Débat : pour ou contre l’assistance sexuelle aux personnes handicapées

Faut-il former, encadrer et légaliser les « assistants sexuels » ?

Débat : pour ou contre l’assistance sexuelle aux personnes handicapées

    Au cinéma depuis le 6 mars, The Sessions raconte l'histoire vraie d'un homme paralysé initié au sexe par une thérapeute.

    « J'encourage les gens à aller voir ce film. Il montre en quoi consiste le travail d'une assistante sexuelle », explique Marcel Nuss, pluri-handicapé de 57 ans, qui milite, notamment grâce à ses livres*, en faveur de la légalisation de ce statut.

    En Suisse, quatre femmes et six hommes, de 35 à 56 ans, exercent ce métier depuis 2009.

    Ils prodiguent à des personnes handicapées des caresses, des massages ou un acte sexuel, contre une rémunération.

    En France, la question divise. « Parler de sexualité renvoie à la morale, précise l'ex-député UMP, Jean-François Chossy, auteur d'une proposition de loi en faveur de l'assistanat sexuel, en 2011. Malgré tout, le débat est nécessaire, sans parti pris ni agressivité. Il faut trouver une solution car il y a une demande. »

    Les féministes crient au scandale. Selon Maudy Piot, du collectif Femmes pour le dire, Femmes pour agir, « cela mènerait au commerce du corps des femmes ». Pour elles, ce qui relève de l'intime n'est pas du ressort du législateur.

    En tout cas, le sujet n'est pas sur la feuille de route de Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée chargée des Personnes handicapées.

    Pour celles-ci, un nouveau droit à conquérir reste bien difficile à écrire.

    * Je veux faire l'amour : handicap, sexualité, liberté, de Marcel Nuss, éditions Autrement.

    Julia Tabath, vice-présidente de l'association nationale d'aide aux personnes handicapées Ch(s)ose*.

    Une solution offerte à des personnes en souffrance. Tout le monde doit pouvoir accéder à une vie affective et sexuelle. La sexualité est une dimension fondamentale de l'être humain.

    Pourquoi les personnes handicapées en seraient-elles privées ? Libre à chacun(e) d'y avoir, ou non, accès.

    Une activité éthiquement encadrée. Nous ne demandons pas la légalisation de la prostitution, mais une « exception » à la loi, pour éviter l'accusation de proxénétisme et de racolage.

    Car l'intermédiaire entre un assistant sexuel et une personne handicapée risquerait aujourd'hui des poursuites.

    Il faut un cadre juridique : formation, encadrement, supervision…

    Un nouveau métier, spécifique. Ce n'est pas au personnel soignant et encadrant de répondre aux besoins sexuels des personnes handicapées.

    L'activité d'assistant(e) sexuel(le), telle qu'elle existe en Europe du Nord, est assujettie à une formation, à une analyse des pratiques.

    Elle doit s'exercer en dehors des soins. Nous prônons la création de « services d'accompagnement sexuel » pour garantir un cadre d'exercice.

    *Ce nom correspond à l'idée que le Collectif handicaps et sexualités (CHS) « ose ».

    Claudine Legardinier, membre du collectif Handicap, sexualité, dignité.

    C'est une réponse marchande. Tout acte sexuel contre rémunération reste juridiquement de la prostitution.

    Les assistants sexuels n'existent que dans les pays qui l'ont légalisée. En France, elle est tolérée, s'exerce librement, mais reste illégale.

    Toute exception légitimerait le proxénétisme comme un metier. Il ne faut pas ouvrir de brèche. Ce serait terrible.

    Les femmes en paieraient le prix fort. En Suisse, 95 % des demandes sont masculines. Les femmes ont certes des besoins, mais les hommes ont davantage l'aisance de demander leur « dû ».

    Créer un métier de nature sexuelle anéantirait trente ans de lutte pour le droit des femmes.

    Autre inquiétude, comment être sûr des sentiments animant les hommes qui optent pour ce métier ? Quelles sont leurs motivations sexuelles et psychologiques ?

    La violence contre les femmes handicapées est importante. Elle s'aggraverait.

    Cela enfermerait les personnes handicapées dans un ghetto. La solution, c'est l'intégration. Il faut leur permettre d'avoir accès à une vie sociale, que les institutions facilitent les rencontres.

    Une personne handicapée cherche un compagnon, pas un cinq à sept avec un assistant sexuel.