Exemption, sanction, remboursement : comment va se passer le passage de 3 à 11 vaccins obligatoires ?

par Julie BERNICHAN
Publié le 6 juillet 2017 à 19h50, mis à jour le 11 juillet 2017 à 10h05

Source : Sujet JT LCI

DÉCRYPTAGE – Alors que la loi rendant obligatoire 11 vaccins pour les enfants de moins de deux ans est prévue pour le début de l’année 2018, la ministre de la Santé, Agnès Buzyn en a dit un peu plus sur la mise en œuvre de cette mesure. LCI fait le point sur ce qui va changer et a demandé l'avis d'un médecin.

La révolution de la vaccination est en marche. Agnès Buzyn a confirmé, jeudi 6 juillet : dès 2018, que les enfants de moins de deux ans devront être vaccinés contre l’ haemophilus influenzae B (à l’origine de pneumopathies et de méningites), la coqueluche, l’hépatite B, la rougeole, les oreillons, la rubéole, le méningocoque C, et le pneumocoque, en plus des trois déjà obligatoires : la diphtérie, le tétanos, la poliomyélite (DTP). 

L’intention est là : "Je souhaite que cette vaccination obligatoire rassure les Français. Je pense aux familles, aux parents dont les enfants sont décédés parce que les vaccins n’ont pas été faits, (parce que) les rappels n’ont pas été faits soit par négligence, soit par défiance", a indiqué la ministre de la santé au micro de RTL ce jeudi. Mais pas la forme, selon le Dr Jean-Paul-Hamon, médecin généraliste et président de la Fédération des Médecins de France : "Rendre les vaccins obligatoires donne plus de voix aux anti-vaccins, qui remettent en cause leur efficacité", explique-t-il à LCI. Le médecin aurait préféré une campagne d’information pour convaincre les réfractaires.

L’exemption

Justement, face aux voix qui s’élèvent, Agnès Buzyn a la parade. "Nous travaillons sur une clause d’exemption, c’est-à-dire si vraiment des familles s’opposent absolument, nous essaierons de leur permettre d’éviter la vaccination", a-t-elle expliqué, toujours sur RTL. Les parents les plus réfractaires pourront ainsi refuser de faire vacciner leur progéniture. 

"On rend plus de vaccins obligatoires mais on met en place, en parallèle, un système d’exemption, s’étonne le Dr Hamon. Ce n’est pas logique." Reste à déterminer qui pourra échapper à la règle et comment mettre en place une telle dérogation d’un point de vue juridique.

Les sanctions

Jusqu’ici, ne pas faire vacciner son enfant était passible de six mois d’emprisonnement et de 3750 euros d’amende, d’après le code de la santé publique (article L3116-4). Le code pénal prévoyait également que le fait de se soustraire à ses obligations légales "au point de compromettre la santé, la sécurité, la moralité ou l’éducation de son enfant" pouvait valoir jusqu’à deux ans d’emprisonnement et 30.000 euros d’amende. Les condamnations sont rares mais un couple d’Auxerrois avait tout de même été condamné à faire 2 mois de prison avec sursis en janvier 2016.

Pourtant, Agnès Buzyn affirme ne pas vouloir sanctionner les parents réfractaires. "Nous allons réfléchir aux sanctions mais ce n’est pas, à mon avis, la meilleure façon d’avancer", a-t-elle déclaré avant d’ajouter : "L’objectif n’est pas de mettre des amendes (comme en Allamagne), l’objectif c’est de faire de la pédagogie". 

Cependant, "aucune campagne d’information n’est à l’ordre du jour", déplore le Dr Hamon qui explique devoir redoubler d’arguments avec certains de ses patients méfiants vis-à-vis de la sécurité des vaccins. "Il est important de faire comprendre aux Français que les réactions sont exceptionnelles et que le vaccin permet de se protéger soi-même, en plus de son entourage", souligne le président de la Fédération des Médecins de France .

Un remboursement à 100%

La ministre de la Santé a prévu un argument de poids pour encourager la vaccination : le remboursement intégral. Il est donc envisagé que l’Assurance maladie prenne en charge 65% du prix du vaccin et que les mutuelles complètent, pour qu’aucun reste à charge ne pèse sur les familles. 

Le gouvernement devrait ainsi investir 10 à 20 millions d’euros, "une petite somme par rapport aux maladies évitées", souligne la ministre. Des négociations sont d’ailleurs prévues avec les laboratoires pour diminuer le prix de base des vaccins. Une décision saluée par le Dr Hamon, qui espère cependant que l'industrie pharmaceutique en produira suffisamment pour éviter les pénuries de vaccins. "Il peut être compliqué de trouver les vaccins DTP seuls en pharmacie alors qu’il sont pourtant obligatoires", conclut-il. 


Julie BERNICHAN

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