Accusations de plagiat : Justin Bieber remporte le premier round judiciaire face au groupe français Justice

Accusant le chanteur canadien d’avoir copié son logo sur son nouvel album, le groupe électro français a mis en demeure Universal, en avril, d’arrêter de vendre le disque et ses produits dérivés en France. Débouté en référé, Justice poursuit son combat sur le fond.

Justin Bieber lors des American Music Awards le 22 novembre à Los Angeles . AFP Photo/Courtesy of ABC
Justin Bieber lors des American Music Awards le 22 novembre à Los Angeles . AFP Photo/Courtesy of ABC

    Justin Bieber a surpris tout le monde en annonçant le 26 février dernier qu’il dévoilerait son huitième album « Justice » le 19 mars, seulement un an et un mois après le précédent. Mais ce Canadien francophile, reçu il y a une semaine avec son épouse Hailey Baldwin par Emmanuel et Brigitte Macron à l’Élysée, a aussi étonné et agacé en France le groupe Justice en dévoilant un logo de « Justice » avec le T en forme de croix rappelant celui du duo électronique. À tel point que ces derniers, leur producteur Ed Banger Records et leur maison de disques Because Music ont mis en demeure par voie judiciaire en avril Universal Music et la société Dify Group de cesser de vendre le disque et ses produits dérivés (vêtements, posters…) en France. Accusant Justin Bieber de plagiat, d’atteinte aux droits d’auteur, aux droits des marques et de concurrence déloyale, ils lui réclamaient aussi plus de 450 000 euros.

    Après avoir entendu les avocats le 8 avril, le tribunal de Nanterre a rendu le 15 avril une ordonnance en référé déboutant Gaspard Augé et Xavier de Rosnay, les deux musiciens de Justice, de toutes leurs demandes et les condamnant à payer les frais de justice des parties adverses. Les juges ont estimé qu’il n’y avait pas lieu de légiférer en urgence.

    « Les articles de presse et publications sur les réseaux sociaux produits par les demandeurs font, certes, état de similitudes, mais ne révèlent pas pour autant une confusion entre les artistes en présence, dont les univers musicaux sont clairement distingués », écrivent-ils dans leurs conclusions, ajoutant que « la similitude des signes en présence n’est pas obvie (NDLR : évidente) ».

    Bieber se défend dans un courrier

    Justin Bieber et son équipe n’ont pas pris l’affaire à la légère. Le chanteur s’est lui-même défendu par courrier d’avoir plagié le logo de Justice. « En janvier 2021, j’enregistrais avec Josh Gudwin, mon producteur, pour mon nouvel album. J’avais déjà décidé d’appeler mon album Justice. J’ai commencé à dessiner des logos à main levée dans le studio et les ai envoyés par texto à ma manageuse Allison Kaye. Elle les a transmis au graphiste avec lequel nous travaillions sur le projet, Mikkel Aranas, et, pendant deux semaines, lui et moi avons affiné mes dessins, en les maintenant pour une conception précise, la proportion, le placement, la translucidité et la taille. Le résultat final est le logo tel qu’il apparaît sur mon album aujourd’hui. »

    Son avocat français, Me Marc-Olivier Deblanc, a argumenté sur la différence de notoriété entre les deux artistes, 169 millions d’abonnés sur Instagram et 62,2 millions d’abonnés sur YouTube pour Bieber, 175 000 abonnés sur Instagram et 332 000 abonnés sur YouTube pour Justice. « Il ne peut être sérieusement soutenu qu’il aurait sciemment utilisé le mot JUSTICE pour détourner la clientèle du groupe Justice », dit-il. Il a aussi insisté sur le caractère intime et religieux des chansons de cet album, expliquant l’utilisation de la croix. « Il est conçu comme un album concept autour de ces notions de Justice et de religion. Les onze titres font référence à la religion chrétienne et sa pratique dans le choix des mots, paradis, prière, église et anges. »

    « Ce nouvel album est ainsi l’occasion pour Justin Bieber de réaffirmer sa foi chrétienne », défend son avocat, qui rappelle que l’utilisation d’une croix dans le lettrage T est courante, aussi bien chez des artistes américains de musique chrétienne que chez George Michael ou chez Prince. Un argument entendu par les juges, qui ajoutent pour la partie produits dérivés que « l’usage, dans le milieu musical, de références à la croix latine et de produits promotionnels utilisant des logotypes ou pictogrammes noir sur fond noir n’est pas exclusif au groupe Justice ».

    « Justice est déterminé à faire reconnaître ses droits »

    Reste une question : pourquoi les équipes de Justin Bieber ont-elles pris contact le 29 avril 2020 avec So Me, alias Bertrand Lagros de Langeron, le graphiste français qui avait réalisé le logo de Justice ? Si l’on en croit les défenseurs de la pop star, ça n’était pas pour l’album, mais afin de « concevoir une version stylisée de son nom pour l’utiliser dans le cadre de sa prochaine tournée. »

    Les avocats de Justice n’ont pas fait appel de ce référé, mais devraient poursuivre leurs démarches judiciaires sur le fond. « Notre démarche en référé avait exclusivement pour objectif de faire immédiatement cesser la vente du merchandising et la mention Justice sur l’album de Justin Bieber (…) afin de mettre un terme à l’association et à la confusion massive provoquée par la sortie de cet album, précisent-ils. Cette décision ne préjuge nullement du résultat qui sera rendu au fond sur l’existence d’actes de contrefaçon ainsi que de concurrence déloyale et de parasitisme. Le débat judiciaire demeure entier et Justice est déterminé à faire reconnaître ses droits. »