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Abandon de Benjamin Griveaux : ce que l’on sait des vidéos et de Piotr Pavlenski

ÉCLAIRAGE - L'artiste contestataire russe a revendiqué avoir publié des vidéos intimes et un article pour critiquer l'"hypocrisie" de Benjamin Griveaux provoquant un séisme politique.

Benjamin Griveaux, le 27 janvier 2020 Crédit : MARTIN BUREAU / AFP
Aymeric Parthonnaud

C'est la publication qui a fait basculer la campagne électorale à Paris. Le 12 février 2020 sur le site internet très confidentiel "PornoPolitique", un article sobrement intitulé "Benjamin Griveaux" est publié. Il est signé de l'artiste et militant russe Piotr Pavlenski qui réside en France depuis plusieurs années depuis l'obtention de son asile politique en France.

L'article souhaitait pointer du doigt une certaine incohérence entre le discours public de Benjamin Griveaux et ses pratiques personnelles, intimes. Après une rapide présentation de l'homme politique et de son passage de gauche au Parti socialiste vers la République en marche du "néo-libéral Macron", Piotr Pavlenski s' est attaqué à la vie familiale de Benjamin Griveaux. 

"Dans sa campagne, Benjamin Griveaux souligne à plusieurs reprises sa foi fanatique dans les valeurs familiales. La famille et les enfants sont tout pour lui et donnent un sens à son activité politique", écrit Piotr Pavlenski avant de partager des extraits de diverses interviews dans lesquelles le candidat Griveaux mettait en avant sa compagne et ses enfants décrits comme les sources de son engagement politique. "Et voici le paradoxe, note l'article de PornoPolitique. En parallèle de ses déclarations très médiatisées, il écrit dans l'une de ses correspondances avec une jeune fille, que la famille et les enfants sont une prison."

Suivent ensuite de nombreuses vidéos et captures d'écran dans lesquelles on peut voir un échange de messages intimes sur les réseaux sociaux entre un homme et une femme qui n'ont pas été formellement identifiés. L’artiste russe, réfugié en France, a confirmé à nos confrères du journal Libération vouloir "dénoncer l’hypocrisie" de l’ex-porte-parole du gouvernement. Il affirme tenir cette vidéo d’une "source" qui avait une relation consentie avec Benjamin Griveaux.

Nudité, douleur et contestation

Piotr Pavlenski est un artiste et militant politique particulièrement connu pour ses performances violentes et spectaculaires. Il souhaite, c'est une constante dans son oeuvre, critiquer le pouvoir et toutes les formes d'autorités. Pour sa première action en 2012, il s'est cousu les lèvres en soutien aux Pussy Riot, condamnées pour une "prière punk" dans la cathédrale du Christ-Sauveur. En 2013, il s'est enroulé nu dans du fil barbelé devant l'Assemblée législative de Saint-Pétersbourg. La même année, il s'est cloué le scrotum devant le Mausolée de Lénine sur la Place rouge pour critiquer une certaine passivité de la société qui reste "le cul assis devant la télé". En juin 2016, Pavlenski, qui se revendique de "l'art politique", avait fait sept mois de détention puis avait été condamné à une amende pour avoir "endommagé" la Loubianka, siège historique des services de sécurité russes.

L'artiste russe a importé son esprit contestataire jusqu'en France où il a, par exemple, incendié la façade d'une succursale de la Banque de France en 2017. Pavlenski a été condamné en janvier 2019 à trois ans de prison, dont 2 ans avec sursis pour cet incendie volontaire. 

"A travers ses actions, il met en évidence ce à quoi on s’est habitué : la domination brutale et sans partage d’une caste de dirigeants, l’idéologie haineuse et hypocrite qui s’insinue dans tous les aspects de la vie, la censure", juge l’essayiste Michel Eltchaninoff qui a préfacé le livre de l'artiste russe Le cas Pavlenski édité chez Louison Editions en 2016.

Griveaux et la classe politique condamnent

L'effet de cette publication et son caractère viral sur les réseaux sociaux ont eu raison de la candidature de Benjamin Griveaux. Le candidat macroniste à la mairie de Paris a retiré sa candidature le 14 février. Après avoir condamné des "attaques ignobles", il a "décidé de retirer [sa] candidature à l'élection municipale parisienne". Et d'ajouter : "Cette décision me coûte mais mes priorités sont très claires. C'est d'abord ma famille, vous l'aurez compris", a déclaré le candidat de La République en Marche dans une vidéo enregistrée en début de matinée au siège de l'AFP.

De nombreux responsables politiques ont fermement condamné vendredi la diffusion sur le web de ces vidéos intimes à l'origine du retrait de Benjamin Griveaux, une méthode "indigne"  et une "menace pour la démocratie" selon eux. "L'attaque indigne qu'il subit est une menace grave pour notre démocratie", a ainsi tweeté le candidat dissident à la mairie de Paris Cédric Villani. La maire socialiste de Paris Anne Hidalgo, candidate à sa propre succession, a appelé "au respect de la vie privée et des personnes". "Jusqu'où ira-t-on dans la honte et l'abomination ? Ce n'est plus aux chiens qu'on livre les hommes désormais, mais aux rats planqués au fond des pires égouts", a dénoncé sur Twitter l'ancienne socialiste et Ministre de la culture Aurélie Filippetti.

La députée Olivia Grégoire, l'une des porte-parole du candidat démissionnaire Benjamin Griveaux, a indiqué qu'il y aura "quoi qu'il arrive" une liste LaREM aux élections municipales à Paris. Elle a précisé que l'ancien porte-parole du gouvernement avait pris seul la décision de retirer sa candidature des municipales à Paris après la diffusion des vidéos intimes. "Personne ne l'a forcé", a-t-elle assuré.

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