Transformer sa voiture en véhicule électrique pour 5000 €, ce sera bientôt possible

Transition One, une start-up installée près d’Orléans, va bientôt permettre à quiconque de transformer son véhicule à moteur thermique en voiture zéro émission. Explications.

    Votre moteur essence est sur le point de rendre l'âme? Ou vous craigniez une interdiction à venir de votre diesel en centre-ville? La start-up orléanaise Transition One propose une solution : donner une seconde vie à votre voiture en la transformant… en modèle électrique! « Nous sommes pour le moment encore à l'état expérimental, prévient Aymeric Libeau, le fondateur. Mais nous devrions être en capacité de lancer 200 précommandes avant la fin de l'année. »

    L'équipe de Transition One se fait pour le moment la main sur les premiers modèles qui bénéficieront de ce « rétrofitage » - le nom donné à la conversion du thermique en électrique -, dans un atelier qui tient effectivement à la fois du laboratoire et du garage automobile à l'ancienne, à Argent-sur-Sauldre (Cher), tout près d'Orléans.

    Renault Twingo, Peugeot 107, Citröen C1…

    Une Renault Twingo deuxième génération, équipée d'un moteur de 50 kilowatts (kW), soit l'équivalent d'un moteur thermique de 68 chevaux, sert déjà de « démonstrateur ». Dans un coin, une Fiat 500 fait aussi sa mue. Son moteur essence, 185 000 km au compteur, trône d'ailleurs déjà à côté de la voiture, capot grand ouvert.

    Le réservoir, désormais inutile, a lui aussi été « déposé ». Sur une table, le tout nouveau moteur, électrique donc, bien plus compact, attend d'être installé. Juste à côté, trois batteries fourniront les électrons nécessaires. Un boîtier électronique, le « contrôleur », servira d'intermédiaire avec la pédale d'accélérateur pour piloter le tout.

    Aymeric Libeau, fondateur de Transition-One, start-up française qui pratique le rétro-fit./LP/Sarah Andersen
    Aymeric Libeau, fondateur de Transition-One, start-up française qui pratique le rétro-fit./LP/Sarah Andersen Erwan Benezet, envoyé spécial à Argent-sur-Sauldre (Cher)

    « D'autres modèles seront bientôt eux aussi éligibles, précise Aymeric Libeau. D'abord, ce que l'on appelle communément des citadines de segment A, comme la Peugeot 107, la Citroën C1 ou encore la Toyota Aygo. Mais, à terme, nous souhaiterions également pouvoir travailler sur des segments B, type Renault Clio, Peugeot 206 ou Volkswagen Polo, ainsi que des utilitaires. »

    Prix de l'opération : environ 8000 euros mais avec une prime écologique de 3000 euros. Ainsi, « le coût de l'opération ne dépassera pas 5000 euros », selon Aymeric Libeau.

    Pour que le nouveau matériel, à commencer par le moteur, coïncide avec les spécificités de chaque modèle, il faudra néanmoins adapter des pièces. Pour cela, Transition One s'est adjoint l'aide d'une autre PME, MP Rezeau, spécialisée dans l'usinage de pièces mécaniques de précision, notamment dans l'automobile.

    Un tour sur les petites routes environnantes, le long de la Sauldre, à bord du prototype Twingo électrifié, permet de se faire une première idée des perspectives qu'ouvre un tel concept.

    Vitesse de pointe : 100 km/h

    Première surprise : pour des raisons pratiques, la boîte de vitesses a été conservée. Une différence de taille donc, avec les modèles électriques commercialisés. Ces derniers ne fonctionnent en effet qu'avec une seule vitesse (exception faite de la Taycan, le modèle 100 % électrique de Porsche, commercialisée fin 2019, qui devrait en comporter deux).

    La Twingo, comme ces petites sœurs à venir, se conduit donc comme sa version originelle thermique : avec embrayage et levier de vitesse. À ce titre, l'absence de bruit de moteur et de compte-tours demande un petit temps d'adaptation pour identifier le moment optimal pour changer les vitesses. En revanche, elle bénéficie d'un système de récupération d'énergie à la décélération, permettant d'économiser de l'autonomie.

    Deux modes de conduite sont disponibles : Éco et Confort. Le comportement routier quant à lui ne change pas, les anciens composants (moteur thermique et réservoir) étant remplacés par les nouveaux (moteur électrique et batteries) aux mêmes endroits, pour un poids total pratiquement identique. Côté performance, les voitures équipées en série seront dotées d'un moteur d'une puissance comprise entre 35 et 50 kW, soit entre 48 et 68 chevaux.

    « Nous testons un fournisseur américain, ainsi qu'un Belge, un Autrichien et un Slovène, précise Aymeric Libeau, en espérant pouvoir travailler de préférence avec une entreprise européenne. » Vitesse de pointe : 100 km/h ; autonomie : 100 km.

    2000 conversions l'an prochain

    Trop peu? « C'est largement suffisant pour l'utilisation que les propriétaires ont généralement avec ce type de véhicule, estime Aymeric Libeau. En ville comme à la campagne. » Selon une étude du cabinet Kantar, publiée début juillet, la distance journalière parcourue en voiture oscille entre 30 km (en agglomération parisienne) et 42 km (en territoire rural). D'où d'ailleurs le pari de l'équipementier français Valeo qui a développé une batterie 48 volts avec des performances peu ou prou similaires.

    Alors que la plupart des grands constructeurs développent des voitures électriques ultra-performantes, avec l'objectif de concurrencer directement les voitures à carburant, une autre voie semble s'ouvrir à la voiture électrique : celle de modèles plus modestes, mais donc également plus abordables, tournés vers une utilisation quotidienne.

    VIDEO. Comment transformer sa vieille Twingo en voiture électrique

    Les voitures électriques de Transition One roulent pour le moment avec un « W » sur leur plaque, les désignant comme prototypes. Mais un arrêté devrait être signé avant la fin de l'année permettant à ce type de véhicule modifié de circuler librement sur les routes. « À terme, il suffira de passer à notre usine, avec votre véhicule, ou chez un concessionnaire agréé, explique le fondateur de Transition One, Aymeric Libeau. Quatre heures plus tard, vous repartirez avec un moteur tout neuf, mais surtout zéro émission. »

    La start-up a déjà jeté son dévolu sur un espace de 10 000 m2 situé sur une zone d'activité au sud d'Orléans, où sera installée dès la fin de l'année sa future usine. Objectif : 2000 rétrofitages en 2020 ; 100 000 en moins de quatre ans.