Argenteuil : le Garac forme à la réparation de voitures anciennes

L’école, qui forme les mécaniciens, ouvre deux nouvelles formations pour réparer les véhicules des années 1980 : l’une de réparateur, l’autre de tôlier.

 Argenteuil. Guillaume Bottcher, responsable des CQP, Benoit Friede, responsable des enseignements professionnels et Laurent Roux, directeur du Garac.
Argenteuil. Guillaume Bottcher, responsable des CQP, Benoit Friede, responsable des enseignements professionnels et Laurent Roux, directeur du Garac. LP/Thibault Chaffotte

    Le Garac ajoute une corde à son arc cette rentrée. L'École nationale des professions de l'automobile, basée à Argenteuil, ouvre deux nouvelles formations portant sur les véhicules anciens et historiques : l'une de mécanicien réparateur, l'autre de tôlier. « L'établissement s'est doté de matériel, les équipes sont prêtes », souligne Laurent Roux, le directeur du Garac. Les étudiants font leur rentrée cette semaine.

    L'établissement propose dix places dans chaque formation, et presque toutes sont prises. « Généralement, ce sont des mordus. Ils ne sont pas tombés là par hasard, ils savent ce qu'ils veulent faire ensuite », ajoute-t-il. Ils viennent de bac pro ou BTS et sont âgés de 18 à 45 ans.

    «Je prends plus de plaisir sur les vieux véhicules»

    Maxime Dias, 18 ans, s'est engagé dans la formation de tôlier pour, dit-il, « donner une seconde voire plusieurs autres vies aux voitures anciennes ». Biberonné à la mécanique enfant par son grand-père notamment, le jeune homme, déjà titulaire d'un BAC Pro en carrosserie/réparation, aidait petit son père pour réparer sa 205 GTi.

    « Je prends plus de plaisir sur les vieux véhicules que les récents, la méthode de travail est totalement différente. Sur les nouveaux, vous enlevez trois boulons et vous changez l'aile. Sur les anciennes voitures, il faut dessouder, dégriffer, déformer la tôle… Cela demande plus de minutie », juge Maxime.

    Déjà en alternance dans un garage proche de Saint-Quentin (Aisne), l'apprenti originaire de la Croix-Verte pourra sans doute faire valoir sa formation dans un milieu qui manque de main-d'œuvre sur cette spécialité. « Ça fait plusieurs années qu'on nous demande si on a ce type de formation », indique Laurent Roux.

    Ces compétences se perdent avec les départs à la retraite

    C'est le l'association nationale pour la formation automobile et le Conseil national des professions de l'automobile qui ont créé ces deux nouveaux certificats de qualification professionnelle (CQP) après avoir constaté un besoin croissant dans ce domaine. « Il y avait des formations complémentaires sur des initiatives locales, mais pas de titre de branche », précise-t-il. Les deux CQP seront dispensés par quatre établissements en France dont le Garac, qui est seul francilien.

    Argenteuil. Cette NSU Ro 80 va bientôt retrouver une deuxième jeunesse. LP/Thibault Chaffotte
    Argenteuil. Cette NSU Ro 80 va bientôt retrouver une deuxième jeunesse. LP/Thibault Chaffotte LP/Thibault Chaffotte

    Si ce type d'enseignement est demandé, c'est principalement parce que les personnes capables d'effectuer des réparations sur ces véhicules sont aujourd'hui âgées. Et les garagistes formés ces dernières années n'ont pas les compétences pour les faire. « Il y a eu une transition technologique si forte ces dernières années que c'est très différent de ce qu'ils font aujourd'hui », souligne Guillaume Bottcher, responsable des CQP au Garac. « Aujourd'hui, quand on répare, on prend une pièce et on la remplace », complète Benoît Friede, responsable des enseignements professionnels. Il prend en exemple une vénérable Renault 15 à la carrosserie rouillée, qui trône dans l'atelier. « Cette aile de R15, si elle n'existe pas, il va falloir la recréer », ajoute-t-il.

    En revanche, les véhicules sont encore là. Et l'engouement du public aussi. Quand l'établissement a lancé les 3 Heures du Garac il y a six ans, il cherchait un moyen d'attirer le public. On leur a suggéré de mettre des voitures de collection dans la cour. Chaque année leur nombre augmente - 300 véhicules y ont participé l'année dernier - et l'événement rassemble plus de 1 000 personnes tous les ans (cette année il a lieu le samedi 19 septembre).

    Argenteuil. Ce Peugeot DK5 a besoin d’une bonne restauration. LP/Thibault Chaffotte
    Argenteuil. Ce Peugeot DK5 a besoin d’une bonne restauration. LP/Thibault Chaffotte LP/Thibault Chaffotte

    Le véhicule ancien a aussi bénéficié de l'arrivée de nouvelles émissions de télévision consacrée à leur restauration comme « Vintage Mecanic » sur RMC ou « Wheeler Dealers » sur RMC découverte. Il s'agit aussi d'un loisir qui est plus accessible financièrement. Les youngtimers - modèles des années 1980 à 90 - permettent de se lancer avec un budget modeste. Une Austin Mini peut d'échanger pour moins de 5 000 €.

    Pour former ses étudiants, le Garac s'est lui aussi constitué une petite collection. Seize véhicules attendent d'être remis en état dans les ateliers. Parmi eux, un camion Peugeot DK5 qui date des années 1930 ou 40, une camionnette Chenard et Walcker dit « Nez de cochon » et une NSU R0 80, berline allemande atypique des années 1970. D'ici à quelques années, les étudiants devraient parvenir à en faire de véritable petit bijou. Avant même la mise en place de cette filière, les étudiants du Garac avaient restauré une Fiat 500. La première d'une lignée.

    «La mécanique à l'ancienne se perd»

    Virgil Dos Reis a eu des centaines de voitures entre les mains. Le patron du garage Peinture-Auto, à Argenteuil, a vu son métier évoluer depuis ses débuts, en 1980. « Maintenant, dès qu'un truc ne va pas, vous changez tout et c'est terminé, lance le mécano. Avant, vous ouvriez le capot et puis vous arriviez à vous en sortir même si vous ne connaissiez pas le véhicule. La mécanique à l'ancienne se perd. »

    Dans son garage, qu'il a repris il y a sept ans, Virgil Dos Reis répare seulement quelques véhicules anciens. Faute de temps, de place… et de mains d'œuvre. « Les jeunes qui arrivent ne savent plus faire, ce n'est plus le même métier, juge-t-il. Dans le temps, vous pouviez bidouiller, changer deux trois choses. Aujourd'hui, il faut presque un BAC + 6 pour réparer un véhicule récent, tellement il y a d'électronique ! »

    «Un moyen de faire perdurer ce savoir-faire»

    Le garagiste voit d'un bon œil l'ouverture de la nouvelle formation de l'école nationale des professions de l'automobile (Garac), destinée à former jeunes et moins jeunes à la réparation de véhicules anciens. « Cela peut offrir plus de possibilités de recrutement pour les professionnels comme moi, et faire perdurer un savoir-faire, estime Virgil Dos Reis. A l'avenir, il n'y aura que les passionnés qui toucheront aux vieux véhicules. Cela va disparaître… A part pour les voitures de collection. »