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Non, les vaccins n’ont pas causé 850 morts, comme l’affirme Jean-Frédéric Poisson

La pandémie de Covid-19 en Francedossier
Confondant signalements pour enquête et cas avérés, l’homme politique a été rapidement contredit par le journaliste Loïc Signor sur le plateau de CNews.
par Florian Gouthière
publié le 10 août 2021 à 14h34

Question posée le 08/08/2021.

«Ce n’est pas moi qui le dis, c’est l’agence nationale de sécurité du médicament.» Se référant à «la page 8» d’un document de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), Jean-Frédéric Poisson n’a pas démordu, jeudi sur CNews : la vaccination serait directement responsable de près de 900 morts en France.

L’animateur de l’émission, Loïc Signor, peinant à masquer son agacement, alerte son invité : «Vous n’avez pas les bons chiffres. […] Il n’y a pas 857 morts dus à un vaccin Pfizer en France : il y a peut-être 857 cas où cela pose problème, mais ce ne sont pas des cas avérés de décès suite au vaccin !» Poisson persiste et signe : «Chers téléspectateurs, l’animateur est en train de me prendre pour un illettré. J’en suis désolé, je n’y peux rien : je lis un document que vous pouvez lire. Donc vous lirez : Pfizer, 761 décès ; AstraZeneca, 98 décès.»

Problème : comme l’a correctement souligné Loïc Signor, les cas listés dans cette partie du document correspondent aux cas transmis aux centres de pharmacovigilance pour investigation (jusqu’au 1er juillet 2021), et non les cas pour lesquels le lien de cause à effet a été établi.

Dans les pages précédant le tableau consulté par Poisson (tiré du rapport sur le vaccin Pfizer) se trouvent plusieurs informations qui semblent avoir échappé à sa vigilance. Ainsi, on peut lire qu’«au vu des éléments transmis et de l’analyse détaillé des cas de décès transmis, les décès survenus dans la population de patients de moins de 50 ans n’apportent pas, dans leurs caractéristiques, d’éléments en faveur d’un rôle de la vaccination.» Un constat identique était déjà dressé dans un précédent rapport, pour les plus de 50 ans, que les nouvelles données ne remettent pas en question.

Investigations en cours

Les auteurs du rapport ont notamment confronté le nombre de décès signalés dans la population vaccinée au nombre de décès qui surviennent habituellement (c’est-à-dire hors campagne de vaccination), pour le même type de pathologies, dans une population d’âge et de taille comparable. «Le nombre de cas de décès hors COVID rapporté au nombre de cas de décès déclaré au système de pharmacovigilance français est très inférieur au nombre de cas attendus de décès dans la population correspondante, soit en termes de mortalité totale (3% des cas attendus), soit en termes de morts subites ou sans cause identifiées (20% des cas attendus).»

Et d’aboutir à une conclusion, inscrite en gras dans le document : «aucun signal de [pharmacovigilance] concernant la mortalité n’est identifié à ce jour à partir des données françaises de notification spontanée.» Les auteurs précisent que les décès survenus chez les sujets d’âge inférieur à 50 ans «continueront à faire l’objet d’une analyse lors des prochains rapports.»

Les enquêtes relatives aux vaccins Pfizer, Moderna et Janssen aboutissent à des conclusions analogues – le rapport de synthèse soulignant dans les trois cas que «concernant les cas de décès déclarés, les données actuelles ne permettent pas de conclure qu’ils sont liés au vaccin.» S’agissant du vaccin AstraZeneca, sur 171 décès signalés depuis le début de la campagne de vaccination, plusieurs cas de morts subites et inexpliquées, ainsi que liés à des thromboses, restent en cours d’investigation.

La confusion entre cas signalés à la pharmacovigilance et évènements imputables à la vaccination alimente fréquemment les discours hostiles à la vaccination. La même erreur est ainsi à l’origine d’une fausse nouvelle selon laquelle l’Agence européenne du médicament imputerait plus de 17 000 décès à la vaccination.

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