Courriers de l’administration : l’Etat veut se débarrasser du charabia

Pour alléger le style de ses communications, le ministère de l’Action publique recueille les pires lettres administratives en promettant de les rendre plus claires.

 Vous pourrez envoyer vos pires courriers administratifs sur le site oups.gouv.fr
Vous pourrez envoyer vos pires courriers administratifs sur le site oups.gouv.fr LP/Guillaume Georges

    Ubuesque lorsqu'on en a été témoin, kafkaïen lorsqu'on en a été victime : certains courriers incompréhensibles de l'administration plongent parfois leurs destinataires dans des abîmes de perplexité . Dans le cadre du troisième Comité interministériel de la transformation publique, qui s'est tenu la semaine dernière, le ministère de l'Action publique a donc lancé un travail sur les lettres adressées par les fonctionnaires aux administrés. L 'Etat visant à être de plus en plus accessible en ligne, les courriers électroniques que vous recevez sont également concernés. Objectif : faire plus simple, plus clair, et débarrasser les missives officielles du charabia administratif. En trois mots : stop au jargon!

    Première conséquence concrète de ces bonnes résolutions, le ministère de l'Action publique affichera à partir de ce lundi soir un bandeau sur le site O ups.gouv.fr, la nouvelle plateforme du gouvernement dédiée au droit à l'erreur : « Les documents de l'administration (courriers, emails, formulaires…) sont difficiles à comprendre? Aidez-nous à les simplifier en envoyant une copie (scan, photo) à simplifions@modernisation.gouv.fr ». Les fonctionnaires s'y essaient en ce moment même, avec un courrier particulièrement opaque de la Caisse nationale d'assurance vieillesse (CNAV), qu'ils s'échinent à simplifier. Sur le document de travail que nous avons pu consulter figure les améliorations à apporter (« références dossier dans un encart saillant », « informations articulées sous forme de questions-réponses », etc.) et les défauts à faire disparaître (« manque de personnalisation », « manque de précisions », « mauvaise articulation des idées »).

    « Parmi les principaux reproches de nos concitoyens vis-à-vis de l'administration – mais aussi parmi les principales sources d'erreurs – la complexité arrive en premier, relève Gérald Darmanin, le ministre de l'Action publique. Je l'ai vécu en tant que maire lors des permanences où des administrés venaient me voir avec des piles de papiers tous plus jargonneux les uns que les autres. »

    Et la meilleure preuve que les administrés se trompent parfois – de bonne foi ! – à cause du charabia administratif, c'est le succès du site Oups.gouv.fr. Alors que le gouvernement l'a lancé le 4 juin dernier, celui-ci a déjà enregistré 200 000 connexions, dont 80 % de la part de particuliers. Parmi les thématiques les plus consultées : « Je déclare/je paie mes impôts », « Je déménage » et « Je poursuis des études supérieures » terminent sur les trois premières places du podium.

    Les syndicats aussi estiment que l'initiative « stop au jargon » va dans le bon sens. « Nous sommes favorables à tout ce qui peut éclairer l'approche des Français avec le service public et les règles administratives », se félicite Luc Farre, secrétaire général de l'Unsa-Fonction publique. Mais il met aussitôt en garde : « Le droit à l'erreur n'en reste pas moins un outil à manier avec précaution, qui doit s'exercer sans alléger les règles ou diminuer les contrôles. Oui à la compréhension, oui à la pédagogie, mais pas au laxisme. » En clair, tout ne peut pas toujours être mis sur le dos de courriers opaques…