Maison de Habsbourg

     Petite famille d'origine alsacienne parvenue à la tête d'un empire "sur lequel le soleil ne se couchait jamais", la maison des Habsbourg connut un destin remarquable, non seulement dans sa tentative de monarchie universelle, mais aussi par son caractère profondément différent de celui de la maison de France.
    C'est Habichtsburg (château de l'Epervier), dressé en Argovie, qui donne son nom à la famille. La première chance arrive avec Rodolphe dont l'élection comme "roi des Romains" (1273) termine la période du Grand Interrègne (1254-1273) consécutif à la disparition des Hohenstaufen. Nullement effrayé par les princes qui l'avaient élu, Rodolphe affirme vite ses ambitions face au roi de Bohème, Ottokar II, qui, après la défaite de Marchfeld (1278) doit céder les territoires d'Autriche, de Carinthie, de Styrie et de Carniole. Refoulée ensuite du trône impérial par une Allemagne cette fois inquiète de cette trop rapide ascension, chassée des terres natales par l'émancipation de la Suisse (1394), la famille s'installe sur la terre autrichienne et prend le nom de "Maison d'Autriche".
    En 1440, les Habsbourg reviennent sur le trône d'Allemagne avec Frédéric III, qui reconstitue à son profit un patrimoine menacé par de nombreux partages. Le contraste est grand entre ce souverain peu guerrier, d'apparence médiocre, temporisateur, chassé de Vienne par le roi de Hongrie Mathias Corvin, et sa devise : Austriae est imperare orbi universo - Il appartient à l'Autriche de régner sur tout l'univers.
    Empereur d'Allemagne de 1619 à 1637, Ferdinand II de Habsbourg, formé à l'école des Jésuites, fut un ardent propagandiste de la Contre-Réforme.
    Qu'importe si la Bohème et la Hongrie conquièrent leur indépendance, puisque Marie de Bourgogne en épousant Maximilien, fils de Frédéric "le dernier chevalier", apporte en guise de dot l'héritage bourguignon (Pays-Bas et Franche-Comté, 1477), brouillant pour longtemps l'Autriche et la France. Jeanne la Folle épouse Philippe le Beau, héritier de Maximilien, apporte à son fils Charles Quint la couronne d'Espagne avec Naples, la Sicile, la Sardaigne et l'immense empire colonial (1496). Enfin, le mariage de Ferdinand et d'Anne prépare le retour de la Bohème et de la Hongrie (1521). Bela gerant alii; tu, felix Austria, nube : que d'autres fassent la guerre; toi, heureuse Autriche, conclus des mariages.
    Mais parce qu'ils ont négligé une centralisation rigoureuse au profit d'une liberté des institutions et des coutumes dont ne se satisfont plus les nationalismes naissants, parce qu'ils sont restés fidèles à une politique de foi catholique en opposition au mouvement de la Réforme, les Habsbourg voient s'éloigner le rêve d'imperium mundi. Charles Quint, vieillard désabusé, partage son empire et se retire au monastère de San Yuste (1556). Philippe II, l'aîné, reçoit les héritages espagnol et bourguignon tandis que Ferdinand obtient l'héritage autrichien et la dignité impériale.
    Etroitement unies, les deux branches continuent le grand duel contre la France. Face à "l'ennemi héréditaire", les Bourbons, "Rois très chrétiens", après les Valois, n'hésitent pas à s'allier aux princes protestants et même aux Turcs. La guerre de Trente Ans puis celle de Succession d'Espagne, après l'extinction de la branche aînée (1700) à la suite de trop nombreux mariages consanguins, portent des coups décisifs à la puissance des Habsbourgs.
    Obligée d'accepter un Bourbon à Madrid, la Maison d'Autriche, défenseur de la Chrétienté par son titre impérial, eut plus de chance contre les Turcs qui, malgré deux sièges devant la capitale, durent céder l'Europe centrale aux ambitions de Vienne. Sans héritier mâle, Charles VI assure par la Pragmatique Sanction (1713) le principe de l'indivisibilité des Etats héréditaires et la possibilité de succession par les femmes. Cela n'empêchera pas sa fille, Marie-Thérèse, de faire face à une coalition européenne dans laquelle la France combattra "pour le roi de Prusse". Finalement, la couronne impériale reviendra à François de Lorraine, grand duc de Toscane, qui fonde la nouvelle dynastie des Habsbourg-Lorraine.
    Au siècle des Lumières, Joseph II affirme : "J'ai fait de la philosophie la législatrice de mon empire", mais en 1806 François II renonce au titre d'empereur romain pour celui d'empereur d'Autriche, avec le nom de François Ier. La fin de l'épopée napoléonienne permet aux Habsbourg de se réinstaller en Italie et dans les Balkans. François-Joseph, empereur d'Autriche et roi de Hongrie, voit son empire entrer dans la Première Guerre mondiale après le drame de Sarajevo, l'assassinat de l'archiduc François-Ferdinand. Charles Ier est contraint à l'exil (1918) et son fils, l'archiduc Otto, chef actuel de la famille, n'est plus qu'un prétendant sans trône.