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Nutrition

Le saumon, à consommer avec modération

S’il demeure une excellente source d’oméga 3, ce poisson accumule aussi des métaux lourds et des polluants. Des labels de qualité permettent d’identifier les spécimens les plus sains.

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BERNARD MARTINEZ POUR SCIENCES ET AVENIR

Frais, fumé, en sushis ou en filet, le saumon est le poisson préféré des Français, juste devant le cabillaud.

(c) Ingedata

FRAIS, FUMÉ, EN SUSHIS ou en filet, le saumon est le poisson préféré des Français, juste devant le cabillaud. Son nom désigne plusieurs espèces, du genre Oncorhyncus, saumons sauvages de l’océan Pacifique ainsi que Salmo salar, le saumon atlantique, variété la plus consommée en Europe. Mais avec la surpêche, les saumons sauvages, qui remontaient les fleuves pour se reproduire en eau douce et dont les plus jeunes migraient vers l’océan pour grandir, se font rares. D’où le recours à l’élevage intensif, la salmoniculture. En France, au moins 80 % des saumons consommés proviennent de Norvège, d’Écosse et d’Irlande. En 2013, après la diffusion d’un documentaire dénonçant les conditions d’élevage en Norvège, les Français avaient boudé ce poisson. Avant que les ventes de saumon frais ne repartent à la hausse (+ 7 % en mars 2016) selon France Agri-Mer. La consommation française de saumon fumé reste également une des plus importantes d’Europe. De quoi rassurer les nutritionnistes car ce poisson demeure une excellente source d’oméga 3. Mais tout n’est pas rose dans le saumon. Prédateur situé en haut de la chaîne alimentaire, il est susceptible d’accumuler dans sa graisse des métaux lourds et des polluants organiques persistants (PCB, dioxines) et des pesticides.

Il est riche en oméga 3…

Le saumon est très riche en deux types d’oméga 3 : l’eïcosapentaénoïque (EPA) et le docosahexaénoïque (DHA) dont le précurseur est l’acide alpha-linolénique (ALA). Différentes études soulignent l’intérêt de ces acides gras polyinsaturés à longue chaîne dans la prévention des maladies cardio-vasculaires et la réduction de la mortalité par infarctus du myocarde (1). Ils permettent de fluidifier le sang, prévenir la formation de plaques d’athérome dans les artères, diminuer la pression artérielle et le taux de triglycérides… Ils pourraient également réduire le risque de démences, principalement sous l’action de la DHA qui joue un rôle essentiel dans le fonctionnement du cerveau (2). En stimulant la microcirculation de l’oreille interne, ils prémuniraient même des troubles de l’audition liés à l’âge comme le suggère une étude sur 65.215 femmes, suivies pendant dix-huit ans (3).

… mais les teneurs sont en baisse

Selon la Société internationale pour l’étude des acides gras et lipides (Issfal), la consommation hebdomadaire de 3,5 g d’EPA et de DHA protégerait des maladies cardio-vasculaires : 100 g de saumon cuit à la vapeur en apportent 1,21 g. Globalement, les poissons d’élevage sont plus gras que les sauvages qui se dépensent davantage, mais leur teneur en oméga 3 tend à diminuer. Autrefois nourris avec des protéines et huiles de poissons, ils mangent désormais 70 % d’aliments d’origine végétale. Résultat : le taux d’oméga 3 des saumons d’élevage écossais est passé de 2,7 g à 1,4 g pour 100 g de chair entre 2006 et 2015 (4). « Ce taux reste cependant sensiblement supérieur à celui du saumon sauvage », souligne Marc Vandeputte, coordinateur des recherches piscicoles à l’Inra.

LEXIQUE :
ALA
L’acide alpha-linolénique est un acide gras essentiel, précurseur de nombreux acides gras polyinsaturés dont le DHA et l’EPA. Comme il ne peut être synthétisé par l’organisme, les besoins doivent être couverts par l’alimentation.
PCB Les polychlorobiphényles sont utilisés pour les isolations électriques et pour leurs propriétés ignifugeantes dans les encres, les peintures et les matières plastiques. Interdits depuis 1987, ils persistent dans l’environnement.
POU DE MER Lepeophtheirus salmonis est un parasite de 6 à 12 millimètres de long qui ronge la peau du saumon jusqu’à créer parfois des plaies ulcérées.

