Pourquoi les casques audio sont-ils si dangereux dans la rue ?

Les experts s’alarment des risques d’accident pour les piétons, mais aussi… pour les cyclistes et utilisateurs de trottinettes.

    Dans le bus, le train, le métro, la rue… Un quart, parfois même un tiers, des passants se déplacent en musique. Toujours plus gros, plus isolants, voire à réduction de bruit active, les nouveaux casques audio permettent d'écouter du son avec un confort d'écoute imbattable. De plus en plus de piétons les utilisent mais aussi… certains des cyclistes et des « trottinettistes », ce qui reste formellement interdit.

    Profiter d'un son immersif qui nous isole des bruits ambiants, du stress des transports et de la promiscuité reste très séduisant, mais l'utilisation de ces casques lors de nos déplacements en ville peut se solder par un accident !

    « Le bruit reste notre premier système d'alerte » rappelle Sabine Meunier, acousticienne au CNRS. « Nous sommes capables de détecter un son, et donc une information comme un crissement de frein, un bruit de moteur ou de pédale qui arrive derrière nous, ce qui est impossible avec les yeux ! ». Autre problème, les casques circum aural, qui recouvrent l'ensemble de l'oreille, nous empêchent de localiser les sons » ajoute la chercheuse.

    Malgré ces risques, on croise de plus en plus de cyclistes, utilisateurs de trottinettes, filant dans les rues, un gros casque sur les oreilles. Ils n'entendent pas les bruits de la rue, mais pas non plus les coups de klaxons, les crissements de pneu. Cela vaut aussi pour les piétons. Un journaliste du « Parisien » a même surpris dans la rue un jeune père de famille, un gros casque sur la tête, traverser la rue en jetant un coup d'œil très furtif au trafic… tout en poussant la poussette de son nouveau-né sur la chaussée.

    Nous avons tenté l'expérience dans la rue, en suivant un jeune passant, Christopher, 22 ans, dans le XVe arrondissement de Paris. Malgré des appels répétitifs, plongé dans sa musique, il ne nous a repérés que lorsqu'on s'est avancé à sa hauteur, dans son champ de vision, comme vous pouvez le découvrir dans la vidéo ci-dessous.

    Pourquoi les nouveaux casques audio sont si dangereux en ville

    La démocratisation des casques RBA

    Si la mode est aux casques circum aural, qui englobe toute l'oreille, l'arrivée sur le marché de nouveaux casques à réduction de bruit active aggrave encore davantage la situation pour les passants inattentifs, sans parler des cyclistes. À l'origine, cette technologie a été développée pour les pilotes de chasse, afin de les isoler des bruits assourdissants en vol. La marque américaine Bose a été l'une des premières à proposer ces accessoires. Son modèle QC 35, vendu au prix d'environ 250 euros, est devenu le plus populaire du marché. Sennheiser, Plantronics, JBL, JVC, Sony, Philips, Beats by Dre… Désormais tous les fabricants proposent cette technologie et de nombreux sportifs en font la pub.

    Adapter son écoute

    « Nous n'avons pas de chiffres encore sur les accidents provoqués à cause de ses casques qui nous coupent de notre environnement. Mais nous avons énormément de témoignages d'usagers qui ont frôlé la catastrophe » explique Emmanuel Renard, de l'association Prévention Sécurité Routière. « Il s'agit de faire particulièrement attention, quand on traverse, car on n'entendra pas l'arrivée d'un véhicule qui grille le feu rouge ou qui arrive trop vite ! A ce moment-là, il est impératif de se rendre plus disponible à notre environnement, en baissant le son et en ne gardant qu'une oreillette par exemple.

    De même, nous conseillons aux parents de ne pas autoriser le port du casque audio à leurs enfants de moins de douze ans, car quand on est tout jeune, on met plus de temps à saisir les informations, à comprendre comment la situation va évoluer et quelles directions le véhicule risque de prendre », poursuit le spécialiste.

    Vigilance aussi sur l'équation casque isolant + téléphone portable ! Avec ce comportement, on multiplie les risques pour soi et pour les autres.