Santé

Médicaments innovants : les labos accusés de "marges exorbitantes"

Sans jeter l'opprobre sur l'industrie du médicament, le collectif interassociatif de défense des patients dénonce toutefois les marges trop importantes réalisées par les laboratoires sur certains médicaments.

Sujet récurent, le débat sur le coût trop important de nombre de médicaments innovants devraient être inscrit dans la campagne présidentielle de 2017.

©SIERAKOWSKI FREDERIC/ISOPIX/SIPA

Le Ciss, collectif interassociatif de défense des patients, a dénoncé lundi 20 juin 2016 "les marges exorbitantes" réalisées par les laboratoires pharmaceutiques avec les médicaments innovants et réclamé un nouveau mécanisme de fixation des tarifs pour mettre fin à "l'envolée" des prix. L'objectif "n'est pas de jeter l'opprobre sur l'industrie du médicament, mais plutôt de comprendre les ressorts, trop souvent opaques, de l'envolée des prix des traitements 'innovants' qui semble ne plus connaître de limites", prévient le Collectif interassociatif sur la santé (Ciss), réuni en assemblée. Le collectif, qui souhaite inscrire le débat dans la campagne présidentielle, plaide pour que la fixation des prix des médicaments innovants ne soit plus basée sur la "seule valeur thérapeutique", mais inclue également "le critère du coût (recherche, développement, production...) aujourd'hui non pris en compte""Il n'est pas acceptable que les laboratoires obtiennent des prix et des marges exorbitants pour leurs molécules innovantes, et ce sans rapport réel avec les coûts réels qu'ils supportent", estime-t-il.

Contre une approche spéculative de la santé

L'organisation accuse l'industrie du médicament d'avoir "progressivement privilégié une approche hautement spéculative de la santé (...) aux dépens des malades et de la santé publique". Or, selon le Ciss, "l'Assurance maladie, solidaire, n'a pas vocation à générer, encore moins sans transparence, des rentes financières élevées au profit des firmes pharmaceutiques".

"Après deux années historiques de recul en 2012 et 2013, les dépenses de médicaments en valeur sont reparties à la hausse en 2014", précise le Ciss qui lie cette rupture à l'apparition du Solvadi, un médicament contre l'hépatite C vendu par le laboratoire américain Gilead. En France, la boîte de 28 comprimés équivalant à un traitement pour 12 semaines a été négociée à 41.000 euros (hors remise), rappelle-t-il. "L'objectif est d'éradiquer l'hépatite C dans les dix ans. Le coût à terme pour la collectivité sera donc de zéro", a réagi auprès de l'AFP le laboratoire Gilead, qui rappelle que le taux de guérison en "vie réelle est de 95%".

Seul 7% des médicament testés arrive sur le marché

"Le médicament est issu d'un processus long (...) dont la mise au point est en moyenne de 11,5 ans", souligne de son côté le représentant des entreprises du médicament (Leem). Le processus est également "risqué", poursuit le Leem, qui rappelle que seulement "7% des médicaments testés en phase I arriveront sur le marché" et que seuls quelques-uns, présentant une véritable innovation thérapeutique de "rupture", "pourront prétendre à des prix élevés". L'accès aux médicaments innovants doit susciter "des engagements forts, au plus haute niveau de l'État", insiste le Ciss qui appelle les candidats à la présidentielle à se positionner "clairement" sur le sujet, soulignant que "l'équilibre" du système de santé est en jeu.

Le 25 mai 2016, la ministre de la Santé, Marisol Touraine, avait annoncé que toutes les personnes atteintes du virus de l'hépatite C allaient bénéficier des traitements innovants jusqu'alors réservés aux malades les plus graves en raison de leur coût. Lundi 20 juin 2016, Médecins du Monde a également dénoncé dans une campagne très virulente les prix "révoltants" des médicaments pour soigner notamment le cancer et l'hépatite C.