Sauvage ou d’élevage, pas plus d’une fois par semaine

« On peut manger du saumon sauvage comme du saumon d’élevage car si on trouve plus de mercure dans le premier, il y a plus d’intrants et d’antibiotiques dans le second, affirme Charlotte Crastilleur, directrice adjointe à la direction de l’évaluation des risques à l’Agence nationale de sécurité alimentaire (Anses). Mais dans les deux cas, les taux de contamination sont inférieurs aux doses maximales autorisées et les bénéfices apportés par les oméga 3 restent supérieurs aux risques. » Néanmoins, afin de maintenir un bon apport en acides gras essentiels tout en limitant l’exposition à des toxiques, l’Anses recommande de ne consommer du poisson que deux fois par semaine en alternant un poisson gras comme le saumon (ou le maquereau) avec un poisson maigre (5).

Se fier à certains labels

Le Label Rouge, attribué par le ministère de l’Agriculture, garantit que le saumon est de qualité supérieure. Le saumon écossais a été le premier a en bénéficier. Les consommateurs, qui veulent s’assurer d’un impact environnemental réduit des élevages, peuvent se référer au nouveau label français Pêche Durable. Attention : le label bio n’est pas exempt de polluants. Dans une enquête de décembre 2016, le mensuel 60 Millions de consommateurs a retrouvé quatre résidus de pesticides, interdits depuis longtemps, dans des pavés de saumon bio frais de Norvège et d’Irlande, en quantité plus importantes que dans les saumons conventionnels (6). En cause, leur alimentation davantage à base de farines et huiles provenant de poissons sauvages. En revanche, il y a moins de toxiques dans les saumons fumés dont les tissus graisseux ont été retirés.

Varier les préparations pour éviter les calories

La chair du saumon fournit de bonnes quantités de protéines, de vitamines D, A, B parmi laquelle la vitamine B12, indispensable au bon développement du système nerveux, des minéraux et des oligoéléments (phosphore, potassium, sélénium, iode, cuivre, fer, zinc…). Mais, en fonction des préparations, le saumon peut être plus calorique qu’il n’y paraît : si 100 g de saumon cru d’élevage fournissent 181 kcal, compter 231 kcal pour la même quantité de rillettes de saumon, 237 kcal pour le carpaccio, et 265 kcal pour 100 g de sandwich au saumon fumé avec du beurre, plus qu’une brochette de bœuf du même poids (7).

Attention au surplus de sel

Les teneurs en sodium du saumon fumé peuvent parfois atteindre 1,9 g pour 100 g, soit près de 5 g de sel, dose journalière maximale recommandée par l’Organisation mondiale de la santé pour prévenir l’hypertension artérielle et les maladies cardio-vasculaires. Modération aussi avec les sushis, surtout en cas de diabète : le riz blanc cuit qui accompagne le saumon cru a un indice glycémique élevé, et augmente le taux de glucose dans le sang.

"De moins en moins d’antibiotiques" - Marc Vandeputte, coordinateur des recherches piscicoles à l'Inra
« En Norvège, les saumons d’élevage sont vaccinés et ne reçoivent quasi plus d’antibiotiques. C’est de l’ordre de 0,9 g par tonne produite. Au Chili, on en utilise 100 fois plus mais il n’y a pratiquement pas de saumon d’élevage chilien vendu en France. Actuellement, le problème numéro un des élevages est l’épidémie de poux de mer qui oblige à traiter les poissons avec des insecticides. On essaie de réduire cette propagation par tous les moyens. Une piste est de mettre dans les bassins des poissons qui se nourrissent des larves de poux. Une autre est d’utiliser des bâches pour empêcher les parasites d’entrer dans les cages à saumons. Mais, pour l’heure, on a besoin de traitements. »

(1) A quantitive analysis of fish consumption and coronary heart disease mortality, Konig A. et al, American Journal of Preventive Medecine, 2005.
(2) The pleiotropic effects of omega-3 docosahexaenoic acid and the allsmarks of alzheimer’s disease, Belkouch M. et al, Journal of Nutritional Biochemistry, 2016.
(3) Fish and fatty acid consumption and the risk of hearing loss in women, Curhan G. et al, American Journal of Clinical Nutrition, 2014.
(4) Impact of sustainable feeds on omega-3 long-chain fatty acid levels in farmed Atlantic salmon, 2006-2015, Sprague et al, Scientific Reports, 2015.
(5) Poissons et produits de la pêche, synthèse des recommandations Anses, 2013.
(6) Saumon : carton rouge pour le bio, n° 521, 2016.
(7) Tables Ciqual (Anses).

Par Brigitte Bègue

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