime que celle de Mamoudou Gassama, qui s’est porté au secours d’un enfant, à Paris. »

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