Tribunal. Homicide involontaire sur un chantier : mise en délibéré au 20 novembre

Par Tiphaine Kervaon

C’est une affaire complexe qui a occupé le Tribunal de grande instance de Brest, lors de l’audience de ce mardi 18 septembre. Un an après un homicide involontaire dans le cadre du travail, la même entreprise, sur le même chantier, situé quai Dupleix, à Quimper, devait répondre d’un autre accident du travail grave. Le jugement, mis en délibéré, sera rendu le 20 novembre.

C’était le 21 mai 2015, l’ouvrier travaillant au premier étage de cette bâtisse, sur les quais de l’Odet, était tombé dans le vide.
C’était le 21 mai 2015, l’ouvrier travaillant au premier étage de cette bâtisse, sur les quais de l’Odet, était tombé dans le vide.

Après un premier accident aux conséquences dramatiques, survenu le 21 mai 2015 à Quimper, l’entreprise qui employait la victime se rend à nouveau responsable de blessures involontaires sur le même chantier, qui avait repris plusieurs mois après les faits. Cette fois plusieurs blessés, dont un grave, sont à déplorer. Mis en cause, un chef d’entreprise en tant que personne physique, ainsi que son entreprise de maçonnerie en construction et en rénovation, en tant que personne morale. Le premier accident avait déjà mis au jour différents manquements graves à la sécurité. Des manquements qui n’avaient pas été comblés lors de la reprise du chantier. Un second accident a lieu le 29 janvier 2016.

L’entreprise mise en cause était missionnée dans le cadre de la rénovation d’une ancienne maison bourgeoise située quai Dupleix, à Quimper. Le bâtiment est ancien et a subi d’importantes infiltrations d’eau. Le 21 mai 2015, le chef d’équipe travaille sur un échafaudage situé à plusieurs mètres de hauteur. Afin de scier des tiges de sécurité, il est amené à ôter un garde-corps faisant office de protection collective. Ne disposant ni de harnais ni d’aucune autre forme de protection personnelle, il chutera du premier étage, la tête la première. Son casque, non maintenu par un cordon jugulaire, tombant dans sa chute, il décédera sur le coup d’un traumatisme crânien majeur.


Un ouvrier enseveli sous un pan de mur qui s’effondre


Le chantier reprendra plusieurs mois plus tard. Entre-temps, un expert, mandaté par l’entreprise ainsi que l’inspection du travail, avaient formulé diverses préconisations pour renforcer la sécurité sur le chantier. Les dispositions à appliquer sur-le-champ ne seront cependant pas respectées. Encore une fois, les ouvriers intervenant sur le chantier ne sont pas formés. Le matériel de sécurité apparaît insuffisant. Enfin, la communication sur le déroulement du chantier et sur les mesures de prévention et précautions à suivre au fil des opérations reste essentiellement orale. Le plan d’intervention n’est pas visible sur le chantier, ni même dans un local de chantier, il n’y en a pas. Les ouvriers se changent dans la cave du bâtiment à rénover. Le 29 janvier 2016, alors que trois ouvriers interviennent dans la démolition d’un mur, un pan de celui-ci, insuffisamment sécurisé, s’effondre. L’un des ouvriers n’a pas le temps de s’échapper et finit enfoui sous les décombres. Extrait par un collègue, il en ressort avec de multiples blessures.

L’enquête consécutive à ces derniers faits révélera de nombreux points noirs qui s’ajouteront à la liste déjà longue d’infractions constatées après l’homicide involontaire. Les ouvriers, salariés ou intérimaires, n’ont suivi aucune formation de prévention. Ils ont pourtant tenté d’alerter sur la dangerosité du chantier et sur la fragilité du matériel et notamment des casques qui ne protègent pas les ouvriers en cas de chute. Le matériel de sécurité collectif est insuffisant, occasionnant des « bidouilles » approximatives pour assurer les différentes étapes du chantier. Quant au matériel de sécurité individuel, de type harnais, il est simplement absent. Enfin, le plan d’intervention n’est pas visible ni appliqué. Aucune vérification des installations de sécurité n’est assurée.

Face aux diverses accusations, le chef d’entreprise persistera, lors de l’audience de ce mardi, à considérer qu’il a fait ce qu’il avait à faire, c’est-à-dire transmis les documents et informations nécessaires, essentiellement par voie orale, à des hommes en qui il avait « toute confiance ». Les défaillances pointées, il dit ne pas les comprendre. Son entreprise encourt une amende de 40 000 € et l’obligation d’affichage de la décision de justice pendant un minimum de deux mois. Le chef d’entreprise risque quant à lui six mois d’emprisonnement avec sursis et une amende délictuelle de 5 000 €. La décision, mise en délibéré, sera rendue le 20 novembre à 13 h 30.

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